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Cuisines
de France
réalisée en partenariat avec
Le Cordon Bleu et l’Alliance française
Crédits photographiques
Panneau-titre : Saint-Honoré, photo Hioki in Le Rêve de Sabrina pour Le Cordon Bleu International, Bunka Shupan éd. ❖ Élèves en P6 : Le Cuisinier-Pâtissier-Traiteur-Rôtisseur, planche de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, 1760, ©D. R. ❖ Un serveur en tenue
cours et cuisine de l’école Le Cordon Bleu de Paris, photos Le Cordon Bleu International ❖ Cuisiniers à l'œuvre dans les cuisines pour d’apparat, chromo publicitaire fin XIXe siècle, ©Coll. Kharbine-Tapabor ❖ Auguste Escoffier (1846-1935) The French Chief, ca. 1925,
la préparation du repas de Noël, G. Marchetti, in numéro de Noël 1893 de L'Illustration, Paris, ©Coll. Kharbine-Tapabor ❖ Route des Paris, France, ©Hulton-Dutch Coll./Corbis ❖ Auguste Escoffier, in L'Album-Revue des Opinions, calendrier publicitaire de 1914,
épices, photomontage, ©PLM2 ❖ Un serveur en tenue d’apparat, chromo publicitaire fin XIXe siècle, ©Coll. Kharbine-Tapabor illustr. de Georges Villa (1883-1965), ©Coll. Kharbine-Tapabor. ❖ Bol et cuillère, photo Le Cordon Bleu International ❖ La Cuisinière
P1 : La soupe, Honoré Daumier (1808-1879), Paris, musée du Louvre D.A.G. (fonds Orsay), ©Photo RMN-Michèle Bellot ❖ Funérailles bourgeoise, Paris, Guillyn éd., 1775, photo PLM2
au bord de la Seine, Gaule préhistorique, Xénophon Hellouin (1820-1895), Paris, musée d’Orsay, ©Photo RMN-Hervé Lewandowski P7 : Assiette « Fête des écoles de Neuilly-sur-Seine (1888)-Parmentier dans la plaine de Sablons (1785) », ©PLM2 ❖ Les apprêts du pot-
❖ Sainte Marthe, gravure de Charles de Mallery, ©D. R. au-feu, Michel-Honoré Bounieu (1740-1814), Paris, musée du Louvre, ©Photo RMN-Gérard Blot ❖ Alexandre Dumas père, par Pierre
P2 : Le miroir historial de Vincent de Beauvais. Tome III. Scène de la vie de saint Mayeul et de saint Odillon (ms722-fol.142 verso), Maître Petit, vers 1860. ❖ Intérieur d’un restaurant, Les Trois Frères Provençaux, E. Lami (1842), ©PLM2 ❖ Femme dans un restaurant, in
François, XVe siècle, Chantilly, musée de Condé, ©Photo RMN-René-Gabriel Ojéda ❖ La peleuse de pommes, Gabriel Metsu (1629- L’Illustration, 1907, photo PLM2
1667), Paris, musée du Louvre, ©Photo RMN-Daniel Arnaudet/Jean Schormans ❖ Intérieur de cuisine, Paris, Bibliothèque des Arts P8 : Dessert à la poire, ©1997, Le Cordon Bleu Home Collection Series, Sauces, Murdoch Books ® ❖ Truite, photo Hioki in Le Rêve de
décoratifs, Coll. Maciet, photo PLM2 ❖ Marchand de vinaigre (règne de Louis XIII), n°47, F. Roy éd., ©D. R. ❖ Le cabaret de Sabrina pour Le Cordon Bleu International, Bunka Shupan éd. ❖ Service de table Renaissance (XVIe siècle), Paris, musée des Arts déco-
Rampouneau, Eugène Benjamin Fichel (1826-1895), Bordeaux, musée des Beaux-Arts, ©Photo RMN-A. Danvers ❖ Enseigne, ©PLM2 ratifs, ©Photos12.com-ARJ ❖ Projet de théière pour Napoléon Ier et couverts de table début XIXe siècle, Paris, ©musée des Arts décora-
P3 : Catherine de Médicis, atelier de Corneille de Lyon (vers 1500-1575), château de Versailles et de Trianon, ©Photo RMN-Daniel tifs-Laurent-Sully Jaulmes ❖ Service de table Charles-Maurice Talleyrand-Périgord, manufacture de Nast à Paris, verres en cristal, four-
Réalisation : Éditions Sépia Arnaudet ❖ Tenture de l’histoire d’Henri IV, François-André Vincent (1746-1816), musée national du château de Pau, ©Photo RMN- chettes aux armes par Lorillon (1798-1809), ©Photo12.com-Pierre-Jean Chalençon ❖ Les cinq sens ou les plaisirs de la vie, gravure, École
René-Gabriel Ojéda ❖ Route des épices, photomontage, ©PLM2 ❖ Le festin du sacre de Louis XV servi dans la grande salle archiépiscopale française du XVIIe siècle, ©Coll. Kharbine-Tapabor. ❖ Menu pour le souper du roi et de Mme de Pompadour au château de Choisy en
Téléphone : 33 (0)1 43 97 22 14 de Reims, le 25 octobre 1722, attribué à Pierre Denis Martin (1663-1742), château de Versailles et de Trianon, ©Photo RMN-Gérard Blot 1757, Paris, Bibliothèque des Arts décoratifs, Coll. Maciet, photo PLM2
P4 : Le Cuisinier-Pâtissier-Traiteur-Rôtisseur, détail de la planche de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, 1760, ©D. R. ❖ Le suicide P9 : Publicité Moulinex, in Arts Ménagers, n°43, 1961, photo PLM2 ❖ Miroir cassis, photo Hioki in Le Rêve de Sabrina pour Le Cordon
Fax : 33 (0)1 43 97 32 62 de Vatel, gravure, E. Ziem, ©D. R. ❖ Couverture d’un livre de Taillevent, ©Costa/Leemage ❖ Le Cuisinier, 1899, Paris, Bibliothèque des Bleu International, Bunka Shupan éd.❖ Nouvelle cuisinière universelle au gaz, Jules Jean Chéret, 1882, Paris, ©musée de la Publicité
Arts décoratifs, Coll. Maciet, photo PLM2 ❖ Les cuisines de Marguerite d’Angoulême, musée national du château de Pau, ©Photo ❖ Je cuisine à l’électricité, Lefor-Openo, 1959, Paris, ©musée de la Publicité ❖ 2e Exposition culinaire gastronomique de Paris, Georges
Site : www.editions-sepia.com
RMN-Hervé Lewandowski ❖ Cuisine de l’école Le Cordon Bleu de Paris, photo Le Cordon Bleu International ❖ Deux cuisiniers, gravu- Villa, 1928, Paris, ©musée de la Publicité ❖ Ustensiles et cuisine de l’école Le Cordon Bleu de Paris, photos Le Cordon Bleu International
E-mail : sepia@editions-sepia.com re in Le Maître d’hôtel français d’Antonin Carême, Paris, 1822, Bibliothèque des Arts décoratifs, Coll. Maciet, photo PLM2 ❖ Cuisiniers ❖ Asperges et mousseline, ©1997, Le Cordon Bleu Home Collection Series, Sauces, Murdoch Books ®
à l'œuvre dans les cuisines pour la préparation du repas de Noël, G. Marchetti, in numéro de Noël 1893 de L'Illustration, Paris, ©Coll. P10 : Botte d’asperges, « Le potager provençal », étal de marché, photos Hioki in Le Rêve de Sabrina pour Le Cordon Bleu International,
Rédaction : Karine Elsener Kharbine-Tapabor Bunka Shupan éd. ❖ Vignette olivier, ©PLM2 ❖ Gargantua à « son petit souper », Paris, musée Carnavalet, ©Photo RMN-Bulloz
P5 : Transports d’hier et d’aujourd’hui, photomontage, ©PLM2 ❖ Henri-Paul Pellaprat et Les Petits Cordons Bleus, photos Le Cordon P11 : Vignoble et fromages, ©D. R. ❖ Concorde, photo Didier Toulorge, coll. musée Air France ❖ Service à bord, brunch, 1999, photo
Graphisme : PLM 2 Bleu International ❖ La cuisine moderne, Paris, ©musée de la Publicité ❖ Habit de cuisinier, gravure, d’après Nicolas de Larmessin Philippe Delafosse, coll. musée Air France
(XVIIIe siècle) ❖ Rose des vents, ©PLM2 P12 : Photos Le Cordon Bleu International
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« Mange
ta soupe ! »
Au Moyen Âge, ce n’est pas
une punition mais la base
appréciée de l’alimentation
rurale. Longuement miton-
née dans la cheminée, elle
est nourrissante. Préparée
avec des herbes, racines
ou fèves de saison, elle se
consomme, à l’origine, en y
trempant du pain. Depuis, Le feu est découvert il y a
plus de cinq cent mille ans...
« être dans la panade », ce
n’est pas tomber dans une
soupe de pain, d’eau et de
◆Les moyens de cuire
beurre, mais avoir des La cuisine se définit donc par l’art de préparer les mets et le
ennuis ! Bouillon, velouté,
consommé : des variantes cuisinier est longtemps associé au rôtisseur. Étonnamment, on
plus légères se sont utilise dans l’Antiquité un plus grand nombre de modes de
multipliées.
cuisson qu’au Moyen Âge : bouillir, saisir, cuire,
rôtir, mijoter, réchauffer. Les possibilités, variées,
s’appauvrissent ensuite : broche à l’intérieur de la
cheminée et marmites à l’extérieur. Le four ne
réapparaît qu’au XIIe siècle, permettant de nouveau
une cuisson modérée, donc les ragoûts et les sauces !
À vos fourneaux
◆Une cuisine de carnassiers
Au Moyen Âge, la viande est assimilée à la richesse et
La garbure toute fête implique des amoncellements de rôts : veaux,
Soupe du Béarn, elle
a traversé les siècles : oies, chevreuils, perdrix, sangliers... Le poisson leur est
on la prépare à partir d’une naturellement mêlé : on farcit même le gibier d’anguilles !
« gerbe » de légumes frais,
de lard et de confit d’oie.
Le roi cochon
Plat riche au Moyen Âge, le cochon
se cuisine tout au long de l’année
Sainte Marthe,
patronne des cuisinières à des moments précis du calendrier
religieux. En Occident, l’Église ne juge
pas la viande impure, à condition
qu’on en élimine le sang
par la salaison.
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À vos fourneaux
Le cassoulet
Fierté de l’Occitanie, ce savoureux
plat de haricots blancs, réunissant
selon les variantes porc, confit
d’oie, saucisses locales et mouton,
soulève pourtant bien des
polémiques : le « véritable »
cassoulet, qui doit son nom à la
« cassole » de terre cuite dans
lequel on le prépare, vient-il
de Castelnaudary, de Carcassonne
ou de Toulouse ? La question n’est
toujours pas... tranchée !
L’appétit à la cour
Du feu aux
Un repas offert
à Catherine de Médicis
à Paris en 1549
La cuisine des Grands
R Brouet de cannelle - Potage
à la bisque de pigeonneaux
R Huîtres frites - Grenouilles -
Hochepot
R Crêtes et rognons de coq
aux fonds d'artichauts
R Salmis de hérons - ◆Les influences étrangères
Chapons hachés
R Grues rôties L’inventivité de la cuisine française ne s’explique pas seulement
R Paons flanqués de cygnes par le génie de ses artisans mais aussi par les apports extérieurs :
R Rognons au fenouil
R Rille à la garbure gratinée Espagne, Allemagne, Europe orientale... Au XVIe siècle, Catherine
à la purée de noisette de Médicis, qui fait un tour de France accompagnée de cuisiniers,
R Petits poulets au vinaigre
R Cochons rôtis exerce une influence durable sur les manières de manger, avec
R Moëlle de bœuf au sucre candi propreté et discrétion, sur la pâtisserie, ainsi que sur l’adoption de
R Gelée de bœuf au vin d'Alicante
R Aigles rôtis légumes et de fruits venus d’Orient : concombres, brocolis,
R Poires à l'hypocras artichauts, melons...
R Bécasses et perdreaux aux truffes
R Oublies - Echaudés
R Poussins à l'orange ◆Du piment dans l’assiette
Le goût des épices et du salé-sucré a précédé notre siècle. Le sucre
sert longtemps de condiment. Safran, cumin, curcuma, clou
de girofle, coriandre, genièvre : réputées depuis l’Antiquité
pour stimuler l’appétit, les épices orientales relèvent des
mets français depuis le Moyen Âge, puis sont laissées aux
« peuples barbares » au XVIIe siècle. Les voyages diplomatiques,
guerriers ou commerciaux introduisent de nouveaux produits ; la
cuisine du Languedoc fut ainsi marquée par le retour
des Croisés.
4 La professionnalisation du cuisinier
Un métier à part entière
Vatel ou le sens
de l’honneur
La médiocrité d’un repas Une cuisine du XVIe siècle Une cuisine de l’école Le Cordon Bleu Habits de cuisiniers
au XXIe siècle au début
peut nuire au prestige d’un du XIXe siècle
seigneur. C’est pourquoi, en
1671, au château de Chantilly,
convaincu que le retard de
◆La reconnaissance du statut de cuisinier
la marée ruinera le festin Jusqu’au Moyen Âge, les cuisiniers se forment sur le tas et, malgré
que le prince de Condé
prévoit pour ses hôtes, Vatel
leurs prouesses, passent pour des incultes. La rédaction des
met fin à ses jours. premières « bibles » culinaires par de grands maîtres puis leur
diffusion améliorent leur image. La cuisine s’apparente à un
ordre : Taillevent repose en armure de chevalier sous un bouclier
orné de trois marmites. La reconnaissance vient d’en haut : en
1564, des chefs accompagnent Catherine de Médicis dans son
tour de France.
À vos fourneaux
La dodine Taillevent,
de Taillevent un précurseur
Au XIVe siècle, Guillaume
L’ajout de lait, de gingembre,
Tirel, dit Taillevent, est
de jaunes d’œufs et de sucre
le cuisinier le plus célèbre
à la graisse d’un rôti donne
du royaume de France.
l’une des variantes de cette
Successivement
sauce savoureuse, à servir
« enfant de cuisine »,
avec du gibier à plumes.
« Premier queux du roi »
et « Premier écuyer
de cuisine », il écrit le
fameux Viandier, un des
plus anciens livres de
cuisine rédigés en français.
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Échanges et harmonisation
Henri-Paul
Pellaprat
(1869-1950)
Chef de cuisine français
et professeur aux écoles
Le Cordon Bleu, il est l'auteur
de nombreux ouvrages
de référence. Traduit en
six langues, L'Art culinaire
moderne est l'un des
premiers livres à avoir fait
connaître à l'étranger
les techniques culinaires
françaises.
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La codification de la cuisine
À vos fourneaux
La pêche Melba
Escoffier crée la « pêche Melba »
en 1893 pour remercier Mme Melba
du plaisir qu'il a eu à entendre sa voix ◆La publication des premiers manuels
à l'Opéra de Covent Garden.
L’imprimerie assure une diffusion aux premiers livres de
cuisine. Le cuisinier, auteur, communique son savoir.
Au XIVe siècle, le Viandier de Taillevent connaît une quinzaine
de rééditions. En 1651 paraissent Le Cuisinier françois de La
Varenne et Le Jardinier françois de N. de Bonnefond, premier
valet de chambre de Louis XV. Au XVIIe siècle, des dictionnaires
Des mets
répertorient les ingrédients et préparations de base, ainsi que
et des mots leurs qualités et défauts diététiques respectifs. Dans leur
Le mot gastronomie, Encyclopédie, Diderot et d’Alembert s’intéressent aux ustensiles.
d’origine grecque,
apparaît au début du XIXe
siècle. Plus que par le seul ◆La mise en place des fondements de la cuisine
art de bien manger, D’une réédition à l’autre, le Viandier illustre l’évolution de l’art
Brillat-Savarin la définit
comme « la connaissance culinaire : les techniques se différencient, de nouveaux
raisonnée de tout ce qui a aliments sont introduits, les proportions et les temps de cuisson
rapport à l’homme, en
tant qu’il se nourrit. » Ce qui plaît se précisent. Ingrédients, mesures et tours de main ne sont plus
au palais ne suffit pas : ce qui est bon ni aléatoires ni confidentiels. Si la cuisine se codifie avec
pour le corps importe autant.
Carême, c’est, un siècle plus tard, le grand Escoffier qui laisse
l’empreinte la plus décisive en rationalisant la répartition des
tâches dans les brigades et en soignant l'image des cuisiniers.
Les noms des recettes
Quand elles ne portent pas leur
◆Critiques et philosophes de l’art culinaire
propre nom, les cuisiniers de l’Ancien La vogue des restaurants aux XVIIIe et XIXe siècles s’accompagne
Régime baptisent leurs recettes du d’une montée en puissance des « critiques gastronomes » : ils
nom de leur maître afin de jouir de
son prestige : ainsi fleurissent les plats concilient la littérature technique (les recettes), la littérature
« à la Colbert », « à la Villeroy » ou « Conti »... poétique (ah, les plaisirs de la chère !) et la littérature scientifique
Au XIXe siècle, nombre de préparations
prennent le nom d’un artiste : et un (la diète quand même !). Ainsi les précurseurs de la Reynière et
« tournedos Rossini », un ! Brillat-Savarin n’écrivent-ils pas que des guides mais donnent-ils
aussi des conseils sur la façon la plus hygiénique de s’alimenter.
Escoffier (1846-1935) :
« l’empereur
des cuisiniers »
Dans la restauration depuis La Cuisinière bourgeoise
ses 13 ans , il rencontre à l’usage de tous ceux
qui se mêlent de dépenses
César Ritz au Grand Hôtel de maisons
de Monte-Carlo. Il le
Brillat-Savarin (Paris, Guillyn, 1775)
La cuisine bourgeoise
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La confirmation des valeurs sûres
Pour la petite histoire
Grandeur et
décadence de
la pomme de terre
Ramenée du Pérou par les
Conquistadors, la pomme de ◆Un luxe mesuré
terre est longtemps considérée
comme un tubercule bon pour
Au XIXe siècle, la cuisine doit être économique, saine et
les pauvres. Elle est valorisée par appétissante. Ragoûts, pot-au-feu, pain perdu... l’art d’accom-
Parmentier, pharmacien chargé en moder les restes vient du souci de ne rien gâcher. Les plats sont
1785 de remédier aux disettes. Simple
garniture, elle est ensuite anoblie par des roboratifs et rassurants. Dans les demeures cossues, la cuisine
chefs imaginatifs : pommes Duchesse, Pont- est confinée au fond d’un couloir. Dans la salle à manger parée
Neuf, noisettes... Bœuf cuit haché, revenu avec
des oignons et du bouillon, nappé d’une purée de lustres, de cristal et d’argenterie, les convives, préservés des
de pommes de terre gratinée, le hachis odeurs et des domestiques indiscrets, se retrouvent en famille,
Parmentier est l’exemple parfait du plat
« du lendemain ». nouent des relations, règlent des affaires.
Un dîner chez
Alexandre Dumas (père)
en 1864
Intérieur du restaurant
Les Trois Frères Provençaux
par E. Lami (1842)
Les bonne tables
Le Procope est le doyen des
restaurants parisiens (1686).
Tortoni, Beauvilliers,
Les Trois Frères Provençaux,
Le Rocher de Cancale, puis
le Café Anglais, la Maison
Dorée, le Café Riche et
le Grand Véfour contribuent
à leur tour au succès de
la gastronomie française.
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Un art de vivre
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Autour des mets
Des mets et des mots
« Entre la poire
et le fromage »
Dans cette expression encore ◆L’art de la table
utilisée, l’ordre de ces mets,
Géométrie et raffinement régentent la table au XVIIe siècle.
contraire à celui d’aujourd’hui,
n’étonne plus lorsqu’on sait qu’au Les convives sont régulièrement répartis selon leur naissance.
XVIIe siècle les fruits précèdent Le repas est mis en scène par la beauté des plats et des décors de
le fromage, conclusion du repas. table, dont les pièces montées sont le point d’orgue. Avant le
gouvernement de Louis XIV, on plonge ses doigts dans le ragoût,
on les rince sous l’eau d’une aiguière, puis on les essuie.
Importée par Catherine de Médicis, la fourchette devient
un signe d’élégance. À chaque mets, assiette et couverts sont
renouvelés. L’apparat se retrouve sur la table bourgeoise du
Les couverts XIXe siècle où l’on est jugé par son argenterie.
à poisson
Utilisés par les Anglais
depuis le XVIIe siècle, ◆L’ordonnance des menus
les couverts à poisson
n’apparaissent sur les Au Moyen Âge, on aime consommer les fruits au début du
tables françaises que repas – certains diététiciens d’aujourd’hui pensent qu’ils
deux siècles plus tard.
Le couteau à poisson, se digèrent mieux ainsi. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, la
en détachant la chair sans symétrie gouverne encore la composition des copieux
la couper, permet d’en
préserver la saveur.
menus. Au lendemain de la Révolution, Brillat-Savarin
indique que « L’ordre des comestibles est des plus substantiels
aux plus légers ». Il prône toutefois la mesure : « Que les mets Un menu royal
en 1757
◆Le service
Dans le service « à la française », appliqué sous l’Ancien Régime,
les plats sont savamment disposés sur la table, tels les éléments
d’un jardin de Le Nôtre. Le repas se divise en trois ou quatre
services. Chacun peut compter plus de vingt plats, qui ne restent
que vingt minutes sur la table, chaque convive n’en goûtant que
Service de table Renaissance (XVIe siècle)
deux ou trois. Ce n’est qu’au XIXe siècle que tous les invités se
La fourchette voient présenter chaque mets et mangent tous la même chose.
Le mot vient de l’italien fuscina, qui signifie
« petite fourche ». Elle ne comporte initialement Dans le service « à la russe », le plat entier leur est présenté avant
que deux dents longues et acérées. Le modèle qu’un morceau découpé ne soit servi à l’assiette.
à quatre dents, moins blessant, lui sera
définitivement préféré.
Service de Talleyrand, dont la table
fut l’une des meilleures de l’Empire.
La réussite
d’un repas
À vos fourneaux « Quelque recherchée que
soit la bonne chère, quelque
Le poulet somptueux que soient
Marengo les accessoires, il n’y a pas
En pleine campagne de plaisir de table, si le vin
d’Italie contre les est mauvais, les convives
Autrichiens, Bonaparte ramassés sans choix,
a faim. L’intendant les physionomies tristes,
s’excuse du manque et le repas consommé
de beurre et lui sert un avec précipitation. »
poulet sauté à l’huile, Brillat-Savarin
assaisonné d’épices,
d’un bouquet garni, de Projets de théière pour
Madère et de vin blanc, Napoléon Ier et de couverts
de table début XIXe siècle
accompagné de champi-
gnons : le général se régale,
la recette est née !
ns le mond
is da e
ire frança
La cuisine
domestique
Mixer, râper,
hacher... les appareils
et robots électriques
garantissent aux ménagères, dès
les années 1950, une rapidité
et une précision dans l’exécution
ainsi qu’une moindre fatigue.
Peut-on encore rater une recette ?
◆... aux nouvelles cuisines
À l’image de la mode, la cuisine connaît des cycles...
et des recyclages ! Aux préparations lourdes, la « nouvelle
cuisine » préfère la sobriété mêlée d’audace : choc des
couleurs et des saveurs, contraste des textures, mi-
cuisson, mousses de légumes, purées, feuilletages,
mariage du luxe et de la rusticité – comme dans la
« salade folle » de foie gras et haricots verts croquants.
Puis la nouvelle cuisine a lassé, le « craquant »
supplantant le moelleux. La légèreté reste de mise
sous l’influence de la cuisine japonaise : goût du
cru, fraîcheur des ingrédients, esthétisme
dépouillé des présentations...
La sophistication révolue
cu
rt
L’a
Gargantua à
« son petit souper »
Quelques diplômés
A.O.C. !
La poularde de Bresse
La pomme de terre de l’île de Ré
Les lentilles vertes du Puy
L’huile d’olive de Nyons
L’oignon doux des Cévennes
Le beurre d’Isigny
Le bleu d’Auvergne
La noix de Grenoble
Le miel de sapin des Vosges
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11 Le prestige français
na
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Le champagne :
une naissance bénie !
En 1668, dom Pérignon, un
ecclésiastique, constate que le
◆Pain, fromages et vins : un trio qui s’exporte
vin de Champagne subit Moyen de survie durant les disettes, le pain s’est depuis anobli.
parfois une fermentation qui
le rend mousseux. Il décide de la Comble du chic outre-Atlantique, la baguette voisine avec les
favoriser en utilisant un bouchon « pains spéciaux », souvent inspirés de recettes anciennes, voire
de liège et en introduisant, à l’instar
des Normands dans le cidre,
antiques. Le pain s’impose surtout avec le fromage et la France
un morceau de sucre, et enfin en revendique la plus grande richesse. Ses fromages sont en
de mélanger différents crus.
effet aussi variés que ses terroirs... à l’image des vins qui les
accompagnent ! De Bordeaux, de Bourgogne, des Côtes du
Rhône ou d’Alsace, les grands vins français s’exportent... et les
cépages aussi !