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Flammarion
Collection dirigée par Laurent Chollet
© Flammarion, 2013
ISBN : 978-2-0812-9360-1
Extrait de la publication
À la mémoire de Bernadette, Juju,
Jean et Jean-Claude.
La Nouvelle Vague
L’école du court-métrage
Le renouveau du cinéma français passe alors par le court-métrage qui est
diffusé en complément de programme. L’État aide les producteurs qui
financent ces essais généralement réalisés par des professionnels confirmés.
Cependant, Jacques Demy, Georges Franju, Pierre Kast, Chris Marker, Alain
Resnais et Jean Rouch se distinguent du lot par leur originalité. De leur côté,
Godard, Rohmer et Truffaut s’y essaient en dehors du système jusqu’à ce
que Pierre Braunberger leur donne leur chance. Bonjour, Monsieur La Bruyère
(Doniol-Valcroze), Tous les garçons s’appellent Patrick (Godard), Le Coup du
Berger (Rivette) et Les Mistons (Truffaut) sont autant de manifestes d’une
nouvelle manière de faire du cinéma. Puis la cristallisation s’opère avec des
auteurs indépendants (Jacques Rozier, Agnès Varda). Les anciens s’unissent
aux nouveaux. Un groupe hétérogène se forme autour d’une volonté de créa-
tion. Mais tous doivent passer au long-métrage pour transformer l’essai.
LA NOUVELLE VAGUE 11
Le raz-de-marée
Marais et Reflux
pas plus leur public que Les Carabiniers (Godard), La Dénonciation (Doniol-
Valcroze) ou Muriel (Resnais). Les acteurs découverts par la Nouvelle Vague
sont récupérés par le cinéma conventionnel (Jean-Paul Belmondo). Mais ces
films mal aimés triomphent dans les festivals internationaux et font naître
des vocations. Quelques disciples inspirés s’affirment : Jean Eustache, Phi-
lippe Garrel et Jean-Daniel Pollet. Cependant, la censure s’en prend au Petit
Soldat et à La Femme mariée (Godard) puis à La Religieuse (Rivette). C’est le
temps de la colère. Entre-temps, Jacques Demy gagne la palme d’or à Cannes
avec Les Parapluies de Cherbourg et Godard a tourné Pierrot le Fou. La Nou-
velle Vague renaît ainsi de ses cendres encore vives. Elle est déjà entrée dans
l’histoire du cinéma.
L’éclatement
Le groupe n’existe plus au milieu des années soixante. Ses membres
suivent des voies parallèles. Chacun bâtit son œuvre à sa façon. Les films de
Chabrol, Rohmer et Truffaut sont moins expérimentaux que ceux de Godard
et Rivette. Pourtant, la notion d’auteur est commune dans chaque trajectoire.
Puis l’histoire de la Ve République renoue les liens, à travers l’affaire Langlois,
quand l’état chasse cet homme de sa cinémathèque. Déjà la lutte contre
l’interdiction de La Religieuse avait refédéré toute la bande. Enfin, les États
généraux du cinéma en Mai 68 sont l’occasion de retrouver l’union des pion-
niers de la Nouvelle Vague. Ils reprendront ensuite leurs chemins séparés.
Leurs ciné-fils prendront la relève pour un temps : Jean-Claude Biette, Juliet
Berto, Jean Eustache, Philippe Garrel, André Téchiné et Paul Vecchiali.
Les filmographies n’indiquent que les films et téléfilms qui sont apparentés
directement ou indirectement à la Nouvelle Vague.
Extrait de la publication
A.
À BOUT DE SOUFFLE (1960) Maquillage : Phuong Maittret.
Film français. Affiche : Clément Hurel.
Durée : 89 minutes.
Dédié à la Monogram Pictures. Interdit aux moins de 18 ans à sa sortie :
Tournage du 17 août au 15 septembre 1959 16 mars 1960.
(Marseille, Paris). Prix Jean Vigo 1960.
Production : Les films Georges de Beaure- Prix de la meilleure mise en scène Ber-
gard, S.N.C. (René Pignères) Imperia. lin 1960.
Sujet : François Truffaut. Prix Méliès 1960.
Réalisation et scénario : Jean Luc Godard. Note : Godard pensa titrer le film Moi, un
Conseiller technique : Claude Chabrol. Blanc en hommage à Moi, un Noir de Jean
Assistant-réalisateur : Pierre Rissient. Sta- Rouch.
giaire : Marc Pierret. Remake : 1983 : Breathless (À bout de
Régie : Gaston Dona. souffle, Made in USA, Jim Mc Bride).
Photographe de plateau : Raymond Cauche- Novellisation : À bout de souffle (Claude
lier. Francolin, Seghers), roman-photo dans Le
Musique : Martial Solal, Wolfgang Amadeus Hérisson (1960), bande dessinée dans
Mozart (Concerto pour clarinette et France-Soir (1960).
orchestre K.622). Avec : Jean Seberg (Patricia Franchini), Jean-
Images 35 mm noir et blanc Ilford HPS 1 : Paul Belmondo (Michel Poiccard, alias Lazlo
1,33 : Cameflex. Kovacs), Daniel Boulanger (Inspecteur
Chef opérateur : Raoul Coutard. Assistant : Vital), Henri-Jacques Huet (Antonio Ber-
Claude Beausoleil. rutti), Roger Hanin (Carl Zubart), Van
Montage : Cécile Decugis, Lila Herman. Doude (l’ami de Patrica), Claude Mansard
Tournage sans le son. (le garagiste), Jean-Pierre Melville (le roman-
Postsynchronisation en postproduction : cier Parvulesco), Jean-Luc Godard (le
Jacques Maumont, Francis Cognany. dénonciateur), Jean Domarchi (l’homme
Script-girl : Suzanne Faye. dévalisé dans les toilettes), Liliane Dreyfus
16 À BOUT DE SOUFFLE
sous le nom de Liliane David (l’amie de projet existe en une dizaine de pages. Tout
Poiccard), Liliane Robin (Minouche), commence comme ça. Beauregard est
Richard Balducci (Tolmatchoff), René Ber- d’accord. JLG développe et transforme le
nard, Raymond Hunflet, André S. Labarthe, synopsis de Truffaut. Il déclare au produc-
François Moreuil, Jean-Louis Richard, teur et à ses amis que ce sera juste un petit
Jacques Siclier (journalistes à Orly), Philippe film noir dans l’esprit des séries B améri-
de Broca (journaliste), Gérard Brach (photo- caines, puis propose le débutant Jean-Paul
graphe de charme), Michel Fabre (policier), Belmondo pour le rôle principal. Beauregard
José Bénazéraf (l’homme à la voiture qui sera accepte, mais refuse de confier le person-
volée), Michel Mourlet (un spectateur de nage féminin à Anne Colette, la compagne
cinéma), Lila Herman (la secrétaire de Tol- de Godard qui a tourné entre autres dans
matchoff), Jean Herman (le soldat sur les deux de ses courts-métrages et aussi dans Le
Champs-Élysées), Jean Douchet (l’homme Bel Âge de Pierre Kast. Il veut une vedette.
qui frappe du pied l’accidenté de la circula- Godard se résigne et choisit Jean Seberg
tion), Jacques Rivette (l’accidenté de la cir- dont il a apprécié la beauté et le talent dans
culation), Jacques Lourcelles. les films d’Otto Preminger.
La comédienne américaine vient d’épou-
Sujet : Michel Poiccard vole une voiture à Mar-
ser l’avocat français François Moreuil, un
seille et remonte à Paris pour revoir l’Améri-
ami des Cahiers du cinéma. Le contrat est
caine Patricia qui vend le New York Herald
signé avec elle. JLG décide ensuite de
Tribune sur les Champs-Élysées. En chemin, il
presque tous les autres rôles et les moins
tue un motard de la police et laisse son porte-
importants sont souvent confiés à des cri-
feuille derrière lui. Aussitôt, il est recherché. Il
tiques-amis à l’exception de celui de l’écri-
retrouve Patricia à Paris, puis attend de récu-
vain Parvulesco tenu par le cinéaste Jean-
pérer de l’argent pour s’enfuir à l’étranger.
Pierre Melville qui le mettra ensuite en
Patricia l’aide, puis le dénonce à la police. Un
contact avec Martial Solal pour l’écriture de
inspecteur l’abat d’une balle dans le dos rue
la musique du film. De son côté, Georges de
Campagne-Première.
Beauregard lui impose l’équipe technique,
En 1959, le producteur Georges de Beau- dont Raoul Coutard, complice et directeur
regard a besoin d’un film très vite et pas de la photo de Pierre Schœndœrffer.
cher à cause de l’échec commercial de Le tournage n’est pas ordinaire pour
Pêcheurs d’Islande de Pierre Schœndœrffer. Il l’époque. D’abord, personne n’a de scénario,
demande donc à Jean-Luc Godard de trou- hors JLG qui trimballe un cahier en faisant
ver un sujet. JLG descend au Festival de office. Par ailleurs, la pénurie des moyens
Cannes où sont ses amis Claude Chabrol et devient plus un moteur qu’un handicap et
François Truffaut et leur demande de l’aide. Coutard joue le jeu de l’invention perma-
Truffaut lui parle, entre autres, d’un vague nente, alors que Beauregard s’affole. La ten-
projet de 1956 dont il voulait faire son pre- sion monte entre lui et Godard qui tourne
mier film et écrire le scénario avec Claude vite et beaucoup (le film dure deux heures
Chabrol. C’est l’histoire du voyou Portal, dix après un premier montage). Postsyn-
inspirée par un authentique fait-divers. Le chronisé, puisque tourné sans le son, À bout
ADIEU PHILIPPINE 17
pour les principaux rôles. Une assistante et le soutien de beaucoup de critiques. Godard
un photographe partent en chasse de jeunes déclare que celui qui n’a pas vu Yveline Céry
inconnus, les prennent en photo puis les danser un cha-cha-cha toute seule en regar-
convoquent pour des essais filmés. Jean- dant droit dans la caméra n’a pas le droit de
Claude Aimini (Michel), Daniel Descamps parler de cinéma sur la Croisette. De son
(Daniel) et Yveline Céry (Liliane) sont les côté, François Truffaut accepte d’être filmé
vainqueurs de cette sélection originale. En comme intervieweur des acteurs pour la
revanche, coproduction oblige, l’autre fille future bande-annonce.
est incarnée par une starlette italienne (Ste- Adieu Philippine sort enfin à Paris, mais en
fania Sabatini) et le comique Vittorio Capri- septembre 1963.
oli est retenu pour jouer Pachala. Des De film-fantôme de la Nouvelle Vague, il
acteurs professionnels français complètent la devient alors un film-culte.
distribution : Jeanne Pérez, Maurice Garrel, « Admirable ! » est le mot qui va sortir de
Marco Perrin, etc. toutes les lèvres. Parce que cette rencontre
Le tournage a lieu pendant l’été 1960 en du néoréalisme avec des petits drames ou
son-témoin, ce qui imposera cinq mois de gags du quotidien cristallise l’entité de ce
détection en début de montage, si bien que que l’on a appelé Nouvelle Vague, sans bien
le budget du film explose et double, à la savoir pourquoi, suite à l’article généraliste
grande colère de Beauregard. Conseiller de Françoise Giroud dans L’Express. En effet,
technique pour le CNC, mais jamais présent ce film en est, non pas la théorie, mais la
sur le tournage, Godard reproche à Rozier pratique imparable. Et ce ne peut pas être
de prendre trop de temps et (selon le témoi- suffisant de le réduire à un portrait réaliste
gnage de Bertrand Tavernier) de dépenser et poétique de la jeunesse du début des
l’argent qui pourrait permettre à un autre années soixante. Oui, le film est la descrip-
cinéaste de faire un film. Mais, il le défend tion juste et sans hypocrisie ni paternalisme
quand même auprès de son producteur. de jeunes gens d’origine modeste qui
Un premier montage de 125 minutes est découvrent le marivaudage sous la menace
terminé en août 1961. Démotivé par les pro- d’une guerre sans nom en Algérie. Mais s’il
blèmes qui l’opposent au cinéaste, Beaure- n’était que ça (ce qui dans le cinéma de
gard exige de raccourcir la durée, ce que l’époque ne serait déjà pas si mal), il ne
Rozier refuse. C’est le blocage et les détrac- serait en rien emblématique de la modernité
teurs de la Nouvelle Vague font des gorges instaurée par la Nouvelle Vague. Parce que,
chaudes sur ce film « infinissable ». Mais en si Chabrol et Truffaut ont su domestiquer à
décembre 1961, Adieu Philippine est racheté leur désir, et avec brio, le cinéma dans leurs
à Beauregard par Alain Baygot (Unitec) et premiers films, si JLG l’a fait s’imploser en
de nouvelles séquences sont tournées pour art moderne, si Kast et Resnais l’ont inscrit
permettre de reprendre le montage en rac- dans les recherches de structures aux fron-
courcissant sa durée. Terminé en jan- tières de l’abstraction enrichissante, Rozier,
vier 1962, le film est sélectionné par la lui, s’est fait aimer du cinéma. Et le film n’est
semaine de la critique pour le Festival de rien que du cinéma, dans son mystère, sa
Cannes. Il y obtient un excellent accueil et sorcellerie de l’invisible et ses secrets qu’on
20 ADIEU PHILIPPINE
pensait pourtant les plus inaccessibles. Sans Téchiné, Claude Miller, Benoît Jacquot. Mais
alibi intellectualiste ni virtuosité calligra- elle tourne aussi des films grand public. Pas
phique, Adieu Philippine capture le temps, le folle, la guêpe !
regard, l’évident, le non-dit, la lumière, la Actrice magique et inclassable, elle est
mer, la nuit, le jour, tout ça avec l’honnêteté stoïque et révoltée dans Les Sœurs Brontë,
de sourcier du plus vrai que le vrai, cette convulsive et extatique dans Possession de
réalité absolue du regard et du cœur de Zulawski, désespérée et effarée dans Mortelle
Rozier qui palpitait déjà chez ses maîtres : Randonnée, puis opère la synthèse risquée de
Jean Vigo, Roberto Rossellini et peut-être toutes ces émergences dans Camille Claudel
bien aussi Chaplin. En outre, réussir un de Bruno Nuytten et en sort exsangue, loin
drame par le biais de la comédie est un para- du public et de l’appui de la critique. Ne
doxe et un tour de force. Surtout si celui qui désarmant jamais, elle réussit des retours
s’y attelle est un homme libre. magistraux (La Reine Margot, La Journée de
la jupe), prouvant à qui ne voulait pas le
ADJANI Isabelle (1955) savoir qu’elle est indispensable au cinéma
Comédienne et chanteuse. français et peut renaître, tel le Phoenix, des
cendres de ses échecs avec l’autorité du
Elle fait du théâtre amateur dès l’âge de génie. Et si elle est imprévisible, tant mieux !
14 ans, puis signe un engagement avec la Ses caprices la rendent insupportable d’indi-
compagnie Robert Hossein. À 17 ans, elle vidualisme et d’arrogance aux uns, admi-
entre à la Comédie française pour jouer rable d’indépendance aux autres. Seul
Agnès dans L’École des femmes de Molière. bémol : elle a rompu son contrat avec
Révélation, succès, le cinéma l’appelle et La Godard après cinq jours de tournage de Pré-
Gifle de Claude Pinoteau en fait une star, elle nom Carmen en 1983. Elle ne « sentait pas »
n’a que 19 ans. Séduit par sa beauté et son JLG. La cristallisation suprême avec la Nou-
talent, Truffaut lui donne alors le rôle princi- velle Vague, qu’on attendait, n’a donc pas eu
pal de L’Histoire d’Adèle H. Admiratif du cou- lieu.
rage et du sérieux de la jeune fille sur un Filmographie : 1975 : L’HISTOIRE D’ADÈLE
tournage, pourtant difficile, il la guide avec H, (FRANÇOIS TRUFFAUT). 1976 : BAROCCO
inspiration dans ce rôle complexe de (ANDRÉ TÉCHINÉ). 1979 : LES SŒURS BRONTË
tumulte et de folie, le plus beau que l’actrice (ANDRÉ TÉCHINÉ). 1983 : MORTELLE RANDON-
tiendra au long d’une carrière stupéfiante et NÉE (CLAUDE MILLER). 1994 : ADOLPHE
ravageuse. Parce que Truffaut sait lui insuf- (BENOÎT JACQUOT).
fler une force impressionnante et un sens du
risque qui perdurera dans son esprit au fil
AFONSO Yves (1944)
du temps. Elle s’investira dans des films à
Comédien, théâtre dans la troupe
l’esthétique radicale, qu’ils soient ceux des
d’Antoine Bourseiller (1965-1968).
cousins européens de la NV (polonais :
Roman Polanski et Andrewj Zulawski, alle- Il débute au cinéma dans Masculin
mand : Werner Herzog) ou ses principaux Féminin en jeune homme hagard qui se
héritiers français, indirects et directs, André poignarde devant Jean-Pierre Léaud. Il
AIMÉE ANOUK 21
enchaîne, encore avec Jean-Luc Godard, GODARD). 1971 : VLADIMIR ET ROSA (JEAN-LUC
dans Made in USA où il campe un romancier GODARD), LE VOYAGE DU LIEUTENANT LE
appelé David Goodis qui meurt de façon BIHAN (LAZLO SABO) cm, VALPARAISO, VALPA-
bouleversante en disant à Anna Karina : RAISO (PASCAL AUBIER). 1972 : LES VOLETS
« Paula, tu m’as dérobé ma jeunesse. » L’évi- CLOS (JEAN-CLAUDE BRIALY), LES GANTS
dence de son talent crève alors les yeux et BLANCS DU DIABLE (LAZLO SZABO). 1975 : ZIG-
seuls les imbéciles vont insister sur sa res- ZIG (LAZLO SZABO). 1986 : MAINE-OCÉAN
semblance physique avec Belmondo pour le (JACQUES ROZIER), DOUBLE MESSIEURS (JEAN-
déconsidérer en pâle copie ou caricature de FRANÇOIS STÉVENIN). 1995 : LE FILS DE GAS-
la star. L’avenir leur donnera tort. Afonso est COGNE (PASCAL AUBIER). 1996 : LE CŒUR FAN-
un comédien original et exceptionnel. Il TÔME (PHILIPPE GARREL). 2001 : FIFI
retrouve encore deux fois JLG puis se dis- MARTINGALE (JACQUES ROZIER). 2002 :
tingue dans une majorité de films signés par MISCHKA (JEAN-FRANÇOIS STÉVENIN). 2003 :
Michel Mitrani, Claude Berri, Yves Boisset, CODE 68 (JEAN-HENRI ROGER).
Bertrand Tavernier, Claude Zidi et Raoul
Ruiz, prouvant ainsi son éclectisme naturel
et l’immense palette de ses possibilités AIMÉE Anouk (Françoise Judith
comiques ou dramatiques. Il s’impose natu- Sorya Dreyfus dite, 1932)
rellement comme l’un des meilleurs seconds Comédienne française, cours de théâtre
rôles de sa génération, ne refusant jamais et de danse à Paris.
l’aventure d’un premier film ou d’une œuvre
Fille de comédiens, elle débute à 14 ans
expérimentale. Notons que tout au long de
dans un film d’Henri Calef, puis dans
sa carrière, il a accepté de jouer dans les
l’œuvre inachevée de Marcel Carné : La
courts-métrages de débutants avec une belle
Fleur de l’âge, avant que Jacques Prévert et
générosité et beaucoup de flair. Sa filmo-
André Cayatte ne l’intronisent en jeune pre-
graphie est magnifique, souvent liée à la
Nouvelle Vague ou, du moins, à son esprit. mière dans Les Amants de Vérone. Ce film
Bouleversant héros des Gants blancs du l’impose comme une des révélations de
diable de son ami Lazlo Szabo, comédien l’après-guerre. Elle y gagne une carrière
rageur, acariâtre et vengeur dans Fifi Martin- internationale et travaille dans le monde
gale de Jacques Rozier, il apparaît chez Phi- entier : Grande-Bretagne, Allemagne, Italie,
lippe Garrel et Jean-François Stévenin. Car Espagne, USA, ce qui lui vaut de belles ren-
Afonso reste un fidèle serviteur de cet esprit contres avec Robert Aldrich, Robert Altman,
NV et le défend coûte que coûte comme un Marco Bellocchio, Alberto Lattuada, Anatole
grognard à la mémoire longue. Il tient Litvak, Sidney Lumet, George Cukor et
d’ailleurs une place majeure dans l’ovni Le Federico Fellini, mais aussi, hélas, de
Fils de Gascogne, hommage de Pascal Aubier longues absences des studios français.
à ce mouvement cinématographique. Avant que la Nouvelle Vague n’existe, elle
Filmographie : 1966 : MASCULIN FÉMININ en est potentiellement une force vive par sa
(JEAN-LUC GODARD), MADE IN USA (JEAN-LUC collaboration avec Alexandre Astruc dès
GODARD). 1967 : WEEK-END (JEAN-LUC 1953. Son éclat illumine Le Rideau cramoisi
22 AIMÉE ANOUK
et Les Mauvaises Rencontres où elle est la par- LE FARCEUR (PHILIPPE DE BROCA). 1961 : LOLA
tenaire de Jean-Claude Pascal, beau séduc- (JACQUES DEMY). 1962 : LES GRANDS CHEMINS
teur cynique des années cinquante. Puis, par (CHRISTIAN MARQUAND). 1968 : MODEL SHOP
deux fois en duo avec Gérard Philipe pour (JACQUES DEMY). 1981 : LA TRAGEDIA DI UN
Duvivier et Becker, elle émeut par son UOMO RIDICOLO (La Tragédie d’un homme
mélange de douceur et de résignation que ridicule, BERNARDO BERTOLUCCI), SUCCESS IS
Franju et Mocky rehaussent poétiquement THE BEST REVENGE (Le Succès à tout prix,
de mystères éperdus dans leurs premiers JERZY SKOLIMOWSKI). 1995 : LES CENT ET UNE
longs-métrages. Mais ce carcan magnifique NUITS DE SIMON CINÉMA (AGNÈS VARDA).
éclate sous la griffe de Fellini et l’humour
feutré de Philippe de Broca. Tout est prêt ALLIO René (1924-1995)
pour qu’elle devienne l’inoubliable Lola de Peintre, décorateur de théâtre et cinéaste
Jacques Demy. Le rôle est transcendance. français.
Malgré l’échec commercial du film, il lui col-
lera à la peau et masquera presque toutes ses Peintre, plasticien, décorateur de théâtre
prestations suivantes. Sublime chez Fellini et inventeur de dispositifs scéniques pas-
encore, inattendue dans Les Grands Chemins sionnants pour Roger Planchon, il est un cas
de Christian Marquand, elle connaît un particulier dans la deuxième génération de
triomphe populaire avec Un homme et une la Nouvelle Vague (Antoine Bourseiller,
femme de Claude Lelouch, prototype absolu Paula Delsol, Jean Eustache, Philippe Garrel,
du revers jumeau de la NV, puis elle ricoche Paul Vecchiali, etc.), sans doute parce que
de film en film, d’une image d’elle-même à l’expérience du théâtre lui ordonnait une
l’autre, retrouvant en chemin Demy et leur rigueur dans la forme et l’espace où l’acteur
Lola, déchue encore, dans Model Shop. est en position rigide et contraignante. Si
À l’exception d’une collaboration avec bien que le refus affirmé du pittoresque et
Agnès Varda pour le centenaire du cinéma, des scolastiques de l’interprétation freina ses
elle ne travaillera plus avec cette Nouvelle captations des effets de réel, même s’il pous-
Vague française dont elle reste pourtant sait en émergence subtile du côté de Marcel
l’icône à jamais, mais sera bien présente Pagnol, ce qui lui venait de l’héritage de Ber-
chez les étrangers périphériques du mouve- told Brecht, sans démériter de l’un et l’autre.
ment. L’Italien Bernardo Bertolucci, le Polo- La Vieille Dame indigne n’était donc pas
nais Jerzy Skolimowski perpétuent ainsi qu’une bonne adaptation cinématogra-
seuls cette flamme parfois trompeuse. Parce phique d’un texte de Brecht, mais une mise
que la belle Anouk Aimée n’appartient à en question du cinéma comme encadrement
personne. d’une vérité des personnages dans l’appareil
Filmographie : 1953 : LE RIDEAU CRAMOISI fictionnel qu’ils habitent. Belle et noble
(ALEXANDRE ASTRUC). 1955 : LES MAUVAISES démarche qui laissait aussi de l’humain dans
RENCONTRES (ALEXANDRE ASTRUC). 1958 : LA les abstractions de ce premier film, son seul
TÊTE CONTRE LES MURS (GEORGES FRANJU), ayant une parenté certaine avec l’esprit de la
MONTPARNASSE 19 (JACQUES BECKER). 1959 : Nouvelle Vague. En revers de cette explora-
LES DRAGUEURS (JEAN-PIERRE MOCKY). 1960 : tion, L’Une et l’Autre est un film qui aborde
ALMENDROS NESTOR CUVAS 23
Extrait de la publication
ALPHAVILLE 25
secret des pays extérieurs, se rend à Alphaville Mais, sur ce point, à la différence de Pierre
pour enlever ou abattre le professeur Von Kast qui est un adepte de la sémantique
Braun-Nosferatu. Il découvre un monde plié générale basée sur une logique non aristoté-
aux directives d’un cerveau électronique qui licienne, JLG entretient une distance cri-
prive les gens de toutes formes de sentiments. tique envers cette forme de pensée. Sa
Mais il tombe amoureux de Natasha, la fille du modernité artistique refuse de tels concepts.
professeur Von Brau-Nosferatu. Et Alphaville est un film contre les machines
Alphaville est la deuxième incursion de de l’intelligence artificielle, les robots et la
Godard dans la science-fiction, après Le pensée programmée. D’ailleurs, à l’instar de
Nouveau Monde (RoGoPaG) et avant Antici- ce que fait au même moment Philip K. Dick
pation (Le Plus Vieux Métier du monde). dans le roman d’anticipation, il joue le
Néanmoins, le projet de départ ne concer- concept du futur pour parler de sa propre
nait guère ce genre. Il s’agissait d’un western époque au moyen d’une fable poétique et
moderne et urbain conçu pour Eddie pessimiste. Car Godard est perplexe et
Constantine, à la demande de ce dernier qui inquiet devant les possibles dérives de ces
désirait retravailler avec le cinéaste après systèmes. Aussi, à sa sortie, le film sera peu
leur collaboration sur un sketch (La Paresse) prisé des affionados de la science-fiction.
des Sept Péchés capitaux. Ce n’est qu’après Par contre, si JLG se méfie des cerveaux
réflexion que JLG décida d’envoyer Lemmy électroniques, il est féru de toutes les nou-
Caution dans le futur. velles techniques en matière de cinéma et il
Il est à noter que, la même année, Pierre les plie à sa volonté artistique. Ainsi, il va
Kast (La Brûlure des mille soleils) et François imposer une pellicule ultrasensible à Raoul
Truffaut (Fahrenheit 451) tournent ou pré- Coutard, son opérateur, afin de pouvoir
parent un film de SF, un registre rarement tourner dans la rue, la nuit, et sans éclairage
emprunté par le cinéma français depuis les d’appoint. Le résultat donne un Paris noc-
films muets de Georges Méliés, mais qui a
turme à la frontière d’impossibles contrastes
trouvé son chef-d’œuvre avec Chris Marker
avec ces cortèges de fantômes dans des
et La Jetée en 1962. Toutefois, si Kast et Mar-
zones opaques aux lumières troubles qui
ker sont érudits en la matière et ont lu les
tranchent avec les intérieurs illuminés de
principaux romans des maîtres du genre, ce
n’est pas le cas de Godard et Truffaut qui façon excessive et blanchâtre. Hors de l’amé-
n’en sont qu’amateurs occasionnels. Pour- nagement de quelques décors, le film
tant, les ombres de Korzybski, et sa théorie n’enregistre donc que le Paris de l’époque,
de la sémantique générale, comme d’Arthur avec ses nouveaux immeubles aux architec-
Van Vogt qui l’a illustrée dans sa saga roma- tures géométriques et souvent froides. De
nesque des Non-A vont planer sur le film, à fait, Godard transfigure tout en utilisant les
tel point que la dernière ligne de The Players dispositifs imposés à la Nouvelle Vague du
of Non-A (Les Aventures de Non-A) est en par- début, mais en reprenant les principes de
tie citée par Caution-Constantine : « Un jeux crus de lumières et d’ombres dont les
enfant qui n’est pas né ne pleure pas encore ». opérateurs des films noirs de série B ou Z
Extrait de la publication
26 ALPHAVILLE
(John Alton) avaient su tirer parti pour pal- frère cadet Luc Moullet et l’aîné Alain Res-
lier la pénurie de moyens. Visuellement, nais donnaient l’exemple, non sans malice.
Alphaville est étonnant et magnifique. Car son style de cinéaste comme son jeu de
Par ailleurs, le vrai sujet du film est l’éloge comédien privilégie cette attitude de la NV
de l’amour en résistance dans un monde où rigueur et liberté faisaient un mélange
sans humanité. Lemmy Caution, l’homme détonant au tournant des années soixante.
qui n’aime que l’or et les femmes, rencontre Réalisateur : 1985 : MARRE DE CAFÉ cm.
Natasha qui ne sait pas ce que le mot amour 1990 : SANS RIRES cm. 1993 : LES YEUX AU
veut dire. Alors, il va découvrir qu’il peut PLAFOND cm, 8 BIS cm. 1997 : MANGE TA
aimer et lui faire découvrir ce qu’est l’amour. SOUPE. 2001 : LE STADE DE WIMBLEDON. 2003 :
Mais ça ne va pas sans douleur capitale, sur- LA CHOSE PUBLIQUE. 2004 : 14,58 EUROS cm.
tout que JLG filme avec amour Anna Karina, 2007 : DEUX CAGES SANS OISEAUX cm, À
la femme qu’il vient de perdre. Il la filme, L’INSTAR DU PÈRE NOËL ET DE LA PIZZA cm,
partant avec son double à lui, mais un dou- LAISSE-LES GRANDIR ICI cm. 2010 : TOURNÉE,
ble improbable, Constantine-Caution, qui L’ILLUSION COMIQUE cm, JOHANN SFAR (DES-
SINS) cm. 2012 : NEXT TO LAST cm. 2014 : LA
voyage au bout de la nuit en bon agent
secret assassin. CHAMBRE BLEUE.
Acteur : 1993 : LES YEUX AU PLAFOND
(MATHIEU AMALRIC) cm. 1998 : ALICE ET MAR-
AMALRIC Mathieu (1965) TIN (ANDRÉ TÉCHINÉ). 1999 : TROIS PONTS SUR
Comédien et réalisateur. LA RIVIÈRE (JEAN-CLAUDE BIETTE), LA FAUSSE
Fils de journalistes, il tente vainement SUIVANTE (BENOÎT JACQUOT). 2001 : LES NAU-
FRAGÉS DE LA D, 17 (LUC MOULLET), LULU
l’IDHEC puis travaille à quantité de postes
sur les films des autres jusqu’à ce qu’on lui (JEAN-HENRI ROGER). 2007 : UN SECRET
propose d’être acteur, alors qu’il ne veut que (CLAUDE MILLER). 2009 : LES HERBES FOLLES
(ALAIN RESNAIS). 2010 : TOURNÉE (MATHIEU
devenir réalisateur.
ALMARIC). 2011 : LETTRES À JACKY EVRARD
L’héritier actuel de la Nouvelle Vague en
(ANDRÉ S, LABARTHE) cm. 2012 : VOUS N’AVEZ
France, c’est lui, comme acteur et réalisa-
ENCORE RIEN VU (ALAIN RESNAIS).
teur : Tournée ne vient pas que de John Cas-
savetes, comme il fut bien trop écrit après
son triomphe cannois. On y sent la marque L’AMOUR À LA CHAÎNE (1964)
secrète de Jean Renoir tout autant que les Film français.
parentés avec Demy, Rozier et Eustache, Tournage à Paris.
même si ton et style révèlent l’évidence de Production : Jean Barral, Robert de Nesles,
son originalité créatrice. Dès ses premiers Georges Mathiot.
films, Godard et Chabrol avaient remarqué Comptoir français du film-Roal film.
cet air de famille et l’on regrette que ni l’un Distribution CFF.
ni l’autre ne l’aient invité à paraître dans Directeurs de production : Jean Lefait,
leurs œuvres, lorsque leur cousin André Michel Monbailly.
Téchiné, leur ami Jean-Claude Biette, leur Réalisation : Claude de Givray.
Extrait de la publication
L’AMOUR À LA CHAÎNE 27
Extrait de la publication
28 L’AMOUR À LA CHAÎNE
prostituée, avec l’atout donné par l’auteur de (Michèle), Célia (Célia-Andromaque), Mad-
ne pas juger, ni condamner et conspuer, tout dly Bamy (Maddly-Céphise), Yves Beneyton
en sachant éviter les complaisances et la vul- (Yves-Oreste), Denis Berry (Denis-Pylade),
garité. À ce titre, la composition de Jean Françoise Godde (Cléone), Michel Delahaye
Yanne mérite des éloges. (Michel-Phoenix), Liliane Bordoni (Puck),
Étienne Becker (l’opérateur du reportage),
L’AMOUR FOU (1967) Claude-Éric Richard (Philipe), André S.
Film français. Labarthe (réalisateur du reportage).
Tournage à Paris, juillet, août 1967 (cinq Sujet : Sébastien monte Andromaque de
semaines). Racine. Son épouse Claire quitte le rôle d’Her-
Production : Georges de Beauregard. mione pendant les répétitions et s’enferme peu
Directeur de production : Roger Scipion. à peu dans la névrose.
Distribution : Cocinor.
Scénario : Marilù Parolini, Jacques Rivette. Après la lutte menée aux côtés de son
Dialogue : Jacques Rivette et improvisations producteur Georges de Beauregard, et quan-
des comédiens. tité de soutiens venus du monde cinéphile
Texte de la pièce de théâtre : Andromaque de et intellectuel pour obliger le pouvoir à lever
Jean Racine. l’interdiction totale de La Religieuse, Jacques
Réalisation : Jacques Rivette. Rivette n’est plus inconnu du grand public.
Images 35 mm : Alain Levent. En collaboration avec André S. Labarthe, il
Son : Bernard Aubouy. tourne alors une trilogie télévisée sur Jean
Coréalisation : André S. Labarthe (scènes du Renoir. Mais, comme Beauregard ne cesse de
reportage). lui demander s’il connaît un réalisateur pou-
Images 16 mm noir et blanc 1 : 1,85 : vant lui faire un film pour 45 millions
Étienne Becker. (anciens), il finit par se porter candidat et
Son : Claude Laureux. cherche une idée de scénario compatible
Mixage : Jacques Maumont. avec les contraintes de ce faible budget.
Assistant-réalisateur : Philippe Fourastié. La genèse de L’Amour fou se fait donc en
Stagiaire : André Téchiné. convergence avec plusieurs désirs et choix
Scripte : Lydie Mahias. de Rivette :
Photographe de plateau : Pierre Zucca. – Refaire un film où le travail du théâtre
Montage : Nicole Lubstchansky. tient une place essentielle. Le montrer
Musique : Jean-Claude Éloy. avec une volonté d’expérimentation et
Durée : 252 minutes. d’improvisation qui était absente de Paris
Sortie en salle : 15 janvier 1969. nous appartient.
Existence d’une version courte de – Travailler avec les comédiens de la
120 minutes réniée par Rivette. troupe de Marc’O : Bulle Ogier, Michèle
Avec : Bulle Ogier (Claire), Jean-Pierre Kal- Moretti, Jean-Pierre Kalfon.
fon (Sébastien-Pyrrhus), Josée Destoop – Pousser le film vers une modernité
(Maria-Hermione), Michèle Moretti qu’il n’a cessé de défendre en tant que
Extrait de la publication
ANÉMÔNE 29
rédacteur en chef des Cahiers du cinéma territoires différents, tant sur le plan formel
(1963-1965). que sur la conception des structures narra-
– Tenir compte des essais des nouveaux tives. D’abord, c’est l’intégration des essais
réalisateurs américains : John Cassavetes, du cinéma-vérité (Rouch, Marker) dans la
Shirley Clarke, Andy Warhol. fiction. C’est aussi la fragmentation du récit
– Intégrer au corps du film la matière linéaire en fonction d’une mise en jeu des
télévisée telle qu’il vient de l’utiliser pour divers éléments comme signes révélateurs
les Cinéastes de notre temps sur Jean des faits, sans qu’ils expliquent les comporte-
Renoir. ments et la psychologie des personnages par
Le scénario écrit avec Marilù Parolini se indications naturalistes ou dramaturgiques.
présente comme un plan de travail avec un Rivette se place ainsi du côté de Godard plu-
canevas d’une trentaine de pages et Rivette tôt que de Rohmer, Truffaut ou Chabrol, à
propose à Jean-Pierre Kalfon de monter lui- la différence toutefois qu’il ne poursuit pas
même Andromaque de Racine avec les le même but que JLG, ne cherchant pas à
acteurs de son choix, puis indique que synthétiser une recherche du pictural et du
l’équipe de Labarthe filmera ses répétitions poétique. Si Rivette et lui sont deux artistes
en 16 mm pendant que, lui, enregistrera les expérimentaux, l’objet filmique que chacun
scènes de répétition et de fiction en 35 mm. crée n’est pas de même nature. Rivette
Kalfon choisit tous les acteurs pour la pièce invente à partir de ce que son équipe
de Racine, à l’exception de Michel Delahaye (acteurs et techniciens) lui propose en toute
que Rivette lui propose pour incarner Phoe- liberté, alors que Godard fait toujours son
nix. Le film se présente donc comme l’inter- film personnel en imposant ses improvisa-
action de trois mises en scène différentes : tions aux autres collaborateurs. Il n’empêche
celle de Kalfon pour le théâtre (répétitions), que L’Amour fou est d’abord un film de
celle de Labarthe pour la télévision (matière Rivette ; il l’est par ses thèmes (complot-
brute) et celle de Rivette pour la dégradation paranoïa, souffrances, groupes, théâtre) et sa
du couple Ogier-Kalfon, sauf que ces trois méthode (liberté du corps de l’acteur, être
blocs distincts sont restructurés, reconstruits sourcier de réalité autant que d’échos du
et organisés au montage pour s’intégrer à la fantastique). L’émotion n’en est jamais
dymanique générale du film. L’Amour fou est absente. Elle gagne le spectateur face aux
un travail collectif mais aussi un film de scènes dramatiques entre le couple en crise,
l’auteur Jacques Rivette. Le devis initial sera mais aussi devant les instants mis en capture
dépassé de 15 millions au montage. Ensuite, du travail des comédiens sur Racine.
les distributeurs exigeront une version rac-
courcie à deux heures, car le film dure qua- ANÉMÔNE (Anne Bourguignon
tre heures douze. Cette version courte est
dite, 1950)
un échec commercial, alors que la version
Comédienne française.
longue est un succès public dans la struc-
ture Art et Essai. Seul Philippe Garrel la rattache à la Nou-
L’Amour fou est une mutation importante velle Vague (deuxième génération) puisque
dans la Nouvelle Vague, car il circonscrit des c’est lui qui la fait débuter dans Anémône et
Extrait de la publication
30 ANÉMÔNE
Extrait de la publication
32 APTEKMAN BARBARA
Extrait de la publication
ARNOUL FRANÇOISE 33
Autant à l’aise dans la comédie que le téléfilms de la série Alfred Hitchcock présente.
drame, elle inspire à Truffaut l’un de ses plus Claude Chabrol a adapté deux de ses
beaux films (La Femme d’à côté), puis romans à l’écran et s’est inspiré d’un troi-
apporte une aura insolite à ceux d’Alain Res- sième, The Unsuspected (L’Insoupçonnable
nais. Cependant, c’est le Belge André Del- Grandison) pour le scénario de Masques, film
vaux qui l’inscrit en icône de la femme dans lequel un personnage lit un livre de
surréaliste dans Benvenuta où elle vibre de la romancière : The Case of the Weird Sisters
façon étonnante et magique, tandis que Vol- (L’Étrange cas des trois sœurs infirmes, 1943).
ker Schlöndorff la place du côté de chez Filmographie : 1970 : LA RUPTURE d’après
Proust avec bonheur. Car Fanny Ardant THE BALLOON MAN (Le Jour des Parques,
porte en elle une force littéraire, au meilleur 1968) (CLAUDE CHABROL). 2000 : MERCI POUR
sens du terme, et elle la cristallise en poésie LE CHOCOLAT, d’après THE CHOCOLATE COB-
noire, si bien qu’on rêve aux rôles que WEB (Et merci pour le chocolat, 1948)
Georges Franju ou Jean Eustache auraient (CLAUDE CHABROL).
pu lui offrir. Certes, son intrusion dans la
Nouvelle Vague est tardive et elle se limite ARNOUL Françoise (Françoise
à deux cinéastes en quête d’exploration des
Gautsch dite, 1931)
sentiments et du temps, la part noble du
Comédienne française.
mouvement, diront certains. Il n’empêche
que les deux films de Truffaut et les trois de Née en Algérie, elle vient en France après
Resnais en font l’une de ses forces les plus la Seconde Guerre mondiale, suit des cours
fascinantes. de théâtre, commence à faire du cinéma et
Filmographie connaît le succès assez vite dans des rôles
Actrice : 1981 : LA FEMME D’À CÔTÉ (FRAN- souvent marqués d’une sensualité féline qui
ÇOIS TRUFFAUT). 1982 : LA VIE EST UN ROMAN ne masque pourtant pas son réel talent.
(ALAIN RESNAIS), VIVEMENT DIMANCHE ! Ralph Habib, Henri Decoin et Henri Ver-
(FRANÇOIS TRUFFAUT). 1984 : L’AMOUR À MORT neuil sont alors ses principaux metteurs en
(ALAIN RESNAIS). 1986 : MÉLO (ALAIN RES- scène. Ce dernier l’a fait d’ailleurs tourner
NAIS). 1994 : LES CENT ET UNE NUITS DE aux côtés de Jean Gabin dans son meilleur
SIMON CINÉMA (AGNÈS VARDA). film : Des gens sans importance (1955). La
Réalisatrice : 2009 : CENDRES ET SANG. même année, elle est superbe dans French
2010 : CHIMÈRES ABSENTES cm. Cancan de Jean Renoir (encore avec Jean
Gabin comme partenaire) et c’est d’ailleurs
ARMSTRONG Charlotte là qu’elle fait la connaissance d’un assistant
nommé Pierre Kast qui l’intégrera plus tard
(1905-1963)
à la Nouvelle Vague. Mais, avant l’originale
Romancière américaine.
expérience de La Morte-Saison des amours
Elle a débuté par des romans à énigmes (1960), puis de Vacances portugaises (1963),
ayant pour héros le détective amateur Mac- elle est la vedette d’une œuvre prémisse de
Dougal, puis s’est tournée vers le récit à sus- ce mouvement : Sait-on jamais de Roger
pense. Elle fut aussi scénariste pour des Vadim.
34 ARNOUL FRANÇOISE
Cependant, en dehors de Kast, elle ne tra- de film, notamment pour Mohammed Lakh-
vaille ensuite qu’avec des auteurs périphé- dar-Hamina.
riques de la NV : Jean Herman, Guy Gilles. Musique de film : 1959 : INDIA : MATRI
Puis Jean Renoir l’invite à encore nous BHHUMI (Inde, terre-mère, ROBERT ROSSEL-
éblouir dans son film-testament : Le Petit LINI), PARIS NOUS APPARTIENT (JACQUES
Théâtre de Jean Renoir. Enfin, au cours de RIVETTE). 1960 : LE TROU (JACQUES
ces dernières décennies, ce sont souvent des BECKER). 1963 : LES CARABINIERS (JEAN-LUC
cinéastes-auteurs qui font appel à elle : Ber- GODARD). 1972 : LES CAMISARDS (RENÉ
nard Paul, Jean Marbeuf, Jean-Claude Mis- ALLIO). 1973 : RUDE JOURNÉE POUR LA REINE
siaen, Raoul Ruiz, Brigitte Roüan, Jacques (RENÉ ALLIO).
Rouffio. Mais pas assez souvent. Et l’on peut Réalisateur : 1963 : LA DEMOISELLE DE
le regretter. CŒUR cm. 1965 : LA CAGE DE VERRE. 1969 :
Filmographie : 1955 : FRENCH CANCAN DIEU A CHOISI PARIS. 1971 : DES CHRISTS PAR
(JEAN RENOIR). 1957 : SAIT-ON JAMAIS… MILLIERS. 1978 : NOCTUOR cm. 1979 : NOCE
(ROGER VADIM). 1960 : LA MORTE-SAISON DES DE SÈVE.
AMOURS (PIERRE KAST). 1963 : VACANCES POR-
TUGAISES (PIERRE KAST). 1967 : LE DIMANCHE ARTS
DE LA VIE (JEAN HERMAN). 1969 : LE PETIT
THÉÂTRE DE JEAN RENOIR (JEAN RENOIR). Hebdomadaire culturel français lancé le
1987 : NUIT DOCILE (GUY GILLES). 31 janvier 1945 par Georges Wildenstein et
consacré aux arts plastiques, dans la conti-
nuation de son journal Beaux-Arts, publié
ARTHUYS Philippe (1928-2010)
(pendant peu de temps) au début des
Compositeur et cinéaste français.
années quarante. En 1952, à l’initiative de
Membre du GRMC (Groupe de recherche Louis Pauwels, son nouveau rédacteur en
et de musique concrète) avec Pierre Henry chef, la critique de cinéma y apparaît sous
et Pierre Schaeffer, il explore ses recherches les signatures de Nino Frank et Adonis
sonores par le disque et le théâtre (ballet Kyrou, puis Henri-François Rey, Yves
avec Maurice Béjart en 1956) puis les pour- Gibeau et Jean-Pierre Vivet. Mais en juillet
suit au cinéma avec Roberto Rossellini et 1954, l’hebdomadaire passe sous la direc-
Jacques Becker, ce qui va le rapprocher de tion de Jacques Laurent, un ancien royaliste
la Nouvelle Vague naissante. Jacques Rivette se proclamant anarchiste de droite, et par
lui confie la partition de Paris nous appar- ailleurs auteur de romans à succès sous le
tient en lui demandant de prendre Bela Bar- pseudonyme de Cecil Saint-Laurent. Il
tok comme base d’inspiration. Godard fait ouvre aussitôt ses colonnes à ses amis, les
appel à lui pour Les Carabiniers. En 1963, hussards de la nouvelle droite littéraire, avec
il passe à la réalisation et tourne des films le désir avoué de faire de la revue un pôle
ambitieux et expérimentaux qui méritent d’opposition aux journaux culturels de
l’attention, mais ne rencontrent aucun suc- gauche (Lettres françaises, France observa-
cès. Parallèlement à son activité de metteur teur) et nomme alors le cinéaste documen-
en scène, il continue d’écrire de la musique taire Jean Aurel chef de la rubrique cinéma.
ASCENSEUR POUR L’ÉCHAFAUD 35
Extrait de la publication
36 ASCENSEUR POUR L’ÉCHAFAUD
que ce soient des essais personnels sur Mur- PASSE adaptation (ALAIN LEVENT). 1981 :
nau ou les autres brillantes adaptations FRÈRE MARTIN (JEAN DELANNOY) TV. 2001 :
d’Edgar Poe. LES ÂMES FORTES (RAOUL RUIZ).
Enfin, lui qui était considéré comme un Acteur : 1949 : RENDEZ-VOUS DE JUILLET
grand héritier de Balzac au moment des (JACQUES BECKER). 1950 : LA VALSE DE PARIS
Mauvaises Rencontres, il termine sa carrière (MARCEL ACHARD). 1957 : UN AMOUR DE
de cinéaste en transposant (à la perfection) POCHE (PIERRE KAST). 1974 : LA JEUNE FILLE
cet auteur : Une fille d’Éve et Albert Savarus. ASSASSINÉE (ROGER VADIM).
L’importance d’Astruc ne se limite donc Romans et essais : 1945 : LES VACANCES.
pas à son rôle de défricheur pour la Nou- 1975 : CIEL DE CENDRES, LA TÊTE LA PREMIÈRE.
velle Vague. Il est un cinéaste majeur, aussi 1977 : LE SERPENT JAUNE, QUAND LA
un romancier et essayiste de valeur. Bref, un CHOUETTE S’ENVOLE. 1982 : LE PERMISSION-
géant du vingtième siècle qui n’a pas tou- NAIRE. 1989 : LE ROMAN DE DESCARTES. 1992 :
jours bien géré sa chance et son génie, DU STYLO À LA CAMÉRA et DE LA CAMÉRA AU
affaire de caractère et choix de vie… STYLO. 1994 : L’AUTRE VERSANT DE LA COLLINE.
Filmographie 1994 : ÉVARISTE GALOIS. 1996 : LE MONTREUR
Réalisateur : 1948 : ALLER-RETOUR cm. D’OMBRES. 1998 : LE SIÈCLE À VENIR. 2000 : LA
1949 : ULYSSE OU LES MAUVAISES RENCONTRES FRANCE AU CŒUR. 2005 : UNE ROSE EN HIVER.
cm. 1952 : LE RIDEAU CRAMOISI cm. 1955 : LES 2008 : LES SECRETS DE MADEMOISELLE FECH-
MAUVAISES RENCONTRES. 1957 : UNE VIE. TENBAUM.
1960 : LA PROIE POUR L’OMBRE. 1961 : L’ÉDUCA-
TION SENTIMENTALE. 1963 : LE PUITS ET LE PEN-
ATIYAH Edward Selim
DULE cm, TV. 1965 : ÉVARISTE GALOIS cm.
1966 : LA LONGUE MARCHE. 1968 : FLAMMES
(1903-1964)
Secrétaire de la Ligue arabe à Londres.
SUR L’ADRIATIQUE. 1970 : INTRODUCTION À LA
MÉTHODE DE MURNAU TV, MURNAU TV. 1975 : Libanais. Études en Égypte puis en Angle-
SARTRE PAR LUI-MÊME (co- MICHEL CIEUTAT), LA terre.
LETTRE VOLÉE TV. 1978 : LOUIS XI OU LA NAIS- Son roman The Thin Line (L’Étau 1951),
SANCE D’UN ROI TV. 1979 : LOUIS XI OU LE POU- adapté au japon par Mikio Naruse : Onna no
VOIR CENTRAL TV. 1980 : À UNE VOIX PRÈS OU LA naka ni iru tanin (1966) est à l’origine de
NAISSANCE DE LA TROISÈME RÉPUBLIQUE TV, Juste avant la nuit (1971), l’un des meilleurs
ARSÈNE LUPIN JOUE ET PERD TV. 1981 : LA Chabrol de la période Génovès, marqué
CHUTE DE LA MAISON USHER TV. 1989 : UNE aussi par l’influence de Simenon.
FILLE D’ÈVE TV. 1993 : ALBERT SAVARUS TV. Filmographie : 1971 : JUSTE AVANT LA NUIT
Scénariste (hors ses films) : 1949 : JEAN DE (CLAUDE CHABROL).
LA LUNE adaptation (MARCEL ACHARD). 1952 :
LA P… RESPECTEUSE (MARCEL PAGLIERO). ATTAL Henri (1936-2003)
1954 : IL VISCONTE DU BRAGELONNE (Le Comédien français de second plan.
Vicomte de Bragelonne, FERNANDO CER-
CHIO). 1964 : BASSAE commentaire (JEAN- Brun, visage émacié, sourcils brous-
DANIEL POLLET) cm. 1980 : COMME LE TEMPS sailleux, yeux de chien battu, il a marqué le
Extrait de la publication
ATTAL HENRI 39
cinéma français, pendant quarante ans, de CHABROL), OPHÉLIA (CLAUDE CHABROL), LES
silhouettes en petits rôles, souvent en duo VIERGES (JEAN-PIERRE MOCKY). 1964 :
avec Dominique Zardi. Il est connu qu’ils L’HOMME QUI VENDIT LA TOUR EIFFEL (Les Plus
allaient ensemble dans les bureaux de pro- Belles Escroqueries du monde, CLAUDE CHA-
duction et menaçaient de casser la gueule à BROL), LE TIGRE AIME LA CHAIR FRAÎCHE
tout le monde s’ils n’obtenaient pas un rôle (CLAUDE CHABROL). 1965 : MARIE-CHANTAL
dans le film en préparation. Cependant, leur CONTRE DOCTEUR KHA (CLAUDE CHABROL),
interminable filmographie laisse à penser PIERROT LE FOU (JEAN-LUC GODARD). 1966 :
que l’intimidation musclée ne fut pas MASCULIN FÉMININ (JEAN-LUC GODARD), LA
l’unique raison qui poussa les réalisateurs de BOURSE ET LA VIE (JEAN-PIERRE MOCKY), LA
toutes sortes à les employer. La rumeur veut LIGNE DE DÉMARCATION (CLAUDE CHABROL).
aussi que Jean-Luc Godard s’inspira beau- 1967 : LE SCANDALE (CLAUDE CHABROL).
coup de ce tandem grotesque pour ses deux 1968 : LES BICHES (CLAUDE CHABROL). 1969 :
loustics des Carabiniers. LA FEMME INFIDÈLE (CLAUDE CHABROL). 1971 :
Seul ou avec son compère, Attal a hanté LE CINÉMA DE PAPA (CLAUDE BERRI), JUSTE
plusieurs films de la Nouvelle Vague, ceux de AVANT LA NUIT (CLAUDE CHABROL). 1972 :
Godard qui aimait « le voir jouer si mal ». DOCTEUR POPAUL (CLAUDE CHABROL), SEX-
Faux aveugle, concubin de concierge, pom- SHOP (CLAUDE BERRI). 1974 : NADA (CLAUDE
piste burlesque, client de bistrot ou lecteur à CHABROL). 1975 : UNE PARTIE DE PLAISIR
voix haute de magazine polisson, il traverse (CLAUDE CHABROL), LES INNOCENTS AUX
les premiers films de JLG avec un naturel ter- MAINS SALES (CLAUDE CHABROL). 1976 : FOLIES
riblement maladroit, qui touche au pathé- BOURGEOISES (CLAUDE CHABROL), BARTLEBY
tique, mais qui le fit remarquer par le public. (MAURICE RONET). 1977 : LE ROI DES BRICO-
Autrement, c’est surtout Claude Chabrol qui LEURS (JEAN-PIERRE MOCKY). 1978 : VIOLETTE
l’utilisera pendant longtemps, et à toutes les NOZIÈRES (CLAUDE CHABROL), LE TÉMOIN
sauces, gendarme, tueur et même vieille (JEAN-PIERRE MOCKY). 1979 : LE PIÈGE À CONS
femme de ménage sourde dans Docteur (JEAN-PIERRE MOCKY). 1980 : L’ÉCHAFAUD
Popaul. Il lui donnera aussi son plus grand MAGIQUE (FANTÔMAS, CLAUDE CHABROL) TV,
rôle dans Les Biches, un intellectuel pique- ARSÈNE LUPIN JOUE ET PERD (ALEXANDRE
assiette et farfelu. Au cours de ce tournage, ASTRUC) TV. 1981 : LE SYSTÈME DU DOCTEUR
Attal reprocha à Chabrol de ne jamais faire de GOUDRON ET DU PROFESSEUR PLUME (CLAUDE
gros-plan de lui. Alors, le cinéaste lui en offrit CHABROL) TV. 1982 : LITAN (JEAN-PIERRE
un, en lui faisant dire, avec profondeur : MOCKY). 1984 : À MORT L’ARBITRE (JEAN-PIERRE
« D’ailleurs, tout est de la merde ! » MOCKY). 1985 : POULET AU VINAIGRE (CLAUDE
En toute logique, il intégra le Mocky’s Cir- CHABROL). 1987 : MASQUES (CLAUDE CHA-
cus. BROL), LE CRI DU HIBOU (CLAUDE CHABROL).
Filmographie : 1960 : LES BONNES FEMMES 1988 : UNE AFFAIRE DE FEMMES (CLAUDE CHA-
(CLAUDE CHABROL). 1961 : LES GODELUREAUX BROL). 1990 : JOURS TRANQUILLES À CLICHY
(CLAUDE CHABROL), UNE FEMME EST UNE (CLAUDE CHABROL). 1991 : MADAME BOVARY
FEMME (JEAN-LUC GODARD). 1962 : VIVRE SA (CLAUDE CHABROL). 1992 : BETTY (CLAUDE
VIE (JEAN-LUC GODARD), LANDRU (CLAUDE CHABROL), VILLE À VENDRE (JEAN-PIERRE
40 ATTAL HENRI
Scénariste : 1965 : TENEBRAE FACTAE SUNT deuxième époque, d’abord avec Jean Eus-
cm. 1968 : MONSIEUR JEAN-CLAUDE VAUCHE- tache, puis Jacques Rivette qui l’intègre à
RIN cm. 1969 : ARTHUR, ARTHUR cm. 1971 : deux expérimentations radicales (L’Amour
VALPARAISO, VALPARAISO (CO-RAPHAEL SORIN). fou et Out 1 : Noli me tangere), conçues sur
1975 : LE CHANT DU DÉPART, LA MORT DU RAT le risque et la surprise hors des lois et règles
cm. 1986 : L’APPARITION cm, LES PETITS COINS du son « propre ». Cette modernité (en son
cm. 1987 : LA SAUTEUSE (DE L’ANGE) cm. direct ou reconstitué en studio) ne lui fait
1988 : LA CENDRE cm. 1988 : LA TRAJECTOIRE pourtant pas mépriser le dispositif des
AMOUREUSE cm. 1995 : LE FILS DE GASCOGNE conceptions plus classiques et il participe à
(CO-PATRICK MODIANO). de nombreux films d’Yves Boisset, Georges
Producteur (hors ses propres films) : Lautner, Yves Robert ou Claude Zidi. Il fait
1968 : MARIE ET LE CURÉ (DIOURKA MED- aussi preuve d’invention tout au long de sa
VECZKY) cm. 1969 : MANOJAHARA (DOMI- collaboration régulière aux documentaires
NIQUE DUBOSC) cm. 1970 : LES JOURS DE de Claude Lanzman. Éclectique et com-
NOTRE MORT (DOMINIQUE DUBOSC) cm, JOJO pétent, il voyage d’un style de cinéma l’autre
NE VEUT PAS MONTRER SES PIEDS (DENIS BERRY) et le spectre général de son travail est donc
cm, L’ESPACE VITAL (PATRICE LECONTE) cm. très large.
1971 : LA COMMUNE, LOUISE MICHEL ET NOUS Ingénieur du son : 1966 : LE PÈRE NOËL A
(MICHEL GARD ET JACQUES BRIÈRE), SAINT- LES YEUX BLEUS (JEAN EUSTACHE). 1967 :
DENIS SUR AVENIR (SARAH MALDOROR). 1972 : L’AMOUR FOU (JACQUES RIVETTE). 1969 :
DOSSIER PENARROYA (DOMINIQUE DUBOSC), PIERRE ET PAUL (RENÉ ALLIO), SEPT JOURS
UN EFFORT D’IMAGINATION (DOMINIQUE AILLEURS (MARIN KARMITZ), PAULINA S’EN VA
DUBOSC), 1973 : ACTUALITÉS EN SEPT SCÈNES (ANDRÉ TÉCHINÉ). 1970 : CAMARADES (MARIN
DU PRINTEMPS 58 (BERNARD EISENSCHITZ),
KARMITZ), LA FAUTE DE L’ABBÉ MOURET
L’AGRESSION (FRANK CASSENTI). 1974 : ÉCHO (GEORGES FRANJU), OUT 1 : NOLI ME TANGERE
D’ALGER (FRANK CASSENTI), ANTARIDA (JEAN-
(JACQUES RIVETTE). 1972 : LES CAMISARDS
JACQUES FIORI) (RENÉ ALLIO). 1974 : MES PETITES AMOUREUSES
Acteur : 1964 : PIERROT LE FOU (JEAN-LUC (JEAN EUSTACHE). 1976 : MONSIEUR ALBERT
GODARD). 1968 : LES IDOLES (MARC’O). 1970 :
(JACQUES RENARD). 1982 : LE CRIME D’AMOUR
ARTHUR, ARTHUR (PASCAL AUBIER) cm. 1971 :
(GUY GILLES). 1985 : BLANCHE ET MARIE
VALPARAISO, VALPARAISO (PASCAL AUBIER).
(JACQUES RENARD), POLICE (MAURICE PIALAT).
1972 : LE SOLDAT ET LES TROIS SŒURS (PASCAL
Réalisateur : 1989 : CHANSON POUR UN
AUBIER). 1986 : LES PETITS COINS (PASCAL
MARIN cm. 1990 : MAMAN cm.
AUBIER). 1990 : LE BAL DU GOUVERNEUR
(MARIE-FRANCE PISIER).
AUCLAIR Michel (Vladimir
AUBOUY Bernard Vijovic dit, 1922-1988)
Ingénieur du son, mixeur, réalisateur Comédien français.
français. Professeur à la FEMIS.
Il étudie au conservatoire et fait du
Formé à l’École Lumière, il participe à théâtre. Ses débuts cinématographiques sont
l’aventure de la Nouvelle Vague dans sa consacrés par Jean Cocteau qui le baptise en
Extrait de la publication
42 AUCLAIR MICHEL
frère veule et trouble de la Belle et ami du Truffaut qui songea plusieurs fois à porter
double vénal de la Bête. Puis une brève ren- ses romans à l’écran et rebaptisa la comé-
contre mystérieuse avec le jeune Alain Res- dienne Claudine Huzé du nom de l’héroïne
nais précède sa vampirisation par les d’un de ses livres : Marie Dubois. Mais ce fut
caméras de René Clément et Henri-Georges un électron libre et marginal de la Nouvelle
Clouzot. Le voilà donc parti dans le peloton Vague (Jacques Baratier) qui l’introduisit
de tête des vedettes masculines des années dans le cinéma, en tant qu’acteur, parolier et
cinquante. Il tourne alors beaucoup et un scénariste. Enfin, bien plus tard, Jean-Luc
peu partout en Europe, mais brûle aussi les Godard mariera son roman Monorail avec
planches à Paris. Car il est d’abord un comé- The Long Goodbye (Sur un air de navaja) de
dien de théâtre qui, pendant toute sa vie, Raymond Chandler pour la base scénarique
sera mis en scène par les plus grands : Mar- du film Nouvelle Vague.
cel Herrand, Roger Planchon, Luchino Vis- Filmographie : 1962 : LA POUPÉE (JACQUES
conti, Patrice Chéreau, Antoine Bourseiller. BARATIER). 1963 : DRAGÉES AU POIVRE chan-
Ce sont les aînés de la Nouvelle Vague qui sons (JACQUES BARATIER). 1990 : NOUVELLE
font appel à lui, et le peu de films tournés VAGUE d’après MONORAIL (JEAN-LUC
dans cette mouvance l’y intégrent de toute GODARD).
autorité. Car, sous la direction de Roger Acteur : 1949 : DÉSORDRE (JACQUES BARA-
Leenhardt, Alexandre Astruc ou Pierre Kast, TIER) cm. 1966 : VOILÀ L’ORDRE (JACQUES
il est parfait, sans cabotinage, tics, ni fiori- BARATIER) cm.
tures. Du grand art. Mais hélas, ce passage
splendide dans la nébuleuse NV reste sans AUDRAN Stéphane (Colette
lendemain, sauf que l’héritier André Téchiné Suzanne Jeanne Decheville dite,
saura le rendre admirable dans sa fresque 1939)
brechtienne Souvenirs d’en France. Comédienne française.
Filmographie : 1945 : LA BELLE ET LA BÊTE
(JEAN COCTEAU), OUVERT POUR CAUSE Elle suit des cours de théâtre avec Tania
D’INVENTAIRE (ALAIN RESNAIS). 1961 : L’ÉDUCA- Balachova, Charles Dullin, René Simon et
TION SENTIMENTALE (ALEXANDRE ASTRUC). Michel Vitold avant de rencontrer la Nou-
1963 : VACANCES PORTUGAISES (PIERRE KAST), velle Vague et d’associer son destin, sa vie et
SOUVENIRS D’EN FRANCE (ANDRÉ TÉCHINÉ). sa carrière à celle de Claude Chabrol.
1983 : LA BELLE CAPTIVE (ALAIN ROBBE- C’est une comédienne complète, capable
GRILLET). d’aborder tous les registres et faire honneur
à chacun des rôles de composition qu’on lui
AUDIBERTI Jacques (1989-1965) confie. Crédible en vendeuse d’électroména-
Journaliste, dramaturge, parolier, ger, fausse chanteuse italienne, strip-
romancier et scénariste français. teaseuse, cantatrice, petite ou grande
bourgeoise, espionne déjantée, criminelle
Il fut adoré des gens des Cahiers du habile à se travestir, institutrice, vraie cou-
cinéma (où il publia des textes sous forme pable, fausse innocente, victime de com-
de Billets), et plus précisément par François plots familiaux, alcoolique et mère abusée
Extrait de la publication
AUDRET PASCALE 43
ou abusive devant la caméra de Chabrol, elle NUIT (CLAUDE CHABROL). 1972 : THE OVER-
est à elle seule, toutes les femmes de la SIDE OF THE WIND (ORSON WELLES, INÉDIT),
comédie humaine. Et c’est encore vrai dans DEAD PIGEON IN BEETHOVENSTRASSE (Pigeon
les films des autres, Audiard, Axel, Buñuel, mort dans Beethovenstrasse, SAMUEL FUL-
Fuller, Sautet, Tavernier, etc. Autant de LER). 1973 : LES NOCES ROUGES (CLAUDE CHA-
talent et de beauté méritent une admiration BROL). 1976 : FOLIES BOURGEOISES (CLAUDE
sans égale et, au sein des femmes tutélaires CHABROL). 1977 : BLOOD RELATIVES (Les liens
de la Nouvelle Vague, seule Bernadette de sang, CLAUDE CHABROL). 1978 : VIOLETTE
Lafont subit un parcours identique par la NOZIÈRES (CLAUDE CHABROL). 1980 : THE BIG
variété des personnages divers et opposés à RED ONE (Au-delà de la gloire, SAMUEL FUL-
défendre. Ajoutons qu’en dehors de Cha- LER), LE SOLEIL EN FACE (PIERRE KAST). 1981 :
brol, elle ne paraît que discrètement dans Le LES AFFINITÉS ÉLECTIVES (CLAUDE CHABROL)
Signe du lion de Rohmer et il n’y a, dans ce TV, LE MARTEAU-PIQUEUR (CHARLES L, BITSCH)
mouvement, que Charles L. Bitsch et Pierre TV. 1982 : MORTELLE RANDONNÉE (CLAUDE
Kast à avoir sollicité sa personne pour leurs MILLER). 1984 : LES VOLEURS DE LA NUIT
travaux, ainsi que Claude Miller (en bon (SAMUEL FULLER), LE SANG DES AUTRES
héritier de Truffaut). Cette défection des (CLAUDE CHABROL). 1985 : POULET AU
autres ténors de la NV vient sans doute du VINAIGRE (CLAUDE CHABROL). 1987 : LES SAI-
fait que Claude Chabrol tournait film sur SONS DU PLAISIR (JEAN-PIERRE MOCKY). 1988 :
film avec elle, la mobilisant ainsi dans son L’ESCARGOT NOIR (CLAUDE CHABROL) TV.
univers. Ce qui n’empêche pas Stéphane 1989 : JOURS TRANQUILLES À CLICHY (CLAUDE
Audran d’être l’une des très grandes dames CHABROL). 1992 : BETTY (CLAUDE CHABROL).
de la Nouvelle Vague. 1996 : LE FILS DE GASCOGNE (PASCAL AUBIER).
Filmographie : 1958 : MONTPARNASSE 19 Théâtre : MACBETH (Shakespeare, MISE EN
(JACQUES BECKER). 1959 : LES COUSINS SCÈNE CLAUDE CHABROL).
(CLAUDE CHABROL), LE SIGNE DU LION (ÉRIC
ROHMER). 1960 : LES BONNES FEMMES AUDRET Pascale (Pascale Auffray
(CLAUDE CHABROL), LES GODELUREAUX
dite,1936-2000)
(CLAUDE CHABROL). 1961 : L’ŒIL DU MALIN
Comédienne française, sœur du chanteur
(CLAUDE CHABROL). 1962 : LANDRU (CLAUDE
Hugues Aufray.
CHABROL). 1964 : LE TIGRE AIME LA CHAIR
FRAÎCHE (CLAUDE CHABROL), LA MUETTE Fragile, piquante et secrète, elle partagea
(PARIS VU PAR, CLAUDE CHABROL). 1965 : sa carrière entre cinéma et télévision après
MARIE-CHANTAL CONTRE DOCTEUR KHA son succès dans L’Eau vive. Sa participation
(CLAUDE CHABROL). 1966 : LA LIGNE DE à la Nouvelle Vague et ses périphériques est
DÉMARCATION (CLAUDE CHABROL). 1967 : LE minime. Un rôle dans Pleins Feux sur l’assas-
SCANDALE (CLAUDE CHABROL). 1968 : LES sin de Georges Franju et une silhouette dans
BICHES (CLAUDE CHABROL), LA FEMME INFI- Les Carabiniers de Jean-Luc Godard.
DÈLE (CLAUDE CHABROL). 1969 : LE BOUCHER Filmographie : 1961 : PLEINS FEUX SUR
(CLAUDE CHABROL). 1970 : LA RUPTURE L’ASSASSIN (GEORGES FRANJU). 1963 : LES
(CLAUDE CHABROL). 1971 : JUSTE AVANT LA CARABINIERS (JEAN-LUC GODARD).
44 AUMONT JEAN-PIERRE
N° d’édition : L.01ELKN000447.N001
Dépôt légal : novembre 2013
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