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ISSN: 2658-8455

Volume 3, Issue 4-3 (2022), pp.587-607.


© Authors: CC BY-NC-ND

Le pilotage de l’immatériel, un renouveau du contrôle de


gestion : Cas de l’Office National des Chemins de fer

The management of intangible assets, a renewal of management


control : Case of the National Railway Office

Lamiae MEGZARI, (Doctorante)


Laboratoire Études et recherche en Management des organisations et des territoires-
ERMOT
Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales
Université Sidi Mohammed Ben Abdellah, Fès, Maroc

Sanae BENJELLOUN, (Enseignante chercheure)


Laboratoire Études et recherche en Management des organisations et des territoires-
ERMOT
Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales
Université Sidi Mohammed Ben Abdellah, Fès, Maroc

Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales


Université Sidi Mohames Ben Abdellah
Adresse de correspondance : Maroc (FES)
30000
0663-215258
Les auteurs n'ont pas connaissance de quelconque financement qui
Déclaration de divulgation :
pourrait affecter l'objectivité de cette étude.
Conflit d’intérêts : Les auteurs ne signalent aucun conflit d'intérêts.
MEGZARI, L., & BENJELLOUN, S. (2022). Le pilotage de
l’immatériel, un renouveau du contrôle de gestion : Cas de l’Office
Citer cet article National des Chemins de fer. International Journal of Accounting,
Finance, Auditing, Management and Economics, 3(4-3), 587-607.
https://doi.org/10.5281/zenodo.6984746
Cet article est publié en open Access sous licence
Licence
CC BY-NC-ND

Received: June 15, 2022 Published online: August 14, 2022

International Journal of Accounting, Finance, Auditing, Management and Economics - IJAFAME


ISSN: 2658-8455
Volume 3, Issue 4-3 (2022)
Lamiae MEGZARI, Sanae BENJELLOUN. Le pilotage de l’immatériel, un renouveau du contrôle de gestion : Cas de
l’Office National des Chemins de Fer

Le pilotage de l’immatériel, un renouveau du contrôle de gestion : Cas de


l’Office National des Chemins de fer

Résumé :
Dans un contexte caractérisé par une forte incertitude, par la complexité et la nécessité de produire de la qualité́ tout en
répondant à un niveau d'exigence qui est sans cesse croissant ; c'est l'intelligence et le talent de l'ensemble des membres
d'une organisation qui doit être mobilisé en synergie. D’où, on assiste au passage d’une société et économie matérielle
vers une société et une économie fondée principalement sur le capital immatériel constituant, aujourd’hui, le principal
moteur de croissance de toute économie.
À cet égard, les organisations publiques, comme les entreprises privées, ont basculé vers ce nouveau modèle de
compétitivité. Un modèle qui tente principalement à appréhender ce capital invisible qui nécessite une gestion et un
pilotage harmonieux. Certes, plusieurs difficultés sont présentes en matière d’identification, de mesure, de pilotage, de
protection ou encore de transmission de ce type de capital. Et, l’ensemble de ces éléments-là interpellent la communauté
des chercheurs en économie et gestion. À cet effet, nous nous sommes focalisés sur le pilotage du capital immatériel qui
exige l’intervention d’un système de contrôle de gestion, non pas traditionnel, mais plutôt un système innovant capable
d’accueillir à la fois les éléments financiers, mais également l’aspect immatériel.
Nous essayerons à travers l’étude exploratoire du cas de l’Office National des Chemins de fer marocains de comprendre
comment le pilotage de la dimension immatérielle de la performance dans cet organisme public renouvelle le contrôle de
gestion. Nous expliquerons les conditions d’émergence de cette démarche innovante de pilotage ainsi que ses
implications sur le management de la performance.
Pour ce faire, nous avons combiné plusieurs techniques méthodologiques à savoir : les entretiens semi-directifs (11
responsables de l’ONCF), l’observation directe et l’analyse documentaire interne. Ainsi, pour l’analyse des différentes
informations obtenues, nous avons choisi l’analyse de contenu manuelle en suivant l’approche d’analyse horizontale.
Cette méthode nous a permis de tirer les résultats les plus pertinents qui ont été exprimés par les répondants des fois
explicitement et d’autrefois de manière implicite.
Les résultats issus de cette étude montrent que l’adoption d’un système managérial, axé sur la valorisation de
l’investissement immatériel et la mise en valeur des composantes du capital immatériel, est propice à la mise en place de
processus innovants en contrôle de gestion pour le pilotage de la performance.

Mots clés : Capital immatériel; Contrôle de gestion; Pilotage de la performance, Organisation publique, Tableau de bord
prospectif.
Classification JEL: L32, M49
Type de l’article : Recherche empirique

Abstract:
In a context characterized by high uncertainty, complexity and the need to produce quality while meeting ever-increasing
demands, the intelligence and talent of all members of an organization must be mobilized in synergy. Hence, we are
witnessing the transition from a material society and economy to a society and economy based mainly on intangible
capital, which is now the main engine of growth for any economy.
In this respect, public organizations, as well as private companies, have switched to this new model of competitiveness. A
model that mainly tries to apprehend this invisible capital that requires a harmonious management and piloting. Certainly,
several difficulties are present in terms of identification, measurement, piloting, protection or transmission of this type of
capital. All of these elements are of concern to the community of researchers in economics and management. To this end,
we have focused on the management of intangible capital, which requires the intervention of a management control
system, not a traditional one, but rather an innovative system capable of accommodating both the financial elements and
the intangible aspect.
Through an exploratory study of the case of the Moroccan National Railways Office, we will try to understand how the
management of the intangible dimension of performance in this public organization renews management control. We will
explain the conditions of the emergence of this innovative steering approach as well as its implications on performance
management.
To do this, we have opted for an exploratory case study of the Office National des Chemins de Fer by combining several
methodological techniques: semi-directive interviews, direct observation and internal documentary analysis. Thus, for the
analysis of the different information obtained, we chose the manual content analysis following the horizontal analysis
approach. This method allowed us to extract the most relevant results that were expressed by the respondents, sometimes
explicitly and sometimes implicitly.
The results of this study show that the adoption of a managerial system, focused on the valuation of intangible investment
and the development of intangible capital components, is conducive to the emergence of managerial innovations in
management control in order to enable the piloting of the intangible dimension of performance.

Keywords : Intangible capital; Management control; Performance management, Public organization, Balanced scorecard.
JEL Classification: L32, M49
Paper type: Empirical research

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1. Introduction

Aujourd’hui, le Maroc, comme d’autres pays, vise à améliorer et moderniser son secteur
public en matière de gestion et de management tout en instaurant des outils pertinents qui
étaient généralement, et pour longtemps, réservés et destinés aux entreprises du secteur
privé. L’objectif principal est de rendre les organismes publics marocains aptes à relever
les défis actuels imposés par leur environnement et à maitriser les rouages de la gestion
publique.
Parallèlement, nous assistons à l’apparition d’une nouvelle ère de l’économie, l’ère de
l’immatériel. L’ économie actuelle est devenue de plus en plus tributaire de l’innovation,
de la connaissance et du savoir. Elle se base principalement sur les activités de services et
se caractérise par l’importance de l’immatériel à la fois comme levier de création de la
valeur et comme facteur de compétitivité pour toutes les organisations (Bose et Oh, 2003).
Au Maroc, le débat sur le capital immatériel s’est intensifié, notamment après le discours
historique de Sa Majesté lors de la fête du Trône du 30 juillet 2014, ce qui a conduit vers
une évaluation de la richesse globale du pays tout en mettant au centre le capital
immatériel comme facteur de création et de répartition équitable de la richesse nationale.
Cela dit que, le Maroc est devenu conscient de l’importance que joue l’immatériel dans la
performance des organisations et du pays tout entier (Aamoum, H., & Sail.S., 2020).
Ainsi, sur le plan managérial, le concept du capital immatériel, omniprésent dans la
littérature fait l’objet d’un vaste débat étant donné que son contenu est large et entraîne des
pratiques différentes d’une organisation à l’autre, notamment en ce qui concerne son
identification, son évaluation et son pilotage. La prise en compte de l’immatériel dans le
pilotage de la performance des organisations nécessite de s’inscrire dans une approche
renouvelée du contrôle de gestion afin de créer de la valeur.
Dans cette étude de nature exploratoire, notre objectif est de cerner les conditions
d’émergence de cette nouvelle démarche de pilotage ainsi que les changements que cela
implique sur le management de la performance dans un organisme public marocain.
Ce papier commence par une revue de la littérature des concepts qui fondent notre
recherche, le capital immatériel, ses approches et ses composantes principalement humaine
et organisationnelle, ainsi que le pilotage de la performance immatérielle comme étant une
innovation managériale qui renouvelle les processus du contrôle de gestion. Ensuite, il fait
une présentation de la méthodologie employée et du cas sur lequel porte l’étude, l’office
national des chemins de fer au Maroc, ses besoins de pilotage et un descriptif de l’existant,
avant de conclure avec la discussion des résultats.

2.Capital immatériel et pilotage de la performance publique

Si durant les Trente Glorieuses, le succès économique reposait essentiellement sur la


richesse en matières premières, sur les industries manufacturières et sur le volume de
capital matériel dont disposait chaque nation, aujourd’hui la réalité est toute autre
(Andrieux, 2011). À partir des années 80, nous assistons à une montée, sans précédente, de
l’immatériel liée directement aux progrès des connaissances scientifiques et techniques,
aux changements de l’environnement, à la pression de la concurrence qui exige de produire
de la qualité et de répondre, sans cesse, à un niveau d’exigence assez croissant. Tous ces
éléments-là, obligent les membres d’une organisation à innover et à utiliser le capital
immatériel comme l’un des principaux outils stratégiques, ce qui constitue le critère le plus
déterminant dans leur avantage compétitif (Mhedhbi, 2010).

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Conscientes de l’importance de l’aspect qualitatif de l’immatériel et de sa nature


stratégique dans la création de valeur ainsi que dans l’amélioration des performances et de
la compétitivité (Edvinsson et Malone, 1999), les entreprises ont été les premières à
basculer vers l’investissement dans ce type de capital et commencent à s’orienter plus
massivement vers sa détention et son développement.
2.1. Capital immatériel : Approche et composantes
En tant que science, le capital immatériel notamment par rapport aux axes conceptuels,
définitionnels et de classification est caractérisé par une certaine parcimonie dans le domaine de la
recherche, qui est resté encore embryonnaire. Ainsi, selon Bounfour (1998), le capital immatériel
peut être vu selon différentes perspectives.
2.1.1. De l’approche basée sur les ressources au management de la connaissance
Dans le cadre de l’approche stratégique, plusieurs types d’œuvres ont fortement contribué à fonder
une doctrine du capital immatériel et de sa dimension stratégique (Bounfour, 2011). Le point de
départ était des travaux de Porter (1980,1985,1990) et de son constat empirique qui a montré que
l’avantage compétitif s’explique moins par la dynamique des cinq forces concurrentielles au sein
des structures de marché (Bounfour, 2003), mais plutôt par la manière, dont une entreprise combine
entre ses ressources matérielles et surtout immatérielles qui forment ses ressources stratégiques,
clés ( Grant, 1991). Les différents types d’œuvres suscités sont :
• Approches basées sur les ressources
Avec la parution de son livre intitulé « Theory of the growth of the firm », Penrose en 1959 a été le
fer de lance de la théorie basée sur les ressources (Germon, 2013). C’est une nouvelle théorie
économique qui place le savoir au centre du processus de création de la richesse (Mhedhbi, 2010)
et qui repose sur l’utilisation efficace et efficiente des ressources d’une organisation pour la
distinction concurrentielle.
Plusieurs auteurs ont contribué à l’enrichissement de cette approche, comme Penrose, Bounfour et
Barney qui l’ont rendue plus opérationnelle en faisant la distinction entre les ressources physiques,
les ressources humaines ou encore les ressources organisationnelles.
Selon cette théorie, le capital immatériel est appréhendé comme une ressource interne stratégique
de l’entreprise. Cette dernière doit combiner entre ce type de capital et ses ressources matérielles
afin de développer les compétences nécessaires à l’établissement d’un avantage concurrentiel
durable et donc sa rentabilité (Bounfour, 2013). C’est l’utilisation efficace des ressources qui
permet de faire une distinction concurrentielle entre les organisations.
• Approches basées sur les compétences
Le concept du « cœur de compétence » est introduit par Prahalad et Hamel (1990) . Il peut être
considéré comme le savoir-faire de l’entreprise par lequel elle acquiert son avantage concurrentiel
(CIGREF,2008) et qui va lui permettre d’apporter des recettes supérieures dans le futur.
Pour cette approche, la réelle source d'avantage concurrentiel pour l'entreprise se trouve dans la
capacité du management à proposer un ensemble de technologies et de compétences qui vont
permettre aux métiers de l'entreprise de s'adapter rapidement dans un contexte de changement
(Hamel,1994).
• L’approche des capacités dynamiques
L’approche des capacités dynamiques, apparue avec Teece, Pisano et Shuen en 1997, insistent sur
le côté immatériel des actifs, notamment organisationnels, et l’impact de leur accumulation sur
l’acquisition des aptitudes et sur l’apprentissage.
Les capacités dynamiques d’une firme résident dans sa capacité à s’adapter rapidement au
changement permanent et aux mutations environnementaux, à travers la construction, le maintien,
l’intégration et la reconfiguration des compétences internes et externes(Germon, 2013). La création
de la richesse réside, donc, dans la recherche des meilleurs combinaisons et usages des ressources
immatérielles (Louzzani,2004).
En gros, le concept de capacité dynamique reflète tout un processus composé d’un ensemble
d’activités identifiables capable de transformer une capacité organisationnelle, la gérer ou créer une

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nouvelle à travers l’investissement dans les ressources et l’apprentissage de nouveau savoir agir
pour accompagner les mutations de l’environnement ou bien les initier (adaptation ou
transformation) (St-Amant et Renard,2003).
• L’approche évolutionniste basée sur l’apprentissage et les routines
organisationnelles
L’approche évolutionniste a été couronnée par les travaux de Nelson et Winter en 1982 et enrichie
par les contributions de plusieurs autres auteurs tels que Dosi, Teece et Winter en 1990 et Dosi et
Alii en 1988.
Les évolutionnistes passent un message simple qui dit que la performance d’une entreprise se
distingue d’une autre par la qualité intrinsèque de ses facteurs de production, et surtout par la
manière dont elle les met en œuvre. Cette coordination dépend largement des savoir-faire et des
compétences organisationnelles dont dispose une entreprise.
En effet, la valeur, la qualité et la pérennité d’une organisation s’appuient sur sa faculté à maitriser
ses apprentissages et ses routines fortement rattachées à la mise en place des procédures
organisationnelles (Nelson et Winter,1982).
• Management de la connaissance
À partir des années 90, un nouveau courant fait apparaître avec ses deux fondateurs Nonaka et
Takeuchi appelé « The Knowledge Based Economy ». Ces auteurs soulignent l’importance du
savoir dans la nouvelle ère de l’économie qui constitue pour eux un facteur rare et une source de
compétitivité surtout dans un tel contexte où l’information devient abondante. Le savoir et la
connaissance sont des ressources stratégiques.
La firme est considérée ici comme un système évolutif et autonome de production, d’application de
connaissance (Drucker, 2001), de circulation et d’échange du savoir qui nécessite une certaine
interaction entre les individus et le groupe ce qui affecte sans cesse la consommation, les sources
de la croissance et de la compétitivité, les modes d’organisation et de management de l’entreprise,
le processus de construction des compétences et d’acquisition de qualifications nouvelles pour le
capital humain. En effet, la priorité d’une entreprise est de maximiser la valeur des connaissances
construites afin de développer et de renforcer son potentiel de performance (Germon,2013).
En ce qui concerne le Knowledge Management , Mouritsen et Larsen (2005) précisent qu’il existe
deux vagues du Knowledge Management et l’information du capital immatériel représente la
seconde vague. L’objectif principal de cette deuxième vague diffère du sens de Nonaka qui
considère la connaissance comme ce que possède l’individu. Certes, les connaissances tacites des
individus représentent les fondements de toutes les connaissances, mais plusieurs études ont intégré
l’importance du capital organisationnel, du capital social et du capital clientèle dans le Knowledge
Management. Et donc, leur importance dans la production et la création de valeur, tout en
cherchant à faire interagir les connaissances des employés avec d’autres employés, avec les
technologies et les processus d’un côté et les relations avec les clients de l’autre côté.
Nous pouvons déduire l'importance du rôle stratégique des connaissances qui mène les chercheurs
et les professionnels à définir des concepts, des approches, et des méthodes pour pouvoir identifier
et manager le capital immatériel. Les pratiques du Knowledge Management représentent des
moyens qui permettent aux organisations de maintenir et de développer les actifs liés aux
connaissances dans l'organisation.
2.1.2. Définitions et décompositions du capital immatériel
Il n'existe pas une définition du capital immatériel qui fasse l'unanimité parmi la diversité
des acteurs qui le traite avec un intérêt particulier , à savoir les investisseurs, les
organismes comptables, les universitaires et les consultants. Certains parlent du capital
immatériel, alors que d'autres préfèrent employer le terme « capital intellectuel » ou «
capital intangible » ou d’autres termes. La définition du concept fait ainsi appel à de
nombreux termes tel qu’immatériel, intangible ou intellectuel qu’à l’instar de Pierrat
(2009) nous les considérerons comme étant synonymes. Le tableau suivant représente
quelques définitions des auteurs sur le capital immatériel, selon l’approche stratégique.

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TABLE I. Les différentes définitions du capital immatériel


Auteurs Années Définitions
« Le CI est le terme donné à la combinaison des actifs
intangibles du marché, la propriété intellectuelle, les actifs
Brooking 1996
liés à l’être humain et à l’infrastructure de l’organisation et
qui aide l’entreprise à fonctionner ».
Le CI est « la détention d’un savoir, d’une expérience
Edvinsson &
concrète, d’une technologie d’organisation, de relations
Malone 1999
avec les clients et de compétences professionnelles qui
confèrent un avantage compétitif sur le marché ».
« Le CI est insaisissable, mais du moment qu’on le
découvre et qu’on l’exploite, il peut fournir à l’organisation
Bontis 2001
une nouvelle base des ressources avec laquelle elle peut
concurrencer et gagner ».
«Le capital immatériel est la capacité d’une entreprise à
coordonner, à orchestrer et déployer ses ressources en
Rastogi 2003
matière de connaissances vers la création de valeur dans la
poursuite de sa vision avenir ».
Elle considère que le champ d’application des actifs
intellectuels a évolué vers un concept plus large qui
OCDE 2008 comprend «les ressources et capacités humaines, les
moyens structurels (bases de données, technologie,
habitudes et culture) et le capital relationnel»
« Un patrimoine ne se résume pas à une liste de biens
matériels ou à une simple somme d’argent. Derrière ce qui
se mesure se cache toute une dimension immatérielle, mais
Depoorter 2016 pourtant bien réelle et qui lui confère toute sa valeur. Il
s’agit en somme de toute la richesse cachée qui permettra
de générer de la rentabilité future et que n’on ne lit pas
dans les comptes ».
Source : Élaboration des auteurs
Malgré la panoplie existante des définitions qui cherchent à décrire le capital immatériel, il
existe une certaine convergence dans les idées des différents auteurs en matière de
décomposition de ce concept qui est très récent (Dibi.A, et Benlakouiri, A., 2020).
Nous retenons, pour notre recherche, la décomposition de Sveiby, Edvinsson et Malone,
pour la simple raison qu’ils ont abouti à construire une typologie binaire qui explique
mieux et décompose d’une nouvelle manière le capital immatériel. Ces deux auteurs
distinguent entre le capital intellectuel « pensant » et le capital intellectuel «non pensant »,
c’est-à-dire le capital humain qui est primordial dans la réalisation de la compétitivité des
entreprises, du capital structurel qui correspond à l’utilisation du savoir, de l’information et
de leur diffusion aux niveaux interne et externe de l’entreprise.
Ces différentes composantes du capital immatériel se complètent et sont toujours en
interaction. C’est ainsi que la distinction d'Edvinsson et Malone, présentée ci-dessous, est
la plus utilisée pour décrire le capital immatériel.

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Fig. 1. Composantes du capital immatériel

Source : Edvinsson, Malone et Shawn, 1999


En effet, pour pouvoir utiliser le capital structurel, il faut disposer de systèmes
d'information, de réseaux, d'infrastructures, de bases de données, d'informations sur le
marché et sur la concurrence, etc. D’ailleurs, Stewart considère que le capital structurel est
« un emballage » qui enveloppe le capital humain, et qui va lui permettre d'être utilisé afin
de créer de la valeur pour l'entreprise. Donc, chaque composante du capital immatériel est
liée aux autres composantes.
Ainsi, une bonne connaissance des interactions existantes entre les différentes composantes
du capital immatériel donne la possibilité de maîtriser, comprendre et savoir ce qui crée de
la valeur chez une organisation et de quelle manière (Jallouli, 2008).
Pour expliquer cette dynamique, nous partons du principe que toute entreprise ne peut être
réduite à une addition de ses actifs (Edvinsson et Malone, 1999). Autrement dit, disposer
des différentes sources de l’immatériel n’est pas suffisant (Saint-Onge et Armstrong,1996)
pour créer de la valeur et aucune composante ne peut la créer de façon isolée. En effet ,au
sein d’une organisation, la création de valeur relève de sa capacité à améliorer toutes les
composantes de son capital immatériel, à les faire interagir pour qu’elles se nourrissent les
unes des autres. C’est à l’intersection des composantes du capital immatériel , à la synergie
générée entre elles que se matérialise toute nouvelle valeur créée par l’organisation
(Grasenick et Low, 2004).
2.2. Pilotage de la dimension immatérielle de la performance publique : une
innovation managériale en contrôle de gestion
Appréhender cet invisible qui représente la partie immergée dans l’économie, constitue
donc un défi majeur : être en mesure de l’identifier, de le mesurer, de le piloter, de le
protéger ou encore de le transmettre sont autant de questions animant la communauté́ des
chercheurs en économie et gestion (Mignon et Walliser,2015).
À cet effet, le développement d’avantages concurrentiels par la création, la protection, le
développement de ressources rares au centre desquels on trouve les connaissances et les

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compétences nécessitent un système de contrôle de gestion créatif et adapté à ce type de


capital. Ce qui pousse le système de contrôle de gestion à se réinventer et à sortir, à tout
le moins, de ses outils et processus qualifiés de traditionnels qui se basaient seulement sur
tout ce qui est financier et négligent l’aspect non financier. Donc, le pilotage de
l’immatériel constitue un nouveau terrain de jeu riche de potentialités pour le contrôle de
gestion (Cappelletti,2018) et lui offre, certes, la possibilité de se renouveler.
2.2.1. L’Innovation managériale : Variable Clé de Compétitivité et de performance
Toutes les fonctions de l’entreprise sont issues d’une innovation managériale et sont
régulièrement transformées par des innovations managériales. C’est pour cette raison qu’il
est difficile d’envisager un pilotage du capital immatériel avec ses différentes composantes
sans innovations managériales. En effet, innover est une des composantes clés de la
compétitivité́ (Verona, Ravasi, 2003) et suscite une attention soutenue de la part des
chercheurs et des praticiens (Bertheau et Gilles, 2015).
L’innovation est alors définie dans son sens le plus large comme « la génération et
l’adoption de nouvelles idées ou de nouveaux comportements se rapportant à un dispositif,
un système, un procédé, une politique, un programme, un produit ou un service qui sont
nouveaux pour l’organisation adoptante» (Aiken et Hage, 1971; Damanpour et al., 1989;
Pierce et Delbecq, 1977; Zaltman et al., 1973) (Dubouloz, 2013). Ces dernières années ont
été marquées par une accélération du nombre de changements et d’innovations dans les
organisations (Beaujolin-Bellet, Schmidt, 2012) que ce soit immatériels (règles,
procédures, outils de gestion) ou matériels (technologies)(Roxana Ologeanu-Taddei et
al.,2015). L’intérêt porté à l’innovation organisationnelle ou managériale, comme objet
d’investigation spécifique, a débuté vers la fin des années quatre-vingt et s’est développé
ces dernières années avec Birkinshaw, Hamel et Mol en 2008, Ganter et Hecker en 2013,
Lam en 2005, Le Roy, Jaouen, Jourdan en 2013 et enfin Mol et Birkinshaw en 2009
(Dubouloz,2013), à la différence des innovations technologiques qui ont fait depuis
longtemps l’objet de la majorité des recherches sur l’innovation (Crossan et
Apaydin,2010).
Le développement récent de ce type d’innovation peut s’expliquer par une reconnaissance
tardive du rôle stratégique des innovations organisationnelles. Pourtant, durant la première
moitié du XXème siècle, les innovations qui ont propulsé les États-Unis au premier rang
des économies capitalistes étaient d’ordre organisationnel plus que technologique,
impliquant notamment de nouveaux principes d’organisation de la production et de la
distribution (Fagerberg, 2005). Toutefois, malgré cet essor récent, la recherche sur
l’innovation organisationnelle est encore qualifiée de balbutiante ou d’embryonnaire
(Damanpour et Aravind, 2012a; Volberda, Van Den Bosch et Heij, 2013). En effet, si la
littérature est parvenue à une acception commune du concept d’innovation technologique,
aucun consensus sur la définition de l’innovation organisationnelle ne semble avoir été
atteint (Lam, 2005). L’« innovation managériale » (IMa) est un concept polymorphe et
polysémique, recouvrant des réalités multiples, comme en témoignent les différents
vocables utilisés pour le nommer (Mignon, 2017) : innovation administrative (Evan,1966;
Teece,1980; Damanpour,1987), innovation organisationnelle (Daft,1978;
Damanpour,1984; Ménard,1995; Ayerbe-Machat,2003), innovation managériale (Hamel,
2006; Damanpour et Aravind, 2012 ; Jaouen et Le Roy, 2013) ou encore changement
organisationnel et dont le dénominateur commun réside dans la prise en compte du
caractère non technologique de la nouveauté introduite au sein d’une organisation.
Selon Hamel (2006), l’innovation managériale est définie comme « un écart important par
rapport aux principes, processus et pratiques traditionnels de management, ou comme un
écart par rapport aux formes organisationnelles courantes qui changent significativement la

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façon dont le travail managérial est réalisé. En le disant simplement, l’innovation


managériale change la façon dont les managers font ce qu’ils font ». Elle a pour objectif de
mieux atteindre les buts de l’organisation.
Dans la même voie, Birkinshaw, Hamel et Mol (2008) définissent l’innovation
organisationnelle comme « la génération et l’implémentation de pratiques, procédés,
structures ou techniques de management qui sont nouvelles pour l’état de l’art et destinées
à favoriser l’atteinte des objectifs organisationnels » et donnent l’exemple du système de
production de Toyota et du tableau de bord prospectif. Par contre, Van Den Bosch et
Volberda (2013) expliquent l’innovation managériale autrement. Ils la considèrent comme
« les nouvelles approches en matière de connaissances pour réaliser le travail de
management et les nouveaux procédés qui produisent des changements dans la stratégie, la
structure, les procédés administratifs et les systèmes ».
Par cela, nous pouvons dire à l’instar de Mignon (2017), qu’innover en management, c’est
changer les façons de définir à l’avance ce que l’on compte faire (planifier), innover dans
les formes d’organisation, faire évoluer les modes d’intégration et modifier les façons
d’évaluer le bon déroulement et les résultats de l’action. Et, cela englobe toutes les
nouvelles pratiques managériales, les nouvelles stratégies, procédures, politiques et
structures organisationnelles (Birkinshaw et al., 2008 ; Damanpour et Aravind, 2012). Et,
certes ces nouvelles pratiques contribuent de façon majeure et constituent un facteur
explicatif de la performance de l’entreprise et de son amélioration, comme en témoignent
Hamel et Breen, (2007) .
2.2.2. Le pilotage de la dimension immatérielle de la performance dans les
organisations publiques
Dans le secteur privé, l’avantage compétitif des entreprises est principalement constitué
d’éléments immatériels comme la puissance des marques, le savoir-faire, la capacité
d’innovation. Cet état de fait est de mieux en mieux intégré dans la stratégie des entreprises
où des outils spécifiques à la gestion des actifs immatériels se multiplient. Au sein de la
fonction publique, il ne peut en être autrement. Même si les objectifs intrinsèques du public
sont très éloignés de ceux du privé, les organismes publics ne peuvent pas rester
insensibles à l’émergence du poids de l’immatériel dans les processus de production du
service public. Ces processus qui se fondent largement sur des éléments intangibles,
difficilement gérables du fait de leur nature immatérielle sont encore assez mal
appréhendés par les gestionnaires publics (savoir-faire, développements informatiques,
bases de données, capacité organisationnelle, etc.). D’ailleurs, en 2010, Yolanda Ramirez,
experte en management du capital intellectuel, a relevé que de nombreux auteurs ont
reconnu que le capital intellectuel était autant présent, voire plus, dans le secteur public que
dans les entreprises privées.
Personne ne peut nier que le niveau de performance d’un organisme public dépend
largement de la qualité de ses actifs immatériels, c’est à dire, par leur robustesse, pérennité
et capacité à contribuer à la réalisation des objectifs stratégiques. C’est ainsi
qu’aujourd’hui, et un peu partout dans le monde, l'évaluation de la performance des
organisations publiques est devenue un impératif et une nécessité. Ceci est porté
essentiellement par le New Public Management qui cherche à formuler une réponse à la
pression sociale qui veut que l’on fasse bon usage des fonds publics pour réaliser des
services de qualité dédiés aux citoyens (Moumene et Benhrimida, 2017).
C’est dans ce sens que , le Maroc s’est engagé dans un vaste processus de modernisation
de ses administrations publiques. Une volonté, qui se manifeste par une adoption d’une
réforme (Loi organique relative à la loi de finances de 2016) dont les jalons sont
essentiellement liés au renforcement de la performance de la gestion publique.

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L’instrumentation du contrôle de gestion représente une opportunité inédite pour mener ces
réformes aux fins escomptées, développer des actifs matériels et surtout immatériels et
maitriser les rouages de management du secteur public. D’ailleurs, Demeestère a pu
démontrer en 2005 que, parmi les raisons d’être du contrôle de gestion dans le contexte
public, il y a la contrainte de l'utilisation optimale des ressources allouées, la question
d'évaluation de la qualité du service rendu au citoyen, la simplification des procédures, la
maîtrise des délais, la réduction des coûts, l’évaluation des résultats et de la performance,
la responsabilisation des services, répondre au besoin d'adaptation de l'organisation aux
évolutions de l'environnement et en dernier lieu, la maîtrise du capital immatériel,
accompagnée du renforcement de l'apprentissage organisationnel (le retour d’expérience
collectif).
Par conséquent, afin de faire face aux rouages du management que connaît le secteur
public et pouvoir maîtriser son capital immatériel, plusieurs changements dans les
systèmes de contrôle de gestion s’imposent. En effet, un ensemble d’outils du contrôle de
gestion innovants ont été développés pour fournir aux responsables l’information
pertinente en temps utile. Parmi ces innovations majeures, nous trouverons le Balanced
Scorecard (Kaplan & Norton, 1992) : outil pertinent et bien utile dans l’organisation
publique lui permettant d’évaluer sa performance financière et non financière (Moumene et
Benhrimida, 2017).
Le Balanced scorecard est un modèle de tableau de bord multidimensionnel développé aux
États-Unis par Kaplan et Norton en 1992. C’est un modèle qui répond aux critiques faites
aux tableaux de bord traditionnels qui sont considérés comme des outils fortement orientés
sur l’évaluation des performances essentiellement financières et à court terme. Leurs
travaux montrent que la performance doit être liée à la notion de pilotage stratégique. Le
pilotage stratégique est la mise à la disposition de la direction de l’entreprise d’un nombre
d’indicateurs variés (financiers et non financiers, à court terme et à long terme), regroupés
sous la forme d’un tableau de bord, de façon à aider les dirigeants dans leur prise de
décision stratégique et vise par conséquent un horizon relativement à long terme.
Le tableau de bord prospectif n’essaie pas d’estimer la valeur des biens immatériels, il
fournit un nouveau cadre pour décrire la stratégie d’une organisation en reliant les actifs
immatériels et matériels dans les activités créatrices de valeur.
Le Balanced scorecard contient quatre axes, financiers et non financiers que nous pouvons
les présenter comme suit :
Fig. 2. Balanced Scorecard

Source : Kaplan et Norton, 2003


Les quatre catégories d’indicateurs sont liées par une chaîne de causalité : la performance
financière est considérée comme le but final, conditionné par la satisfaction des clients,

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elle-même dépendant de la bonne organisation des processus internes, qui reposent quant à
eux sur une motivation suffisante des acteurs et des systèmes d’information performants.
Ce qui montre l’interaction entre les différents éléments constituant le capital immatériel
des organisations.
Fig. 3. La chaîne de causalité au sein du Balanced Scorecard

Source : Kaplan et Norton, 2003


Les quatre perspectives ne sont donc pas en conflit, elles se conditionnent mutuellement.
À l’issue de notre revue de littérature, nous pouvons déduire que l’intérêt accordé à
l’investissement immatériel ainsi que la prise en compte de la dimension immatérielle dans
les pratiques managériales et organisationnelles est naturellement, propice à la mise en
place de processus innovants en contrôle de gestion pour le pilotage de la performance.

3.Méthodologie de recherche
3.1. Déroulement de l’étude
L’aspect théorique de notre travail a été complété par une étude qualitative exploratoire du
cas de l’ONCF. Cette étude nous parait comme un moyen pertinent permettant de
répondre à nos questions de recherche. En effet, cette méthodologie retrouve tout son sens
et son utilité «lorsque les questions comment et pourquoi se posent, quand le chercheur n’a
que peu de contrôle sur les événements, et lorsque le centre d’intérêt porte sur un
phénomène contemporain au sein d’un contexte social réel » (Yin R.K, 1990). Ainsi,
l’exploration donne la possibilité d’identifier pourquoi et comment les variables sont liées
les unes aux autres.
Nous avons pour cela, tout au long de notre intervention au sein de la Direction Régionale
Infrastructure et Circulation Nord, considérée comme un service de production de la
valeur, procédé en combinant plusieurs techniques méthodologiques :
L’observation directe non participante qui consistait essentiellement, en
l’observation des acteurs en action, l’observation du processus de contrôle de
gestion afin d’identifier les éléments de l’immatériel, à savoir le capital humain
et structurel, ainsi que les différents outils de pilotage utilisés.
Les Entretiens semi directifs (11 entretiens), auprès des responsables, en se
basant sur un guide d’entretien préalablement établi (voir annexe, Tableau1).
Notre guide a été structuré en axes comme suit :
- Axe 1 : Informations générales
- Axe 2 : Objectifs stratégiques
- Axe 3 : management et organisation
- Axe 4 : inventaire des composantes du capital immatériel
- Axe 5 : contrôle de gestion et pilotage de la performance
immatérielle
Et, l’analyse documentaire interne (analyse des directives, des rapports…).
Concernant le choix des répondants, nous avons opté pour la méthode d’échantillonnage
non probabiliste. Nous avons donc interrogé les responsables accessibles au sein de la
Direction Régionale Infrastructure et Circulation Nord.

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3.2. Traitement des données


Pour le traitement et l’analyse de données obtenues, nous avons adopté l’analyse de
contenu manuelle qui est fortement recommandée pour l’étude exploratoire.
Par ailleurs, les données que nous avons collectées sont de nature qualitative et se
caractérisent par leur richesse en informations et par leur complexité, comparativement aux
données quantitatives. Pour Saunders (2003), du fait de leur nature complexe et non
standardisée, les données qualitatives collectées nécessitent probablement une
classification en catégories avant de pouvoir être analysées de manière signifiante.
D’ailleurs, c’est l’intervention de l’analyste, de sa finesse, de sa perspicacité ainsi que son
intelligence du corpus qui va permettre d’aller au-delà des premiers résultats bruts comme
le précisent Gavard-Perret et al. (2012).
Ainsi, nous avons procédé par un traitement préalable qui s’avère crucial dans toute étude
qualitative, qui est celui de la transcription des réponses des Interviewés. Puis, nous avons
usé de l’indexation des différents documents internes pour le découpage, la classification et
le regroupement des informations par rapport à chaque variable ou item de notre étude tout
en préservant le sens implicite.
Ce processus d’analyse horizontale qui relève de l’analyse thématique du contenu, à la fois
manuel et intellectuel, nous a permis de retrouver facilement les informations dont on a
besoin pour chaque axe. En effet, cette approche détecte les récurrences et les régularités
d’un document, que ce soit document interne ou contenu d’un entretien, à l’intérieur du
corpus total en respectant les rubriques fixées au niveau du guide d’entretien. Nous
n’avons pas traité la structure individuelle de chaque répondant, mais plutôt nous avons
essayé de réunir les informations pour chaque item à partir des différentes sources
d’informations qu’on avait, pour ne choisir au final que les informations pertinentes au
regard de chaque axe, comme le recommandent Gavard-Perret et al. (2012).
L’analyse de données textuelles nous a permis de présenter et d’expliquer d’une manière
descriptive, l’importance de l’immatériel dans les processus managériaux et
organisationnels de l’ONCF, et les implications sur le pilotage de la performance.
3.3. Terrain de l’étude et besoins en pilotage
L’Office National des Chemins de fer est un établissement Public à caractère Industriel et
Commercial (EPIC), doté de la personnalité civile et de l’autonomie financière et sous
tutelle du ministère de l’Équipement, du Transport et de la logistique. Il dispose d’un
ensemble de directions rattachées à la direction générale telle que : la direction stratégie et
communication , la direction des ressources humaines, la direction audit et pilotage de la
performance … , et de quatre pôles : pôle voyageurs, pôle infrastructure et circulation, pôle
fret et logistique et pôle maintenance matériel.
L’ONCF veille à assurer le transport ferroviaire que ce soit pour les voyageurs ou de la
marchandise avec des conditions de sécurité, de sûreté, de confort, de régularité, de coût et
de développement durable qui constituent les objectifs stratégiques de cet office.
En effet, dans les industries à enjeu de sûreté de fonctionnement, les besoins en matière de
pilotage du capital immatériel sont liés à deux problèmes :
• La persistance d’un nombre élevé d’évènements indésirables liés aux activités,
malgré les dispositifs et procédures mis en place ;
• L’existence d’une culture de blâme, où l’erreur est perçue comme liée au
comportement d’un individu, et ne constitue pas une opportunité d’apprentissage et
d’amélioration du système et de prévention d’évènements indésirables futurs.
Ces deux constats sont liés à des éléments appartenant aux composantes du capital
immatériel (humain et structurel) qu’il faut gérer, piloter et améliorer.

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Conscient de l’importance de l’immatériel dans l’accomplissement de ses objectifs de


sécurité , de coût et de délai , l’ONCF poursuit une stratégie de valorisation des actifs
matériels et surtout immatériels pour en faire un réel relais de croissance, et s’est donc
lancé dans l’amélioration de la gestion de son système ferroviaire pour le moderniser et le
rendre capable de tenir compte du capital immatériel qui constitue la pierre angulaire de
toute son activité.
À cet effet, un grand intérêt a été dédié à la mise en place d’une culture positive de sécurité
et à son développement de manière appropriée au contexte de l’office. Cette mise en place
s’est concrétisée par l’instauration d’un système de management de la sécurité (SMS) dont
les principaux leviers sont de nature immatérielle.
Le système de management de la sécurité (SMS) est un processus explicite, global et
proactif qui couvre toutes les activités à tous les niveaux hiérarchiques. C’est dans ce sens
qu’il intègre les systèmes opérationnels et techniques, l’organisation et les dispositions
relatives aux structures, responsabilités et politiques ainsi que les procédures mises en
place pour gérer les risques en matière de sécurité ferroviaire. Ce système ne s’arrête pas
là, mais il permet de gérer la sécurité ferroviaire même pour l’activité des autres
intervenants tels que les sous-traitants et les clients tout en tenant compte, également, des
effets sur l’environnement.
En effet, il s’agit d’un système fondé principalement sur les valeurs de l’office et qui met
l’accent sur les connaissances, les compétences et la traçabilité des actions au niveau de
toutes les activités de l’ONCF. Il veille au respect des principes généraux de management
de l’office et considère la sécurité comme une caractéristique essentielle de sa production
de valeur. Il agit, également, sur la consolidation de l'expérience acquise et la capitalise par
la pratique. Ainsi, il contribue à détailler et préciser les modalités de réalisation des actions
et à gérer les interfaces des processus.
Par ailleurs, pour mettre en place un pilotage de la performance plus pertinent, dans le
cadre du système de management de la sécurité, il est important d’appréhender la
dimension immatérielle de la performance, à travers la création de valeur pour les clients.
Cette dimension doit être partie intégrante des systèmes de pilotage de la performance à
l’ONCF, et donc traduite en indicateurs. En effet, en présence du seul système budgétaire
pour piloter la performance, la qualité de service se trouve occultée au profit d’un
management purement administratif des ressources.
4. Résultats et discussions

Le système de pilotage place l’activité opérationnelle dans une perspective stratégique et


met en évidence les chaînes de satisfaction du client auxquelles elle contribue. Il relie la
stratégie globale à la réalité des opérations qui devra assurer sa mise en œuvre et doit
permettre d’ancrer la stratégie retenue dans les actions sur le terrain.
Pour cela, le SMS utilisé consiste en tout un système permettant de prescrire le pilotage
transversal des processus ayant un lien avec la sécurité des circulations dans toutes les
phases du cycle de vie du système ferroviaire : conception, réalisation, mise en service,
exploitation, maintenance, retrait du service. « l’objectif principal demeure zéro dommage,
cela veut dire zéro accident et zéro blessé ou mort dont l’ONCF porterait la
responsabilité » vision du Chef de Section Circulation sur le SMS.
La vision du Chef de Section Circulation. Également, il renforce la formalisation, la
cohérence, et la visibilité des moyens et actions accordés au management de la sécurité et
met en place une démarche proactive structurée de gestion des risques afin d’assurer la
sécurité. Ainsi selon le responsable du Service Organisation et Knowledge Management
« C’est un système qui organise l’activité de l’office tout en entier en matière de sécurité

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de la stratégie jusqu’au niveau opérationnel et qui se focalise sur le capital humain, les
procédures et processus, le côté financier et tout ce qui est culture et environnement ».
Les orientations stratégiques de l’ONCF sont traduites en plans d’action et objectifs
suivant quatre axes qui constituent les principaux enjeux du SMS et qu’il faut bien gérer et
piloter : la dimension humaine (formations, expériences, aptitudes…), la dimension
organisationnelle (règles et procédures…), la dimension sociale (culture…) et la dimension
financière. Le trois quarts de ces dimensions relève du capital immatériel. Ainsi, d’après
Birkinshaw (2008) qui définit l’innovation managériale comme étant la « génération et
implémentation de pratiques, procédés, structures, et techniques nouvelles et destinés á
permettre l’atteinte des objectifs organisationnels », nous envisageons les innovations
managériales dans les processus de contrôle de gestion. En effet, pour l’ONCF, le pilotage
de la performance immatérielle implique un renouvellement d’approche puisqu’il entraine
des changements de différentes natures, à savoir : la modification de systèmes existants, la
conception et la mise en service de nouveaux systèmes managériaux, le renouvellement du
contrôle de gestion en termes de processus et outils ainsi que l’instauration de nouveaux
indicateurs servant au pilotage des composantes du capital immatériel.
De grandes implications organisationnelles ont touché le système de contrôle de gestion. Il
est passé d’un contrôle à postériori (contrôle des résultats) vers un contrôle à priori, au vif
et à postériori et est aujourd’hui présent donc sous une approche proactive. Ce contrôle
s’effectue à trois niveaux (contrôle effectué par le chef de district ( KN1), contrôle par le
chef de section (KN2) et contrôle par le chef d’arrondissement (KN3) avec l’obligation de
rendre compte.
L’office s’appuie sur un pilotage systémique qui suppose la mise en place des instances de
pilotage réparties en deux catégories : instance de pilotage transverse (inter pôles, au
niveau central ou régional) et instance de pilotage verticale au niveau central ou régional.
Ainsi, le processus de fonctionnement de ces instances passe par trois étapes : planification
– tenue des réunions et rendre compte des résultats ou de l’avancement – décisions et
actions.
Pour faire face aux incidents et aux écarts soulevés, le système de contrôle de gestion peut
intervenir en modifiant et améliorant les plans d’action, en améliorant les règles,
procédures, processus ou pratiques et/ou redéfinissant les objectifs eux-mêmes. En effet,
l’efficacité du système de contrôle de gestion de cet organisme s’évalue par la capacité
d’apprentissage qu’il fournit aux collaborateurs. Ce contrôle doit être mené principalement
pour un but éducatif. C’est ainsi que, le responsable du Service Contrôle de gestion a
précisé que « Le personnel doit être informé des actions prévues ou entreprises pour
remédier aux problèmes de sécurité mis en lumière : information et feedback ».
Le système de contrôle de gestion de l’ONCF est un système de veille et d’anticipation de
manière continue, permanente et dynamique qui mobilise plusieurs outils de pilotage tels
que la comptabilité générale spéciale de l’office, la comptabilité analytique, les reportings ,
le système de planification budgétaire ainsi que les tableaux de bord.
L’utilisation des tableaux de bord au sein de l’ONCF est très récente. Ce sont ces tableaux
de bord qui ont permis d’innover en contrôle de gestion, en termes d’outils, suite à la
focalisation de l’office sur le pilotage de la dimension immatérielle de la performance. Ils
comportent un ensemble d’indicateurs, organisés en système, suivi par un responsable pour
aider à décider, à coordonner, à contrôler les actions. Sont utilisés les tableaux de bord de
suivi (opérationnels), les tableaux de bord de résultats et les tableaux de bord de
performance (généralement au niveau central).
Selon les responsables de l’office, les tableaux de bord sont d’une grande utilité puisqu’ils
permettent d’anticiper les risques, de suivre l’action, d’évaluer, de diagnostiquer, de
contrôler les résultats, de favoriser l’échange entre les niveaux hiérarchiques et ainsi

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d’améliorer le système de mesure de la performance. Ces tableaux de bord agissent tout


simplement sur le pilotage du capital humain et le capital organisationnel qui constituent la
pierre angulaire de la sécurité ferroviaire.
L’opérationnalisation des tableaux de bord avec différents indicateurs a entrainé plusieurs
changements qui ont porté essentiellement sur la formalisation et la structuration des
pratiques managériales. C’est pour cette raison que l’ONCF a mené plusieurs actions que
nous pouvions résumer dans la figure suivante :
Fig. 4. Actions de formalisation et structuration des pratiques managériales au sein de l’ONCF

Source : Élaborée par nos propres soins


Pour finaliser l’opérationnalisation des tableaux de bord, il a été primordial de construire
de nouveaux indicateurs purement qualitatifs pour le capital humain, afin d’assurer un bon
pilotage et une bonne gestion et mobilisation des collaborateurs, et pour le capital
organisationnel. À ces indicateurs, liés au pôle de production, s’ajoutent d’autres, rattachés
au pôle commercial permettant l’évaluation de la satisfaction des clients.
En effet, la fiabilité humaine joue un rôle très important pour l’ONCF. Elle comprend toute
le domaine relatif à la collecte et l’analyse de toutes les informations concernant un
collaborateur exerçant une fonction de sécurité, ayant ou pouvant avoir un impact sur la
manière de servir de ce dernier.
L’objectif pour la hiérarchie étant de détecter les signes d’alerte professionnelle,
sociologique, psychologique, physiologique ou médicale afin d’éviter toute dérive
fâcheuse du collaborateur sur le plan professionnel, et ce à travers la mobilisation de
plusieurs indicateurs.
Aussi bien que le capital humain, le capital organisationnel joue un rôle primordial dans
l’atteinte d’un niveau de sécurité très élevé et par conséquent rendre un service de qualité
aux usagers.
La figure ci-dessous présente les objectifs des indicateurs utilisés par l’office regroupés par
composante.

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TABLE II. Indicateurs du CI et leurs objectifs au sein de l’ONCF


Composantes du Objectifs des indicateurs Exemples d’indicateurs
C.I mobilisés
-Suivi des formations des - Nombre de morts et blessés
collaborateurs constatés ou potentiels
-Suivi des programmes de - nombre de garde-barrière
travail des collaborateurs endormi ou absent sans motif
-Suivi de réalisation des tâches avec barrières ouvertes
-Évaluation des connaissances - Agent de sécurité en état
des collaborateurs en matière de d'ivresse, sous l'emprise de
techniques, procédures et de la stupéfiants
documentation utile - Nombre de collaborateurs en
-Accompagnement dans leur besoin de formations
prise de décision
Capital humain
-Évaluation de leur capacité́ de
-Pour les indicateurs de fiabilité
résoudre les problèmes et humaine :
évaluation des risques * Nombre de personnes en
-Accompagnements et
manque de concentration (alerte
intégration au milieu de travail professionnelle)
-Évaluation du niveau
* Nombre de collaborateurs ayant
d’apprentissage et du retour une maladie grave (alerte
d’expérience. sociologique)
*Personnes ayant une
incohérence dans le discours
(alerte psychologique).
-Évaluation des procédures -Écart d’application des
utilisées procédures avec degré de gravité.
Capital -Évaluation du management - Nombre d’écarts répétitifs
organisationnel -Évaluation de la observés (fréquence pour
documentation mobilisée apprécier le niveau de sécurité
global).
Source : Élaboré par nos propres soins
Enfin, à travers l’utilisation des tableaux de bord , le contrôle de gestion se permet de
s’appliquer selon son approche proactive.
Pour le contrôle à priori, il convient de s’assurer par un examen préalable que les
collaborateurs disposent des moyens et compétences nécessaires à l'exercice de leurs
missions, qu’il y a une adéquation entre l'organisation et les opérations prévues, une
présence et mise à disposition de la documentation (bon état de la collection, en place, à
jour, adaptée, accessible…). Il faut aussi s’assurer du niveau de formation et d’habilitation
des collaborateurs.
Pour le contrôle sur le vif, il s’agit de vérifier que les collaborateurs possèdent la
connaissance des textes réglementaires et de l’utilisation des installations et outils (le
savoir), qu’ils savent mettre en œuvre les procédures (le savoir-faire) et de vérifier
l’adaptation de leur comportement à la situation (le savoir-être). Le contrôle sur le vif
permet de fournir une capacité de détection immédiate des écarts et donc la connaissance
des procédures applicables et un savoir voir et écouter développé.
Et pour le contrôle à postériori, il permet de s’assurer que chaque élément des procédures
enregistrées est adapté et conforme aux prescriptions réglementaires de maîtrise des

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procédures et de leur efficacité. Il permet également de revoir l’ensemble de procédures et


écarter celles qui sont rarement employées.

5.Conclusion

La majorité des économies transitent progressivement vers des modèles économiques basés
sur la richesse abstraite et non concrète. L’avantage compétitif réside, aujourd’hui, dans le
capital immatériel et à son rôle dans la création de valeur par la capacité à innover, à créer
des concepts et à produire des idées. Donc, au niveau de la partie théorique de notre article,
nous avons essayé de valoriser ce type du capital en expliquant son rôle, ses approches
fondatrices et ses composantes qui sont rattachées l’une à l’autre.
Dans un deuxième volet théorique, nous avons montré, le poids économique du secteur
public et comment le Maroc veut en faire un secteur moderne capable de renforcer la
performance de sa gestion, et ce en fixant des objectifs, des programmes et des plans, et en
mobilisant les moyens de leur mise en œuvre. Ainsi, pour accompagner ces changements
structurels et organisationnels, tout en tenant compte de l’importance du capital
immatériel, les gestionnaires ont tendance à se faire outiller par des dispositifs de gestion
modernes, les aidant ainsi à améliorer la performance publique.
Ceci nous a permis de conclure qu’en effet, la performance publique ne dépend plus
uniquement de l’aspect financier , c’est-à-dire la maîtrise des coûts, mais elle s’est élargie
vers une performance plus globale en intégrant le financier et l’immatériel. Cet
élargissement de la performance est dû à la multiplication des contraintes liées à des
aspects immatériels tels que la qualité du service rendu, la maîtrise de délais et la
simplification des procédures. Ceci fait appel, en l’occurrence du pilotage du capital
financier, au pilotage du capital organisationnel et capital humain.
C'est dans cette perspective que la contribution du pilotage du capital immatériel au
renouvellement du contrôle de gestion revêt un intérêt capital pour l’atteinte de la
performance au sein de secteur public marocain. Par ce renouvellement, le contrôle de
gestion se trouve au cœur du processus de suivi de la performance et contribue ainsi à son
amélioration en se concentrant sur les points essentiels du quotidien des unités(des moyens
alloués, des activités réalisées et des services rendus). Il se permet de s'étendre, ainsi, à
l'ensemble des entités et se concrétise par des échanges de directives, de tableaux de bord
et de compte rendu entre les différents niveaux hiérarchiques.
Toutefois, plusieurs auteurs confirment que le contrôle de gestion est un vecteur tacite ou
un catalyseur de la pérennité organisationnelle, en faisant partager par l'ensemble des
acteurs appartenant à l'organisation contrôlée les éléments de la performance qui fondent
cette pérennité. Ces éléments de performance qui ne sont plus rattachés qu’à la seule
dimension financière, mais qui sont élargis vers la dimension globale qui intègre le capital
financier aussi bien que le capital immatériel.
En ce qui concerne la partie empirique, nous avons commencé par l’explication de la
méthodologie poursuivie tout en justifiant notre choix du terrain d’étude et des outils
mobilisés . Ensuite, nous avons pu faire une description de l’office tout en tenant compte
des variables étudiées. En effet, à travers l’étude du cas de l’Office Nationale des Chemins
de fer, nous avons pu confirmer nos résultats déduits de la théorie. L’intégration de la
dimension immatérielle à travers l’instauration du Système de management de la sécurité
avait plusieurs implications organisationnelles et managériales notamment en matière du
contrôle de gestion. Le contrôle de gestion de l’office s’est trouvé dans l’obligation de se
renouveler afin d’accompagner et piloter le capital immatériel. Ce renouvellement a porté

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sur le processus, c’est-à-dire coté managériale du contrôle de gestion ainsi que sur les
outils mobilisés, ou en d’autres termes le volet instrumental.

Références
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(66) Yin R.K., 1990, «Case study research: DESIGN and Methods»,California, Sage
Publications

Annexes :
Tableau 1 : Liste des acteurs interviewés et leur fonction
Nom Fonction Ville
1 Chef du Service Comptabilité Analytique et Suivi de la Rabat
Performance
2 Chef du Service Gestion Budgétaire Rabat
3 Responsable du Service Organisation et Knowledge Rabat
Management
4 Responsable des Ressources Humaines Rabat
5 Responsable de l’Élaboration et Suivi du Budget Meknès
6 Contrôleur de gestion Meknès
7 Chef de Service des Ressources Humaines Meknès
8 Chef de Service sécurisation des passages à niveau (ponts) Meknès
9 Responsable Cellule Signalisation et Telecom Meknès
10 Chef de Section Circulation (Sécurité de circulation) Fès
11 Chef de Section de la Maintenance des installations fixes Fès
(Voies, signalisation, catenaires, sous-stations, bâtiments)
Source : Élaboré par nos propres soins

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