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Ahmadou SEHOU
Chercheur-Résident
Institut d’Etudes avancées de Nantes
&
Université de Maroua (Cameroun)
« Le sort réservé à l’être humain est toujours dépendant de l’idée qu’un peuple
se fait de Dieu et de ses commandements »
Les travailleurs de l’Egypte ancienne étaient-ils des esclaves ou des ouvriers? Mécanismes de
réinsertion sociale des prisonniers, des condamnés, inexistence de marchés d’esclaves.
Le mot esclave dérive du latin slavius ou de l’anglais slave; pour désigner les Slaves (populations
indo-européennes d’Europe orientale) qui étaient vendus comme esclaves parce que non-chrétiens;
L’esclavage est une institution des sociétés indo-européennes et sémitique (voir la Grèce, Rome; la
Bible et le Coran);
Conquête de l’Egypte par les Arabes en 641 suivie de celle de la Nubie (traité de 652 ou Baqt avec
livraison annuelle de 400 esclaves);
L’alliance en 1061 de Ouar Diabi, roi du Tekrour avec les Almoravides pour la conquête du Ghana
en 1076 et la propagation de l’islam: « les populations du Ghana devenues musulmanes, ainsi que
leurs coreligionnaires du Tekrour (Fouta Toro) et de Silla, se rependaient régulièrement chez les
populations animistes pour opérer les razzias… les victimes trouvaient acheteurs parmi les
commerçants du Maghreb ». (Renault F. et Daget S., 1985, Les traites négrières en Afrique, Paris,
Karthala, p. 24-25).
Origines (suite)
Sur la côte (jusqu’à l’arrivée des Portugais au Du Lac Tchad jusqu’à la lisière de la forêt
XVe Siècle) puis des Anglais au XVIIIe siècle
Des peuples de pêcheurs autour du Lac Tchad et le long
Peuples de pêcheurs (Sawa: duala, isubu, des fleuves tels que le Logone, le Chari, la Benoué
bakweri, banyang, mbo… ) en migrations (Kotoko, Mousgoum, Tupuri …);
le long de la côte ou suivant les rives des
Des agriculteurs (Wandala, Tupuri, Moundang, Mofou,
cours d’eau (Campo, Nyong, Lokoundje,
Matakam, Guiziga, Guidar, Fali, Sara, Dama, Dowayo,
Sanaga, Wouri, Moungo …
Dii, Mboum, Gbaya, Péré, Vouté, Tikar, Wawa, Kondja,
Kaka, Maka….);
Structures claniques (familles élargies);
Des principautés kotoko (Sao); des cités mousgoum avec
Pratique de l’exogamie (rapt de femmes leurs cases obus; des chefferies Mboum autour des
parfois); grottes et montagnes (Ngan-Ha, Ngawkor, Ngaouhora,
Ngaoundéré, Ngaoundal); des cités Vouté;
Contacts limités avec les peuples de
l’intérieur forestier (Pygmées, Bassa, Structures politiques à la dimension des clans ou
Bakoko, Ngumba, Bakossi, Abo, Bakundu, lignages; pratique de l’exogamie (enlèvement de
Yabassi, Bamileke, Bamoun, Widikum, femmes), culture matérielle (céramique, poterie, forge,
Nso, Tikar, Banen, Béti, Ntumu, Fang… ; architecture, artisanat…)
Conflits très limités (rixes, luttes entre Pas d’existence avérée d’esclaves ou de marchés d’esclaves
jeunes…); réinsertion sociale des dans la structure sociale ou dans les traditions orales, avant
prisonniers dans la communauté l’introduction de l’Islam par le Nord ou l’arrivée des
Portugais par la côte atlantique en 1472.
ARRIMAGE À LA TRAITE TRANSATLANTIQUE
À PARTIR DE 1472
De la traite de proximité (entre la côte et les îles voisines,
centres de collecte, de transit, d’entrepôt, de ravitaillement)
…
… à la traite transatlantique (embarquements, traversée,
destinations, débarquements, vente, achat des produits
exotiques pour l’Europe: sucre, coton, café, or, …);
Logique de construction d’un système (processus de
raccordement et d’implication des populations de l’intérieur;
Transformation progressive des pratiques antérieures et
organisation des circuits pour satisfaire la demande exprimée
à partir de la côte.
LE CAMEROUN SEPTENTRIONAL DANS LE
SYSTÈME TRANSSAHARIEN
Relations avec les empires du pourtour tchadien: Kanem (VIIIe
s.), Bornou (XIVe s.), Kanem-Bornou (XVIe s.), Baguirmi
(XVIe s.); Wandala (XVe s. fondé par une femme Soukda);
Abraham Hannibal (prince du Logone-Birni), capturé en 1703
et emmené à Istanbul, acheté pour Pierre le Grand (Tsar de
Russie); secrétaire de l’empereur et enfin général en chef dans
l’Armée impériale russe; arrière-grand-père maternel du
célèbre poète russe Alexandre Pouchkine.(Gnammankou,
1996; Hugh Barnes, 2008);
Le tournant majeur: fondation de l’Empire de Sokoto à partir
de 1804 par Ousman dan Fodio (plus grand empire africain au
XIXe siècle: Islam, esclavage et commerce caravanier); djihad
sans islamisation.
RÉSISTANCES, ABOLITIONS ET COLONISATION
Résistance à la capture et aux razzias (fuites, sites défensifs, constructions
défensives, armes…), pendant l’esclavage (luttes, refus de travailler, révoltes,
fugues/femmes…);
Abolitions de la traite : luttes externes, imposées aux chefs, signature des
traités (Côte et intérieur); décrets coloniaux (Allemands, Anglais et Français);
Répression de la traite mais sans éradication de l’esclavage; persistance; tracé
des frontières; tentatives d’encadrement du pouvoir des chefs, immixtion
dans la succession, destitutions, création des chefferies autonomes (pouvoir
de l’occupant contre la légitimité ancestrale); restructuration des réseaux
internes;
Modus vivendi entre Européens et chefs locaux, accommodements des
colonisateurs, réalisme colonial, pluralisme légal (coutumes, religions
importées, lois européennes);
« Tout ce que le Blanc dit au bureau, il l’oublie vite dès qu’il rentre à la
maison ! » (son confort, sa nourriture, ses ordres ne peuvent être assurés
qu’avec le maintien du système)
La case obus des Mousgoum: une architecture de résilience
face aux razzias et incendies (épopée esclavagiste de Rabah, 1842-1900)
SURVIVANCES ET SÉQUELLES ACTUELLES
Traces perceptibles (mémoire, attitudes, comportements…);
apparitions publiques des souverains; préjugés discriminatoire;
Perpétuation dans les royaumes côtiers, chefferies des
Grassfields, le Sultanat Bamoun, les lamidats du Nord-
Cameroun (Tibati, Tignère, Banyo, Ngaoundéré, Rey-Bouba,
Garoua, Demsa, Bibemi, Guider, Mayo-Oulo, Maroua,
Guidiguis, Mora, Mokolo, Yagoua, Kousseri, Pouss, Makari,
Logone-Birni…);
Descendants d’esclaves non-affranchis; incapacités attachés au
statut; citoyenneté incomplète;
Pas de reconnaissance officielle, « réalité encore visible qu’on
refuse de voir »; pas de loi de condamnation spécifique,
pouvant permettre le travail de mémoire.
ENJEUX MÉMORIELS LIÉS À L’ESCLAVAGE
Problématique au Cameroun où les vestiges et les témoins disparaissent
(silence, oubli, peu de musées); économie du souvenir (Programme ‘‘La Route
de l’esclave’’ de l’Unesco) ?
Travail de collecte et de sauvegarde, élaboration du discours scientifique,
appropriation mémorielle et culturelle indispensable;
Dimension pédagogique (grand public, cibles spécifiques…); construction
d’une mémoire historique de la traite; narration d’une mémoire historique
dramatique; histoire et actualité des sociétés africaines; être de l’Africain;
rapport aux autres;
Signification, mémoire de qui? Pour qui ? Pourquoi ? Critères d’émergence:
Mémoriaux: lieu de mémoire ? lieu où est la mémoire ?
Spatialité des mémoires: dimension spatiale, inscription dans l’espace;
Temporalité : construction de la mémoire;
Sites, lieux sacrés, monuments, musée etc.
Les ruines de Bimbia (Limbe), port négrier
Plage d’embarquement, trompette d’appel du Chef Toko
et bascule anglaise (Grand Batanga/ Kribi)
Berges du Wouri (site de traite le plus important),
La pagode: Palais de King Akwa à Douala
Palais du Sultan Bamoun, vues Chefferie Bamileke
Cortège du Lamido de Ngaoundéré,
colonne de femmes esclaves sortant du Palais chercher du sable (1955)
Entrée principale du Palais du Lamido de Ray-Bouba
(colonne de femmes esclaves à moitié nues)
Cortège du Lamido de Ray:
palanquin et tambours royaux
portés par les esclaves
Cavalerie cuirassée
de Ray-Bouba
Lamido Iyawa Adamou
(Banyo), 1942-1966
Des efforts récents de mise en tourisme,
une institution muséale en construction
THANK YOU
SO MUCH