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1
Département de Géographie, Université de Yaoundé I, Cameroun.
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Piscimeuse, Belgique.
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Unité de Recherche en Biologie Environnementale (URBE) Université de Namur (UN), Belgique.
4
Ecole Régionale Post-Universitaire d’Aménagement et de Gestion Intégrés des Forêts et Territoires
Tropicaux d’Aménagement (ERAIFT/UNESCO), Kinshasa, R.D. Congo.
*
Auteur correspondant ; E-mail: juniealbine@yahoo.fr
RESUME
Introduite au Cameroun en 1948, la pisciculture a connu un succès qui s’est effondré après
l’indépendance du pays. Pour tenter une analyse prospective du développement de l’aquaculture au Cameroun
un bilan de la situation a été dressé et des perspectives ont été explorées. L’une des causes principales
attribuées à cet échec fut la mise en œuvre de politiques inadaptées. L’élaboration de la stratégie nationale de
l’aquaculture en 2003 avec un plan d’action précis en 2009 n’a pas suffi à relancer le sous-secteur de
l’aquaculture. L'absence d'industries alimentaires pour poissons, l'accès difficile au crédit, l'absence et/ou
l'insuffisance d’alevins de qualité, le manque de personnel qualifié, le manque de maîtrise des technologies de
production et le mauvais aménagement d’étangs piscicoles sont autant de contraintes qui continuent de plomber
le développement du sous-secteur. Pourtant le pays dispose de multiples atouts et des investissements
importants sont réalisés en faveur du développement de la pisciculture. Pour l’avenir de la pisciculture au
Cameroun, il faudrait sortir de l’amateurisme financier et recourir à une expertise certifiée, à du personnel
compétent, motivé et bien payé.
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ABSTRACT
Introduced in Cameroon in 1948, fish farming was a success that collapsed after the independence of
the country. To try a prospective analysis of the development of aquaculture in Cameroon, a balance sheet on
the situation was drawn up and the perspectives were explored. One of the main causes attributed to this failure
was the implementation of inappropriate policies. The development of the national aquaculture strategy in 2003
with a specific action plan in 2009 was not enough to relaunch the aquaculture sub-sector. The lack of fish feed
industries, the poor access to credit, the lack and/or the insufficiency of quality fingerling, lack of trained
personnel, lack of control over production technologies, and the development of fish ponds that are not adapted
are all constraints that continue to limit the development of the sub-sector. Nevertheless, the country has many
assets and important investments are made in favour of the development of fish farming. For the future of fish
farming in Cameroun, we should exit from financial amateurism and resort to an expertise evidenced, to a
qualified, motivated and well paid staff.
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Keywords: Aquaculture policy, aquaculture development plan, aquaculture strategy, fish farm planning,
planning.
(Peace Corps) dont les activités portaient sur trafic et d’échanges d’importance variable,
l’organisation des pisciculteurs, l’amélioration plus ou moins ramifiés et desservant des terres
de la production d’alevins et la fabrication d’inégale valeur, aux caractéristiques
d’aliments pour poissons. géographiques contrastées (FED, 1975). On
Parallèlement à la vulgarisation, les distinguait ainsi trois grands groupes
travaux de recherche menés dans les stations régionaux : le Sud-Cameroun, l’Ouest-
existantes permirent de sélectionner deux Cameroun et le Nord-Cameroun. Les grandes
espèces de poissons ayant le double avantage contraintes nationales (production et réseaux)
de s’adapter aux conditions des étangs ruraux et les potentialités physiques de ces grands
et d’être appréciées des consommateurs. Il groupes régionaux étaient alors identifiées
s’agit des espèces Oreochromis niloticus et afin d’orienter les actions de développement
Heterotis niloticus. Cette fois, les stations ont dans leurs aires d’influence. L’objectif était de
fonctionné juste le temps des perfusions profiter des avantages respectifs des
financières avant de tomber en ruine. différentes provinces du pays. Les zones à
Apparemment, l’approche de l’auto relief difficile recevaient les plus grandes
financement des stations n’aurait pas été subventions. Cette action avait pour avantage
développée. Ce fut un deuxième échec de faciliter la mise en place de projets
(Tangou, 2009 ; MINEPIA, 2009). régionaux.
Entre 1961 et 1970, période qui C’est dans cette perspective que cinq
correspond à la mise en œuvre des deux zones au potentiel biophysique favorable au
premiers plans quinquennaux, la pisciculture développement de la pisciculture avaient été
était destinée à compenser le déficit sélectionnées. Il s’agissait de l’Adamaoua, du
d’alimentation en protéines animales des Centre, de l’Est, de l’Ouest et du Littoral. La
populations des zones où l’élevage et la pêche période 1960-1994 a été marquée par
n’assuraient pas de ressources suffisantes. Sa l’absence d’un cadre légal et d’un document
production n’était certes pas comparable à stratégique relatif à la filière aquacole.
celle des pêches, mais sa portée restait Toutefois, la pisciculture était une activité de
considérable. L’objectif de la politique subsistance et la production aquacole
aquacole était donc triple : insuffisante. Dès les années 1971, avec la
- Porter au maximum la production des mise en œuvre du IIIe plan quinquennal,
étangs par la vulgarisation des méthodes l’orientation générale de la politique aquacole
d’alimentation et la culture de nouvelles visait les techniques piscicoles et
espèces ; l’alimentation des poissons. Les axes
- Promouvoir la pisciculture partout où les stratégiques reposaient alors sur la recherche
conditions naturelles s’y prêtent ; scientifique (technique d’élevage, nouvelles
- Poursuivre les recherches scientifiques espèces de poissons), la vulgarisation,
sur les meilleures méthodes d’élevage l’identification des zones propices (en termes
(premier plan quinquennal, 1960). de potentiel physique, spatial et humain) et la
Cet art nouveau avait trouvé terrain formation. A la culture du Tilapia s’était
fertile dans tout le Sud du territoire national ajouté Clarias gariepinus (= lazera) apporté
jusqu’à Ngaoundéré. Notamment en raison de Bangui par J.-C. Micha (comm. Pers.) à
des conditions naturelles favorables au Foumban dès 1971 dans le cadre du projet
développement de la pisciculture. Dès lors, la FAO de pisciculture régionale (RCA,
culture du tilapia en étangs de barrage était Cameroun, Gabon et R. Congo). En 1969, l'on
promue dans les régions du Centre et de a introduit la carpe (Cyprinus carpio). La
l’Ouest du pays. population piscicole s'était à nouveau agrandie
Au cours de cette période, le en 1990 avec l'arrivée des carpes herbivores,
développement du Cameroun était amorcé Ctenopharyngodon idella (FAO, 2004).
depuis sa façade maritime longue de 400 km Pour accompagner la réalisation des
vers laquelle convergeaient les grands axes de actions prévues dans la politique aquacole, le
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pays avait souscrit à plusieurs projets Entre 1994 et 2003 : vers une réorientation
bilatéraux et à des interventions multiformes. du rôle de l’administration dans
En effet, entre 1968 et 1987, des organisations l’aquaculture
internationales (PNUD / FAO, FIDES, FAC, Jusqu’au milieu des années 1980, le
Peace Corps, OXFAM /SELF HELP, USAID, Cameroun avait inscrit sa politique de
CRDI), la Banque Mondiale et même une développement et ses choix d’investissement
société parapublique du Cameroun (SEMRY) dans une vision stratégique à court terme,
ont œuvré chacune en son temps pour la s’exprimant par le biais des plans
redynamisation de l’activité piscicole avec des quinquennaux de développement économique
objectifs différents (ZAPI, 1987). Pendant que et social. Cependant, la crise économique de
certains proposaient de vulgariser la culture 1987 avait contraint le gouvernement à
du tilapia à travers la formation et ou adopter une politique de gestion à très court
l’encadrement des pisciculteurs, d’autres terme. Cette situation a diminué la capacité
proposaient la culture de la carpe commune, la d’intervention des pouvoirs publics dans les
pisciculture intégrée à l’élevage de porcs et secteurs économiques et sociaux, contribuant
poules, la pisciculture associée à la culture du ainsi à la modification du paysage des acteurs
riz (dans le Nord du pays). locaux de développement (Etamane, 2009).
Entre 1991 et 1995, l’ONG américaine De fait, les structures étatiques jusque-là
Peace Corps avait proposé aux paysans un engagées dans la fourniture des services de
appui au développement de la monoculture de base (santé, éducation, sécurité alimentaire,
Tilapia. Il s’agit d’un mode d’élevage où l’on développement communautaire, etc.) ne
ne cultive qu’une seule espèce de poisson. La purent continuer leurs missions, laissant ainsi
petite taille des poissons obtenus à la récolte un vide quelques fois comblé par les
avait découragé les paysans. Ce qui n’avait organisations de la société civile et le secteur
pas favorisé la reproduction des actions. La privé.
multiplicité des actions menées en faveur de la Au cours des années 1996, la pauvreté
pisciculture n’avait pas suffi pour impulser le avait fortement progressé au Cameroun et
développement de l’activité. Les objectifs touchait plus de 50,5% de la population
étaient rarement atteints. Pour preuve, que ce (BAD, 2002). De plus, l’offre publique de
soit les techniques de reproduction des services avait été affectée par les difficultés
espèces cultivées ou l’encadrement, tous financières de l’Etat qui étaient traduites par
avaient disparu avec le projet. Même les un indice de développement humain de 0,536.
étangs aménagés avaient été abandonnés à la Cet indice classait le Cameroun au 134ème
fin des projets (Tangou, 2009). Bien que rang sur 174 pays en 1997. Aussi, la lutte
l’élevage et la pêche constituaient un secteur contre la pauvreté était au centre des
important de l’économie camerounaise, les préoccupations de la politique économique,
activités et prérogatives des acteurs de elle prévoyait l’adoption d’une stratégie de
l’aquaculture étaient limitées faute de lisibilité réduction de la pauvreté. Dans le secteur rural,
des marchés, ainsi que d’un cadre la crise économique avait entraîné la baisse de
réglementaire clair. Ce manque de lisibilité de la production agricole qui s’était aggravée
l’environnement institutionnel et les avec la disparition des structures
contraintes de l’environnement d’encadrement des agriculteurs (BAD, 2009).
socioéconomique (accès limité aux ressources, Dans ce contexte, l’approche développée dans
aux intrants, aux financements et à la la politique aquacole était moins
technologie) et physique (infrastructures interventionniste (MINEPIA, 2003), moins
rurales déficientes) auraient conduit la filière à tournée vers l’atteinte de résultats quantifiés
(augmentation du nombre d’étangs). Elle
une situation de stagnation voire de
prenait davantage en considération les aspects
régression.
de rentabilité et d’autonomie des systèmes de
production, et consacrait le principe de la
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participation des promoteurs aux différentes objectif de satisfaire les besoins des
étapes des projets. populations en protéines animales et
En effet, les actions menées par le d’améliorer le revenu des producteurs. C’est
passé en faveur du développement de la donc dans un contexte politique où les
pisciculture étaient le plus souvent des conditions macro-économiques ont imposé un
interventions non coordonnées, plutôt changement radical de stratégie que l’idée de
impulsées par les bailleurs de fonds (Tangou, la mise sur pied d’un cadre stratégique pour le
2009). Elles ne semblaient pas tenir compte développement durable de l’aquaculture au
des réalités du terrain et donc des paramètres Cameroun avait fait son apparition en 2003.
socioéconomiques et culturels des zones En effet, les nouvelles politiques
d’intervention. C’est pourquoi les nouveaux exigeaient que le gouvernement cesse son rôle
projets de pisciculture avaient misé sur une d'investisseur et de directeur d'entreprise pour
démarche participative pour le décollage de la adopter celui de facilitateur et de régulateur, le
pisciculture au Cameroun (Tangou, 2009 ; secteur privé étant le principal acteur du
MINEPIA, 2009b). C’est l’exemple du projet développement de l'économie du pays. Les
de recherche action développement de la objectifs stratégiques pour l’aquaculture
pisciculture à Yemossoa (entre 1994 et 1997 étaient donc de satisfaire non seulement la
avec le concours de la Coopération française) demande locale, mais de contribuer à
et du projet d’appui à la recherche l’amélioration de la balance commerciale des
participative en pisciculture et à la produits aquacoles, de créer des opportunités
commercialisation des produits (entre 2000- d’emploi dans les zones urbaines et rurales
2005 avec le World Fish Center). Le constat tout en améliorant l’efficacité de la gestion
fut encore décevant, les rendements obtenus des ressources naturelles (MINEPIA, 2009a).
étaient faibles, les activités se sont arrêtées Les axes d’orientation de cette stratégie
dès la fin des projets. Toutefois, la relance des concernant l’identification des zones à fort
activités du secteur agricole ne sera effective potentiel aquacole, la définition des types
qu’après l’atteinte du point d’achèvement de d’aquaculture, la définition d’un cadre
l’Initiative Pays Pauvres Très Endettés approprié de vulgarisation aquacole. C’est
(PPTE) intervenue en 2006. dans ce contexte, que le gouvernement avait
tenté de céder des stations piscicoles aux
Depuis 2003 : aux origines de la mise en acteurs du secteur privé (Tangou, 2009 ;
œuvre d’un cadre stratégique pour le WFC, 2011). On dénombrait environ 15 000
développement durable de l’aquaculture étangs produisant 330 tonnes avec un
En 2003, les politiques mises en rendement moyen de 400 kg/ha (FAO, 2004).
perspective dans le Document Stratégique de Cependant, la mise en œuvre du DSRP,
Réduction de la Pauvreté (DSRP), traduisaient n’avait pas permis de réduire de manière
l’ambition du gouvernement d’œuvrer pour la significative la pauvreté au Cameroun.
réalisation des Objectifs du Millénaire pour le L’économie était demeurée fragile et entravée
Développement (OMD). L’objectif de ces par des lacunes structurelles, relatives à la
politiques était de réduire sensiblement la faible compétitivité du secteur productif
pauvreté au moyen d’une croissance (Mikolasek et al., 2009) et aux déficiences des
économique forte et durable, d’une meilleure facteurs de production clés que constituent les
efficience des dépenses, de politiques de infrastructures et l'énergie. En conséquence,
réduction de la pauvreté convenablement pour renforcer la reprise économique amorcée
ciblées et du renforcement de la gouvernance depuis une décennie et l'asseoir durablement,
(BAD, 2002 ; Etamane, 2009). Ainsi, la le gouvernement camerounais avait entrepris
stratégie du gouvernement dans le secteur de réviser la stratégie de croissance
rural, visait à améliorer la productivité et les économique et de réduction de la pauvreté en
rendements agricoles. En ce qui concerne le 2009. D’où l’élaboration du document de
secteur de l’élevage des pêches et des « vision de développement du Cameroun à
industries animales, la stratégie avait pour l'horizon 2035 ». La première décade de cette
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vision à long terme était couverte par la mise piscicole paysan élaboré en Afrique de
en œuvre du Document de Stratégie pour la l’Ouest. Ce modèle consistait en l’élevage de
Croissance et l'Emploi (DSCE) élaboré en poissons à base de la productivité naturelle
2009. Convaincu du rôle moteur du secteur des étangs de barrage pour le grossissement et
rural dans la satisfaction non seulement des de petits étangs de « service » pour la
besoins alimentaires des populations, mais production d’alevins. Malgré la pertinence du
également des agro-industries, le modèle piscicole proposé, le développement
gouvernement entendait procéder à la de l’activité est resté limité. Les densités
modernisation de l'appareil de production. d’élevage étaient faibles (0,5 Tilapia/m2).
L’accent était donc mis sur le développement Restant dans une optique de maintien
d'hyper extensions agricoles dans les de l’appui technique tel que suggéré dans la
différentes régions du pays selon leurs stratégie aquacole, le projet d’appui à la
spécificités agro écologiques afin de réaliser structuration des groupements et de la
des rendements d'échelle et d'accroître Profession avait été mis en œuvre (PSRPP)
substantiellement la production (DSCE, dans les mêmes zones, dans la période 2009-
2009). 2011. Considérant que l’existence d’une
Ainsi, dans le sous-secteur de organisation capable de défendre les intérêts
l’élevage, des pêches et des industries de la profession, de garantir une production de
animales, la stratégie restait ancrée au DSCE. qualité permettrait d’impulser une nouvelle
Désormais, il ne s’agissait plus seulement dynamique à l’activité piscicole, ce projet
d’autosuffisance alimentaire, mais aussi de avait pour objectif d’appuyer la création et la
commercialisation, de création d’emplois et mise en réseau de groupes de pisciculteurs
de gestion des ressources naturelles. (APDRA, 2011). Dans la continuité de ses
L’engagement du gouvernement dans cette interventions au Cameroun, l’ONG APDRA
nouvelle vision de développement s’était et ses deux partenaires nationaux, le Service
traduit entre autres en 2009 par l’élaboration d’Etudes et d’Appui aux Populations à la Base
du plan de développement durable de (SEAPB) et le Centre d'Information, de
l’aquaculture qui mettait l’accent sur la Formation et de Recherche pour le
commercialisation de la production. A long Développement au Cameroun CIFORD),
terme, l’impact positif du développement de avaient mis en œuvre le Projet de
l’aquaculture sur la réduction de la pauvreté Renforcement des Compétences des
serait perçu à travers la réduction du chômage Pisciculteurs de la Région Centre (PRCP)
des pauvres non qualifiés. Pour y arriver, la entre 2011-2012. Le PRCP visait à renforcer
proposition du plan aquacole serait de créer au les compétences des acteurs du secteur de la
moins deux (2) emplois/ferme piscicole pisciculture paysanne (ONG partenaires,
(MINEPIA, 2009a). groupes de pisciculteurs) et à poursuivre
La dynamique observée dans le l'accompagnement des producteurs en cours
développement de la pisciculture s’était d'installation et en production (APDRA,
poursuivie avec l’implémentation de 2013). Etant donné que la durée impartie à ce
nouveaux projets piscicoles en vue de relancer projet ne permettrait pas d’atteindre les
l’activité. C’est le cas du Projet pour une objectifs fixés, deux projets conjoints avaient
Pisciculture Villageoise rentable dans les été mis en place dans la période 2013-2015
régions Centre et Ouest du Cameroun toujours dans le cadre du développement de la
(PVCOC) qui avait tenté de vulgariser les pisciculture. Il s’agit du Projet de
techniques de production piscicole extensive Développement de la Pisciculture dans les
(APDRA, 2011). Ce projet avait été mis en régions Centre et Est du Cameroun (PDPCE)
œuvre par le gouvernement avec l’aide de et du projet Systèmes Piscicoles Extensifs
l’ONG française Association Pisciculture et familiaux en Afrique de l'Ouest et Centrale
Développement Rural en Afrique tropicale (SyPiEx). Le PDPCE accompagnait les
humide (APDRA) qui avait décidé de tester la producteurs en cours d'installation et en
pertinence au Cameroun d’un modèle production uniquement avec un appui
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technique (APDRA, 2013). Pendant que le n’est pas fonctionnelle, ses exigences en
projet SyPiEx proposait d’identifier et de énergie électrique ayant été sous-estimées.
comprendre les innovations piscicoles au Globalement l’approvisionnement en intrants
niveau local afin de lever les principales est aléatoire et difficile, en raison de la
contraintes au développement de l’activité. défectuosité du réseau routier entre autres.
Apparemment, la durée des projets était courte L’essentiel de la production piscicole est
(2 à 3 ans) et insuffisante pour garantir realisée dans les systèmes de type extensif.
l’appropriation des techniques piscicoles par Les systèmes semi-intensifs et intensifs sont
les pisciculteurs. rares (Mikolasek et al., 2009). Les systèmes
Sur le plan économique, la mise en d’élevage, sont des polycultures de
œuvre du plan de développement de Oreochromis niloticus et de Clarias
l’aquaculture devrait permettre de passer gariepinus en association parfois avec
d’une production de 1000 tonnes à 8000 Heterotis niloticus, Channa obscura (poisson
tonnes en 2015 puis à 80 000 tonnes en 2020. à tête de serpent) et/ou Cyprinus carpio
Cependant, la production aquacole actuelle (Photo 1). Des systèmes d’intégration de
demeure autour de 1.000 tonnes sur 155 000 l’élevage de porcs ou de poulets sont
tonnes que représente la production également pratiqués.
halieutique nationale (FAO, 2013). Celle-ci Toutefois, des capitaux importants sont
est inférieure à la production réalisée dans les injectés dans des projets visant la promotion
années 1980 (3000 à 4000 tonnes de des systèmes semi-intensifs des espèces
poisson/an). Quant à la consommation de Clarias gariepinus et tilapia (Oreochromis
poisson, soit environ 9 kg/habitant/an, elle est niloticus) dans des cages ou des bassins hors
également inferieure à la valeur escomptée qui sol en béton et dans les cours d’eau (Photo 2).
est de 11,57 kg/habitant/an. Il est clair que le En 2014, le gouvernement a lancé la
niveau de production a fortement chuté. Celle- construction des centres de production
ci ne satisfaisant pas la demande locale, elle intensive dans plusieurs régions du pays
ne pourrait donc améliorer la balance (Centre, Littoral, Sud, Sud-Ouest). Le projet
commerciale. Ce qui explique que les d’«Appui au développement de l’élevage du
importations de poissons soient en hausse. De tilapia en cage au Cameroun» consiste en la
8046 tonnes entre 1975 et 1976, elles sont production locale des alevins, afin
passées à 281 450 tonnes environ en 2014 d’approvisionner les pisciculteurs du pays.
(INS, 2015). Ce qui ne cadre pas avec l’option Des centres de production intensive de
d’autosuffisance alimentaire visé par le poisson sont ainsi multipliés à travers des
gouvernement. La sous-alimentation reste une initiatives gouvernementales tel le programme
réalité au Cameroun (DSDSR 2005). Sur 30 Agropole (en 2010), le Programme de
stations aquacoles mises en place depuis Promotion de l’Entreprenariat Agropastoral
l’introduction de la pisciculture dans le pays, des Jeunes (PPEA-Jeunes en 2015), avec pour
seules cinq (5) sont encore fonctionnelles objectif de soutenir le développement
(MINEPIA, 2009b). L’approvisionnement en d’entreprises des jeunes hommes et femmes
alevins est essentiellement assuré par des (FIDA, 2016). L’utilisation d’aliments
écloseries privées. Toutefois, les prélèvements importés pour la production de tilapias et de
en milieu naturel constituent un autre mode poissons chat clarias, en système semi-intensif
d’approvisionnement en alevins. Quant à a fait l’objet d’une promotion importante dans
l’aliment industriel pour poisson, il est le cadre du projet PPEA. La recherche est
importé. Les productions artisanales locales limitée aux expériences biotechnologiques et
sont de très mauvaise qualité tant économiques. L’association des pisciculteurs
nutritionnelle que qualitatives. Sa disponibilité aux activités de recherche n’est pas toujours
est erratique. Leur qualité est souvent effective. En matière de formation
dégradée par une mauvaise conservation d’où professionnelle, le pays dispose des
la présence de mycotoxines. L’usine de établissements d’enseignement supérieurs
production pour aliment construite à Bamenda (FASA de Dschang, ISH de Douala à
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• Les sujets de recherche pas toujours co- • La présence de vase dans les étangs ou
construits avec les promoteurs. Les leur envasement progressif (Photo 4).
relations entre les chercheurs et les Non seulement la récolte n’est pas aisée
promoteurs se limitent souvent aux et la vase est délétère pour la qualité de
enquêtes. la récolte et, de plus, elle favorise la
• Les bénéficiaires immédiats de la mise croissance des plantes aquatiques dans
en œuvre de la politique aquacole sans l’étang ;
tradition de l’aquaculture. Le temps • L’inadéquation des étangs piscicoles
d’appropriation des connaissances et avec le milieu biophysique.
techniques dans le domaine de L’emplacement des étangs dans les bas-
l’aquaculture serait donc long. Il devrait fonds, leur profondeur, leur accessibilité
être pris en compte dans la politique ; et leur source d’approvisionnement en
• Le faible engagement de l’Etat dans la eau (Photo 5) ne favorisent pas toujours
mise en place de partenariats entre les de bonnes conditions de gestion de l’eau
acteurs de la politique aquacole. et des déchets ;
• Les conflits d’usage des terres. Ils sont
Les contraintes liées à l’aménagement des liés aux chevauchements des activités
étangs notamment entre agriculture et élevage
Toujours d’après nos constats sur le ou entre habitation et élevage. En général
terrain et selon divers auteurs (Fongang, la sécurité foncière n’est pas garantie.
2008 ; Mikolasek et al., 2009), ces contraintes
comprennent : Les contraintes liées à la gestion des étangs
• L’indisponibilité de la main d’œuvre D’après nos observations de terrain
qualifiée. Généralement ceux qui appuyées par les documents de divers auteurs
construisent les étangs ne sont pas (Mikolasek et al., 2009, Mikolasek et Oswald,
spécialisés en ce type d’aménagements ; 2013), les contraintes relatives à la gestion des
• La faible sollicitation des services du étangs sont :
MINEPIA. Les pisciculteurs semblent se • La proximité des étangs piscicoles. Les
limiter à leurs connaissances et leurs effluents des étangs situés en amont
savoir-faire. Ils construisent de manière entrainent l’inondation des étangs situés
anarchique sans autorisation du en aval et la perte de poisson ;
MINEPIA ; • Les inondations. En saison des pluies, les
• Les exigences de prospection de sites étangs reçoivent les eaux de
sont jugées pénibles et coûteuses. Les ruissellement et les eaux usées en
pisciculteurs n’ont pas le temps ni les provenance des activités anthropiques.
ressources financières nécessaires pour Le type d’aménagement ne favorise pas
recourir aux services d’un topographe ou le contrôle de l’eau (moines, surverses) ;
du MINEPIA ; • La rupture des digues. Les inondations
• L’insuffisance de moyens financiers. provoquent souvent la rupture des digues
Selon les pisciculteurs, il faut disposer occasionnant ainsi la perte des alevins ou
des ressources financières pour des poissons présents dans les étangs.
aménager le site, constituer le stock de Celles-ci ne sont pas toujours
poissons et gérer l’élevage ; suffisamment solides pour supporter la
• Le caractère pénible des travaux pression de l’eau ;
manuels. En effet, il faut être • La pollution des cours d’eaux. Les
physiquement fort et en bonne santé pour pécheurs utilisent souvent les pesticides
aménager et entretenir un site piscicole pour pêcher dans les cours d’eau qui
(Photo 3). Les pisciculteurs dont la alimentent les étangs piscicoles. De plus
moyenne d’âge est de +/- 50 ans la qualité et le volume des déchets
estiment ne plus avoir assez de force d’ordures drainés par la pluie ou
pour ces travaux ; déversés par les populations ne sont pas
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production des matières premières fourragères aquaculteurs une sécurité suffisante du point
(soja, tournesol, maïs, etc.) importante dans la de vue juridique.
composition de l’aliment pour poisson en D’un point de vue administratif. Des
Afrique est insuffisante pour approvisionner outils visant à dynamiser ou à améliorer les
les marchés locaux. Les sites piscicoles restent pratiques piscicoles (guide pour l’aquaculture,
éloignés des marchés, ce qui ajoute un coût de etc.) d’une part, et, des dispositifs
logistique. Sachant que le marché est la base d’accompagnement (financier, technique et
du développement d’une activité économique administratif) d’autre part pour les porteurs de
durable, l’organisation de la profession projets piscicoles devraient être mis en place
pourrait contribuer à une meilleure au niveau local, régional et national avec la
commercialisation des produits piscicoles. participation de tous les acteurs. Un lien étroit
Toutefois, le besoin de professionnalisation de devrait être établi entre ces outils et ceux
la filière est prégnant pour tous les maillons dédiés aux autres pratiques agricoles. La
de la chaîne des valeurs, partant des cohérence entre les administrations publiques
producteurs d’alevins et d’aliment pour et au sein du ministère en charge de
poisson, des fournisseurs de services, des l’aquaculture permettrait à l’aquaculture de se
producteurs au consommateur. faire une place aux côtés des autres activités
Actuellement, les pisciculteurs ne de productions alimentaires au sein du
seraient pas encore capables de fournir du territoire.
poisson d’élevage de qualité de taille En effet, les fermes aquacoles sont par
adéquate, en temps et lieu requis par les nature fortement dépendantes du milieu dans
acheteurs et à prix compétitif avec celui offert lequel elles sont installées, ce qui crée des
par la pêche ou les poissonneries interactions fortes entre elles et l’agriculture,
(importation) tout en ayant une marge comme avec les autres activités du territoire.
bénéficiaire. Leur capacité à faire face à la Au Cameroun, la pêche et l’aquaculture en
concurrence reste faible. Vraisemblablement, eau douce relèvent d’un même ministère. De
à l'échelle nationale, la dotation en ressources, plus, les pisciculteurs s’approvisionnent
la technologie, la productivité, les souvent en alevins auprès des pécheurs. Ces
caractéristiques du produit semblent être les interactions obligent une certaine
facteurs les plus importants qui conditionnent collaboration entre les pisciculteurs et les
la compétitivité de l’aquaculture. Il est pêcheurs. En mutualisant leurs forces, ces
important de recadrer le développement de acteurs pourraient mieux défendre leurs
l'aquaculture dans le contexte de concurrence intérêts communs.
permanente de tous les produits carnés, En ce qui concerne l’organisation de la
notamment le poisson congelé, le bœuf, le filière aquacole, elle est éclatée entre de
porc et la volaille (Lacroix et Paquotte, 1999). nombreuses structures et interprofessions : les
Sur le plan juridique, les zones idéales ONG locales, et internationales (œuvrant dans
pour les aménagements piscicoles la pisciculture, dans l’agriculture ou dans le
appartiennent au domaine public fluvial. Les domaine agricole, voire social), les fabricants
biens du domaine public sont insusceptibles d’aliments, les menuisiers (fabriquant de
d’appropriation privée. La politique aquacole dispositif de vidange), les pisciculteurs et les
n’a pas encore réglé cette question foncière. revendeurs de poisson. Une fédération de
L’élaboration d’un cadre légal spécifique à l’aquaculture permettrait de mieux organiser
l’aquaculture permettrait donc de garantir la la filière sur l’ensemble du territoire.
sécurité foncière des pisciculteurs. Les acteurs Sur le plan environnemental, le site
de la pisciculture devraient avoir une reconnu devant la loi devrait satisfaire les
connaissance claire de la législation régissant exigences biophysiques requises pour le bon
l’activité et des règles de planification développement des poissons (bonne qualité de
correspondantes. Dans ce but, le pays devrait l’eau et du sol). Pour éviter que les étangs ne
disposer d’une législation transparente en soient abandonnés, ceux-ci devront être
matière d’aquaculture afin de fournir aux aménagés sur des sites adaptés. Les conditions
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maîtrisables et qu'il est presque impossible de reste une contrainte majeure. Actuellement au
les vidanger complètement. De plus, leur Cameroun, il n’existe pas de fonds de garantie
production décroît après la première récolte pour l’aquaculture, ni de système de prêts
(MINEPIA, 2013). Toutefois, il est possible bonifiés auprès des institutions bancaires.
d’améliorer le niveau de production et de Toutefois, les taux bonifiés varient entre 1,5 à
rentabilité avec les ressources disponibles 2 % par mois ce qui est supérieur au taux de
actuellement, en adoptant des techniques rentabilité d’une pisciculture. Dans ces
d’élevage appropriées (Olubunmi et al., 2015 ; conditions, ce n’est pas imaginable de recourir
Dada, 2015). En outre, il est possible de à ces emprunts. L’absence de garantie sur la
minimiser la majeure partie des impacts terre constitue un des facteurs qui limite
potentiels de l’aquaculture à condition de l’accès au crédit. L’Etat devrait sensibiliser les
connaître les processus mis en œuvre, de institutions bancaires sur la rentabilité de la
pratiquer une gestion responsable et de pisciculture, en s’appuyant notamment sur des
déterminer correctement l’emplacement des business plans élaborés, le suivi des fermes
installations d’aquaculture (UICN, 2007). pilotes, et la mise en place d’un système fiable
D’une manière générale, les recherches de statistiques et d’informations sur l’activité.
devraient être menées continuellement afin De même, le taux d’imposition sur le
d’améliorer les connaissances en aquaculture. bénéfice de 45 % appliqué à la pisciculture
Celles-ci devront être disponibles et serait un autre facteur qui pousse les
compréhensibles par tous. Le développement opérateurs à travailler dans l’informel sans
de la pisciculture au Cameroun devrait reposer avoir recours au MINEPIA ou autres
sur l’élevage des espèces Oreochromis structures d’appuis. Généralement, les
niloticus et Clarias gariepinus, qui sont pisciculteurs ne déclarent pas leur activité par
endémiques à l’Afrique. Oreochromis crainte de devoir payer des taxes. Une
niloticus, dont la production annuelle révision de la valeur de ce taux dans le cadre
mondiale (2017) approche les 5 millions de de la mise en œuvre de la politique aquacole
tonnes, reste une des meilleures espèces serait un avantage pour les promoteurs.
mondiales pour l’aquaculture, bien connue et Il convient de noter que la prise en
parfaitement maîtrisée. Le pays devrait compte d’un seul de ces facteurs ne suffirait
sélectionner des souches à croissance rapide et pas à impulser le développement de l’activité
passer à l’élevage mono sexe mâle à partir piscicole. Loin d’être une équation facile, le
d’alevins de même âge et de qualité certifiée développement de la pisciculture nécessite
provenant éventuellement d’un sexage une batterie de conditions sociales,
manuel, d’une inversion de sexe par méthyl économiques, politiques, environnementales
testostérone ou mieux de la technique plus et culturelles afin de s’assurer que celle-ci
récente des super mâles YY (Micha, 2013). s’intègre à l’économie locale et que les sites
Compte tenu des compétences requises pour soient sélectionnés et gérés de manière
la reproduction artificielle et l’alevinage de concertée et adaptée à l’environnement.
ces espèces de poisson, une formation Il ressort de cette analyse que les choix
spécifique des techniciens et des fermiers est politiques effectués dans le cadre du
nécessaire. développement de l’aquaculture au Cameroun
Cependant, cette technologie exige des n’ont pas permis d’atteindre les objectifs
connaissances et des compétences fixés. La production nationale aquacole stagne
approfondies, et par conséquent des autour de 1000 tonnes/an alors que la
formations adaptées, tant pour les demande en poisson ne cesse de croître depuis
professionnels que pour les fonctionnaires, sur l’indépendance du pays. Les étangs piscicoles
la conception et la mise en œuvre des projets sont relativement petits et difficilement
piscicoles, sur les aménagements piscicoles et vidangés de manière complète. Ils sont situés
sur les techniques d’élevage. dans des zones enclavées, souvent éloignés
D’un point de vue socio-économique, des marchés. Les techniques de production
l’accès aux financements dans la pisciculture sont rudimentaires et les intrants de bonne
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qualité ne sont pas toujours disponibles, voire privilégier. Toutefois ceux-ci doivent
accessibles. Les performances de la politique être respectueux de l’environnement ;
aquacole ne seraient pas suffisantes pour De la cohérence entre les politiques
impulser le développement durable de publiques. Une politique aquacole claire,
l’activité aquacole. L’aquaculture demeure concertée et partagée, en harmonie avec
soumise à des contraintes administratives, les politiques des finances, des cadastres,
financières, techniques, de marketing et socio- des travaux publics, de l’agriculture, de
économiques qui entravent le développement la gestion de l’eau, etc. favoriserait
durable du sous-secteur. L’augmentation de la l’efficacité et l’efficience des
production aquacole sera fonction : interventions relatives au developpement
De l’élaboration d’un cadre légal et de l’aquaculture. Des mesures incitatives
réglementaire approprié prenant en telles que la réduction du taux
considération les contraintes et d’imposition, la mise en place de fonds
potentialités de l’activité et définissant pour l’aquaculture favoriseraient le
clairement les droits fonciers des développement de l’activité. La
pisciculteurs. Les pays ayant connu une recherche devrait proposer une gamme
forte augmentation de leur production, variée d’espèces d’élevage. Notamment
comme le Chili et l'Espagne, ont une loi les espèces à haute valeur ajoutée :
spécifique à l'aquaculture. Selon la FAO, poisson à tête de serpent (Parachanna),
les exigences légales d’une licence et sole du fleuve (Schilbe), crevette,
d’une évaluation d'impacts sur daurade, bar, etc. (Micha, 2006). En
l'environnement avant la création d’un chine, l'introduction d'espèces nouvelles
étang piscicole justifieraient les progrès à haute valeur commerciale a stimulé le
obtenus dans la maîtrise de la gestion de développement de grosses entreprises de
l’eau dans les fermes piscicoles, au production d'aliments (FAO, 2000).
Ghana et dans l’amélioration de la
production ; SYNTHESE
De l’adoption d’une approche globale et A l’évidence, le Cameroun, comme
intégrée aux niveaux stratégique et local. beaucoup d’autres pays africains, voit ses
Plusieurs études font états des ressources halieutiques décliner par
interactions entre les composantes surexploitation, entre autre, alors que sa
économiques, sociale, environnementale consommation de poisson ne fait que croître
et institutionnelle de l’aquaculture. En tout comme sa population qui de plus tend à
effet, les mesures à concevoir pour s’orienter vers la consommation de poisson
développer l’aquaculture doivent plutôt que vers la viande, comme source de
considérer à la fois les implications protéines animales. Etant donné ces constats,
sociale, environnementale et économique le pays a tenté depuis son indépendance et
des modifications envisagées dans la tente toujours, comme la plupart des autres
conduite de l’activité. La sélection des pays du continent, de développer le secteur de
sites appropriés devra tenir compte de la l’aquaculture dont les perspectives sont
proximité avec les marchés, des bonnes vu la demande nationale croissante en
conditions environnementales et produits halieutiques. Un tel secteur avec une
socioéconomiques du milieu (UICN, filière bien organisée peut rapidement
2009). De même, la fertilisation des contribuer à un fort développement durable
étangs à partir des systèmes de d’une région (delta du Mékong au Vietnam,
production intégrés (Montchowui et al., delta du Nil en Egypte, périphérie de Lagos au
2012 ; Mikolasek et Oswald, 2013) à Nigeria, etc.). Et pourtant au Cameroun, on
l’agriculture (rizi-pisciculture, n’enregistre pas de franc succès, on ne repère
maraîchage-pisciculture, etc.) ou à aucune région où la pisciculture, la
l’élevage (volaille, porcs, lapins, etc.), crevetticulture, etc. connaissent un essor
comme c’est le cas en Asie, sont à spectaculaire rentable et durable. Les espèces
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Tableau 1: Contraintes piscicoles spécifiques aux régions du Centre de l’Est et de l’Ouest (Source:
enquêtes de terrain, 2013).
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Photo 2 : Pisciculture dans les rives d’un cours d’eau (Littoral) et dans des bassins en béton (Sud).
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Photo 6 : Systèmes de vidange (déversoir en bambou dans la région du Centre et en tuyau PVC
dans la région de l’Est).
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