Les barrages
A. ROLES D'UN BARRAGE
Les barrages sont construits pour arrêter les eaux d'un oued en vue de les emmagasiner (stocker) ou de les dériver vers
une autre utilisation bénéfique à l'homme.
Parmi les objectifs d'un barrage on peut citer :
O le stockage de l'eau pour l'alimentation en eau potable,
O le stockage de l'eau pour l'irrigation des terres et la production agricole,
O la lutte contre les crues qui peuvent causer des dégâts considérables (humains et
matériels), O la production de l'énergie hydroélectrique,
O la pisciculture,
O La navigation,
O la plaisance et le tourisme,
O La création de zones humides en vue de la préservation de l'environnement.
Cependant, les investissements pour un barrage sont tellement élevés que l'on préfère dans la plupart des cas réaliser
un barrage à buts multiples.
Lors de l'étude du barrage, il y a lieu d'étudier son impact sur l'environnement:
o rétention des limons fertiles suite au dépôt de sédiments dans la cuvette du barrage,
o prolifération d'algues et de mauvaises herbes qui consomment l'oxygène de l'eau et réduisent ainsi sa qualité,
o inondation de terres fertiles,
o inondation des habitations, parfois des quartiers entiers qu'il faut compenser équitablement (ce n'est pas
facile),
o inondation de cimetières comme dans le cas du barrage de Bou Roumi, wilaya de Ain Defla,
o inondation de sites archéologiques comme dans le cas du barrage d'Assouan en Egypte.
(en
terre homogène avec noyau en argile)
Barrage Keddara (Wilaya de Boumerdes)(en terre zonée avec noyau en argile)
Barrage Taksebt (Wilaya de Tizi Ouzou) (en terre zonée avec noyau en argile)
Barrage Deurdeur (Wilaya Ain Defla) (en terre zonée avec noyau en argile)
de Boukourdane (Wilaya de Tipaza)(en terre zonée avec noyau en argile)
Barrage Sidi M'hamed Ben Taïba (Wilaya Ain Defla)(terre zonée avec noyau en argile)
b- Les barrages en enrochement utilisent des enrochements de toutes tailles pour assurer la
stabilité et une membrane imperméable pour garantir l’imperméabilité. La membrane, placée sur la pente amont, peut être une
couche de sol imperméable, une couche de béton bitumineux, des plaques en acier, ou tout autre matériau imperméable. La
membrane peut aussi être un noyau central constitué d’argile imperméable. Les barrages en enrochement nécessitent des
fondations qui ne sont pas assujetties à d’importants tassements qui risqueraient de rompre la membrane imperméable. D’où
les seules fondations viables sont celle constituées de barres rocheuses, de sable ou de graviers compactés.
Les barrages en enrochement comme les barrages en terre nécessitent des évacuateurs de crue ayant une capacité
suffisante pour éviter la submersion de la digue ce qui entraînerait des dégâts importants et graves et souvent la rupture de la
digue et c’est la catastrophe.
Barrage Foum El Keis (Khenchela) (enrochement avec masque en béton armé)
Barrage El Agrem (Wilaya de Jijel) (enrochement avec masque amont en béton armé)
c- Les barrages en béton sont construits sur des sites très étroits en U ou en V constitués de roches
rigides non sujettes à des déformations ou des tassements et pouvant supporter des charges importantes. On peut distinguer
trois types de barrages en béton.
- Barrage-poids : massifs, ces barrages de section transversale triangulaire, résistent à la poussée de l’eau par
leur poids. Ils conviennent très bien à une disposition de l’évacuateur de crue sur la digue. Son poids doit être
suffisamment grand pour qu’il ne glisse pas et ne bascule pas sous l’effet de la poussée de l’eau. Il est soumis
à deux types de forces :
La force de la poussée de l’eau qui est horizontale,
Et la force du poids du barrage qui est verticale et maintient le barrage en place.
Barrage poids
Barrage de Béni Haroun (Mila) (poids)
Barrage à contreforts
- Barrages-voûtes : leur forme leur permet de résister à la poussée de l’eau qu’ils reportent sur les rives et les
fondations. Ils sont constitués d’une voûte, parfois très mince, à simple ou double courbure. Le barrage voûte
nécessite moins de béton qu’un barrage poids. Sa stabilité est assurée par sa forme et non sa masse. Les
barrages voûtes sont construits surtout dans des vallées étroites.
²
Les barrages en béton sont rigides et ne supportent donc pas les déformations générées par des tassements
différentiels de la fondation, des failles ou des séismes.
2. Le volume utile : Le volume utile est le résultat d’une étude de régularisation. La régularisation comme son
nom l’indique permet de rendre régulier le débit d’un oued qui, à l’origine, est irrégulier. Ainsi le débit de l’oued devient
adapté aux besoins. La régularisation a pour but d’aplanir les pics et les creux d’un hydrogramme de manière à obtenir un plus
grand bénéfice de l’utilisation de ses ressources en eau. L’eau est stockée pendant les périodes où le débit est excédentaire
pour le restituer pendant les périodes où le débit est plus faible que les besoins.
Le volume utile est le volume nécessaire pour réguler les débits, c’est à dire pour stocker les excédents et
satisfaire au mieux les besoins avec une défaillance acceptable. Ce volume dépend de la capacité du barrage, de la régularité
des apports et de la régularité des besoins.
Pour avoir une idée plus claire du concept de la régularisation, prenons le cas de l’approvisionnement en eau d’un
domicile à Alger, dans un quartier où les coupures d’eau sont fréquentes.
On considère les cas suivants :
α) – Les besoins domestiques sont réguliers et à peu près constants : un douche tous les deux jours, la cuisine
tous les jours, une lessive tous les trois jours, etc. On peut, à titre d’exemple, considérer trois possibilités :
α) – 1 : L’approvisionnement en eau est régulier, c'est-à-dire qu’il n’y a pas de coupure d’eau et que chaque fois
qu’un besoins s’exprime, il est satisfait. Dans ce cas, nous n’avons pas besoin de Jerrycans pour stocker l’eau, nous n’avons
pas besoins de régulariser le débit car il est déjà régulier (adapté aux besoins) et donc le volume de stockage est nul, c'est-à-dire
que le volume utile est nul : Vu1 = 0.
α) – 2 : L’approvisionnement en eau est irrégulier, il y des coupures d’eau, l’eau est fournie un jour sur deux par
exemple. Dans ce cas il faut stocker l’eau dans une citerne ou un autre récipient dont la capacité ou volume utile V u2 doit nous
permettre de satisfaire les besoins en eau avec une certaine garantie. Vu2 > Vu1 > 0.
α) – 3 : Les coupures d’eau sont très irrégulières, dans ce cas, nous devons augmenter notre volume utile pour
accroître le degré de garantie que la demande en eau sera satisfaite.
Alors on aura : Vu3 > Vu2 > Vu1 > 0.
β – Supposons maintenant que les besoins sont eux aussi irréguliers. Cette irrégularité additionnelle va exiger un
volume de stockage ou volume utile encore plus grand.
Donc la régularisation est une opération d’optimisation du volume utile : il ne doit pas être trop grand auquel cas
le barrage sera surdimensionné et il y aurait gaspillage d’argent, il ne doit pas être non plus trop petit auquel cas il y aurait
gaspillage de ressource en eau. Cette optimisation s’opère en fonction de plusieurs variables qui sont :
- les apports, -
la demande,
- les pertes (évaporation et infiltration), -
la pluie sur le réservoir,
- et la configuration géométrique du réservoir.
Les apports futurs sont une variable aléatoire que l’on peut estimer d’une manière ou d’une autre grâce à une
étude hydrologique. On peut utiliser les débits historiques et adopter l’hypothèse que les débits passés se reproduiront dans le
futur (ce qui n’est absolument pas vrai). On peut aussi créer des débits artificiels grâce à des méthodes statistiques.
La demande est aussi une variable aléatoire qui va se manifester dans le futur, on ne la connaît pas et l’on sera
obligé de procéder par estimation. On estime la demande en eau à un certain horizon dans le futur. Cette demande peut
concerner l’eau potable, l’agriculture ou l’industrie, les trois ensembles ou tout autre besoin.
Cette demande doit être satisfaite avec une certaine avec une certaine garantie. La population ne peut pas endurer
de pénurie d’eau au delà d’une certaine limite : un jour sur 20 ou un jour sur 50 ou pas du tout.
Un périmètre irrigué, en fonction de la spéculation qui y est développée, ne peut pas aller au delà d’un certain
degré de défaillance, sinon les pertes économiques deviennent inacceptables. Un verger d’arbres fruitiers ne peut pas accepter
une défaillance d’une année sur dix ; la limite serait une année sur 20.
On peut encore pousser le raisonnement plus loin et dire que le consommateur peut accepter de recevoir une
portion de son quota avec une défaillance moindre qu’on peut fixer à l’avance.
Les pertes que sont l’infiltration et l’évaporation ainsi que les pluies sont soit mesurées soit estimées.
La configuration géométrique de la retenue est décrite par deux courbes que sont la courbe Hauteur Capacité et la
courbe Hauteur Surface. Elles sont en général combinées dans un seul graphe appelé Courbe Hauteur-Surface-Capacité
(Courbe HSC). Ces courbes sont tirées à partir du plan topographique de la cuvette dont un exemple est dessiné ci-dessous.
A l’aide d’un planimètre on mesure les surfaces planes S 1, S2, S3, S4 de chaque ligne de niveau et l’on porte sur
un graphe en abscisses les surfaces et en ordonnées les hauteurs ou altitudes correspondantes, et ainsi l’on obtient la courbe
Hauteur-Surface.
Figure III – 2 : Plan topographique de la cuvette d’un barrage
Ensuite, pour tracer la courbe Hauteur-Volume, on commence par calculer les volumes partiels DVi compris
entre les lignes de niveau Hi-1 et Hi , il est donné par l’expression suivante :
DV = (Si-1 + Si ) ´ (H - H i-1 )
i
i
2
où Si = surface par la ligne de niveau Hi.
Le volume initial V1 compris entre le fond de l’oued et la ligne de niveau H1 est considéré comme étant égal à
V = 2´S ´H .
1
1 1
3
Le volume V2 compris sous la ligne de niveau H2 est égal à V2 = V1 + DV2
Le volume Vi compris sous la ligne de niveau Hi est égal à Vi = V + DVi
i-1
Le volume Vn compris sous la ligne de niveau Hn , qui est la hauteur du barrage, est égal à Vn = Vn-1 + DVn ; il
correspond à la capacité totale du barrage. La courbe Hauteur-Volume est obtenue en portant en abscisses les volumes et en
ordonnées les hauteurs.
3. Le volume forcé pour le laminage des crues : Le volume forcé est la portion du volume du barrage
réservée au stockage temporaire d’une partie des eaux des crues. La submersion d’un barrage lors du passage d’une forte crue
est très dangereuse pour le barrage, particulièrement s’il est en terre. Cette submersion peut entraîne la rupture du barrage avec
toutes les conséquences catastrophiques en aval. La submersion se produit lorsque le dispositif d’évacuation des eaux
excédentaires n’est pas suffisant.
Le laminage d’une crue permet de diminuer son débit de pointe de sorte que les débits maxima sortant puissent
passer sans difficulté par l’évacuateur de crues sans débordement par-dessus la digue, qui en général n’est pas conçue à cet
effet.
Le débit maximum qui passe par l’évacuateur de crue est inférieur à celui de la pointe de la crue à l’entrée de la
retenue.
Le laminage d’une crue est fonction de la forme de l’hydrogramme de crue entrant dans le réservoir, de la
capacité d’évacuation du déversoir de crue et de la forme de la retenue.
L’étude de laminage de crue consiste à déterminer la côte maximale atteinte par le plan d’eau pendant la crue
pour des dimensions économiques du déversoir et de la digue afin d’aboutir à une sécurité optimale (pas de débordement par
dessus la digue).
4. La revanche : La revanche est une hauteur de sécurité en cas de montée accidentelle du plan d’eau au-
dessus du niveau des plus hautes eaux suite a plusieurs causes telles que une crue exceptionnelle, de grosses vagues générées
par des vents violent dans la cuvette, ou un tassement des fondation, etc. Afin d’éviter ce risque, une hauteur de sécurité est à
prévoir. La hauteur de la revanche peut atteindre 2 à 3 m.
1. Définition du risque
Une crue d’un cours d’eau est un débit suffisamment important qui déborde les rives naturelles ou artificielles en un ou
plusieurs points du parcours d’un cours d’eau. Une crue est aussi définie comme une augmentation brutale du débit d’un cours
d’eau. On dit aussi qu’un oued est en crue lorsque son débit dépasse le débit moyen annuel.
Les crues sont fonction de la taille du bassin versant et des phénomènes climatologiques qui ont été à la base de cet
écoulement exceptionnel qu’est la crue.
Lors d’une crue, les eaux envahissent les terres avoisinantes qui sont en général exploitées par l’homme : habitations,
industries, agriculture ou autres investissements permettant à l’homme de vivre et de s’épanouir.
Nous avons eu des cas de crues exceptionnelles à Bab El Oued en Novembre 2001 et à Ghardaïa en 2008. Les dégâts
causés se sont élevés à des centaines de vies humaines et des milliards de Dinars.
Afin d’éviter que les crues ne perturbent les activités de l’homme, il devient important qu’elles soient contrôlées de
façon à ce que les dégâts causées ne dépassent pas une certaine limite acceptable.
Cette limite doit être fixée, car une protection avec un risque zéro n’existe pas ou coûte très cher à la communauté.
La définition du risque est la suivante :
= Danger ´ Vulnérabilité
Risque
Gestion de la catastrophe
Le risque est défini comme l’ensemble des conséquences de l’évènement dangereux (crue dans notre cas) : pertes en
vies humaines, dégâts matériels et à l’environnement.
Le danger est défini comme le phénomène naturel (crue), la force externe qui cause les dégâts.
La vulnérabilité est définie comme la faiblesse ou la force (résistance) des éléments exposés au danger.
La gestion de la catastrophe est l’ensemble des mesures prises pour lutter contre le danger.
Le danger que ce soit un tremblement de terre, une inondation ou une sécheresse doit être évalué sur la base de données
historiques sur des catastrophes de même nature qui sont survenues dans le passé. On doit déterminer la nature, la gravité, lé
fréquence, l’étendue, l’heure, la durée et la période de retour. Les données sur l’évènement doivent être mesurées, les annuaires
consultés ainsi que les études antérieures. Les données doivent être analysées et le danger quantifié.
La vulnérabilité (faiblesse / résistance des éléments exposés au danger) de la région exposée au danger doit être
évaluée : population (densité, structure), habitat, infrastructures, monuments archéologiques etc. Une description détaillée doit
être réalisée afin de permettre d’établir une carte de vulnérabilité.
La gestion de la catastrophe consiste en des mesures diverses prises avant, pendant et après la catastrophe, comme par
exemple :
· La vigilance, l’éducation, la législation et la réglementation,
· La prévention et les mesures de réduction de la catastrophe,
· Prévision, alerte et préparation,
· Les capacités d’intervention,
· La participation des autorités et des associations.
Les mesures de réduction des conséquences de la catastrophe peuvent être classées en quatre groupes :
· Les mesures techniques : construction d’infrastructures (barrage, aménagement fluvial, reboisement, etc.),
· L’aménagement du territoire en différentes zones de différentes vulnérabilités,
· Les capacités de gestion et institutionnelles : capacités de construction, expertise, éducation, formation, etc.),
· Vulgarisation : prise de conscience de la population, information et participation).
c - Fonctionnement du barrage: Les barrages de stockage d'eau doivent fonctionner de manière à satisfaire
le plus de besoins possibles tout en respectant une certaine hiérarchie dans ces besoins: alimentation en eau potable, irrigation,
eau industrielle, contrôle de crues, pisciculture, récréation, sport, protection de l'environnement, production d'énergie
électrique, etc.
Une bonne connaissance de l'hydrologie de la région permettra :
- une gestion sécurisée en vue de permettre le laminage des crues et éviter une surverse par dessus la digue; ce qui
serait catastrophique dans le cas d'un barrage en terre ou en enrochement.
- d'optimiser le stockage de l'eau pour une future utilisation.
Une protection doit être menée contre les glissements de terrain sur les versants de la cuvette, ce qui éviterait une
diminution du volume du réservoir du barrage et une augmentation de son envasement. Une lutte contre la prolifération des
plantes aquatiques doit être menée pour éviter une eutrophisation des eaux du barrage.
F. BIBLIOGRAPHIE
- United States Department of the Interior, Bureau of reclamation, Design of small dams, a water resource publication,
Unites States Government printing office, Denver, Colorado, 1987.