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UNIVERSITÉ D’ÉTAT D’HAÏTI

CAMPUS HENRY CHRISTOPHE DE LIMONADE


Institut Supérieur de l’Environnement et de l’Aménagement du Territoire

La surpêche des concombres de mer et des poissons-perroquets : une


menace socio-écologique majeure dans la baie de Caracol

Mémoire réalisé par Jeff GEORGES pour l’obtention du grade de Licencié en


Géographie, Environnement et Aménagement du Territoire

Directrice : Enseignante-Chercheure Jusline RODNÉ - JEANTY

Juin 2021
La surpêche des concombres de mer et des poissons-perroquets : une
menace socio-écologique majeure dans la baie de Caracol
i

REMERCIEMENTS
Au terme de ce modeste Travail de Fin d’Études, c’est avec un sentiment
d’honnêteté que nous adressons d’abord, nos plus humbles remerciements à l’endroit de
la Directrice du Mémoire, la Professeure Jusline RODNÉ-JEANTY pour toutes ces
remarques, pour son engagement, sa disponibilité, sa rigueur et ses encouragements depuis
le début jusqu'à la rédaction finale de ce travail. Qu’elle trouve ici l’expression de notre
profonde gratitude.

Ensuite, nous adressons nos sincères remerciements aux trois (3) Membres du
Conseil de Gestion du Campus Henry Christophe de Limonade, soient le Président Hérissé
GUIRAND et les deux Vice-Présidents : Pierre Maxwell BELLEFLEUR et Claudel
NOËL, pour les réalisations effectuées à la tête du CHC-UEH-L. Une fois de plus, nos
remerciements à Claudel NOËL de la Direction des Affaires Académiques, car il n’est
jamais fatigué dans son travail. Il est toujours disponible et il prend à cœur ses
responsabilités. D’ailleurs, on doit reconnaître que c’est lui qui nous a permis de participer
au Projet d’Échange des Équipements de Pêche.

Nous exprimons aussi notre gratitude à l’égard de l’ancien Responsable de la


filière Géographie, Environnement et Aménagement du Territoire (ISEAT), Monsieur
Bazelais DULIENCE pour son engagement.

Aussi, nous ne saurons oublier une institution comme la Fondasyon Konesans ak


Libète (FOKAL) qui a financé en partie cette recherche et toutes les personnes qui ont
contribué d’une manière ou d’une autre afin que cette étude soit une réalité : Caroline
BISSADA (Consultante à The Nature Conservancy et USAID), Dr. Gregor HOGSON
(Fondateur de Reef Check), Jhonny PIERRE, Jovenel JEADOR, Sandelyne GEORGES,
Hyppolite GERALD, Jeef GONEL, Jean-Elie FRANÇOIS, Jackson PIERRE (Pêcheur de
Caracol), Joseph LOUINAUD, Marckely PHILEMOND et Taloute MARIE-RENÉE.

Enfin, une fois de plus nous adressons gratitudes à nos parents : Monsieur
Job GEORGES et Madame Lucienne OBAS pour tous les efforts consentis pour notre
instruction depuis la maternelle jusqu'à l’Université.
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RÉSUMÉ
À travers le monde, l’industrie florissante de la pêche emploie plusieurs millions
de personnes et fournit la nourriture à des billions d’êtres humains. En Haïti, par exemple,
le secteur de la pêche constitue une activité socio-économique ayant une place importante
dans l’économie nationale pour les populations côtières comme c’est le cas de la commune
de Caracol, où la pêche maritime artisanale représente l’un des secteurs clés de l’économie
locale. Toutefois, un phénomène majeur appelé : surpêche risque de détériorer les stocks
de ressources halieutiques. Du coup, l’objectif de ce travail de recherche consiste à
montrer dans quelle mesure la surpêche a des effets bioécologiques néfastes sur les
poissons-perroquets et les concombres de mer, qui sont des espèces épuratrices pour le
milieu marin. À travers une méthodologie mixte (quantitative et qualitative) et
transdisciplinaire comprenant le montage d’une base de données biométriques, des
observations in situ, des focus groupes et des entretiens semi-directifs avec des pêcheurs
et d’autres acteurs locaux, les méfaits de cette pêche incontrôlée ont été constatés et
discutés en profondeurs.

D’après les données biométriques collectées sur les scaridés et les holothuries, la
surpêche constitue une menace socio-écologique, pourvu que cela entraine: la capture
d’espèces de taille immature à 88% chez les scaridés et 80% chez les holothuries ; la
réduction du potentiel de reproduction des espèces ; un faible taux de biomasse inférieure
à la moyenne (350g pour un holothurie et 270 à 300g pour un scaridé) ; la faible Capture
Par Unité d’Effort (moins de 0.30 kg) ; l’utilisation des engins de pêche illégale (sennes
et nasses de petites mailles) ; l’eutrophisation des récifs coralliens par les macroalgues, dû
à la diminution des poissons-perroquets qui sont les ingénieurs de l’écosystème récifal.
Toutes ces caractéristiques sont liées également à la précarité sociale et économique des
pêcheurs qui sans en rendent compte menacent leur moyen de survie. En termes de
perspectives et en se basant sur les principes de l’approche écosystémiques des pêches
nous suggérons aux autorités et autres acteurs compétents du secteur de mettre en place
un plan de gestion de la pêche afin de garantir une meilleure exploitation des ressources
halieutiques de la Baie de Caracol.

Mots-clés : Récifs Coralliens, Pêche Artisanale, Stock, Ressources Halieutiques, Poisson-


Perroquet, Concombres de Mer, Surpêche, Précarité Sociale, Approche Ecosystémique
des Pêches et Cogestion des Pêcheries.
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ABSTRACT
Throughout the world, the thriving fishing industry employs several million people
and provides food for trillions of human beings. In Haiti, for example, the fishing sector
is a socio-economic activity that has an important place in the national economy for
coastal populations, as is the case in the municipality of Caracol, where artisanal maritime
fishing represents one of the key sectors of the local economy. However, a major
phenomenon called: overfishing is likely to deteriorate the stocks of fishery resources.
Therefore, the objective of this research work is to show to what extent overfishing has
adverse bioecological effects on parrotfish and sea cucumbers, which are purifying species
for the marine environment. Through a mixed methodology (quantitative and qualitative)
and transdisciplinary including the assembly of a biometric database, in situ observations,
focus groups and semi-directive interviews with fishermen and other local actors, the
harms of this uncontrolled fishing were observed and discussed in depth.

According to the biometric data collected on parrotfish and sea cucumbers,


overfishing constitutes a socio-ecological threat, provided that it leads to: the capture of
species of immature size at 88% in the case of scarids and 80% in the case of sea
cucumbers; the reduction of the reproductive potential of the species; a low rate of biomass
below the average (350g for a sea cucumber and 270 to 300g for a parrotfish); the low
Catch Per Unit Effort (less than 0. 30 kg); the use of illegal fishing gears (seines and small
mesh traps); the eutrophication of coral reefs by macroalgae, due to the decrease of
parrotfish which are the engineers of the reef ecosystem. All these characteristics are also
linked to the social and economic precariousness of the fishermen who, without realizing
it, threaten their means of survival. In terms of perspectives and based on the principles of
the ecosystem approach to fisheries, we suggest to the authorities and other competent
actors of the sector to implement a fisheries management plan in order to guarantee a
better exploitation of the fisheries resources of Caracol Bay.

Keywords: Coral Reefs, Artisanal Fishing, Stock, Fishery Resources, Parrotfish, Sea
Cucumbers, Overfishing, Social Precariousness, Ecosystem Approach to Fisheries and
Fisheries co-management.
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TABLE DES MATIÈRES


REMERCIEMENTS .......................................................................................................i
RÉSUMÉ ....................................................................................................................... ii
ABSTRACT ................................................................................................................. iii
TABLE DES MATIÈRES.............................................................................................iv
LISTE DES TABLEAUX ET DES GRAPHIQUES ....................................................ix
LISTE DES FIGURES ................................................................................................... x
LISTE DES SIGLES, ACRONYMES ET DES ABRÉVIATIONS ........................... xii
LISTE DES ANNEXES ..............................................................................................xiv

CHAPITRE I : INTRODUCTION GÉNÉRALE ......................................................... 1


1.1. Mise en contexte de l’étude ................................................................................. 1
1.2. Justification de recherche .................................................................................... 2
1.3. Problématique de recherche ................................................................................ 3
1.4. Question de recherche ......................................................................................... 7
1.4.1. Questions optionnelles ................................................................................. 7
1.5. Hypothèse fondamentale ..................................................................................... 7
1.6. Objectifs .............................................................................................................. 7
1.6.1. Objectifs opérationnels................................................................................. 7
1.7. Organisation du travail ........................................................................................ 8

CHAPITRE II : REVUE DE LITTERATURE ............................................................ 9


2.1. Introduction ......................................................................................................... 9
2.2. Considération théorique et conceptuelle sur les notions clés ............................ 10
2.1.1. La notion de ressource ............................................................................... 10
2.1.2. Différentes approches sur la notion de ressources naturelles..................... 11
2.1.3. Définition sur la notion de ressources halieutiques et la pêche artisanale . 13
2.2.1.1. La notion de ressources halieutiques .................................................. 13
2.2.1.2. La pêche .............................................................................................. 13
2.2.1.3. La pêche artisanale.............................................................................. 13
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2.3. Stratégies d’exploitation et de gestion des ressources halieutiques .................. 14


2.3.1. L’approche néoclassique sur les ressources halieutiques........................... 14
2.3.2. L’approche écosystémique des pêches....................................................... 16
2.4. L’exploitation des ressources halieutiques en Haïti .......................................... 18
2.4.1. Situation géographique et environnementale du littoral d’Haïti ................ 18
2.4.2. Services écosystémiques des écosystèmes côtiers du littoral d’Haïti ........ 19
2.4.3. Profil de la pêche artisanale côtière en Haïti .............................................. 20
2.4.3.1. Les pêcheurs artisanaux dans la société haïtienne .............................. 20
2.4.3.2. Les différents types d’embarcation de pêche ...................................... 22
2.4.3.3. Les techniques de pêche côtière et infralittorale ................................. 27
2.4.4. Potentialités socio-économiques du secteur de la pêche maritime ........... 27
2.4.5. Problématique de la dégradation des ressources halieutiques en Haïti ...... 29
2.5. Considérations critiques .................................................................................... 30

CHAPITRE III : PRÉSENTATION DE LA ZONE D’ÉTUDE ET DU CADRE


MÉTHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE ......................................................... 31
3.1. Présentation de la zone d’étude ......................................................................... 31
3.1.1. Localisation et délimitation du milieu d’étude........................................... 31
3.1.2. Caractéristiques du domaine terrestre et côtier .......................................... 32
3.1.2.1. Description géomorphologique, hydrogéologique et occupation du sol.33
3.1.2.1.1. Topographie ..................................................................................... 33
3.1.2.1.2. Géologie ........................................................................................... 33
3.1.2.1.3. Hydrogéologie .................................................................................. 33
3.1.2.1.4. Occupation de sol ............................................................................. 34
3.1.2.2. Couverture végétale des zones de l’arrière-littorale ........................... 35
3.1.2.2.1. Zone d’agroforesterie ....................................................................... 35
3.1.2.2.2. Zone agricole de cultures mixtes ou associées................................. 35
3.1.2.2.3. Zone de savanes semi-aride ............................................................. 35
3.1.3. Caractéristiques écologiques de la baie de Caracol ................................... 37
3.1.3.1. Les récifs coralliens ............................................................................ 38
3.1.3.2. L’écosystème de mangroves ............................................................... 39
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3.1.3.3. Les herbiers marins ............................................................................. 41


3.1.4. Caractéristiques démographiques et socio-économiques ........................... 42
3.1.5. Les principales activités socio-économiques ............................................. 44
3.1.5.1. L’agriculture et l’élevage .................................................................... 44
3.1.5.2. Le commerce....................................................................................... 45
3.1.5.3. Les marais salants ............................................................................... 45

3.2. Méthodologie de collecte des données empiriques ........................................... 46


3.2.1. Brève présentation du projet GSPP et sa méthodologie............................. 47
2.1.1.1. Contexte du Projet d’Échange des Équipements de Pêche ................. 47
2.1.1.2. Méthodologie de mise en œuvre du GSPP ......................................... 47
2.1.1.3. Protocole de collecte des données biométriques du GSPP ................. 48
3.2.2. Population ciblée ........................................................................................ 49
3.2.3. Recherche bibliographique......................................................................... 49
3.2.4. Techniques d’enquête de recherche ........................................................... 49
3.2.4.1. Observation participante ..................................................................... 49
3.2.4.2. Focus groupe ....................................................................................... 49
3.2.4.3. Enquête par entretiens semi-directifs .................................................. 50
3.2.5. Instruments de collecte des données empiriques ....................................... 50
3.2.6. Description des matériels de collecte des données biométriques............... 51
3.2.7. Traitement et analyse des données ............................................................. 51

CHAPITRE IV : ANALYSE DES IMPACTS DE LA SURPÊCHE SUR LES


CONCOMBRES DE MER ET LES POISSONS-PERROQUETS ........................... 52
4.1. Introduction ....................................................................................................... 52
4.2. Situation de la pêche artisanale dans la baie de Caracol ................................... 53
4.2.1. La pêche à la senne .................................................................................... 53
4.2.2. Pêche aux filets .......................................................................................... 55
4.2.3. Pêche aux nasses ........................................................................................ 56
4.2.4. Pêche à la ligne........................................................................................... 57
4.2.5. Pêche en apnée et plongée sous-marine ..................................................... 59
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4.3. Regard sur le contexte d’exploitation des espèces marines étudiées ................ 60
4.3.1. Le cas des concombres de mer ................................................................... 60
4.3.1.1. Technique de pêche utilisée pour pêcher les holothuries ................... 62
4.3.1.2. Étapes de préparation .......................................................................... 62
4.3.2. Le cas des poissons-perroquets .................................................................. 67
4.3.2.1. Technique de pêche courante pour capturer les scaridés .................... 69
4.3.2.2. Processus de commercialisation ......................................................... 69
4.4. Impacts de la surpêche sur les scaridés et les holothuries ................................. 71
4.4.1. Capture d’espèces de taille immature ........................................................ 71
4.4.1.1. Cas des poissons-perroquets…………………………….......……….71
4.4.1.2. Cas des concombres de mer ................................................................ 73
4.4.2. Réduction du potentiel de reproduction des espèces.................................. 75
4.4.3. Déclin d’abondance (faible pourcentage de biomasse) .............................. 75
4.4.4. L’exportation des concombres de mer ....................................................... 77
4.4.5. Dégradation du récif corallien .................................................................... 80
4.4.6. Exploitation abusive des palétuviers .......................................................... 81
4.5. Considérations ................................................................................................... 81

CHAPITRE V : ANALYSE DES IMPACTS SOCIO-ÉCONOMIQUES DE LA


SURPÊCHE ET DISCUSSION AUTOUR DU PROJET PILOTE D’ÉCHANGE
DES ÉQUIPEMENTS DE PÊCHE .............................................................................. 83
5.1. Introduction ....................................................................................................... 83
5.2. Discussion autour du Gear Swap Pilote Projet (GSPP) .................................... 83
5.2.1. Forces du GSPP ...................................................................................... 83
5.2.2. Faiblesses du GSPP ................................................................................ 86
5.3. Impacts socio-économiques de la surpêche à Caracol ...................................... 87
5.3.1. Augmentation de l’effort de pêche ............................................................. 87
5.3.2. Utilisation d’engins de pêche illégale ........................................................ 89
5.3.3. Augmentation de la précarité socio-économique des pêcheurs ............... 90
5.4. Considérations ................................................................................................... 91
CHAPITRE VI : CONCLUSION GÉNÉRALE ......................................................... 92
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6.1. Perspectives : pour une gestion durable des ressources halieutiques de la baie de
Caracol .......................................................................................................................... 93
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ..................................................................... 97
ANNEXE.................................................................................................................... 105
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LISTE DES TABLEAUX ET DES GRAPHIQUES


Tableau 3. 1 : Population totale, pourcentage de 18 ans et plus en 2009, 2012 et en 2015.42
Tableau 3. 2 : Ménages et densité en 2009, 2012 et 2015…………………………………..43
Graphique 4. 1 : Dimension de la taille moyenne des poissons-perroquets inventoriés……72
Graphique 4. 2 : Variation de la taille des concombres de mer inventoriés en Juillet 201973
Graphique 4. 3 : Dimension de la taille moyenne des concombres de mer inventoriés……74
Graphique 4. 4 : Variation de la taille des concombres de mer inventoriés en Août 2019….74
Graphique 4. 5 : Dimension de la biomasse moyenne des poissons-perroquets inventoriés76
Graphique 4. 6 : Biomasse moyenne des concombres de mer inventoriés…………………77
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LISTE DES FIGURES


Figure 2. 1 : Une pirogue sur la plage de Caracol. ........................................................... 23
Figure 2. 2 : Trois corallins amarrés dans la mangrove de la baie de Caracol ................. 24
Figure 2. 3 : Un canot en bois ou à voile amarré au bord de mer de Caracol. ................. 25
Figure 2. 4 : Chaloupe en fibre de verre dans la baie de Caracol. ................................... 26
Figure 3. 1 : Délimitation territoriales de la commune de Caracol .................................. 32
Figure 3. 2 : Carte décrivant de l’occupation de sol de Caracol en Août 2019 ............... 34
Figure 3. 3 : Zone agroforesterie dense. ........................................................................... 36
Figure 3. 4 : Savanes semi-arides. .................................................................................... 36
Figure 3. 5 : Image satellite de la baie de Caracol en Juin 2019 ...................................... 37
Figure 3. 6 : Un banc de poissons-perroquets observés dans la baie de Caracol. ............ 38
Figure 3. 7 : Récifs coralliens dégradés observés dans la baie de Caracol. ..................... 38
Figure 3. 8 : Les peuplements de palétuviers périphériques observés à Caracol. ............ 39
Figure 3. 9 : Palétuvier blanc (Cornocapus Erectus) observé dans la baie de Caracol. .. 40
Figure 3. 10 : Palétuvier gris (Laguncularia racemosa) observé dans la baie de Caracol.40
Figure 3. 11 : Lits d’herbiers à tortue (Thalassia testudinum) identifiés à Caracol. ........ 41
Figure 3. 12 : Ramassage de sel dans un marais salant par des femmes.......................... 46
Figure 4. 1 : Réparation de senne par un pêcheur sur la plage de Caracol ...................... 54
Figure 4. 2 : Des pêcheurs en train de confectionner un filet de pêche, sous l’ombre des
mangroves de la plage de Caracol. ................................................................................... 55
Figure 4. 3 : Typologie des nasses couramment utilisés dans la baie de Caracol. ........... 56
Figure 4. 4 : Typologie des lignes de pêche habituellement utilisés à Caracol. .............. 58
Figure 4. 5 : Matériels de pêche à compresseur. .............................................................. 59
Figure 4. 6 : Des spécimens matures d’Holothuria grisea (Pin Jòn ou Pin Kafe) .......... 61
Figure 4. 7 : Un spécimen juvénile d’Holothuria grisea (Pin Jòn ou Pin Kafe).............. 61
Figure 4. 8 : Un spécimen d’Holothuria mexicana (Pin Bwa Rèd) identifié à Caracol. . 61
Figure 4. 9 : Un spécimen mature d’Isostichopus badionotus (Pin Fran) ....................... 61
Figure 4. 10 : Des spécimens d’Holothuria glaberrima (Pin Kalawou) ......................... 61
Figure 4. 11 : Des concombres de mer fraîchement éviscérés ......................................... 63
Figure 4. 12 : Des concombres de mer conservés dans du gros sel. ................................ 64
Figure 4. 13 : Moyen de cuisson traditionnel des concombres de mer. ........................... 65
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Figure 4. 14 : Séchage de concombres de mer dans la cour d’un colporteur local . ........ 66
Figure 4. 15 : Poisson-perroquet rayé (Scarus iseri) capturé dans la baie de Caracol. .... 68
Figure 4. 16 : Poisson-perroquet à l’aile noire (Sparisoma radians) ............................... 68
Figure 4. 17 : Poisson-perroquet tacheté (Sparisoma aurofrenatum) .............................. 68
Figure 4. 18 : Poisson-perroquet tacheté (Sparisoma aurofrenatum) .............................. 68
Figure 4. 19 : Poissons-perroquets tachetés (Sparisoma aurofrenatum) ......................... 68
Figure 4. 20 : Une bourrette remplie de poissons-perroquets juvéniles. .......................... 70
Figure 4. 21 : Prise de poids des concombres de mers échantillonnés ............................ 79
Figure 4. 22 : Collecte des données biométriques sur une ardoise de perspex ................ 79
Figure 4. 23 : Suivi d’un débarquement avec mon collègue de stage. ............................. 79
Figure 4. 24 : Dimensions de la taille des poissons-perroquets sur un ichtyomètre et prise
de leur poids unitaire avec une balance numérique plate................................................. 79
Figure 4. 25 : Zones de mangroves dévastées par l’abattage dans la baie de Caracol. .... 82
Figure 4. 26 : Des sacs de charbons de bois de mangroves ............................................ 82
Figure 5. 1 : Focus Groupes avec des pêcheurs du GSPP. ............................................... 84
Figure 5. 2 : Captures provenant des nasses à grandes mailles........................................ 85
Figure 5. 3 : Vivaneaux capturés dans les nouvelles nasses du projet. ............................ 85
Figure 5. 4 : Un pêcheur montrant des mérous capturés dans les nouvelles nasses. ....... 85
Figure 5. 5 : Formation des pêcheurs sur l’utilisation des nouvelles nasses à grandes
mailles. ............................................................................................................................. 86
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LISTE DES SIGLES, ACRONYMES ET DES


ABRÉVIATIONS
AIA : American Institute of Architects

AMP : Aire Marine Protégée

ANAP : Agence Nationale des Aires Protégées

AP3B : Aire Protégée des Ressources Naturelles Gérées des 3 Baies

ASEC : Assemblées des Sections Communales

BM : Banque Mondiale

BMA : Brigadier Maritime en Action

BME : Bureau des Mines et de l’Energie

CASEC : Conseil d’Administration de la Section Communale

CATEDEL : Cellule d’Appui Technique en Développement Local

CIAT : Comité Interministériel d’Aménagement du Territoire

CITES : Convention on International Trade in Endangered Species

CMBP : Caribbean Marine Biodiversity Program


CNIGS : Centre National de l’Information Géo-Spatiale

CNUCED : Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement

FAO : Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture

FoProBiM : Fondation pour la Protection de la Biodiversité Marine

GARDEL : Groupe d'Action et de Recherche en Développement Local

GSPP : Gear Swap Pilot Projet

IFREMER : Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer


IHSI : Institut Haïtien de Statistique et d’Informatique
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INSA : Institut National des Sciences Appliquées

MARNDR : Ministère de l’Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement


Rural

MASMA : Marine and Coastal Science for Management


MdE : Ministère de l’Environnement

MPCE : Ministère de la Planification et de la Coopération Externe

OCB : Organisation Communautaire de Base

OMC : Organisation Mondiale du Commerce

ONG : Organisation Non Gouvernementale

ONU : Organisation des Nations Unies

PED : Pays En Développement

PIC : Parc Industriel de Caracol

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement

RED : Recherche Étude et Développement

TNC : The Nature Conservancy

UE : Union Européenne

UICN : Union Internationale pour la Conservation de la Nature

UNESCO : Organisation des Nations-Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture

USAI : Unité de Statistique Agricole et Informatique

USAID: United States Agency for International Development

WIOMSA: The Western Indian Ocean Marine Science


WWF: World Wildlife Fund
ZEE: Zone Economique Exclusive
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LISTE DES ANNEXES


Annexe 1 : Départ pour des observations sous-marines au niveau du récif corallien à la
pointe de Fond-Blanc. ................................................................................................... 105
Annexe 2: Six pêcheurs de sennes de Caracol qu’on a interrogés ................................ 105
Annexe 3 : Coraux à corne de cerf (Acropora palmata) dégradés par des cyclones,
observés dans la baie de Caracol. .................................................................................. 106
Annexe 4 : Coraux blanchis observés dans la baie de Caracol.2019. ........................... 106
Annexe 5 : Transect de poissons au niveau de la barrière récifale de Caracol. ............ 107
Annexe 6 : Prolifération de macroalgues au niveau du récif corallien de Caracol.. ..... 107
Annexe 7: Guide d’entretien des pêcheurs de concombres de mer et de poissons-
perroquets de la baie de Caracol ................................................................................... 108
Annexe 8: Guide d’entrevue de groupe avec les colporteurs locaux de concombres de
mer de la baie de Caracol .............................................................................................. 111
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CHAPITRE I : INTRODUCTION GÉNÉRALE

1.1. Mise en contexte de l’étude

Les ressources maritimes jouent un rôle fondamental dans le développement de


notre société. Disponibles sous forme de ressources naturelles renouvelables pour la
plupart, elles sont abritées par les océans qui occupent 70 % de la superficie terrestre et
plus de 95 % de la biosphère1. Ce faisant, il n’est pas surprenant d’observer que ces
ressources fournissent à l’homme de nombreux services écosystémiques, au point qu’elles
assurent la sécurité physique, économique et alimentaire de 60 % de la population
mondiale (UICN, 2017). Leur diversité naturelle résulte des services écosystémiques de
régulations et de fonctions que fournissent les océans, les mers et les écosystèmes côtiers
(Costanza et al., 1997). En d’autres termes, elles sont d’une grande importance pour les
générations présentes et futures.

Des études scientifiques montrent que les milieux océaniques et marins jouent un
rôle particulier dans l’équilibre de l’écosystème planétaire en fournissant 50 % à 80 % de
l’oxygène que nous consommons tout en absorbant le gaz carbonique (CO2) que nous
dégageons dans la nature (Amano et al., 2013). En ce sens, ils régulent le climat de la terre
en absorbant une partie de la chaleur qu’ils restituent, grâce aux courants marins et leurs
relations avec l’atmosphère terrestre. Ils participent aussi dans le cycle de l’eau et dans la
régulation du climat mondial en emmagasinant environ mille fois plus de chaleur que
notre atmosphère. De plus, environ 90 % de la masse carbone se trouvent sous les océans
sous forme d’organismes morts2.

Les océans et les mers sont le sanctuaire de la conservation de la biodiversité


marine, où l’on retrouve les grands mammifères marins tels que : les baleines et les
dauphins. D’après les données du World Register of Marine Species3, environ 164 774
espèces marines ont été listées dans les océans, dont 121 997, soit 74 % font l’objet d’une
validation (IFREMER, 2010). On précise que les espèces de poissons représentent plus

1
www.cbd.int/marine
2
https://www.worldoceannetwork.org/fr/cartouche-quadrie-copie/carem-wod-2014-4/ocean-important/
3
www.marinespecies.org
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de la moitié des invertébrés et ils figurent parmi les espèces les mieux documentées au
monde (Bœuf, et al., 2010). Parmi les principaux environnements côtiers qui existent, les
zones littorales sont les plus riches en biodiversité, car environ 80 % des espèces marines
y vivent, particulièrement dans les récifs coralliens (Gray, 2001). Avec une superficie
mondiale estimée à 255 000 km2 (Spalding & Grenfell, 1997), les récifs coralliens sont en
effet des points chauds de la biodiversité marine d’où plus de 25 % des espèces marines
mondiales habitent. Or, ces derniers couvrent une superficie équivalente à moins de la
moitié de la France (ONU-ENVIRONNEMENT, 2017).

Les écosystèmes côtiers et estuariens jouent un rôle essentiel également dans le


renouvellement des stocks de ressources halieutiques marines (Pape, 2005). C’est le cas,
des forêts de mangroves et des herbiers marins qui sont des niches écologiques
nourricières et de frayères pour la majorité des espèces de poissons et de crustacés. Enfin,
ils agissent aussi comme des filtres naturels qui bloquent les éléments sédimentaires
nuisibles pour la santé de la biodiversité marine, tout en protégeant nos côtes des tempêtes
et de l’érosion.

1.2. Justification de recherche

Il s’avère nécessaire de préciser que trois (3) grandes raisons nous amènent à
entamer une telle étude. Premièrement, c’est parce que nous avons eu l’opportunité de
bien assimiler les notions dispensées dans le cours de « Géographie de la Mer et du
Littoral ». Deuxièmement, suite aux différentes sorties de terrain académiques réalisées,
nous avons pu découvrir l’importance des écosystèmes côtiers et les ressources marines.
En gros, cela a développé en nous le goût pour la recherche dans ce domaine, si peu étudié
en Haïti. Et finalement, c’est parce qu’on a travaillé avec l’Organisation Non
Gouvernementale The Nature Conservancy (TNC) en tant qu’étudiant stagiaire dans le
cadre du Projet Pilote d’Échange d’Équipement de Pêche au niveau de Madras et de
Caracol, s’inscrit dans le Programme de biodiversité marine des Caraïbes (dit CMBP ou
en anglais : Caribbean Marine Biodiversity Program). Durant notre présence sur le terrain
on avait comme tâche principale de colleter et d’analyser les données biométriques des
poissons de récifs capturés par les pêcheurs du projet. C’est à partir de cette expérience
qu’on a découvert la situation précaire de la filière de pêche artisanale dans cette zone
Page |3

d’aire protégée, du coup, on a voulu appréhender la problématique de la surpêche afin de


proposer des perspectives efficaces aux décideurs.

En plus de cela, cette étude va nous permettre de répondre à une obligation


académique et professionnelle. Dans le premier cas, elle est réalisée pour avoir droit au
grade de Licencié en « Géographie, Environnement et Aménagement du Territoire ». Mais
également de continuer d’ouvrir la voie de la recherche pour un Master dans le domaine
de la biodiversité marine. Dans le second cas, elle est réalisée dans un but professionnel
afin d’attirer l’attention des collectivités locales, des institutions gouvernementales, des
organisations de la société civile, sur la situation dans laquelle se développe la filière
pêche en Haïti et plus particulièrement dans la baie de Caracol.

1.3. Problématique de recherche

Au niveau de la Caraïbe, des chercheurs de l’Institut Français de Recherche pour


l’Exploitation de la Mer (IFREMER) pensent que l'opinion la plus répandue dans les
milieux professionnels et scientifiques, est que les ressources marines sont très
intensivement exploitées, voire gravement surexploitées (Blanchet, Bobert, et Gueregat,
2002). En parallèle, d’autres scientifiques affirment que tous les types d’écosystèmes
côtiers de la Caraïbe sont gravement menacés (Spalding et Ravilious, 2004). Parmi les
principaux effets écologiques majeurs, on constate que depuis le milieu de l’année 1970
les populations coralliennes se dégradent dans la région, en affichant une diminution de
80% (Augier, 2010). Parmi les espèces menacées d’extinction il y a : Acropora
cervicornis (le corail corne de cerf) ; Acropora palmata (le corail corne d’élan) (Spalding,
Ravilious, 2001) ; et Montastraea annularis (le corail étoile massif) (Wege, Ryan et al.,
2010). En outre, les écosystèmes de mangroves de la Caraïbe connaissent une dégradation
de plus en plus accélérée, soit une réduction de 42 % durant ces 25 dernières années
(Agard et Cropper, 2007). Les herbiers marins sont aussi en pleine disparition, car
plusieurs centaines de kilomètres carrés ont été détériorées par les chalutiers. Cela a
entrainé la disparition des dizaines de milliers d’espèces marines, comme : les lamantins,
les crocodiles de mer et les tortues marins.
Page |4

Comme partout ailleurs dans l’espace caribéen, les ressources du littoral d’Haïti
subissent de nombreuses pressions anthropiques, notamment ceux de la baie de Port-au-
Prince (Desse, 2003). Ceci entraine conséquemment la dégradation chronique des
écosystèmes côtiers (Saffache, 2006). En Haïti, on assiste aussi à l’exploitation abusive
des palétuviers, environ 35 à 86 % des forêts de mangroves perdent leurs superficies
initiales avec un taux de perdition estimé entre 1 et 2 % par an4. Entre autres, 10 % des
récifs coralliens sont menacés en Haïti (Hodgson, 2014). Dans certains endroits du pays
les pêcheurs brisent les blocs de récifs coralliens pour prendre les poissons assommés et
les vendent aussi comme matériaux de construction. Certains pêcheurs utilisent aussi des
détergents chimiques, comme le chlore pour pêcher dans les récifs. Ces mauvaises
pratiques augmentent le risque de blanchiment des coraux. De plus, en raison de la
dégradation des écosystèmes côtiers du pays et de la pêche incontrôlée, de nombreuses
espèces de poissons et d’invertébrés marins ayant leurs niches écologiques dans ces
écosystèmes sont rudement exploitées (MdE, 2016).

Au niveau national on a recensé plusieurs études clés qui abordent les


problématiques de la filière pêche artisanale en Haïti. Il s’agit de celles de : Hay (1984),
(Damais et al., 2008), Breuil (2000), Célestin (2004), Favrelière (2008), Roney (2015) et
(Kramer et al., 2016). À la suite d’une synthèse des différentes opinions des auteurs, nous
constatons que la pêche maritime artisanale en Haïti est confrontée à une grave situation
de précarité depuis plusieurs décennies. Cette thèse est clairement soutenue par Roney
(2015) qui explique qu’en raison de la libre exploitation incontrôlée des ressources
halieutiques, la diminution des stocks s’épuise aux quotidiens, notamment ceux des
espèces les plus commercialisées, telles que : mérou, vivaneau, lambis, langouste, etc...
Suite à la réduction des ressources halieutiques dans les zones côtières, l’effort de pêche
est en hausse depuis 20 à 30 ans en Haïti (Roney, 2015). D’après lui, cette situation crée
par conséquent des tensions et des conflits entre les groupes de pêcheurs, soient entre
ligneurs, caseyeurs, fileyeurs, senneurs et plongeurs. À cela s’ajoute la situation de
vulnérabilité socio-économique des pêcheurs artisans.

4
https://www.ht.undp.org/content/haiti/fr/home/ourperspective/ourperspectivearticles/2014/10/29/la-
mangrove-un-atout-dans-la-lutte-contre-le-d-r-glement-climatique.html
Page |5

Parallèlement, Breuil (2000), a touché la situation de précarité socio-économique


des pêcheurs artisans haïtien en affirmant que l’une des causes serait l’individualisme des
producteurs et la faiblesse de regroupement social de ces derniers. C’est un point de vue
que nous partageons parce que certains pêcheurs sont très méfiants par rapport à leurs
compagnons, surtout dans les pêcheries où les poissons deviennent de plus en plus rares.

Damais et al., (2008) soutient que les pêcheurs manquent de moyens techniques
et de matériels pour pratiquer cette activité en haute mer, qui renferme des ressources
hauturières de grande valeur économique. De plus, l’auteur fait état d’un système de
conservation archaïque et déficient qui ne permet pas aux pêcheurs artisans de conserver
leurs fruits de mer pendant une longue durée. Par conséquent, les produits connaissent
une grande perte de valeur sur le marché.

Dans le département de la Grande Anse, Célestin (2004) évoque que le secteur de


la pêche fait face à plusieurs difficultés telles que : dégradation écologique des ressources
halieutiques ; faiblesse des institutions compétentes ; carence de professionnels qualifiés
travaillant dans le domaine ; manque de matériels et de service ; carence de recherches
scientifiques, etc... Ce sont autant d’obstacles parmi d’autres qui engendrent la précarité
sociale et économique des pêcheurs dans cette région du pays.

Au niveau de la baie de Caracol, depuis la fin du XXème siècle, Hay (1984) a fait
état de la surpêche comme une menace pour la biodiversité marine. Selon l’auteur, ce
phénomène touche particulièrement les espèces de poissons-perroquets et les oursins de
diadème. Par ailleurs, il a mis l’accent sur la pêche à la senne et aux nasses de petites
mailles qui constituent les engins de pêche les plus menaçants pour les habitats et les
espèces marines de la zone.

Récemment, Philippe Kramer et al., (2016) a précisé que la surpêche constitue la


menace la plus éminente qui pèse sur les espèces marines du Parc National des 3 baies,
plus précisément dans la baie de Caracol. Dans cette même ligne de pensée, lors d’une
présentation faite en 2015 sur l’état de l’environnement marin haïtien l’ex-coordonnatrice
nationale de Reef Check, la biologiste marine Erika Pierre-Louis, a affirmé que « la
surpêche est la menace majeure à la conservation marine haïtienne ». Selon une
observation scientifique menée par les experts de Reef Check Haïti dans la Baie de
Page |6

Caracol, ils ont pu constater qu’au bout d’une heure environ 100 bateaux de pêche
venaient s’embarquer sur le rivage5. Cette même étude a révélé que dans certaines zones
du récif de Caracol moins d’un poisson a été observé sur une superficie de 100 m2. Les
quelques espèces de poissons rencontrées mesuraient pas moins de 25 cm de longueur.
D’après la scientifique ces faits expliquent clairement que cette zone connaît une surpêche
extrême.

Un obstacle de taille s’est présenté toutefois, car aucune des études antérieures
consultées n’abordent en profondeur les effets socio-écologiques de la surpêche sur les
espèces marines à Caracol. De plus, ces études ne tiennent pas en compte des facteurs
socio-économiques qui engendrent la surexploitation des ressources marines de la zone.
Or, dans la baie de Caracol, depuis quelques années, on observe que les espèces de
concombres de mer et de poissons-perroquets sont intensivement exploitées.
Généralement, capturées par les pêcheurs à senne ou avec des nasses de très petites
mailles, les poissons-perroquets sont capturés de manière la plus outrancière.
Quotidiennement, des observations in situ ont montré que plusieurs bourrettes, paniers en
bambou et des cuvettes ont été remplis majoritairement des poissons-perroquets juvéniles
et sont vendus aux marchands de « tiyaya ».

Parallèlement, les concombres de mer sont confrontés à une pareille situation. Les
pêcheurs les ramassent par centaine quotidiennement que ce soit les juvéniles ou les
espèces matures pour les vendre aux colporteurs locaux à meilleurs prix, qui vont les
revendre ensuite aux négociants du Cap-Haïtien. Ces derniers vont les vendre à leur tour
aux grands exportateurs de Port-au-Prince qui les envoient directement sur le marché
asiatique. Face à une course effrénée vers la quête d’un mieux-être quotidien, les pêcheurs
n’écartent rien pour capturer tout ce qui peut être vendu. Ainsi, plusieurs centaines de
milliers de concombres de mer sont pêchées chaque année dans la baie de Caracol sans
que les pêcheurs et les autres acteurs de ce secteur en connaissent le bien-être écologique
de ces espèces marines dans la zone. Dans le but d’appréhender cette situation, nous avons

5
https://lenouvelliste.com/public/article/140546/lenvironnement-marin-haitien-dans-le-viseur-de-reef-
check
Page |7

réalisé ce travail de recherche ayant pour titre « la surpêche des concombres de mer et des
poissons-perroquets : une menace socio-écologique majeure dans la baie de Caracol ».

1.4. Question de recherche

Le présent travail de recherche se décline autour de la question centrale suivante :


en quoi consistent les effets socio-écologiques de la surpêche des poissons-perroquets et
des concombres de mers dans la baie de Caracol ?

1.4.1. Questions optionnelles

En quoi consistent la taille, le poids et la biomasse des espèces étudiées au cours


de plusieurs mois?
Dans quelle mesure les impacts socio-économiques de la surpêche sont-ils liés à
la vulnérabilité économique des pêcheurs ?
Quelles sont les perspectives pour une meilleure gestion des stocks de ressources
halieutiques en Haïti, dont les concombres de mer et les poissons-perroquets?

1.5. Hypothèse fondamentale

Tenant compte de la problématique de l’étude, nous partons de l’hypothèse suivante :

« Dans la Baie de Caracol, la surpêche est la conséquence des pratiques de pêches


illégales, l’augmentation croissante de l’effort de pêche et de la vulnérabilité socio-
économique des pêcheurs ».

1.6. Objectifs

Les objectifs de ce travail de recherche consistent à montrer dans quelle mesure


une pêche artisanale abusive et non sélective pourrait avoir des effets bioécologiques
néfastes sur les poissons-perroquets et les concombres de mer.

1.6.1. Objectifs opérationnels

Monter une base de données biométriques « Fishbase » permettant de faire un


inventaire de la taille, le poids, la biomasse et la situation d’exploitation des espèces
étudiées au cours de 2 mois.
Page |8

Proposer des perspectives pour une meilleure gestion durables des stocks de
ressources halieutiques, dont les concombres de mer et les poissons-perroquets.

1.7. Organisation du travail

Dans le but de mieux appréhender cette étude, nos réflexions seront structurées au
tour de six grands chapitres. Dans le premier chapitre, nous avions introduit l’étude en
présentant les grands axes de la recherche. Dans le deuxième chapitre nous ferons le point
sur la revue de littérature. La méthodologie de la recherche sera articulée au troisième
chapitre dans deux grands points : en premier lieu, nous présenterons la zone d’étude selon
ses dimensions physico-spatiales, et environnementales ; en second lieu, nous décrirons
les différentes stratégies de collecte des données empiriques, ainsi que les matériels
utilisés pour mener les enquêtes de terrain. La présentation des résultats de l’enquête se
fera au chapitre quatre. Pour s’y prendre, nous ferons l’interprétation et l’analyse des
données biométriques collectées sur les poissons-perroquets, dans le cadre du projet tout
en adaptant ce protocole de recherche pour les concombres de mer. Et, nous analyserons
également les informations recueillies à travers les entretiens et focus groupes auprès des
acteurs du secteur de la pêche artisanale. En dernier lieu, dans le chapitre cinq nous ferons
une discussion sur le Projet pilote d’Échange des Équipements de Pêche mis en place à
Caracol et Madras par TNC. Dans la conclusion, en guise de perspectives, on proposera
quelques mesures de conservation et de gestion des ressources halieutiques comme la
cogestion des pêcheries et l’application volontaire des règlements juridiques et légaux sur
le fonctionnement de la pêche artisanale, pour une gestion durable de la pêche artisanale
dans la baie de Caracol.
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CHAPITRE II : REVUE DE LITTERATURE


2.1. Introduction

La revue de littérature est une étape importante dans la réalisation d’un travail de
recherche, car elle va nous permettre de prendre connaissance des études antérieures qui
ont été réalisées sur le sujet. Dans cette revue de littérature nous aborderons : les approches
théoriques sur l’exploitation des ressources halieutiques, les stratégies d’exploitation et
de sa gestion, en jetant un regard sur le contexte actuel de l’exploitation des ressources
halieutiques en Haïti plus précisément dans la baie de Caracol.

La pêche maritime constitue un atout fondamental dans le développement socio-


économique et culturel des territoires côtiers (Noël et Le Sauce, 2004). Cependant, en
raison de la surpêche en espace de 40 ans (soit entre 1970-2012) 49 % des espèces
maritimes ont disparu (WWF, 2015). Depuis la fin du XXe siècle, l’Organisation des
Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) estimait que le coût annuel de
la surpêche était de 50 milliards de dollars (FAO, 1990). Charles Clover (2004), soutient
que ce problème est systématiquement lié à l’impact de la pêche commerciale qui affecte
habituellement 90 % des espèces de grandes valeurs économiques, telles que : Thon rouge,
Morue, Mérou, Dorade, Bar et Hareng. Dans les pays pauvres, comme Haïti la surpêche
engendre le plus souvent une surexploitation des ressources halieutiques, surtout chez les
espèces les plus ciblées, comme les Langoustes, le Vivaneaux, les Poissons-Perroquets,
le Mérou, le Dorade. Au regard de cette menace, les ressources halieutiques ne sont-elles
pas exploitées au niveau d’un seuil maximal insoutenable ? Au niveau mondial, quelles
sont les deux plus grandes stratégies de gestion des ressources halieutiques? À l’échelle
d’Haïti, en quoi consiste la problématique de l’exploitation des ressources halieutiques ?

Afin de répondre à ces interrogations, ce chapitre est structuré autour des cinq (5)
grands points :1) considérations sur la notion de ressources halieutiques et la pêche
artisanale ; 2) stratégies d’exploitation et de gestion des ressources halieutiques ; 3) le
contexte actuel de l’exploitation des ressources halieutiques en Haïti ; 4) la problématique
de la dégradation des ressources halieutiques côtières. 5) Pour finir, nous jetterons un
regard critique sur la revue de littérature.
P a g e | 10

2.2. Considération théorique et conceptuelle sur les notions clés

Dans la perspective d’une meilleure compréhension du sujet, nous allons tenter


d’aborder ici les principales définitions et approches théoriques avancées par divers
auteurs, plus précisément sur l’exploitation et la gestion des ressources halieutiques,
considérées comme une ressource naturelle renouvelable. Mais juste avant, nous jetterons
ici un regard sur la notion de ressources et ressources naturelles.

2.1.1. La notion de ressource

Dans le domaine des Sciences Humaines et Sociales, la définition de ressource est


sujet à de nombreux débats. Il s’agit de l’un des thèmes les plus ambigus de la géographie.
On découvre qu’il existe toutefois différentes acceptations théoriques sur cette notion
dépendamment de la discipline scientifique considérée. D’après le Dictionnaire de la
géographie et de l’espace des sociétés, la notion de ressource met en évidence une réalité
naturelle ou autre faisant partie d’un processus de production qui est constamment liée
avec le résultat final de cette production (Lévy et Lussault, 2003). Parallèlement, dans une
publication parue dans Géoconfluences6, la notion de ressource est vue comme une
capitale naturelle (l’eau, la terre, les océans, etc.) ou matérielle (immobilier, machine, etc.)
que l’homme exploite afin de créer des richesses pour assurer son bien-être. En ce sens,
on précise que pour les économistes, la notion de ressource est considérée comme des
biens immatériels, des capitaux et des ressources humaines. Du coup, toute utilisation
d’une ressource est susceptible de satisfaire un besoin quelconque. Pour un géographe,
les ressources sont considérées en fonction de leur répartition spatiale, les demandes de
flux, leur accessibilité, leur qualité mais aussi selon l’analyse des jeux des acteurs ainsi
que les conflits ayant rapport à leur exploitation. Selon le point de vue du géologue, les
ressources sont considérées comme des gisements ou réserves estimées et évaluées
économiquement et techniquement au regard du coût d’exploitation et les technologiques
existantes. C’est le cas par exemple d’une mine d’or.

Dans ce contexte, Weigel (1996) affirme pour sa part que la notion de ressource
fait référence à une valeur qu’on peut potentiellement exploiter, échanger et évaluer. Dans

6
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/ressource-s
P a g e | 11

la logique du capitaliste de marché dans laquelle s’insère le monde contemporain, la


raréfaction d’une ressource implique forcément une tension entre les besoins et sa
disponibilité. Cela peut découler sur des conflits géopolitiques majeurs. Toutefois, on doit
préciser qu’il existe une catégorie de ressources qu’on appelle ressources naturelles.

2.1.2. Différentes approches sur la notion de ressources naturelles

La définition de la notion de ressources naturelles ne fait pas l’unanimité chez tous


les auteurs. Son sens diffère suivant le courant idéologique et/ou scientifique, ainsi que
l’institution qui l'a définie. Dans son rapport sur le commerce mondial, la définition
retenue par l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) a un sens strictement
commercial et économique car les ressources naturelles sont considérées comme des : «
Stocks de matières présentes dans le milieu naturel qui sont à la fois rares et
économiquement utiles pour la production ou la consommation, soit à l’état brut, soit
après un minimum de transformation » (OMC, 2010 : 46). Pour cette institution
internationale, toutes les ressources naturelles ne représentent pas les mêmes intérêts. Par
exemple, l’air et l’eau ne sont pas considérés comme ressources naturelles, tant qu’elles
sont limitées strictement à la consommation et la production gratuite. En ce sens, seuls les
stocks de matières susceptibles de faire l’objet d’une commercialisation sur les marchés
financiers sont vus comme des ressources naturelles, à l’exception des produits de la
pêche et les ressources forestières.

Egard, Malwé & Negrutiu (2014), considèrent que certaines définitions avancées
à propos du terme de ressources naturelles ne sont basées que sur une approche utilitaire
et étroite qui ne prend pas vraiment en considération les objectifs de gestion de la
biodiversité et ceux des satisfactions des besoins de l’homme. Selon eux, une ressource
naturelle doit être considérée comme les éléments vivants ou non vivants, les différentes
formes d’énergies reçues (énergie solaire) ou produites (énergie marémotrice et éolienne)
en dehors de l’action humaine. À notre avis, une telle définition est basée sur une approche
essentiellement écologique. Les auteurs se penchent un peu plus vers la conservation et la
préservation des ressources dites naturelles.
P a g e | 12

Sous un autre angle, Weber et al., (1990) considèrent une ressource naturelle
comme celle que l’homme exploite sans avoir le pouvoir de contraindre son
renouvellement de manière positive. Du moins, l’auteur avance que ce sont des stocks de
ressources qu’il faut exploiter rationnellement.

Dans le même ordre d’idée, Cormier-Salem (2007) avance qu’une ressource


naturelle est une matière première identifiée comme d’une grande utilité capable de
satisfaire les besoins primordiaux de l’homme. Économiquement, l’exploitation de celle-
ci est intimement liée à la situation des technologies actuelles. Ainsi, selon l’auteure il y
a deux catégories de ressources naturelles : les ressources naturelles renouvelables, qui
ont une capacité de régénération propre à l’échelle des temps humains (espèces animales
ou végétales) et les ressources non renouvelables qui en sont incapables de se régénérer,
donc leur viabilité est limitée dans le temps. D’une manière plus simple, elle essaie
d’aborder cette notion d’une manière globale, en lui générant son sens utilitaire,
notamment sa dimension économique et écologique.

Cette définition va dans le même sens avec celle de l’Union Internationale pour la
Conservation de la Nature (UICN) qui affirme que les ressources naturelles sont produites
par la nature et elles sont subdivisées en ressources naturelles renouvelables et non
renouvelables (UICN, 2012).

Contrairement, aux ressources naturelles non renouvelables, les ressources


naturelles renouvelables sont connectées à un écosystème qui constitue l’élément
fondamental dans leur régénération. On ne peut pas contraindre le renouvellement de cette
ressource de manière positive. C’est le cas de l’eau, l’air, ainsi que les milliers d’espèces
animales sauvages. Leur pérennité est fonction de la manière qu’on les utilise. Le
dérèglement d’un élément naturel du système peut détériorer toute la dynamique du
système dans son ensemble (Weber, Betsch et Cury, 1990). L’un des cas typiques, c’est
l’exploitation des ressources halieutiques dont le prélèvement maximal insoutenable peut
détériorer toute la régénération des stocks. Par conséquent, cela pourrait entrainer la
pauvreté des pêcheurs (Weigel, 1996).
P a g e | 13

2.1.3. Définition sur la notion de ressources halieutiques et la pêche artisanale

2.2.1.1. La notion de ressources halieutiques

La notion de ressources halieutiques, est considérée comme toutes les ressources


vivantes du règne animal et végétal qui se développent dans les milieux aquatiques marins
ou d’eaux douces exploitées par l’homme7. Dans la pratique, cette activité est couramment
appelée la pêche.

2.2.1.2. La pêche

D’après Fargier (2010), la pêche c’est une activité consistant à capturer


des animaux aquatiques ou marins (poissons, crustacés, céphalopodes, etc.) dans
leur milieu naturel (océans, mers, cours d'eau, étangs, lacs, etc.). Elle peut être pratiquée
par loisir ou profession. Différemment du milieu et de la société en question, les
techniques et engins de pêche sont divers. On distingue plusieurs types de pêche, il s’agit
notamment de la pêche artisanale, la pêche industrielle, la pêche hauturière et électrique,
la pêche sportive ou de loisir. Dans le cadre de cette recherche, nous allons mettre l’accent
spécifiquement sur la pêche artisanale.

2.2.1.3. La pêche artisanale

Selon la FAO (2008) dans le Rapport de la Conférence mondiale sur les pêches
artisanales, les pêches artisanales sont des pêches de subsistance pratiquées pour
l’autoconsommation et la vente sur les marchés locaux. Les pêcheurs artisans utilisent des
techniques de pêche traditionnelle pour tirer un meilleur gain des ressources halieutiques
des eaux marines ou aquatiques. Ils ont aussi des engins de capture et des opérations de
transformation et de commercialisation spécifiques. Depuis plusieurs décennies, la pêche
artisanale est en pleine dynamique. On observe d’autres activités secondaires telles que la
fabrication de filets, la construction de canots, la réparation et l’entretien des canots, etc.,
ces derniers constituent des sources d’emplois générant des revenus supplémentaires dans
les communautés de pêcheur (Fargier, 2012). Actuellement, les pêches artisanales sont au
cœur des systèmes halio-alimentaires durables (Noel et Le Sauce, 2014).

7
https://www.futura-sciences.com/planete/definition/developpement-durable-ressource-halieutique-5449/,
consulté le 20 janvier 2019.
P a g e | 14

En Haïti, selon le Décret du 27 octobre 1978 sur la pêche : « (…) la pêche


artisanale est pratiquée avec des engins simples de capture, sur des embarcations de
moins de dix (10) tonnes brutes. La durée de capture dans ce cas est de 72 heures au plus
(…) ». En effet, nos observations de terrain dans la baie de Caracol nous a permis de
constater que cette activité fait appel à des savoir-faire traditionnels et très souvent non
technologiques. Techniquement, la pêche artisanale se caractérise par sa diversité et ses
aspects multidimensionnels. Les nombreux types d’engins et des techniques de pêche
développés par les pêcheurs artisans en sont des exemples.

2.3. Stratégies d’exploitation et de gestion des ressources halieutiques

Il existe deux principaux courants de pensée sur l’exploitation et la gestion des


ressources halieutiques dans le monde scientifique : il s’agit de l’approche néo-classique
sur les ressources halieutiques et de l’approche écosystémique de la pêche. En s’appuyant
sur les travaux de grands chercheurs tels que Gilles Rotillon (2005) et des institutions
internationales comme la FAO (2010), nous présenterons en détails en quoi elles
consistent.

2.3.1. L’approche néoclassique sur les ressources halieutiques

L’approche néoclassique de l’exploitation des ressources halieutiques permet


d’intégrer l’aspect économique dans les dimensions biologiques de celles-ci, d’où la
nécessité de créer un équilibre bioéconomique du secteur de la pêche. D’après Rotillon
(2005), cet équilibre fait appel à deux principales conditions : d’une part, il faut que l’état
de la population de poissons soit stable ; d’autre part, il faut que le secteur de la pêche ait
la même rentabilité que le reste de l’économie. L’objectif de cette approche consiste à
rechercher une meilleure relation entre l’homme et les ressources pour une gestion
optimale ou rationnelle des stocks de produits halieutiques. Selon Rotillon (2005), dans
le cadre de l’exploitation des ressources halieutiques, on doit faire un prélèvement
maximum soutenable. On parle de prélèvement maximum soutenable lorsque le
prélèvement ne nuit pas à l’accroissement naturel de la population, c’est-à-dire, le
prélèvement ne touche pas au stock initial de ressources halieutiques. En considérant le
secteur de la pêche par exemple, dans un temps très restreint, le prélèvement soutenable
dépend fortement de l’état de stabilité de la population de poissons. Dans un temps plus
P a g e | 15

long, l’état de stabilité peut dépendre d’une gestion efficace des ressources halieutiques
du milieu considéré. En cas d'exploitation optimale, le pêcheur doit savoir l’état du stock
avant n’importe quel prélèvement maximal. Dans le cas contraire, si la pêcherie à un faible
stock tout prélèvement maximal ne ferait que détériorer ou voire aggraver l’état de
stabilité du stock exploité (Rotillon, 2005).

Suite à cette analyse bioéconomique du secteur de la pêche, Rotillon (2005)


évoque trois caractéristiques qui définissent le comportement des pêcheurs dans une
pêcherie : d’abord c’est la technique de pêche ; ensuite, ce sont les paramètres
économiques ; et enfin, c’est le cadre institutionnel existant. Dans le premier cas, l’auteur
explique que la technique de pêche définit le comportement du pêcheur dans la mesure où
elle se différencie avec le rendement du stock de l’espèce et l’espace de pêche considéré.
Ici, on comprend que le pêcheur fera en sorte de développer un ensemble de techniques
de pêche qui lui permet de prélever une grande quantité de poissons. Toutefois, l’auteur
nous fait remarquer que la capture augmente avec l’effort de pêche et selon la situation
biologique du stock. Dans le second cas, les paramètres économiques qui définissent
l’attitude du pêcheur sont : le prix de vente du fruit de mer, le coût de l’effort de pêche et
le taux d’intérêt financier de la ressource halieutique sur le marché. Selon l’auteur, ces
facteurs ont un poids considérable dans l’exploitation des ressources halieutiques. Dans
le dernier cas, il avance que la mise en place des institutions régulatrices influence
également le comportement du pêcheur, dans la mesure où ces dernières sont considérées
comme des acteurs qui définissent des stratégies de gouvernance et de régulations pour
pouvoir gérer l’exploitation des ressources halieutiques et résoudre les conflits entre les
pêcheurs dans un espace de pêche donné. Pour finir, dans la but de mieux gérer les
ressources halieutiques, l’économiste évoque qu’on doit prioriser une gestion statique
optimale de la pêcherie qui dépend d’un effort de pêche équilibré en rapport avec une
stabilité biologique équilibrée de l’état des stocks.

Ce modèle fait néanmoins état de certaines critiques. Nous pensons que les
dynamiques et défis spatio-temporels actuels ne sont pas pris en compte dans l’analyse
bioéconomique. En effet, lorsque nous considérons le contexte socio-économique de l’un
des pays du Sud et d’Haïti en particulier, nous supposons que ce modèle peut ne pas être
P a g e | 16

applicable, car les réalités socio-économiques et les dynamiques du littoral sont


différentes aux autres pays de la région. En outre, nous réalisons que dans l’approche
analytique néoclassique on ne facilite pas la mise en place d’une stratégie commune de
gestion entre les différentes parties prenantes.

2.3.2. L’approche écosystémique des pêches

Pour pallier les limites de la première approche, la FAO a mis en place l’Approche
Ecosystémique des Pêches (AEP) : comme une stratégie de gestion durable de la pêche.
Cette notion a fait son apparition pour la première fois, à travers le Code de conduite pour
une pêche responsable, publié en 1995 par la FAO. L’Approche Ecosystémique des
Pêches (AEP) est considérée comme une nouvelle action légale mise au service des
acteurs de l’aménagement des pêcheries dans le monde entier pour faire face à des enjeux
et défis de taille qui malheureusement ne sont pas encore résolus. La toute première
tentative de définition a été développée en 2000, lors de la Convention des Nations Unies
sur la Diversité Biologique, où elle a été considérée comme : « une stratégie de gestion
intégrée des terres, de l’eau et des ressources vivantes qui favorise la conservation et
l’utilisation durable de manière équitable » (FAO, 2010). De nos jours, l’approche
écosystémique des pêches (AEP) est très en vogue, surtout avec la montée des idéologies
basées sur l’utilisation et la conservation durable des ressources halieutiques.

Depuis 2001, lors de la Conférence de Reykjavik sur une pêche responsable dans
l'écosystème marin l’Approche Ecosystémique des Pêches (AEP) a pour but de planifier,
valoriser et gérer les pêches en considérant la diversité des aspirations et des besoins
sociaux contemporains sans remettre en cause les avantages que les générations futures
doivent pouvoir tirer de l’ensemble des biens et services issus des écosystèmes marins8.

En effet, au sens de Didier (2009), l’approche écosystémique des pêches est une
application des principes du développement durable au domaine de l’exploitation des
ressources et écosystèmes marins. Dans la perspective d’une gestion commune et
participative de la pêche, les experts de la FAO ont mis au point en 2010 un document

8
http://www.fao.org/3/Y2211f/Y2211f.htm , Conférence de Reykjavik sur une pêche responsable dans
l'écosystème marin
P a g e | 17

intitulé “Dimensions humaines de l’approche écosystémique des pêches : une vue


d’ensemble du contexte, des concepts, outils et méthodes ”. À travers ce document, ils ont
considéré les facteurs sociaux, économiques et institutionnels comme étant des éléments
essentiels dans la mise en application de ce qu’on appelle l’approche écosystémique des
pêches. Ainsi, cette démarche est vue comme un moyen de gestion efficace capable
d’assurer le développement et l’amélioration de la pêche.

Plus récemment, la FAO (2010) précise que l’approche écosystémique des pêches
prône une pêche écologiquement viable et intégrée. En quelque sorte, l’AEP tente
d’équilibrer plusieurs objectifs de la société tout en mettant l’accent sur les éléments
vivants (biotiques) et non vivants (abiotiques) du milieu marin aussi bien que leurs
interactions. Ici, on remarque que la dimension socio-environnementale et/ou socio-
écologique est largement prise en compte. Ainsi, cette démarche se veut être une stratégie
de gestion non seulement biologique et économique des stocks, mais aussi une action
participative qui intègre largement l’homme et la société en général dans la conservation
et l’utilisation durable des ressources halieutiques. En résumé, cette approche n’est donc
pas limitée à la gestion biologique des espèces marines, mais elle s’applique à la politique,
aux cadres juridiques, au développement et à la planification de gestion des ressources
halieutiques. Les objectifs fondamentaux de ladite approche c’est la recherche d’une :
gestion optimale de la pêche, l’atteinte d’un ensemble d’objectif durable, la gestion des
conflits entre les acteurs, etc. Pour appliquer l’AEP, on utilise des outils tels que : l’étude
des anthropologues, sociologues, écologistes, économistes, statisticiens et des logiciels de
modélisation informatique, comme FISAT II (FAO, 2010).

Toutefois, cette nouvelle approche risque d’être difficile à développer dans les
pays du Sud comme Haïti, en manque de ressources humaines capables de mettre en
œuvrent des programmes de gestion des ressources halieutiques basés sur l’Approche
Ecosystémique des Pêches (AEP).
P a g e | 18

2.4. L’exploitation des ressources halieutiques en Haïti

Nous allons présenter ici le contexte de l’exploitation des ressources côtières en


Haïti à savoir : le milieu, la situation socio-économique, ainsi que l’état de dégradation
des ressources halieutiques. On met en exergue l’état des connaissances existantes en la
matière, sous forme de synthèses bibliographiques, tirées des publications scientifiques
de référence, ainsi que des observations de terrain.

2.4.1. Situation géographique et environnementale du littoral d’Haïti

Haïti est située dans la zone éco-régionale marine de la Caraïbe Centrale, une zone
appartenant à la province biogéographique de l’Atlantique Tropicale du Nord-Ouest
(MdE, 2016). La limite de la mer territoriale de la République d’Haïti est fixée à 12 milles
marins à partir de la laisse de mer et la zone économique à 200 milles marins (Décret 6
Avril 1977). Les eaux maritimes internationales s’étendent de l'océan Atlantique au Nord
et de la mer des Caraïbes au Sud et à l’Ouest. Le plancher continental a une superficie de
5,857 km2 (FAO, 2005). Le plancher continental d’Haïti est généralement étroit. Il oscille
entre 6 à 200 m et il est formé de grandes fosses mannes dont celle de Brownson avec 4
000 m de profondeur. Les zones côtières sont soumises à une faible marée oscillant entre
0.30 à 0.60 m, avec quotidiennement deux marées hautes et deux marées basses. Les
températures minimales de la mer varient approximativement de 26 oC en Janvier à 29 oC
en Septembre pour les températures maximales. Dépendamment des régimes
pluviométrique et thermométriques, le degré de salinité de la mer peut varier de : 34.6 %
(de Novembre à Février), 36.2 % (d’Avril à Août) et parfois jusqu’à 40 % durant l’été
(AUBÉ, 1999). Concernant la superficie de la longueur du linéaire côtier d’Haïti, les
chiffres divergent : pour certains c’est 1 500 km et pour d’autres c’est 1 771 km
(UNESCO, 1998). Toutefois, selon le Ministère de l’Agriculture, des Ressources
Naturelles et du Développement Rural (MARNDR) le pays a le deuxième plus long
linéaire côtier après Cuba, parmi les pays des Grandes Antilles. De nombreuses activités
économiques se développent sur le littoral telles que : la pêche, les marais salants, les
ports et les stations balnéaires.
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2.4.2. Services écosystémiques des écosystèmes côtiers du littoral d’Haïti

Le littoral d’Haïti est constitué d’un ensemble d’écosystèmes variés, endémiques


et très riches en biodiversité. Les zones urbanisées se répartissent sur 77 villes côtières,
dont la plupart sont créées il y a 200 ans9 (CIAT, 2015 ). Le milieu naturel (anthropisé)
est constitué de trois types d’écosystèmes côtiers associés qui sont : les récifs coralliens,
les herbiers et la mangrove.

Les communautés coralliennes du pays couvrent une superficie de 450 km


(Spalding, M., C. Ravilious et al., 2000). Dans les années 2000 on a inventorié 27 espèces
de coraux et 50 espèces de poissons dans les eaux maritimes d’Haïti (Bouchon et al.,
2000). De plus, les récifs coralliens d’Haïti sont des lieux de conservation de la
biodiversité marine et côtière qui abritent environ 25 espèces de poissons résidents et
migratoires (Spalding & Ravilious, 2004). Le premier inventaire écologique des récifs
coralliens en Haïti a été réalisé par l’écologue américain William Beebe, dans la baie de
Port-Au-Prince en 1928. Selon l’auteur, à cette époque le récif corallien de la capitale était
un espace riche en diverses espèces de poissons, soit 270 espèces ont été observées
(Beebe, 1928). Une étude scientifique (Hodgson, 2014) montre qu’il existe de nombreuses
espèces de coraux actuellement très rares dans toute la Caraïbe, mais qui peuplent encore
les zones côtières haïtienne. C’est le cas du corail à corne de cerfs, observés dans la baie
de Fort-Liberté (Hodgson, 2014). De plus, les récifs coralliens sont les principales zones
de pêches pour les pêcheurs locaux. Dans le Nord-Est d’Haïti, la baie de Caracol possède
l’une des plus grandes formations de récifs coralliens dans le pays, soit une superficie
estimée à 901 hectares (FoProBiM, 2009). Les herbiers marins du pays sont aussi d’une
grande valeur écologique. Ils nous fournissent de l’oxygène et des éléments nutritifs aux
espèces marines herbivores, en particulier les poissons-perroquets et les lamantins qui
peuplent les eaux côtières haïtiennes. Le littoral haïtien dispose de quelques superficies
de mangroves riches en faune sauvage. En 1998, la superficie totale des mangroves du
pays couvrait 173.37 Km2, soit une valeur de 17 337,139 ha, dont 525 m3 de volumes sur
pied et 893 000 tonnes de biomasses aériennes (FAO, 2010).

9
http : //ciat.gouv.ht/articles/le-littoral-en-Haïti
P a g e | 20

2.4.3. Profil de la pêche artisanale côtière en Haïti

Après Cuba, la République d’Haïti est le deuxième pays de la Caraïbe insulaire


qui dispose du plus long linéaire, soit une superficie de 1 535 kms de côtes pour toute la
presqu’île (MARNDR, 2010). La mer territoriale est estimée à plus de 30 000 km 2 et la
superficie du plateau continental est de 5 857 km2 (FA0, 2005). Avec de telles dimensions
physiques, le milieu marin et côtier renferme d’une potentialité non négligeable en ce qui
a trait aux ressources halieutiques marines. Au fil des années, le secteur de la pêche
artisanale s’est largement évolué. Les pêcheurs haïtiens utilisent différents types d’engins
de capture qui sont communs dans toutes les Antilles. La pêche constitue, une source de
revenus socio-économiques pour les communautés halieutiques du littoral et l’économie
nationale.

2.4.3.1. Les pêcheurs artisanaux dans la société haïtienne

En Haïti, la pêche artisanale se développe à quelques 100 mètres du rivage où l’on


trouve les espèces démersales côtières, telles que : bourses, poissons-perroquets, murène,
cardinaux, langoustes et poulpes (Desse, 2014). En 2008, une étude montre qu’il existait
plus de 52 000 familles de pêcheurs qui se répartissent sur plus de 420 localités ou villages
de pêche en Haïti. On a dénombré un total de 26 000 unités de pêche, dont 14 800
pirogues, 10 000 bateaux à voiles, 1 200 bateaux à moteur, ainsi que plus de 350 000
lignes et nasses, 9 000 filets qui incluent 1 900 sennes de plage (Damais et al., 2008). Le
grand Sud, reste la zone de pêche la plus riche du pays en matière de biodiversité marine
et ressources halieutiques. En effet, Philippe Favrelière (2008) a montré qu’environ 3 300
familles sont impliquées dans cette activité dans cette zone. La pêche artisanale fait vivre
directement 20 000 personnes et indirectement 10 000, soit près de 7 % de la population
du département du Sud-Est. L’auteur précise aussi que ce secteur a généré un chiffre
d’affaires annuel supérieur à 200 millions de gourdes en 2008.

Récemment, d’après le rapport de l’Unité de Statistique Agricole et Informatique


(USAI) du Ministère de l’agriculture intitulé “Recensement National de la Pêche
Artisanale” en 2018 la pêche artisanale fait vivre plusieurs centaines de milliers de
personnes, soit 72 253 pêcheurs (USAI, 2018). Dans ce même rapport, les experts
P a g e | 21

montrent que trois départements à eux seuls couvrent 50 % du nombre total de pêcheurs,
il s’agit du département de : l’Ouest (13 400 pêcheurs, soit 18, 5 %) ; le Sud (12 205
pêcheurs, 16.9 %) et les Nippes (10 852 pêcheurs, 15%).

Selon le rapport de l’USAI-MARNDR (2018), la plus grande communauté de


pêcheurs haïtiens se localisent dans le département de l’Ouest, notamment dans les
communes de : Léogâne (5 255 pêcheurs), Arcahaie (1 439 pêcheurs), et Cité Soleil (1 556
pêcheurs). Le nombre d’embarcations est estimé à 5 198, soit 39 bateaux en moyenne par
port. Du moins, on constate que dans le Nord-Est d’Haïti, la communauté de pêcheurs est
relativement très faible par rapport à ces trois départements. On estime à 930 le nombre
de personnes qui pratique la pêche dans ce Département, avec 11 ports de pêche actifs et
390 engins d’embarcations, soient une moyenne de 35 bateaux par port de pêche. La
commune de Fort-Liberté représente la zone ayant la plus forte communauté de pêcheurs,
soit une estimation de 305 pêcheurs et la commune de Caracol se situe en deuxième
position avec 295 pêcheurs (USAI-MARNDR, 2018).

En Haïti, les communautés de pêcheurs s’installent dans des territoires différents.


Parfois, on les retrouve dans des villages situés à la bordure des forêts de palétuviers
(mangroves) tout près du rivage, comme c’est le cas à : Barradères, Fort-Liberté, Caracol,
etc. On les retrouve également dans les zones périphériques des littoraux des grandes
agglomérations urbaines, telles que : Port-au-Prince (Cité Soleil) et Cap-Haïtien (Shada,
Petite-Anse et Fort Saint-Michel).

Bien que leur zone de pêche se limite à quelques centaines de kilomètres du rivage
et/ ou à la limite du ZEE nationale, ces derniers suivent le plus souvent les bancs de
poissons tels que les carangidés et les barracudas. Le pêcheur haïtien n’a pas un territoire
de pêche stable. Par exemple, il y a des pêcheurs semi-nomades qui changent
constamment de lieux. Parfois, certains viennent dans différentes zones côtières au sein
d’une même région. Par exemple, dans la région du Nord durant la période des carangidés
(Juillet à Septembre), on constate qu’il y a des pêcheurs qui viennent de : Bas-Limbé,
Cap-Haïtien, Borgne et Acul-du-Nord pour pêcher dans les environs de Caracol et Fort-
Liberté.
P a g e | 22

Les pêcheurs nomades quant à eux s’installent temporairement d’un village de


pêcheurs à l’autre. Ils changent de zones et s’adaptent avec les territoires et les types de
pêche de l’espace dans lequel ils se trouvent. Ils s’installent provisoirement soit pour deux
à trois jours sur des ilots isolés afin de se reposer, se faire à manger, réparer leurs engins
de pêche, etc. Dans certains cas, il y a également des pêcheurs saisonniers, ces derniers
pêchent des espèces nobles et d’autres espèces saisonnières telles que : les anguilles et les
concombres de mer. En dehors de cette diversité, la majorité des pêcheurs haïtiens
pratiquent d’autres activités économiques, telles que : l’agriculture et l’élevage, afin de
compenser leurs multiples besoins. D’ailleurs, le plus souvent les pêcheurs sortent de la
mer sans aucunes prises, lorsqu’ils ne capturent pas de poissons. Dans ce cas, ils disent
en créole haïtiens qu’ils sont « kreve ».

2.4.3.2. Les différents types d’embarcation de pêche

Après une recherche bibliographique, et divers constats réalisés sur plusieurs


zones de pêche en Haïti, on dénombre 4 types d’embarcations de pêche (FAO, 2005 et
USAI-MARDNR, 2018). Au total 18 grands ports d’embarcations de pêches artisanales
actifs assurent la production halieutique dans les grandes villes. Il s’agit du port de : Port-
au-Prince, Lully, St-Marc, Gonaïves, Môle St-Nicolas, Port-de-Paix, Cap-Haïtien, Fort-
Liberté, Petit-Goâve, Roseaux, Jérémie, Dame-Marie, Anse d’Hainault, Les Cayes, les
Anglais, Aquin, Jacmel et Marigot (FAO, 2005).

En 2005, hormis une trentaine de bateaux en fibre de verre, Haïti comptait 6 500
à 7 000 unités d’embarcations. Actuellement, d’après les chiffres de l’enquête de l’USAI
en 2018, on assiste à une nette augmentation, car le nombre d’embarcations de pêche
s’élève à 26 641 unités, soit 43 embarcations par port de pêche. On distingue 4 types de
bateaux de pêche en Haïti : pirogue ou (Bwa fouye), corallin, canot en bois et bateaux en
fibre de verre (chaloupe).

La pirogue ou (Bwa fouye) est une sorte d’embarcation de petite taille (10 à 12
pieds en moyenne) fabriquée avec un seul morceau de bois qu’on a taillé dans un tronc
d’arbre (Figure 2.1). Ce petit bateau peut être déplacé à voile ou à la pagaie.
Habituellement, on retrouve les pirogues dans le Sud, les Nippes, la Grand-Anse et dans
P a g e | 23

l’Ouest. Depuis plusieurs années, elle est le type d’embarcation le plus utilisé en Haïti
(USAI-MARNDR, 2018).

Les Amérindiens pratiquaient la pêche côtière avec ces genres de pirogue dans
toute la région des Caraïbes. Elle peut être gouvernée par une seule personne (pirogue
monoxyle), notamment un pêcheur qui pratique la pêche côtière à proximité des eaux
tranquilles et de faibles profondeurs. Elle est couramment utilisée dans la pêche à la senne
de plage. Entre 2017-2018, un total de 14 543 pirogues a été recensé sur tout le territoire
national, soit 54.6 % de la flottille maritime de pêche du territoire (USAI-MARNDR,
2018). Dans la commune de Caracol cette embarcation de pêche est très peu utilisée.

Figure 2. 1 : Une pirogue sur la plage de Caracol. ©Photo : G. Jeff, Août 2019
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Le corallin est une petite barque de fond plate, qu’on utilise certaines fois pour
pêcher au large du plateau continental et dans les côtes abruptes, rocheuses et les vasières
maritimes (Figure 2.2). Comparativement aux autres embarcations de pêche, les corallins
sont très utilisés dans le Sud-Est (69.1%), le Nord-Est (41 %), le Nord (34.5%) et dans
l’Artibonite (30.6%). La présence de ces types d’embarcations dans ces départements
reflète sûrement l’habitude des pêcheurs qui pêchent avec ces bateaux dans les côtes
abruptes et les zones récifales depuis des générations. Pour les rendre plus esthétiques, les
pêcheurs décorent l’extérieur de ces petites barques de différentes couleurs en les donnant
des noms locaux. Au niveau du territoire national, le corallin représente 12 % de la flotte
de pêche, soit 3 260 unités (USAI-MARNDR, 2018). Dans la baie de Caracol, le corallin
est le deuxième type d’embarcation de pêche le plus utilisé, il mesure 18 pieds de
longueur, 4.5 pieds de largeur et 1 pied de hauteur. Lors d’une sortie de terrain effectuée
le dimanche 18 août 2019, on a pu inventorier 50 corallins amarrés dans le port et 11 en
dehors sur la plage. Cette embarcation est principalement utilisée par les pêcheurs qui
capturent les poissons avec des filets.

Figure 2.2 : Trois corallins amarrés dans la mangrove de la baie de Caracol. ©Photo :
G. Jeff, Août 2019
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Les canots en bois (ou à voiles) sont utilisés à divers fins, notamment pour : la
pêche côtière ou au large ; la promenade en mer et le commerce maritime local ou régional
(Figure 2.3). On dénombre environ 10 000 canots à voiles et 1 200 canots à moteur dans
le pays (USAI-MARNDR, 2018). Il peut être mû à la rame, à la voile, à la godille, à la
pagaie et certaines fois par moteur. Cet engin est différent du corallin, car le fond de celui-
ci est plus aigu et pointu. Il est habituellement utilisé dans les Départements du Nord,
Nord-Est, Artibonite, et l’Ouest respectivement à 62 %, 56.4 %, 52.4 %, et 47.8 % (USAI-
MARNDR, 2018). Dans le Nord-Est, notamment au niveau de la baie de Caracol, ces
embarcations sont les plus utilisées. Lors d’une observation de terrain, on a dénombré 68
canots sur la plage de Caracol, 7 étaient en cours de réparation. Il mesure environ 12 à 18
pieds de longueur et 5.6 à 6 pieds de large avec 3 pieds de hauteur. Certains ont été en
trains d’être rafistolés avec une sorte de colleta noir et quelques morceaux de toile en
coton.

Figure 2.3 : Un canot en bois ou à voile amarré au bord de mer de Caracol.


©Photo : G. Jeff, Août 2019
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Les bateaux en fibre de verre (chaloupe), ont un rôle important aussi dans la
flottille de pêche artisanale en Haïti (Figure 2.4). Selon la dernière enquête du Ministère
de l’Agriculture, on les identifie au nombre de 663 unités. Cet engin de pêche à fonds plat
qui mesure 22 pieds est couramment utilisé dans les Départements du Sud-Est, du Sud,
de l’Ouest et de la Grand-Anse (USAI-MARNDR, 2018). Contrairement aux autres types
d’embarcations, qui sont construits sur le rivage, ils sont achetés le plus souvent en
République Dominicaine. Parfois, leur coût unitaire dépasse les 200 000 gourdes. Étant si
cher, pour les pêcheurs artisans, ce sont souvent les grandes Organisations Non
Gouvernementales comme Food For The Poor, qui distribue gratuitement ces bateaux
aux associations de pêcheurs. On a pu observer quelques-uns utilisés par les membres de
la FoProBiM à Caracol.

Figure 2.4 : Chaloupe en fibre de verre dans la baie de Caracol. ©Photo : G.


Jeff, Août 2019
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2.4.3.3. Les techniques de pêche côtière et infralittorale

Les pêcheurs pratiquent diverses techniques de pêche afin d’exploiter au mieux le


plateau continental. Les principaux engins de pêche couramment utilisés du rivage
jusqu’aux récifs sont : la senne de plage, les filets, les trémails, les nasses, les sennes à
balaou, les fusils de plongée et les lignes. Leur coût de fabrication varie également d’une
zone à une autre, et de leurs dimensions (longueur, largueur, grosseur des mailles, etc.).
En dépit de la condition météorologique, les pêcheurs ne passent pas beaucoup de temps
en mer. D’après Michel Desse (2004), le nombre de sorties en mer d’un pêcheur haïtien
ne dépasserait pas 150 à 200 jours par année. Le choix d’une de ces techniques de pêche
varie selon la saison et l’espèce ciblée. On constate que les pêcheurs utilisent très souvent
des engins illégaux qui vont à l’encontre des normes établies par l’Etat. En bref, toutes les
techniques de pêche présentées ci-dessus ont leurs avantages et leurs inconvénients.

2.4.4. Potentialités socio-économiques du secteur de la pêche maritime

Selon la FAO (2005), il existe généralement trois grandes catégories de produits


halieutiques en Haïti. D’abord, il y a les fruits de mer tels que : langoustes, crevettes, chair
de poulpes qui sont destinés vers le marché extérieur. Ensuite, il y a les espèces
marines pélagiques : les Carangidés, les Barracudas, les Lutjanidés et les Serranidés. Ces
espèces sont considérées comme les premières catégories de fruits de mer destinés aux
marchés des grandes agglomérations urbaines. Enfin, il y a certaines petites espèces
nobles et de petits pélagiques qui sont le plus souvent séchées et salées avant d’être
vendues sur le marché local ou dans les communes voisines. Parmi les nombreuses
activités qui se développent sur le littoral, la filière pêche maritime contribue dans la
mesure du possible dans l’économie nationale grâce aux revenus et les emplois locaux
qu’elle procure aux communautés des zones côtières.

De 2005 à 2019, le secteur de la pêche artisanale a connu une grande évolution


socio-économique. Effectivement, on estimait que la valeur brute de la production
halieutique était de 16 millions d’Euros (FAO, 2005). Le secteur a produit 5 000 tonnes
de produits halieutiques en poids vif destinés à la consommation humaine. Au total, la
production halieutique du pays fut estimée à environ 8.000 tonnes/an. Les principales
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espèces marines exploitées étaient des : poissons démersales et des accores (3 000 tonnes),
pélagiques côtiers (1200 tonnes), pélagiques océaniques (1500 tonnes), crustacés (2000
tonnes), lambi (300 tonnes). L’offre des produits halieutiques était estimée à un total de 4
kg/hab./an. Le pays a exporté 349 tonnes de fruits de mer, soit environ 50 tonnes de
langouste, de crevettes et d’autres espèces à forte valeur marchande, tout cela constitue
une somme de 4 et 5 millions EU par année. Toujours selon la FAO (2005), on a importé
349 tonnes de fruits de mer pour une valeur de 3 752 000 EU. Les principales importations
sont essentiellement constituées de : 15 000 t/an de chinchard congelé ; 5000 t/an
d’hareng-sel ; 1000 t/an le hareng-saur et 2 000 t/an d’autres poissons congelés. La pêche
artisanale a généré 50 000 emplois dans le secteur primaire, dont celui des pêcheurs et 5
000 emplois dans le secteur secondaire, à savoir pour les concepteurs de nasses, filets et
les vendeurs de matériels de pêche.

En 2014, la consommation de poissons fut estimée à 17 000 tonnes par an, soit une
production locale de 5 000 tonnes et 12 000 autres tonnes importées10. On constatait que
la filière pêche artisanale comptait plus de 12 000 marchandes locales, 7 000 « Madan
Sara »11 et 20 000 agents de commercialisation de fruits de mer (MARNDR, 2010).

En 2019, la production de capture du pays était de : 12 600 tonnes de fruits de mer


par an (non inclus DCP), avec une production de 10 000 kg de concombres de mer et 6
200 kg d’anguilles (MARNDR, 2019). Le pays est très dépendant des importations de
produits halieutiques venant de l’extérieur. Haïti a importé 16 000 tonnes : d’harengs,
chinchards (poissons "pèpè") et tilapia. Ces produits représentent 70 % de la
consommation locale. Contrairement à cela, le pays a exporté une très faible quantité de
fruits de mer, soit un total de 800 tonnes par an. Ceci se répartit de la manière suivante :
140 tonnes de langoustes, 10 000 kilos de concombres de mer, 6 200 kilos d’anguilles, 1
600 000 unités de poissons ornementales, 720 kg crabes et lambis, etc. (MARNDR, 2019).
A noter, qu’il existe près de sept (7) exportateurs de fruits de mer en Haïti.

10
https://www.rfi.fr/fr/emission/20140829-peche-haiti-secteur-pleine-expansion
11
https://www.haitilibre.com/article-13477-haiti-agriculture-la-peche-en-haiti-bilan-et-perspectives.html
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2.4.5. Problématique de la dégradation des ressources halieutiques en Haïti

Haïti figure jusqu'à présent sur le banc des accusés en matière de dégradation des
écosystèmes côtiers, en dépit de nombreux efforts réalisés en matière de gestion de
l’environnement marins, surtout par la mise en place de plusieurs Aires Marines
Protégées. En avril 2019, le Ministère de l’Environnement a publié, le sixième Rapport
National sur la Biodiversité. A travers ce document, il précise que la biodiversité d’Haïti
fait face à une menace constante due à plusieurs facteurs d’origines anthropiques et
environnementales (MdE, 2019). En effet, plusieurs études récentes montrent qu’à cause
des pressions anthropiques qui s’exercent sur les ressources halieutiques côtières, elles
sont en nette dégradation (Rony, 2015). Parallèlement, selon Dr. Hodgson (2014),
fondateur de l’ONG Reef Check, Haïti figure parmi les premiers pays au monde qui
présentent le plus haut niveau de surpêche. Selon le scientifique, l’une des causes de cette
surpêche c’est parce que les pêcheurs artisans utilisent des engins non sélectifs qui
dégradent continuellement les ressources halieutiques côtières. C’est le cas des sennes de
petites mailles qui facilitent la prise des espèces juvéniles. En dehors de cela, nous
pensons qu’il faut considérer aussi la précarité socio-économique de ces deniers et le
désordre institutionnel qui existe en Haïti en matière de conservation de la biodiversité
marine.

Par ailleurs, l’espace marin et côtier fait face à une sédimentation de plus en plus
grandissante, soit 10 % des côtes haïtiennes connaissent la sédimentation12, surtout à
Belle-Anse, Anse-à-Pitre, Les Cayes et Port-Salut. Cette sédimentation détériore l’habitat
des espèces marines comme le homard et les poissons-perroquets. Le littoral haïtien
connaît aussi une urbanisation précaire et chaotique alimentée par l’exode rurale et la
croissance démographique non contrôlée des grandes agglomérations urbaines côtières
comme c’est le cas de Port-au-Prince et du Cap-Haïtien. Les mauvaises occupations des
sols de ces villes engendrent des effets potentiellement néfastes pour les habitats des
espèces marines. Le déversement des déchets plastiques, des eaux ménagères et usées
dans la mer sont des menaces imminentes.

12
https://lenouvelliste.com/article/140546/lenvironnement-marin-haitien-dans-le-viseur-de-reef-check
P a g e | 30

2.5. Considérations critiques

En dépit de l’abondance des recherches réalisées sur ce sujet, nous constatons que
ces études n’abordent pas en profondeur les effets socio-écologiques de la surpêche des
concombres de mer et des poissons-perroquets dans la baie de Caracol. De plus, ces études
ne tiennent pas compte des facteurs socio-économiques qui engendrent la surexploitation
de concombres de mer et des poissons-perroquets. L’une des raisons qui pourraient
engendrer cette floue bibliographique c’est parce qu’il existe très peu de chercheurs et
spécialistes travaillant dans le domaine de la biologie marine et la gestion des écosystèmes
côtiers en Haïti. Afin de combler ce vide, contrairement aux études consultées, ce travail
est appréhendé sous l’angle d’une approche quantitative, qualitative et transdisciplinaire.
Cela nous facilitera la maîtrise du phénomène de surpêche dans ses aspects
multifonctionnels. Notre analyse sera particulièrement basée sur l’approche
écosystémiques des pêches car elle est orientée vers un développement plus durable de la
filière pêche, contrairement à l’approche néoclassique sur les ressources halieutiques qui
met majoritairement l’accent sur les aspects économiques.

Pour conclure ce chapitre, nous venons d’élucider certains points relatifs à la


situation des ressources marines mondiales au niveau mondial. En ce qui concerne Haïti,
nous constatons malheureusement qu’en dépit des bienfaits qu’elles procurent, elles font
face à des menaces majeures comme la surpêche. Certes, la pêche procure des biens et
services socio-économiques cruciaux pour les communautés côtières, mais en raison d’un
manque de contrôle et d’une politique maritime responsable, cette activité menace de
déduire le renouvellement des stocks de poissons et d’autres produits halieutiques. Ces
facteurs devraient être considérés dans le cadre de l’aménagement du territoire, de la
protection des écosystèmes et du développement durable de la filière pêche artisanale.
Mais envisager de telles perspectives exigerait que des études soient effectuées et des
compétences nécessaires soient développées. Dans cette panoplie de problèmes socio-
écologiques, nous nous focaliserons dans le chapitre suivant sur les méthodes d’enquêtes
pouvant nous aider à comprendre la surexploitation de deux espèces marines dites
« épuratrices des écosystèmes côtiers», qui sont les poissons-perroquets et les concombres
de mer dans la baie de Caracol.
P a g e | 31

CHAPITRE III : PRÉSENTATION DE LA ZONE D’ÉTUDE ET DU


CADRE MÉTHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE

Dans ce chapitre, il sera question de présenter le socle méthodologique de notre


travail de recherche, notamment en ce qui concerne les méthodes et techniques de collecte
des données, ainsi que les outils et matériels nécessaires pour la réalisation de ce travail.
La méthode quantitative et l’approche qualitative seront considérées comme notre
principale méthode de collecte de données empiriques.

Juste avant d’aborder la question nous allons présenter la zone d’étude, en mettant
l’accent sur les caractéristiques physiques et écologiques du domaine littoral et sous-
marin ainsi que les dimensions démographiques. Nous jetterons un regard aussi sur le
secteur socio-économique, notamment la filière pêche artisanale qui fait vivre des
centaines de personnes grâce à la richesse des fonds marins au point qu’on le surnomme
« Karakòl Pwason ».

3.1. Présentation de la zone d’étude

La commune de Caracol est avant tout un espace géographique, ce qui veut dire
qu’elle dispose d’une localisation géographique précise, une délimitation spécifique et un
mode d’administration territoriale conforme au fonctionnement des collectivités
territoriales haïtiennes. Elle bénéficie également d’un patrimoine naturel constitué de
zones d’agroforesteries, de mangroves, de récifs coralliens et d’herbiers marins. À cela
s’ajoutent les savanes semi-arides que l’on peut observer dans la quasi-totalité de la
commune. Ici, nous allons décrire à tour de rôle chacun des éléments physiques,
administratifs et écologiques qui caractérisent ce milieu d’étude.

3.1.1. Localisation et délimitation du milieu d’étude

En matière de localisation géographique, le système de coordonnées


géographiques de Caracol correspond à : -72o 00' 05'' W et 19o, 68' 46'' N. la commune de
Caracol est bornée au : Nord par l’Océan Atlantique et au Sud par Trou-du-Nord ; à
l’Ouest par la commune de Limonade ; et enfin, à l’Est par la commune de Terrier Rouge
(Figure 3.1). Elle s’étend sur une superficie totale de 74.91 km2 et se subdivise en deux
sections communales qui sont respectivement : Champin (1ère section) et Glaudine ou
P a g e | 32

Jacquesyl (2ème Section) (Institut Haïtien de Statistique et d’Informatique, 2015). Les


deux sections communales sont délimitées physiquement par la rivière de Trou-du-Nord.
Huit habitations sont plus connues et densément habitées, il s’agit de : Bas Saline,
Mangnon, Lombart, Garde Mombin, Cahesse, Morency, Madras, Chabert et Volant
(PNUD, 2004).

Figure 3.1 : Délimitation territoriale de la commune de Caracol

3.1.2. Caractéristiques du domaine terrestre et côtier

La commune de Caracol est tributaire d’un patrimoine naturel d’une grande


valeur. Ce patrimoine naturel fait de cette zone un espace propice au développement de
l’écotourisme et également à la recherche en biodiversité. Ce pourquoi nous allons faire
la description géomorphologique, hydrogéologique et l’occupation du sol. De plus, on va
décrire la couverture végétale de l’arrière littorale. En dernier lieu, nous allons présenter
les caractéristiques écologiques de la baie. Il faut noter que de nombreuses observations
de terrain nous ont permis d’appréhender la réalité physique et environnementale de la
zone d’étude.
P a g e | 33

3.1.2.1. Description géomorphologique, hydrogéologique et occupation du sol

La structure géomorphologique présente un relief tout à fait particulier avec des


formations géologiques très spécifiques aux zones côtières. Grâce à la topographie, la
géologie de l’espace, le climat, les potentialités du sol et l’hydrogéologie du milieu, nous
découvrons que c’est un espace qui jouit d’une grande potentialité en matière de
ressources naturelles qui nécessitent une gestion durable.

3.1.2.1.1. Topographie

Suite à une analyse spatiale sur le logiciel de cartographie ArcGis, on observe que
la classe de pente de Caracol se situe aux environs de 0 à 2 %. La commune de Caracol
se localise sur un relief doux et de très faible pente : soit 0 à 50 mètres d’altitude. En
outre, Caracol est une zone côtière constituée majoritairement de plaines alluviales qui
sont des parties de la Plaine du Nord qui constitue 46 % de la superficie du Nord-Est.

3.1.2.1.2. Géologie

La commune de Caracol est une zone constituée en majeure partie de formations


d’alluvions (observées notamment dans les berges des rivières), d’aboulies et de
mangroves. Celles-ci, sont estimées à 7 473, 762 ha, soit 74.73 % selon les données du
CNIGS en 2008. La plupart des roches sont sédimentaires et ils datent de l’époque
quaternaire. La couche lithosphérique est aussi formée de roches détritiques (roche formée
de sédiments meubles accumulés, parfois cimentés, provenant de la dégradation d'autres
roches par l'érosion). En outre, on retrouve dans la zone des sols noirs ou bruns, limono-
sableux et des sols argilo limono-sableux, surtout à proximité de la rivière de Trou-du-
Nord. En raison de ces formations géologiques, certaines zones de Caracol possèdent une
potentialité favorable au développement de l’agriculture (PNUD, 2004).

3.1.2.1.3. Hydrogéologie

Le potentiel hydrogéologique de Caracol est relativement important. Elle dispose


d’une grande disponibilité en ressources en eau douce. La rivière de Trou-du-Nord qui
sépare Champin et Glaudine constitue le principal cours d’eau qui est alimenté par les
affluents secondaires actifs (rivière Moro). Au cours de l’année 2018, en raison du
P a g e | 34

changement climatique et la persistance des périodes d’étiage sévère dans la zone, la


rivière de Trou-du-Nord a enregistré un débit annuel faible (USAID-AVANSE, 2018).
Au niveau souterrain, deux catégories de couches hydrogéologiques existent dans la zone
: il y a les aquifères alluviaux à nappe en partie captive semi-perméable et les aquifères
alluviaux à nappes libre13. On doit noter qu’une aquifère est une couche de roches
perméables ou peu perméables qui a la capacité de stocker l’eau souterraine. La
disponibilité en eau de la zone rend favorable le développement de l’agriculture,
notamment dans certaines localités de Chabert, Champin, Fleury et Jacquesyl.

3.1.2.1.4. Occupation de sol

La commune de Caracol dispose d’une occupation de sol diversifiée. Le traitement


d’une image satellite Landsat 8 Oli datant d’Août 2019 et les observations (Figure 3.2) de
terrain nous ont permis de constater qu’il y a plusieurs classes d’occupations de sol. À la
suite d’une classification supervisée sur le logiciel de traitement d’images satellites Envi,
nous avons pu identifier 8 classes d’occupation de sol dans la commune qui sont les
suivantes : zones agroforesteries denses, zones agricoles, zones agricoles peu denses,
mangroves, marais salants, tannes (ou zones salines), urbaine continue et boues. À partir
de la carte présentée ci-dessous le lecteur trouvera de plus amples détails.

Figure 3.2 : Carte décrivant de l’occupation de sol de Caracol en


Août 2019

13
Sources de données : CNIGS, 2008
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3.1.2.2. Couverture végétale des zones de l’arrière-littorale

Relativement, on identifie qu’il y a quatre grandes classes de couvert arbustifs


dominants à Caracol qui sont les suivantes : zone agroforesterie, zone agricole de cultures
mixtes et zones de savanes semi-arides. Dans l’objectif de décrire ces milieux, on va
donner quelques traits caractéristiques de ces milieux.

3.1.2.2.1. Zone d’agroforesterie

Dans les zones de l’arrière littoral, on observe qu’il y a un système agroforesterie


dense qui se caractérise par la présence de certains arbres fruitiers de hautes ou de petites
tiges tels que : Citronnier (Citrus limon), Manguier (Mangifera indica L.), Orangier
(Citrus sinensis , Oranger amer, bigarradier (Citrus aurantium), Fruit à pain (Artocarpus
altilis), Châtaignier (Castanea sativa). Il existe aussi d’autres types d’arbres forestiers tel
que : Chênes (Catalpa longissima). Les principales zones concernées par ce type de
couvert arbustif sont : Chabert, Loumbart, Fleury et Mangnon (Figure 3.3)14.

3.1.2.2.2. Zone agricole de cultures mixtes ou associées

Dans les zones agricoles mixtes, on observe que les cultivateurs développent une
culture associée, notamment dans les zones riveraines de Jacquesyl. D’après certains
qu’on a interrogés à proximité de l’embouchure de la rivière de Trou-du-Nord, ils
expliquent que c’est une zone agricole très dense où l’on développe la culture des
légumineuses, du maïs, des patates et des maniocs, etc. Les gens pratiquent une agriculture
de subsistance qui leur permet de répondre aux besoins sociaux de base.

3.1.2.2.3. Zone de savanes semi-aride

La commune de Caracol présente les caractéristiques d’une zone semi-aride,


dominée par un couvert arbustif formé de plantes capables de résister dans les milieux
secs (plantes xérophiles). En effet, lors des observations de terrain, on a identifié des
formations d’Acacia farnesiana, de Prosophis juliflora, de Consolea picardæ, d’Opuntia
taylorii ; et de Selenicereus pteranthus (Figure 3.4). Les Bayahondes et les Cassiers sont
très dominants dans la commune, notamment à l’entrée de Champin et Jacquesyl.

14
Cette image a été prise dans une zone située sur la route menant à Caracol ( Mangnon).
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Figure 3.3 : Zone agroforesterie dense. © Photo G. Jeff, Août 2019

Figure 3.4 : Savanes semi-arides. © Photo : G. Jeff, Août 2019


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3.1.3. Caractéristiques écologiques de la baie de Caracol

Le littoral de Caracol dispose d’un ensemble de caractéristiques écologiques très


spécifiques. Dans le but de bien assimiler les réalités floristiques et faunistiques, nous
ferons une description des écosystèmes côtiers, ainsi que sur les biens et services
écosystémiques qu’ils fournissent aux communautés locales. Tous les trois (3) principaux
écosystèmes côtiers de la Caraïbe, à savoir : les récifs coralliens, les mangroves et les
herbiers marins (phanérogames benthiques) sont présents dans la baie de Caracol (Figure
3.5). Ils constituent non seulement une richesse écologique mais aussi une source
économique qui fait vivre une grande partie de la population locale. Une récente étude,
publiée en 2016 par The Nature Conservancy (TNC) intitulée « Inventaire écologique de
référence pour le Parc National des 3 Baies, Haïti » donnait en détail une aperçue
biologique et écologique de ces trois écosystèmes côtiers et des habitats dans la baie de
Caracol.

Figure 3.5 : Image satellite de la baie de Caracol en Juin 2019


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3.1.3.1. Les récifs coralliens

La baie de Caracol dispose d’une barrière de récifs coralliens de 901 ha, soit 20
km2 (FoProBiM, 2013; TNC, 2016). Ces récifs constituent un habitat pour de nombreuses
espèces benthiques qui se localisent plus particulièrement dans les avant-récifs et dans les
crêtes des récifs. Lors de l’inventaire de TNC, 215 espèces marines benthiques ont été
identifiées dans la baie de Caracol et 25 autres espèces en arrière du récif (TNC, 2016).
Les récifs coralliens constituent une barrière naturelle qui protège les habitants de Caracol
contre les cyclones et les tempêtes. Ils constituent aussi une niche écologique pour les
espèces marines côtières (Figure 3.6). D’autant plus, ils assurent une fonction économique
de 90 000 000 dollars à la communauté côtière (FoProBiM, 2013). Toutefois, en dépit de
sa valeur socio-écologique, cet écosystème côtier est fortement menacé en raison des
pratiques de pêche illégale. Une récente plongée sous-marine réalisée en Août 2019, avec
l’équipe de Reef Check Haïti, nous a permis de constater effectivement que la grande
majorité des récifs sont dégradés (Figure 3.7). Un signe qui prouve que la surpêche des
espèces de poissons herbivores est évidente au niveau de cet écosystème côtier.

Figure 3.7 : Récifs coralliens dégradés observés Figure 3.6 : Un banc de poissons-perroquets
dans la baie de Caracol. © Photo : Reef Check observés dans la baie de Caracol. © Photo:
Haïti, Août 2019 Reef Check Haïti, Août 2019
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3.1.3.2. L’écosystème de mangroves

L’écosystème de mangroves de la baie de Caracol couvre une superficie de 4 030


ha, c’est la deuxième plus grande couverture de mangroves en Haïti, après celle de
l’Estère (TNC, 2016). On observe qu’il y a quatre types de palétuviers. Au front de mer
il y a le palétuvier rouge (Rhizophora mangle) et le palétuvier noir (Avicennia germinans),
(Figure 3.8)15.

Figure 3.8 : Les peuplements de palétuviers périphériques observés à Caracol.


©Photo : G. Jeff, Août 2019

15
Dans la figure 3.8, en haut de gauche à droite, des palétuviers noirs (Avicennia germinans). En
bas, de gauche à droite les palétuviers rouges (Rhizophora mangle) qui occupent le front de mer.
Ces milieux constituent des espaces de pêche où les gens y pêchent des petits crabes de
mangroves, des cirriques et des poissons comme : vivaneaux, tilapia et molles.
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En arrière du rivage ou à proximité de l’estran, on observe le palétuvier blanc


(Cornocapus Erectus) (Figure 3.9) et le palétuvier gris (Laguncularia racemosa) (Figure
3.10).

Figure 3.10 : Palétuvier gris (Laguncularia Figure 3.9 : Palétuvier blanc (Cornocapus
racemosa) observé dans la baie de Caracol. Erectus) observé dans la baie de Caracol.
©Photo : G. Jeff, Février 2021 ©Photo : G. Jeff, Février 2021

La forêt de mangrove fournit des services écosystémiques très précieux aux


habitants de la zone depuis plusieurs années. D’abord, elle est une source de frayère et
nourricière pour les espèces de poissons juvéniles. Ensuite, elle sert de barrière naturelle
qui agit comme brise-vent et qui protège les zones de l’arrière-littorale lors des périodes
cycloniques. Enfin, la forêt de mangrove représente un territoire de pêche pour les
pêcheurs artisans. Par exemple, il y a plusieurs espèces, comme les crabes violonistes et
les petits crabes de mangroves qui font leurs terriers sous les racines des arbres ; des
espèces de poissons provenant d’eau douce, comme : Tilapia, Molles et brochets. Selon
un pêcheur interrogé, il y avait autrefois beaucoup plus de poissons et de crabes dans la
mangrove et plus de personnes, notamment de femmes qui venaient y pêcher. La valeur
des services écosystémiques de la mangrove est évaluée à 3,156 000,000 dollars
(FoProBiM, 2013). Actuellement, cet écosystème est menacé à cause de son abattage pour
la production de bois de combustibles.
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3.1.3.3. Les herbiers marins

Les herbiers marins de la baie de Caracol sont des habitats exceptionnels qui
abritent de nombreuses espèces marines, dont : les poissons herbivores, les lamantins, les
langoustes, les crabes et les échinodermes. Les herbiers phanérogames marins sont des
habitats privilégiés pour les espèces de poissons herbivores et les holothuries. À l’échelle
de l’Aire Protégée des ressources naturelles gérées des 3 Baies (AP3B), la baie de Caracol
fait partie des sites où l’on a observé une grande superficie d’herbiers marins (Figure
3.11).

Figure 3.11 : Lits d’herbiers à tortue (Thalassia testudinum) identifiés à Caracol.


©Photo : G. Jeff, Août 2019

Selon FoProBiM (2013), ces herbes marines couvrent une superficie de 7 100 ha
et ils sont majoritairement formés d’herbier Tortue (Thalassia testudinum). Étant en très
excellents états, les experts de TNC ont inventorié 45 espèces d’invertébrés marins dans
le lit des herbiers marins de la baie de Caracol (TNC, 2016), sur l’ensemble des 86 espèces
inventoriées dans l’AP3B. Pour l’instant nous ne disposons pas encore à combien de
dollars américains sont estimés les services écosystémiques des herbiers marins de la baie
de Caracol.
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3.1.4. Caractéristiques démographiques et socio-économiques

À côté des ressources naturelles dont dispose la commune de Caracol, elle est une
zone en pleine dynamique démographique et socio-économique, surtout depuis
l’implantation du Parc Industriel en 2012. Dans un premier temps nous allons présenter
les aspects liés aux nombres de ménages, la densité, le ratio homme et femmes, etc. En
second lieu, nous aborderons les principales activités socio-économiques locales les plus
en vogue actuellement.

L’analyse des effets des activités anthropiques sur les ressources halieutiques
nécessite d’avoir une estimation de la population qui habite cet espace. Et quelle
proportion qui exploite les ressources naturelles à une période donnée. Nous allons donc,
nous appuyer en partie sur les estimations démographiques les plus récentes, soit celles
de : 2009, 2012, et de 2015 qui ont été obtenues à partir des dernières estimations de la
population et de l’habitat de l’IHSI. Le Tableau (3.1) nous montre que Caracol connaît
une dynamique démographique relativement lente entre 2009 et 2015, soit un effectif total
de 7 015 à 7 714 habitants. On estime qu’entre 2009 et 2012 la commune avait un taux de
croissance moyen annuel de 1,4 % (Golder Associés et UTE, 2015). Nous constatons qu’il
y a un fort pourcentage de personnes âgées de 18 ans et plus, qui étaient respectivement :
54 % (en 2009), 59 % (en 2012) et 59 % (en 2015) (IHSI, 2009, 2012, 2015). C’est aussi
une population majoritairement rurale, soit 4 440 ruraux contre 3 274 urbains en 2015
(IHSI, 2015). Selon les estimations démographiques de l’IHSI, en tant que zone rurale,
c’est la section communale de Glaudine ou Jacquesyl qui dispose de plus d’habitants.
Pour le milieu urbain, c’est le centre-ville de Caracol qui accuse le plus grand nombre
d’habitants, soit 2 6 90 en 2009 à 3 274 Citadins en 2015.

Tableau 3.1 : Population totale, pourcentage de 18 ans et plus en 2009, 2012 et en 2015

Population totale % de 18 ans et plus

2009 2012 2015 2009 2012 2015

7 015 7 362 7 714 54 % 59 % 59 %

Source de données : IHSI, 2009, 2012, 2015


P a g e | 43

Il nous paraît nécessaire de jeter un regard sur l’évolution du nombre de ménages


et la densité de la population de Caracol entre 2009, 2012 et 2015 (Tableau 3.2). En 2009,
on estimait que la commune avait 1 713 ménages, avec une densité de 94 hab/km2 (IHSI,
2009). Six ans plus tard, soit en 2015, cela est passé de 1 889 ménages, avec 103 hab.
/km2. Nous avons vite compris qu’au fil de ces années le nombre de ménages et la densité
ont augmenté lentement, selon le rythme de la croissance démographique.

En tenant compte du contexte actuel, il faut être très prudent vis-à-vis de ces
estimations, car de 2016 à nos jours de nombreux facteurs doivent être considérés. Par
exemple, il y a une augmentation du nombre d’habitants due à la croissance naturelle et
la migration. D’ailleurs, l’implantation du Parc Industriel de Caracol a sans doute des
effets migratoires sur la population de Caracol. Depuis sa création, des gens viennent
s’installer pour y travailler en provenant un peu partout à travers le pays. Dans la
communauté de pêcheurs il y a aussi une nette augmentation chaque année, car des gens
viennent de toute la région du Nord pour s’installer temporairement ou définitivement.
Ces flux migratoires influent de manière non négligeable la démographie de la zone. En
bref, le tableau et graphique ci-après va donner une idée précise sur la dynamique
démographique en tenant compte des aspects sociodémographiques et spatiaux.

Tableau 3.2 : Ménages et densité en 2009, 2012 et 2015

Milieu de Ménages Densité (hab /km2)


résidence
2009 2012 2015 2009 2012 2015

Urbain 680 753 828 12 810 14 186 103

Rural 1 033 1 047 1 061 58 59 15 590

Nbre de 1 713 1 800 1 889 94 98 103


ménages et
densité total
Source de données : IHSI, 2009, 2012, 2015
P a g e | 44

3.1.5. Les principales activités socio-économiques

À Caracol on y trouve tous les secteurs d’activités économiques (primaire,


secondaire et tertiaire) bien que certains sont plus développés que d’autres. Nos
recherches bibliographiques et les observations sur le terrain révèlent que les activités
économiques locales sont très développées. Le secteur secondaire et tertiaire regroupe
l’ensemble des activités de transformation des matières premières (industrie) et celui des
services marchands commencent à se développer depuis l’installation du Parc Industriel ;
autrement dit, le développement du commerce interne, la création de nouveaux restaurants
et des lieux d’hébergement s’installent au fur et à mesure. Du moins, on doit préciser que
les services non marchands, tels que : l’enseignement, l’accès aux soins communautaires
et à l’eau potable, restent très limités dans la zone. L’administration locale peine de
répondre aux besoins croissants de la population en matière de services. Bref, nous
n’allons pas toutefois nous éterniser sur ces points, mais plutôt on va décrire les
principales sources de revenus locales des habitants, à savoir : la pêche artisanale,
l’agriculture, l’élevage, le commerce, les marais salants et le Parc Industriel de Caracol.

3.1.5.1. L’agriculture et l’élevage

L’espace Caracolois est tributaire d’une grande potentialité en matière


d’agriculture. Certes, du point de vue pédologique, certaines zones du rivage ne sont pas
favorables au développement des cultures agricoles, mais les zones de l’arrière-pays
bénéficient toutefois de sols fertiles. Habituellement, les gens élèvent des caprins, des
bovins et des volailles. Les paysans tentent de faire des cultures mixtes ou associées : de
maïs, de pois congo, de haricots et de maniocs doux. Ils plantent aussi des patates douces,
des giraumonts, et récoltent le plus souvent des bananes dans les terres situées surtout à
proximité de la rivière de Trou-du-Nord. La production agricole est en baisse constante,
car, les grands planteurs sont expropriés de leurs lopins de terre pour faciliter la création
du Parc Industriel. La chute de la production agricole est également due à cause de la
sécheresse chronique qui touchait le Nord-Est d’Haïti au début de l’année 2019,
notamment durant les mois de Janvier à Avril. La plupart des cultures étaient rachitiques,
et les bétails mouraient énormément.
P a g e | 45

3.1.5.2. Le commerce

La vente des produits agroalimentaires, tels que : poulets de chair, carottes,


concombres, harengs, salamis, spaghettis, choux, œufs, produits gazeux et alcoolisés
constituent l’essentiel du commerce interne à Caracol. Ces produits proviennent
principalement de la République Dominicaine, et ce sont les femmes qui pratiquent
majoritairement ce commerce. Il n’y a pas de marchés public à Caracol, les marchands
vendent leurs produits chez eux habituellement dans des petites boutiques. En 2007, le
secteur du commerce couvrait 23 % des revenus locaux (LGL, 2007). À ce jour, ce
pourcentage est certainement plus élevé, car l’accès à l’électricité 24/24 et l’installation
du PIC à favoriser l’émergence de nouvelles formes de commerce, notamment à Champin,
tels que : la restauration, la vente des produits manufacturiers de première nécessité,
produits pharmaceutiques, etc.

3.1.5.3. Les marais salants

La production du sel figure parmi les plus anciennes sources d’activités socio-
économiques à Caracol. C’est une activité qui est pratiquée généralement par des femmes
(Figure 3.12). Elles font la récolte, en échange d’une part de 20 % ou 40 % du sel ramassé.
Les bassins de sel bordent les arrières de la mangrove du littoral partant du village de
pêcheurs de Madras jusqu'à Jacquesyl (plus précisément à Fossé une localité située dans
les limites de la commune de Terrier Rouge). En 2012, on dénombrait 507 unités de
marais salants dans la commune de Caracol (AIA, 2012). Une récente étude montre qu’il
existe 797 bassins de sel (CATEDEL, 2018). On retrouve la majorité des bassins de sel
dans la section communale de Jacquesyl. Dépendamment de la période, le coût d’un sac
de sel varie de 400 gourdes (en période d’abondance) à 600 gourdes (en période de rareté).
La production du sel se développe de manière rudimentaire et non hygiénique. Des
mesures de modernisations et d’accompagnements doivent être impérativement prises
afin d’améliorer la productivité de ce secteur potentiel.
P a g e | 46

Figure 3.12 : Ramassage de sel dans un marais salant par des femmes. ©Photo: G. Jeff, Juillet
2018

3.2. Méthodologie de collecte des données empiriques

L’étude est appréhendée sous l’angle d’une méthodologie mixte, c’est-dire


qualitative et quantitative. Cette approche nous a permis de mobiliser les bienfaits de la
méthode quantitative et de l’approche qualitative. D’une part, on a utilisé l’approche
qualitative pour l’observation participante. De plus, cette approche nous a aussi permis de
réaliser des focus groupe avec les pêcheurs ayant participé aux GSPP et des entretiens
semi-directifs auprès de certains acteurs clés de la filière pêche soient : un Colporteur de
Concombres de mer, un membre de la FoProBiM, le Maire principal de Caracol, le
Président de la Coopérative des Pêcheurs de Caracol (COOPECA) (voir Annexe 6).
D’autre part, on a utilisé la méthode quantitative pour le montage d’une base de données
biométriques (Fishbase) sur les espèces marines qu’on a collectées, ce qui va nous
permettre d’évaluer sous base d’un échantillon l’estimation cumulée des captures sur une
période donnée.
P a g e | 47

3.2.1. Brève présentation du projet GSPP et sa méthodologie

Dans le cadre de cette étude, il nous paraît évident de faire le point sur le Projet
Pilote d’Échange des Équipements de Pêche, considéré comme une activité alternative à
la surpêche notamment dans la lutte contre l’utilisation des nasses et sennes illégales
utilisés dans la baie de Caracol.

2.1.1.1. Contexte du Projet d’Échange des Équipements de Pêche

Le Projet Pilote d’Échange des Équipements de Pêche ou Gear Swap Pilote Projet
(GSPP en anglais) fut financé par l’USAID dans le cadre du Programme Caribéen de
Conservation de la Biodiversité Marine (CMBP en anglais). Ce projet a été développé
sous l’égide de The Nature Conservancy (TNC) en partenariat avec la Fondation pour la
Protection de la Biodiversité Marine (FoProBiM) et l’Initiative pour l’Environnement et
le Développement Integré en Haïti (IEDIH), dans le but de promouvoir des pratiques de
pêches artisanales durables, d’améliorer la densité et la diversité des espèces dans l’Aire
Protégée des Ressources Naturelles Gérées des 3 Baies (AP3B).

2.1.1.2. Méthodologie de mise en œuvre du GSPP

La consultante du projet Madame Caroline Bissada, et nous autres étudiants


stagiaires avons travaillé avec les pêcheurs artisans qui pratiquaient la pêche avec des
nasses et des sennes afin de remplacer les nasses à petites mailles par des nasses à grandes
mailles. Cette demarche allait augmenter la taille et le poids des poissons capturés en
réduisant la surpêche qui entraine la capture d’espèces de poissons juvéniles. Les
participants devraient signer un protocole d’engagement envers le GSPP dans lequel ils
acceptent d’échanger leurs nasses à mailles restreintes pour des nasses de grands
maillages qui leur permettraient d’attraper des poissons de tailles matures. En parallèle,
les pêcheurs devraient collaborer pour les suivis de leurs débarquements. Pour compenser
les pertes qui pourraient subvenir au cours de l’utilisation des engins avec le nouvel
équipement, une rémunération mensuelle les a été versée. De plus, ils avaient proposé un
membre de leur famille pour travailler dans une usine de transformation de fruits à pain.
P a g e | 48

2.1.1.3. Protocole de collecte des données biométriques du GSPP

Le protocole de collecte des données biométriques (quantitative) mis en place dans


le projet a été considéré pour l’échantillonnage des spécimens de poissons-perroquets et
de concombre de mer inventoriés. Par exemple, avant de contrôler le poids de la prise, on
détermine la masse (kg) du seau vide en utilisant l’échelle à poulie (128 kg par 2 kg).
Ensuite, la prise est placée dans le seau afin d’évaluer sa masse unitaire. La formule
suivante nous permet de déterminer la masse totale de la prise (kg) : masse du seau
contenant la prise -masse du seau vide.

2.1.1.3.1. Pour les poissons provenant des nasses :


 le poisson est identifié par son espèce ou au moins à la famille à laquelle il
appartient, puis sa longueur est consignée ;
 la masse (kg) de chaque poisson est obtenue et notée dans une ardoise ;
 annotation de l’heure de début et fin du voyage de pêche;
 annotation du temps de mouillage (nombre de jours pendant lesquels les nasses
sont restées dans l’eau);
 annotation du nombre de pêcheurs ayant effectué le voyage de pêche;
 obtention des pêcheurs une description succincte de la zone où les nasses ont été
placées (nom de la zone, type de substrat, profondeur, etc.).

2.1.1.3.2. Pour les poissons capturés dans les sennes :


 enlèvement des laisses de mer dans la prise ;
 mesure de la masse (kg) des seaux vides ;
 distribution de la prise de manière équitable dans les seaux vides ;
 distribution par hasard des poissons dans les seaux ;
 mesure de la masse de chaque seau de poisson, puis soustraction de la masse de
chaque seau vide ;
 compilation des masses de tous les seaux contenant les poissons (masse s1 + masse
s2+ masse s3 + … = masse totale (kg);
 choix au hasard d’un seau de poisson en vue d’échantillonner la prise en détail;
 prise et annotation du poids et de la longueur des poissons.
P a g e | 49

3.2.2. Population ciblée

Dans le cadre de cette étude, on a ciblé une population mixte. D’un côté, on
s’intéressera d’étudier les espèces de poissons-perroquets et de concombres de mer. De
l’autre côté, on étudiera la communauté de pêcheurs de la baie de Caracol, en particulier
ceux qui pratiquent la pêche aux sennes et aux nasses. Ces pêcheurs pratiquent des
techniques de pêche qui constituent un maillon essentiel dans la compréhension du
phénomène de la surpêche.

3.2.3. Recherche bibliographique

Pour réaliser cette étude, à part que des recherches bibliographiques effectuées on
a également puisé d’autres données disponibles dans des banques et sur les portails
scientifiques en ligne comme : Revue Caribéenne, Google Schoolar, Erudit,
Géoconfluence, Nature, Cairn info, etc.

3.2.4. Techniques d’enquête de recherche

Différentes techniques de recherche ont été mobilisées pour collectes les données
primaires (issues de l’enquête biométrique et sociale). Pour cela, on a mené des
observations participante, des focus groupe et des recherches bibliographiques.

3.2.4.1. Observation participante

L’observation participante constitue une phase exploratoire très nécessaire dans la


compréhension de secteur de la pêche artisanale dans la baie de Caracol. Par exemple, en
tant que stagiaire au GSPP, nous sommes allés à la pêche avec des pêcheurs en se joignant
à eux dans leur tâche, pour pouvoir identifier leurs comportements, leurs techniques, leur
zone de pêche, les espèces qu’ils capturent, etc.

3.2.4.2. Focus groupe

Les entretiens de groupe auprès des pêcheurs de concombres de mer et du GSPP


ont été priorisés parce qu’il : « s’agit d’une méthode qualitative d’entretien visant à
collecter des informations variées sur un sujet, dans l’objectif d’extraire des perceptions
et comportements sociaux; et de favoriser l’émergence de nouvelles opinions.» (Lugen,
P a g e | 50

2015 : p.22). En d’autres termes, on a utilisé cette technique de collecte des données parce
que tous les sujets sont liés à une même expérience. Autrement dit, les entretiens de
groupes ont été réalisés sur l’embarcation des pêcheurs de concombres de mer et dans le
village de pêcheurs de Madras avec les participants du GSPP (Figure 5.1). C’étaient des
questions ouvertes. Au total, une heure a été consacrée pour recueillir les propos des
individus. Cette démarche est très efficace dans le cadre des investigations sociales, car
elle nous met au cœur de l’activité de pêche du début jusqu'à la fin. Ainsi, nous avons pu
déterminer l’effort de pêche, la qualité des techniques de pêche utilisées pour capturer les
poissons-perroquets et les concombres de mer.

Bref, puisque notre but a été d’analyser les perceptions collectives des pêcheurs,
le focus groupe a été l’une des techniques favorables, qui permet de comprendre la
situation et les priorités des populations. À noter que deux catégories de focus groupes
ont été réalisées : on a effectué un focus groupe avec 6 pêcheurs de sennes (voir Annexe
2) qui capturent habituellement les espèces de poissons-perroquets et de concombres de
mer ; un autre avec 9 pêcheurs du GSPP.

3.2.4.3. Enquête par entretiens semi-directifs

L’enquête par entretiens semi-directifs aux questions ouvertes a été priorisé dans
le but d’analyser les perceptions des principaux acteurs clés qui interviennent soient dans
l’exploitation ou la gestion des ressources halieutiques dans la baie de Caracol.

3.2.5. Instruments de collecte des données empiriques

 Observation directe (participante)


 Montage d’une Fishbase (pour l’enquête quantitative)
 Guide d’entretien (pour l’enquête qualitative ou focus groupes)
 Appareil de photo
 Récepteurs de GPS
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3.2.6. Description des matériels de collecte des données biométriques

Étant donné qu’une partie des données utilisées est issue de la collecte réalisée
dans le projet, nous pensons qu’il est nécessaire aussi de mentionner les matériels utilisés
pour collecter les données biométriques des concombres de mer dans la baie de Caracol :

 trois seaux de 5 gallons (5 ou 6 seaux pour les protocoles de sennes) ;


 1 balance à poulie 128 kg par 2 kg ;
 1 balance à crochet pendante pour poissons ;
 1 pied à coulisse ou un petit ruban à mesure ;
 1 petit seau à utiliser en conjonction avec la balance à poulie ;
 des ardoises réalisées à partir de perspex, affinées avec du papier de verre ;
 des marqueurs permanent de type sharpie et des crayons.

3.2.7. Traitement et analyse des données

Les données cartographiques ont été traitées à travers le logiciel ArcGIS. On a procédé à
une analyse statistique pour les données quantitatives biométriques sur Excel. Puis, on a
fait une analyse de contenu pour les données qualitatives. Il faut préciser que les méthodes
d’analyse de contenu reposent sur des techniques assez précises.
P a g e | 52

CHAPITRE IV : ANALYSE DES IMPACTS DE LA SURPÊCHE


SUR LES CONCOMBRES DE MER ET LES POISSONS-
PERROQUETS

4.1. Introduction

Généralement, on parle de surpêche lorsque les stocks d’une ressource halieutique


sont exploités au-dessous du niveau pouvant produire un rendement maximal durable.
Dans la baie de Caracol, ce phénomène menace les ressources halieutiques, notamment
les stocks d’holothuries et les scaridés. Sur ce, nous nous demandons en quoi la surpêche
est une menace majeure pour la baie de Caracol ? Nous cherchons à comprendre en quoi
consiste la situation de la pêche artisanale dans la baie de Caracol, notamment la pêche
des concombres de mer et des poissons-perroquets? Nous aimerions savoir également en
quoi consistent la taille, le poids et la biomasse des concombres de mer et des poissons-
perroquets inventoriés?

En considérant la période de suivi des dimensions biologiques chez les poissons-


perroquets de Juillet à Août 2018, et de Juillet à Août 2019 pour les concombres de mer,
nous avons pu découvrir les impacts de la surpêche sur ces espèces. Notre recherche a été
approfondie au niveau du récif avec l’équipe de Reef Check Haïti et surtout grâce à l’aide
du fondateur, Docteur Gregor HODGSON, qui nous a fait découvrir la gravité de la
surpêche lors d’une série de plongées sous-marines effectuées dans différents sites des
récifs frangeants en Août 2019 à Caracol.

Comme nous l’avions précisé au départ dans ce chapitre nous allons pencher
particulièrement sur le traitement, l’interprétation et l’analyse des données biométriques
qui ont été ollectées durant la période de stage (Juillet et Août 2018), tout en adaptant ce
même protocole de recherche pour les concombres de mer (Juillet et Août 2019). Les
résultats de l’enquête biométrique révèlent clairement les principaux effets socio-
écologiques engendrés par la surpêche dans la baie de Caracol. La raison d’être de cette
recherche est d’analyser la situation actuelle de la pêche artisanale dans la baie de Caracol.
P a g e | 53

4.2. Situation de la pêche artisanale dans la baie de Caracol

La pêche artisanale joue un rôle important dans l’économie locale depuis plus
d’une cinquantaine d’années. En dehors des autres activités socio-économiques, c’est la
première activité qui permet à la majorité des habitants de subvenir aux besoins familiaux
de base. Elle se pratique de manière très traditionnelle et archaïque. Les prises sont
souvent limitées aux zones littorales et infralittorales, en particulier dans les récifs
coralliens. Des dizaines de milliers de personnes viennent de différentes communes de la
région du Nord pour pêcher dans la baie de Caracol ou pour acheter des poissons. En
2007, on estimait que le secteur de la pêche a constitué 39 % de la source de revenus de
la population de Caracol, avec un revenu moyen de 1 500 gourdes par jour. De plus, le
taux de chômage était très élevé dans la majorité des familles (LGL, 2007). Le plus
souvent c’était une seule personne qui était génératrice de revenus. Cela nous a amené à
comprendre que la pêche artisanale en tant qu’une activité socio-économique importante,
n’arrive pas à couvrir les besoins d’emplois de la population. Cependant, en dépit de tout,
elle assure la survie de beaucoup de ménages.

Habituellement, les pêcheurs exploitent les fonds vaseux, sableux, rocheux, et le


large des vasières maritimes. Mais, très peu de pêcheurs vont pêcher dans les hauts fonds
de l’arrière-récif qui nécessitent une certaine expérience et des engins de pêche adaptés.
En dehors de cette petite nuance, nous avions remarqué que les pêcheurs utilisaient une
grande typologie d’engins et de techniques de pêche dont les plus populaires sont
expliquées et présentées ci-dessous (Figure 4.1). Il s’agit notamment de la pêche à la
senne, la pêche aux filets, la pêche aux nasses, la pêche à la ligne, la pêche en plongée
(avec des compresseurs et à l’arbalète traditionnelle).

4.2.1. La pêche à la senne

Les sennes sont des engins de pêche très courants dans la baie de Caracol. C’est
probablement l’engin le plus utilisé depuis plusieurs décennies. La pêche à la senne est
réalisée sur des canots allant de 15 jusqu'à 20 pieds, par 7 ou 10 pêcheurs. Cet engin
dispose de deux extrémités dans lesquelles on attache une corde (Figure 4.1). Lorsque le
maître senneur identifie ou connaît un endroit où il y a un banc de poissons, il ordonne
P a g e | 54

aux autres pêcheurs de tirer la senne qui exerce un mouvement d’encerclement pour
fermer les bancs de poissons. Le temps pris pour tirer une senne est de 4 à 5 heures de
temps. À Caracol, une longue senne peut mesurer au moins 100 à 200 m, parfois jusqu'à
plus de 600 m. Le plus souvent la taille des mailles fait moins d’un centimètre de diamètre.
La plupart des pêcheurs utilisent des morceaux de briques qu’ils placent aux alentours de
la senne afin qu’elle puisse plonger sous l’eau très rapidement. D’autres préfèrent des
morceaux d’éponges comme bouée flottante. La prise est largement constituée de
poissons-perroquets, localement appelés « Boutou » et d’autres types de poissons
herbivores, des crevettes, des harengs et des millets égarés à proximité des rives. Les fonds
sableux, les lits d’herbiers marins, ainsi que les zones qui bordent la mangrove sont des
zones de pêche idéale pour les pêcheurs de sennes. Du moins, il s’agit de mentionner que
certains pêcheurs de senne développent une pratique de pêche destructrice au niveau du
récif. Cela consiste à bouleverser l’eau (en amont sur les crêtes récifales) afin d’insister
les poissons terrifiés à prendre la fuite, et une fois descendu (en aval de la barrière récifale)
ils sont pris au piège dans la senne.

Figure 4.1 : Réparation de senne par un pêcheur sur la plage de Caracol. ©Photo: G. Jeff,
Août 2019
P a g e | 55

4.2.2. Pêche aux filets

Figure 4.2 : Des pêcheurs en train de confectionner un filet de pêche, sous


l’ombre des mangroves de la plage de Caracol. © Photo: G. Jeff, Août 2019

La pêche aux filets est une autre technique de pêche artisanale pratiquée à Caracol.
Généralement, les pêcheurs exercent cette pêche sur des petits canots très plats qu’on
appelle « Koralen » (corallin). Ces embarcations de pêche sont pratiquement utilisées
pour la pêche aux filets. Les filets couramment utilisés sont les filets trémails de très
petites mailles que les pêcheurs laissent dans l’eau durant 24 heures et parfois entre 18 à
20 heures, selon un pêcheur interrogé (Figure 4.2). Le nombre de pêcheurs pratiquant
cette activité est de 2 à 4, mais si le filet est long et que l’embarcation est assez grande
l’équipage peut avoir jusqu'à 6 membres, mais c’est un fait rare. Les filets sont mis à l’eau
habituellement le soir, puis ils sont relevés le jour de très tôt. D’après certains pêcheurs
de filets interrogés, cet engin est utilisé surtout pour pêcher les harengs, les sardines et les
millets. Une pêche aux filets réussie peut permettre à un pêcheur de remplir 4 à 5 et jusqu'à
10 grandes glacières (ou igloo) de sardines. Actuellement, un grand filet peut coûter
environ 25 à 30 000 gourdes pour l’achat des matériels de fabrication. Le canot corallin
quant à lui peut coûter 30 000 à 35 000 gourdes.
P a g e | 56

4.2.3. Pêche aux nasses

La pêche aux nasses en forme de Z est une technique de pêche traditionnelle très
rependue dans la Caraïbe depuis à l’époque des Indiens (Guillou et Lagin, 1997). En Haïti,
particulièrement à Caracol, plusieurs de ces engins sont fabriqués avec des roseaux et sont
de très petite taille (Figure 4.3)16. D’après Desse (2004), cet engin de pêche permet de
capturer des espèces marines démersales côtières qui sont plus faciles à capturer du rivage
et au niveau des récifs coralliens. Effectivement, lors de plusieurs expériences de pêche
qu’on a réalisées avec un pêcheur de renom dans la zone, M. Jackson PIERRE, on
constatait que la prise était continuellement constituée d’espèces récifales, telles que :
poissons-perroquets, langoustes, murène, mérous, crabes de mer et de requins de récif.

Figure 4.3 : Typologie des nasses couramment utilisés dans la baie de Caracol. © Photo:
G Jeff, Août 2018

Deux catégories de nasses de mailles différentes sont couramment utilisées dans


la baie de Caracol : premièrement, il y a les nasses à petites mailles qui sont les plus
utilisées ; et deuxièmement, les nasses à grandes mailles. Les nasses à petites mailles sont
classées en : 10, 11, 12, 15, 17 et 23. Il faut préciser qu’elles sont toutes de petites mailles
même si les chiffres sont élevés. Elles sont conçues pour capturer des petits poissons.
C’est pourquoi on les place particulièrement au niveau du lagon récifal, dans les zones de

16
À gauche, une nasse à petites mailles et à droite les nouvelles nasses à grandes maillages
proposées dans le Gear Swap Project Pilot.
P a g e | 57

boue près de la mangrove et dans les lits d’herbiers marins pour prendre des petites
langoustes, des murènes et des crabes cirriques. Ces types de nasses sont placés dans l’eau
avec des bouées faites en gallons de plastiques ou à l’aveuglette. Elles sont callées pendant
3 à 4 jours. Les nasses sont levées habituellement très tôt, soit vers 6 heures du matin.
L’utilisation des nasses petites mailles est très répandue dans la baie de Caracol.
D’ailleurs, un pêcheur nous a dit qu’il utilise ces petites nasses pour répondre aux besoins
quotidiens de sa famille. Malheureusement, l’utilisation de cet engin de pêche va à
l’encontre des principes de conservation des ressources halieutiques, car les mailles des
petites nasses ne laissent pas échapper les espèces de poissons juvéniles, voire même les
alevins.

En ce qui concerne les nasses à grandes mailles, elles sont classées en : 17, 22, 23
et 24, etc. Celles-ci sont placées dans les eaux de grandes profondeurs, soit entre 100 à
300 brasses, en arrière du récif dans les fonds rocheux, là où il y a des grandes espèces
pélagiques. On observe que les pêcheurs capturent généralement de grosses langoustes,
des requins, des thazards, des barracudas, des bonites, des Carangues, des Gorettes, ect.
Un pêcheur qui en a les moyens financiers peut posséder une trentaine de nasses de 21
et/ou 22. Cependant, très peu de pêcheurs de Caracol utilisent ces nasses car elles sont
trop couteuses. La plupart des pêcheurs utilisent au contraire les nasses à petites mailles
qui sont plus adaptées pour pêcher les espèces juvéniles et immatures. Comme appâts, les
pêcheurs à nasses utilisent des morceaux de mangue, d’oranges, de fruit à pain (pour
attirer les herbivores) ; et des morceaux d’oursins de mer, d’étoiles de mer pour attirer les
poissons carnivores. A noter que ce ne sont pas les chiffres qui définissent la largeur et la
grosseur des nasses, mais elles sont classées en fonctions de leurs maillages.

4.2.4. Pêche à la ligne

Dans la baie de Caracol, on pratique aussi la pêche à la ligne. Elle est pratiquée
par une ou deux personnes. D’après un grand pêcheur qui pratique cette activité depuis
30 ans, en l’occurrence Monsieur Clothère (69 ans), le nombre de pêcheurs spécialisé
dans la pêche à la ligne est insignifiant par comparaison aux autres catégories. Ils sont
toutefois très expérimentés dans ce domaine qui les rapporte habituellement des revenus
très satisfaisants. Toute une panoplie de variétés de pêche à la ligne est pratiquée (Figure
P a g e | 58

4.4). La plupart d’entre elles sont communes aux autres pêcheries d’Haïti et de la Caraïbe.
Par exemple, on observe que la pêche à la traine est pratiquée dans les fonds rocheux des
récifs, notamment dans la zone appelée Bati. Ce type de pêche se réalise avec ligne en
nylon de 400 mètres qui dispose d’un seul hameçon. Cette technique de pêche est très
rentable pour les pêcheurs du point de vue économique, car un seul poisson capturé peut
être vendu jusqu'à 2 à 4 mille gourdes ou plus. Les espèces ciblées sont les : mérous,
vivanaux, dorades, béquines, bonites, thazard, requins, etc.

Dans les grandes profondeurs, en arrière des récifs coralliens, les pêcheurs
utilisent des lignes qui disposent de 3 à 4 hameçons qu’ils appellent localement «lignes
de grands fonds», ayant jusqu'à 500 mètres de longueur dans laquelle ils attachent un bout
de fer de 1 kilo qui permet à la ligne et l’appât (constitués de poissons vivants) d’être
stable sous l’eau. Au moment de la pêche, les pêcheurs filent jusqu'à 300 brasses de ligne
sous l’eau et laissent 200 brasses enroulées dans un gallon en plastique. Ils utilisent
également des lignes 60 et 70 «ligne d’eaux peu profondes», ayant 3 hameçons pour attirer
d’autres grands pélagiques. Par ailleurs, il y a aussi des lignes 35 et 50 couramment
appelées «ligne d’eaux peu profondes» utilisées dans les zones de l’arrière récif. Ces lignes
disposent de 300 mètres de longueur et de deux hameçons de numéro 9. En dernier lieu,
il y a les petites lignes 40 appelées «ligne eaux très peu profondes» ayant 100 à 200 mètres
de longueurs dans lesquelles on attache habituellement des hameçons de numéro 14 lesté
à un bout de fer. Ces lignes sont utilisées pour capturer uniquement les espèces de
poissons juvéniles.

Figure 4.4 : Typologie des lignes de pêche habituellement utilisés à


Caracol. © Photo: G. Jeff, Août 2019
P a g e | 59

4.2.5. Pêche en apnée et plongée sous-marine

C’est un mode de pêche qui requiert avant tout une certaine expérience en plongée
sous-marine (Figure 4.5)17. La majorité des pêcheurs qui pratique cette technique sont des
plongeurs très expérimentés. Ces derniers utilisent une arbalète traditionnelle pour tirer
toutes sortes d’espèces de poissons au niveau du récif et dans l’arrière-récif. Certains
utilisent aussi un flash sous-marin pour pêcher le soir sur le récif barrière. Ce sont ce
même groupe de pêcheurs qui récolte les concombres de mer et d’autres types
d’échinodermes. Certains plongeurs utilisent au péril de leur vie un compresseur dans
laquelle ils attachent un long tube en plastique de plusieurs centaines de mètres pour qu’ils
respirent sous l’eau. Bien que dangereuse, ils affirment que cette pêche rapporte beaucoup
d’argent.

Figure 4.5 : Matériels de pêche à compresseur. © Photo: G. Jeff, Août 2019

17
En haut, une bonbonne de compresseur dans laquelle est attachée un long tuyau qui aspire l’air
dont le pêcheur a besoin pour respire sous l’eau. En bas, de gauche à droite une lampe de pêche
nocturne et le moteur utilisé pour faire fonctionner le compresseur installé directement sur le
canot.
P a g e | 60

4.3. Regard sur le contexte d’exploitation des espèces marines étudiées

Au début du mois de Juillet jusqu'en Août 2018, nous avons participé dans un
Projet Pilote d’Échange des Équipements de Pêche, réalisé à Madras et Caracol dans
lequel on a reçu une formation théorique et pratique en biologie des pêcheries. Ce projet
s’inscrit dans le cadre du Programme Caribéen de Conservation de la Biodiversité Marine
(CMBP en anglais) financé par l’Agence Américaine pour le Développement
International (USAID) et The Nature Conservancy (TNC). Après plusieurs heures de
formations (théoriques et pratiques), nous avons été certifiés en Monitoring des Activités
de Pêche dans les Récifs Coralliens, par The Nature Conservancy. En tant qu’étudiant
stagiaire, l’une de notre tâche consistait à collecter les données biométriques (taille,
biomasse, inventaire des espèces de poissons de récifs), pour les intégrer dans une base
de données mise en place par TNC. Grâce à cette expérience académique et
professionnelle réalisée exclusivement sur le terrain, nous avons pu avoir la possibilité de
nous joindre à une formation sur : la biologie de pêche in situ, les méthodes de collecte
de données biométriques, l’identification des espèces de coraux, de mangroves et d’herbes
marines. Entre autres, nous étions autorisés à utiliser ces données pour notre propre
recherche afin qu’on puisse mettre à profit le temps passé sur le terrain (Bissada, 2019).
À noter qu’une période de deux mois de collecte de données a été considérée pour les
poissons-perroquets et les concombres de mer. Mais juste avant d’aborder le fond du
travail, nous allons jeter un regard sommaire sur la situation d’exploitation des poissons-
perroquets et des concombres de mer à Caracol.

4.3.1. Le cas des concombres de mer

Dans les eaux maritimes d’Haïti plusieurs espèces d’holothuries ou de concombres


de mer ont été observées. Il s’agit des espèces suivantes : Holothuria thomasi ; Holothuria
glaberrima ; Holothuria mexicana ; Holothuria grisea (Alvarado, 2011). Au niveau de la
baie de Caracol, nous avons observé 3 parmi celles-ci : Holothuria grisea (Figure 4.6,
4.7), Holothuria Mexicana (Figure 4.8), et Holothuria glaberrima (Figure 4.10) et une
espèce non mentionnée par Alvarado (2011) l’Isostichopus badionotus (Figure 4.9).
P a g e | 61

Figure 4.7: Un spécimen juvénile Figure 4.6 : Des spécimens matures


d’Holothuria grisea (Pin Jòn ou Pin Kafe) d’Holothuria grisea (Pin Jòn ou Pin Kafe)
identifié à Caracol. © Photo: G. Jeff, Août identifiés à Caracol. ©Photo: G. Jeff, Août
2019 2019

Figure 4.9 : Un spécimen mature Figure 4.8 : Un spécimen d’Holothuria


d’Isostichopus badionotus (Pin Fran) mexicana (Pin Bwa Rèd) identifié à Caracol.
identifié à Caracol. ©Photo: G. Jeff, Août ©Photo: G. Jeff, Août 2019
2019

Figure 4.10 : Des spécimens d’Holothuria glaberrima


(Pin Kalawou) identifié à Caracol. ©Photo: G. Jeff,
Août 2019
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4.3.1.1. Technique de pêche utilisée pour pêcher les holothuries

L’exploitation des holothuries est l’une des activités de pêche artisanale


importantes dans la baie de Caracol. D’après un groupe de pêcheurs interrogés, ce
commerce prend effet au début des années 2008. À l'époque, la biomasse des concombres
de mer était très potentielle au point que certains pêcheurs et des colporteurs ont eu des
revenus assez importants grâce à cette activité commerciale. Lors d’une sortie de pêche
expérimentale effectuée avec des pêcheurs de « Pin » de la baie de Caracol, on constatait
que cette ressource marine est prélevée sur les barrières des récifs, dans les zones boueuses
et dans les lits d’herbiers marins.

La pêche des concombres de mer est pratiquement exercée en apnée et à la main,


car, étant lent et inoffensif ces espèces marines sont faciles à être capturées. Les pêcheurs
ramassent habituellement les concombres de mer durant l’été, ils précisent qu’en hiver
l’eau de la mer est très froide, du coup ils sont incapables de plonger pendant longtemps.
Pendant le ramassage des holothuries, les plongeurs les mettent dans des sacs qu’ils
accrochent à leur ceinture. Une fois capturées, elles sont placées vivants dans un récipient
remplit d’eau salée.

4.3.1.2. Étapes de préparation

Avant d’être expédiées aux grands négociants régionaux basés à Cap-Haïtien, les
holothuries subissent une première phase de conservation sur place à Caracol. D’après les
pêcheurs, c’est l’une des étapes la plus importante dans la préparation de ce fruit de mer
avant qu’ils soient exportés. Les concombres de mer sont vendus vivants par les pêcheurs
une fois que ces derniers reviennent de la pêche. Le reste du travail est réalisé par les
colporteurs locaux. Pour s’y prendre, quatre grandes étapes importantes doivent être
minutieusement prises en compte.

La première étape c’est l’éviscération. Normalement, c’est l’étape au cours de


laquelle les holothuries sont vidées de leurs intestins et de tous ce qui vont avec (Figure
4.11). Au cours de cette étape, on débarrasse rapidement l’animal de toutes ces tripes, puis
il est placé dans un récipient bien sec.
P a g e | 63

L’incision des concombres de mer est habituellement réalisée par des femmes, qui
sont assises sur la plage. Celles-ci sont accompagnées aussi du colporteur qui vient acheter
la marchandise. Elles sont celles qui prennent des notes sur un petit cahier concernant le
nombre de kilogrammes de concombres de mer vendus par tels ou tels pêcheurs, etc. Ces
femmes sont engagées soient par leurs maris ou soient par un colporteur local pour faire
le compte et la première préparation de conservation.

Figure 4.11 : Des concombres de mer fraîchement éviscérés. ©Photo: G. Jeff, Août 2019
P a g e | 64

La deuxième étape c’est le salage, elle consiste à mettre du sel dans les
concombres de mer éviscérés. Les colporteurs nous rapportent que c’est extrêmement
important de remplir chaque concombre de mer de sel, sinon ils risqueraient de perdre la
marchandise à cause du pourrissement (Figure 4.12). Les concombres de mer peuvent
rester dans le sel pendant 5 jours au maximum avant la cuisson. Mais, cela arrive rarement,
car les colporteurs les font bouillir habituellement le même jour.

Figure 4.12 : Des concombres de mer conservés dans du gros sel. ©Photo: G. Jeff, Août
2019
P a g e | 65

La troisième étape c’est la cuisson (Figure 4.13)18. C’est une étape obligatoire et
délicate dans la conservation des concombres de mer. Elle consiste à les bouillir dans de
l’eau salée. Au cours de cette étape, ils vont perdent 80 à 90 % de leurs poids. Ils subissent
une première cuisson pour qu’ils soient bien cuits. Ensuite, une seconde cuisson dans de
l’eau douce avant d’être séchés. Faut-il qu’on précise que le temps de cuisson est fonction
de la quantité et de la variété des holothuries que l’on veut cuire.

Figure 4.13 : Moyen de cuisson traditionnel des concombres de mer. © Photo: G. Jeff, Août
2019

18
N.B : C’est dans cette grande marmite préfabriquée que l’on fait cuire les holothuries avec du
bois à proximité de la plage de Caracol.
P a g e | 66

La quatrième étape de conservation c’est le séchage (Figure 4.14). C’est l’étape


finale au cours de laquelle les concombres de mer cuits sont exposés au soleil durant deux
(2) jours, afin que l’eau puisse être complètement évaporée de leur chair. Habituellement,
ils sont séchés sur des morceaux de tapis en plastique dans la cour des colporteurs. Après
cette étape, les concombres de mer sont vendus aux négociants basés au Cap-Haïtien.

Figure 4.14 : Séchage de concombres de mer dans la cour d’un colporteur local.
© Photo: G. Jeff, Août 2019

Actuellement, les colporteurs locaux achètent le kilo de Pin Fran 350 gourdes, et
le kilo de Pin Jòn coûte entre 300 à 350 gourdes. Tandis que le kilo de Pin Bwa Rèd est
de 50, 100, et 150 gourdes respectivement pour : le plus petit, le juvénile et le moyen.
Normalement, des espèces de telles tailles ne devraient pas être capturées, car elles sont
immatures et elles jouent un rôle fondamental dans la biodiversité marine de la baie de
Caracol. Malheureusement, entre précarité socio-économique et manque d’actions
concrètes des pouvoirs publics, les holothuries sont probablement vouées à une
surexploitation depuis 12 ans (2008-2020) pas seulement à Caracol mais dans toutes les
zones de pêche de l’AP3B.
P a g e | 67

4.3.2. Le cas des poissons-perroquets

Les poissons-perroquets sont des espèces de poissons herbivores appartenant à la


famille des Scaridea. Après les Blenniidés (196 espèces), ils représentent le deuxième
groupe de poissons herbivores (92 espèces) colonisant les récifs et les lits d’herbiers
marins19. Tout comme les concombres de mer, les Scaridea présentent des bio-indicateurs
extrêmement importants pour la santé des communautés coralliennes et plus largement
pour le milieu marin. D’après Bellwood (1994), au niveau mondial on a inventorié 10
genres de scaridés et 80 espèces. Dans l'espace caribéen, Randall (1978) avance qu’il
existe 4 genres et 14 espèces. Ils appartiennent à la classe des poissons osseux
(Ostéichtyens) et dans l’ordre des Perciformes. Cette large famille est subdivisée en deux
sous-familles : celles des Scarinae et celles des Sparisomatidae. L’auteur précise que la
première famille est constituée de quatre genres dont le : Scarus qu’on rencontre dans
l’Atlantique (Randall, 1978). La deuxième famille est formée de cinq genres : Sparisoma,
Nicholsina et Cryptotomus qu’on rencontre précisément dans la région des Caraïbes
(Bellwood, 1994).

Dans les récifs du Parc National des 3 baies, les espèces de poissons-perroquets
constituent le groupe de poissons de récif le plus majoritaire (Kramer et al., 2016) qui agit
comme les ingénieurs de l’écosystème récifal. Lors de la collecte des données
biométriques dans la baie de Caracol dans le cadre du projet d’Echange des Equipements
de Pêches les espèces couramment observées (Figure 4.16, 4.15, 4.17, 4.18, 4.19) sont
respectivement : a) le poisson-perroquet aile-noire (Sparisoma radians) ; b) le poisson-
perroquet rayé (Scarus iseri) ; c) le poisson-perroquet feu (Sparisoma viride) ; et d) le
poisson-perroquet tacheté (Sparisoma aurofrenatum). Les poissons-perroquets figurent
parmi les groupes de poissons les plus abondants dans les récifs de la baie, et ils figurent
parmi les poissons les plus capturés par les pêcheurs. Le nombre de poissons-perroquets
identifié par pêcheur lors d’un échantillon oscille entre 1 à 347 individus. Les pêcheurs
attrapent en moyenne 9 poissons-perroquets par nasse à petites mailles, allant de 1 poisson
au minimum à 19 poissons au maximum par nasse (Bissada, 2019).

19
https://www.fishbase.de/
P a g e | 68

Figure 4.16 : Poisson-perroquet à l’aile


noire (Sparisoma radians), capturé dans la Figure 4.15 : Poisson-perroquet rayé
baie de Caracol. ©Photo: G. Jeff, Juillet (Scarus iseri) capturé dans la baie de
2018 Caracol. ©Photo: G. Jeff, Juillet 2018

Figure 4.18 : Poisson-perroquet tacheté Figure 4.17 : Poisson-perroquet tacheté


(Sparisoma aurofrenatum) en phase (Sparisoma aurofrenatum) en phase
terminale capturé dans la baie de Caracol. terminale capturé dans la baie de Caracol.
©Photo: G. Jeff, Juillet 2018 ©Photo: G. Jeff, Juillet 2018

Figure 4.19 : Poissons-perroquets tachetés (Sparisoma


aurofrenatum) en phase initiale capturé dans la baie
de Caracol. ©Photo: G. Jeff, Juillet 2018
P a g e | 69

4.3.2.1. Technique de pêche courante pour capturer les scaridés

La pêche à la senne est l’une des principales techniques de pêche utilisée pour
capturer les poissons-perroquets. Les pêcheurs utilisent essentiellement des sennes ayant
une maille d’un centimètre de diamètre. Certaines fois, la maille est plus petite que la
taille d’un crayon. Cet engin peut mesurer jusqu'à 300 mètres de longueur. La minuscule
largeur des sennes occasionne malheureusement la capture des scaridés juvéniles, ayant
des poids (biomasse) très insignifiants allant jusqu'à 5 g et des tailles (TL) de moins d’un
centimètre. Pour capturer les poissons-perroquets et beaucoup d’autres espèces de
poissons juvéniles, la senne est tirée par un canot en bois de 3 pieds de hauteur. Le nombre
d’équipages varie entre 7 à 10 pêcheurs. Après avoir jeté la senne dans l’eau, les pêcheurs
tirent pendant plus de 5 à 6 heures de temps pour remonter la senne avec la prise. Très
souvent il arrive que les pêcheurs remontent la senne sans rien capturer. On constate que
la pêche à la senne est pratiquement exercée à proximité de la mangrove et au large dans
les lits d’herbes à tortue. Cela nous amène à conclure qu’il est évident que les senneurs
attrapent les scaridés juvéniles en phase initiale, car à ce stade les herbiers marins sont
leurs habitats privilégiés (Randall, 1978).

En dehors des sennes, les pêcheurs utilisent aussi des nasses de très petites mailles
ayant 3.8 cm x 3.8 cm de large. Ces engins sont habituellement placés durant trois jours
au maximum dans les zones d’alevinage, c’est-à-dire pas loin des peuplements de
mangroves périphériques, dans les lits d’herbiers et dans le récif frangeant. Comme appât,
les pêcheurs mettent des morceaux de fruits mûrs, tels que : mangues, avocat et des
calebasses pour capturer les espèces de poissons herbivores, notamment les scaridés.

4.3.2.2. Processus de commercialisation

Les poissons-perroquets sont vendus à des marchandes, qu’on appelle en créole


haïtien « Machann Yaya ». Ce nom est évoqué parce que les poissons vendus sont très
petits. Généralement, ce sont des femmes adultes de Caracol et de Trou-du-Nord qui
exercent ce commerce. Sous l’ombre des palétuviers qui se situent dans les ports
d’embarcations de pêche de « haut saline » et de « bas Saline » ces marchandes attendent
l’arrivée des pêcheurs vers 12 ou 14 heures.
P a g e | 70

Deux cas de commercialisation des poissons-perroquets existent dans la baie de


Caracol. Premièrement, on observe qu’il y a certaines femmes qui achètent les poissons-
perroquets fraîchement pêchés pour les vendre par petits lots au marché de Trou-du-Nord,
le jour même. Elles prennent toujours des taxis moto pour pouvoir assurer le trajet
Caracol-Trou-du-Nord. Les poissons sont vendus dans des paniers traditionnels en
bambous et/ou dans de petites cuvettes en plastique utilisées comme mesures de vente.
Une petite cuvette de Yaya coûte 1000 gourdes. Deuxièmement, il y a aussi des
marchandes qui achètent les petits poissons pour les vendre comme du poisson salé. Bien
avant, ces poissons sont lavés dans de l'eau salée, puis ils sont séchés au soleil, dans la
tanne. Selon certains pêcheurs on les vend à Bas-Limbé chaque samedi. Les poissons-
perroquets sont tellement surexploités qu’il n’est pas étonnant d’observer une bourrette
remplie (Figure 4.20) de scaridés dont la majorité est de petite taille.

Figure 4.20 : Une bourrette remplie de poissons-perroquets


juvéniles. ©Photo: G. Jeff, Août 2019
P a g e | 71

4.4. Impacts de la surpêche sur les scaridés et les holothuries

Pour évaluer les impacts engendrés par la surexploitation des poissons-perroquets


et des concombres de mer dans la baie de Caracol, les séries de données biométriques
relatives à chaque espèce étudiée ont été analysées. Parmi les données colletées lors du
stage (Figure 4.23, 4.24), on a choisi celles concernant les poissons-perroquets (Figure
4.21, 4.22) recueillies de Juillet à Août 2018. Par ailleurs, les données sur les concombres
de mer ont été récoltées de Juillet à Août 2019. Ici notre principal objectif consiste à
décrire les effets biologiques et écologiques de la surpêche des poissons-perroquets et des
concombres de mer dans la baie de Caracol. Suite à une analyse approfondie des données
sur ces deux espèces marines, on constate qu’elles font l’objet d’une surpêche extrême
dans la zone, ce qui entraine des conséquences bioécologiques graves.

4.4.1. Capture d’espèces de taille immature

4.4.1.1. Cas des poissons-perroquets

Dans les nasses de petites mailles que les pêcheurs du Gear Swap Projet Pilot
utilisaient, nous constatons que les poissons-perroquets étaient présents en grande
quantité (n=2 707). Mais, par souci de précision, dans le cadre de notre étude on a
seulement considéré 1 930 spécimens de scaridés (513 en Juillet, 1 417 en Août), qui ont
été capturés par l’un des plus grands pêcheurs de Caracol. Ainsi, on a pu observer que
durant le mois de Juillet 2018, ces échantillons nous révélaient que la longueur moyenne
des poissons-perroquets capturés était estimée à 14.34 cm, avec une taille minimale de 9
cm pour le poisson ayant la plus petite taille ; contre 26.5 cm pour le poisson ayant la plus
grande taille dans la cohorte. Cette réalité persiste au cours du second mois. En Août 2018,
la longueur moyenne des poissons a été estimée à 14.03 cm, avec une taille maximale de
25.1 cm pour le poisson ayant la plus grande taille et 9 cm pour le poisson-perroquet de
la plus petite taille. On peut donc conclure que les poissons-perroquets capturés dans les
nasses à petites mailles sont très immatures. Seulement 11% des scaridés capturés dans
ces engins de pêche ont atteint la maturité sexuelle, or la fourchette de la longueur
maximale de l’espèce devrait être 50 cm (Bissada, 2019).
P a g e | 72

14.4 14.37

14.3

Longueur moyenne en cm
14.2

14.1
14.03
14

13.9

13.8
Juillet 2018 Août 2018
Période de suivi

Graphique 4.1 : Dimension de la taille moyenne des poissons-perroquets


inventoriés

Depuis quelques années, cette situation de surpêche a été constaté par Kramer et
al., (2016), ainsi ils ont relaté que les nasses et les sennes de mailles illégales sont des
engins qui accélèrent la surpêche notamment au niveau de la baie de Caracol. Bissada
(2019) a observé cette même réalité de surpêche extrême chez les poissons-perroquets
provenant dans les sennes de Madras en montrant que : la longueur moyenne des scaridés
(Figure 4.1) fut de 5.57 cm, la taille minimale du plus petit scaridés était de 3.5 cm tandis
que la taille maximale du plus grand était de 8.5 cm et la biomasse moyenne d’un poisson-
perroquet était de 3 g (soit 0.03 kg) (Bissada, 2019). Selon un membre de la FoProBiM,
Monsieur Jean-Baptiste Daniel Dubois : en 2017 il existait dans la commune de Caracol
66 sennes (34 à Madras et 32 à Caracol). Les pêcheurs les utilisent pour pêcher durant au
moins 4 à 5 heures de temps. Tenant compte de toutes ces situations on peut affirmer que
la pêche artisanale avec des engins de pêche non adaptés comme les sennes et nasses à
petites mailles constituent une menace écologique majeure dans la baie de Caracol.
P a g e | 73

4.4.1.2. Cas des concombres de mer

Les holothuries sont confrontées à une situation de surpêche similaire. Selon les
données recueillies (Figure 4.21, 4.22) nous avons constatés que les concombres de mer
capturés sont également immatures et juvéniles. Par exemple, le 25 Juillet 2019, sur une
cinquantaine d’espèces (n=50) inventoriées, seuls deux individus de l’échantillon a eu la
plus grande taille, soit 30 cm, et le plus petit individu affichait une longueur de 3.5 cm
(Graphique 4.2). En moyenne, la taille des concombres de mer inventoriés était estimée à
10.65 cm de long (Graphique 4.3). Cela explique à quel niveau les espèces juvéniles sont
surexploitées.

35

30

25
Longueur en cm

20

15

10

0
0 10 20 30 40 50 60
Nombre d'individus (n=50)

Graphique 4.2 : Variation de la taille des concombres de mer inventoriés en


Juillet 2019

Une semaine plus tard, soit le 2 Août 2019, on a choisi au hasard un autre groupe
de pêcheurs de concombres ayant l’habitude de pêcher sur des sites différents. Avec la
plus grande stupéfaction, on a observé que la situation de surpêche était similaire parce
que sur une centaine de dizaine d’individus inventoriés (n=110), leur taille moyenne était
estimée à 10.3 cm de longueur, et seulement deux individus affichaient la plus grande
taille, soit 15 cm Max, contre 6 cm Min pour les deux plus petites holothuries de cet
échantillon (Graphique 4.4).
P a g e | 74

10.7
10.65

10.6
Longueur moyenne en cm

10.5

10.4

10.3
10.3

10.2

10.1
Juillet 2019 Août 2019
Période de suivi

Graphique 4.3 : Dimension de la taille moyenne des concombres de mer inventoriés

16
14
12
Longueur en cm

10
8
6
4
2
0
0 20 40 60 80 100 120
Nombre d'indivivus inventoriés (n=110)

Graphique 4.4 : Variation de la taille des concombres de mer inventoriés en Août 2019
P a g e | 75

La capture des poissons-perroquets et des concombres de mer immatures menace


de réduire le potentiel de reproduction de ces deux espèces épuratrices des écosystèmes
côtiers. Elles subissent une forme de surpêche de recrutement qui consiste à attraper
beaucoup d’alevins, des juvéniles et des individus immatures qui n’ont pas eu le temps
d’atteindre la taille adulte pour se reproduire.

4.4.2. Réduction du potentiel de reproduction des espèces

La surpêche des poissons-perroquets et des concombres de mer immatures peut


réduire le potentiel de reproduction de ces espèces marines. Les scaridés faisant partie de
notre échantillon étaient à 84 % juvéniles. La majorité des espèces capturées n’ont pas pu
atteindre la phase terminale de maturité sexuelle. Or, chez les poissons-perroquets ce sont
les individus de tailles matures qui assurent la reproduction, notamment les individus
femelles qui deviendront des mâles une fois adulte, plus précisément lorsqu’ils atteignent
une fourchette de longueur estimée de 26.2 à 43.7 cm (Hawkins et Callum, 2003, cité par
Bissada, 2019). En d’autres termes, la surpêche des holothuries et des scaridés pourrait
avoir des effets néfastes sur le rapport femelle-mâle très nécessaire pour maintenir la
reproduction de ces espèces. Durant la période de collecte des données biométriques, les
poissons-perroquets en phase terminale étaient vraiment rares. De Juillet à Août 2018,
tous les poissons-perroquets qui provenaient des nasses de petites mailles, ceux ayant
atteint l’âge adulte étaient très minimes. En effet, uniquement 16 % de scaridés en phase
terminale ont été prises dans les nasses à grandes mailles. Les résultats des dimensions
biométriques sur les espèces de concombres de mer nous révélaient également la même
situation. Non seulement les holothuries sont majoritairement immatures, mais en plus,
ils sont capturés en été durant leur période de reproduction. En somme, 84 % des individus
de notre échantillon étaient de tailles immatures.

4.4.3. Déclin d’abondance (faible pourcentage de biomasse)

En se basant sur la biomasse des populations de poissons-perroquets et des


concombres de mer inventoriés à Caracol, on observe qu’il y a eu un faible de biomasse
qui est certainement dû à cause de la capture des espèces immatures et/ou juvéniles. Par
exemple, sur les 1 930 poissons-perroquets inventoriés de Juillet à Août 2019, en moyenne
P a g e | 76

la biomasse varie entre 6.3 à 57.25 g (Graphique 4.5). Au cours de cette même période,
on a observé que les deux poissons-perroquets ayant le plus grand poids (Max masse) en
matière de biomasse avaient respectivement 55 et 250 g. À 25 mètres de profondeur, nous
avons constatés une rareté de poissons-perroquets matures, dont la biomasse maximale
est de 1000 g (soit 1 kg). Avec des biomasses aussi faibles, collectées sur une large
population qui provient de différents sites, on peut déduire que les scaridés sont
majoritairement confrontés à une situation de surpêche extrême, qui entraine le déclin
d’abondance et la prédation biologique des stocks de ces poissons herbivores dans les
récifs. Cela a été vérifié encore lors des plongées sous-marines le 19 Août 2019 (voir
Annexe 5). Tels sont autant de facteurs qui justifient les pressions de la surpêche dans la
baie de Caracol.

70

60 57.25
Masse moyenne en g

50

40

30

20

10 6.3

0
Juillet 2018 Août 2018
Période de suivi

Graphique 4.5 : Dimension de la biomasse moyenne des poissons-perroquets


inventoriés

Parallèlement, en analysant la biomasse des concombres de mer (n=160) recueillie


entre Juillet et Août 2019, on a constaté que leur biomasse (en g) était très faible. En
moyenne cela variait entre 12 et 5.9 g (Graphique 4.6). En outre, au cours de cette période
le poids maximal du plus grand concombre de mer était estimé à 90 g contre 10.5 g le
poids minimale de l’individu ayant affiché la plus petite biomasse. Or, la biomasse d’une
espèce d’holothurie mature des Caraïbes devrait être 150 g avec une longueur de 50 cm
P a g e | 77

(Alvarado, 2011). Ces résultats confirment que la surpêche affecte les espèces juvéniles.
Certaines espèces inventoriées étaient tellement immatures que leurs poids étaient nuls
(0). Etant donné que les espèces de grande taille deviennent de plus en plus rares, les
espèces juvéniles et immatures deviennent le principal choix des pêcheurs.

14
12
12
Masse moyenne en g

10

8
5.9
6

0
Juillet 2019 Août 2019
Période de suivi

Graphique 4. 6 : Biomasse moyenne des concombres de mer inventoriés

4.4.4. L’exportation des concombres de mer

L’exploitation des concombres de mer dans la baie de Caracol commençait au


début de l’année 2008. Selon un colporteur local, il y avait une grande quantité
d’holothuries et plus d’une centaine de personnes qui pêchaient des concombres de mer.
Environ 200 à 300 kilogrammes d’holothuries ont été pêchés par jour selon ses registres.
Un seul pêcheur rapportait environ 45 à 50 kilo d’Isostichopus badionotus «Pin Fran»,
50 à 60 kilo d’Holothuria grisea «Pin Jòn ou Pin Kowosòl». C’étaient les deux espèces
les plus ciblées. Cependant, 3 ans plus tard (2017-2020), on peut constater une catastrophe
écologique. Actuellement, les pêcheurs attrapaient environ : 4 kg de «Pin Fran»
(Isostichopus badionotus); 4 kg de «Pin Kowosòl» (Holothuria glaberrima); et 7 kg de
«Pin Bwa Rèd» (Holothuria Mexicana). En moins d’une décennie, le stock a été
P a g e | 78

considérablement surexploité au niveau des sites de pêche. En raison de la réduction


d’holothuries, le nombre de pêcheurs pratiquant cette activité est aussi en baisse. Un
pêcheur-colporteur d’holothurie nous a confié ce qui suit:

"Nou oblije peche tout kalite konkonm lanmè (jivenil, mwayèn, oubyen mati) paske
li se sèl aktivite ki ka ede nou kouvri bezwen tout yon fanmi pwolonje. Kounye a, tout
pechè yo vann konpayi VIMA ki nan Morne Rouge konkonm lanmè. Nou vann kilo Pin
Fran an 35 dola ameriken; mwayèn Pin Bwa Rèd la koute 7 dola, pi gwo yo koute 12 dola
ameriken. kilo Pin Jòn nan koute 35 dola, alòske Pin Kalawou a koute 12 dola ameriken.
Konpayi VIMA fe ekspòtasyon yo dirèkteman nan Hong Kong. Sèjousi, komès la vin pi
difisil paske nou paka rive jwenn gwo Pin ke kliyan chinwa yo prè pou depanse anpil kòb
pou yo. Nan tan lontan, kote nou te konn peche konkonm lanmè yo te tèlman gen anpil yo
te tankou yon mòn men kounye a pa gen anpil ki rete menm nan pi gwo sit yo tankou: la
pas, pwent Jakzil, Basen Lavil, elatriye”.

La surpêche de ces espèces accélère le déclin d’abondance au niveau de ces sites.


C’est cette situation que nous découvrons à la suite de l’analyse des données biométriques
et les opinions des acheteurs et/ou colporteurs, ainsi que des plongeurs qui ramassent les
holothuries depuis 12 ans.

Les stocks de concombres de mer sont actuellement en chute dans les principaux
sites de capture habituels de la baie de Caracol. Face à cette malheureuse situation, on
doit rappeler que le déclin démographique accéléré des concombres de mer dans une
pêcherie pourrait avoir des effets bioécologiques graves, en particulier sur les espèces
faisant partie de la chaine trophique de ces animaux marins et celles avec lesquelles les
holothuries développent des rapports symbiotiques, comme les mollusques, les crabes et
certains poissons de récifs (Bruckner, Johnson et Field, 2003).
P a g e | 79

Figure 4.21 : Collecte des données Figure 4.22 : Prise de poids des
biométriques sur une ardoise de perspex concombres de mers échantillonnés avec
affinée avec du papier de verre. © Photo: G. une balance à crochet. ©Photo: G.
Sandelyne, Août 2019 Sandelyne, Août 2019

Figure 4. 23 : Suivi d’un débarquement avec Figure 4.24 : Dimensions de la taille des
mon collègue de stage. © Photo: G. poissons-perroquets sur un ichtyomètre et prise
Sandelyne, Août 2018. de leur poids unitaire avec une balance
numérique plate. ©Photo: G. Jeff, Août 2018
P a g e | 80

4.4.5. Dégradation du récif corallien

La surpêche n’échappe pas les récifs coralliens de la baie de Caracol, surtout dans
les sites prospectés à proximité du récif frangeant. Les blocs de récifs coralliens sont
extraits et/ou cassés, puis transportés sur des canots sur la rive, là où ils seront vendus
pour la construction des bases d’habitations et de murs. Cette activité a été observée
depuis plusieurs décennies dans la zone. De plus, certains pêcheurs utilisent des détergents
chimiques, tels que le chlore qu’ils vident dans les fissures de coraux afin d’inciter les
poissons à laisser de leur habitat naturel. Ces mauvaises pratiques de pêche contribuent à
la détérioration de l’écosystème récifal de Caracol. En outre, il faut considérer
l’eutrophisation des coraux (voir Annexe 6) par la prolifération des macroalgues qui est
engendrée par l’absence de poissons-perroquets assez matures pour consommer
suffisamment d’algues sur les coraux.

Lors d’une séance de plongée réalisée par Reef Check Haïti (voir Annexe 5) en
compagnie de plusieurs experts américains et dominicains dans la pointe de Fond Blanc,
on a observé que les coraux étaient fortement dégradés (voir Annexe 3 et 4). À cela
s’ajoute-la pêche à la senne et aux nasses de petites mailles qui sont les engins de pêche
les plus menaçants pour les habitats et les espèces marines de la baie de Caracol. Ces
pressions de pêche excessive ne sont pas sans conséquence sur les poissons-perroquets,
car ce milieu représente leur principal habitat. La perte et le déclin généralisé des récifs
coralliens sont préoccupants pour ces deux espèces qui dépendent considérablement des
récifs coralliens pour se nourrir et se loger. La dégradation de ce milieu naturel entraine
donc la rareté des populations adultes qui sont pourtant très nécessaire en matière de
reproduction et dans la lutte contre la croissance des macro-algues sur les coraux. La
vulnérabilité de cet habitat est également préoccupante pour les scaridés qui sont
habituellement capables de produire des tonnes de sable, et qui jouent un rôle majeur dans
la dynamique et la sédimentation des récifs ; et cela est aussi similaire pour les
concombres de mer qui filtrent jusqu'à une tonne de sédiments par an (Randall, 2008).
P a g e | 81

4.4.6. Exploitation abusive des palétuviers

L’abattage abusif des palétuviers dans la baie de Caracol est une pratique très
courante depuis plusieurs décennies. Aujourd’hui, cette mauvaise pratique continue de se
développer dans l’informalité la plus totale (Figure 4.25). La coupe effrénée des
palétuviers accélère la dégradation des habitats des espèces de poissons-perroquets
juvéniles qui préfèrent passer une partie de leur temps à brouter à proximité des vasières
maritimes. La mangrove est une sorte de zone de frayère pour ces petits poissons, aussi
bien qu’un espace nourricier qui contribue largement à la croissance biologique des
poissons-perroquets. L’abattage excessif de ces plantes halophiles a certainement de
graves effets écologiques pour ces espèces marines. En se basant sur de nombreuses
expériences de terrain et plus particulièrement sur une récente participation en Décembre
2019, dans le cadre du suivi biologique de l’écosystème de mangrove de la baie de Caracol
par l’équipe de Reef Check Haïti, nous avons constaté que la situation de la mangrove
devient de plus en plus exposée à la coupe effrénée pour les résidents de la zone. Des
personnes coupent les palétuviers pour faire du charbon et pour produire du bois de
combustible destinés aux entreprises de nettoyage de vêtements à sec (Figure 4.26). De
plus, dans certains endroits les gens jettent énormément de déchets ménagers en toute
tranquillité. Ces pratiques sont potentiellement dévastatrices pour la forêt de mangroves
qui est un habitat très fondamental pour l’équilibre de la biodiversité marine dans la baie
de Caracol.

4.5. Considérations

Nous venons de montrer à l’aide de données biométriques à l’appui et des


observations in situ que la surpêche constitue une menace écologique majeure pour les
stocks de poissons-perroquets et de concombres de mer dans la baie de Caracol.
L’interprétation et l’analyse des dimensions biométriques nous permettent de confirmer
qu’il y a eu une surpêche outrancière de ces espèces marines dans la baie de Caracol. En
conséquence la surpêche entraîne : une diminution du nombre d’espèces matures dans les
prises ; une diminution de la taille moyenne des espèces prise et une diminution du poids
moyen ou de la biomasse des espèces capturées. L’ensemble de ces signes indiquent que
ces espèces sont pêchées plus vite qu’elles ne se reproduisent.
P a g e | 82

Figure 4.25 : Zones de mangroves dévastées par l’abattage dans la baie de Caracol.
© Photo: G. Sandelyne, Septembre 2019

Figure 4.26 : Des sacs de charbons de bois de mangroves débarqués au bord de mers
de Caracol. © Photo: G. Jeff, Septembre 2019
P a g e | 83

CHAPITRE V : ANALYSE DES IMPACTS SOCIO-


ÉCONOMIQUES DE LA SURPÊCHE ET DISCUSSION AUTOUR
DU PROJET PILOTE D’ÉCHANGE DES ÉQUIPEMENTS DE
PÊCHE
5.1. Introduction

Au niveau mondial, la surpêche a des répercussions très graves, même dans


certains pays où la filière pêche est très règlementée comme le Canada. Pour répondre aux
besoins croissants des populations grandissantes dans les Pays en Développement et pour
maintenir le niveau de consommation de fruits de mer dans les pays développés, une
pression accrue est exercée sur les ressources halieutiques20.Dans les pays du Sud comme
Haïti cela accélère la pêche illégale et non réglementée qui engendre un déclin des stocks
de ressources halieutiques côtières et la dégradation des écosystèmes côtiers. Dans le but
de comprendre les impacts socio-économiques de la surpêche dans la baie de Caracol nous
allons analyser les opinions, perceptions et comportements des pêcheurs. Juste avant
d’aborder les impacts socio-économiques entrainés par la surpêche nous avons réalisé une
discussion autour du Projet Pilote d’Échange des Équipements de Pêche proposé par TNC
comme une alternative à la surpêche.

5.2. Discussion autour du Gear Swap Pilote Projet (GSPP)

Ici nous allons essayer d’analyser les perceptions des pêcheurs artisans dans le
Projet Pilote d’Échange des Équipements de Pêche, considéré comme une alternative de
gestion des activités halieutiques artisanales et une mesure de conservation des ressources
marines côtières. Nos réflexions sont présentées autour des forces et faiblesses de ce projet
très prometteur.

5.2.1. Forces du GSPP

Selon les pêcheurs interrogés (Figure 5.1), l’échange des engins de pêche a
particulièrement permis de capturer des espèces de poissons de récifs en phase de maturité
sexuelle (Figure 5.2, 5.3, 5.4) comme des poissons-perroquets ayant une biomasse élevée.

20
https://www.dfo-mpo.gc.ca/international/isu-global-fra.htm
P a g e | 84

Les poissons-perroquets pris dans les nasses à grandes mailles ont été de 2 cm plus long
que ceux pris dans les nasses à petites mailles. De plus, on a observé qu’environ 30 % des
poissons-perroquets pris dans les grandes nasses ont la taille de maturité sexuelle. En
outre, une baisse de 79 % de scaridés a été constatée dans les nasses de petits maillages
contre 16 % dans les nasses à grands maillages (Bissada, 2019). Selon les points de vue
des pêcheurs de Caracol qui ont pris part au GSPP, cette activité leur a permis d’accroître
les bénéfices économiques potentiels tout en capturant des poissons adultes. En effet,
l’utilisation de ces engins en arrière de la barrière de récifs a permis aux pêcheurs de
capturer des espèces très rentables économiquement.

Par exemple, selon Bissada (2019) les pagres furent les espèces les plus capturées
dans les nasses à grandes mailles, soit 35 % de la prise totale (n = 89), puis on retrouve
les poissons-perroquets 16.6% (n=44), et des vivaneaux, 13.5 % du total de la prise (n=
36). Les pêcheurs ont pris aussi des mérous (Figure 5.3), et des daurades (86%) en phase
de maturation sexuelle (L50 = 8 cm) ; de même que 66% de vivaneaux (Figure 5.1) (L50
= 20.6 cm). La consultante précise d’avantage que ces nasses sélectives permettent surtout
de capturer aussi des langoustes rouges des Antilles (n=11) matures qui avaient des
carapaces dont la longueur oscille de 5.5 à 9.4 cm. En bref, certains pêcheurs affirment
que ce projet leur permette de comprendre que l’utilisation des nasses à large maillage (6
cm x 5.5 cm) est capable de contribuer valablement dans la conservation des ressources
halieutiques de la zone côtière

Figure 5.1 : Focus Groupes avec des pêcheurs du GSPP. © Photo: G. Jeff,
Septembre 2019
P a g e | 85

Figure 5.3 : Vivaneaux capturés dans les Figure 5.2 : Un pêcheur montrant des
nouvelles nasses du projet. ©Photo: G. poissons provenant des nasses à grandes
Sandelyne, Mai 2019 mailles. ©Photo: G. Sandelyne, Juin 2019

Figure 5. 4 : Capture provenant dans les nouvelles nasses. © Photo: G.


Jeff, Août 2018
P a g e | 86

Les nouvelles nasses du GSSP sont conçues pour capturer des poissons matures,
de tailles et de biomasses élevées, donc ils sont un moyen efficace dans la lutte contre la
surpêche qui est généralement due à cause de l’utilisation des engins de pêches non
sélectifs et illégaux. Ainsi, l’utilisation des nouveaux engins de pêche (Figure 5.5)
permettent aux pêcheurs de découvrir eux-mêmes que les poissons juvéniles s’échappent
facilement de ces pièges afin d’atteindre la fourchette de taille mature pour maintenir la
stabilité du stock.

Figure 5. 5 : Formation des pêcheurs sur l’utilisation des nouvelles nasses à grandes
mailles. © Photo: Caroline Bissada, Juillet 2018

5.2.2. Faiblesses du GSPP

À côté des avantages, le GSPP présente quelques faiblesses qui nécessitent d’être
relatés dans le but de perfectionner le projet pour une meilleure application dans les
années à venir. D’abord, les pêcheurs affirmaient que le nombre de participants était trop
limité, beaucoup d’autres pêcheurs de Caracol en particulier aimeraient intégrer le projet
dans l’avenir. Généralement, dans les activités de conservation des ressources naturelles
et surtout dans les PED, une plus large population est plus efficace car cela donnerait des
résultats plus satisfaisants.
P a g e | 87

La participation des communautés de pêcheurs doit être plus intégrée afin de


mieux les informer et former sur les menaces qui existent dans l’utilisation des engins de
pêche non sélectifs. De plus, ils pensaient que le temps imparti pour réaliser le projet était
trop court. À notre avis, une telle activité devrait être insérée dans un programme annuel
de gestion durable de la pêche, de sorte que les décideurs puissent avoir accès à des
données continues sur l’état des stocks de poissons dans les récifs, et les techniques et
engins mis en place par les pêcheurs artisans. Malheureusement, étant un projet pilote, il
était de courte durée. Dès lors, nous oserons demander est-ce que les pêcheurs étaient
assez préparés pour laisser définitivement les mauvaises pratiques qu’ils avaient
l’habitude de faire depuis des décennies ? Ces derniers souhaitaient qu’un suivi plus long
soit mis en place afin d’observer les débarquements de pêche. Cela permettrait de suivre
la situation de la pêche artisanale dans la baie, pendant que les pêcheurs commençaient à
utiliser les engins de pêches sélectifs.

Les pêcheurs critiques le fait que dans le projet on a mis l’accent uniquement sur
certains nouveaux engins de pêche, comme les nasses à larges mailles. Ils voulaient avoir
des embarcations de pêche artisanale ou autres qui pouvaient les aider à déposer ces
nouvelles nasses dans les zones où ils trouveraient de plus gros poissons. C’est un volet
qui ne devrait pas être écarté dans le projet car, sans une bonne embarcation aucun pêcheur
ne pourrait transporter des nasses aussi grosses pour les déposer dans les zones de pêche
adaptées.

5.3. Impacts socio-économiques de la surpêche à Caracol

Selon les résultats de l’enquête, la surpêche des ressources halieutiques dans la


baie de Caracol entraine une forte augmentation de l’effort de pêche, l’accélération de
l’utilisation des engins de pêche illégales et une augmentation du niveau de pauvreté des
pêcheurs. C’est ce que nous allons présenter dans les sous-points qui suivent.

5.3.1. Augmentation de l’effort de pêche

Lors des entretiens de groupes presque tous les pêcheurs affirmaient que depuis
les dix dernières années leurs prises diminuent de plus en plus. Certains sont donc obligés
d’aller pêcher plus loin, notamment en République Dominicaine.
P a g e | 88

Par exemple, 95 % des membres des deux focus groupes pensaient que la quantité
et la taille des poissons-perroquets ainsi que les concombres de mer qu’ils avaient
l’habitude de capturer sont largement diminuées. Or, selon eux les voyages de pêche
débutent normalement à partir de 4 ou 5 heures du matin. Dans le port, plus d’une centaine
d’embarcations artisanales partent pour la pêche dans les récifs coralliens et à proximité
des marais maritimes. Elles reviennent habituellement vers midi, ou aux environs de 1
heure ou plus tard dans l’après-midi. Sous un soleil battant, les pêcheurs passaient environ
8 à 9 heures de temps et plus en mer en quête de poissons. Le plus souvent malgré cet
effort élevé leurs prises sont très faibles. Lorsqu’ils arrivaient à attraper quelques
poissons, la majorité sont des juvéniles ayant une biomasse extrêmement faible. Dans le
pire des cas, ils peuvent passer 5 heures de temps à tirer une senne ou à enlever des nasses,
sans qu’ils n’y trouvent rien. Au final, ils retourneront chez eux « Kreve21 » selon le
langage populaire.

Pour comprendre cette situation, Bissada (2019) a calculé la capture par unité
d’effort standardisé pour les nasses à petites mailles au cours d’un temps de mouillage de
deux jours. Sachant que l’effort de pêche peut souvent varier par les facteurs comme le
pêcheur, la zone, la taille des mailles de la nasse. La prise est alors fonction des différentes
composantes qui constituent l’effort, c’est-à-dire C = Nasses + Temps de mouillage +
Pêcheur. En d’autres termes, la prise est seulement divisée par l’effort pour obtenir la
Capture par Unité d’effort (CPUE).

En termes de résultats, la valeur obtenue pour la pêche provenant d’une nasse à


petit maillage était de 0.14 kg. Bien que le temps de mouillage reste très restreint, on a
toutefois une biomasse extrêmement faible. Entre autres, cela nous permet de comprendre
que la situation de surpêche à laquelle sont confrontées les ressources démersales côtières
dans la baie de Caracol. Ceci est l’une des conséquences directes des pressions de pêche
croissantes. Cela nous donne d’avantage une idée sur la quantité de pressions qui
s’exercent de manière continuelle sur toutes les ressources halieutiques à Caracol, dont
les poissons-perroquets et les concombres de mer qui sont très ciblées.

21
Bredouilles
P a g e | 89

5.3.2. Utilisation d’engins de pêche illégale

Lors de nos différentes missions de terrain à Caracol nous avons pu constater et


vérifier que les engins de pêche artisanale sont non sélectifs, contrairement à ce que
prescrit le Décret de loi sur la pêche du 27 octobre 1978, selon lequel:

Les mailles des nasses auront 16mm au moins (art.30) ; les filets pour la
pêche doivent avoir des mailles étirées de 16mm. Les sennes de plage auront les
mailles suivantes : fonds de la senne 16mm diamètre moule 9mm, milieu de la
senne 27mm diamètre moule 17, 2mm, queue de la senne 40mm diamètre moule
25 4mm (art.40), les filets pièces, les casiers, les épuiseries ou haveneaux à
crevettes ayant des mailles de moins de 10mm sont interdits(art.41); il est interdit
d’exploiter des coraux quels qu’ils soient. Il en est de même des éventails de mer,
des pierres calcaires au fond de la mer (art.100).

En dépit de l’existence de ces règlements juridiques et légaux à notre connaissance


aucun pêcheur de la baie de Caracol ne respecte ces principes. Paradoxalement, les
maillages des petites nasses sont très souvent restreints. Elles ont des mailles estimées à
3.8 cm x 3.8 cm de diamètre. Tenant compte de ces faits, on peut comprendre à quel point
il est difficile de capturer les poissons matures avec ces engins qui sont conçus
spécifiquement pour capturer les espèces juvéniles, comme les poissons-perroquets. Un
pêcheur à lui seul peut avoir au moins 10 à 12 nasses à petites mailles. Les pêcheurs
utilisent aussi des sennes qui ont moins d’un centimètre de diamètre à mesure qu’ils
constatent que les poissons deviennent rares. Ainsi, on observe depuis quelques années
un ensemble de techniques de pêche archaïque et destructive pour les écosystèmes côtiers.

Dans les lits d’herbiers marins, les morceaux de briques attachés dans les bordures
des sennes dégradent continuellement ce riche écosystème, car ils arrachent violemment
les herbiers, en détruisant ainsi l’habitat privilégié des jeunes concombres de mer et de
poissons-perroquets. Dans la mangrove, il y a certains pêcheurs à sennes qui montent des
embuscades en amont, pendant que d’autres vont en aval (dans les chenaux et sous les
racines des palétuviers rouges) pour battre l’eau afin que les poissons puissent retourner
en bas pour être pris au piège dans leurs filets. À notre avis, une utilisation constante de
ces pratiques destructives accélère la surpêche des poissons herbivores qui colonisent les
zones de vasières maritimes, les herbiers marins et les récifs coralliens. Ces mauvaises
P a g e | 90

pratiques se développent à mesure que les espèces deviennent rares et à force que la
situation socio-économique des pêcheurs devient de plus en plus précaire.

5.3.3. Augmentation de la précarité socio-économique des pêcheurs

À la suite d’un entretien de groupe réalisé avec des pêcheurs qui pratiquent la
pêche depuis plus de vingt ans, ces derniers affirmaient qu’ils utilisaient les sennes et
nasses de petits maillages illégaux afin de subvenir aux besoins de bases de leurs familles.
Pour pallier leurs problèmes, ils nous rapportent qu’ils sont obligés de pêcher les petits
poissons, car ils sont plus faciles à être capturés dans les vasières maritimes et ils peuvent
être vendus rapidement à un fort prix. Les pêcheurs de concombres de mer quant à eux,
affirmaient qu’ils capturaient les concombres de mer sans contrôlé, il suffit simplement
de trouver la quantité de kilo demandée par le négociant. Ce qui est essentiel, disaient-ils,
c’est de faire un peu d’argent chaque jour. Généralement, l’argent obtenu sert à payer du
consortium, les frais de nourriture de la famille et autres petits besoins primaires. À ce
niveau la majorité des pêcheurs à senne qui capturaient les scaridés sont obligés d’aller
en mer du lundi au samedi, et les plongeurs qui ramassent les holothuries au moins 4 à 5
jours par semaine. L’argent qu’ils ont obtenu ne les permet pas de payer toutefois les frais
de santé, de scolarité et d’autres besoins nécessaires. Cela justifie encore une fois de plus
leur précarité socio-économique. Or, nous savons que la surexploitation des ressources
naturelles marche de pair avec la précarité socio-économique des ménages dans les pays
du Sud comme Haïti. Certains pêcheurs pratiquent aussi l’agriculture et/ou l’élevage
comme une alternative supplémentaire pour survivre au quotidien. Dans les entrevues de
groupes réalisées les 6 pêcheurs de sennes qui capturent habituellement les espèces de
poissons-perroquets et de concombres de mer et 9 pêcheurs du GSPP, ces derniers nous
rapportaient qu’au cours de ces dernières années ils prenaient beaucoup de temps avant
de capturer quelques espèces. Les quelques espèces capturées étaient en majorité
immatures, donc de taille minime et de très faible biomasse. Ceci est la conséquence
directe des fortes pressions de pêche que ces derniers exercent sur les ressources
halieutiques.
P a g e | 91

5.4. Considérations

Les résultats de l’enquête socio-économique nous a permis de comprendre que


l’un des facteurs fondamentaux de la surpêche dans la baie de Caracol c’est la précarité
socio-économique des pêcheurs. En outre, l’absence d’une cogestion du secteur de la
pêche est aussi un facteur non négligeable. Par exemple, en dépit des effets néfastes de la
surpêche, jusqu’à présent la Mairie de Caracol et les autres acteurs environnementaux
locaux n’ont pas mis en œuvre un plan de pêche durable pour la zone. Les pêcheurs de
sennes et de nasses de petites mailles illégales continuent toujours d’utiliser ces engins de
pêche au détriment de la biodiversité marine.
P a g e | 92

CHAPITRE VI : CONCLUSION GÉNÉRALE


À la fin de ce travail de recherche, il nous parait évident de préciser qu’après
interprétations et analyses des données biométriques la surpêche entraîne non seulement
des effets écologiques, mais elle impact carrément les stocks de ressources halieutiques
de la baie de Caracol, notamment les populations de scaridés et d’holothuries. Ceci
pourrait entraîner des impacts sociaux et économiques considérables. Béné (2003),
soutient que la cause principale de la pauvreté au sein des communautés de pêcheurs
artisans dans les pays du Sud est liée à la dissipation de la rente dû à la surpêche.
Autrement dit, puisque les ressources marines côtières sont en libre accès localement, cela
entraine la surexploitation biologique et économique des ressources marines côtières au
quotidien.

La surpêche constitue un frein au développement socio-économique des pêcheurs


et entraine la dégradation écologique des écosystèmes côtiers de la baie de Caracol. Cette
situation est la conséquence directe des pressions de pêche croissantes qui se développent
notamment au niveau des récifs et à proximité des vasières maritimes. À côté de cela, la
grande majorité des pêcheurs de Caracol utilise des engins de pêche non sélectifs, comme:
les nasses et les sennes à petites mailles qui attrapent 98 % de poissons juvéniles. Chaque
pêcheur peut posséder jusqu'à 10 à 24 nasses de petits maillages dépendamment de leur
moyen financier. D’autres ont une senne ayant 200 à 300 mètres de long. Un nombre
grandissant de pêcheurs venant de Caracol et d’autres zones avoisinantes utilisent
quotidiennement ces engins illégaux. Par conséquent, cela débouche sur une pression de
pêche de plus en plus élevée, notamment sur les scaridés et les holothuries.

Selon les résultats des données biométriques et l’analyse des débarquements des
pêcheurs de poissons-perroquets et de concombres de mer, nous sommes parvenus à
confirmer l’idée selon laquelle « dans la Baie de Caracol, la surpêche est la conséquence
des pratiques de pêches illégales, l’augmentation croissante de l’effort de pêche et de la
vulnérabilité socio-économique des pêcheurs ». L’une des causes de la vulnérabilité
socio-économique de ces derniers seraient le manque d’emploi dans la région ou au niveau
local. Dès lors, le pêcheur est obligé de se tourner constamment vers la pêche artisanale
comme unique moyen de subsistance disponible en libre accès. Ceci engendre des
P a g e | 93

dégradations bioécologiques qui sont potentiellement néfastes non seulement pour les
stocks de scaridés et d’holothuries, mais aussi pour les communautés de pêcheurs. Par
exemple, on a observé que les pêcheurs capturaient des espèces de tailles immatures chez
les scaridés. Pourtant, la réduction du potentiel de reproduction des espèces est l’un des
impacts majeurs de la surpêche. Cela entraine un déclin d’abondance caractérisé par une
faible biomasse des stocks de poissons-perroquets et des concombres de mer faisant partie
de notre échantillon de travail. Cela nous donne une idée claire sur la situation de
surexploitation à laquelle sont exposées les espèces marines côtières de la baie de Caracol.

Le phénomène de surpêche impact aussi les écosystèmes côtiers, notamment les


herbiers, les récifs coralliens et la mangrove. Ceci dit, les mauvaises pratiques de pêche
artisanale détériorent largement les habitats des espèces de poissons juvéniles.
L’utilisation des sennes dégrade les lits d’herbiers marins et l’abattage excessif des
palétuviers détruisent les niches écologiques des espèces. Autant d'impacts anthropiques
majeurs qui mettent à la fois la biodiversité marine et la survie des pêcheurs en danger
et/ou qui les rendent plus vulnérables.

6.1. Perspectives : pour une gestion durable des ressources halieutiques de


la baie de Caracol

En matière de perspectives, pour faire face à cette imminente menace, nous


suggérons aux décideurs de mettre en place un «Plan de Gestion Durable de la Pêche
Artisanale» basé sur la cogestion des pêcheries. Ce serait la stratégie de mise en œuvre
idéale pour une action d’aménagement de pêcherie dans la zone. D’après Acheson (1989),
la cogestion des pêcheries se définit comme une relation mutuelle et réciproque entre les
autorités étatiques locales et nationales avec les communautés de pêcheurs dans le but de
gérer conjointement les ressources halieutiques. À l’origine, cette démarche a été
appliquée dans les pays développés afin de pallier les échecs des programmes de gestion
des pêcheries habituelles. Aujourd’hui, la cogestion des pêcheries donne des résultats tout
à fait surprenants, notamment au Japon, aux Philippines et au Sénégal (Acheson, 1989).
Dans cette même logique, nous recommandons aux autorités de rencontrer les pêcheurs
de la baie de Caracol afin de prendre connaissance de leurs réalités socio-économiques.
Ainsi, ils découvriront certainement que la surexploitation des ressources halieutiques
P a g e | 94

dans la baie est une conséquence directe de la pauvreté des pêcheurs. Un accord doit être
trouvé dans ce cas afin d’accompagner les pêcheurs, pour que ces derniers puissent
s’adonner à d’autres activités en dehors de la pêche. De telles décisions réduiraient
grandement la surpêche et l’effort de pêche global.

De plus, les collectivités territoriales doivent de concert avec les pêcheurs définir
un calendrier de la pêche. D’ailleurs, certains pêcheurs sont prêts à y participer. En dehors
de la période de repos biologique des stocks, chaque groupe de pêcheurs pourraient
pratiquer une activité qui lui semble favorable telle que : l’agriculture, l’aquaculture,
l’artisanat, et guide écotouristique. Parallèlement, la Coopérative des Pêcheurs de Caracol
peut travailler par exemple sur des projets d’aquaculture des concombres de mer et de
mariculture. De tels programmes sont en cours depuis plus d’une vingtaine d’années au
Japon, aux Philippines, et au Sénégal (Acheson, 1989). Des résultats très prometteurs ont
été obtenus, notamment en matière de conservation des ressources halieutiques côtières.

En outre, Acheson (1989), avance que la cogestion des pêcheries veut que
l’élaboration et l’application des mesures juridiques de gestion des ressources halieutiques
soient prises en collaboration avec les communautés de pêcheurs. Assez souvent, des
décrets et/ou accords sur la pêche maritime en Haïti sont publiés sans prendre en compte
réellement l’implication des communautés locales. De fait, les résultats escomptés sur le
terrain sont quasiment décevants. Bien des fois, des projets sont décidés en haut, et ce
n’est que sur le coup du hasard que les pêcheurs soient mis au courant. Dès lors, ils ont
mis en tête que leurs intérêts et leurs points de vue sont bafoués par les grands décideurs
qui certaines fois connaissent très peu la réalité de ces derniers. Pour pallier ce manque,
il faudrait que toutes les activités ou tous les programmes de gestion durable de la pêche
soient mis en place avec l’accord et la participation intégrale des pêcheurs. Ainsi, ces
derniers seront plus aptes à suivre les règlements définis et prescrits.

Dans certains pays, les pêcheurs sont mis au courant des décisions juridiques ou
contraignantes que les autorités veulent prendre. Contrairement à Haïti, les décisions ne
sont pas brusquement imposées ; elles sont prises de manière concertées. Par exemple, en
2009 au Belize, le gouvernement de concert avec la population a mis une interdiction
P a g e | 95

totale sur la pêche des poissons-perroquets22. Cela a permis de contribuer dans le


rééquilibrage des stocks au cours des dix dernières années. Ces gouvernements ont pris
des années pour sensibiliser la population sur l’importance capitale des scaridés au niveau
de l’écosystème récifal.

Nous suggérons que l’élevage des concombres de mer soit considéré comme
moyen de lutte face à la surpêche des holothuries. Il faut savoir qu’en absence d’une
gestion rationnelle et soigneuse, les concombres de mer sont très sensibles à la surpêche
d’où la nécessite d’une meilleure conservation des pêcheries d’holothuries à Caracol par
l’élevage règlementé. Cette démarche est durable, car elle va permettre de procéder à
l’exploitation de cette ressource pendant que le stock initial soit en repos biologique. Les
pêcheurs, une fois formés dans ce domaine, pourront se convertir en éleveurs
d’holothuries. Durant la période de récolte, ces derniers augmenteront leurs revenus
considérablement. Dans certains pays comme l’Indonésie, aux Seychelles et au
Madagascar, on pratique largement l’élevage des holothuries (Conand et Muthiga, 2007).
Par exemple, Conand et Muthiga (2007) relataient qu’un projet d’élevage de concombres
de mer financé par le Programme Marine and Coastal Science for management (MASMA)
de WIOMSA a été la première action concertée de la région de l’océan Indien occidental
pour comprendre une série d’aspects liés à l’élevage de cette ressource marine.

Toutefois, dans la baie de Caracol, on doit être prudent concernant l’élevage des
holothuries, car des études doivent être préalablement menées pour analyser la faisabilité
d’une telle activité à court, moyen et long terme. Cela demanderait de gérer aussi les
stocks géniteurs qui se trouvent dans la nature, d’assurer un bon élevage larvaire en
nourricerie et bien assurer le grossissement.

Enfin de compte, nous suggérons aux décideurs, et surtout les collectivités


territoriales de mettre à jour le Décret du 27 octobre 1978 sur la pêche. Les acteurs
concernés doivent faire appliquer le récent arrêté intercommunal du 02 avril 2018 portant
sur la gestion des ressources halieutiques de l’Aire Protégées des Ressources Naturelles
Gérées des 3 Baies (AP3B), qui est un ensemble de mesures juridiques très contraignantes

22
https://reefresilience.org/case-studies/belize-fisheries-management-2/
P a g e | 96

sur l’utilisation des engins de pêche non sélectifs et illégaux, en l’occurrence les nasses à
petites mailles et les sennes. Dans cette même ligne de pensée, il est formellement interdit
à l’intérieur de l’AP3B de fabriquer, de commercialiser, d’utiliser de quelque manière que
ce soit, ou avoir en sa possession, à partir du 1er janvier 2020, des filets de maille inférieure
à 50 millimètre. Dans la réalité ces règlements ne sont pas encore en vigueur dans la baie
de Caracol. En outre, des suivis biologiques réguliers doivent être réalisés sur les espèces
marines récifales afin de suivre l’évolution des stocks. Des recensements des pêcheurs
artisans et de leurs équipements seraient nécessaires dans l’évaluation du secteur de la
pêche.

En dépit de ces perspectives, cette étude a des limites, car nous n’avons pas pu
étudier totalement le phénomène de la surpêche dans toutes ces dimensions dans la baie
de Caracol. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons étudiés deux espèces
marines parmi tant d’autres. De plus, la collecte des données a été très difficile. Parfois
nous étions obligés d’aller en mer (Figure 5.6) avec les pêcheurs pour pouvoir découvrir
leurs comportements et techniques, certains d’entre eux étaient très hostiles à aborder.

Dans le but d’apporter des réponses efficaces face à la situation de surpêche qui
touche le Parc National des 3 Baies en général et la Baie de Caracol en particulier, des
recherches scientifiques doivent être menées pour évaluer la biodiversité marine, la santé
des récifs coralliens et des mangroves, les phytoplanctons, la situation socio-économique
des pêcheurs et les impacts du changement climatique sur les ressources halieutiques.
P a g e | 97

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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ANNEXE

Annexe 1 : Départ pour des observations sous-marines au niveau du récif corallien à la


pointe de Fond-Blanc. ©Photo : Reef Check Haïti, Août, 2019.

Baba un pêcheur de Caracol nous emmène à l’équipe de Reef Check Haïti pour des
plongées sous-marines sur des sites de pêche. Lors de ce suivi nous avons pu découvrir
l’état des récifs et la situation des espèces marines qui y vivent.

Annexe 2: Six pêcheurs de sennes de Caracol qu’on a interrogés © Photo: G. Jeff, Juillet 2018
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de mailles illégales à l’eau à Fond Blanc. ©Photo : G. Jeff, Août 2018.

Annexe 3 : Coraux à corne de cerf (Acropora palmata) dégradés par des cyclones, observés
dans la baie de Caracol. ©Photo : Reef Check Haïti, Août, 2019.

Annexe 4 : Coraux blanchis observés dans la baie de Caracol. ©Photo : Reef


Check Haïti, Août, 2019
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Annexe 5 : Transect de poissons au niveau de la barrière récifale de Caracol.


©Photo : Reef Check Haïti, Août, 2019.

Annexe 6 : Prolifération de macroalgues au niveau du récif corallien de


Caracol. ©Photo : Reef Check Haïti, Août, 2019.
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Annexe 7: Guide d’entretien des pêcheurs de concombres de mer et de poissons-


perroquets de la baie de Caracol

1- Fiche d’identité des participants

Nom Prénom Sexe Age Résidence

2- Séries de questions relatives à la pêche des concombres de mer dans la baie de


Caracol

Question I Depuis combien de temps pratiquez-vous la pêche des


concombres de mer et de poissons-perroquets à Caracol ?

Pouvez-vous nous montrer les zones dans laquelle vous pêchez


Question II
les concombres de mers et les poissons-perroquets à Caracol?

Question III Quelles sont les noms usuels des différentes variétés de
concombres de mers et de poissons-perroquets que vous avez
l’habitude de capturer à Caracol?

Pouvez-vous nous dire quelles sont les principales espèces


Question IV
d’intérêt commercial que vous capturer le plus souvent ?

Question V Quelle est la zone de pêche correspondant à chaque espèce (ou


ce groupe d’espèces) de concombres de mers et de poissons-
perroquets dans la baie de Caracol?

Question VI Les espèces de concombre de mer et de poissons-perroquets à


Caracol se reproduit-elle à une saison ou à un endroit particulier?

Question VII
P a g e | 109

Comment les taux de capture (par jour ou par sortie) ont-ils


évolué au cours des 3 dernières années (2017-2020) chez les
concombres de mer et les poissons-perroquets ?

Question VIII Est-ce que vous remarquez que la quantité et la taille des
concombres de mer et des poissons-perroquets sont de plus en
plus diminuées ?

Décrivez les engins et techniques que vous utilisez pour pêcher


Question IX
les concombres de mer et des poissons-perroquets.

Question X Pouvez-vous nous donner une idée de l’heure que vous quittez le
bord de mer et quand vous y retourner habituellement ?

Est-ce que vous constatez que la quantité de concombres de mer


Question XI
et de poissons-perroquets est faible comparativement à une
période donnée ? Si oui, donnez-nous la période et expliquez
pourquoi cela est t- il arrivé selon vos propres mots ?

Question XII D’où est-ce que vous vendez les concombres de mers et les
poissons-perroquets et à quel prix on vous achetez le kilo de
chaque espèce ?

3- Séries de questions relatives à la gestion des stocks de concombres de mer dans


la baie de Caracol

Etes-vous informé d’une réglementation communale ou nationale


Question I
qui s’applique à la pêche aux espèces de concombres de mer et
les poissons-perroquets ?

Les autorités locales vous ont-ils empêché d’exercer cette activité


Question II
dans la zone, si oui donnez-nous les raisons ?
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Question III
D’après-vous quelles mesures peuvent être adoptées pour assurer
une exploitation plus durable des concombres de mers et les
poissons-perroquets ?

D’après-vous la communauté de pêcheurs est-elle suffisamment


Question VI
motivée et dotée des capacités nécessaires pour accepter des
mesures de gestion visant l’exploitation durable de la ressource
halieutique et le bien-être des générations futures ?
Question V
D’après-vous la communauté de pêcheurs serait-elle disposée à
faire appliquer les règlements de gestion que les autorités vont
mettre en place, si on interdit catégoriquement la pêche des
concombres de mers et les poissons-perroquets pendant une
période donnée ?
P a g e | 111

Annexe 8: Guide d’entrevue de groupe avec les colporteurs locaux de concombres


de mer de la baie de Caracol

1. Fiche d’identité des participants

Nom Prénom Sexe Age Résidence

2. Séries de questions semi-ouvertes relatives à la commercialisation des


concombres de mer

Question I A quelle année remonte le commerce des concombres de mer à


Caracol et depuis combien de temps pratiquez-vous ce
commerce ?

Question II Saviez-vous ce qu’on fait avec les concombres de mer ?

Question III Quel est le prix unitaire de chaque variété de concombres de


mer ? ; En fonction de quoi vous définissez ces prix ? ; Le prix
de la marchandise se varie-t-il ? Si oui, justifiez vos réponses ?

Question IV Pouvez-vous nous dire les principales espèces d’intérêt


commercial que vous achetez le plus souvent ?

Question V Est-ce-que vous achetez les concombres de mer vivants ou


morts ? Si oui ou non, donnez les raisons ?

Expliquez-nous en détails les différentes étapes à suivre pour


préparer la marchandise (les concombres de mers) et de qui vous
Question VI
les aviez apprises ?
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Question VII Pouvez-vous nous donner une évaluation quantitative des


revenus de la vente de concombres de mer au cours d’une
période donnée ?
Est-ce que vous-constatez que les quantités de concombres de
mer que vous avez l’habitude d’acheter dans le passé est faible
par rapport à celles que vous achetez actuellement ? Si oui,
Question VIII donnez-nous la période et expliquez pourquoi cela est t- il arrivé
avec vos propres mots ?

D’où est-ce que vous vendez les concombres de mer et à quel


prix on vous achète le kilo de chaque espèce ?
Question IX
Les autorités locales vous ont-elles empêché d’exercer cette
activité, si oui donnez-nous les raisons qu’elles ont évoquées ?
Question X

Connaissez-vous l’importance écologique des concombres de


mer dans leurs écosystèmes ?
Question XI
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez habituellement
dans ce commerce ?
Question XII

Etes-vous informé de quelques mesures, qui ont été prises par les
autorités locales dans la zone pour contrôler la pêche et la vente
Question XIII
des concombres de mer?

Seriez-vous prêts à abandonner cette activité, si on interdit la


pêche des concombres de mer à Caracol pendant une période
donnée?
Question XIV

Qu’est-ce que vous espérez de la part des acteurs


environnementaux de Caracol et de l’Etat central?
Question XV

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