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Les combats de Robert Badinter en faveur de

l’abolition de la peine de mort

Repères historiques

Le 18 septembre 1981, Philippe Séguin, député RPR des Vosges, nommé pour l’occasion président de
séance, annonce que l’article 1er du projet de loi sur l’abolition de la peine de mort est adopté par
363 voix « pour » et 117 « contre ». Le 30 septembre, ce vote est confirmé par le Sénat, où la gauche
au pouvoir n’est pourtant pas majoritaire. La France devient alors le dernier pays d’Europe (après
l’Espagne en 1978) à abolir la peine de mort, après deux siècles de combat abolitionniste porté, entre
autres, par les plumes de Victor Hugo ou d’Albert Camus.

Depuis la Révolution française et la loi du 6 octobre 1791, la torture avait été abolie, les actes
passibles de peine capitale réduits et le mode d’exécution (jusqu’alors dépendant du rang social du
condamné) uniformisé : Tout condamné à mort aura la tête tranchée. La guillotine, alors considérée
comme un progrès, sera utilisée jusqu’au 10 septembre 1977, jour de l’exécution de
Hamida Djandoubi, condamné pour viol, torture et meurtre d’une jeune femme.

En pratique, le nombre d’exécutions n’a cessé de décroître au cours du XIX e et du XXe siècle pour
atteindre 0,4 % du nombre total d’affaires jugées par les cours d’assises entre 1968 et 1978 (cf. Jean-
Yves Le Naour). Les jurés des assises paraissent alors plus mesurés que l’opinion publique française,
qui, selon un sondage publié par Le Figaro, s'oppose à 62 % à la loi votée le jour même à l’Assemblée
nationale.

Si les exécutions sont moins nombreuses et ne sont plus publiques depuis 1939, certaines enquêtes
criminelles sont très médiatisées. Les années 1970 sont marquées par des procès demeurés célèbres.
L’affaire Buffet-Bontemps a ainsi ravivé les débats autour de la peine de mort et déterminé
l’engagement de l’avocat Robert Badinter, chargé de la défense de Roger Bontems et profondément
marqué par son exécution. Claude Buffet et Roger Bontems, détenus à la prison de Clairvaux, sont
condamnés à mort après avoir pris en otage et tué une infirmière et un gardien. Au pouvoir depuis

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Les combats de Robert Badinter en faveur de
l’abolition de la peine de mort
1969, le président Georges Pompidou, qui avait par trois fois accordé la grâce présidentielle à des
condamnés à mort, refuse de les soustraire à la guillotine.

Le 18 janvier 1977 s’ouvre le procès de Patrick Henry pour l’enlèvement et le meurtre d’un garçon de
7 ans. L’affaire a elle aussi été très médiatisée : appel au ravisseur lancé par la famille ; entretien
télévisé avec Patrick Henry niant sa culpabilité juste avant d’être inculpé ; célèbre édito du
présentateur du journal de TF1, Roger Gicquel, contre les dangers liées à la tentation d’une justice
expéditive (La France a peur) et polémique autour de la chanson Je suis pour de Michel Sardou.
Après le refus de plusieurs avocats, Robert Badinter accepte de défendre Patrick Henry. Au procès, il
prononce une plaidoirie d’une heure et demie, totalement orientée vers la dénonciation de la peine
de mort. Grâce à lui, son client est finalement condamné à la perpétuité.

Le combat en faveur de l'abolition se déplace sur le terrain politique. Sous la présidence de Valéry
Giscard d’Estaing, trois exécutions ont lieu. Le président de la République refuse sa grâce à
deux condamnés à mort pour meurtres de jeunes enfants (Christian Ranucci et Jérôme Carrein,
exécutés respectivement le 28 juillet 1976 et le 23 juin 1977), ainsi qu’à Hamida Djandoubi,
condamné pour la torture et le meurtre d’une jeune femme et exécuté le 10 septembre 1977 à la
prison des Baumettes de Marseille.

Au cours du septennat de Valéry Giscard d’Estaing, le débat autour de la peine de mort qui secoue
l’opinion publique ne parvient pas à émerger à l’Assemblée nationale, malgré les efforts déployés par
le député RPR de Paris, Pierre Bas, ou des Vosges, Philippe Séguin. Ces députés abolitionnistes se
heurtent aux habiles manœuvres politiques du garde des Sceaux de l’époque,
Alain Peyrefitte, abolitionniste pour plus tard (Jean-Yves Le Naour). Au cours des débats
parlementaires, les rétentionnistes imaginent des solutions alternatives pour maintenir la peine de
mort en en modifiant les modalités : abandon de la guillotine, évolution de la liste des crimes
passibles de la peine de mort, mise en place d’une peine de substitution.

À la fin des années 1970, la France est la dernière démocratie européenne à ne pas avoir aboli la
peine de mort (après l’Espagne en avril 1978). Alors que l’ONU s’est engagée en décembre 1971 en
faveur d’un objectif d’abolition totale de la peine de mort dans tous les pays, le Parlement européen
demande explicitement à la France, en novembre 1980, de mettre un terme aux exécutions capitales
et de s’engager sur la voie de l’abolition. En janvier 1978, l’Église catholique apporte son soutien
moral au combat abolitionniste.

Au cours de la campagne pour les élections présidentielles de mai 1981, les paroles prononcées par
le candidat François Mitterrand en faveur de l’abolition de la peine de mort tranchent avec la frilosité
de ses adversaires qui se fient aux sondages et ne veulent pas froisser une opinion publique qui y est
majoritairement favorable. Après les élections législatives de 1981, la proposition, qui figurait dans le
programme présidentiel, est mise en œuvre par le nouveau garde des Sceaux, Robert Badinter.

Publiée au Journal officiel le 10 octobre 1981, la loi pour l’abolition de la peine de mort a fait l’objet
d’attaques répétées au cours des deux mandats de François Mitterrand : au total, 27 propositions de
loi sont déposées pour demander son rétablissement. Le tournant des années 2000 marque une
inflexion de l’opinion publique sur ce sujet. Dans la loi constitutionnelle promulguée le 23 février
2007, le président Jacques Chirac fait adopter un nouvel article (66-1) indiquant : Nul ne peut être
condamné à la peine de mort, ce qui rend toute demande de modification de la loi
inconstitutionnelle.

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Les combats de Robert Badinter en faveur de
l’abolition de la peine de mort
Problématique
Quels arguments Robert Badinter oppose-t-il aux partisans de la peine de mort ?

Vidéo : Robert Badinter sur l'abolition de la peine de mort

QUESTION 1
Quelle est l’attitude et le ton adoptés par le garde des Sceaux Robert Badinter face aux députés ?
Il parle d’un tons grave, il était très sérieux et déterminé à convaincre son auditoire, il va ensuite
pousser son engagement dans le discours en parlant plus vite, plus fort, tout en gardant un tons
sérieux et éloquent.

QUESTION 2
Quels sont les arguments utilisés par Robert Badinter dans cette première partie de discours ?
Il va utiliser des arguments évidents pour défendre cette abolition comme :
- Les droits fondamentaux de l’Homme, c’est une violation de ces droits (le droit à la vie) de laisser
l’état (ou quiconque) avoir le droit de vie ou de mort sur un individu

- La mort c’est pas réversible, quand la personne est exécutée si elle est innocente il n’y a aucun
moyen de de corriger ces erreurs, contrairement à une peine de prison ou le préjudice est moins
important. Les erreurs judiciaires ça arrive et il faut protéger les innocents.

- Il à remis en question son efficacité par des faits, des données, elle ne dissuade pas, le nombre de
crimes n’est pas inférieur avec la peine de mort que sans (voir même l’inverse). Elle pourrait même
pousser au terrorisme.

Mais il va utiliser un arguments moins pragmatique, l’humanité de la justice. Il explique


l’incompatibilité de ces deux points, la peine de mort n’est pas assiciable avec le principe d’humanité.
Il faudrait s’orienter vers des solutions moins violente que la « vengeance », comme la réhabilitation
par exemple. Le peuple français va dans ce sens.

QUESTION 3
À l’aide du découpage chronologique indiqué sous la vidéo et du chapitrage de la retranscription
du discours, vous indiquerez le plan du discours et les principaux arguments développés en faveur
de l’abolition.

QUESTION 4
Comment Robert Badinter conclut-il son discours ?

Pour la question suivante, on pourra se reporter à la rubrique « Grands discours parlementaires »,


disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

QUESTION 5
Quels autres discours prononcés devant l’Assemblée nationale et restés dans l’histoire – en raison
de l’éloquence de l’intervenant et de la réforme soutenue – peut-on rapprocher celui de
Robert Badinter ?

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Les combats de Robert Badinter en faveur de
l’abolition de la peine de mort
Questions sur le document audio de RFI : Robert Badinter : « La peine de mort nourrit le
terrorisme »

QUESTION 1
Pourquoi Robert Badinter est-il devenu le symbole du combat contre la peine de mort en France ?

QUESTION 2
Pourquoi Robert Badinter est-il à nouveau interrogé sur le sujet lors de cet entretien du 10 octobre
2015 ?

QUESTION 3
Quels sont les progrès mesurés dans le combat mené par Robert Badinter depuis le vote de la loi
sur l’abolition de la peine de mort en 1981 ?

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