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WILBERT KREISS

LE PARLER EN
LANGUES DANS LE
NOUVEAU TESTAMENT

Le terme "glossolalie" est dérivé du grec


"glôssa lalein" qui signifie "parler en langue".
Avant de monter au ciel, Jésus avait dit à ses
disciples: "Voici les miracles qui
accompagneront ceux qui auront cru: en mon
nom, ils chasseront les démons; ils parleront
de nouvelles langues; ils saisiront des
serpents. S'ils boivent quelque breuvage
mortel, il ne leur fera point de mal; ils
imposeront les mains aux malades, et les
malades seront guéris" (Marc 16:17.1 8). Cette
promesse selon laquelle ils allaient parler "de
nouvelles langues", c'est-à-dire des langues
qu'ils n'avaient pas connues jusqu'à présent,
s'accomplit le jour de la Pentecôte par la
puissance du Saint-Esprit (Actes 2:1-4).

D'autre part, l'apôtre Paul déclare que des


membres de l'Eglise de Corinthe parlaient en
langues et attachaient beaucoup d'importance
à ce charisme. Quand on compare la
glossolalie de la Pentecôte à celle qui se
pratiquait à Corinthe, trois conclusions sont
possibles :
1) il s'agit de part et d'autre, à la première
Pentecôte et dans l'Eglise de Corinthe, de
langues humaines parlées par certains peuples
ou ethnies;
2) les apôtres s'exprimèrent dans des langues
humaines le jour de la Pentecôte, tandis que la
glossolalie de Corinthe était un langage
extatique et incohérent ne correspondant à
aucune langue humaine;
3) les deux événements font état d'un langage
extatique.

La plupart des charismatiques souscrivent à la


deuxième ou la troisième solution. Voyons ce
que disent les textes de l'Ecriture.

1. LA NATURE DE
LA GLOSSOLALIE
DE LA PENTEC
PENTECÔ
ÔTE
(Actes 2)

Le texte de l'Ecriture affirme qu' "ils furent tous


remplis du Saint-Esprit et se mirent à parler en
d'autres langues, selon que l'Esprit leur
donnait de s'exprimer" (Actes 2:4). Surpris,
leurs auditeurs, des Juifs venus de différents
pays de l'empire romain pour célébrer la
Pentecôte, se dirent les uns aux autres: "Voici,
ces gens qui parlent ne sont-ils pas tous
Galiléens ? Et comment les entendons-nous
dans notre propre langue à chacun, dans
notre langue maternelle ? Parthes, Mèdes,
Elamites, ceux qui habitent la Mésopotamie, la
Judée, la Cappadoce, le Pont, l'Asie, la
Phrygie, la Pamphylie, l'Egypte, le territoire de
la Libye voisine de Cyrène, et ceux qui sont
venus de Rome, Juifs et prosélytes, Crétois et
Arabes, comment les entendons-nous parler
dans nos langues des merveilles de Dieu"
(Actes 2:71 1). La plupart étaient perplexes,
"d'autres se moquaient et disaient: Ils sont
pleins de vin doux" (Actes 2:13). Le texte dit
clairement que les apôtres s'exprimaient dans
différentes langues étrangères que les
auditeurs identifièrent à leur langue
maternelle
maternelle. Ils saisirent bien le contenu de
cette glossolalie. Si les disciples s'étaient
exprimés en un langage extatique et
incohérent, ne correspondant à aucune langue
humaine, il aurait fallu une traduction pour
qu'ils comprennent. Les partisans de cette
thèse soutiennent donc que le Saint-Esprit
interpréta le parler des apôtres pour le rendre
intelligible à leurs auditeurs. Ils fondent cette
explication sur le fait qu'on les soupçonna
d'ivresse. Nous la rejetons parce qu'elle ne
rend pas justice au texte qui dit clairement que
les auditeurs reconnurent dans la glossolalie
des apôtres leurs langues maternelles
maternelles. Si
on les suspecta d'ivresse, c'est parce qu'ils se
mirent à parler en même temps et chacun dans
une autre langue. Les sons ont dû se mélanger
et, entendus de loin, ressembler à un
bavardage incohérent. Mais en écoutant de
plus près, les Juifs parvinrent à discerner
chacun la langue qui était la sienne. Du reste,
Luc précise que ceux qui accusèrent les Douze
d'ivresse le firent pour se moquer d'eux.
Signalons que Luc utilise dans les V.6 et 8 le
terme grec "dialektos" (dialecte) et en fait un
synonyme de "glossa" (langue). Or ce terme
dénote toujours une langue effectivement
parlée par des hommes. Il n'y a par ailleurs
aucune raison d'admettre que la glossolalie
d'Actes 10: 46 et 19:6 ait été différente.

2. LA NATURE DE
LA GLOSSOLALIE
DANS 1
CORINTHIENS

Si la plupart des charismatiques sont


convaincus que le parler en langues de la
Pentecôte a eu lieu dans des langues réelles,
ils soutiennent cependant que la glossolalie
dont parle Paul dans sa première épître aux
Corinthiens était un langage inarticulé,
d'origine inconnue et ne ressemblant à aucune
langue parlée par les hommes. 1 Corinthiens
justifie-t-il une telle conception ou l'étude du
texte nous contraint-elle de tirer une autre
conclusion ?

Parmi les différents dons que le Saint-Esprit


accorde à l'Eglise, l'apôtre mentionne la
"diversité des langues" (littéralement: "des
genres de langues", 1 Corinthiens 12: 10).
Aurait-il employé ce terme pour désigner un
langage extatique ? Un tel langage permet-il de
distinguer entre différents "genres de langues"
? Nous retrouvons la même expression
"diverses langues" (littéralement: "genres de
langues") dans 1 Cor 12:28. Ce sont des
genres, des types différents, mais il s'agit
toujours d'authentiques langues humaines.
Paul, le grand globe-trotter et missionnaire de
Dieu, loue le Seigneur de ce qu'il "parle en
langue" plus que les Corinthiens (1 Cor 14:18).
Le mot est employé au pluriel en grec, soit
"parler en langues". Se serait-il exprimé ainsi
s'il s'était agi d'un parler extatique ?

On retrouve ce pluriel dans le V. 6 du même


chapitre. Il précise aussi dans le V.10 qu'il y a
diverses langues et qu'aucune d'entre elles
n'est sans signification. Mais si quelqu'un vient
à parler dans une de ces langues et que lui-
même ne la comprend pas, il sera un
"barbare", un illettré pour celui qui parle (V.1 1).
On objecte que l'apôtre utilise le mot grec
"phônè" au lieu de "glôssa" dans les V. 10 et
11, qu'il fait par là la différence entre les
langues des hommes et le parler extatique.
Mais rien ne prouve cela. Luc, nous l'avons vu,
utilise lui aussi deux termes pour désigner les
langues étrangères parlées par les Juifs de la
diaspora.
Les charismatiques font valoir que lorsqu'il dit :
"Quand je parlerais les langues des hommes et
des anges ... " (1 Cor 13:1), Paul distingue
entre les langues de ce monde parlées par les
hommes et des langues célestes, de caractère
extatique. Mais il ne faut pas oublier qu'il
s'exprime au conditionnel : "Quand je
parlerais ..." Il é nonce une hypoth
hypothèèsese. Il dit
aussi: "Quand j'aurais le don de prophétie, la
science de tous les mystères et toute la
connaissance, quand j'aurais même toute la foi
jusqu'à transporter des montagnes..." (1 Cor
13:2). Nous n'en concluons pas qu'il
connaissait effectivement tous les
myst
mystèères, qu'il savait transporter des
montagnes et qu'il avait toute la
connaissance. N'ajoute-t-il pas un peu plus
loin : "Nous connaissons en partie et nous
prophétisons en partie" (1 Cor 13:9) ? D'autre
part, il ne nous donne aucune indication quant
aux langues des anges nous permettant de les
assimiler à un parler extatique. Nous ignorons
tout de ces langues angéliques et savons
simplement que chaque fois que des anges se
sont adressés à des hommes, ils l'ont fait dans
la langue parlée par ces derniers.

"Celui qui parle en langues s'édifie lui-même;


celui qui prophétise édifie l'Eglise" (1 Cor 1 :
4.5). Le fait que celui qui parle en langues
s'édifie lui-même indique qu'il comprend ce
qu'il dit. En effet, selon l'enseignement de
l'Ecriture, l'l'éédification a toujours lieu par
la Parole qui s'adresse à l'intelligence
l'intelligence.
Mais il ne peut pas communiquer avec d'autres
en une langue qu'ils ne comprennent pas ; la
langue étrangère l'empêche de les fortifier
dans la foi. C'est pourquoi l'apôtre ne veut pas
de glossolalie dans l'assemblée si ce qui est
dit en langues n'est pas traduit pour les autres.
"C'est pourquoi, que celui qui parle en langue
prie pour avoir le don d'interpréter....
Autrement, si tu rends grâces par l'esprit,
comment celui qui est dans les rangs des
simples auditeurs répondra-t-il Amen à ton
action de grâces, puisqu'il ne sait pas ce que
tu dis?" (V. 13.16).

Paul établit donc le principe de "l'interprétation


des langues" ("hermèneia glôssôn", 1 Cor 12: 1
0). Le mot grec rendu par "interprétation"
signifie en fait "traduction" (Cf. Hébreux 7:2;
Jean 1:42; 9:7). Et l'apôtre d'ajouter: "S'il n'y a
point d'interprète, qu'on se taise dans l'Église
et qu'on parle à soi-même et à Dieu" (V.28).
L'examen du texte montre donc que rien ne
nous oblige à conclure que la glossolalie de
Corinthe était un langage céleste, un parler
extatique. Il semble que l'autre explication
s'impose, que ce charisme particulier ait
consisté à parler dans des langues étrangères
que les intéressés n'avaient pas apprises et ne
savaient pas manier en temps ordinaire.

Luc était l'associé et le compagnon de Paul. Il


écrivit certainement le livre des Actes après
que Paul eut rédigé la première épître aux
Corinthiens (approximativement en l'an 62 pour
les Actes, et en l'an 55 pour 1 Corinthiens).
D'autre part, Luc connaissait l'Église de
Corinthe et il est fort probable qu'il ait lu les
lettres que l'apôtre avait envoyées à cette
communauté (Cf. Act 18:1-1 1). Nous en
concluons qu'il connaissait l'attitude de Paul
concernant l'abus de la glossolalie. On
constate en effet qu'en écrivant le livre des
Actes, il utilise, après la mise au point
concernant le parler en langues à Corinthe, le
même terme que Paul pour désigner ce
charisme : "parler en langue".
Paul n'avait pas besoin de définir la nature de
la glossolalie, en écrivant aux Corinthiens. Ces
derniers savaient de quoi il s'agissait. Il n'en va
pas de même pour Luc qui écrit son évangile
et les Actes pour Théophile (Luc 1:1-4). Dans le
Nouveau Testament, le mot grec traduit par
"langue" désigne ou bien l'organe du corps qui
permet de parler (Marc 7:33; Philippiens 2:1 1),
ou bien une langue parlée, c'est-à-dire le
moyen dont se servent les hommes pour
communiquer. Le mot n'est jamais employé
pour désigner une forme de discours extatique,
un ensemble de sons inarticulés impropres à
traduire une pensée. Un principe
d'interprétation primordial affirme: "L'Ecriture
s'interprète elle-même". Les mots de l'Ecriture
ont donc le sens que leurs auteurs entendent
leur donner. Paul écrit dans 1 Cor 14: 1 0:
"Aussi nombreuses que puissent être dans le
monde les diverses langues, il n'en est aucune
qui soit sans signification". Il semble donc qu'il
songe aux langues que les hommes ont
l'habitude d'utiliser pour communiquer entre
eux. Il s'ensuit que dans tout le chapitre le mot
a sans doute ce sens. Tel est l'avis de la
grande majorité des exégètes. Il faut vouloir à
tout prix chercher une justification biblique au
parler extatique pour procéder à une autre
interprétation.

Wilbert Kreiss

#saintEsprit #chair

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