Vous êtes sur la page 1sur 31

4 séance du cours

ème

éthique et politique
Le déontologisme d’Emmanuel Kant et les impératifs
catégoriques.
1. Les deux principaux courants éthiques
◦ Le déontologisme
◦ Le conséquentialisme
2. Emmanuel Kant
◦ Éléments de biographie
3. Qu’est-ce que les lumières?
• Sapere aude!
4. La pensée rationaliste
• Parenté avec Descartes
• La révolution copernicienne
• Noumènes et phénomènes
• Caractère universel de la morale
5. La liberté et la morale
6. Qu’est-ce qu’une action morale pour Kant
7. Bonne volonté et devoir
• L’action accomplie par devoir et l’action accomplie conformément au devoir
8. Les impératifs catégoriques et les trois forme du principe d’universalisation.
9. Lectures pour la prochaine séance.

Plan de séance
Un des deux principaux courants en éthique réfère aux normes
morales :

L'Éthique déontologique ou déontologisme (dérivé du mot grec


deontos signifiant « obligation » ou « devoir ») est la théorie éthique
qui affirme que chaque action humaine doit être jugée selon sa
conformité (ou sa non-conformité) à certains devoirs.
Les théories morales se réclamant de cette approche estiment
que certaines actions sont toujours condamnables ou requises
quelles qu’en puissent être les conséquences.
L’éthique proposée par Emmanuel Kant est de cet ordre .
 

1. Déontologisme
L’autre courant important de l’éthique réfère aux
valeurs.

L’éthique téléologique (qui vient du grec telos, but,


visée) qui affirme que les actions humaines sont à
juger uniquement en fonction de leurs conséquences
dans l’atteinte d’un but donné. Le conséquentalisme de
John Stuart Mill et de Peter Singer est une éthique
téléologique. Le but à atteindre est le plus grand
bonheur(et le moins de souffrance) pour le plus grand
nombre.

1. Le conséquentialisme
2. Emmanuel Kant (1724-1804)
Est né et a vécu toute sa vie à
Königsberg, en Prusse-Orientale
(aujourd’hui Kaliningrad en Russie) ;
Professeur de philosophie et
d’anthropologie à l’Université Albertus ;
Bien qu’il ne voyage pas, il se tient
informé de l’évolution du monde en
recevant des voyageurs (Königsberg est
un port important) ;

2. Emmanuel Kant (1724-1804)


A une vie on ne peut plus routinière. Les
ménagères se fiaient sur sa marche
matinale pour ajuster leurs horloges ;
Deux évènements brisèrent cette
routine :
1. La lecture de L’Émile de Jean-Jacques
Rousseau ;
2. L’annonce de la prise de la Bastille qui
marqua le coup de la révolution française.

2. Emmanuel Kant (1724-1804)


Enguise d’épitaphe, il fit graver cette
maxime sur sa pierre tombale :

"deux choses ne cessent de remplir


mon cœur d'admiration et de respect,
plus ma pensée s'y attache et s'y
applique : le ciel étoilé au-dessus de
ma tête et la loi morale en moi".

2. Emmanuel Kant (1724-1804)


« Les «Lumières» se définissent comme la sortie de l'homme hors de l'état de tutelle
dont il est lui-même responsable. L'état de tutelle est l'incapacité de se servir de son
entendement sans être dirigé par un autre. Elle est due à notre propre faute lorsqu'elle
résulte non pas d'une insuffisance de l'entendement, mais d'un manque de résolution
et de courage pour s'en servir sans être dirigé par un autre. Sapere aude! Aie le
courage de te servir de ton propre entendement! Telle est la devise des Lumières.
Paresse et lâcheté sont les causes qui expliquent qu'un si grand nombre d'hommes,
alors que la nature les a affranchis depuis longtemps de toute tutelle étrangère restent
cependant volontiers, leur vie durant, mineurs; et qu'il soit si facile à d'autres de les
diriger. Il est si commode d'être mineur. Si j'ai un livre pour me tenir lieu
d'entendement, un directeur pour ma conscience, un médecin pour mon régime... je
n'ai pas besoin de me fatiguer moi-même. Je n'ai pas besoin de penser, pourvu que je
puisse payer; d'autres se chargeront à ma place de ce travail fastidieux. Et si la plupart
des hommes (et parmi eux le sexe faible en entier) finit par considérer comme
dangereux le pas - en soi pénible - qui conduit à la majorité, c'est que s'emploient à
une telle conception leurs bienveillants tuteurs, ceux-là mêmes qui se chargent de les
surveiller. Après avoir rendu stupide le bétail domestique et soigneusement pris garde
que ces paisibles créatures ne puissent faire un pas hors du parc où ils les ont
enfermés, ils leur montrent ensuite le danger qu'il y aurait à marcher seuls. Or le
danger n'est sans doute pas si grand, car après quelques chutes ils finiraient bien par
apprendre à marcher, mais de tels accidents rendent timorés et font généralement
reculer devant toute nouvelle tentative

3. Qu’est-ce que les lumières?


Il est donc difficile pour l'individu de s'arracher tout seul à la tutelle,
devenue pour lui presque un état naturel. Il y a même pris goût, et il se
montre incapable, pour le moment, de se servir de son propre
entendement, parce qu'on ne l'a jamais laissé s'y essayer. Préceptes et
formules - ces instruments mécaniques d'un usage ou, plutôt, d'un
mauvais usage raisonnable de ses dons naturels - sont les entraves qui
perpétuent la minorité. Celui qui s'en débarrasserait ne franchirait
pourtant le fossé le plus étroit qu'avec maladresse, puisqu'il n'aurait pas
l'habitude d'une pareille liberté de mouvement. Aussi n'y a-t-il que peu
d'hommes pour avoir réussi à se dégager de leur tutelle en exerçant
eux-mêmes leur esprit, et à avancer tout de même d'un pas assuré.

En revanche, la possibilité qu'un public s'éclaire lui-même est plus réelle;


cela est même à peu près inévitable, pourvu qu'on lui en laisse la
liberté. » (Qu’est-ce que les lumières, Kant ; Recueil de textes p.23-24)

3. Qu’est-ce que les lumières?


La devise des Lumières :
◦ Sapere aude !
 « Aie le courage de te servir de ton propre
entendement! »

◦ Le projet des Lumières étaient de sortir les êtres


humains et les peuples de leur minorité (état de
tutelle dans lequel ils sont assujettis à la pensée
d’autrui) et leur permettre d’atteindre la majorité
(l’autonomie de la pensée).

3. Qu’est-ce que les lumières?


Les philosophies de Descartes et de Kant
sont rationalistes.

Rationalisme (définition) :
◦ théorie philosophique qui pose la raison
comme un moyen de connaissance sûr et
indépendant de l’expérience sensible (Platon,
Démocrite, Descartes,Kant).

4. Parenté Descartes/Kant
Autant Kant que Descartes considèrent que le sens commun
suffit pour atteindre la connaissance en générale, et la morale en
particulier.

Descartes débute son célèbre Discours de la méthode (1637) par


une phrase mi-flatteuse (sophisme de l’appel à la popularité),
mi-provocatrice : « Le bon sens est la chose du monde la mieux
partagée : car chacun pense en être si bien pourvu que ceux
mêmes qui sont les plus difficiles à contenter en toute autre
chose, n’ont point coutume d’en désirer plus qu’ils en ont. En
quoi il n’est pas vraisemblable que tous se trompent. » (Discours
de la méthode, p.29) 
Ici le bon sens = raison, faculté de juger ce qui vrai et ce qui est
faux.

4. Parenté Descartes/Kant
• Dans le cas de la morale, Kant s’inscrit en faux
par rapport à la tradition grecque dans laquelle
le jugement moral est associé soit à la vertu
(développement de disposition à bien agir,
comme chez Aristote), soit à la connaissance
(connaissance de l’idée du Bien chez Platon).
 Pour Kant, le sens commun est suffisant pour
découvrir les lois de la morale. Cela n’est pas
la chasse-gardée d’une élite restreinte.

4. Parenté Descartes/Kant
Dualisme corps/esprit Descartes et Kant
Corps Esprit
Substance étendue Substance pensante
Véritable identité de l’être
humain
Lieu de l’hétéronomie Lieu de l’autonomie (du
(déterminisme physique) libre arbitre)

Hétéro = autre, étranger Auto = soi-même


Nomos = lois, règles Nomos = lois, règles

Les règles viennent de Nous fixons nos propres


l’extérieur. règles.

4. Parenté Descartes/Kant
Tout comme Copernic a changé notre
vision du cosmos, Kant opère un
changement radical quant à notre vision
du monde.

Chez Kant, le sujet (le « je  », l’individu)


devient au centre de la connaissance, tout
comme le soleil devient le centre de
l’Univers.

4. Révolution copernicienne selon


Kant
4. Révolution copernicienne selon
Kant
Noumène :
◦ la chose en soi (nous n’y avons pas accès)

Phénomène :
◦ la chose telle que reçue par la médiation de mon esprit.

Nous n’avons accès qu’aux phénomènes puisque


toutes nos connaissances sont médiatisées (ou
filtrées) par l’espace, le temps, la causalité…
◦ Cela n’implique pas que nos connaissances
scientifiques et éthiques ne sont pas universelles.

4. Révolution copernicienne selon


Kant
Pour Kant la morale est universel :
◦ Il s’agit de devoirs qui s’appliquent à tous les êtres humains, peu
importe le contexte social dans lequel les êtres humains évoluent ;

◦ Un devoir implique un pouvoir. Il n’existe pas de devoir lorsque nous


n’avons pas la possibilité de nous y conformer.
 Ex : personne n’a le devoir d’instaurer la paix dans le monde.
 Chaque être humain est doté de bon sens selon Kant. Ce bon sens nous
permet d’identifier nos devoirs moraux. C’est grâce à ce bon sens que
nous pouvons agir moralement, donc que nous devons agir moralement.

Pour Kant la morale est objective :


◦ Les devoirs moraux restent inchangés. Ils ne varient pas en fonction
de circonstances particulières.

4. Universalité et objectivité de la
morale chez Kant
« Ce point de départ ne peut être la liberté, car nous ne
pouvons ni en prendre immédiatement conscience, puisque le
concept premier en est négatif, ni la conclure de l’expérience,
puisque l’expérience ne nous fait jamais connaître que la loi des
phénomènes, donc le mécanisme de la nature, qui est
précisément le contraire de la liberté. Ainsi, c’est la loi
morale dont nous prenons immédiatement conscience (dès que
nous ébauchons pour nous-mêmes des maximes de la volonté),
qui s’offre à nous d’abord et nous mène droit au concept de
liberté, la raison nous le présentant, en effet, comme un
principe déterminant sur lequel ne doit prédominer aucune
condition sensible, et qui même est tout à fait indépendant de
ces conditions. » (Critique de la raison pratique, Kant; Recueil
de textes p.22)

5. La liberté et la morale
« À supposer que quelqu’un prétende ne
pouvoir résister à sa passion luxurieuse
quand l’objet aimé et l’occasion se
présentent à lui, on demande si, un gibet se
trouvant dressé devant la maison où cette
occasion s’offre à lui pour l’y pendre aussitôt
sa passion satisfaite, il lui serait dans ce cas
impossible de dompter son inclination. On
n’aura pas à chercher longtemps ce qu’il
répondrait ».

5. La liberté et la morale
« Mais demandez-lui si, son prince lui intimant, sous
menace de la même mort immédiate, de porter un faux
témoignage contre un homme honnête qu’il voudrait
perdre sous de spécieux prétextes, il tiendrait dans ce cas
pour possible, quelque grand que puisse être son amour
de la vie, de le vaincre malgré tout ? Il n’osera peut-être
assurer s’il le ferait ou non, mais il devra concéder sans
hésitation que cela lui est possible. Il juge donc qu’il peut
quelque chose parce qu’il a conscience qu’il le doit, et il
reconnaît en lui la liberté qui, sans la loi morale, lui serait
restée inconnue ».(Critique de la raison pratique, Kant;
Recueil de textes p.22)

5. La liberté et la morale
La Raison permet de découvrir la loi
morale (ce que Kant appellera nos devoirs
moraux). Seuls les êtres rationnels ont
des devoirs moraux car eux-seuls peuvent
découvrir la loi morale.
La conscience de la loi morale nous
prouve l’existence de la liberté.

Raison Loi morale Liberté

5. La liberté et la morale
Laraison permet de découvrir les devoirs
moraux.

La liberté permet d’être autonome, c’est-


à-dire de nous fixer nos propres lois. Or,
la seule attitude morale est d’accepter
librement de nous conformer aux devoirs
moraux découverts par la raison.

5. Le libre arbitre et la morale


Une action est morale :

1. Lorsque le devoir moral dont découle l’action est


universalisable.
• Le devoir doit être conforme aux trois formes du principe
d’universalisation.
2. Lorsqu’elle issue d’une bonne volonté (une intention
véritable de suivre les devoirs moraux). Lorsqu’elle est
accomplie par devoir (et non conformément au devoir)
• Il est souvent difficile de trancher lorsqu’il s’agit de l’action d’autrui.
Pour soi-même, il faut se poser la question : fais-je cette action par
devoir ou pour répondre à d’autres fins?
3. Lorsque le devoir moral dont découle l’action respecte le
principe de l’autonomie de la personne.

6.Qu’est-ce qu’une action morale


pour Kant?
Une action est morale si et seulement si
elle est motivée par la bonne volonté,
c’est-à-dire l’intention véritable de
suivre les devoirs moraux
indépendamment des conséquences.

7. Bonne volonté et devoir moral


« De tout ce qu'il est possible de
concevoir dans le monde, et même en
général hors du monde, il n'est rien qui
puisse sans restriction être tenu pour bon,
si ce n'est seulement une bonne
volonté. » (Fondements de la
métaphysique des mœurs, Kant. Recueil
de textes p. 11)

7. Bonne volonté et devoir moral


« … sans les principes d’une bonne volonté elles peuvent devenir
extrêmement mauvaises; le sang-froid d’un scélérat ne le rend pas
seulement beaucoup plus dangereux, il le rend aussi immédiatement à
nos yeux plus détestable encore que nous ne l’eussions jugé sans cela.

 Ce qui fait que la bonne volonté est telle, ce ne sont pas ses œuvres
ou ses succès, ce n’est pas son aptitude à atteindre tel ou tel but
proposé, c’est seulement le vouloir ; c’est-à-dire que c’est en soi qu’elle
est bonne; et, considérée en elle-même, elle doit sans comparaison
être estimée bien supérieure à tout ce qui pourrait être accompli par
elle uniquement en faveur de quelque inclination et même, si l’on veut,
de la somme de toutes les inclinations (…) L’utilité ou l’inutilité ne peut
en rien accroître ou diminuer cette valeur » (Fondements de la
métaphysique des mœurs, Kant. Recueil de textes p. 12)

7. Bonne volonté et devoir moral


Une action est morale si elle est accomplie par
devoir, c’est-à-dire par l’expression de notre
liberté qui décide de suivre la loi morale, dans
une intention désintéressée.

Une action accomplie conformément au devoir


n’est pas morale, parce qu’elle ne vise pas le
devoir en soi. Ici, une action est posée par
intérêt (pour ses conséquences) ou par
inclination (parce que nous avons le désir).

7. L’action accomplie par devoir et l’action accomplie


conformément au devoir
«  Par exemple, il est sans doute conforme au devoir que le débitant
n'aille pas surfaire le client inexpérimenté, et même c'est ce que ne
fait jamais dans tout grand commerce le marchand avisé; il établit au
contraire un prix fixe, le même pour tout le monde, si bien qu'un
enfant achète chez lui à tout aussi bon compte que n'importe qui. On
est donc loyalement servi; mais ce n'est pas à beaucoup près
suffisant pour qu'on en retire cette conviction que le marchand s'est
ainsi conduit par devoir et par des principes de probité; son intérêt
l'exigeait, et l'on ne peut pas supposer ici qu'il dût avoir encore par
surcroît pour ses clients une inclination immédiate de façon à ne
faire, par affection pour eux en quelque sorte, de prix plus
avantageux à l'un qu'à l'autre. Voilà donc une action qui était
accomplie, non par devoir, ni par inclination immédiate, mais
seulement dans une intention intéressée. » (Fondements de la
métaphysique des mœurs, Kant. Recueil de textes p. 15)

7. L’action accomplie par devoir et l’action accomplie


conformément au devoir

Vous aimerez peut-être aussi