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DEPARTEMENT DE GEOGRAPHIE
DEPARTMENT OF GEOGRAPHY
«ACNATURELS
2022/2023
»
6 Crédits Cours de cycle Licence Formation en CM : 40h
Licence 2 présentielle et TD/TP : 20h
semi-distance TPE : 10h
Département de Géographie
INTERVENANTS:
Dr ANABA BANIMB Robert C. ;
Dr Mabouloum Anne-Marie ;
Dr Njoya Mvu Marie ;
M. Dourkangou Yafet.
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CHAPITRE 1. Cartographie thématique:
les principes de bases
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1. Introduction
La cartographie thématique a pour objet la conception des cartes illustrant la distribution spatiale
des différents caractères ou des valeurs d'un phénomène de nature biophysique ou socio-
économique (p.ex. température moyenne à travers le Canada durant l'été, densité de population à
travers le continent Asiatique ou un pays quelconque, etc.). Ainsi, sur les cartes thématiques
l'accent est mis sur le bon usage de la symbolisation pour montrer les variations d'un phénomène
donné dans l'espace. Chaque discipline scientifique liée à l'étude des phénomènes spatiaux
(géographie, géologie, pédologie, foresterie, etc.) a ses propres règles de cartographie thématique.
Cependant au niveau de l'usage des symboles, de la couleur, du tramage, etc. Il y a certaines
règles de bon usage qui proviennent des études en sémiologie graphique et en perception
physiologique humaine. Ces règles ainsi que les différentes méthodes et techniques de
représentation des phénomènes en cartographie thématique sont examinées dans cette partie des
notes.
Note importante: Deux livres de cartographie (bibliothèque) sont proposés ici pour pouvoir compléter vos
lectures:
1) Robinson Arthur et al. "Elements of Cartography," 6th Edition, Wiley & Sons, 1995
2) Rouleau Bernard "Méthodes de la cartographie," Presses du CNRS, 1991.
Une carte thématique a deux composantes: le fond cartographique et la couche thématique (figure
1.1). La couche thématique permet de représenter à l'aide des symboles graphiques les catégories
ou les valeurs d'un phénomène géographique et leur distribution dans l'espace.
Figure 1.1: Les deux composantes d'une carte thématique: le fond cartographique
et la couche thématique
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La figure 1.2 montre les étapes de création d'une carte thématique. Chacune des ces étapes est
examinée brièvement dans les sections qui suivent.
En règle générale, les cartes thématiques sont compilées à des échelles moyennes et petites. Pour
les cartes à des échelles moyennes les feuilles topographiques sont utilisées pour la création du
fond cartographique. Pour les petites échelles, n'importe quel type de projection peut être choisi.
L'étendue et la configuration du territoire, sa localisation et les particularités du phénomène à
représenter dictent ce choix. Le dernier tableau du chapitre 3 (section 3.3) donne quelques règles
générales pour le choix d'une projection cartographique à ces échelles. Un exemple de
l'importance de l'aspect et de l'orientation de la projection est présenté à la figure
1.3. Pour les phénomènes socio-économiques, en particulier, on préfère les projections
équivalentes pour permettre la comparaison sans biais de la distribution d'un tel phénomène dans
les différentes zones de la carte. Un exemple de l'importance d'une projection équivalente est
montré à la figure 1.4.
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Figure 1.3: Représentations du même phénomène: les sources de pollution atmosphérique qui
affectent l'arctique, selon deux projections. La projection de Miller à gauche à part d'exagérer les
distances (Est-Ouest) empêche de bien percevoir la relation origine-destination pour le continent
asiatique. Meilleure représentation de tout point de vue avec une projection azimutale polaire
stéréographique.
Figure 1.4: Exemple hypothétique d'une carte thématique de la distribution de la population (carte à
points, voir chapitre 7) selon deux projections cylindriques: conforme de Mercator (A) et équivalente
de Lambert (B). L'île de Bornéo (région équatoriale) et la Scandinavie (hautes latitudes) ont presque
la même superficie. L'usage de la projection de Mercator n'est pas approprié car en exagérant la
superficie de la Scandinavie elle introduit un biais dans la bonne compréhension des variations de la
densité de population dans les deux endroits.
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Généralement, si le fond de carte provient d'une feuille topographique il y a une certaine
simplification des traits des objets présentés. La présentation de la carte thématique à petite échelle
impose aussi une généralisation souvent importante du fond cartographique. Le but de la carte
peut aussi dicter une simplification plus ou moins grande du trait comme il est montré par la figure
1.5.
Les données géographiques sont des observations, effectuées pendant une période de temps
donnée, décrivant les caractéristiques et la distribution spatiale des différents éléments
physiques, événements ou phénomènes qui ont lieu ou qui se manifestent sur ou près de la
surface terrestre.
Ouvrons une parenthèse ici. Il importe de faire la distinction entre données et informations
géographiques car souvent ces deux termes sont employés indifféremment. Les données
doivent être manipulées, traitées, analysées, recoupées avec d'autres séries des données, et
interprétées pour obtenir un renseignement. Ce renseignement, résultat des toutes ces
opérations, nous le qualifions d'information géographique. En d'autres mots les données ne
sont que des informations en état brut.
Selon la définition donnée ci-dessus, les données géographiques ont trois dimensions:
1) la localisation (où est faite notre observation),
2) l'attribut (quelle caractéristique nous avons observé et quelle est la mesure que nous
avons prise) et
3) le temps (à quel moment nous avons pris nos mesures ou pour quelle période nous
considérons que nos observations soient valides).
Quelques exemples:
- Les utilisations du sol en 1991 dans l'île de Montréal
- Le nombre de logements inoccupés par municipalité au mois d'août 1994 dans le
territoire de la communauté urbaine de Québec
- Les types de dépôt de surface en Abitibi (ici le temps ne joue pas un rôle primordial,
phénomène peu dynamique)
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La carte est un instantané d’une réalité territoriale (un document statique). La dimension temporelle,
importante en géographie (phénomènes dynamiques), est difficile à incorporer dans une carte. Quelques
solutions proposées sont illustrées à la fin de ce chapitre ainsi qu’aux chapitres 7 et 8. Ainsi en ce qui suit
seule la localisation et l’attribut seront considérés; les variations dans le temps d’un phénomène seront
ignorées.
Les attributs
Le tableau suivant montre les échelles de mesure des attributs décrivant les caractéristiques des
phénomènes géographiques.
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En fonction des échelles de mesure nous pouvons établir les suivants :
1) Les données mesurées selon les échelles nominale ou ordinale traduisent non pas des quantités
mais des états distincts d’une variable géographique : les diverses catégories.
En conséquence il peut exister entre les données qualitatives une relation :
- de différence : différentes unités lithologiques, différentes occupations des sols,
différentes ethnies, différentes croyances religieuses; etc.
- ou de ressemblance : familles des roches (sédimentaires, ignées, métamorphiques);
immigrants provenant du même continent; etc.
- ou d’ordre/hiérarchie : sévérité de l’érosion des sols; villes classées selon leur population
en villes, villages, etc.
2) Les données quantitatives quant à elles peuvent entretenir des relations :
- de proportionnalité : ceci est deux fois plus grand que l’autre
- ou d’ordre : ceci est plus grand ou plus intense que l’autre.
L'échelle de rapport est la plus riche en information car elle permet d'appliquer aux données une
grande gamme de traitements statistiques et mathématiques. Également, par un regroupement
des données on peut obtenir des nouvelles données du type d'intervalle ou ordinal. Comme il sera
question plus loin, il est important pour la cartographie de faire la distinction entre données
quantitatives absolues et données quantitatives relatives.
Les données absolues: ce sont des données observables directement utilisées sans
aucune manipulation: exemples population des villes; production hydroélectrique par
province;
Les données relatives: ce sont des données qui résument des données originales
absolues ou des données provenant d'un traitement conjoint de deux séries (ou plus) de
données absolues. Le tableau suivant présente certaines données relatives.
Très souvent en cartographie thématique pour des raisons des limitations dans la perception
visuelle des signes graphiques (tailles, teintes de grisés, couleurs, formes, etc.) nous sommes
contraints à regrouper les données quantitatives en classes distinctes. Ce regroupement est
appelé la discrétisation d’une variable quantitative. Il existe plusieurs méthodes de
discrétisation (tableau 1.1) mais leur choix est une opération délicate car la discrétisation doit
satisfaire à la fois aux exigences de la représentation cartographique et à celles des principes
statistiques. Elle doit conserver les caractéristiques essentielles présentées par les données,
perdre le moins d’information possible, mais aussi respecter les
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règles de la perception visuelle afin de transmettre une information géographique efficace et de
qualité. Le présente les divers Nous reviendrons là-dessus dans le chapitre.
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La localisation
Une donnée géographique peut être attachée dans l’espace de coordonnées utilisées à un
point, à une ligne, ou à une surface. Ce qui peut être considéré comme un point, une ligne ou
une surface est fonction de l’échelle de la carte (Figure 1.6).
Figure 1.6: Une entité surfacique (une ville) tend vers une entité ponctuelle avec la diminution de
l'échelle.
Ces points, lignes ou surfaces représentent des entités dont les limites peuvent être
matérialisées dans l’espace : l’épicentre d’un tremblement de terre, un bâtiment, une route, le
périmètre urbain, les frontières d’un état, un peuplement de conifères, une unité géologique,
etc. Nous pouvons ainsi parler des entités spatiales discrètes. Pour plusieurs types
d'inventaires des caractéristiques biophysiques du territoire, les limites des entités discrètes
sont souvent établies par interprétation visuelle ou classification automatique des images de
télédétection.
Dans certains cas les données sont prélevés à certains emplacements particuliers mais sont
considérées comme représentatifs d’une entité spatiale discrète dont ont ignore les limites
exactes. Ces limites peuvent être générées approximativement en se servant la méthode
d’interpolation dite par polygones de Tiessen (ou de Voronoi) (Figure 1.7).
En cartographie thématique nous représentons aussi des grandeurs qui varient d’un point à
l’autre dans l’espace; nous pouvons parler des entités spatiales continues (température de
surface ou de l’air près de la surface, humidité des sols d’une région agricole, etc.). Les données
sont alors rattachées à des emplacements particuliers et les valeurs de la variable géographique
dans n’importe quel autre emplacement sont générées par interpolation spatiale entre les
valeurs mesurées de la grandeur. Ce type de cartographie particulier est examiné dans le
chapitre 7 (cartes isarithmes).
Il arrive aussi que nous voulions représenter un phénomène continu mais les données ne sont
connues que par entité polygonale. C’est le cas notamment des différentes variables socio-
économiques qui pour des raisons de confidentialité sont connues par unité de recensement,
district électoral, etc.
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Figure 1.7 : Carte des limites approximatives des unités spatiales du sol ayant le même contenu
en chrome (parties par million). Les croix représentent la localisation des points
d’échantillonnage du contenu en chrome (les localisations des données).
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1.4. La symbolisation
La figuration fait référence à l’utilisation des signes graphiques élémentaires (le point, le trait, la
tache) pour construire un symbole graphique ou figuré, qui transcrit sur le plan de la carte
l’emplacement et/ou l’attribut d’une donnée géographique. On distingue les figurés ponctuels,
linéaires et zonaux. Les figurés peuvent être abstraits, expressifs ou pictographiques (Figure 1.8).
Pour exprimer les relations spécifiques qu’entretiennent les données entre elles (différence,
ressemblance, ordre, proportionnalité) les figurés représentant une variable géographique peuvent
varier en forme, taille, couleur, valeur, orientation et texture. Selon la terminologie courante la forme,
la taille, etc. constituent des variables visuelles. Ce terme a été introduit par Jacques Bertin, un
géographe français, qui est le premier à systématiser les connaissances sur la symbolisation
cartographique, entre autres, dans ses deux ouvrages considérés comme la base contemporaine
de la cartographie thématique : « Sémiologie graphique » paru en 1973 chez Gautier-Villars et «
La graphique et le traitement graphique de l’information » paru en 1977 chez Flammarion. Les
principes d’usage des signes graphiques et des variables visuelles, ou sémiologie graphique selon
Bertin, seront revus dans la section 1.4.1.
L’implantation pour sa part fait référence à la façon de placer un figuré sur la carte. L’implantation
peut se faire à un emplacement précis, le long d’un axe linéaire, ou à l’intérieure d’une surface.
Nous distinguons ainsi l’implantation ponctuelle, linéaire ou zonale. L’implantation peut coïncider
avec la localisation des données mais ceci n’est pas la règle comme nous le
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verrons par la suite. Ainsi les notions de localisation d’une donnée géographique et d’implantation d’un
figuré ne sont pas nécessairement synonymes.
L’implantation d’un figuré dans l’espace de la carte peut se faire de différentes manières :
Il ne faut cependant pas oublier que l’échelle de la carte peut imposer un mode d’implantation qui dévie
de la localisation exacte des données. En même temps la diminution d’échelle peut imposer la
généralisation des attributs. La figure 1.9 en montre deux exemples.
Puits de pétrole
Figure 1.9 : Localisation des données et implantation des figurés ne sont pas nécessairement des notions synonymes.
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1.4.1 Les variables visuelles
(Synthèse des textes de Jacques Bertin ainsi que Michèle Beguin et Denise Pumain
« La représentation des données géographiques » 2e édition, Armand Colin (2003))
Bertin décrit d’une façon laconique son système graphique comme suit (figure 1.10) : « Le
système graphique considère 8 variables visuelles qui peuvent s’appliquer à 3 implantations.
Elles possèdent 5 propriétés permettant de transcrire 3 relations entre les données »
Une image cartographique est créée en implantant à des positions particulières les différents
figurés. Ces positions constituent en soi une variable visuelle. Il existe certaines formes de cartes
thématiques où seules les positions des signes graphiques élémentaires créent l’image. Dans la
plupart des cas à ces variables de position (points, lignes, zones) nous associons une
« valeur » et parfois plusieurs des 7 autres variables visuelles (la dimension z de la figure 1.11).
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Les 8 variables visuelles ne possèdent nécessairement pas toutes les 5 propriétés. En fonction des
leurs propriétés, Bertin les divise en deux catégories : les variables de l’image et les variables de
séparation des images (figure 1.11). Dans la première catégorie nous retrouvons les variables de
position sur le plan de la carte, la taille et la valeur. Elles sont appelées ainsi car elles construisent
des plages de visibilité variable, font apparaître des formes sur un fond, suggèrent des reliefs
(hiérarchie visuelle). Le grain, la couleur (nuance), l’orientation et la forme construisent pour leur part
des plages de visibilité homogène, sans relief et ne font que séparer les éléments entre eux sans
faire apparaître des formes sur un fond. C’est le résultat de leur propriété de base : l’associativité.
D’où leur appellation, variables de séparation.
Les signes graphiques élémentaires placés sur le plan de la carte pour indiquer des emplacements
constituent en soi une variable visuelle. Ces signes graphiques créent une image pouvant transcrire
toutes les propriétés : ordre par rapport un point pris comme référence, distance, ressemblance ou
différence, regroupement, proximité, etc. Cette variable visuelle joue un rôle primordial lorsque nous
voulons indiquer par une carte une variable binaire (absence/présence) d’un phénomène (figure
1.12).
La taille
La valeur
clarté variable de la
couleur pour créer la variable visuelle valeur
Souvent le blanc est associé au plus petit ou au plus faible et le noir au plus grand ou au plus fort.
Le noir attire plus l’attention du lecteur et visuellement se trouve au plus haut d’une hiérarchie
visuelle établie instinctivement par le lecteur, suivi des diverses tonalités de gris
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(allant du gris foncé vers le gris pâle) et en dernier du blanc. Cette hiérarchie visuelle est
quelque chose d’analogue à un relief (ou une image) selon Bertin.
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Figure 1.12 : La position sur le plan des signes graphiques représentant les emplacements des données est en soi une variable visuelle de l’image
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Propriétés transcrites par la taille et la valeur
Tel que mentionné, la taille transcrit en premier lieu la proportionnalité entre les données.
Pour sa part la valeur montre l’ordre existant entre les données. Voici un exemple simple
présenté par Bertin pour signaler cette différence entre taille et valeur avec la représentation
du volume de production d’un bien quelconque en Europe (données quantitatives
absolues). Dans la figure 1.13.2 nous pouvons très facilement établir la proportionnalité en
comparant la taille du symbole. Ainsi en prenant la production du Portugal comme base
nous pouvons comprendre que la production du même bien en Italie est d’environ 9 fois
plus grande. Dans la figure 1.13.1 où l’on fait varier la valeur du figuré nous sommes
incapables de se prononcer sur la proportionnalité car le blanc ne peut servir d'unité pour
mesurer le noir. En conséquence la valeur ne peut représenter que l’ordre (la production de
l’Italie est plus forte que celle du Portugal, elle-même moins forte que celle de l’Irlande et
ainsi de suite). En conséquence la taille seule est la variable visuelle appropriée pour
représenter les données absolues. La valeur quant à elle apparaît comme Ie moyen de
représentation privilégié des taux, des densités, des indices, des mesures relatives en
général.
La variation de la taille peut être perçue également comme une relation d’ordre. Ainsi taille
et valeur peuvent transcrire des relations d’ordre entre les données. Le lecteur n'a pas
besoin de légende pour mettre en ordre des tailles ou des valeurs. Elles créent un ordre
spontané. Dans une transcription ordonnée la légende ne sert qu'à définir
« verbalement » les limites des paliers.
Par le fait même d’établir un ordre spontané, ces deux variables visuelles transcrivent aussi
des relations de différence entre les données. Elles sont dissociatives selon le jargon de
Bertin, elles ont une visibilité variable contrairement aux variables de séparation qui créent
une image de visibilité constante (elles sont associatives selon le jargon de Bertin). En
conséquence, taille et valeur dissocient toute autre variable avec laquelle elles sont
combinées.
La figure 1.14 montre des exemples de cartographie thématique en faisant varier les
variables visuelles taille et valeur pour transcrire les propriétés de proportionnalité et/ou
d’ordre.
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Figure 1.14 : Exemples d’utilisation de la taille et de la valeur
Taille et relation de proportionnalité (symbole ponctuel) Taille et relation d’ordre : la variable quantitative est transformée en variable ordinale
(symbole ponctuel)
Taille et relation de proportionnalité (symbole linéaire) Taille et relation d’ordre : la variable quantitative est transformée en variable ordinale
(symbole linéaire)
Figure 1.14 (suite)
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Les longueurs des variables visuelles taille et valeur
Les tailles
En théorie, la variable visuelle taille offre des possibilités infinies de variation (« longueur de la
variable visuelle») puisqu'il suffit de faire varier la dimension d'un segment: hauteur d'un bâton
ou d'une barre, rayon d'un cercle, côté d'un carre, hauteur d'un triangle pour obtenir une
variation de la taille du figuré. Construire des signes ou figurés linéaires d'épaisseur
proportionnelle à des quantités ou à un ordre préétabli en théorie ne pose pas non plus de
problèmes (Figure 1.15).
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Volume d’une sphère : 4R Volume d’une cube : s Volume d’un prisme : axbxh
a b
a) Variable ordinale (ex. ordre du réseau hydrographique)
b) Variable quantitative (ex. Volume du trafic par segment du réseau routier)
Figure 1.15 : La variation de la taille d’un figuré ponctuel (aire ou volume) ou linéaire
(épaisseur du trait) peut exprimer la relation de proportionnalité et d’ordre entre les
données
En pratique, les possibilités sont quand même limitées dues aux limites techniques ainsi qu’aux
limites de la perception visuelle. Comme dans toute réalisation cartographique, Ie choix de
I'échelle de proportionnalité est fonction du format de la carte, du type d'implantation des
données géographiques, du nombre d'observations prises en compte, de leur proximité
géographique et de I'encombrement qui peut en résulter :
- en premier lieu, il faut que la taille du plus petit figuré soit perceptible et identifiable (Ie cercle
minimum perceptible a un diamètre de I'ordre de 2/10 de millimètre). En principe, plus
I'étendue des quantités à représenter sera grande, plus on élargira Ie contraste des tailles de
signes ;
- en second lieu, il faut être très attentif aux contraintes du fond de carte directement liées au
format d'édition, à I'échelle, à la proximité des unités géographiques si elles sont en
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implantation ponctuelle (exemples des villes) à la disparité des formes et des surfaces si elles
sont en implantation zonale (pays, régions, départements,…).
- l'estimation de la valeur du rapport entre les quantités ainsi traduites cartographiquement est
plus ou moins précise selon que I'on fait varier la longueur, la surface ou Ie volume d'un figuré.
Les tests montrent que ce sont les différences de longueur qui sont les plus faciles à estimer,
que les erreurs augmentent dans I'appréciation des rapports de surfaces et que ces erreurs
ne font que s'amplifier pour les représentations a base de volumes.
La valeur est la variation de l'intensité de la lumière perçue par l'œil comme des teintes de gris,
allant du blanc au noir. En pratique, particulièrement lors de l'impression finale de la carte, une
variation du grain de la texture est employée pour créer cette impression des variations de la valeur.
Ainsi on répète le même élément graphique (un point, une ligne) avec une fréquence plus ou
moins grande, de sorte que le rapport entre la surface couverte par l'élément graphique et la
surface restée blanche varie. Ce rapport est exprimé en pourcentage de noir. Par exemple, une
surface blanche correspond à 0% de valeur, 50% signifie équilibre entre la quantité de noir et du
blanc, 100% signifie que l'élément graphique remplit entièrement la surface. L'utilisation de trames
à éléments constitutifs très visibles est indispensable lorsqu'il faut combiner, dans une
représentation en noir et blanc, une variation de valeur et une différenciation entre deux sous-
ensembles (par exemple, des écarts de part et d'autre d'une valeur repère : voir double
progression, figure 1.16).
C'est en implantation zonale que cette variable est la plus efficace, car une certaine surface est
nécessaire pour que I'œil apprécie et mémorise correctement Ie rapport de noir et de blanc.
Cependant, plus les surfaces sont petites et de formes contrastées, plus Ie nombre de paliers
perceptibles est restreint. En règle générale la gamme des valeurs est plus grande quand on
travaille sur un fond blanc que sur un fond coloré, car alors Ie contraste est atténué.
Contraintes particulières. Quelle que soit la trame choisie, I'utilisation du blanc pour représenter les
valeurs les plus faibles et du noir pour figurer les valeurs les plus fortes à chaque extrémité d'une
suite de paliers soulève des questions liées à I'interprétation de ces couleurs. Ainsi, le blanc est
parfois perçu soit comme une absence d'information, soit comme I'inexistence du thème étudié
dans la localisation concernée. Au contraire, Ie noir est parfois identifié à la totalité, à I'absolu. La
légende doit éviter toute ambiguïté à ce sujet. La cartographie manuelle avait souvent recours au
blanc et au noir par commodité, pour la rapidité d'exécution, cet usage tend à disparaître avec
I'utilisation des logiciels de dessin qui fournissent de larges palettes de gris bien distincts. De
grandes masses de blanc ou de noir peuvent déséquilibrer Ie rendu final de la carte. Quand Ie noir
recouvre Ie trace des limites des unités géographiques, il en rend I'identification impossible sauf à
faire apparaître ces limites sous la forme d'un filet blanc. En outre, il faut savoir que d'autres
facteurs interviennent dans la qualité du rendu final d'une variation de valeur: Ie niveau de contraste
du film d'impression; I'imprimante (elle a tendance à graisser et donc parfois a empâter les trames),
ou plus généralement la technique d'impression; Ie support d'impression (Ie papier absorbant
risque d'empâter Ie noir, Ie papier glacé peut I'empêcher de se stabiliser).
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Figure 1.16 : Différentes façons de créer des paliers visuels de valeur différente
Ces variables visuelles permettent au lecteur de la carte d’apprécier efficacement les différences
(ou les ressemblances) de nature qualitative entre les données. Elles sont : le grain, la nuance
d’une couleur, l’orientation et la forme.
Grain
Couleur (nuance)
Orientation
Forme
figuré ponctuel figuré linéaire
Figuré zonal
Habituellement ces variables sont utilisées en combinaison entre elles en introduisant aussi la taille
et/ou la valeur pour rehausser leur sélectivité (Figure 1.17).
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Figure 1.17 : Utilisation des variables de séparation en combinaison
Le grain
Le grain est obtenu par la répétition d’un élément simple (un point, un tait, une tache) et intervient
comme un figuré de surface (il remplit la surface d’un figuré ponctuel, linéaire ou surface).
L’utilisation du grain comme un substitut de la variable visuelle valeur a été expliquée plus haut.
Ici nous verrons comment nous pouvons utiliser le grain comme une variable de séparation.
Pour qu’il joue le rôle d’une variable de séparation, la variation du grain s'obtient par
agrandissement ou réduction d'une trame, elle correspond à une variation de taille de I'élément
constitutif de la trame, pour un même rapport de noir et de blanc (lequel n'est pas modifié par
la réduction ou I'agrandissement). Cette façon d’opérer est cependant délicate car il est difficile
d'en maîtriser la perception à valeur égale (rapport de noir et de blanc). Ainsi une trame à gros
grains apparaît plus noire qu'une trame plus couvrante qui sera perçue plus grise (Figure 1.18).
Pour cette raison on préfère garder la taille de l’élément constitutif constant et modifier son
orientation.
Le grain a une propriété remarquable particulièrement utile lorsque nous avons superposition à un
même lieu de plusieurs caractères d’une variable nominale quelconque comme il est montré par la
figure 1.19.
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Figure 1.19 Transparence du grain pouvant faciliter la
superposition au même emplacement d’informations
diverses.
La couleur
La couleur peut être naturelle (couleurs spectrales) et elle est fonction de la longueur d'onde du
rayonnement électromagnétique dans le visible ou elle peut être artificielle (pigments de peinture).
Une couleur artificielle peut ne pas exister comme couleur naturelle. En cartographie la couleur est
un moyen de communication très puissant, mais son utilisation demande une grande expérience.
En effet la juxtaposition des couleurs incompatibles peut créer des effets visuels inattendus. Les
deux livres de référence présentent un bon aperçu de l'usage de la couleur.
Généralement, les variations de nuance sont utilisées pour montrer des différences des données
nominales tandis que la valeur et/ou la saturation pour montrer des variations des données
quantitatives. Parfois nous pouvons employer les couleurs spectrales en respectant l'ordre de la
plus petite longueur d'onde (violet) à la plus grande longueur d'onde (rouge) pour montrer des
différences quantitatives. La figure 1.20 montre deux exemples de où des dimensions différentes de
la couleur sont utilisées en implantation ponctuelle (combinées éventuellement avec d’autres
variables visuelles comme la forme) pour montrer des données qualitatives ou quantitatives.
Nuance de la couleur (même valeur) pour montrer Valeur de la couleur pour montrer des variables
des variables qualitatives quantitatives
Figure 1.20 : Utilisation des dimensions de la couleur en cartographie thématique
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L'orientation
L'orientation est définie par l'angle que fait un figuré linéaire avec la verticale. L'œil perçoit
facilement les changements d'orientation. L'orientation s'applique à des figurés ponctuels
allongés (la base doit être au plus égale au tiers de la hauteur) ainsi qu’à des figures linéaires
et zonaux (trames).
La longueur de cette variable est limitée en général à quatre directions: verticale, horizontale et
deux obliques à 45° (figure 1.21). Aucune de ces orientations n'est privilégiée, il n'y a donc
aucun classement possible à partir de l'orientation. Cette variable est donc uniquement
différenciatrice et elle est utilisée pour représenter les modalités de caractères qualitatifs. Elle
est également utilisée pour montrer une direction de manifestation préférentielle d'un phénomène.
À un autre niveau, l'orientation des éléments linéaires d'une texture peut être utilisée pour montrer
de différences qualitatives.
Implantation ponctuelle
Implantation linéaire
Figure 1.21 : Exemples d’utilisation de la variable orientation
La forme
La forme est avec les variables visuelles taille et couleur, celle que I'on identifie Ie plus
facilement. La forme d'un élément graphique est définie par les contours de cet élément. On
peut donc concevoir qu'il existe une infinité de formes (figure 1.22) :
- géométriques : cercles, carrés, triangles, losanges, rectangles, etc.
- symboliques : Ie symbole ou pictogramme, peut être évocateur, c'est-à-dire que son seul
aspect suffit à évoquer Ie phénomène représente (par ex. un avion pour un aéroport, un bateau
pour un chantier naval ou une bobine pour une industrie textile …), ou figuratif, c'est alors un
symbole évocateur constitue par un schéma très simplifié de l'objet à représenter (par ex. un
cercle surmonté d'une croix pour une église).
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La variable forme est uniquement différenciatrice, c'est-à-dire qu'elle ne permet de transcrire
qu'une information qualitative. Les variations de forme ne peuvent être utilisées pour traduire
un ordre ou des quantités.
Sa possibilité de variation «à I'infini» permet de dire que la variable visuelle « forme » a une
«longueur» illimitée. Celle-ci reste cependant une propriété en grande partie théorique. En effet,
s'il y a un trop grand nombre de formes sur une carte, I'œil va d'abord percevoir comme
semblables les signes de même surface, de même valeur et de même couleur mais de forme
différente, avant de différencier les formes les unes des autres. Or, si la forme affectée à un
phénomène représenté n’est pas rapidement identifiée et mémorisée, un recours fréquent à
une légende trop longue décourage Ie lecteur Ie plus assidu.
Figure 1.22 Différentes façons de symboliser les attributs des entités discrètes
Pour qu'une carte s'appuyant sur la variation de forme soit efficace, il est donc nécessaire que
Ie nombre de formes employées soit limité (10 au maximum), que les formes retenues offrent
une forte capacité de séparation, c'est-à-dire que I'on puisse aisément les reconnaître et les
différencier. Pour cette raison, il faut éviter d'associer les formes géométriques classiques :
cercle, triangle, carre, que I'œil sépare mal. En revanche, comme I'a démontré J. Bertin,
I'association cercle, croix, bâtons orientés offre une plus grande efficacité en implantation
ponctuelle (Figure 1.23). La forme d’un symbole ponctuel abstrait est aussi utilisée comme un
élément graphique dans la conception des symboles linéaires ou zonaux nous permettant ainsi de
différencier les catégories d’une variable nominale qui concerne une entité spatiale linéaire ou
zonale (Figure 1.23).
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Figure 1.23 : Utilisation de la forme en différentes implantations
Les symboles évocateurs sont utilisés surtout dans les cartes d'inventaires, cartes scolaires, cartes de
la presse, dépliants touristiques, etc., car ils aident incontestablement Ie lecteur dans I'identification
rapide et la mémorisation de l'information représentée (Figure 1.24). Toutefois, même si les formes
utilisées sont évocatrices, les cartes ainsi réalisées ne répondent qu'a une seule question: «À cet endroit
précis, qu'y a-t-il ?» Elles ne permettent pas de répondre efficacement à la question: «Dans quelles
zones de la carte tels et tels phénomènes sont-ils localisés ?».
a. Cette carte représente la distribution des animaux b. Cette carte représente le même phénomène par des
dans un territoire par des symboles abstraits. La taille symbols mimétiques. Dans cet exemple l'image
du symbole varie en fonction de la taille de l'animal afin cartographique "parle" directement à son lecteur.
d’aider le lecteur de la carte à mémoriser la légende.
La forme d’un symbole ponctuel expressif peut pour sa part être introduite comme élément graphique
pour différentier les catégories d’une variable nominale qui concerne une entité spatiale zonale (les
poncifs; Figure 1.25)
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Figure 1.25 : Poncifs
Les auteurs contemporains d’ouvrages en cartographie proposent les mêmes variables visuelles
que Bertin et s’accordent sur les propriétés que chacune des variables peut transcrire sur la carte.
La seule différence notoire est concernant la variable visuelle « grain ». Ainsi tous ces auteurs
parlent plutôt de la variable « texture » d’un figuré. Certains d’entre eux proposent aussi d’autres
variables visuelles comme le « focus ». Nous allons examiner ces variables en ce qui suit.
La texture et le motif
La texture et le motif sont créés par la répétition et l'arrangement des éléments graphiques de base
(point, ligne) et ils sont utilisés soit pour remplir la surface d'un symbole ponctuel ou linéaire ou pour
remplir la surface à l'intérieur d'un contour qui a une signification (limites des unités administratives,
limites des peuplements forestiers, etc.). Certains auteurs présentent cette combinaison
graphique comme une variable visuelle différente du grain proposé par Bertin. II serait plus juste
de considérer que c'est un cas particulier de la variable visuelle forme, puisque son élaboration
repose essentiellement sur Ie choix d'une forme, que l'on répète de façon à couvrir une surface.
On appelle texture la forme attribuée à I'élément graphique constitutif de base (on parle de
texture-point, de texture-trait) et motif (ou pattern ou structure) Ie mode de répartition et de
disposition de ces éléments. Ces figurés où une forme est répétée sont appelés de manière
courante des «trames ». On distingue des éléments graphiques de forme simple (point, trait),
des éléments graphiques aux formes plus complexes, souvent évocatrices ou symboliques, qui
portent Ie nom de poncifs.
Quand les éléments constitutifs de la trame sont repartis selon des périodes identiques, on
dit que la structure est régulière (structure parallèle, en quinconce, croisée), quand ils sont
repartis sans ordre apparent, la structure est dite irrégulière (ex. trame bois).
Le focus
Il est une variable visuelle surtout utilisée pour montrer l'atténuation graduelle de l’intensité d'un
phénomène avec la distance d’un point quelconque (Figure 1.27). Dans un autre ordre d'idée, il
peut être utilisé pour montrer l'incertitude quant à la catégorie d'un phénomène au fur et à mesure
que l'on s'éloigne d'un site d'échantillonnage.
1.5. Résumé
Le tableau suivant résume les principes énoncés dans la section 1.4 concernant l’usage des
symboles et des variables visuelles.
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1.6. L’habillage de la carte
Le tableau suivant résume les éléments qui doivent servir à la création de la maquette de la
carte (Figure 1.2), une fois la couche thématique implantée sur la carte de fond.
Échelle Absolument nécessaire pour les cartes montrant une portion de la Terre afin de
donner au lecteur le sens des dimensions et des distances. Dans le cas des cartes
montrant le globe nous pouvons l’omettre.
L’échelle graphique est préférable
Crédits Absolument nécessaire. On inclut la source de données, les questions du
copyright, le nom de celui qui a produit la carte, des dates, et si nécessaire
d'autres explications ou notes.
Bordures et cadre de Utilisation pour délimiter la carte et aussi pouvoir trouver une référence
référence cartographique
Toponymie et autres Fournissent une information clé et orientent le lecteur de la carte
textes
La flèche pour le Nord Fournit une information clé pour orienter la carte. Pas nécessaire pour les cartes
montrant le globe terrestre.
Un élément crucial dans la confection d’une bonne carte est la disposition des tous ces éléments
sur la surface disponible de la carte. La figure 1.28 présente des exemples avec la disposition
proéminente du titre de la carte et bien évidemment du dessin. La légende et les autres éléments
doivent apparaître en second plan avec une police plus petite que le titre et leur position ne doit
pas déranger la visibilité du dessin.
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À l’intérieur du dessin nous pouvons aussi créer une hiérarchie visuelle pour rehausser
le contraste entre les éléments (hiérarchie visuelle).
Image sans relief Mettre les masses terrestres en avant- Créer une hiérarchie en avant-plan en
plan épaississant les traits représentant les
frontières entre pays
Figure 1.27 : Création d’une hiérarchie visuelle à l’intérieur du dessin
Deux autres éléments importants aussi dans la présentation des cartes thématiques sont le centre
visuel ainsi que les dimensions de la carte. Comme il est montré dans la figure 1.28 le dessin ne
doit pas être centrée par rapport au centre géométrique de la surface du dessin mais légèrement
plus haut là où se trouve le centre visuel. Également selon des études une surface rectangulaire
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d’une carte doit avoir un rapport de 3 : 5 (entre hauteur et gelarur; voir aussi figure 1.26) pour qu’il
soit stable et plaisant à regarder.
Figure 1.28 : Éléments importants pour la présentation d’une carte bien structurée et plaisant à regarder.
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