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La bonne soupe

Alors qu’ils voyagent à travers une agréable contrée, les voyageurs tombent sur les ruines d’un village
récemment pillé. Ils sont alors pris en embuscade par une horde de groin, qui les capture pour qu’ils
leur concoctent la Bonne Soupe.
Ce rêve a cela de particulier que les voyageurs n’auront pas à réaliser leur rêve d’archétype, mais à
réaliser celui d’une horde de groins vindicatifs.

I : La Menace Grouine
Les voyageurs battent la campagne joyeusement, le temps est bon, le fond de l’air est frais, la région
regorgent de plantes comestible et de gibiers savoureux, les sources d’eau sont claires et le chemin est
dégagé. En bref, c’est une agréable randonnée.
C’est d’autant plus désolant lorsqu’ils tombent sur un village en ruine. Le hameau ne devait pas
compter plus d’une vingtaine d’habitants. Les traces de pillages sont récentes, les cendres sont à peine
froides. Que s’est-il passé ?
Les voyageurs ont à peine le temps de se poser la question qu’une bande d’une vingtaine de groins
leur tombe sur le râble. Ce qui a l’air d’être leur chef hurle qu’il les veut vivant ! et les groins, soucieux
d’obéir à leur chef, se contente de tabasser les voyageurs à coup de gourdins dénué des habituels
aménagements typiques d’une grouine.
Le chef reste en retrait à beugler des ordres, comme « Machicoulis, assomme-le » ou « Capulte, ne le
tue pas ». S’il constate qu’un des voyageurs monte dans les terres médianes, il ordonne « Oink, Gruik
et Snort, caillassez le sorceleu ! » et trois groins se mettront à lancer des grosses pierres sur le haut-
rêvant pour l’empêcher de se concentrer. Sa stratégie est simple, temporiser le temps que ses groins
artilleurs, munis de pierres et de frondes, prennent en tenaille les voyageurs et les assomment par
derrière. Si les voyageurs se réfugient dans l’un des rares bâtiments encore debout, le chef grouin
ricane « boutez y le feu, on assommera ce qui sort ».
Les voyageurs peuvent résister, mais cela est vain, ils finissent submergés par la horde.
Saucissonnés, ils sont brinquebalés non loin de là dans un campement sommaire, fait de bric et de
broc, aux tentes de peau et d’écorce. Au centre de celui-ci trône une marmite, des denrées
alimentaires de toutes sortent sont stockées à côté du foyer.
Le chef grouin regardent les voyageurs avec dédain. Il montre la marmite et leur dit « vous faites la
bonne soupe ou vous êtes la soupe, capiche ? toi d’abord. » il libère un des voyageurs et le pousse vers
le foyer. Toute la horde observe alors le voyageur, attendant fébrilement qu’il fasse la bonne soupe.
Quel que soit la compétence en cuisine du voyageur, quel que soit la qualité de sa recette, le chef groin
goutera et décrètera, déçu : « ça n’est pas la bonne soupe. Vous serez donc la soupe. ». D’autres
voyageurs peuvent se porter volontaire pour essayer, mais toutes tentatives sont vouées à l’échec.
Les voyageurs sont jetés dans une cage de bois et la horde s’évanouit dans la nature, le chef estime
qu’il ont encore le temps de faire un raid. Avant de partir, le chef groin ordonne à deux groins (une
énorme gruie1 et un vieux groin malingre) de garder le camps tandis que les autres continuent leur

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Oui, une gruie. Les linguistes et ethnologues se sont longuement disputés sur la dénomination des groins
femelles. Certains les appelant grouines (comme la masse), d’autres penchant pour groins femelles (ceux-là sont
de piètres poètes), quelques-uns « ma jolie » (nous n’avons plus de nouvelles). L’auteur a décidé d’utiliser le
terme gruie. L’expert en peuples non-humains du rêve, Orkidok le Dernier, a l’habitude de trancher le débat ainsi
: « appelez-les comme bon vous semble, de toute façon elles ne savent pas lire. »

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recherche. Le vieux groin se met au fourneau pour préparer un fond de soupe qui sera servi avec le
ragout de voyageur, tandis que la gruie s’installe pesamment dans un coin pour roupiller. Les
voyageurs peuvent, après un examen superficielle, remarquer que des doigts habiles, ou un bon coup
de pied, suffisent à défaire le loquet sommaire de leur cage. C’est le moment ou jamais, leurs geôliers
distraits ne les surveillant que superficiellement, ils ont l’occasion de récupérer leurs affaires et de
prendre la poudre d’escampette au groin et aux soies de leurs ravisseurs.

II : Le village fortifié
Après avoir erré quelques temps, ils tombent sur un convoi. Une demi-douzaine de chariots escortés
par des paysans effrayés. Quand les voyageurs approchent, ils pointent leurs fourches ou leurs arcs
rudimentaires dans leur direction. Un guerrier en armure, au lourd bouclier de chêne orné d’un gland,
pointe son épée sorde dans leur direction. Une voix féminine résonne de sous le heaume : « Pas un
pas de plus, déclinez votre identité ! »
Constatant que ce ne sont pas des groins, la guerrière baissera son arme. Elle se nomme Sidonie,
forgeronne dans un village non loin et elle assure la sécurité du convoi jusqu’à Bourg-Couyon, seul
village suffisamment défendable pour résister à un assaut de la horde. Car les voyageurs l’apprennent,
ils ne sont pas les seuls à avoir subi les agressions des groins. Depuis quelques jours, la régions est
assaillis par des centaines de groins qui pillent et enlèvent les villageois pour leur poser une seule et
même question : « savez-vous faire la bonne soupe ? ».
Bourg-Couyon n’est pas un véritable bourg, mais plutôt un gros village, le plus gros du coin. Les maisons
accolées les unes aux autres sont en pierre et forment une sorte de mur tout autour du village, percé
ici et là par des chemins menant aux champs alentours. Une fois des barricades élevées aux « portes »
de la bourgade, le village devient une véritable forteresse.
Bourg-Couyon abritent une auberge, la Tête de Lard, renommée dans le coin car Benjamin le Hutin,
son tenancier, est une véritable cordon bleu. Ce qui excuse largement son humeur maussade voire
bougonne et la laideur proverbiale de son faciès. Ce n’est pas un mauvais bougre, mais il n’est pas
populaire. Actuellement, son établissement accueille des réfugiés et il s’occupe de nourrir beaucoup
avec peu.
Le patelin accueille également un haut-rêvant, reconnu comme tel, et donc logé comme il se doit dans
une tour au centre du village. C’est également le bourgmestre de Bourg-Couyon, le Connétable
Lacoene. C’est un savant, un homme de lettre qui n’avait jamais eu rien d’autre à faire que d’inaugurer
des granges, se montrer aux fêtes et serrer des pognes lors des marchés. Il consacre le reste de son
temps à l’étude et à la recherche. Il ne s’attendait pas à devoir gérer une invasion de groins.
Sidonie et son groupe sont les derniers arrivés, Lacoene va avoir du mal à trouver un coin où les loger,
la place centrale est déjà encombrée de tentes et de refuges de fortune. Lacoene est complètement
dépassé et il sait que les réserves sont dramatiquement basses, et même les provisions apportées par
Sidonie ne suffiront pas. Pour le moment, il se contente de rassurer tout le monde et d’assurer que
des renforts arrivent, même si ses appels à l’aide auprès des bourgs et villages voisins sont restés
lettres mortes.
Les voyageurs peuvent se proposer pour aider à la défense du village, mais la situation est critique et
les villageois vivent avec la peur de voir surgir une horde qui balayerait leurs défenses en un rien de
temps. Il faut trouver une solution.

III : La tablette
Après un repas frugal assaisonné par l’angoisse, les voyageurs passent leur première nuit à Bourg-
Couyon. Benjamin leur a trouvé un coin dans les combles de sa taverne, qu’ils partagent avec deux
familles de paysans. Dans cette bruyante moiteur, ils font un rêve.

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Ballotté dans la mélasse, le rêveur parvient à refaire surface, entre un bout de navet et une carotte.
S’accrochant désespéramment à un morceau flottant dans l’eau grasse, le rêveur aperçoit enfin
l’extérieur. Il se trouve au milieu d’une immense marmite de fer noir. Au-delà, il n’y a qu’un obscurité
éclairée par des feux infernaux. Se détachant des ombres, le mufle porcin d’une bête se penche sur la
marmite, inspirant profondément, se délectant de l’odeur. La créature semble se plonger dans des
abîmes de réflexions, ignorant le minuscule rêveur dans son plat. Il se tourne alors vers une grande
plaque d’argile dans laquelle un texte est tracé, écrit dans une langue inconnu du rêveur. La chose pose
alors un doigt sur une ligne, et de son autre main, il lance quelque glands dans la préparation puis se
mets à touiller du doigt la préparation, créant un tourbillon qui aspire peu à peu le rêveur qui se
réveille.
Ceci est un indice ? Est-ce la bonne soupe ? Est-ce une piste ?
La bonne soupe est inconnue des villageois, la tablette d’argile dit quelque chose à Sidonie. Son grand-
père bêchait dans son champ quand il buta sur quelque chose. Il déterre alors une tablette d’argile
couverte d’étranges gribouillis. Illettré, il pensa à une relique du second âge et l’exposa fièrement au-
dessus de sa cheminée. Aux dernières nouvelles, elle s’y trouve toujours. Mais entre cette cheminée
et le village, il y a des bandes grouines en maraude.
Est-ce que le risque en vaut la chandelle ? Sidonie est disposée à prêter mains fortes aux voyageurs,
plutôt un maigre espoir que de se laisser mourir à Bourg-Couyon. C’est une excellente guerrière mais
aussi une guide qui connait très bien la région.
Le chemin est relativement dégagé, les groins rôdent mais ne sont guère discrets, ils ont bien compris
que tout le monde se trouve à Bourg-Couyon. Les éviter est plutôt simple, et ils ne sont jamais plus
d’une dizaine. Au village de Sidonie, il peut y avoir quelques groins, qui fouillent le village en quête
d’un butin que les autres auraient oubliés, mais aucun stratège parmi eux, c’est du menu fretin. La
tablette est toujours à sa place. Et elle est en effet illisible, mais aussi rigoureusement, quoique bien
plus petite, identique à celle du rêve.
Retourner à Bourg-couyon est assez simple, du moins jusqu’à arriver en vue de la tour de Lacoene.
Pendant l’expédition, la horde s’est installé autour du village et commence le siège. Il va falloir être
très rapide, ou très discret, pour rejoindre les barricades. Mais rien d’insurmontable, les groins sont en
pleine installation, et ne s’attendent pas à qui que ce soit veuille rentrer dans le village.
Si les voyageurs montre la tablette aux villageois, Lacoene reconnaîtra l’écriture utilisée : elle est en
grouinique ! Le Grouinique est l’ancêtre supposé du langage groin, celui qui était parlé dans les temps
anciens où les groins étaient circonscrit à leur rêve unique. C’était la langue des lettrés et des puissants,
avant que le rêve ne se déchire et renvoie la race des groins à une vie de pillage et de brutalité. Rares
sont ceux qui la parlent encore, si ce n’est quelques rescapés du rêve des groins, et seuls quelques
historiens curieux arrivent à la déchiffrer. C’est justement un sujet d’étude de Lacoene, il possède l’une
des plus belles collections de tablettes grouiniques de tout le Rêve, et il travaille à l’établissement d’un
lexique.

IV : La soupe
Il faudra laisser le temps à Lacoene de déchiffrer la tablette, et également à Benjamin le Hutin le temps
de concevoir la soupe, les voyageurs selon leurs compétence (Intellect/écriture à -8 et Odorat-
goût/cuisine à -8) pourront aider et gagner ainsi un temps précieux. Car pendant ce temps, quelques
groins impatient lance des assauts contre les barricades et de l’aide sera la bienvenue.

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Benjamin le Hutin fera merveille et parviendra à concevoir la soupe avec les quelques maigres réserves
qui lui reste. Mais est ce que la recette contenue par la tablette est la bonne ? Il n’y a qu’une seule
façon de s’en assurer : que les groins la goûtent.
Les groins sentiront l’odeur de la soupe, et cesseront leurs assauts, sous les ordres et les coups de leurs
chefs. Si les voyageurs ou les villageois mettent trop de temps à la leur livrer, ils lanceront un assaut
simultané sur toutes les portes, et cette fois-ci ils utiliseront de véritables grouines. Si les voyageurs et
les villageois la transportent dès qu’elle est prête, les chefs groins ordonneront à leurs sbires de laisser
passer les porteurs de la soupe. Sinon on peut juste les laisser accéder à la soupière en leur ouvrant
les portes du village.
Sous le regard affamé des groins, les porteurs de la soupe seront amenés devant le grand chef, un
groin aussi gros que grand. C’est lui qui goûtera la soupe. Puis dans un grand sourire, il plongera le
groin dedans, provoquant une frénésie indigné parmi ses sujets. Ceux-ci se bousculeront pour
atteindre la soupière, dans une cohue de corps se percutant, ignorant les voyageurs qui feraient bien
de s’esquiver s’ils ne veulent pas finir en pâté.
Petit à petit, la cohue faiblit, et quand la poussière de la lutte retombe, il ne reste, baignés d’une lueur
violette s’estompant peu à peu, que les reliefs du campement groin, les affaires qu’ils ont
abandonnées, et la grande soupière renversée, vide et parfaitement récurée.

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