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Profils d’élevage de porcs

aux coûts de production


les plus faibles :
Situation en France, comparaisons
internationales, perspectives.

A u cours des 40 dernières années, la compétition entre bassins de production


porcine en France, dans l’UE, dans le monde a eu tendance à s’accroître. Le prix
du porc, déterminé par le marché, suit en tendance le coût de production. Mais la
Résumé
L’étude montre que les profils
d’élevage ayant les plus faibles
disparité toujours importante des coûts de production détermine des situations très coûts de production se situent,
pour 2000, à 1,09 €/kg carcasse.
différentes ; d’où l’intérêt d’identifier et de caractériser les profils d’élevages fran- Cinq profils ont été caractérisés.
çais à coûts faibles en situant le niveau et les conditions d’obtention de ces coûts. Profil 1 : coût moyen sur tous les
L’étude vise aussi à positionner le coût français par rapport à certains bassins de postes grâce à de bonnes perfor-
production à coûts réputés faibles : les Etats-Unis, l’Espagne et la Pologne ont été mances techniques, profil 2 :
prix très faible de l’aliment
retenus. Enfin, elle vise à rechercher des voies d’abaissement des coûts.
sevrage vente,
souvent fabriqué à la ferme,
Les profils d’élevage Une méthode dite de Kohonen a permis de profil 3 : coût total de main
réaliser une typologie de ces 120 élevages. Des d’oeuvre le plus faible du fait
français obtenant les coûts d’une bonne productivité
éléments qualitatifs ont été obtenus à partir
les plus faibles d’une enquête postale et grâce à la rencontre du travail, mais aussi par une
mise en pension d’animaux,
Résultats globaux de quelques éleveurs choisis selon le profil. profil 4 : amortissements et frais
financiers les plus faibles car
L’analyse repose sur un échantillon de 20 % La classification a abouti à 5 profils à partir des ancienneté des installations,
des élevages ayant les coûts les plus faibles et 11 variables quantitatives choisies. Les effectifs profil 5 : les meilleurs résultats
choisis parmi les élevages naisseurs-engrais- dans les différents profils sont compris entre 16 techniques.
seurs suivis en GTE-Tableau de Bord en 2000, et 30 élevages ; il n’y avait d’ailleurs a priori aucu- Les USA et l’Espagne demeurent
très compétitifs dans la mesure
soit 120 élevages. ne raison de trouver des groupes rigoureusement
où les facteurs de productions
de même effectif. Il peut être souligné le fait que sont moins coûteux,
La comparaison poste par poste des éléments le niveau de coût de production est sensible- où les contraintes sociétales sont
du coût de production de la moyenne natio- ment le même dans les différents profils et dans moins lourdes, et ce malgré des
nale et de l’échantillon des 120 élevages la population des 120 éleveurs : il existerait donc résultats techniques en retrait.
montre que les résultats nationaux sont supé- bien différentes voies pour obtenir un coût de L’élargissement aux pays de
rieurs d’un 1/2 écart-type environ à ceux de production bas. Le profil 2 se situe cependant à l’Europe centrale ne constitue
pas dans l’immédiat une
l’échantillon des 120 élevages. Le coût de pro- un niveau inférieur à tous les autres profils.
compétition redoutable du fait
duction total moyen des 120 élevages est infé- de lourds freins.
rieur à plus d’1 écart-type à celui de l’échan- Caractéristiques des profils à coûts Le progrès technique,
tillon national : leur coût de production faibles obtenus par enquête la baisse du prix des facteurs
moyen est de 1,09 €/kg carcasse contre 1,26 de productions, l’optimisation
à l’ensemble du Tableau de Bord. Ils ont une Parmi leurs caractéristiques générales, P1, P2 des systèmes d’élevages sont
des pistes à explorer.
taille moyenne de 138 truies. Ils se situent géo- et P5 se situent majoritairement dans le « Grand
graphiquement surtout dans le Grand-Ouest et Ouest » puis le Nord, P3 surtout dans le « Grand
le Nord. Ils pratiquent un peu plus la FAF que Ouest » (81 %), P4 plus dans le Centre. La sur-
l’ensemble des élevages du Tableau de Bord et face moyenne est de 90 ha avec 0,65 ha/truie,
ont une SAU/truie de 0,65 ha. soit un lien au sol assez important. Les 2/3 des Claudie GOURMELEN

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L’effectif est éleveurs gèrent un autre atelier ani- automatique aux autres stades. P3 pour atteindre un coût de pro-
en moyenne de mal (lait, viande bovine, …). La automatise le plus. duction bas. (cf. Tableau 1)
main-d’œuvre est globalement
138 truies avec familiale, un peu moins dans le En terme d’investissements, il ont Le profil 1 présente des coûts plu-
245 pour P2 profil 2. L’effectif est en moyenne été effectués en moyenne en 1997 tôt moyens et de bonnes perfor-
et 97 pour P4. de 138 truies avec 245 pour P2 et et concernent pour la moitié des mances en dehors d’un coût de
97 pour P4. Les installations datent rénovations ou extensions de bâti- main-d’œuvre élevé (assez faible
en moyenne de 1984 (1990 pour ment en naissage et pour l’autre productivité du travail mais plus
P5), l’année du dernier agrandisse- moitié des créations de places en rigoureux). Ce profil présente un
En moyenne, ment de 1995, les projets d’agran- post-sevrage/engraissement pour niveau relativement faible des
un tiers des élevages dissement sont plus orientés vers un montant de 106 K€ (jusqu’à amortissements et frais financiers.
mettent environ l’engraissement. En moyenne, un 122-130 K€ pour P2 et P5). Le coût des aliments fabriqués ou
tiers des élevages mettent environ achetés est moyen mais le coût FAF
un tiers de leurs
un tiers de leurs porcs en pension Concernant les bâtiments, l’année est élevé. L’effectif est de 126 truies
porcs en pension pour 9,6 €/porc, un peu plus fré- de construction date en moyen- en moyenne par élevage. Les éle-
pour 9,6 €/porc. quemment pour P3 et P5. ne de 1988 et la rénovation de vages se situent en majeure partie
1994. P5 a les plus récents. Les dans le Grand Ouest et le Nord. Ils
L’analyse des constituants du coût bâtiments sont quasiment tous fer- ont en moyenne 0,78 ha/truie. Les
nous fournit les éléments suivants : més, majoritairement sur caillebo- marges et les revenus sont de
tis total et équipés d’une ventila- niveau moyen.
En terme d’alimentation, chez tion dynamique. Le jugement des
P1, P2 et P5, la FAF est importan- bâtiments par les techniciens est Le profil 2 présente l’effectif de plus
te alors qu’en P3 et P4, les ali- globalement plus positif pour P5. grande dimension (245) en nombre
ments sont majoritairement ache- La pratique du vide sanitaire est de truies et le coût de production le
tés (70-80 %). 10 % des élevages bien respectée, soit 5,9 jours en plus faible. Il présente le plus faible
utilisent des co-produits en gesta- moyenne. Entre 2 lots consécutifs, coût des aliments fabriqués et
tion-maternité et 20 % en engrais- la désinfection des salles, le vida- achetés avec un coût de revient
10 % des élevages sement (P2 davantage). ge des pré-fosses sont plus rigou- FAF le plus faible et un prix des ali-
Les profils P1, P2 et P5 présentent reusement suivis chez P1. La moi- ments du commerce avantageux.
utilisent des
de faibles coûts alimentaires. Pour tié des élevages ont un groupe Ce profil est assez orienté en FAF.
co-produits en P1 et P5, cela tient à leurs bons électrogène et un puits. Son coût de renouvellement est
gestation-maternité indices. Le très faible coût alimen- faible. Les coûts d’amortissement
et 20 % en taire de P2 s’explique surtout par le Sur le plan de la santé et de la pro- sont élevés, à relier aux investisse-
engraissement. faible coût des aliments achetés ou tection sanitaire, un même plan de ments récents. Le coût de main-
fabriqués, notamment le faible coût vaccination pour tous est observé, d’œuvre salariée est plus élevée.
matières des céréales dans l’aliment une supplémentation systématique Les performances sont moyennes.
fabriqué. Dans le profil P3, les éle- antibiotique dans l’aliment 1er âge Les élevages se situent pour l’es-
veurs qui achètent plus de 80 % de est administrée pour 77 % (pour un sentiel dans le Grand Ouest et le
leurs aliments se situent dans des coût de 2 592 €/an). Nord. La surface par truie est de
régions à prix compétitifs. A l’in- 0,50 ha. Ce profil a le meilleur
verse, les élevages de P4 ont un La conduite la plus fréquente est revenu horaire du travail.
prix d’achat élevé. de 7 bandes avec 20 truies/ban-
Le mode le plus fréquent de pré- de. L’âge moyen au sevrage est de Le profil 3 est surtout caractérisé
Les bâtiments sentation des aliments est la farine. 26,7 jours. 93 % des élevages pra- par le coût de main-d’œuvre le
sont quasiment Les aliments sont majoritairement tiquent l’insémination artificielle et plus bas (grâce à une bonne pro-
tous fermés, distribués dans des auges en sou- les doses viennent à 80 % de ductivité du travail mais aussi par
pe en attente-saillie/gestation et en centres d’IA et à 20 % de prélève- une externalisation du travail par
majoritairement sur
engraissement, avec un nourris- ments à la ferme. La surveillance une mise en pension d’animaux
caillebotis total seur à sec en nurserie-post-sevra- des mises bas est assidue. plus fréquente dans ce profil), mais
et équipés ge. En maternité, 3 modes se ren- aussi par les frais divers les plus éle-
d’une ventilation contrent : en soupe ou en sec à Analyse des profils vés (notamment dus aux frais d’en-
l’auge ou encore au nourrisoupe. graissement à façon). La distribu-
dynamique.
La distribution des aliments est Cette analyse approfondie a mon- tion alimentaire dans ce profil est
plutôt manuelle pour les truies et tré une diversité de voies suivies plus automatisée. Les niveaux des

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Tableau 1- Valeurs moyennes observées de l’échantillon des 120 élevages et par profil pour les 11 variables
(en gras figurent les valeurs les plus élevées parmi les profils pour chaque variable, en italique les plus faibles)
Echantillon Profil 1 Profil 2 Profil 3 Profil 4 Profil 5
Variables retenues Moy. Ecart Moy. Ecart Moy. Ecart Moy. Ecart Moy. Ecart Moy. Ecart
pour la typologie type type type type type type
Axe dimension
Nombre de truies/élevage 138 78 126 43 245 107 132 44 87 36 131 52
Axe technique
Nb de porcs produits/truie présente/an 19,99 2,16 20,88 1,57 20,07 1,87 19,80 2,12 18,14 2,11 21,24 1,57
Pertes en sevrage-vente (%) 5,76 2,64 4,45 1,74 6,86 2,86 8,17 3,28 6,14 2,52 4,38 1,05
IC technique en sevrage-vente (kg/kg) 2,65 0,16 2,60 0,11 2,66 0,17 2,63 0,11 2,78 0,16 2,54 0,12
Prix aliments en sevrage-vente (€/kg) 0,174 0,015 0,175 0,014 0,157 0,014 0.172 0,009 0,181 0,015 0,177 0,015
Coût du renouvellement (€/kg carc.) 0,033 0,015 0,037 0,014 0,022 0,015 0,039 0,015 0,034 0,015 0,032 0,012
Coût des charges diverses (€/kg carc.) 0,104 0,037 0,118 0,027 0,112 0,041 0,134 0,035 0,078 0,029 0,093 0,026
Axe charges fixes
Coût de main-d’œuvre totale (€/kg carc.) 0,143 0,043 0,163 0,040 0,145 0,043 0,112 0,041 0,146 0,038 0,135 0,038
Coût des amortissements (€/kg carc.) 0,076 0,038 0,064 0,030 0,090 0,032 0,065 0,035 0,048 0,034 0,113 0,023
Frais financiers de long-terme (€/kg carc.) 0,024 0,018 0,017 0,012 0,024 0,014 0,026 0,014 0,012 0,011 0,044 0,020
Frais financiers de court-terme (€/kg carc.) 0,005 0,008 0,003 0,005 0,004 0,005 0,017 0,008 0,0016 0,003 0,003 0,005
Coût de production (€/kg carc.) 1,090 0,052 1,098 0,049 1,055 0,073 1,101 0,038 1,093 0,047 1,104 0,032
Nombre d’élevages 120 29 20 16 30 25
Sources : ITP-GTE-TB-2000- France entière, naisseurs-engraisseurs

autres coûts sont moyens, avec un sentent une surface de 0,80 ha par celui d’automatiser la distribution
niveau assez faible des coûts truie. Leurs marges et revenus sont de l’aliment (P3).
d’amortissement. Les entreprises en retrait. - des rentes de situation, coûts
sont moyennes techniquement, de d’approvisionnement intéres-
taille moyenne (132). Le prix des Le profil 5 présente une très bon- sants (par exemple, par la FAF
aliments du commerce est com- ne fonction de production tech- voire l’utilisation de co-produits
pétitif, ce qui est lié à la situation nique. Ces élevages ont une taille (P2)), bâtiments amortis (P4)…
géographique des élevages majo- moyenne (131), de meilleures per- - le très bon savoir-faire d’éle-
ritairement dans le Grand Ouest. formances (productivité, IC, le plus veur (P1 et P5). La variabilité
La surface par truie est de 0,40 ha. bas niveau de pertes en sevrage-
des conditions
Les revenus sont plutôt inférieurs à vente), un coût alimentaire moyen Ceux qui ont des coûts plus éle-
la moyenne des 120. mais les amortissements et les frais vés ont des marges de progrès, de production et
financiers de long terme les plus mais tous ne peuvent pas rivaliser des résultats s’appuie
Le profil 4 est caractérisé par les élevés, ce qui est dû aux installa- avec les plus performants. toujours largement
niveaux d’amortissement et de tions récentes, les bâtiments sont Certaines stratégies sont repro- sur les aptitudes
frais financiers (LT et CT) les plus d’ailleurs jugés bien adaptés. La ductibles, mais la variabilité des
bas (leurs installations sont les plus productivité du travail est moyen- conditions de production et des
différentes des
anciennes, et leurs bâtiments sont ne. La mise en pension d’animaux résultats s’appuie toujours large- individus à gérer et
jugés moins bien adaptés), les frais est assez fréquente. ment sur les aptitudes différentes à piloter leur élevage.
vétérinaires les plus faibles mais les Les élevages sont surtout situés des individus à gérer et à piloter
coûts alimentaires les plus élevés. dans le Grand Ouest. La surface leur élevage.
Ce profil utilise surtout de l’aliment par truie est de 0,50 ha. Ce profil
du commerce, avec un prix des présente les meilleurs niveaux de Le coût de production restera
aliments achetés en sevrage-vente marge et de revenu. déterminant à l’avenir, et c’est
élevé. Les élevages sont de plus d’ailleurs dans ce domaine que
petite dimension (87 truies). Ils ont Ces groupes ont en moyenne des l’éleveur peut agir le plus pour
les performances les plus faibles coûts de production voisins mais améliorer son revenu. Dans le
sur les 5 profils (productivité, IC, fondés sur des causes diverses : domaine des prix, le marché évo-
pertes). Les élevages sont répartis - des choix stratégiques enga- lue dans un contexte très concur-
sur l’ensemble du territoire, et pré- geant à long terme, comme rentiel. La question se pose donc

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Pour les Etats-Unis, d’analyser le niveau du coût de Pour les Etats-Unis, les écarts de Le risque de compétition directe
production des élevages de bas- coûts dépendent largement de la sur le marché européen semble
les écarts de coûts
sins à coûts réputés faibles valeur relative des monnaies (euro donc faible pour le moment. La
dépendent largement (Espagne, USA) afin de situer la contre dollar) et du prix de l’ali- différence de prix des aliments
de la valeur relative compétitivité des meilleures entre- ment (marché des matières pre- sera déterminée par des décisions
des monnaies et du prises françaises ; un état des lieux mières). En 2001, la valeur de l’eu- politiques : évolution de la PAC,
prix de l’aliment. de la production porcine en ro a plutôt favorisé la compétitivité nouveau Farm bill et évolution des
Pologne sera également réalisé européenne. L’écart avec le coût règles de l’OMC. Les perspectives
dans la perspective de l’élargisse- moyen français se situe entre ne sont donc pas figées.
ment de l’Europe. 0,122 et 0,229 €/kg carcasse (10
à 15 % de moins). Les élevages aux Coûts et résultats dans
Les coûts de produc- coûts les plus faibles actuellement les régions productrices
Les élevages aux sont les fermes familiales naisseurs- du nord de l’Espagne
tion dans des
coûts les plus faibles bassins compétitifs engraisseurs de 400 truies situées
actuellement à l’Ouest du Corn Belt : le chiffre La productivité numérique des
En France, certains élevages sont de 1 à 1,05 $/kg carcasse peut être truies est inférieure à celle des éle-
aux USA sont
capables de produire à coût de avancé (dollar moyen de 2001 à vages français (-2,47 porcelets
les fermes familiales production faible. L’objet de cette 1,113 €). A long terme, les éle- sevrés/truie/an) malgré son amé-
naisseurs-engraisseurs partie est de réactualiser nos vages multisites naisseurs-engrais- lioration au cours des 10 dernières
de 400 truies connaissances sur les situations aux seurs entre 1000 et 4000 truies années. En 1999, ceux des
Etats-Unis, en Espagne et en seront et sont déjà pour une bon- meilleurs élevages espagnols sont
situées à l’Ouest
Pologne et ainsi de positionner le ne part les élevages les plus com- assez proches de la moyenne fran-
du Corn Belt. coût français par rapport à celui pétitifs ; leur coût serait de 1,05 à çaise.
des bassins considérés. 1,10 $/kg carcasse. La production
a peu évolué depuis 1998, quasi- Le coût moyen de l’alimentation
Etant donné le manque voire l’ab- ment stoppée actuellement, prin- reste plus élevé. La comparaison
sence de dispositifs nationaux de cipalement à cause des contraintes des séries « engraissement »
références technico-économiques, environnementales. (MAPA, DARP, FNP) met en évi-
la méthodologie employée repo- dence des prix plus élevés en
se sur un faible nombre d’échan- Le coût des facteurs est avanta- Espagne pour l’aliment de type
tillons et sur des avis d’experts. Le geux. L’aliment détermine un croissance/finition (environ 25 %
degré de précision de l’analyse est avantage compétitif certain. De plus élevés). Cela est confirmé par
donc moindre que dans la partie 1993 à 1999, le niveau du coût les données publiées par l’ITG
précédente et a surtout pour alimentaire a baissé fortement en Ganadero (en moyenne sur 1998-
objectif de situer le niveau moyen France et en Europe mais il a aus- 1999-2000) et par l’analyse de
du coût de production et du prix si diminué aux Etats-Unis. Le prix prix relevés en 2001 auprès d’un
L’investissement
des facteurs. des bâtiments observés en 2000 groupe d’éleveurs catalans. (cf.
moyen en serait près d’un tiers moins élevé à Figure 1)
production porcine Coûts de production ceux de la France (conception
coûterait entre 25 aux États-Unis technique plus simple et prix uni- Les charges de structure sont tou-
taires inférieurs des matériaux). Le jours avantageuses pour l’Espagne.
et 33 % moins cher
Les résultats techniques sont net- coût de la main-d’œuvre est net- La main d’œuvre est 25 % moins
en Espagne tement inférieurs à ceux des éle- tement inférieur mais elle est chère qu’en France, avec semble-
qu’en France. vages français (1,7 né vif et 1,4 moins qualifiée aux États-Unis. La t-il une productivité apparente du
sevré/portée en moins et l’indice différence essentielle porte sur le travail meilleure mais la main-
de consommation global est supé- coût unitaire de cette main- d’œuvre est difficile à trouver (il
rieur de 0,16 à 0,38 point). d’œuvre. s’agit beaucoup de main d’œuvre
immigrée non formée).
Élevage américain
Le constat réalisé en 1999 reste
valide : l’investissement moyen en
production porcine coûterait entre
25 et 33 % moins cher en Espagne
qu’en France.

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L'intégration domine l'organisa- Élevage espagnol
tion de la production porcine :
c'est un élément fondamental du
paysage porcin espagnol. Elle est
le fait de grands intégrateurs aus-
si bien que d'éleveurs de taille
moyenne. Pour l'engraissement,
les indemnités versées aux éle-
veurs entre 2001 et 2002 varient
de 7,21 à 10,82 €/porc.
Coûts de la production par rapport à ceux de l’UE, les prix L'intégration domine
Le coût de production moyen en en Pologne des protéines sont plus élevés
l'organisation de la
naisseur-engraisseur reste infé- actuellement. A terme, le coût de
rieur au coût moyen français en La majorité de la production est l’aliment serait un peu moins cher. production porcine :
2001 pour les régions de privée, répartie dans une multitu- c'est un élément
Catalogne, Aragon, Navarre. Il de de micro-élevages et 10 % des La main-d’œuvre polonaise est fondamental
serait compris dans une fourchet- élevages ont plus de 100 truies. abondante et 2 à 4 fois moins chè- du paysage porcin
te de 150 à 160 ESP/kg vif, soit re qu’en France : elle n’est pas
1,189-1,250 €/kg carcasse. On Trois types d’élevages co-existent qualifiée.
espagnol.
peut estimer par modélisation le en Pologne : une majorité de
coût moyen espagnol environ –5 micro-structures (destinées sur- Des baux généralement courts
à -6 % inférieur au coût moyen tout à l’autoconsommation), des entravent la constitution durable
français (1,227 vs 1,299 €/kg car- macro-exploitations sociétaires d’exploitations intensives. Il n’est
casse). (en 1996 environ 3000 ex-fermes par ailleurs pas possible pour des
d’état avec du porc), des grandes investisseurs de l’UE d’acheter de
Les résultats publiés par l’ITG de sociétés individuelles minoritaires la terre.
Navarre présentent sur la pério- (issues d’une concentration de
de 1998-2000 une différence de fermes existantes, peu de hors-sol Différents acteurs interrogés souli-
coût de production de 0,045- vu les prix des céréales). gnent une grande difficulté actuel-
0,061 €/kg carcasse avec la le d’accès au capital (taux d’inté- La main-d’œuvre
moyenne française à l’avantage Le constat de l’ITP (1996) d’un rêt de 15-18 %) : beaucoup polonaise est
des éleveurs navarrais. L’écart est retard technologique dans les d’autofinancement est nécessaire abondante et
plus important en Aragon (0,152- structures porcines, de niveaux pour les restructurations.
2 à 4 fois moins
0,305 €/kg carcasse). médiocres d’efficacité alimentaire
et d’une productivité du travail Le constat plutôt pessimiste de chère qu’en France.
D’ici à 5 ans, l’Espagne bénéficie- 3 fois moins élevée semble peu l’ITP (1996) mettait en avant des
ra des même avantages compétitifs modifié. outils en place au potentiel
mais une augmentation des frais médiocre dans les différentes struc-
liés à la main d’œuvre, aux bâti- En ce qui concerne le prix des fac- tures. Des fonds de pré-adhésion
ments et équipements est prévi- teurs, globalement les prix des devraient les aider à s’équiper. Par
sible à moyen-terme. céréales sont assez concurrentiels ailleurs, l’ITP avançait avec une
certaine prudence en 1996 que
Source : ITP d'après données MAPA, DARP et FNP dans les exploitations familiales, le
335
Espagne
coût de production se situait
autour de 1,143 €/kg carcasse.
euros/tonnes

285

France
235 La réflexion sur des scénarios
Catalogne d’avenir avec l’élargissement de
185
l’UE-15 conduit aux considéra-
Bretagne
135
tions suivantes :
85 87 89 91 93 95 97 99 01
Peu de capitaux étrangers ont été
Figure
Source 1- d'après
: ITP Prix comparés des aliments
données MAPA, DARP et FNP injectés dans des entreprises por-
pour les porcs charcutiers (France et Espagne) cines. Cependant, des conditions

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Élevage polonais de l’hyperprolificité, la dilution - d’autres voies stratégiques peu-
des charges en alourdissant le vent alors être de viser des seg-
poids des carcasses, la recherche ments de marché mais des garan-
d’une amélioration de l’efficaci- ties doivent pouvoir être
té alimentaire, la prévention de fournies. La démarche n’est plus
maladies par la recherche d’amé- dans ce cas de produire au coût
lioration de conduite et d’orga- le plus faible.
nisation d’élevage.
Conclusion
• La diminution du prix des fac-
pour les attirer seraient la consoli- teurs de production avec, en L’analyse de résultats du tableau de
dation légale du droit des agricul- fonction de son intérêt écono- bord en 2000 des naisseurs engrais-
teurs locataires et la libération des mique, le choix de la FAF ou seurs parmi ceux obtenant les coûts
surfaces ne servant pas à l’auto- coproduits dans la ration, avec de production les plus faibles a per-
consommation. Dans ces condi- peut-être l’investissement en mis d’identifier différents profils
tions, différents experts interrogés France dans des bâtiments plus d’élevages, certains à coûts moyens
entrevoient la possibilité pour des simples, avec un hypothétique sur tous les postes, d’autres à coûts
investisseurs étrangers de créer des abaissement du coût du travail très faibles pour les aliments ache-
élevages compétitifs sur le mode mais ceci renvoie à des débats tés et fabriqués, un profil à coût de
intensif. Certains coûts de facteurs de société. main-d’œuvre faible mais avec une
favorables à la Pologne pourraient mise en pension des porcs plus fré-
se maintenir encore dans les • La recherche de l’optimisation quente, un groupe d’élevages avec
10 ans à venir. Dans l’UE, de nom- des systèmes d’élevage qui des bâtiments amortis et enfin le
breux éleveurs rencontrent des conduit aux réflexions sui- dernier avec de très bons résultats
problèmes pour accroître leur pro- vantes : techniques et des outils récents. Les
duction. Des débouchés potentiels - les économies d’échelle n’ont coûts de production de ces profils
importants existent en Europe cen- pu être chiffrées; sont de même niveau, ce qui prou-
trale, et surtout orientale. - les contraintes environnemen- ve qu’il existe bien des voies diffé-
tales pourraient redonner ses rentes conduisant à un coût faible.
A moyen terme, l’accès probable chances au système naisseur-
aux paiements compensatoires (PC) engraisseur sur plusieurs sites Autrement dit, ces profils analysés
pour la Pologne ne suffirait cepen- (avec mise en pension ou rachat relèvent selon les cas de choix stra-
dant pas à établir un scénario d’ateliers existants); tégiques et/ou de rentes de situa-
La voie d’abaissement expansionniste dans le secteur por- - une autre voie de réduction tion et/ou de rentes de technicité.
des coûts apparaît cin, vu l’ampleur des obstacles des coûts pourrait être d’opter Il existe donc des marges de pro-
structurels à son intensification, et pour l’option d’un système plus grès possibles même si tout le
d’autant plus
à la montée des coûts fonciers donc autonome (surface épandable monde ne peut pas rivaliser avec
importante que des fourragers. Dans les conditions suffisante, assolement adapté les plus performants. La tentation
surcoûts vont venir actuelles, la production porcine pour FAF). Mais dans quelle est grande de simuler un profil
s’ajouter aux coûts de polonaise ne devrait pas constituer région mettre en place ces pro- idéal mais est-ce que l’améliora-
un compétiteur redoutable sur un jets ? tion d’un poste ne pénalise pas les
production actuels
marché européen élargi. autres par ailleurs ? Si les coûts des
afin de répondre aux La voie d’abaissement des coûts différents postes étaient totale-
attentes sociétales. Quelques voies apparaît d’autant plus importante ment indépendants, les avantages
d’abaissement que des surcoûts vont venir s’ajou- comparatifs seraient cumulables ;
ter aux coûts de production or il existe un lien entre eux, par
des coûts en France
actuels afin de répondre aux exemple entre l’automatisation
Il faut donc continuer à explorer les attentes sociétales. des bâtiments, donc le niveau
voies pour améliorer la compétiti- d’amortissement, d’une part et la
vité. Selon des experts et scienti- D’autres éléments dépassent le productivité du travail d’autre part.
fiques, on peut compter sur : débat de la réduction des coûts :
- la concurrence commerciale En France, les coûts faibles étudiés
• De nouveaux progrès de tech- avec la poursuite de la libéralisa- ci-dessus se situent approximati-
nicité avec la poursuite de la voie tion de l’OMC. vement à un écart-type en dessous

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de la moyenne nationale, soit près Unis et moins élevé qu’en donc compétitifs vis-à-vis de la Les élevages français
de 15 ct d’€/kg carcasse pour Espagne en croissance-finition, moyenne de ces concurrents ayant les coûts les plus
l’année 2000. En comparant la - en revanche, les investisse- étrangers.
faibles sont donc
moyenne des coûts et des prix des ments s’avèrent plus coûteux en
facteurs de production en France France, nos partenaires ayant sou- Dans une réflexion portant sur les compétitifs vis-à-vis
à la moyenne de ceux observés vent des bâtiments plus simples voies d’abaissement des coûts en de la moyenne de ces
chez nos partenaires étrangers, il - de même, la main-d’œuvre France, les experts et scientifiques concurrents étrangers.
ressort que : française est plus qualifiée et à consultés mettent en avant de
- le niveau des performances un coût plus élevé. nouveaux progrès techniques pos-
obtenues se situe en faveur sibles, la diminution du prix de
des résultats français : ceci est Globalement, il en résulte pour la certains facteurs de production,
particulièrement net pour la Pologne un coût de production l’optimisation des systèmes d’éle-
Pologne, mais aussi pour moyen proche du coût moyen vage. Cependant, pour avoir des Pour avoir des coûts
l’Espagne et les Etats-Unis bien français, alors qu’aux Etats-Unis coûts de production faibles dans
de production faibles
que pour ces deux derniers le et en Espagne il est respective- un élevage, le rôle de la filière res-
niveau se soit accru récemment, ment de 10 à 15 % et de 5 à 6 % te important (approvisionnement, dans un élevage,
- le coût des aliments est plus inférieur. Les élevages français qualité des facteurs de production, le rôle de la filière
élevé en France qu’aux Etats- ayant les coûts les plus faibles sont encadrement technique...). ■ reste important.

Etude réalisée avec le concours financier de l’OFIVAL.

Références bibliographiques
• GOURMELEN C., VAN FERNEIJ J.P., MAROUBY H., DARIDAN D., TEFFÈNE O., RIEU M., 2002. Produire du porc
à coûts faibles : dans quelles conditions ? Situation en France, comparaisons internationales, perspectives.
Rapport d’études. ITP éd. Paris, 135 p.
• GOURMELEN C., TEFFÈNE O., RIEU M., 2003. Typologie d’élevages porcins français obtenant de faibles coûts
de production. Journées de la Rech. Porcine en France, 35, 195-200.

Contact :
claudie.gourmelen@itp.asso.fr

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