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S_04 (14 Février 2024)

PARTIE II : METHODES DE DIAGNOSTIC ET SOLUTIONS

Chapitre n°1 : TECHNIQUES DE DIAGNOSTIC DES PATHOLOGIES DU BATIMENT


(CAS DU BETON ARME)

I- DEMARCHE D’UNE ETUDE PATHOLOGIQUE :

Quand un désordre est constaté, plusieurs étapes sont à franchir afin de définir la nature et
l’origine de ce désordre. Ceci permet de choisir les moyens et les matériaux pour la
réparation et la réhabilitation du bâtiment.

1- Le diagnostic :

Les étapes à suivre en tout processus de diagnostic sont :

a- Le pré-diagnostic : qui consiste à faire une première évaluation de l’état du


bâtiment et de définir, lors de la première visite, les aspects du travail pour des
études pluridisciplinaires

b- Les études pluridisciplinaires : qui récoltent toutes les informations des tests et
analyses des désordres dans le bâtiment. Elles serviront de guide pour une future
intervention.

c- Le diagnostic : qui consiste à analyser les informations des études


pluridisciplinaires et déterminer les besoins d’intervention en réhabilitation ou
entretien. Ce programme définit les travaux de réparation et de consolidation des
structures existantes et d’amélioration de tous les éléments dégradés.

2- Le choix de la solution :

L’objectif consiste à éliminer les anomalies constructives accumulées au cours du temps ou


survenues suite à des causes accidentelles. Le choix de la solution dépend de la nature et de
l’ampleur du désordre. L’intervention peut être légère, moyenne ou lourde. Une
réhabilitation légère concerne les bâtiments dont la structure ne présente pas de faiblesse
particulière ; l’amélioration touche les enduits, la menuiserie… Une réhabilitation moyenne
peut être appliquée à des constructions qui nécessitent un renforcement de leurs structures
porteuses ou un changement de certains équipements (réfection de l’électricité, installation
des pièces d’eau ou d’ascenseur. Cependant, une réhabilitation lourde concerne les
bâtiments dont la structure est sérieusement endommagée ce qui nécessite une
intervention rapide.

3- Les moyens et les matériaux :

Le choix d’une solution suppose la possibilité de l’appliquer. Certaines techniques


demandent des applications et des formations spéciales. Les méthodes et les matériaux
choisis dépendent de plusieurs facteurs :
- Le type et l’âge de l’ouvrage
- Les conditions locales et environnementales
- La nature et le degré des dégradations

1
- Les délais mis à disposition pour l’achèvement des travaux de réhabilitation
- Le niveau de sécurité demandé
- Le coût de revient de la méthode

II- ETUDE DE CAS : LA CORROSION DE L’ARMATURE DES OUVRAGES EN BETON ARME :

1- Pathologie des ouvrages en béton armé :

Les pathologies du béton armé ont des causes et des conséquences variables. La dégradation
du béton armé comporte deux phases successives :

- Une phase d’incubation ou de latence ou d’amorçage qui correspond à l’altération


lente du béton, sans qu’il ne se produise encore des effets visibles. Cette phase
s’arrête soit lorsque les produits formés par les réactions internes du ciment
atteignent un volume critique provoquant un gonflement du béton, soit lorsque
l’enrobage du béton ne protège plus les aciers.
- Une phase de développement ou de croissance des dégradations du matériau. La
phase de développement est celle où les dégradations sont visibles. A ce stade les
réparations deviennent lourdes et coûteuses.

Les pathologies des structures en béton armé peuvent être d’origine mécanique, chimique
ou physique.
Défauts dans le béton armé

Mécaniques Chimiques Physiques

- Chocs -RAG (Réactions - Gel-dégel


- Surcharges Alcalis- - Actions
- Mouvements Granulats) thermiques
(tassement …) - Agents agressifs - Retrait
- Explosion (sulfates, sels, - Erosion
- vibrations… CO2 …)

Causes de dégradation du béton armé

La corrosion des armatures des ouvrages en béton armé est une dégradation chimique. Une
réaction chimique est un évènement au cours duquel il y a des transformations chimiques
qui peuvent être accélérées par l’augmentation de la température ou de la concentration.

2- Causes de la corrosion des armatures des ouvrages en béton armé :

La corrosion des armatures des ouvrages en béton armé peut avoir plusieurs origines
comme la carbonatation et la présence de chlorures.

2
a- La carbonatation :

La carbonatation est un phénomène chimique lié à


l’émission de gaz carbonique dans l’atmosphère. C’est une
pathologie du béton armé qui, avec le temps, atteint des
couches de plus en plus profondes et elle est responsable
de la mise à nu de l’armature en acier. Le dioxyde de
carbone CO2 présent dans l’atmosphère sous forme
gazeuse pénètre dans le béton à partir de la surface du
matériau et provoque une réaction dite de carbonatation
avec l’eau interstitielle.
La carbonatation est un phénomène qui progresse de
l’extérieur vers l’intérieur à travers la zone d’enrobage des Elément en BA carbonaté
armatures et consiste à la transformation de l’hydroxyde de
calcium Ca(OH)2 [chaux hydratée qui est une base] en carbonate CaCO3 :
Ca(OH)2 + CO2 CaCO3 + H2O

Cette réaction mène à la diminution du pH1, il s’en suit une corrosion rapide de toute la
surface de l’armature qui gonfle et fait éclater le béton d’enrobage. Ceci entraine des
problèmes de durabilité et de résistances sur les structures en béton armé.
Dans les zones fortement industrialisées, dans les parkings et aux abords des grands axes
routiers, la quantité du CO2 dans l’atmosphère est assez élevée.

Processus de carbonatation

b- L’Attaque des ouvrages en béton armé par les chlorures :

La pénétration des chlorures (ions Cl-) dans le béton armé qui est un milieu poreux se fait
en présence d’eau (béton immergé). Les chlorures dans le béton proviennent soit des
constituants de celui-ci (sable, granulats, adjuvants) soit de la contamination par le milieu
environnant.
L’attaque des ouvrages en béton armé par les chlorures mène à la corrosion des armatures.
Lorsque la teneur en chlorure atteint ou dépasse une valeur seuil, l’enrobage ne peut plus
protéger l’acier qui se couvre de dépôts de rouille ce qui fait gonfler le béton jusqu'à le faire
éclater. La corrosion des armatures mène à une augmentation du volume, elle mène
également à une perte de capacité portante due à la diminution de la section efficace.

1
pH : Mesure de l'état acido-basique d'une solution contenant des ions H+, définie par pH = − log10 [H+], où [H+] est
la concentration de la solution en ions H+.

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Ainsi, la pénétration des ions chlorure dans l’enrobage et la carbonatation du béton
d’enrobage sont les premiers responsables de la corrosion des armatures des ouvrages en
béton armé.

Corrosion des armatures

Processus de corrosion
des armatures

3- Diagnostic du béton armé dégradé par la corrosion :

La corrosion des armatures a souvent pour conséquences des symptômes visibles sur le
parement tels que des éclats, des épaufrures ou des tâches de rouille.
La forme des désordres, leur étendue ainsi que leur intensité dépendent de la position des
armatures (enrobage), de la qualité du béton d’enrobage (compacité et homogénéité) et de
l’environnement (nature de l’agent agressif : chlorures ou dioxyde de carbone ou autres).

Plusieurs méthodes peuvent être envisagées pour la réparation ou la réhabilitation des


structures en béton armé endommagées par la corrosion. Il s’agit d’abord d’identifier
l’origine des désordres pour choisir les méthodes adéquates.

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1- Le diagnostic :

a- Objectifs du diagnostic :

Le diagnostic de la corrosion a pour objectifs :


- L’identification de l’origine des désordres (carbonatation, chlorures…)
- L’évaluation de l’étendue dans l’espace
- La prédiction de l’évolution probable dans le temps et dans l’espace
- L’estimation des conséquences sur la sécurité de l’ouvrage et des personnes
- La définition des suites à donner (le principe des solutions de réparation)

b- Visite préliminaire :

La visite préliminaire a pour objet d’améliorer la compréhension de l’état et du


fonctionnement de l’élément à réparer. Cette visite permet la collecte des informations
nécessaires à la compréhension de l’ouvrage : historique, implantation, orientation, date de
construction, plans de coffrage et de ferraillage, environnement (nature chimique, vents
dominants), matériaux (ciment, agrégat, dosage) … Cette visite permet également un
examen de l’intégralité de la structure et le relevé de tous les symptômes avec prise de
photographies. Quelques tests peuvent être envisagés lors de cette visite, tels que
profondeur de carbonatation, présence de chlorure…

c- Investigations in-situ :

Elles comportent des mesures relatives aux armatures et des mesures relatives à la qualité
du béton ou à son vieillissement.

- Les mesures relatives aux armatures :

• Mesure de l'enrobage des armatures : La technique de mesure de l'enrobage fait


appel à de nombreux appareils disponibles sur le marché tel que le radar géophysique. Ces
appareils permettent d’accéder aux informations relatives à l’enrobage (profondeur), à
l’estimation du diamètre des armatures et à la reconnaissance du profil de l'acier.

L'objectif de ces mesures est de localiser géographiquement


les armatures faiblement enrobées, d'estimer les surfaces
concernées et d'apporter des éléments quantitatifs pour une
modélisation de l'évolution possible des phénomènes (en
relation avec la profondeur de carbonatation ou de
pénétration des chlorures).

Détection des armatures au radar

• Estimation des surfaces corrodées et évaluation des risques de corrosion : mesures


de potentiel : cette méthode, à caractère non destructif, permet une évaluation des risques
de dépassivation2 des armatures. Elle permet également la détection du phénomène, bien

2
La passivation des armatures se traduit par la présence d’un fil passif qui apparaît spontanément par oxydation et
qui va ralentir la vitesse de corrosion

5
avant qu'un désordre ne soit visible en surface et ainsi de mieux planifier les réparations
(mesures préventives).

• Estimation de la vitesse de corrosion : en effectuant des mesures périodiques, il est


possible de contrôler l'évolution du processus de corrosion, d'identifier les zones à forte
activité corrosive, et de prédire une durée de vie résiduelle (restante) pour la structure
considérée.

- Mesures relatives à la qualité du béton ou à son vieillissement

• Détermination de la profondeur de carbonatation : le test à la phénolphtaléine


constitue l’une des méthodes de détermination de la profondeur de carbonatation, il s’agit
d’une investigation destructive. Le principe du test à la carbonatation repose sur le fait que
le pH du béton carbonaté est plus faible que celui du béton sain. Pour déterminer la zone
carbonatée, il est utilisé un indicateur coloré. La couleur que prend la phénolphtaléine
dépend du pH. Elle sera rose pour un pH compris entre 8,2 et 12 et incolore au-delà et au-
deçà de cette zone de virage.

• Mesures de perméabilité (à l’air et perméabilité à l’eau) : Les propriétés physiques


du béton, dont sa perméabilité, influencent la durée de la période d’amorçage de la
corrosion. Une mesure de perméabilité à partir de la surface est particulièrement
intéressante.

d- Analyses et essais au laboratoire :

Les analyses et essais au laboratoire sont effectués sur


des échantillons prélevés, généralement, par
carottage dans des zones représentatives des états de
dégradation.
Ces tests permettent de définir les caractéristiques
chimiques du béton d’enrobage (teneur en chlorures,
sulfates…). Ces essais donnent des informations
précises sur les caractéristiques physiques du béton
d’enrobage, liées surtout, à leur résistance à la
pénétration (transfert) des fluides (porosité à l’eau,
perméabilité, absorption capillaire, résistances
Prélèvement par carottage
mécaniques…).

Comment mesurer la carbonatation ?

La technique la plus simple à mettre en œuvre pour mesurer la profondeur de carbonatation


des bétons correspond au test à la phénolphtaléine réalisé sur des fractures fraîches de
béton. La phénolphtaléine est un indicateur de pH coloré dont le virage si situe aux alentours
de 9. Cela permet de différencier la zone carbonatée (pH < 9) qui reste incolore, de la zone
non carbonatée (pH > 9 et allant jusqu'à 13) colorée en violet. Cet essai doit être effectué, à
l'échelle d'un ouvrage, sur un nombre de points de mesure représentatifs en tenant compte
des conditions locales d'exposition et de l'hétérogénéité possible du matériau. Ce test
permet une mesure fiable et rapide de la profondeur de carbonatation dans le cadre de
diagnostic d'ouvrages.

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