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Construire des Ouvrages

d'Art en Béton

Durabilité du béton armé

M. Dierkens (DLL)

19-20 janvier 2011


Durabilité du béton armé

La définition et les spécifications des bétons sont fixées par le


prescripteur ; elles doivent entre autre prendre en compte :

 les agressions liées à la carbonatation et à la


pénétration des chlorures (en présence de sels),
 la prévention des désordres dus aux gonflements internes du
béton (alcali-réaction et réaction sulfatique interne),
 la durabilité des bétons durcis soumis au gel en présence ou
non de sels de déverglaçage.

Les caractéristiques induites sont à contrôler à l’exécution pour


assurer la durabilité de l’ouvrage.

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Durabilité du béton armé
Phénomène de carbonatation
 le CO2 présent dans l’air pénètre dans le béton par le réseau
poreux et les fissures et, en présence d’eau dans les pores,
abaisse le pH (initialement de 13) de la solution interstitielle du
béton à 9 par réaction avec la pâte de ciment hydratée et
notamment la portlandite :

Ca(OH)2 + CO2 → CaCO3 + H2O

 au fur et à mesure de la progression du front de


carbonatation, les armatures initialement protégées par une
couche d’oxyde de fer (liée à l’alcalinité de la solution
interstitielle) sont alors dépassivées et le phénomène de
corrosion s’initie. pH<9 pH>9

XC

Progression
carbonatation
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Durabilité du béton armé

Phénomène de carbonatation (suite)

 la carbonatation est maximale lorsque l’humidité


relative est modérée (cycle séchage/humidité).

 après environ 30 ans, la profondeur de carbonatation


dans un béton d’ouvrage peut varier de 1 à 30 mm suivant
la compacité du béton, la fissuration de peau et le milieu
environnant.

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Durabilité du béton armé
La corrosion induite par carbonatation est donc fonction de :
 l’exposition des parements au CO2 et à l’eau
→ liée au choix de la classe d’exposition XC

 la qualité du béton en place (compacité) et notamment en


parement avec l’absence de ségrégation, de bullage ou de
fissuration (retrait gêné, dessiccation)
→ liée à la qualité de formulation et d’exécution

 l’enrobage du premier lit d’armature


→ lié à la valeur spécifiée et à son respect lors de l’exécution

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Durabilité du béton armé
Phénomène de pénétration des chlorures
 en pénétrant dans le béton par diffusion, les chlorures
réagissent avec les hydrates (Ca(OH)2 notamment) de la
pâte de ciment, ce qui conduit à la dépassivation et à la
corrosion des armatures.
 la pénétration des chlorures est favorisée par des cycles
séchage/humidité également.
 distinction entre chlorures libres sous forme ionique dans
la solution interstitielle (extractibles à l’eau) et chlorures
totaux (extractibles à l’acide).
 seuls les chlorures libres (solubles dans l’eau) peuvent
diffuser et jouer un rôle actif dans le processus de
corrosion des armatures.

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Durabilité du béton armé

Phénomène de pénétration des chlorures (suite)

on définit un seuil critique [Cl-libres]critique = 0,4% par rapport à


la masse de ciment soit 0,04 à 0,1% par rapport à la
masse de béton.

 lorsque [Cl-libres] > [Cl-libres]critique au voisinage des armatures,


le phénomène de corrosion s’initie.

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Durabilité du béton armé
La corrosion induite par la pénétration des chlorures est donc
fonction de :
 la quantité initiale de chlorures dans le béton
→ liée au choix de la classe de chlorures du béton

 l’exposition des parements aux chlorures et à l’eau


→ liée au choix de la classe d’exposition XD ou XS,

 la qualité du béton en place (compacité), et notamment en


parement avec l’absence de ségrégation, de bullage ou de
fissuration (retrait gêné, dessiccation)
→ liée à la qualité de formulation et d’exécution

 l’enrobage du premier lit d’armature


→ lié à la valeur spécifiée et à son respect lors de l’exécution.
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Durabilité du béton armé

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Durabilité du béton armé

La corrosion
s’accompagne
généralement d’un
gonflement des
armatures qui génère
une fissuration
accrue et des
éclatements du béton
en parement, ce qui
accélère le processus
de dégradation.

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Durabilité du béton armé
Phénomène d’alcali-réaction
 réaction entre les granulats (silice réactive) et les alcalins
(granulats, ciment, eau, adjuvants) en présence d’humidité
 formation de gel
 propriété gonflante : détérioration interne du matériau et des
structures

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Durabilité du béton armé
La démarche préventive concernant l’alcali-réaction (RAG) est
définie dans les recommandations LCPC de juin 1994
(rappelées à l’article NA.5.2.3.4 de la norme NF EN 206-1).
→ choix du prescripteur

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Durabilité du béton armé

La démarche préventive concernant l’alcali-réaction se fait en 2


temps :
 détermination du niveau de prévention à atteindre parmi 3
niveaux (A,B ou C), le choix dépendant de :
 la catégorie de l’ouvrage définie par le maître d’ouvrage,
 la classe d’exposition du béton à l’environnement
climatique.
 orientation vers la (ou les) solution(s) possible(s) au regard
des précautions liées au niveau de prévention retenu.

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Durabilité du béton armé
Catégorie d’ouvrage RAG (ou de partie d’ouvrage)
I : - éléments non porteurs des bâtiments
- ouvrages provisoires ou facilement remplaçables
- produits préfabriqués non structurels
II : la plupart des bâtiments et des ouvrages de génie civil
III : ouvrages de génie civil où le risque est inadmissible :
centrale nucléaire, barrage, tunnel, pont ou viaduc
exceptionnel, monument ou bâtiment de prestige

Classe d’exposition RAG


1 : sec ou peu humide (Hr < 80%)
2 : Hr > 80% ou en contact avec l’eau, avec ou sans gel
3 : Hr > 80% avec gel et fondants
4 : marin
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Durabilité du béton armé
Détermination du niveau de prévention alcali-réaction
nécessaire (choix à spécifier par le prescripteur) :

Classe d’exposition
Catégorie d’ouvrage 1 2 3 4

I A A A A

II A B B B

III C C C C

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Durabilité du béton armé
Niveaux de prévention alcali-réaction :
 niveau A : pas de précaution particulière
 niveau B : précautions particulières
 granulats NR
 ou bilan des alcalins satisfaisant
 ou formulation avec références d’emplois
 ou formulation avec présence d’additions minérales
inhibitrices en proportion suffisante
 ou granulats PRP avec conditions particulières satisfaites
 ou essai de performance satisfaisant (NF P 18-454)
 niveau C : précautions exceptionnelles
 granulats NR, ou granulats PRP avec conditions
particulières satisfaites,
 ou essai de performance satisfaisant
(NF P 18-454 et FD P 18 456).
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Durabilité du béton armé
Bilan des alcalins satisfaisant si :
 CEM I, CEM II et CEM V :
bilan des alcalins contenus dans l’ensemble des constituants
du béton :
 Tmoy < 3,5 / (1+2Vc) kg/m3,
avec Vc = coefficient de variation de teneur en alcalins du
ciment (valeurs sur 12 mois)
 et Tmax < 3,5 kg/m3,
Rq : en l’absence de données statistiques (Vc), on retiendra :
Tmoy < 3,0 kg/m3 et Tmax < 3,3 kg/m3 .

 CEM III/A ou B : ciment avec plus de 60% de laitier et


teneur en alcalins du ciment < 1,1%,
 CEM III/C : ciment avec plus de 80% de laitier et teneur en
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alcalins du ciment < 2,0%.
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Durabilité du béton armé
Phénomène de réaction sulfatique interne
 réaction entre les ions sulfate de la solution interstitielle du
béton et les aluminates du ciment plusieurs mois voire
plusieurs années après la prise du ciment.
 formation différée d’ettringite.
 propriété gonflante :
détérioration interne
du matériau et des
structures.

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Durabilité du béton armé
Phénomène de réaction sulfatique interne (suite)
 principaux paramètres de la réaction :
 eau et humidité (réaction et processus de transfert),
 température et durée de maintien lors de la prise et du
durcissement (fonction de la géométrie de la pièce),
 teneur en sulfates et en aluminates du ciment,
 teneur en alcalins du béton (rôle sur la solubilité de l’ettringite).

 pièces critiques :
 pièces massives pour lesquelles la chaleur dégagée n’est que
très partiellement évacuée vers l’extérieur et conduit à une
élévation importante de la température du béton,
 pièces coulées en période estivale,
 pièces préfabriquées ayant subi un traitement thermique très
élevé (étuvage).

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Durabilité du béton armé
La démarche préventive concernant la réaction sulfatique
interne (RSI) est définie dans les recommandations LCPC
d’août 2007.

La norme NF EN 206-1 garantit


la durabilité de la structure
vis-à-vis des agressions
extérieures, donc de la RSE,
via le choix des classes
d’exposition mais pas de la RSI
→ spécification complémentaire
par le prescripteur.

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Durabilité du béton armé

La démarche préventive concernant la réaction sulfatique


interne se fait en 2 temps :
 détermination par partie d’ouvrage (notamment pour les
pièces critiques) du niveau de prévention à atteindre parmi 4
niveaux (As, Bs, Cs ou Ds), le choix du niveau étant fonction
de :
 la catégorie de l’ouvrage définie par le maître d’ouvrage,
 la classe d’exposition vis-à-vis de la RSI.
 orientation vers la (ou les) solution(s) possible(s) au regard
des précautions liées au niveau de prévention retenu.

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Durabilité du béton armé
Catégorie d’ouvrage RSI (ou de partie
d’ouvrage)
I: conséquences faibles ou acceptables : éléments non
porteurs des bâtiments, ouvrages provisoires ou facilement
remplaçables, produits préfabriqués non structurels
II : conséquences peu tolérables : éléments porteurs des
bâtiments et des ouvrages de génie civil, produits
préfabriqués structurels
III : conséquences inacceptables : centrale nucléaire, barrage,
tunnel, pont ou viaduc exceptionnel, monument ou bâtiment
de prestige, traverse de chemin de fer

Classe d’exposition RSI


XH1 : sec ou humidité modérée
XH2 : alternance d’humidité et de séchage, humidité élevée
XH3 : en contact durable avec l’eau
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Durabilité du béton armé
Détermination du niveau de prévention concernant la réaction
sulfatique interne nécessaire (choix à spécifier par le
prescripteur) :

classe
d’exposition
catégorie d’ouvrage
XH1 XH2 XH3

I As As As
risque faible ou acceptable

II As Bs Cs
risque peu tolérable

III As Cs Ds
risque inacceptable

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Durabilité du béton armé
Niveaux de prévention RSI :
 niveau As : Tmax < 85°C,
 niveau Bs : Tmax < 75°C
ou 85°C avec respect d’ 1 des 6 conditions suivantes :
 traitement thermique maîtrisé avec une durée de maintien de la
température du béton au delà de 75°C < 4 heures et avec alcalins du
béton < 3 kg/m3 ,
 ou pour les éléments préfabriqués, utilisation de ciment ES, avec alcalins
du béton < 3 kg/m3 pour CEM I et CEM II/A
 ou pour les bétons de pièces critiques coulés en place, utilisation de
ciment ES, excepté les ciments CEM I, CEM II/A-L et CEM II/A-LL
 ou utilisation de ciment non ES du type CEM II/B-V, CEM II/B-S, CEM
II/B-Q, CEM II/B-M (S-V), CEM III/A ou CEM V dont C3A < 8% et SO3 <
3%,
 ou utilisation de ciment CEM I dont C3A < 8% et SO3 < 3% avec au
moins 20% de cendres volantes, de laitiers de haut fourneau moulus ou
de pouzzolanes naturelles calcinées,
 ou essai de performance satisfaisant (méthode d’essai lpc n°66).
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Durabilité du béton armé

Niveaux de prévention RSI (suite) :


 niveau Cs : Tmax < 70°C
ou 80°C avec respect d’ 1 des 6 conditions
précédentes en remplaçant 75°C ← 70°C,
 niveau Ds : Tmax < 65°C de préférence
ou 75°C avec respect simultané des 2 conditions suivantes :
 pour les éléments préfabriqués, utilisation de ciment ES
avec avec alcalins du béton < 3 kg/m3 pour
CEM I et CEM II/A,
 pour les bétons de pièces critiques coulées en place,
utilisation d’un ciment ES excepté les ciments CEM I, CEM
II/A-L et CEM II/A-LL.
 validation de la formulation par un laboratoire expert.

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Durabilité du béton armé
Phénomène d’attaque gel-dégel avec ou sans sels
de déverglaçage

 présence d’eau non combinée dans le réseau de capillaires


du béton.
 gel de l’eau vers - 3 à - 4°C (gros capillaires).
 pression hydraulique sur l’eau des petits capillaires restée à
l’état liquide, du fait de l’augmentation de volume (9%) lors de
la transformation d’eau en glace.
+
 pression osmotique liée à la diffusion des sels de
déverglaçage dans le milieu interstitiel de la peau du béton.

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Durabilité du béton armé
Phénomène d’attaque gel-dégel avec ou sans sels
de déverglaçage (suite)
 lorsque les pressions hydrauliques et/ou osmotiques
deviennent supérieures à la résistance à la traction du béton,
celui-ci se fissure : fissuration dans la masse (feuilletage
parallèle aux faces) ou écaillage de surface.

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Durabilité du béton armé
Recommandations établies par le LCPC en décembre 2003
pour les ouvrages de génie civil (visées à l’article NA.5.3.1 de
la norme NF EN 206-1).

Ces recommandations
renforcent
les prescriptions de la
norme NF EN 206-1
(classe exposition XF)
→ spécification complémentaire
par le prescripteur.

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Durabilité du béton armé
Les recommandations sont liées à la classification de
l’environnement qui dépend de :
 la classe de gel
 le degré de saturation en eau du béton (humidité, surface
verticale/horizontale, exposition pluie)
 l’exposition au salage

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Durabilité du béton armé
Carte de gel (NA.4.1 NF EN 206-1 ; voir FD P 18 326)

sévère : plus de 10 jours par an avec


température < -10°C

faible : moins de 3 jours par an avec


température < -5°C :
(non concerné par les
recommandations)

modéré : entre faible et sévère

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Durabilité du béton armé
Carte de salage

Recommandations
LCPC Gel –
Guide SETRA
DOVH (itinéraires
structurants)

H1 : salage peu fréquent


H2 : salage fréquent
H3 et H4 : salage très fréquent

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Durabilité du béton armé
type de gel
 
choix du type de béton
modéré sévère

peu fréquent béton approprié béton G


(H1 ou n < 10 j) (XF1) (XF3)
fréquent béton approprié  béton G+S
  (H2 ou (XD3)
10 j ≤ n < 30 j)
(XF4)
type de + teneur en air ≥ 4%
 
salage pour les éléments très
exposés (XD3+XF2)

très fréquent béton G+S béton G+S


(H3+H4
ou n ≥ 30 j)
(XF4) (XF4)

grisé : recommandations LCPC pour la


durabilité des bétons durcis soumis au gel

autre : pas d’exigence complémentaire


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Durabilité du béton armé
Ces recommandations (G ou G+S) portent sur :
 prescription de moyens :
 caractéristiques des constituants,
 formulation du béton (Eeff/C et dosage en ciment pour
une bonne compacité, emploi d’un entraîneur d’air pour
créer un réseau de bulles d’air adapté pour les bétons de
classe de résistance < C50/60).
 prescription d’objectifs de résultat :
 caractéristiques de résistance mécanique,
 résistance au gel interne (facteur d’espacement si air
entraîné compris entre 4 et 8% ou essai de performance),
 résistance à l’écaillage.

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Durabilité du béton armé
Ce qui se traduit en étude ou convenance par :
caractéristiques béton G béton G+S

caractéristiques des granulats adaptées adaptées

type et classe du ciment CEM I ou CEM I ou


CEM II/A et B CEM II/A (S, D)
sauf CV PM ou ES
dosage minimal du ciment pour un béton armé ou 385 kg/m3 (*) 385 kg/m3 (*)
précontraint 0/20
emploi entraîneur d’air obligatoire pour obligatoire pour
béton < C50/60 béton < C50/60
rapport Eeff/C ≤ 0,50 ≤ 0,45
(C = ciment ou liant recomposé pour les bétons G)
Résistance caractéristique en compression (cylindre) ≥ 30 MPa ≥ 35 MPa

facteur d'espacement L (ASTM C 457) ≤ 250 µm ≤ 200 µm


avec air entraîné compris entre 4 et 8%
Ecaillage (XP P 18-420) sans objet ≤ 600 g/m²

allongement relatif (NF P18-424 et NF P18-425) ≤ 400 µm/m ≤ 400 µm/m

rapport des carrés des fréquences de résonance ≥ 75 ≥ 75


(P 18-414)

(*) : peut être abaissé à 350 (G) et 370 (G+S) si essai de performance
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Durabilité du béton armé
Cas des CEM III
(Application de l’approche performantielle : Recommandations provisoires LCPC)

caractéristiques Béton G
type de ciment CEM III/A ou B
résistance caractéristique en compression ≥ 30 MPa
(cylindre)
facteur d’espacement à déterminer
utilisé pour le suivi du chantier

allongement relatif ≤ 400 µm/m


(NF P18-424 et NF P18-425)

rapport des carrés des fréquences ≥ 75


de résonance (P 18-414)

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FIN

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