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Mémoire

Michel Lajoye

Édité et mis en ligne par:

L'Église Mondiale du Créateur


P.O. Box 2002
USA – East Peoria, IL 61611
http://www.creator.org
http://www.wcotc.com/france
Avant-propos (en guise d'introduction)

V
ous tenez entre vos mains un porte le nom du stalinien Gayssot et quant à elle, est la moins bien lotie
"mémoire" qui n'en est pas à qui contraint les goyim à être des avec seulement l5OO agents.
sa première édition: cette disciples de la Très Sainte Religion Pourtant, la DST est très connue,
présente est la huitième! Holocaustique … vous en aviez déjà entendu parler. Ce
La toute première rédaction de ce Dans mon récit, je me suis qui n'était pas le cas de la DPSD et de
document a été achevée il y a 3 ans, efforcé de décomposer chaque pan de ses 1620 barbouzes!
en décembre 1997. Date symbolique, cette/mon affaire en commençant par Additionnons la DGSE, la DRM et
puisque cela faisait alors 10 ans que le début: ma rencontre avec un la DPSD et cela constitue, au sens
j'étais incarcéré pour une affair e dénommé Christophe Arcini qui fut mon large, une police politique militaire de
criminelle qui apparaissait déjà comme coaccusé lors du procès de Caen. Le 4100 + 1709 + 1620 = 7429 agents! Un
"pas claire". lecteur découvrira que cet individu, total bien supérieur aux RG (3200) et à
Aujourd'hui, en avril 2001, je suis fonctionnaire du Ministère de la DST (1500) réunis qui, eux,
entré dans ma quatorzième année de l'intérieur, était un agent chargé n'alignent donc que 4700 agents, soit
détention et je vous propose de lire ce d'infiltrer les milieux d'extrême-droite 2729 de moins que la police politique
mémoire qui vous relate une afin de leur faire commettre des militaire! Et aux effectifs de cette
manipulation d'État dont, vous aussi, attentats. dernière, il ne faut pas oublier d'y
vous avez été victime, puisqu'elle était Le lecteur découvrira aussi ajouter les 95 000 gendarmes qui sont
destinée à influencer votre opinion, comment la Police Judiciaire et des militaires et qui ne se font pas
votre choix, votre conditionnement l'lnstitution Judiciaire ont exécuté les prier pour faire, dès que la DPSD le
électoral... ordres du Pouvoir politique et ont leur ordonne, du renseignement sur tel
Ne pensez pas que j'exagère, car relâché (provisoirement...) cet Arcini ou tel citoyen!
ce document vous apprendra que le qu'ils avaient auparavant interpellé! Ces chiffres vous étonnent, mais
terrorisme d'État existe, que le Pouvoir Ceci pour qu'il puisse continuer à jouer ils parlent d'eux-mêmes: en France la
n'hésite pas à y recourir, que cela soit son rôle d'agent-provocateur et me police politique est plus militaire que
pour éliminer des opposants, ou pour fasse commettre un attentat à la civile.
servir la propagande d'État. Car qui y bombe. Lisez ce mémoire, cela vous en
a-t-il de mieux qu'un bon attentat, Lire ce document, ce sera aussi apprendra encore plus sur les activités
intervenant au bon moment, pour entrer dans les coulisses des services de cette police politique militaire,
souder une opinion publique derrière et des polices politiques . Que ce soit omniprésente, mais dont vous n'aviez
une politique gouvernementale? la civile avec les Renseignements jamais entendu parler avant et dont
En France, dams les années 80, Généraux, mais aussi de la militaire vous ne soupçonniez même pas
il a été commis divers attentats que avec la Direction de la Protection, de l'existence, alors que c'est vous,
l'on a qualifiés d'extrême-droite. Des la Sécurité et de la Défense (l'ex- contr ibuable, qui la financez.
actions qui ont toujours été perpétrées Sécurité Militaire). Certains lecteurs ne manqueront
au "bon moment" pour servir la Cette DPSD, dont il sera pas de s'étonner que ce mémoire soit
propagande gouvernementale contre beaucoup question dans ce récit, est imprimé sur des feuilles A4, et non "en
ce qui était à l'époque le Front inconnue du grand public. Pour ce livre". Cela tient au contenu même de
National. dernier, la police politique, en France, ce récit, et aux chiffres détaillés plus
Ce document contient le récit se limite aux civils des RG et à ceux haut. Quel est l'éditeur grand public
d'une de ces campagnes. Une de la Direction de la Surveillance du qui oserait braver ces assassins
opération qui s'est soldée, entre Territoire. st ipendiés par l'État? Alors ce que
autres, par ma condamnation à la Pourtant, les chiffres budgétaires vous avez entre les mains ne pouvait
réclusion criminelle à perpétuité pour 1999/2000 sont sans équivoque être qu'un samizdat , car aujourd'hui, à
assortie d'une peine incompressible de (cf. l'organigramme paru dans cause des polices politiques, un
18 ans, pour la pose d'une bombe, qui Libération du 26 novembre 1999): la diss ident ne peut pas plus se faire
n'a peut-être pas explosé, et qui, en DPSD a officiellement 1620 éditer en France qu'il ne le pouvait en
tout cas , n'a causé ni dégât, ni blessé permanents. Et nous en sommes URSS du temps de la "splendeur" du
et, bien entendu: aucun mort. arrivés à 2800 "civils" plus 2200 KGB.
Condamnation prononcée à l'issue d'un militaires pour la Direction Générale Le lecteur dispose, au recto de
procès (si l'on peut appeler cela des Services Extérie urs. Sans omettre cette présentation, d'un « Sommaire »
comme ça...) qui s'est tenu à Caen en les 1709 fonctionnaires de la Direction pour faciliter ses éventuelles
juin l99O, c'est-à-dire entre la du Renseignement Militaire. recherches et/ou retours en arrière, à
profanation de Carpentras (commise, À l'opposé, la police politique travers ce mémoire.
elle aussi, fort à propos...) et civile compte officiellement, avec les Bonne lecture!
l'adoption/promulgation de la loi qui RG, 3200 fonctionnaires. Et la DST,

Huitième Édition, avril 2001


Sommaire

Chapitre 1 13. Arcini forcément identifié par la police 4. Lundi 7 décembre 1987 (convocation
Premiers contacts avec Arcini (1984) dès juin 1987 ………………………… 31 à la PJ) …………….…………………. 57
14. Nouvelle voiture pour Arcini ………… 33 5. Plan pour faire évader Arcini des
1. Mon parcours, mon passage au FN, 15. Une fuite malencontreuse dans la locaux de la PJ ……….……………… 57
et mon fichage par les polices presse …………………………..……. 33 6. Mardi 8 décembre 1987, convocation
politiques ………….…..……………… 3 16. Les revendications sionistes ………… 34 à la PJ (suite) …….………………….. 57
2. Rencontre avec Arcini .….....……….... 4 17. Visite d'un inspecteur à la prison où 7. Arcini "s'évade" ……………………… 58
3. Origines d'Arcini …………………..…. 4 j'étais détenu …………………..…….. 34 8. Mercredi 9 décembre 1987 (trajet
4. Arcini forcément fiché …………….… 4 Caen-Le Havre) ….………………….. 61
5. Travail d'Arcini …………………….… 5 Chapitre 6 9. Je croise Arcini "par hasard" ………... 61
6. La récupération d'armes, d'explosifs, Ma sortie de prison (26 octobre 1987) 10. Le jeudi 10 décembre (l'arrestation) ... 62
et autres ……………………………… 5
1. Reprises de contacts avec Arcini ….... 35 11. Arrêtés sur "renseignement" ……..… 64
7. Formation qui m'est dispensée …….. 6 12. Un, ou des mystérieux "groupes ar-
8. Arcini forcément manipulé ou agent
infiltré…………………………………. 7 Chapitre 7 més" ………………………………….. 65
L'attentat qui m'est reproché
Chapitre 9
Chapitre 2 I. Avant toute chose ……………..……... 35 La garde-à-vue et l'instruction
Passage à l'armée 2. Arcini n'y a pas participé directement 36
3. Trajet Caen-Cherbourg (vendredi 20 1. Il manque des armes et les explosifs
1. Procédure d'engagement (mars
novembre ont disparu ……………………..…….. 66
1985) ……………………..…………… 7 4 1987) ………………..……. 36
4. Assemblage de la bombe (dimanche 2. L'instruction ………………..………… 69
2. Étrange visite au Peloton d'Elèves
22 novembre 1987) ……………..…… 36 3. Les motifs d'inculpation ……...……… 70
Gradés (juin 1985) …………..…..…... 8
5. Essai avec la "bombe-test" (lundi 23 4. Soi-disant arrêté avec l'arme du
3. Arrivée au régiment d'affectation, puis
novembre 1987) ………..……………. 37 crime de Caen ……………….……… 70
description de mon travail ……..……. 9
2. Mon nom disparaît de l'effectif 6. Possible substitution de l'explosif …... 37
7. Cabines téléphoniques toutes en Chapitre 10
régimentaire ………………..………... 10
panne ……………………….….…….. 37 Le dossier
5. Visites officielles de la Sécurité
Militaire (fin mars 1986) ……….….... 10 8. Obligé de partir pour Caen (25 1. Sa remise (8 juin 1990) ………..……. 72
6. Est-ce un agent de la DGSE? ……… 12 novembre 1987) ……………….…….. 38 2. L'enquête de personnalité a été en
7. Première mission (avril 1986) ……... 12 9. Trajet Cherbourg-Rouen (27 partie rédigée par la gendarmerie …... 72
8. Problèmes idéologiques …………….. 13 novembre 1987) ……………………. 39 3. Les parents ……………..……………. 73
9. Les autres missions, en vrac (courant 10. Derniers repérages (29 novembre 4. Les frères et sœurs ………….……… 74
1986) ………………………………..... 13 1987) …………………………….…… 39 5. Procès-verbaux sur la période
10. L'affaire des GAL (octobre 1986) ...…. 14 11. L'attentat en lui-même, tel que j'ai scolaire ………………………..……… 75
11. Refus de la mission GAL, je déserte opéré (30 novembre 1987) ……..…… 39 6. Procès-verbaux militaires …….…… 76
(octobre/novembre 1986) …………… 15 12. Retour à Caen (30 novembre 1987) .... 41 7. L'enquête fut manifestement stoppée ……………………
12. Conclusion du passage à l'armée …... 16 13. Récit de l'explosion de la bombe 8. Pas d'audition d'ami(e) ou de voisin .. 77
13. Contexte de l'époque …………...……. 16 (version officielle) …………………... 41
14. Durant l'armée, contacts réguliers 14. Le Parquet n'a jamais convoqué les Chapitre 11
avec Arcini …………………………... 19 témoins! …………………….……….. 42 Le procès aux Assises (juin 1990)
15. Bilan de l'explosion: trois blessés 1. Dates, lieu, ambiance ………..……… 77
Chapitre 3 (version officielle) ……….…………... 43 2. Le président de la Cour ……………... 78
Une liberté très surveillée 16. "Bizarreries " des versions officielles 43 3. L'avocat général (promu après le
17. Un explosif défectueux selon la procès) …………….………………… 78
1. Ma voiture qui prend feu …………..… 20 version officielle ……….…………... 44 4. Comportement anormal des jurés ….. 79
2. Une voiture piégée qui disparaît …..... 21 18. Récit de l'attentat (version du témoin 5. Les témoins cités ………………..…... 80
Bounifia) ……………….…………….. 45
Chapitre 4 6. Les témoins que j'avais fait citer …… 80
19. Disposition de chacun (selon 7. Les parties civiles qui s'étaient
Ma première incarcération (janvier 1987)
Bounifia) ………………..…………… 46 constituées …………………………… 81
1. L'arrestation …………………………. 22 20. Ce qui a suivi mon départ (version 8. Les experts cités …………….………. 81
2. Le procès "arrangé" de Coutances Bounifia) ………………..……………. 46 9. Comportement d'Arcini durant le
(4 août 1987) ………………………… 22 21. Disposition de chacun lors de procès ……………..…………………. 81
3. Un projet d'attentat …………..………. 23 l'explosion (version Bounifia) ……… 47 10. Arcini incapable de décrire, techni-
4. Visite d'un colonel en prison et 22. Effets matériels de l'explosion (selon quement, la bombe …….……………. 81
démission de l'armée …………...…... 24 Bounifia) ……………………….…….. 48 11. Le réquisitoire contre moi ……..……. 83
23. Aucun dégât humain (selon Bounifia) 49 12. Le réquisitoire contre Arcini ……..….. 83
Chapitre 5 24. Hypothèse d'une défaillance du
Les attentats commis par Arcini (1987) 13. Les plaidoiries de la défense ……...… 83
système de mise à feu …...…….…… 50 14. J'ai pris la parole pendant près de 2
1. Rappel de ma situation à l'époque de 25. Bounifia ne savait pas………...……… 51 heures ………………………..………. 84
ces attentats ……………………..…... 24 26. Un assureur fantôme ………………… 51 15. Le verdict ………………………….…. 84
2. Le prernier attentat (6 marsl987) ….... 24 27. Conclusions sur ce témoignage de 16. Arcini est toujours en prison ……..…. 84
3. Le second attentat (5 juin 1987) …….. 24 Bounifia ………………………..…….. 51
4. Arcini a utilisé sa voiture personnelle 26 28. Témoignage de Bounifia, version Chapitre 12
5. Arcini a-t-il opéré seul? ……….……. 26 janvier 2000 ………………...…….….. 52 Le pourvoi en cassation
6. Le jour de l'attentat, Arcini protégeait 29. Ce qui a pu se dérouler dans ce bar le
1. Je n'étais pas pour ………….……….. 85
Balladur ………………………...……. 27 30 novembre 1987 …………………... 53
2. Arcini dépose un pourvoi …….……… 85
7. Provenance étrange de l'arme du 30. Arcini m'a déconseillé un système de
3. L'avocat, qui avait accepté, se désiste
crime ………………………….……… 27 mise à feu "à bille" ………………….... 54
………………………………………... 85
8. Celui qui a fourni l'arme abattu par la 31. Aucun débris de la bombe ne sera
4. Mon pourvoi, évidemment, rejeté …. 86
suite ….………………………………. 27 présent au procès …………..……….. 55
5. Des journaux ont les attendus avant
9. Des munitions identiques dans 32. Conclusions sur cet "attentat virtuel" .. 55
nous …………………………..………. 86
diverses affaires ……………..……. 29
10. Les munitions qui ont servi au crime Chapitre 8
de Caen ……………………………… 29 Derniers jours avant l'arrestation Conclusion ……………………………... 86
11. Précisions de la presse concernant les I. Vendredi 4 décembre 1987 ……..…... 56
munitions ……………..………….. 30 2. Samedi 5 décembre 1987 (envoi
12. Arcini a peut-être commis des Postface de Carlos ……………… 97
d'une revendication) …………...……. 56
attentats en Corse ……………….…... 31 3. Dimanche 6 décembre 1987 ……..…. 57

Mémoire de Michel Lajoye page 2


Chapitre 1
PREMIERS CONTACTS AVEC ARCINI (1984)

à trou. Le collège avait beau râler, menacer, et tout


1. MON PARCOURS, MON PASSAGE AU FN ET et tout: rien n'y faisait! Ils ne pouvaient quand même
MON "FICHAGE" PAR LES POLICES POLITIQUES pas me forcer à y aller, et encore moins m'attacher
sur la chaise dans une salle de cours pour que j'y

E
n 1984, comme aujourd'hui, les média
présentaient le Front National comme un parti reste... J'avais même le droit à des mises à pied, un
néofasciste, néonazi, et j'en passe. Dès lors, vrai bonheur: je manquais le collège, et, en punition,
puisqu'ils me présentaient ainsi ce mouvement: j'y ai j'étais interdit d'y venir (de toute façon je n'y serais
adhéré de confiance! pas venu...) pendant 3 ou 8 jours. J'étais aussi
Mais voyons avant mon parcours personnel, plutôt (pour)suivi par une assistante sociale et une
sinueux, qui m'a conduit à m'encarter dans ce parti (ré)éducatrice qui, évidemment, ne me voyaient
politique (mon "environnement familial" ne sera jamais: pour ça il aurait d'abord fallu qu'elles
abordé qu'au chapitre 10). m'attrapent...
Je suis né en 1967, le 19 avril, dans la commune Cela a duré ainsi de mes 12/13 ans (1980)
de Le Dézert (environ 500 habitants à l'époque) jusqu'à mes 16 ans (1983). "L'aggravation" a surtout
située dans le canton de Saint-Jean-de-Daye (cela été à partir d'avril 1981 où j'ai eu 14 ans, 1'âge
se trouve entre Saint-Lô et Carentan), dans le minimum pour avoir un cyclomoteur, et je m'en suis
département de la Manche. J'ai vécu toute mon acheté un grâce aux revenus procurés par les
enfance dans cette région à la limite sud du Cotentin. castors... Avec ce véhicule (une petite moto plus
Au niveau scolarité, ce fut très chaotique, mais qu'un cyclo) j'étais très mobile, ce qui a accru mon
seulement à partir du collège. À compter de mes absentéisme scolaire...
12/13 ans, j'estimais que j'avais mieux à faire que de En avril 1983, j'ai eu 16 ans. Par conséquent libre
passer mon temps à bâiller en n'écoutant même pas (outre d'acheter une moto de cylindrée plus grosse)
les professeurs. Et de toute façon pour ce qu'ils de ne surtout plus aller au collège (puisque la
avaient à dire... scolarité/endoctrinement est obligatoire jusqu'à 16
Il y a aussi que lorsque j'étais petit, j'étais ans). Je n'ai pas fait un jour de plus, j'ai donc quitté
anormalement grand pour mon âge... La raison en l'école à 16 ans pile, et même un peu avant puisque
est que j'ai fait ma croissance en avance, et en mon 16 ème anniversaire tombait durant les vacances
conséquence vers mes 12/13 ans, j'avais déjà scolaires de Pâques 1983. À l'époque j'étais en
quasiment ma taille adulte. Je n'ai plus grandi depuis troisième, mais disons que j'étais inscrit à ce niveau,
mes 13/14 ans. Dès lors, je n'avais pas vraiment car dire que j'y étais scolarisé, cela serait très
envie de rester avec des "petits merdeux" de mon exagéré. La dernière année, si je me souviens bien,
âge qui n'étaient même pas à ma taille en plus... Ceci j'ai été malade trois mois d'affilée: le trimestre d'hiver
s'ajoutait au fait, aux dires même de mes où je chassais les castors du Cotentin...
professeurs, que j'avais une maturité précoce. C'est Durant cette période, puisque je fréquentais des
exact, et j'aspirais à d'autres activités/loisirs que ceux gens plus âgés, nous sortions beaucoup, et chaque
dont j'avais l'âge. Je ne fréquentais donc que des jour était un jour de fête... Ce qui me permettait de
personnes plus âgées que moi, des aînées de 4 à 5 vivre ainsi, c'est que j'étais indépendant
ans, parfois plus. financièrement grâce à mes activités de chasse aux
En ce temps-là, mes loisirs étaient surtout axés rats d'eau. À la fin de l'été, début de l'automne,
"nature": pêche (en rivière), plus chasse. Cela avait j'agrémentais en faisant du braconnage à la truite de
aussi un but très lucratif, car j'habitais en bordure du mer. Dans la Vire, la plus importante rivière commune
Cotentin, et l'hiver, dès que les rivières entraient en aux départements de la Manche et du Calvados, il
crue, tous les marais étaient inondés. Dans ces remontait pas mal de truites de mer (et parfois
derniers, à l'époque, c'était plein de rats d'eau (les quelques saumons). Il était aisé de les capturer avec
castors locaux!) très facile à capturer lorsque tout est un filet lorsque les poissons tentaient de franchir, par
inondé puisqu'ils sont obligés de se réfugier sur des les échelles à saumons, les divers barrages de la
îlots. J'utilisais une barque à moteur et je pouvais Vire. Des restaurants m'achetaient les prises un très
ainsi les traquer dans tous les marais du Cotentin. Un bon prix. Les affaires marchaient fort bien...
tanneur m'achetait chaque bête 10 francs. Au début En 1984 (j'avais 16/17 ans) j'étais donc déjà en
des années 80 c'était très rentable, car j'en capturais rupture totale de scolarité depuis près d'une année
en moyenne une trentaine par jour lorsqu'il y avait et peu à peu j'ai changé de fréquentations. Fini les
des crues! beuveries et autres (au bout de 3 à 4 ans, ça
Par conséquent, entre aller à l'école, ou capturer lasse...), il n'était que temps que cela se termine, que
des rats d'eau qui se matérialisaient pour moi en je décroche de certaines accoutumances... J'ai par
argent de poche, c'était vite choisi! Dès l'hiver, dès conséquent mis fin à cette période que l'on peut
que les premières grosses pluies donnaient des qualifier de "baba-cool".
crues: je tombais toujours gravement malade pour la Comme précisé plus haut, c'est à ce moment-là
durée des crues, et de ce fait la scolarité était plutôt (1984) que j'ai adhéré au FN. Ce fut le début de ma

Mémoire de Michel Lajoye page 3


politisation si je puis dire, car auparavant je ne l'étais percée nationale (11%), j'ai quitté ce mouvement. En
pas, du moins je ne m'en étais pas rendu compte, effet, la propagande destinée à conditionner la
alors que je l'étais. . . "masse goye" me l'avait présenté comme
En effet, comme tout petit Blanc confié à néofasciste, néonazi, etc, mais j'ai pu constater, de
l'enseignement soi-disant laïque, mais qui est tout ce l'intérieur, qu'il y avait tromperie sur la marchandise
qu'il y a de plus confessionnel, j'ai été soumis à un que les média vendaient! Donc, ne voyant pas le
embrigadement. Mes professeurs voulaient, et même moindre prémisse de soulèvement armé en
devaient remplir leur mission de fonctionnaires de préparation du côté du FN (et la suite m'a donné
l'État, c'est-à-dire faire de nous tous des moutons raison...), j'ai tout naturellement, et fort logiquement,
incultes, adeptes des religions d'État, que cela soit quitté ce mouvement démocratique, beaucoup trop
l'Antiracisme, les Droits de l'Homme et, bien entendu, légaliste à mon goût.
la sacro-sainte croyance dans le Dogme de la Shoah,
ce Mythe fondateur de nos sociétés actuelles. Ils 2. RENCONTRE AVEC ARCINI
exigeaient (c'était au début des années 80, Je me suis alors dirigé vers d’autres formations
parallèlement à l'arrivée au pouvoir de Mitterrand et réputées plus dures. J’ai ainsi été amené à côtoyer le
l'installation de sa clique! Alors les profs gaucho- responsable local d’un mouvement dont je tais le
socialistes se lâchaient...) que l'on se mobilise pour patronyme. Cette personne avait coutume d’inviter
servir de supplétifs, une sorte de Garde jaune, à ce les militants des départements de la Manche et du
Pouvoir sioniste, ce Grand Frère, c'est-à-dire ce Big Calvados à venir discuter de choses et d’autres. Tous
Brother que tout goy doit aimer et servir. .. mouvements nationalistes confondus, cela nous
J'étais imperméable à cet endoctrinement pro- mettait parfois jusqu’à 5 factieux à table puisque les
sioniste (réaction biologique?), et pour tout dire je démocrates du FN, qui auraient pu renforcer l’effectif,
réagissais même, instinctivement, assez violemment à n’étaient bien sûr pas invités à ces agapes. C’est
cette acculturation. C'est ce qui explique que, par la chez cette personne que j’ai rencontré, en 1984,
suite, en réaction à ce que l'Éducation nationale Christophe Arcini qui venait d’arriver à Caen.
avait voulu m'inculquer, j'ai adhéré au FN (le mal
absolu pour mes profs...) dès qu'il est apparu sur la 3. ORIGINES D'ARCINI
scène politique et que j'ai eu une adresse où le
Christophe Arcini est né en 1961, en Algérie, c’est
contacter.
un pied-noir. Lorsque je l’ai rencontré en 1984, il
J'aurais sans doute adhéré au FN plus tôt (dès
avait 23 ans, ce n’était pas un novice en politique. Il
1983, dès la percée de Jean-Pierre Stirbois à Dreux)
avait un passé activiste. Il était adhérent d’un
si j'avais eu le moyen d'entrer en contact avec. Mais
mouvement nationaliste: l’Œuvre Française. Et je sais
dans le département de la Manche, à l'époque, il
aussi que dans le Nord de la France (là où sa famille
était difficile d'obtenir l'adresse du siège de ce
a été rapatriée), il a fréquenté diverses autres
mouvement. Je n'ai pu avoir un contact que grâce au
formations, notamment le Parti des Forces Nouvelles
qui, au début de 1984, avait eu la bonne idée de
(PFN).
s'indigner (ses employés aux écritures sont payés
pour quotidien Ouest-France cela!) de la création 4. ARCINI FORCÉMENT FICHÉ
d'une section du FN dans le sud du département, et
de mentionner le nom du responsable local. Le jour En 1984, lorsque nous organisions nos
même, je lui écrivais après avoir trouvé son adresse rencontres "œcuméniques", le "coordonnateur"
dans l'annuaire. On m'a répondu et je me suis invitait chacun par téléphone et ce dernier était
encarté.. . forcément sur écoute chez quelques militants (sans
Au FN, j'ai participé à la campagne des élections compter les indics qui renseignaient directement...).
européennes de 1984, collages d'affiches et autres Par conséquent les RG avaient forcément
dans le département de la Manche, notamment sur la connaissance d’une prochaine réunion. Il y avait là
ville de Saint-Lô. Lors de ces actions militantes, à en général 4 à 5 militants, mais la tendance dure de
plusieurs reprises, j'ai subi des contrôles d'identité la région. Ce qui ne pouvait que les intéresser!
opérés par la police urbaine de cette ville. Comme la personne chez qui avaient lieu ces
De fait, pour ma part, dès 1984 (j'avais alors réceptions habitait un pavillon, et que chaque invité
16/17 ans) j'étais forcément fiché aux garait sa voiture devant, il suffisait à un membre des
Renseignements Généraux puisque la police RG (ou autres) de passer dans la rue pour relever les
urbaine, démocratie oblige, transmet numéros des plaques d’immatriculation des véhicules
automatiquement les identités des colleurs d'affiches afin d’en connaître les propriétaires. J’étais le seul à
du FN aux diverses polices politiques et officines de n’avoir pas d’automobile, puisque à l’époque j’étais
police de la pensée. encore trop jeune (j’avais 17 ans, je suis né en avril
De plus, lors de ces diverses activités, j'étais en 1967) pour en avoir une.
compagnie de militants connus et dûment fichés pour Puisque Arcini allait à ces rendez-vous avec sa
leurs opinions nationalistes. Il est évident que les RG voiture et qu’il la garait, comme les autres, bien en
(et autres) ont forcément mis en fiche l'identité du vue devant la maison, il était forcément fiché comme
nouveau venu. activiste depuis, au moins, 1984!
À l'issue de cette campagne des Européennes de Son fichage est d’autant plus certain pour deux
juin 1984 où le FN a réalisé sa première grande autres raisons:
Mémoire de Michel Lajoye page 4
La première est qu’en 1998, des renseignements de découverte d’objet suspect, était envoyée sur
(pris auprès de certains militants et ex-militants des place.1
régions de Cherbourg et de Caen) ont permis Arcini était donc à la disposition du Ministère de
d’établir qu’en 1984/1987 le nom de Christophe l’Intérieur qui, ayant une très haute idée de ses
Arcini était connu de la mouvance nationaliste bas- compétences (il était connu pour faire des miracles),
normande. l’envoyait là où on en avait besoin.
La seconde est qu’en 1984 j’ai participé avec lui, De même qu’il n’était pas simple artificier-démineur
dans la forêt de Fontainebleau, à un "camp" où se puisqu’il assurait également, régulièrement, des
regroupaient divers militants (nous étions plus d’une protections rapprochées comme nous le verrons plus
trentaine!) venus de tous les coins de France. Vu la loin quand sera abordé l’attentat de Caen commis en
proportion d’indicateurs, il est totalement utopique de juin 1987. Lorsque des Ministres d’État (ou autres
penser que les RG n’ont pas eu les identités de tous autorités) faisaient une visite en Normandie, ou dans
les participants qui s’y étaient rendus, comme Arcini, une région où Arcini était détaché temporairement,
avec leur véhicule personnel sans en avoir s’il fallait une protection, c’est lui qui l’assurait pour
préalablement changé les plaques tout ce qui était du domaine des explosifs. C’est ainsi
d’immatriculation… qu’il fréquentait régulièrement les milieux de la
Par conséquent, Arcini était, forcément, fiché en sécurité des hommes politiques.
1984! Christophe Arcini était tout, sauf ce petit employé
Et, probablement qu’il l’était déjà avant 1984 à de la Sécurité Civile de Caen, comme on a tenté, fort
cause de son activisme dans le Nord de la France. logiquement d’ailleurs, de le présenter.
Que cela soit au sein du PFN, ou par la suite de
l’Œuvre Française. 6. LA RÉCUPÉRATION D'ARMES,
Mais, admettons que ce ne soit que seulement en D'EXPLOSIFS, ET AUTRES
1984, en Normandie, qu’il ait été "fiché" par une Pour moi Arcini c’était la relation précieuse, bien
police politique. plus intéressant que les autres militants que je
côtoyais! Car avec lui, au moins, je ne m’ennuyais
5. TRAVAIL D'ARCINI
pas… Entre coller des affiches et distribuer des
À cette époque (1984) Arcini était déjà artificier- tracts, ou apprendre des choses très détonantes
démineur et il venait d’être récemment affecté à Caen avec lui, je n’ai pas hésité!
avec le grade de Contrôleur. Ce qui, aux vues de ses Comme le travail d’Arcini était d’être artificier-
23 ans (il est né en 1961), était élevé. Il n’était démineur et qu’en Normandie c’était encore fréquent
artificier-démineur que depuis 1982. Avant d’être qu’à l’époque il soit mis à jour des armes de la
affecté à Caen il a passé un an au centre de dernière guerre mondiale, cela offrait de nombreuses
déminage d’Arras où ses compétences avaient opportunités. En général lorsque sur une plage, ou
retenu l’attention. dans un champ, voire dans une maison (chez des
Lors du procès de juin 1990, dans la partie "collectionneurs"), il était découvert des obus,
personnalité, il a été dit que l’année où Arcini est grenades, etc, c’était pour lui.
devenu artificier-démineur, il n’y avait qu’un poste à En cas de découverte de ce genre, il arrivait pour
pourvoir pour toute la France. Ce poste a été attribué s’occuper de tout cela, et si c’était transportable, il
à celui arrivé en tête du concours et ce fut Arcini. emportait le tout à la Sécurité Civile de Caen où il
Cela démontre que c’était un grand professionnel de avait un atelier. En général il opérait seul sur un site.
la chose, car finir premier d’un concours national de Il n’y a que sur les gros chantiers où ils venaient à
ce niveau, ce n’est pas à la portée du premier venu! plusieurs et c’était le Contrôleur Arcini qui contrôlait,
La propagande officielle, sur cette affaire, a donc qui conduisait les opérations de déminage.
présenté Arcini comme un vague employé de la Ces dernières permettaient des récupérations très
Sécurité Civile du Calvados, il n’en était rien! Ce intéressantes. Par exemple, lorsqu’il était mis à jour
n’était pas un banal artificier-démineur, mais l’un des de l’armement, seul Arcini voyait combien
artificiers-démineurs les plus cotés de France l’emplacement contenait d’obus, de grenades, de
dépendant du Ministère de l’Intérieur. Il n’était pas mines et choses diverses puisque c’était le seul à
aux ordres de la Sécurité Civile comme cela a été opérer dessus. Et il rapportait, officiellement, à son
claironné trop complaisamment, mais à ceux de la atelier (ou faisait sauter sur place) ce qu’il voulait
Préfecture qui le détachait à la Sécurité Civile! Ce qui bien. Il pouvait en mettre de côté pour lui (et pour
n’est pas tout à fait la même chose… moi), personne ne pouvait le savoir puisque nul
De plus, son affectation en Basse-Normandie n’allait mettre son nez sur les obus et mines pendant
n’était pas sédentaire, il était régulièrement envoyé qu’il les maniait au risque de se faire sauter avec.
en renfort çà et là. Que cela soit en Corse (il y 1
séjournait professionnellement très souvent) ou à En 1998, la Sécurité Civile comptait alors 2.885 membres, dont 1.458
professionnels, tous rattachés au Ministère de l'Intérieur. Mais le Corps
Paris. En 1986, lorsqu’il y a eu la vague d’attentats, il des Artificiers-Démineurs, auquel appartenait officiellement Christophe
fut détaché dans la capitale pour intégrer une Arcini, n'était composé que de 123 personnes réparties dans 19 centres
brigade d’intervention qui à la moindre alerte, en cas régionaux d'intervention se trouvant, en général, au sein des bases de la
Sécurité Civile. Cela fait une moyenne d'un peu plus de 6 hommes par
centre de déminage, ce qui explique qu'en cas de besoin (vague
d'attentats), on "dégarnissait" un centre pour envoyer des renforts vers un
autre.
Mémoire de Michel Lajoye page 5
Il faut bien remettre les choses dans leur contexte Il arrivait aussi quelquefois qu’Arcini soit chargé de
géographique: dans le milieu des années 80 dans pétarder des stocks réformés de l’armée française
les départements du Calvados et de la Manche, il ne provenant notamment de régiments dits de Génie
se déroulait pas de semaine sans que quelque part il matériel. Apparemment l’armée n’avait pas d’artificier
soit mis à jour des vestiges des combats de 1944. compétent. Ils confiaient ce travail à la Sécurité Civile,
Alors cela donne une idée du nombre d’opportunités autrement dit à Arcini. Et évidemment, même
qu’Arcini avait de récupérer pour lui (et pour moi) des prélèvement au passage, si nous en avions besoin.
obus, mines, grenades, etc… Mais, dans ce cas, l’utilisation était plus risquée,
C’est ainsi qu’il y avait, également, moyen de car l’explosif militaire est coupé avec des composants
récupérer aisément des armes de poing ou d’épaule. chimiques permettant d’identifier le numéro du lot.
Du moins suffisamment facilement pour nous équiper. Ainsi, après l’explosion d’une bombe ou d’une
Il était mis à jour régulièrement (que cela soit sur une grenade, à l’analyse scientifique des restes, il est
plage ou en pleine campagne) des caisses (ou des possible de déterminer le numéro du lot d’explosif, et
cantines) qui avaient été enterrées par accident de ce fait sa provenance régimentaire. Ce qui aurait
durant les combats de 1944. Pour cela il suffisait été fâcheux!
qu’un obus (ou une bombe d’avion) tombe à Il n’en était pas de même pour l’explosif de la
proximité d’une caisse quelconque pour qu’elle se Sécurité Civile servant à pétarder, lui était anonyme
retrouve totalement enterrée pour des décennies. quant à sa provenance. C’est pour cette raison que
Puisqu’en général, les armes allemandes, c’était celui-là qui était détourné en priorité.
conditionnées dans des caisses, étaient En conclusion, de très grandes facilités pour
soigneusement emballées dans des papiers spéciaux récupérer certaines choses, mais il n’était détourné
de protection, ou des housses en cuir (pour les que ce qu’il fallait, cela n’aurait servi à rien que l’on
pistolets dans les cantines), plus de 40 ans après les stocke démesurément. Il nous fallait simplement de
caisses et/ou les cantines étaient dans un piteux état quoi couvrir nos besoins.
extérieur, mais à l’intérieur, ce qui s’y trouvait était
encore souvent en bon état. Et même quelquefois à 7. FORMATION QUI M'EST DISPENSÉE
l’état neuf! En plus de cet approvisionnement en matériel, j’ai
Les mises à jour d’armes anglo-américaines bénéficié d’une formation. Car j’ai beaucoup appris
n’étaient pas si payantes, cela dépendait du lieu de avec Arcini dans le maniement des armes et des
découverte. Parfois il y en avait qui contenaient des explosifs.
choses intéressantes. Mais le plus souvent ces armes De par ses fonctions, puisqu’il dépendait du
anglo-américaines avaient été perdues sans Ministère de l’Intérieur, Arcini était aussi destinataire
protection extérieure suffisante, ce qui faisait qu’elles de rapports confidentiels. Ces documents étaient
étaient presque toujours inutilisables 40 ans après. publiés après chaque attentat (en Europe), ou en
Seuls les corps des grenades anglo-américaines cas de menaces précises. Cela faisait le topo sur les
étaient récupérables, principalement les grenades engins employés par divers groupes terroristes. De ce
anglaises Mills, car simples à recycler. Par exemple, fait, j’avais connaissance de tous les "trucs et
pour une grenade, il suffisait de la brosser pour ôter astuces" pour réaliser du piégeage. Je pouvais,
l’éventuelle oxydation extérieure, et, évidemment, de surtout, me servir de l’expérience des autres (et
remplacer la charge explosive vieille de 40 ans (qui prendre en compte les erreurs qu’ils avaient
n’était plus fiable) par une neuve. Idem pour le commises). Dans ces documents, destinés à tous les
système de mise à feu. artificiers du Ministère de l’Intérieur, j’avais aussi les
Je précise, tout de même, que les bonnes commentaires et directives indiquant la meilleure
découvertes en armes de poing et d’épaule étaient façon de neutraliser tel ou tel engin couramment
rares. Par an cela se comptait sur les doigts d’une employé par tel groupe terroriste. Ces rapports me
main! En revanche pour les obus, mines et grenades: permettaient, aussi, de me rendre compte que les
c’était autant que nous en voulions pour ainsi dire, il versions officielles (médiatiques et judiciaires) de
suffisait de se servir! certains attentats des années 80 ne correspondaient
Outre cette possibilité de récupérer des armes et pas du tout avec la réalité! Mais ceci est une autre
des équipements en tout genre de la dernière guerre histoire…
mondiale, il était aisé de se procurer du matériel neuf Je signale, car cela a son importance, que j’étais,
(plastic, détonateurs, etc...). Arcini pouvait en apparemment, le seul "élève" d’Arcini. Mais je n’en
détourner de son atelier sans aucun problème. suis pas certain… Je n’ai jamais eu connaissance
Lorsqu’il allait faire sauter des obus ou des mines qui qu’il ait fait bénéficier d’autres militants de son savoir
avaient été mis à jour, la charge servant à pétarder (et quel savoir!) et il n’approvisionnait pas, à ma
était à son appréciation. Il pouvait, par exemple, connaissance, d’autres activistes en matériel divers
mentionner sur son cahier qu’il avait utilisé 1 kilo pour (et quel matériel!). Mais je ne peux l’affirmer
détruire tel site alors qu’en fait, il n’en avait utilisé que catégoriquement.
800 grammes, le reste était "mis de côté"… Personne
ne pouvait contrôler: c’était lui le Contrôleur! Cet
explosif mis de côté nous servait, en priorité, à
recycler le matériel.

Mémoire de Michel Lajoye page 6


8. ARCINI FORCÉMENT MANIPULÉ OU AGENT néofascistes, tout en étant Contrôleur artificier-
INFILTRÉ démineur du Ministère de l’Intérieur qui l’avait
détaché à la Sécurité Civile de Basse-Normandie. De
Maintenant il faut être logique: Arcini était
plus il assurait la protection rapprochée de Ministres
forcément fiché comme "factieux" (depuis au moins
d’État!
1984, comme expliqué dans ce chapitre à la section
Donc, soit il était manipulé et on le laissait faire
4) et il est totalement farfelu de penser qu’une
en le surveillant de très près quand même pour savoir
personne fichée comme "activiste d’extrême-droite"
qu'il faisait bénéficier de ses connaissances et qui il
ait pu occuper un emploi aussi sensible. Et
approvisionnait en matériel. Soit, tout simplement,
admettons que ce ne soit qu’en 1984 que les RG, ou
Arcini n’était pas un élément nationaliste infiltré, mais
autres, l’aient fiché comme activiste. Dans ce cas,
un agent du Ministère de l’Intérieur chargé d’infiltrer
dès qu’ils ont appris sa profession, ils ont donné
les mouvements nationalistes. Cette dernière
l’alerte! C’est l’évidence même!
hypothèse apparaît aujourd’hui comme la plus
Or, Arcini a continué après 1984 (et il était déjà
plausible.
activiste avant!) à fréquenter les milieux néonazis et

Chapitre 2

PASSAGE À L'ARMÉE

recrutement de Saint-Lô. Après que j'ai accepté l'idée


1. PROCÉDURE D'ENGAGEMENT (mars 1985) de contracter un engagement, le major qui m'a reçu a
téléphoné pour prendre rendez-vous pour les tests

E
n 1985 je me suis engagé dans l’armée. Mais
en fait, initialement, je n’ai jamais eu l’intention que j'ai passés moins de 8 jours plus tard. Ayant été
de m’enrôler dans la milice supplétive de l'US reçu "haut la main" (note 17/20), j'avais le droit à tout
Army, puisque je ne voulais pas servir de sabbat-goy ce que je voulais comme affectation régimentaire, à
à Tsahal! Je désirais juste faire un devancement moi de choisir. Je me suis alors vu énumérer des
d’appel pour être débarrassé du service militaire. régiments, et comme je n'avais pas d'opinion sur le
Cependant, ce n’était pas possible, car en mars sujet, je répondais toujours « Bof, le suivant c'est
1985 j’étais encore mineur et l’on ne pouvait pas quoi? ». Après une vingtaine de « bof... », les nerfs
effectuer de devancement d’appel lorsque l’on avait de l'orienteur ont un peu lâché et il m'a dit qu'il
moins de 18 ans. Mais le Centre de documentation et faudrait que je me décide un peu... Comme à ce
de recrutement de l’armée de terre de Saint-Lô m’a moment-là il était sur 5 ème Régiment d'Hélicoptères de
proposé un engagement de 3 ans, et de faire en Combat basé à Pau, ce fut adopté: direction le
réalité 6 mois comme engagé, de résilier mon contrat Béarn, dans l'Aviation Légère de l'Armée de Terre
au bout de cette période, et de finir les 6 autres mois (ALAT).
du service national (il était d’un an à l’époque) Par conséquent, je pense (mais chacun est libre
comme appelé. Si c’était possible, c’est qu’engagé d'avoir son opinion, je ne fais que relater les faits)
alors que j’étais mineur, je pouvais résilier mon que c'est le hasard qui a voulu que je me sois
contrat au bout de 6 mois (contre 3 mois pour les retrouvé dans ce régiment. Il me semble (pour moi qui
engagés majeurs). ai vécu ces mésaventures) que si l'orienteur s'était
Cependant, ce n'était pas possible, car en mars fatigué plus tôt, ou plus tard, de mes « bof... »,
1985 j'étais encore mineur et l'on ne pouvait pas j'aurais été affecté ailleurs. À moins que ce major n'ait
effectuer de devancement d'appel lorsque l'on avait été machiavélique, et qu'il m'ait fait croire que j'avais
moins de 18 ans. Mais le Centre de Documentation le choix de mon affectation, mais qu'il ait prévu, au
et de Recrutement de l'Armée de Terre de Saint-Lô final, de me faire signer, d'une façon ou d'une autre,
m'a proposé un engagement de 3 ans, et de faire en pour le 5 ème RHC.
réalité 6 mois comme engagé, de résilier mon contrat I1 ne peut être exclu, en effet, que l'on m'ait
au bout de cette période, et de finir les 6 autres mois sciemment envoyé dans cette unité, après qu'Arcini
du service national (il était d'un an à l'époque) ait signalé à ses supérieurs qu'il y avait moyen de me
comme appelé. Si c'était possible, c'est qu'engagé faire contracter un engagement militaire. Il savait que
alors que j'étais mineur, je pouvais résilier mon j'allais me rendre au Centre de Documentation et de
contrat au bout de 6 mois (contre 3 mois pour les Recrutement de l'Armée de Terre de Saint-Lô,
engagés majeurs). puisque je lui en avais parlé. A-t-il agit en
C'était alléchant, car le premier semestre j'avais la conséquence?2
solde des professionnels, le second la misère des Ce qui pourrait faire répondre par l'affirmative à
appelés. En plus je gardais les 45 jours de cette question, c'est une analyse des événements.
permission des engagés. C'était vraiment une bonne
2
affaire qui me convenait parfaitement. Nous verrons plus loin, dans la « Conclusion » de ce récit, qu'Arcini a
fort bien pu être, en réalité, une barbouze opérant pour le compte de la
C'est en mars 1985, le 12 (si je me souviens bien) police politique militaire. Dans ce cas, son statut de fonctionnaire du
du mois, que je suis entré dans ce centre de Ministère de l'Intérieur n'aurait été qu'une "couverture".
Mémoire de Michel Lajoye page 7
C'est un peu comme si l'armée n'attendait que moi ou comptait m’utiliser, me manipuler, pour diverses
presque! I1 suffit de voir avec quelle promptitude j'ai choses.
été engagé, accueilli à bras ouverts! Mais il reste bien Il faut bien voir qu’à cette époque je côtoyais déjà
difficile de dire, de façon affirmative, qu'Arcini a eu Arcini depuis un moment. Et s’il était manipulé, ceux
(ou n'a pas eu) un rôle dans cet engagement. qui tiraient les ficelles savaient qu’il m’en avait appris
Quoi qu'il en soit, le 3 avril 1985, j'étais de beaucoup dans le domaine des explosifs et que je
nouveau au centre de recrutement de Saint-Lô pour m’entraînais souvent avec lui, que cela soit au tir,
signer mon contrat. Ce qui fait qu'entre le 12 mars, lancé de grenades, piégeages complexes, etc. Si
date où je suis entré dans ce centre pour me Arcini n’était pas manipulé, mais un agent infiltré,
renseigner et le 3 avril, jour où j'y signais mon c’est encore pire, car la police politique était, dans ce
engagement, il s'est écoulé 3 semaines (quelle cas, encore mieux informée!
rapidité!). Ce cours délai exclut totalement qu'ils aient À partir de ce moment, la logique aurait voulu que
fait une enquête de moralité sur mon compte. Il faut l’on me dise de faire mon paquetage et d’aller voir
compter trois mois pour une procédure de ce genre ailleurs puisque "l’activisme néonazi" est un motif
et ce n'est que plus tard que je serai (du moins, je d’exclusion de l’armée dite française.
l'interprète ainsi) rattrapé par cette enquête. Or, ce n’est pas ce qui s’est déroulé, bien au
Une fois le contrat paraphé, je me suis rendu à contraire! Car, à l’issue de cette "visite", cela a
Pau, non pas pour être incorporé tout de suite au changé: on s’occupait de moi. Je me retrouvais
5 ème RHC, mais pour commencer par un séjour à la envoyé en formation et en entraînement bien plus
"prestigieuse" École des Troupes Aéroportées souvent que les autres élèves du peloton.
(ETAP) qui se trouve également à Pau. Par exemple les séances d’instruction étaient par
petits groupes (4 à 5 élèves afin de mieux
2. ÉTRANGE VISITE AU PELOTON D'ÉLÈVES personnaliser), chaque groupe tournait sur une
GRADÉS (juin 1985) activité. En moyenne une seule activité poussée par
Début juin 1985, j’étais militaire depuis deux mois, jour et par groupe. Le reste du temps: TIG, c’est-à-
et cela faisait près d’un trimestre que j’avais sollicité dire astiquer les bâtiments. Pour ma part j’étais inclus
un engagement. Soit le délai moyen pour le retour dans plusieurs groupes de façon à être
d’une enquête de moralité. À cette date, j’étais dans continuellement en formation. Ce qui fait que lorsque
l’un des deux Pelotons d’Elèves Gradés de l’ETAP et les autres élèves faisaient une seule activité dans la
je fus demandé dans le bureau du lieutenant du journée, j’en avais fait 4 à 5 en passant d’un groupe
PEG de la 12 ème compagnie, un certain Bellinck. à l’autre. Et l’on ne me passait rien, là où les autres
Une fois entré dans la pièce, j’ai pu voir qu’outre réussissaient moyennement ce qui leur était
Bellinck qui était assis à son bureau, il y avait un demandé, et où les instructeurs s’en foutaient pas
autre lieutenant derrière lui, adossé au mur. Ce mal qu’ils réussissent ou pas, si je faisais une chose
mystérieux militaire m’était inconnu, et il avait les médiocrement, je devais recommencer jusqu’à que
cheveux assez "longs" (trop longs pour appartenir à cela soit parfait.
l’ETAP, ou alors c’était le beatnik de l’école!). Bellinck C’était systématique, dès que j’arrivais sur un
m’a d’entrée dit qu’il avait un "problème de sécurité" terrain d’entraînement (nous étions toujours plusieurs
avec moi, et qu’il avait une "note de sécurité" à élèves à y arriver), la première chose que faisaient les
remplir me concernant. J’en ai dès lors conclu que les instructeurs c’était de repérer celui qui avait
Renseignements Généraux (et autres) avaient bien « Lajoye » écrit sur sa bande patronymique. Ils
fait leur travail, et que j’étais bel et bien fiché comme avaient des consignes de me pousser plus que les
activiste… autres, et à chaque fois j’y avais droit.
Après diverses questions destinées à remplir cette Il y avait forcément une raison à ce "traitement de
note de sécurité, j’ai été invité à disposer. J’ai faveur". D’autant plus que les listes de l’effectif
présumé que cette note ne pouvait avoir été désigné pour tels et tels entraînements venaient
demandée que par la Sécurité Militaire et que ce directement de l’état-major de l’ETAP. En quelque
lieutenant, dans le bureau de Bellinck, en faisait sorte, je peux dire que j’ai eu un entraînement plus
partie. Il n’avait aucun insigne d’unité, il était juste en poussé avec la contrepartie suivante: aucune
treillis, pas de béret ou de képi apparent, et de fait permission et/ou quartier libre. La raison en est que
pas de signe qui m’aurait indiqué d’où il venait. j'étais mélangé à tous les groupes, je passais de l'un
Quant à son nom sur la bande patronymique de sa à l'autre, et je n'étais donc pas mis au repos en
veste, je n’ai pas pu le lire, si tenté que cela ait été même temps que "mon" groupe, puisque je n'étais
son vrai nom en plus. Durant l’entretien que j’ai eu rattaché à aucun. Ainsi, j'étais "isolé" de la troupe.
avec Bellinck ce lieutenant n’a pas dit un mot, il est J’ai mis ce "traitement spécial" (qui a débuté
resté adossé au mur afin de le soutenir… aussitôt après la mystérieuse visite de ce lieutenant)
Ce qui s’est déroulé est très important, car dès sur le compte de mon affectation future. Le 5 ème RHC
juin 1985 j’étais donc repéré officiellement par la est (sur le papier) une "unité d’élite" (ayant connu ce
Sécurité Militaire (cela ne pouvait être que cela!). régiment de l’intérieur, j’en rigole encore!), un des
Tout à partir de cette date doit être vu avec à l’esprit piliers de la Force d’Action Rapide (ça aussi, cela me
que les autorités militaires savaient forcément à qui fait encore bien rigoler!) de l’époque. Alors je pensais
elles avaient à faire, et il ne faut pas exclure que l’on qu’à unité d’élite, entraînements plus poussés.

Mémoire de Michel Lajoye page 8


3. ARRIVÉE AU RÉGIMENT D'AFFECTATION, Quoi qu'il en soit, du coup, vu les conditions de
PUIS DESCRIPTION DE MON TRAVAIL travail et les tâches vraiment pas écrasantes (j'avais
juste à faire travailler les deux dactylos appelés) que
Fin juillet 1985, la promotion en avait fini avec
j'avais dans ce régiment, cela ne me donnait plus du
l'ETAP. Nos examens s'étaient bien déroulés, sauf
tout envie de résilier mon contrat au bout de 6 mois
pour quelques-uns qui furent recalés. Pour ma part je
comme je l'avais prévu initialement.
me retrouvais "major de promotion" (j'ai peut-être
En effet, je n'avais aucune astreinte dans ce
bénéficié d'un petit coup de pouce occulte, mais
service! J'embauchais le matin à 8 heures, pour
comme j'avais bien assimilé les cours dispensés par
débaucher le soir à 17 heures 30 (17 heures le
Arcini et dont j'ai fait état au chapitre 1, section 7, les
vendredi). Travail (ou plus exactement "acte de
examens militaires furent pour moi une "promenade
présence au bureau") du lundi au vendredi. Tous les
de santé"... ). À ce moment, les élèves gradés ont
soirs de libre pour rentrer à l'appartement que j'avais
été ventilés dans leurs unités respectives. Pour moi le
loué dans Pau. Idem pour le week-end: j'étais libre
5ème RHC qui se trouve à moins de 2 kilomètres de
du vendredi 17 heures au lundi matin 8 heures
l'ETAP, sur la petite commune d'Uzein, là où est situé
puisque les Services Techniques ne travaillaient
l'aéroport de Pau.
jamais les week-ends et jours fériés. Ajoutons à tous
Arrivé à la base d'hélicoptères, j'ai été avisé que
ces quartiers libres, les 45 jours de permission par an.
je devais me présenter, immédiatement, au
Plus tous les après-midi que je prenais ça et là après
commandant Drulhe (il était Chef d'Escadron pour
avoir demandé l'autorisation à mon commandant de
être précis), chef des Services Techniques du
rentrer chez moi à midi plutôt qu'à 17 heures 30 (un
régiment.
militaire, c'est avant tout un fonctionnaire...). En
Une fois que je me suis présenté aux ST, j'ai vu le
outre, avantage non négligeable: puisque j'étais au
commandant Drulhe qui m'a informé que je
service d'un officier supérieur, j'étais dispensé d'aller
travaillerais à son secrétariat et que j'étais également
aux divers rapports, ainsi que d'aller faire le guignol
à la disposition des officiers comptables des Services
dans des occasions dont seule l'armée dite française
Techniques qu'il dirigeait.
a le secret.
Partant de là, j'ai intégré ces lieux qui étaient
En conclusion: un emploi plus administratif que
stratégiques dans ce régiment. Ils géraient la
militaire, ou pour mieux dire, une sinécure "faite sur
comptabilité matériel (armes notamment), carburants,
mesure" pour que je ne résille pas mon contrat, et
munitions, parc automobile et d'hélicoptères, pièces
que je reste au sein de l'armée... J'aurais été bien
détachées, etc. Le chef des ST est celui qui gère les
bête de ne pas y rester, car un travail (si je puis
potentiels de vols pour chaque hélicoptère, c'est le
nommer cela ainsi...) aussi reposant, et fort bien
chef technique de toutes les escadrilles volantes, des
payé, je ne risquais pas de trouver cela dans le civil.
ateliers d'entretien, que cela soit des véhicules ou
Cet emploi pépère cadrait mal avec ce que l'on
des aéronefs. Autrement dit, en importance, le boss
avait exigé de moi à I ETAP, où tous les "brevets" et
après le chef de corps et son adjoint!
"diplômes que j'y ai obtenus sont estampillés
En étant au secrétariat du chef des ST, j'étais, en
d'appellations issues des "troupes de choc". Mais le
quelque sorte, une "mémoire" du service, celui qui
5ème Régiment d'Hélicoptères de Combat est,
triait le courrier, et qui répartissait même le travail de
comme son nom l'indique, un régiment de combat,
"frappe" sur les deux dactylos appelés, qui de fait
donc il ne comprenait pas de "groupe de choc"
devenaient mes subordonnés. À ce poste, j'avais
destiné au combat (c'était le nom de l'unité qui était
aussi accès aux comptabilités, aux clés des soutes à
censé terroriser l'ennemi, pas son personnel!).
munitions, aux alarmes, etc. J'occupais dès lors des
Cependant, compte tenu de mon emploi aux
fonctions bien peu compatibles avec mon fichage
Services Techniques, j'avais plus d'occasions que
comme activiste!
tout autre militaire de parfaire mon entraînement.
C'est le moins que l'on puisse dire, car en
J'avais juste à demander à mon commandant si je
occupant cet emploi, j'étais bel et bien un des seuls
pouvais aller faire telle ou telle activité afin de me
militaires du régiment à avoir, à la fois, accès aux clés
divertir. I1 était toujours d'accord et comme cet officier
des diverses soutes (munitions, notamment) et aux
était hiérarchiquement le numéro 3 de l'unité,
alarmes que je pouvais neutraliser! Sans oublier la
personne, hormis le chef de corps et son adjoint,
comptabilité, aisément falsifiable, de tout cela! Ils
n'aurait pu se permettre d'aller à l'encontre de cette
auraient voulu accréditer, par la suite, que je me suis
autorisation accordée par mon chef... Je citerai deux
forcément copieusement servi dans les stocks, qu'ils
exemples de ces facilités qui m'étaient offertes:
n'auraient pas eu à m'affecter dans un autre service
Le premier est qu'en tant que secrétaire du
au sein du 5ème RHC...
service qui établissait les "potentiels de vol" des
Encore aujourd'hui, je me demande pourquoi ils
appareils, les pilotes ne me refusaient jamais un
m'avaient fait affecter au secrétariat des Services
embarquement lorsque j'allais faire de "l'hélico-stop".
Techniques de ce régiment, alors qu'ils savaient pour
Ceci afin de sauter "clandestinement" en parachute
mon activisme (cf. section 2 de ce chapitre)? J'ai du
durant un vol passant au-dessus de la drop zone qui
mal à croire que cette affectation, aux ST du 5ème
jouxtait la base militaire (j'avais réussi à me faire
RHC, fut le fruit du hasard... Ils en attendaient
allouer un équipement militaire "personnel" pour ces
quelque chose, cela semble évident!
sauts).

Mémoire de Michel Lajoye page 9


Le second est que je passais une bonne partie commandant Drulhe, lui-même, qui l’ôtait! Mais je me
de mon temps à faire du tir puisque j'avais la place voyais mal lui demander en quel honneur il faisait
idéale. Au secrétariat des ST, j'assistais, entre autres, cela et s’il n’avait pas bientôt fini…
le comptable carburant qui était aussi le Une chose est cependant évidente: je n’étais pas
munitionnaire (les munitions sont assimilées aux intégré dans l’effectif régimentaire! Officiellement
carburants). Si pour une séance de tir, il était sorti j’étais affecté au 5 ème RHC, mais, au sein de cette
des comptes et déstockés des soutes 10.000 unité, je n’étais pas pris en compte!
cartouches, et si à l'issue de la séance d'instruction, Sur le coup je ne me suis posé quelques
l'officier de tir nous rapportait 8.500 douilles et 1.500 questions pensant que je ne faisais pas l’affaire et
munitions non utilisées, nous ne rentrions pas ces que j’allais être éjecté. Mais il n’en a rien été, et les
dernières en comptabilité. Ceci pour faciliter nos semaines qui passaient me voyaient m’installer. Ce
comptes, ainsi que le conditionnement des munitions n’est que par la suite que c’est devenu clair lorsque
(de façon générale, nous ne reprenions en compte la Sécurité Militaire est venue me voir.
aucun surplus: tout lot déstocké était considéré
comme tiré et devait l'être. Seules devaient nous 5. VISITES OFFICIELLES DE LA SÉCURITÉ
revenir les douilles). S'il y avait du rab, je le prenais, MILITAIRE (fin mars 1986)
passais à l'armurerie prendre une arme J’étais engagé, mais comme tous les militaires
correspondant au calibre des munitions, et en professionnels, j’étais quand même rattaché à un
compagnie d'un appelé (il me fallait bien quelqu'un contingent. Celui de la date de mon engagement,
pour ramasser les douilles éjectées... ) j'allais tirer ce c'est-à-dire le 85/04 qui a été libéré fin mars 1986.
surplus au stand de tir. J'y passais parfois plusieurs Moi aussi, si j’avais résilié mon contact pour redevenir
après-midi par semaine! appelé au bout de 6 mois, j’aurais été libéré fin mars
En conséquence, j'avais certes un emploi pépère 1986 à l’issue de la durée légale de service (12 mois
de bureau, mais je n'étais pas toujours au bureau! à l’époque).
Et, au final, j'avais un entraînement (que j'effectuais Mais au moment où les appelés du contingent
volontairement), ainsi que des séances de tir ou 85/04 rentraient chez eux, de mon côté c’est la visite
autres, sans commune mesure avec ce que j'aurais de la Sécurité Militaire que j’ai eue.
eu en étant dans un "groupe de combat". Ceux qui Cela s’est déroulé un après-midi (je ne me
ont été dans de tels groupes savent de quoi je veux souviens plus de la date, cela devait être vers le 25
parler! Eux qui n'ont lancé, au mieux, qu'une mars 1986), le téléphone a sonné au secrétariat des
grenade, tiré 200 cartouches, n'ont même pas eu le Services Techniques: j’étais demandé au PC. J’y suis
droit à 15 sauts en parachute, et n'ont vu le allé, cela n’avait rien d’anormal, j’y étais demandé
maniement des explosifs que de façon théorique... très fréquemment pour aller chercher des documents
que le colonel (ou son adjoint) voulait remettre au
4. MON NOM DISPARAÎT DE L'EFFECTIF
commandant Drulhe. En arrivant au bâtiment, j’ai
RÉGIMENTAIRE
remarqué, garée devant, une 305 blanche qui avait
Lors de mon affectation aux Services Techniques des plaques d’immatriculation civile. J’ai trouvé
le premier travail que j’ai eu à effectuer fut de mettre anormal qu’une voiture civile soit garée ici puisque
à jour le tableau des effectifs du commandant Drulhe. l’accès de la base était interdit aux véhicules de ce
Sur l’un des murs de son bureau, il avait un genre. Mais je n’ai pas prêté plus attention que cela
gigantesque tableau organigramme de tous les à cette voiture.
services et escadrilles volantes avec indiqué les noms Une fois dans le PC, j’ai été informé que j’étais
des personnels les composant et sur lesquels le demandé dans le bureau du chef de corps adjoint.
commandant avait la haute main. Cela faisait Je pensais que c’était lui qui voulait me voir, mais ce
l’ensemble du régiment. J’ai mis de nouvelles n’était pas le lieutenant-colonel qui était dans son
étiquettes nominatives suite à la ventilation du bureau: c’était un type en civil assis à sa place. Il m’a
nouveau contingent (il y avait toujours quelques fait asseoir aussitôt, prenant un ton jovial. Je trouvais
appelés dans les escadrilles volantes et autres pour très étrange qu’un civil "squatte" le bureau du chef
balayer les hangars), j’ai ôté les noms des "libérés", de corps adjoint. Ce visiteur m’a d'entrée dit qu’il avait
etc. Et, bien sûr, vers le haut de ce grand tableau à parler avec moi, et que nous en aurions pour tout
dans la case Secrétariat des Services Techniques, l’après-midi. J’ai tout de suite pensé RG, puisque tout
au-dessus des noms des deux dactylos appelés, j’ai de même, dans ces moments-là, on y pense…
mis une étiquette avec mon nom, cela allait de soi. Il ne m’a pas dit qui il était, il jouait le mystère, et
Hé bien apparemment non! Car quelques jours j’étais mal placé pour lui demander « À qui ai-je
plus tard, par hasard, je constate que l’étiquette avec l’honneur? », puisque s’il était assis à la place du
mon nom avait disparu. J’en remets donc une numéro deux du régiment, c’est qu’il avait un "certain
puisque quand même, étant celui qui devait veiller à pouvoir" et que ce n’était pas un VRP!
la mise à jour du tableau, cela faisait désordre que le Il a commencé par me poser un tas de questions
seul nom qui manque cela soit justement le mien. qui portaient sur un peu tout, famille, scolarité, etc.
J’ai surveillé cela, et de nouveau quelques jours Mais visiblement il savait déjà tout cela et il me le
plus tard, j’ai vu que l’étiquette avec mon nom était faisait bien voir par des petits commentaires amusés,
encore partie. Il était évident que c’était le notamment en rectifiant lui-même les erreurs ou les

Mémoire de Michel Lajoye page 10


oublis volontaires que je commettais… Toutes ces plus loin avec les missions que j’ai eu à effectuer. Il
questions c’était vraiment la mise en condition pour m’a aussi précisé que, c’est important, l’on ne
me désarçonner, car je me demandais vraiment qui demandait jamais à y entrer, mais que c’était elle qui
était ce type en civil qui savait absolument tout sur recrutait son personnel.
moi: même la moindre bricole lui était connue!. Tout cela faisait que plus nous avancions, plus je
Mais, chose étonnante, s’il savait tout, et s’il a comprenais que je n’étais plus du 5 ème RHC, mais
absolument tout abordé, il n’a pas été question une affilié à la DPSD. Tout devenait clair: l’entraînement
seule fois de politique, de mon activisme notamment. poussé à l’ETAP, le fait que mon nom ne soit pas sur
Pourtant il savait forcément… le tableau organigramme du commandant Drulhe
À un moment, chose certainement que n’avait pas contenant l’effectif technique du régiment, etc, etc. Il
prévu ce mystérieux civil, le lieutenant-colonel3 est devenait évident que lorsque j’étais à l’ETAP j’ai été
venu dans son bureau pour récupérer un dossier. repéré, puis recruté à mon insu. Et en juin 1985,
Comme il me connaissait fort bien, il a eu un lorsque j’étais en PEG à l’ETAP, le lieutenant
commentaire à mon égard et a dû voir que je n’étais mystérieux dans le bureau de Bellinck est sans doute
pas à l’aise. Il s'est alors mis à donner à l’autre, le venu voir, de visu, le repéré.
civil, du « Mon commandant » (le lieutenant-colonel Il faut aussi noter que c’est en mars 1986 que la
l'a-t-il fait exprès pour "griller" mon visiteur?). Ainsi j’ai DPSD est venue au 5 ème RHC. On a donc attendu
su tout de suite que j’étais en face d’un militaire, mais que j’aie accompli la durée légale de service. Ce n’est
en civil. Ce qui pour moi était déjà une indication! J’ai pas pour rien.
tout de suite pensé "Sécurité Militaire" à la place de En effet, à aucun moment je n’ai été placé devant
"Renseignements Généraux"… un choix, ce commandant de l’APSD de Tarbes ne
J'étais d'autant plus conforté dans mon idée m’a pas demandé si je voulais en être, c’était acquis
d'avoir affaire à la SM que j'avais été étonné pour lui. Mais hypothèse que j’aie refusé, que je lui
d'entendre le lieutenant-colonel donner au "civil" du aie dit d’entrée que je n’acceptais pas d’être intégré
« Mon commandant ». Un supérieur, en l'occurrence à une police politique (bien qu’à l’époque je ne
un lieutenant-colonel, ne donne jamais du « mon » à savais pas que c’en était une). Dans ce cas, c’était
un inférieur en grade, en l'état un commandant. Le simple: il est venu me voir fin mars 1986, soit pile au
fait que le lieutenant-colonel l'ait appelé ainsi moment où le contingent 85/04 (auquel j’étais
m'assurait que j'avais en face de moi un rattaché pour ma période légale de service) était
"Commissaire politique" à qui même un lieutenant- libéré. C’est-à-dire à une époque où, moi aussi,
colonel, chef-adjoint d'un régiment, parlait avec la j’aurais dû finir mon service si j’avais résilié mon
plus extrême déférence en n'oubliant pas d'inclure le contrat d’engagement comme j’en avais initialement
« mon » de politesse qu'il aurait refusé à n'importe envie. Il est évident que si j’avais dit « Non » à la
quel autre commandant. DPSD en mars 1986, ils sortaient le fait que j’étais
Après le départ du lieutenant-colonel, cela a été fiché comme "activiste néonazi" et que l’on ne voulait
plus direct, le "civil" a dû se sentir démasqué avec le pas de ça. Mon contrat aurait été cassé, et, comme
« Mon commandant ». La période du jeu des j’avais accompli les 12 mois minimum, le soir même
questions dont il connaissait à l’avance toutes les (ou quelques jours après) j’étais civil. Je pense que
réponses, était finie. Il m’a alors parlé de la Direction c’est uniquement pour cette raison que je n’ai pas
de la Protection, de la Sécurité et de la Défense et il été contacté, officiellement, plus tôt.
s’est présenté comme le chef de l’Antenne de la L’entretien a duré dans les 4 heures quand
Protection, de la Sécurité et de la Défense de la même, et j’imagine que ce fut un tête-à-tête comme
région. Au niveau national c’est une Direction, donc en subissent tous les recrutés.
la DPSD, et au niveau régional des Antennes, par Le lendemain, même procédure que la veille:
conséquent des APSD. Et celui que j’avais devant appel téléphonique au secrétariat des ST pour me
moi c’était le commandant de l’APSD basée à signaler que j’étais demandé au PC. Devant il était
Tarbes, au 35 ème RAP, avec qui l’Antenne partageait garé la 305 blanche de la veille plus une 4 L de la
des infrastructures. même couleur avec elle aussi une immatriculation
Il m’a expliqué ce qu’était la DPSD puisque je civile.
l’ignorais. Comme tout le monde, j’avais entendu Une fois arrivé au PC, pour cette seconde visite,
parler de la Sécurité Militaire, mais sans plus et j’en j’ai vu que nous n’avions plus droit au bureau de chef
étais resté à la dénomination SM. Il m’a appris que de corps adjoint, mais à la salle d’honneur (que l’on
cette dernière n’existait plus depuis novembre 1981, aura toujours pour les entrevues suivantes). Le
que c’était maintenant la DPSD et qu’elle était liée à commandant n’était pas seul, il avait avec lui le
la DGSE. Pour simplifier, il m’a présenté la DPSD chauffeur de la 4L qui me sera présenté comme
comme une version militaire de la DST et des RG étant "l’adjudant-chef Michel" (probablement un
réunis (pas moins!). Mais à aucun moment il ne m’a pseudonyme). Cela a été assez rapide, le
défini la DPSD comme une "police politique militaire", commandant m’a présenté cet adjudant-chef Michel
alors que c’est cela en réalité comme nous le verrons en me disant que cela serait lui mon chef. De là
l’officier a pris ses affaires, et il est parti (pour si peu
3 ce n’était pas la peine qu’il vienne!).
Un dénommé Ladevèze, il est aujourd’hui général. En 1991 il a participé
à l’agression contre l’Irak. Et en 1996/1997 il a eu un commandement Après le départ du commandant, cet adjudant-
"onusien" en Bosnie… chef Michel m’a alors fait savoir diverses choses,
Mémoire de Michel Lajoye page 11
remis des numéros de téléphone, et expliqué que je passait me prendre après déjeuner, et que je devais
resterais au 5 ème RHC, et plus particulièrement aux m’habiller en civil.
Services Techniques, mais dans une sorte "d’emploi Je mentionne, par la même occasion, que le
à mi-temps". Il m’a aussi annoncé que le commandant Février et l’adjudant-chef Michel, je les
commandant Drulhe, chef des ST, aurait pour ai toujours vus en civil, jamais en uniforme. C’était
consignes de me laisser partir selon les directives que une règle à l’APSD: tous les membres devaient y
l’APSD de Tarbes donnerait. venir en civil afin qu’un observateur ne puisse pas
J’ai également appris une information à ce déterminer les unités de provenance des agents.
moment-là, c’est que l’officier dirigeant l’APSD de Cette visite avait pour but de mieux me présenter
Tarbes (donc celui que je connaissais depuis la veille) la maison et surtout de me confier ma première
c’était le "commandant Février". Là aussi, un mission.
pseudonyme à tous les coups.
Je sais que ce commandant Février se faisait 7. PREMIÈRE MISSION (avril 1986)
également appeler "commandant Tillé". Si je le sais Une fois installé, il m’a été apporté un dossier,
c’est que lorsqu’il venait me voir au 5 ème RHC, en celui d’un certain Christian Coutard, habitant la région
même temps, il allait faire le plein de sa 305 aux de Rouen (à Tourville la Rivière pour être précis). Les
pompes régimentaires et sur le bordereau de prise de documents qu’il contenait émanaient des RG. C’était
carburant, il était mentionné "commandant Tillé". le dossier RG de Coutard transmis par cette police
Comme le comptable carburant se trouvait aux politique civile à la police politique militaire qu’est la
Services Techniques, le soutier-pompiste rapportait DPSD. Cette dernière n’avait pas son propre dossier
au secrétariat des ST (donc à moi) les feuilles sur Coutard, et elle prenait pour argent comptant ce
journalières. J’ai pu les consulter et savoir de cette qu’avaient raconté les RG (la guerre des services
façon que le civil chauffeur de cette 305 blanche faisait qu’ils s’intoxiquaient les uns les autres!).
donnait le grade et le nom de commandant Tillé au Il se trouve que je connaissais déjà ce Coutard,
pompiste. La feuille de prise de carburant était puisque Normand j’avais fréquenté un peu tous les
toujours émargée d’une signature "Tillé" à la groupes de Normandie et Coutard en fondait
calligraphie identique d’une feuille à l’autre. Ce qui quasiment un toutes les semaines. Ce type est un
démontrait que celui qui utilisait ce patronyme avait escroc notoire, mais il intéressait la DPSD, et pas
l’habitude de signer ainsi… n’importe quelle antenne, celle de Tarbes! Un sous-
groupuscule de Rouen surveillé par l’APSD de
6. EST-CE UN AGENT DE LA DGSE?
Tarbes au lieu de celle de Rouen, c’était étrange!
Et là j’ouvre une parenthèse, car dans l’affaire du Mais peut-être qu’ils considéraient que le "meilleur"
Rainbow Warrior, il a été cité à plusieurs reprises un pour infiltrer le mouvement de Coutard c’était encore
"commandant Tillé". J’ignore son implication exacte, moi qui le connaissais si bien.
j’avais juste lu ce nom dans une publication. Et il y a J’ai lu le dossier Coutard et ce qui était dit de son
deux solutions: soit le commandant Février était un groupuscule, cela m’a amusé, car connaissant déjà
petit plaisantin qui utilisait un pseudonyme connu ce mouvement, je savais que c’était 3 à 4 tondus et 2
lorsqu’il prenait du carburant ; soit c’est le même pelés, et encore, en comptant très large. Or sur le
commandant Tillé que celui mouillé (c’est le cas de le rapport il y avait une cinquantaine de noms de
dire) dans le plasticage du Rainbow Warrior. Ce qui "membres connus", mais inconnus de moi!
est techniquement possible, la DPSD est liée à la Etrangement il n’y avait pas mon nom. Ainsi, les RG
DGSE, et l’on passe de l’une à l’autre très facilement n’auraient pas su que j’avais fréquenté un temps ce
selon les besoins des missions: opérations en France Coutard? Etonnant quand même et très peu crédible!
ou à l’étranger. La DPSD n’ayant été créée que pour Une fois lu le dossier, ce fut direct: l’adjudant-chef
contourner le fait que le DGSE ne doit opérer, en Michel m’a dit que j’allais retourner en Normandie et
théorie, qu’à l’étranger. m’inscrire au parti de Coutard!
Physiquement, à l’époque, ce commandant J’avoue que c’était la mission facile pour moi,
Février/Tillé était un sosie du cinéaste Claude puisque Coutard je le connaissais déjà. De fait, la
Chabrol. Mêmes lunettes, même "bouille". Il lui DPSD me demandait de faire ce que j’avais déjà
ressemblait tellement qu’à chaque fois que je voyais réalisé, et je n’avais plus qu’à reprendre contact avec
Chabrol à la télévision, cela me faisait rigoler de voir Coutard. Soit la DPSD ignorait (ce qui est douteux!)
mon commandant en train de faire le pitre! Février que je l’avais déjà fréquenté ; soit ils avaient une
avait la cinquantaine lorsque je l’ai connu (1986). autre idée (que j’ignore) derrière la tête.
La seconde visite de la DPSD s’est déroulée sans Toujours est-il qu’aussitôt, c’est-à-dire au tout
que je sache précisément ce que l’on attendait de début avril 1986, direction la Normandie, et là j’ai
moi. Je suis reparti continuer mon service aux ST en admiré la "couverture".
attendant la suite, puisque l’on procédait par En effet, j’étais affecté officiellement au 5 ème RHC,
épisodes. et plus particulièrement aux Services Techniques, je
Je n’ai pas eu à attendre très longtemps, car ne pouvais pas partir comme ça, cela se serait
quelques jours plus tard, un matin, j’ai eu au remarqué. Qu’importe, il y avait les permissions
téléphone l’adjudant-chef Michel qui m’a dit qu’il spéciales, tout était prévu! J’arrivais avec mon carton
de demandes de permission, et je prenais des

Mémoire de Michel Lajoye page 12


congés selon les besoins de la DPSD. Seulement, création d’un "mouvement autonomiste armé" en
les jours ne m’étaient pas décomptés de sur mon Normandie puisque Coutard reprenaient (selon les
temps de permissions normales: je gardais mes 45 RG) des thèmes "régionalistes".
jours de congés par an. Tant et si bien qu’en 1986, Dès fin 1984 (à moins que ce ne soit au début de
ajouté à mes 45 jours de permissions normales, j’ai 1985), l’hebdomadaire Minute avait publié deux
dû être en permission au total une centaine de jours, pages entières sur Coutard en démontrant que c’était
si ce n’est plus! Sans parler des "en stage" (ou un provocateur manipulé par des éléments du Parti
autres prétextes bien vaseux) pour expliquer mes Socialiste pour nuire au FN en particulier et aux
fréquentes absences aux yeux des autres militaires nationalistes en général. Mais apparemment à la
du 5 ème RHC. DPSD ils n’avaient pas Minute (ils fichaient juste ceux
Quant aux frais de mission, c’était couvert en qui le lisaient!). Dommage pour eux, car cela leur
liquide. Il m’était remis une somme suffisante pour aurait évité de perdre 6 mois, d’avril 1986 à octobre
mes déplacements, et au besoin je pouvais 1986 pour apprendre ce que Minute avait publié à la
demander une rallonge si j’en avais été de ma fin de 1984 ou au début de 1985!
poche, ce qui n’est jamais arrivé. Il me n’était pas Si j’ai relaté longuement cette "mission Coutard"
demandé de notes de frais, c’était une relation de c’est que lors de mon arrestation en décembre 1987,
confiance, j’en avais eu pour tant, un point c’est tout. et lors de mon procès en juin 1990, les média et
Je me suis donc inscrit chez Coutard (cotisation même le président de la Cour d’Assises, ont affirmé
payée avec les fonds de la DPSD!), je trouvais cela que j’étais membre du parti de Coutard. Non, je n’en
débile de voir la DPSD surveiller un type aussi étais pas membre, je l’avais infiltré pour le compte de
mythomane, escroc, et j’en passe… J’ai passé un la DPSD, ce qui n’est pas la même chose.
peu moins d’une semaine en Normandie, chez
Coutard en plus, car je le connaissais suffisamment 8. PROBLÈMES IDÉOLOGIQUES
pour qu’il m’invite chez lui. C’était de l’infiltration Tout cela me posait des gros problèmes. Car tout
menée haut la main: directement dans la place! le temps que cela portait sur des opérations
À mon retour, l’adjudant-chef Michel est venu me concernant des individus comme Coutard, cela allait.
voir au 5 ème RHC, toujours au PC, et j’ai fait mon Compte tenu que ce dernier était un indic de
compte rendu. C’est lui qui s’est déplacé, car comme gendarmerie, tout militant de ses sous-groupuscules
je n’avais pas de voiture (j’en aurai une dans les était obligatoirement fiché. De fait, cela ne me posait
semaines suivantes), c’était plus facile que ce soit lui pas de problème de morale de saboter les
qui vienne à Pau, plutôt que moi qui aille à Tarbes. "coutarderies". C’était même plutôt de la salubrité
Par la suite, il y a eu d’autres "opérations publique que d’empêcher ce type de nuire.
Coutard" (ils m’y ont fait aller plein de fois pour vérifier Cependant, si pour Coutard cela ne me posait
parfois des bricoles). La DPSD faisait une fixation sur pas de problème, je savais que tôt ou tard on me
Coutard, c’en était risible puisque, d’après sa fiche, demanderait d’autres choses que je ne pourrai
c’était un indicateur de la gendarmerie de Cléon, en accepter.
Seine-Maritime, et les RG avaient déjà infiltré son Ce qui veut dire que, dès avril 1986, j’ai pris la
mouvement 4. décision de leur "tirer ma révérence" dès que cela
Ainsi, les réunions de son groupe (où nous étions irait trop loin, et qu’ils me demanderaient de faire une
parfois à quatre!) étaient alors couvertes par: les RG chose contraire à mes opinions. Cela sera le cas 6
qui avaient un agent (je n’ai jamais su avec certitude mois plus tard, mais nous n’en sommes pas encore
qui c’était, mais je me doute...), la DPSD qui avait un là…
agent (moi) et Coutard indic de la gendarmerie! Pour le moment, en avril 1986, je ne voyais que
Comme la gendarmerie, c’est militaire, la DPSD aurait des avantages à l’affaire, cela me permettait d’infiltrer
pu passer par la brigade de Cléon pour avoir ses le milieu du renseignement pour voir comment il
renseignements, au lieu de m’envoyer en Normandie. travaillait.
Mais s’ils l’ont fait, c’est qu’il y a une raison. Laquelle?
Mystère! 9. LES AUTRES MISSIONS EN VRAC
En octobre 1986 la DPSD laissera tomber (courant 1986)
Coutard, même la police politique militaire a fini par se
Les autres missions effectuées sont du tout
rendre compte que c’était un provocateur, c’est dire!
venant. Du renseignement en majorité, parfois même
Ils ont mis 6 mois d’enquêtes poussées, de suivis,
à l’étranger, notamment en Belgique, et toujours
d’infiltrations, d’écoutes téléphoniques (nous utilisions
orienté politiquement dans le même sens: lutte contre
un "crédit d’écoutes" de la DGSE pour cela!), etc,
la baîîîte immôôônde!
pour réaliser que ce type était un mythomane et que
J’ai aussi eu le "plaisir" de participer, en avril
ce sont les RG qui avaient intoxiqué la DPSD en
1986, à l’exfiltration d’un mystérieux pilote américain
grossissant démesurément le "danger Coutard". Ils
tombé dans les Pyrénées français et qui avait été
craignaient, d’après ce que j’ai vu dans les fiches, la
récupéré par la gendarmerie d’Oloron-Sainte-Marie.
4 D’où venait ce pilote? Venait-il de Grande-Bretagne
La gendarmerie "tenait" Coutard car il faisait dans le vol et
l’escroquerie. Il n’était jamais inquiété par la Justice: ses bons et se dirigeait-il vers la Libye? Ou, inversement, en
renseignements lui valaient une "protection en or" avec l’oubli total de tout revenait-il? Car détail gênant: cette exfiltration a eu
ce qu’il commettait! C’est dire si c’était un indicateur "de qualité", très lieu la fameuse nuit d’avril 1986 où les USA ont
efficace, pour bénéficier d’une telle rémunération!
Mémoire de Michel Lajoye page 13
bombardé Tripoli pour tenter de tuer le chef de l’État Nous pouvions être pris en photo, filmés, etc, sans le
libyen! Il se pourrait que cet avion, mystérieusement moindre problème!5
écrasé dans les Pyrénées et dont le lendemain des L’entretien a eu lieu vers les 18 heures et a duré
hélicoptères Puma ont été ramasser les morceaux, ait une heure environ. D’entrée j’ai trouvé Février bizarre,
été touché au-dessus de Tripoli par la DCA libyenne ; il ne me tutoyait plus (alors qu’il l’avait toujours fait),
que le pilote pensait rentrer en Grande-Bretagne, mais me vouvoyait. Ou alors il alternait les deux et
mais qu’il ait fini son vol dans les Pyrénées français… faisait parfois du « tu/vous » dans la même phrase.
Très fâcheux! Car la France a toujours juré-craché De la part d’un "pro" du renseignement comme lui,
que les avions américains, partis de Grande- cela m’a étonné. Soit il jouait la comédie du
Bretagne (l’Espagne avait refusé qu’ils partent de "paniqueur" ; soit il paniquait vraiment.
son territoire), n’avaient jamais survolé le sol français. Quoi qu’il en fût, il m’a sorti un baratin (tournant
On imagine l’embarras de Jacques Chirac, alors franchement à la très grosse flagornerie) disant qu’il
Premier Ministre, si à l’aller, ou au retour, un des avait pour moi de "grands projets" (selon son
avions américains s’est écrasé dans les Pyrénées expression). J’ai bien senti qu’il ne contrôlait pas
suite à un problème technique… l’opération qu’il allait m’exposer. Jusque-là toutes les
Mais peut-être que la Libye n’a rien à voir là- missions, c’est lui qui les dirigeait, c’était lui le patron.
dedans, et qu’il ne se soit agi que d’une banale Là c’était évident qu’il ne l’était plus, on lui avait dit
liaison aérienne de l’OTAN entre l’Espagne et la de faire comme ci et comme ça, et cela se voyait qu’il
Grande-Bretagne (ou inversement) ; ou entre ne sentait pas bien l’affaire qui se présentait.
l’Espagne et l’Allemagne (ou inversement). Un pilote Ce que je devais faire est "simple", il m’a dit que je
d’un avion américain en liaison technique a-t-il eu un devais m’inscrire à l’un des deux para-club de Pau
problème au-dessus des Pyrénées et a-t-il dû (celui qui est sur la commune d’Uzein). Ensuite je
s’éjecter? Tout est possible! devais m’y présenter comme "militaire aux idées de
Si le gouvernement français (dont la parole est droite", me faire remarquer comme "extrémiste", pour
sacrée!) a affirmé que les avions américains n’ont reprendre les termes qui m’ont été tenus.
jamais survolé la France, c’est forcément la vérité Ensuite il m’a dit que si tout se déroulait comme
vraie. À peu près au même moment le même prévu, je serais contacté: soit par une jeune femme ;
gouvernement français avait aussi dit sa vérité soit par un homme auquel la jeune femme allait me
concernant le nuage radioactif de Tchernobyl, à signaler. Février a ajouté que ces gens étaient
savoir qu’il n’avait jamais survolé le territoire français! soupçonnés d’être des "recruteurs" de tueurs pour le
Nuage radioactif, avions américains, même vérité compte des GAL 6.
vraie? J’ai fait en sorte de ne rien laisser paraître lorsqu’il
Pour ma part je n’en sais pas plus, si ce n’est que a lâché le terme GAL, mais en réalité, il m’avait scié
suite à cette exfiltration, à laquelle j’ai modestement avec son annonce. Parce que, tout de même, en
apporté ma petite contribution, j’ai changé de chef. 1986, les GAL étaient réputés, surtout dans le Béarn
Avant j’étais "traité" par l’adjudant-chef Michel, par la et au Pays Basque!
suite je le serai directement par le commandant Le tête-à-tête s’est poursuivi et Février a sorti de
Février! Donc: promotion! son attaché-case des photos (du type clichés pris de
loin au téléobjectif par les RG ou autres...) de cette
10. L'AFFAIRE DES GAL (octobre 1986) jeune femme soupçonnée de signaler à d’autres les
En octobre 1986 (vers le 15 du mois) j’ai eu un "mercenaires galeux" potentiels. Il a aussi sorti des
entretien avec le commandant Février, cela aurait dû photos de l’homme soupçonné, puisqu’il ne savait
être un tête-à-tête de routine, mais cela ne l’a pas pas qui des deux allait m’approcher.
été. Pour commencer le lieu de cette rencontre, ce Je n’en sais pas plus, car lorsque j’ai demandé
n’était ni à l’APSD de Tarbes, ni au 5 ème RHC de Pau, « Et après? », j’ai eu pour réponse que l’on aviserait
mais dans un bar: le Henry IV à Pau. J’avoue que à ce moment-là, puisqu’il n’était pas dit que je sois
lorsque j’ai appris qu’il me rencontrerait dans un lieu approché comme on l’avait prévu. Et cela pouvait
public j’ai trouvé que Février tombait dans le mauvais prendre longtemps avant que le poisson ne morde à
film. C’était contraire à la plus élémentaire sécurité, et l’hameçon. Mais, en tout cas, c’était moi l’appât!
il était quand même plus fiable de parler "affaires" J’ai quand même eu un éventail des moyens car
dans un bureau du 5 ème RHC ou de l’APSD de j’ai demandé si je devais fréquenter juste un peu
Tarbes! comme ça le para-club, ou y être tous les week-ends
Finalement j’ai pensé que mon officier traitant et plus. Car, dans ce cas, cela impliquait des crédits
avait certainement quelqu’un à me présenter, une importants dès lors que ce n’est pas gratuit de faire
personne non-militaire qu’il ne souhaitait pas faire des sauts civils en parachute. Il fallait prévoir l’achat
entrer dans une enceinte de l’armée. d’un matériel civil, ou sa location. Février m’a répondu
En réalité Février était seul, il m’attendait à une qu’il y aurait ce qu’il faut. Ce qui m’a confirmé que ce
table, près de la vitrine en plus! Ce qui fait que du
trottoir, du parc public qui était en face, et même de 5
la rue en passant en voiture, nous étions visibles! Peut-être que nous l’avons été! Il n’est pas impossible que Février ait dû
me montrer et me faire écouter à des gens…
6
Ces mystérieux Groupes Antiterroristes de Libération qui liquidaient les
membres de l’ETA et qui étaient, en partie, composés de policiers
espagnols.
Mémoire de Michel Lajoye page 14
n’était pas l’APSD de Tarbes qui "pilotait" l’affaire chance, dès ma première visite, j’ai vu la jeune
puisque, subitement, elle était devenue riche! femme signalée par Février. Je craignais de devoir
Et dans les moyens, le commandant Février a revenir plusieurs fois pour tomber dessus. Ensuite
ajouté qu’il me serait délivré un permis de port cela s’est déroulé très rapidement, je suis allé la voir,
d’arme. Ce détail m’a vraiment fait tiquer, car s’il je lui ai remis une enveloppe en lui disant que j’avais
m’était délivré un permis de port d’arme (donc un cela à lui remettre et je suis reparti.
permis permanent englobant le hors-service), c’est Cette enveloppe contenait des renseignements
que cette mission "puait" un maximum… sur l’APSD de Tarbes, numéros de téléphone,
C’est tout, je n’en saurai pas plus, et même adresses de permanents, d’agents ou d’honorables
aujourd’hui je n’en sais pas plus sur ce qu'on correspondants, également divers numéros de
attendait de moi au final. Après cet entretien, j’ai plaques immatriculation fréquemment apposées sur
repris ma voiture, direction la Normandie, puisque je les voitures civiles utilisées par l’Antenne, etc, etc.
devais "opérer" sur Cherbourg en liaison avec l’APSD J’abordais aussi les GAL et je mentionnais tout ce
locale et je devais, une dernière fois, réaliser une que je savais sur ce qui se préparait en relatant ce
"coutarderie" sur Rouen. Ce qui me laissait quelques qui m’avait été "proposé" par Février. Je précisais
jours pour réfléchir à ce que m’avait dit Février bien qu’une infiltration était en cours. C’est tout, à
concernant les GAL. eux (les GAL) d’en tirer les conséquences et les
conclusions.
11. REFUS DE LA MISSION GAL, JE DÉSERTE J’ai remis et/ou envoyé des choses similaires à
(octobre/novembre 1986) d’autres personnes d’autres groupes ; à des
En fait je n’avais pas beaucoup à réfléchir, car il combattants politiques surveillés par des honorables
était hors de question que j’accepte quelque chose correspondants ou des agents officiels de la DPSD.
de ce genre pour le compte de la DPSD. Ce qui En faisant cela je franchissais plusieurs barrières, non
m’était proposé avait le côté excitant du mystère et seulement je faisais défection de la DPSD, mais en
de l’aventure. C’était quand même autre chose que plus je lui "cassais la baraque" dans un tas
la routine qu’ont les militaires moyens! Beaucoup d’infiltrations en cours, sans oublier que je lui "grillais"
auraient voulu être à ma place, mais au point de vue et même "carbonisais", tous les agents et indics que
idéologique je n’avais pas à accepter cela. Comme je connaissais.
depuis quelques semaines j’en avais de plus en plus Début novembre, le jour où j’aurais dû reprendre
marre de tout cela, puisque appartenir à une police le travail, j’ai téléphoné à deux "collègues" pour
politique militaire ne m’enthousiasmait pas, j’ai par demander, à l’un puis à l’autre, comment il avait été
conséquent décidé de déserter. Seul "choix" que pris le fait que le matin, je n’étais pas de retour. Ils
j’avais! m’ont dit que pour le moment il n’y avait pas
Vers les 25 octobre, j’ai eu un contact d’effervescence, car tout le monde pensait que j’étais
téléphonique avec le commandant Février, je l’ai eu retenu par une mission et que je n’avais pas pu
depuis Cherbourg puisque à ce moment-là j’étais en prévenir. Ces deux collègues m’ont quand même
"renfort" auprès de l’APSD cherbourgeoise conseillé « de ne pas déconner » et de rentrer avant
(infiltration/surveillance des "fafounets" locaux). La que cela ne se remarque. Je leur ai dit que je ne
conversation (dans laquelle Février me tutoyait à rentrerai pas, et que c’était irrévocable.
nouveau) a porté sur diverses choses, notamment les Quelques jours plus tard, j’ai à nouveau
"coutarderies" et c’est là que Février m’a annoncé téléphoné à ces collègues pour "prendre la
que c’en était fini pour Coutard. Je ne devais plus température", et là cela avait changé, c’était
m’en occuper et il m’a dit que je devais rentrer à l’ébullition! Par la suite, lors d’une arrestation,
Pau/Tarbes, car il avait un besoin urgent de moi. Il j’apprendrais que l’on avait mis de très gros moyens
n’a pas précisé pourquoi, mais j’ai présumé que (de gendarmerie, etc), et même les RG (les ennemis
c’était pour les GAL. Bien qu’il se peut que cette héréditaires de la DPSD pourtant...) étaient priés de
"urgence" ait eu une autre raison! donner un coup de main pour me retrouver vite fait
Cependant, je n’avais pas à rentrer tout de suite. pour laver cet affront!
Car, avant de partir en mission en Normandie, j’avais Je n’aurai plus de contact avec ces deux
déposé un congé de 8 jours et ce n’est que début collègues par la suite, mais ce dernier appel
novembre que je devais revoir Février. Mais il ne m’a téléphonique m’a confirmé que la DPSD était sur les
pas revu, puisque je ne suis pas rentré à Pau, ni à dents (cela se comprend!) et que l’on n'avait pas
Tarbes, du moins pas rentré le voir. beaucoup apprécié, c’est le moins que l’on puisse
Alors ma désertion c’est comme l’on veut: elle dire, que d’une part je déserte, mais que d’autre part,
peut être datée de fin octobre 1986 moment où ma je mette en l’air l’opération d’infiltration des GAL! Ainsi
décision a été prise, ou l’on peut la dater de début qu’un tas d’autres actions dont j’avais eu
novembre 1986, époque où ma permission de 8 jours connaissance en "fouinant" dans les archives de
était finie et où j’aurais dû rentrer. l’APSD de Tarbes…
Je suis quand même passé à Pau fin octobre Sans prétention excessive, je peux quand même
(durant le temps de mon congé) pour régler diverses dire que j'ai désorganisé la DPSD pour quelque
affaires. Je suis également passé au para-club temps, car les renseignements détournés, remis à
auquel Février m’avait dit de m’inscrire. J’ai eu de la diverses personnes et/ou groupes, étaient très
importants.
Mémoire de Michel Lajoye page 15
Pour effectuer ces détournements, j'ai profité de la DPSD comptait m’utiliser pour quelque chose.
l'installation récente, par la DPSD dans ses Peut-être me faire commettre des actes criminels afin
Antennes, de terminaux similaires à ce que la d’impliquer l’extrême-droite?
gendarmerie possédait avec son réseau Saphir. Il Je doute quand même qu’ils aient été sincères à
suffisait de pianoter sur le clavier pour avoir des mon égard et me considéraient comme un agent
renseignements sur telle ou telle affaire et/ou comme les autres, à part entière. Il faut bien voir qu’a
personne fichée. Le réseau Saphir de la gendarmerie l’époque, lors de la première approche officielle en
était d'ailleurs inclus dans celui de la DPSD. mars 1986, j’étais à trois semaines de mes 19 ans!
Évidemment les terminaux n'avaient aucun lecteur de Ce qui fait bien jeune pour appartenir de façon
disquettes (il ne s'agissait pas d'ordinateurs, mais active, à ce genre de service spécialisé en
plutôt d'espèces de Minitel) et aucune sortie barbouzeries.
d'imprimante afin qu'un agent "véreux" ne puisse pas De plus, l’utilisation d’un "bleu" pour des missions
détourner en listage ces précieux renseignements... délicates (comme l’était celle contre les GAL!) est
Partant de là, les "cerveaux" de la DPSD étaient contraire à tous les usages! Ces derniers
certains que personne ne pourrait leur pirater des commandent de bien tester le nouvel agent pour
informations. Tout au plus craignaient-ils qu'un agent- éviter les éventuelles "défections". Cette règle de
pirate, ayant réussi à "cracker" les codes base apparaît comme nécessaire. Si elle avait été
d'accès/protection, puisse afficher des pages sur appliquée, l’APSD de Tarbes, et plus généralement
l'écran. Mais à moins d'avoir une mémoire la DPSD, n’auraient pas eu ces déboires. Mais, après
phénoménale, il ne pourrait jamais retenir toutes ces tout, j’étais militaire depuis avril 1985, très bien noté.
pages de données. Ce que les cerveaux n'avaient En mars 1986, après 12 mois de tests militaires, ont
pas prévu, c'est qu'un agent (en l'occurrence moi) démarré les tests DPSD avec les "missions Coutard"
utiliserait un appareil photo et photographierait, en et autres. Puis, comme je donnais pleinement
gros plan, l'écran du terminal sur lequel s'affichaient, satisfaction, après ces classes de 18 mois, le
les unes après les autres, les pages d'informations commandant Février a très bien pu commettre une
confidentielles. erreur d’appréciation en pensant (à tort!) que j’étais
Dès lors, il me fut aisé de faire afficher, entre "bon pour le service".
autres, la liste des indics ou agents infiltrés dans tel Par ailleurs, mon jeune âge devenait, dès lors, un
ou tel mouvement... En réalité ce ne fut pas aussi atout! Car qui aurait pu penser que ce "gamin" était
simple que cela, car chaque indic avait un nom de un agent de la DPSD?
code qu'il fallait "percer", mais j'ai schématisé, pour Quoi qu’il en soit, j’avais la même reconnaissance
que les non-initiés à ces technologies puissent que les autres membres du service, et le même accès
comprendre comment j'ai fait pour détourner ces (limité!) aux archives. Ce qui n’aurait sans doute pas
informations. été le cas s’ils n’avaient pas eu une certaine
Pour conclure ce point, je mentionne que dans les confiance… Certainement pas une confiance
années 80, alors que j'étais encore au collège, puis aveugle, mais une confiance quand même.
par la suite jusqu'à mon départ pour l'armée, j'avais Cependant, je les imagine très bien me faire
coutume d'aller plusieurs heures par semaine dans abattre quelqu’un, ou commettre quelque chose de
un centre informatique. C'est un domaine où je ne similaire, et se mettre à dire après: « Lajoye? On ne
suis pas tombé dedans lorsque j'étais tout petit (car connaît pas! » et c’était parti pour une campagne
cela n'existait pas encore), mais dès que les premiers contre l’extrême-droite accusée, évidemment, d’avoir
micro-ordinateurs sont apparus, je m'y suis intéressé perpétré l’attentat. Avec le recul, nous pouvons
et ai pratiqué. Février le savait (il connaissait tout sur quand même dire que mon recrutement par la DPSD
moi comme expliqué à la section 5 de ce chapitre), et puait vraiment la grosse manipulation.
il aurait dû se méfier de mes compétences en la Cette affaire d’infiltration des GAL, cela n’était,
matière que j'ai mises à profit contre le réseau interne peut-être (je n’en sais rien!), que le prélude à une
de la DPSD... Cette dernière, en plus de sa mission énorme affaire. En effet, en 1991/1992, lors d’un des
de police politique, a celle de veiller à la protection et premiers procès des GAL en Espagne, j’ai suivi un
la sécurité de tout ce qui est lié à la défense, mais peu cela dans les média. Et à la fin de 1986, lorsque
elle n'a même pas été foutue de protéger son propre la DPSD était sur l’affaire, effectivement, des officiels
réseau... La honte des hontes pour elle! de la police espagnole opéraient illégalement en
France.
12. CONCLUSION DU PASSAGE À L'ARMÉE
13. CONTEXTE DE L'ÉPOQUE
J’ai donc été militaire pendant plus de 19 mois de
service actif. De début avril 1985 à novembre 1986. Il faut aussi remettre cette "infiltration des GAL2
Avec 7 mois d’appartenance "officielle" et active à la dans un contexte général d’une époque trouble.
DPSD puisque c’est fin mars 1986 qu’ils m’ont Bien se remémorer ce qui se déroulait dans le milieu
officiellement contacté, mais c’est en juin 1985 qu’ils des années 80.
m’ont apparemment recruté. Certains pourraient se dire, à la lecture de ce qui
Il est évident que rien n’a été fait au hasard, je va suivre, que l’on s’égare de mon affaire, que cela
n’ai pas été enrôlé parce que j’étais "bon élève" à n’a rien à voir, puisqu’elle n’est pas liée aux faits que
l’ETAP, il y a une autre raison. Je suis persuadé que je vais relater. Mais, je pense qu’il est bon de voir,

Mémoire de Michel Lajoye page 16


qu’au final, mon affaire qui peut sembler une depuis plusieurs années. Cette arrestation aurait pu,
manipulation énorme, bien compliquée, incroyable, et même dû, être opérée depuis très longtemps.
est somme toute bien peu de choses! Une banalité, En effet, à Vitry-aux-Loges (Jean-Marc Rouillan et
comparé aux énormes manipulations des années 80! Nathalie Ménigon) deux des quatre membres d’Action
Par exemple, en 1986, les média diffusés en Directe louaient 4.200 francs (une fortune pour
France n’en avaient que pour les otages français du l’époque dans ce coin!) par mois une ferme sans
Liban… Chaque jour, les journaux de la propagande donner l’illusion d’y travailler. Georges Cipriani et
télévisée s’ouvraient sur un message le rappelant! Joëlle Aubron, les deux autres, louaient une autre
Maintenant il est généralement connu, et reconnu, habitation proche. Ce qui, évidemment, ne pouvait
qu’en fait de "journalistes otages", étaient qu’attirer l’attention des indigènes (à l’époque encore
principalement retenus prisonniers des honorables très curieux envers l’étranger à la commune) qui
correspondants de services dont le Mossad! Ce qui devaient se demander qui étaient ces "babas-cool".
explique la mobilisation médiatique qu’il y avait, en Lors de leur arrestation, en février 1987, cela
France, en faveur de certains de ces otages… faisait plus d’un an que Rouillan et Ménigon étaient
En 1986 Pasqua était aussi en grande difficulté, résidents de Vitry-aux-Loges. Ils se faisaient passer
car il y avait dans le pays une vague d’attentats (soi- pour des Belges et roulaient quasiment tous les jours
disant islamistes commis, soi-disant, par le réseau de dans une voiture de location non restituée (donc
Fouad Ali Saleh). Il n’est pas impossible que Pasqua déclarée volée!) immatriculée en Belgique et dont les
ait voulu « terroriser les terroristes » à bon compte. plaques n’étaient même pas maquillées, c’est dire!
Peut-être (ce n’est qu’une hypothèse!) arrêter des On ne me fera pas croire que la gendarmerie de
pontes de la police socialiste espagnole, membres Vitry-aux-Loges, qui voyait passer et repasser la
des GAL, venus sur le territoire français éliminer des voiture devant la brigade, ne s’est jamais demandé
activistes de l’ETA. qui étaient ces "babas-cool" venus de Belgique et
Ce qui me fait penser cela, c’est qu’à cette que les pandores n’ont pas passé la plaque
époque (octobre 1986) j’ai constaté à l’APSD de d’immatriculation du véhicule au fichier des voitures
Tarbes une effervescence de messages et autres. recherchées… Et, comme elle était déclarée volée, il
C’était comme si le Béarn et le Pays Basque étaient a bien fallu qu'on protège ces gens d’AD contre toute
peuplés de tous les services. Il y avait de tout dans arrestation intempestive!
ces communications, de la DST, des RG, de la PJ, et Cette protection est d’autant plus manifeste, que
je sais que le GIGN est même venu dans la région au Vitry-aux-Loges ne se trouve pas très loin des
moins pendant une semaine (les gendarmes étaient Cercottes! Charmant coin perdu du Loiret, mais qui a
dispersés et logés incognito dans des casernes de la pour particularisme significatif d’accueillir le centre
région, dont quelques-uns au 5 ème RHC, à l’hôtel national d’instruction du Service Action de la DGSE!
cadres). Cependant rien ne s’est déroulé. Ils étaient Ce qui veut dire (nous étions en 1986/1987, l’URSS
en attente, mais je ne sais pas ce qu’ils attendaient. existait encore!) que la gendarmerie du Loiret avait
De plus, les GAL je connais un peu, car j’ai côtoyé pour ordre de s’intéresser aux "nouveaux habitants"
en prison des condamnés membres de cette des environs et de vérifier, scrupuleusement, qu’il ne
organisation. Ce que j’ai appris c’est qu’en 1986, s’agissait pas d’agents kagébistes, ou autres, venus
ceux qui opéraient en France étaient de moins en espionner les allées et venues des Cercottes.
moins des "mercenaires", mais de plus en plus des Alors la question n’est pas de savoir si le quartette
hauts placés dans la hiérarchie de la police constituant la branche internationale d’Action Directe
espagnole (ils avaient même sous-traité des missions était protégé, mais: qui était le chef d’orchestre qui le
aux services spéciaux portugais). De quoi gêner aux protégeait?
entournures le gouvernement socialiste espagnol si Quoi qu’il en soit, en février 1987, comme Pasqua
ces gens de la police ibérique s’étaient fait arrêter, et sa bande avaient un besoin très urgent d’amuser
les armes à la main, sur le territoire français! Pasqua l’opinion avec un "succès" dans la lutte contre le
(et d’autres...) y ont forcément pensé afin de faire terrorisme, faute, sans aucun doute, de pouvoir "se
remonter leur côte mise à mal après les attentats en faire" les GAL, on a sifflé la fin de la récréation pour
tout genre de 1986. les quatre de la branche internationale d’Action
Finalement, ce sera la "branche internationale" Directe! Ils avaient déjà "bien servi"! Notamment en
d’Action Directe qui sera sacrifiée et qui fera les frais endossant des attentats commis par d’autres! Je
du besoin d’opération médiatique de Pasqua et sa pense surtout au général Audran, évidemment
bande. Après cette arrestation, la cote de Pasqua abattu par des services spéciaux, mais mis au crédit
remontra, celle de Chirac, le Premier Ministre de d’Action Directe, c’est plus sage…
l’époque, fera de même… En effet, dans son livre Guerres secrètes à
De ce fait, Action Directe n’aura pas été sacrifiée l’Elysée, le capitaine Paul Barril affirme, pages 98 et
pour rien! Car, pour le pouvoir, ce fut un réel sacrifice! 246, que c’est le général Audran qui l’a envoyé en
La branche internationale d’AD c’est le "fameux" Irak. À l’époque, l’Irak était en guerre contre l’Iran.
quatuor mis en place par Pierre Joxe et sans doute Audran avait donné pour mission au capitaine Barril
Gilles Ménage, chef de la Cellule Elyséenne, le d’aller en Irak constituer et instruire des commandos
"Cabinet noir" de Mitterrand. Les quatre d’AD, arrêtés de nageurs de combat afin de "tanner" (l’expression
à Vitry-aux-Loges (Loiret très rural...) le 21 février est du général) les Iraniens! Ce qui veut surtout dire
1987, étaient forcément en liberté très surveillée qu’Audran soutenait bien (très bien même!), à titre
Mémoire de Michel Lajoye page 17
personnel, l’Irak de Saddam Hussein. Car il a Directe qui a exécuté Audran! Puisque les média l’ont
dépêché le capitaine Barril et certains autres affirmé, c’est forcément la vérité vraie…
instructeurs, plus tout le nécessaire, à titre non Si ce général était un bien trop gros gibier pour
officiel! Action Directe, Georges Besse, abattu le 17
Page 98 de son livre, le capitaine Barril révèle novembre 1986, semble, lui, avoir été à la portée du
aussi que, la veille de son assassinat, Audran se groupe. Mais c’est bien plus complexe!
trouvait en Allemagne. Et, comme par hasard, lors du En effet, après l’assassinat de Besse, aussitôt,
retour, arrivé à la frontière germano-française, les 6 avant même la prétendue revendication, les média
(six!) gardes du corps de la DGSE, affectés à la ont tartiné (tant et plus pour faire diversion!) sur le
protection du général, ont reçu l’ordre de lever leur « PDG de Renault lâchement assassiné » par les
dispositif! Ce n’est sûrement pas Action Directe qui tueurs et tueuses d’AD… Or, il semblerait que ce soit
avait le pouvoir d’ordonner à ces six agents de la plus le Georges Besse administrateur d’Eurodif
DGSE de le laisser effectuer le reste du trajet routier (encore un contentieux avec l’Iran, hasard...) qui ait
tout seul! été abattu, que le Georges Besse PDG de Renault…
De même, les quatre isolés d’AD ne pouvaient Et c’est loin d’être acquis que ce soit AD qui ait
pas deviner qu’Audran serait sans escorte, et qu’il abattu Besse!
emprunterait, à coup sûr, la petite route de Comme quoi, dans le milieu des années 80,
campagne sur laquelle il a été abattu! époque où la France avait des otages au Liban
En conséquence, il est clair qu’Audran a été (notamment à partir de 1986, où le gouvernement
abandonné! Et même livré, par la DGSE, à des Chirac voulait à tout prix résoudre le contentieux
tueurs qui n’étaient sûrement pas les quatre d’AD à Eurodif pour aider à faire libérer ces "journalistes"), il
qui ce fut imputé… ne faisait pas bon s’opposer à l’Iran! Ce dernier pays,
De plus, vu sa personnalité (un général avec un je le rappelle, accessoirement soutenu par Israël
passé très "spécial" et encore jeune, pas le genre à dans sa guerre contre l’Irak.
pantoufler au Ministère...) pour qu’il ait arrêté sa À cette époque, des Fatwas (pas vraiment
voiture, sans se méfier (alors qu’il savait que du KGB lancées par les Iraniens...) s’abattaient contre tous
au Mossad on voulait sa peau!), sans prendre son ceux qui posaient un problème dans les relations
arme en main, c’est qu’il faut vraiment que ceux qui entre la France et l’Iran: l’allié de circonstance des
lui ont fait signe de s’arrêter aient eu l’apparence de Israéliens!
l’autorité légitime. Un "vrai-faux" contrôle de la C’en est d’autant plus vrai, que quelques
gendarmerie peut-être… semaines après l’assassinat de Besse, ce fut au tour
Les raisons de l’assassinat de ce général sont de Michel Baroin, PDG de la GMF! Baroin était, lui
principalement liées à la politique au Moyen-Orient. aussi tout comme Besse, un administrateur posant
Page 306 de son livre, le capitaine Barril indique un problème dans le règlement du contentieux
qu’Audran s’opposait à la livraison d’armes à l’Iran! Eurodif! L’avion de Baroin s’est écrasé, sans
Ce sont ces ventes d’armes qui sont connues, dans explication, sur le Mont-Cameroun. Pas de chance!
le grand public, sous l’appellation d’Affaire Luchaire. Pour cet "accident" africain de Baroin, comme
Ces livraisons à l’Iran étaient, soi-disant, destinées à c’était un "accident", on n’a pas eu besoin d’imputer
faciliter la libération des divers otages du Liban (les ça aux quatre de la branche internationale d’Action
fameux "journalistes"...). Elles ont aussi servi à Directe qui pourtant servait à ça et uniquement à ça!
financer le Parti Socialiste! Car la branche internationale d’AD, c’est bien ça:
Comme Audran, Délégué général à l’Armement, un groupe monté de toutes pièces par le pouvoir
s’opposait catégoriquement à la vente de cet politique afin de donner des explications
armement aux Iraniens et que son refus était un veto "rationnelles" à certaines morts survenues dans les
incontournable, cela explique son élimination! C’est années 80.
que certains, comme les Israéliens par exemple, Par exemple, sans Action Directe, comment on
étaient doublement pour ces livraisons. D’une part, ils aurait bien pu expliquer, à l’opinion publique,
soutenaient l’Iran contre l’Irak ; et d’autre part l’assassinat d’Audran? On n’aurait, quand même, pas
plusieurs de ces "journalistes otages" étaient de chez osé dire qu’il s’était suicidé? Bien que ce fut la
eux! version servie au bon peuple afin d’expliquer, en
Donc, le Mossad a sans doute éliminé Audran-le- 1983, la mort du colonel Nut (de la DGSE!) retrouvé
gêneur, et comme la DGSE n’a rien à refuser au dans la neige, sur le bord de la route, dans les Alpes.
Mossad, on a envoyé se faire voir ailleurs les six En 1983 la branche internationale d’AD n’était pas
gardes du corps. Ou, autre hypothèse, le Mossad n’y encore médiatiquement opérationnelle, sinon il ne fait
est "pour rien", et Audran a directement été liquidé aucun doute que le colonel Nut aurait été, comme le
par la DGSE, la DPSD ou un autre service général Audran, abattu par les quatre d’AD! Du
gouvernemental français. À l’époque de l’assassinat, moins: officiellement!
le Premier Ministre de la France n’était autre que le Je sais d’autant plus à quoi m’en tenir sur la
très sioniste Laurent Fabiusida… branche internationale d’AD que je côtoie Georges
Ensuite, une fois l’obstacle supprimé, cet attentat Cipriani, "l’idéologue" des quatre, l’intellectuel du lot,
fut porté au crédit d’Action Directe! Ainsi, pour arrêté à Vitry-aux-Loges en février 1987. Nous
l’opinion publique, l’affaire était claire: c’est Action sommes détenus dans la même centrale et nous
sommes voisins de cellule. Si lui c’est l’intellectuel des
Mémoire de Michel Lajoye page 18
quatre, au secours pour les autres! Ça, capable de permissions, j’avais un reste de congés à prendre de
mettre sur pied une opération visant à abattre un 1985. Ensuite à compter d’avril 1986 avec mon
général du calibre d’Audran? Non mais c’est à mourir "officialisation" à la DPSD, j’étais plus souvent en
de rire! Entre "l’image médiatique" de la branche Normandie qu’à Pau. Par exemple long séjour en
internationale d’AD et "l’image réelle" que j’ai sous les avril, mai, juin et juillet. En août j’ai été en vacances
yeux (et dans le nez, avec les odeurs, vu qu’il trouve durant tout le mois et donc en Normandie. En
que les douches c’est, sans doute, capitalistes- septembre j’y suis revenu en mission pour la DPSD
bourgeois), il y a une différence énorme! Il n’a au moins pendant un total de trois semaines. Puis en
aucune culture militante, ce n’est pas un militant octobre mission à Cherbourg plus congés. Autant
révolutionnaire (il lit uniquement Le Monde, c’est dire dire que j’ai été, au total, quasiment 3 semaines sur 4
les lectures de révolutionnaire...). C’est le parfait en Normandie à partir d’avril 1986, naviguant sans
"déclassé" à qui l'on pourrait faire endosser n’importe cesse sur les routes avec mon véhicule.
quoi. Ce qui a d’ailleurs été fait… Pour donner une idée de cela: la voiture (civile)
La branche dite internationale d’AD ne doit pas neuve que j’ai eue fin avril 1986 et qui me servait
être confondue avec la branche dite lyonnaise d’AD dans tous mes déplacements (aussi bien
qui, elle, était composée de militants révolutionnaires. professionnels que personnels, car je les faisais se
Des combattants respectables puisque tous confondre…) ) avait au compteur, en janvier 1987,
antisionistes 7. Ce qui explique, évidemment, qu’ils plus de 60.000 kilomètres. Ce qui donne une idée de
aient tous été arrêtés très vite (hormis Maxime Frérot ma "sédentarisation" comme secrétaire-comptable
qu’ils ont raté), car en France, tout de même, on ne aux Services Techniques du 5 ème RHC basé à Pau.
plaisante pas avec l’antisionisme! Frérot, l’antijuif,
finalement arrêté en novembre 1987, était traqué, les
ordres étaient de le tirer à vue! Il vivait comme un
clochard dans des caves, pendant que ceux de la
branche internationale pouvaient rouler,
tranquillement, dans le Loiret au volant d’une voiture
belge signalée volée (plaques non maquillées!), tout
en louant (fort cher!) une ferme sans donner l’illusion
de travailler… Mais du moment que ces quatre-là
rendaient des "petits services" en endossant des
attentats commis par d’autres, il n’y avait pas de
problème: une bonne étoile (à six branches!) veillait
sur eux…
C’est donc dans cette ambiance d’attentats
gouvernementaux imputés à d’autres, que j’ai fait
défection et cassé la baraque à la DPSD concernant
diverses affaires. Si j’ignore ce que j’ai fait échouer,
en revanche je sais qu’en cassant la baraque à la
DPSD, en les trahissant, je m’en suis fait des
ennemis jurés, et ma condamnation, c’est eux qui
sont derrière. J’en suis persuadé! À partir de
novembre 1986 ils m’ont "suivi" et ils savaient très
bien ce que je faisais! Ils m’ont même facilité les
choses pour que j’en fasse le plus possible afin que
je sois condamné au maximum.
Nous verrons aussi, au prochain chapitre que,
dans un premier temps, ils ont peut-être retenu
l'option "liquidation" plutôt que condamnation après
utilisation. Mais cela a échoué.

14. DURANT L'ARMÉE, CONTACTS RÉGULIERS


AVEC ARCINI
Durant toute cette période militaire, je n’ai jamais
perdu le contact avec Arcini. À partir d’avril 1985,
date de mon départ pour l’armée, je l’ai moins vu
forcément puisque j’étais à Pau, lui à Caen (ou en
déplacement selon les besoins).
Mais en 1986 on se voyait très souvent puisque à
partir de fin janvier 1986 j’ai pris 5 semaines de

7
Ce qui contraste avec l’idéologue des quatre de la branche internationale
arrêtés à Vitry-aux-Loges! Car, durant un temps, il avait décoré sa cellule
avec des Étoiles de David! Tiens, tiens…
Mémoire de Michel Lajoye page 19
Chapitre 3

UNE LIBERTÉ TRÈS SURVEILLÉE

enfoncé dans cette "résine", mais qu'il y ait eu


1. MA VOITURE QUI PREND FEU défaillance.
J'ai indiqué plus haut, à la fin de la section 13 du Toujours est-il que le garagiste a examiné le circuit
précédent chapitre, qu'il semble bien que j'aie fait électrique de mon véhicule, et tout était en ordre.
l'objet d'une tentative de liquidation… Donc comment se fait-il que le démarreur ait continué
Après ma défection de la DPSD, dans la période à tousser alors que j'avais coupé le contact puisque
qui a suivi, j'ai fait le tour de France des groupes plus j'avais la clé en main? La seule solution entrevue par
ou moins clandestins afin de leur livrer des ce mécanicien, c'est que l'on avait couplé quelque
informations sur la DPSD qui les surveillait. C'est ainsi chose au démarreur, lui procurant une alimentation
qu'en novembre 1986, j'étais "en livraison" chez les qui ne passait pas par le coupe-circuit géré par la clé
autonomistes bretons. Ils m'ont gardé quelques jours de contact. Mais ce quelque chose de mystérieux,
car nous avions sympathisé. nous ne l'avons pas trouvé. Il a pu être ôté
C'est au cours de ce séjour, alors que j'étais en (récupéré!) durant la nuit: pendant que je dormais
compagnie de quelques activistes bretons, que j'ai chez le garagiste, puisque ce n'est qu'au matin que
été invité à rendre visite à "quelqu'un". Nous avons nous avons examiné le véhicule. Il peut aussi s'agir
passé la soirée chez ce "quelqu'un", et au retour je d'un moyen de mise à feu qui s'est consumé comme
me suis arrêté dans une station assez importante cette pâte qui ne laissait aucune trace après
pour y faire le plein de carburant. Au moment de combustion. Difficile de dire ce qu'il en a été puisque
repartir le pompiste s'est mis à hurler dans les haut- nous n'avons récupéré que cette pâte résineuse.
parleurs de la station que j'avais le feu sous ma Quoi qu'il en soit, ce dépanneur, avec ses 30 ans
voiture. J'ai coupé le contact, du moins tenté, car de métier dans la mécanique, m'a assuré que ce qui
j'avais la clé en main, mais mon démarreur tournait s'était déroulé était électriquement impossible sans
toujours (phénomène plutôt étrange!). Il sortait sabotage. La meilleure preuve qu'il m'a fournie, c'est
effectivement des longues flammes de sous le que nous sommes allés chez un ferrailleur pour y
moteur, et même de sous le châssis du véhicule. J'ai acheter un démarreur de remplacement, il l'a monté à
déclenché l'ouverture du capot et avec un petit la place de l'autre, connecté les prises d'alimentation,
extincteur que j'avais à bord, j'ai éteint le sinistre. et sans faire la moindre intervention sur le système
Le démarreur a cessé de lui-même de tousser. La électrique du véhicule: tout a fonctionné
voiture n'a pas brûlé, il n'y eut aucun dégât, les normalement.
flammes n'ont fait que "lécher". Personnellement, tout me porte à croire (mais je
Cependant, je fus quelque peu intrigué par la me fais peut-être des idées...) que l'on a voulu me
taille des flammes! Rien, aucun combustible situé faire sauter dans ma voiture. Cependant, ceux qui
sous le moteur et/ou le châssis, ne pouvait alimenter ont réalisé l'opération ont subi une défaillance de leur
un tel foyer! système de mise à feu. Il semble que cela aurait dû
Nous avons remis le contact du véhicule, mais exploser lorsque j'ai démarré après avoir passé la
sans actionner le démarreur, poussé la voiture et elle soirée chez "quelqu'un". Or cela n'a pas fonctionné,
a démarré. Nous sommes allés chez un garagiste ce n'est que plus loin, lorsque je me suis arrêté à la
(nationaliste breton) ami de mes passagers, et j'y ai station-service, qu'au moment de repartir cela a fait
passé la nuit (l'incendie est arrivé vers les 22/23 long feu en prenant feu justement...
heures). Une chance en tout cas que mon véhicule était
Le lendemain ce professionnel a examiné ce un diesel! Le gazole ne s'enflamme pas facilement!
démarreur, car le véhicule n'avait que 7 mois, cela Si cela avait été une automobile essence, cela
semblait quand même étrange qu'il se soit bloqué auraient remonté les durits jusqu'au réservoir et tout
ainsi et ait continué à tourner alors que le contact sautait. J'explosais dans ce véhicule en compagnie
électrique était coupé (j'en suis certain, puisque de mes passagers. Et, bien sûr, la version officielle
j'avais la clé dans les mains). Après examen dudit aurait été la suivante: « Lajoye s'apprêtait à
démarreur, et du dessous du véhicule, nous avons commettre un attentat en compagnie de membres du
récupéré une sorte de "pâte résineuse" qui FLB, et ils ont explosé avec leur propre bombe qu'ils
s'enflammait lorsque l'on y mettait le feu (nous avons manipulaient » (ainsi la DPSD aurait réglé le
testé!), et qui ne laissait aucune trace après "problème Lajoye" et faisait un joli coup en éliminant,
combustion. Étonnant! S'agissait-il d'un plastic très par la même occasion, des nationalistes bretons...).
spécial qui aurait été défectueux, ou mal amorcé, ce C'est une version de ce genre que l'on a servie en
qui l'a fait flamber/fondre au lieu de août 1986 après que Claude Noblia, ainsi que trois
détonner/exploser? Il faut savoir que le plastic, si on de ses compagnons, aient été tués à Toulon dans
le met dans le feu, fond comme de la pâte (cela l'explosion de leur véhicule.
n'explose pas). Pour faire exploser du plastic, il faut Noblia, ex-militaire de carrière, comme certains de
un détonateur. Il se peut fort bien qu'il y en avait un ses passagers, était l'animateur de SOS France. Il fut
Mémoire de Michel Lajoye page 20
accusé d'avoir perpétré des "attentats racistes". En reste y était: portières, vitres, etc. C’était justement ce
septembre 1986, moins d'un mois après la mort de qu’il me fallait pour mes "travaux pratiques".
Noblia, j'avais lu le rapport DPSD sur cette affaire, Alors en décembre 1986 (au début du mois), j’ai
cela m'avait intrigué, ce n'était pas clair. J'en ai parlé fait mon montage sur une des voitures-épaves dont
à Arcini qui, comme tous les artificiers-démineurs du les portières fonctionnaient parfaitement. L’exercice
Ministère de l'Intérieur, avait reçu un rapport sur le consistait non pas à faire s’envoler des morceaux
sujet. Il m'a affirmé (et tout me porte à le croire) que d’automobile à 300 mètres, mais à faire se déformer
la voiture de Noblia a explosé dans le sens extérieur le châssis de la voiture en des points précis afin que
vers l'intérieur, c'est-à-dire qu'il n'a pas explosé à l’on ne puisse plus ouvrir les portières à cause de la
cause d'une bombe embarquée, mais à cause d'un déformation structurelle. Evidemment, une charge
engin placé sous le châssis de la voiture et qui a auxiliaire faisait s’embrasser le véhicule grâce à son
provoqué l'explosion/embrassement de cette réservoir.
dernière. C’est vraiment du "piégeage scientifique", aucune
Par ailleurs, toutes les actions reprochées à chance d’en réchapper. C’est à ceci que l’on voit
Noblia et ses acolytes avaient été perpétrées avec qu’ils apprennent de bonnes choses dans les écoles
des systèmes de mise à feu pyrotechnique (à d’artificiers-démineurs du Ministère de l’Intérieur, là où
mèche), et la version officielle dit que Noblia a Arcini avait appris cela, puisque c’est lui qui m’a
explosé avec une bombe à système électrique. Donc enseigné l’art de piéger de la sorte les véhicules.
pas le type d'engin utilisé d'ordinaire par les membres Une fois terminé mon rapide montage sur le
de SOS France. "véhicule-test", j’ai mis à feu, et cela s’est déroulé
Pour finir, il est bon de savoir que Noblia et ses comme prévu avec un résultat concluant: impossible
amis sortaient d'une réunion amico-familiale et qu'ils d’ouvrir les portières.
étaient en chemisette, short et sandales! Pas Si j’étais suivi par un service comme la DPSD, ou
vraiment la tenue pour aller déposer des bombes, qui une autre officine de police politique, et qu’ils étaient
plus est avec sa voiture personnelle (car Noblia planqués aux alentours avec des jumelles, ils m’ont
explosé dans son véhicule personnel)8. vu faire mon petit manège. Et je pense réellement
Quoi qu'il en soit, considérons dans mon cas qu’ils étaient dans le coin.
qu'en novembre 1986 la DPSD a voulu me liquider, Ce qui me fait penser cela, c’est que moins d’une
mais cela a échoué. Difficile pour eux de remettre semaine plus tard je suis revenu à cet endroit, car
cela une seconde fois, car il y a des témoins de la j’avais prévu de revenir pour récupérer diverses
première tentative (les nationalistes bretons qui choses sur un des véhicules. Et à mon retour sur les
étaient à mon bord, plus le gérant de la station- lieux, surprise: l’épave que j’avais piégée n’y était
service, plus le garagiste qui a remis le véhicule en plus! Elle avait disparu!
état, ainsi que quelques autres personnes...). La Sur le coup, j’ai pensé à un ferrailleur qui aurait
DPSD ignore si j'ai gardé (ou plus exactement fait embarqué la voiture. Mais c’est illogique, pourquoi il
garder) un échantillon de la fameuse "pâte/résine" aurait pris la carcasse brûlée (donc inutilisable pour
qui disparaissait une fois consumée. Dès lors, s'ils lui) alors qu’à côté il y avait une autre épave en "bon"
avaient remis cela avec plus de succès, la DPSD état?
prenait le risque que des gens exhibent un Finalement, à bien y réfléchir, je ne vois qu’une
échantillon de cette pâte non consumée et solution: les RG (ou la DPSD) me surveillaient, et
récupérée après la première tentative de me faire voyant mon petit manège, ils sont venus, dès que je
exploser... suis parti, pour faire embarquer l’épave de la voiture
pour aller examiner chez eux ce que j’avais fait
2. UNE "VOITURE PIÉGÉE" QUI DISPARAÎT dessus. Et surtout analyser ce que j’avais utilisé
En décembre 1986, soit un mois après que mon comme explosif. Cela ne peut être que ça. Qui aurait
automobile ait pris feu, j’avais réalisé un exercice de pu venir enlever cette carcasse calcinée sinon eux?
piégeage de véhicule dans le cadre de mes "petits Dans les jours suivants, je suis repassé pour voir
entraînements". s’il avait été ôté les autres épaves, et rien du tout,
Près de Saint-Lô il y avait un dépôt d’une elles étaient toujours là. Idem vers le 20 janvier 1987.
ancienne entreprise de transport fermée depuis pas Cela faisait plus d’un mois que j’avais piégé une de
mal de temps, et c’était dans un coin désert. Il y avait ces carcasses et il ne manquait que celle que j’avais
déjà longtemps que les bâtiments avaient été rasés, utilisée.
mais il restait des épaves de deux camions et de Ce qui veut dire qu’en décembre 1986 on m’avait
deux voitures. Les carcasses de ces dernières retrouvé, on me surveillait, et l'on savait de façon
étaient sur cales, il n’y avait plus les roues, mais le certaine que je "jouais" avec des explosifs. On devait
déjà le savoir depuis longtemps puisque cela faisait
8
Pour ceux qui veulent en savoir un peu plus sur cette "Affaire Noblia", je depuis 1984 (depuis que je côtoyais Arcini) que
leur recommande la lecture du numéro 93 (avril 2000) de la revue régulièrement je m’adonnais à ce genre de "travaux
Révision qui contient une étude intitulée « Terrorisme Made in France ».
Elle consacre une large place à mon affaire, mais celle de Noblia y est pratiques".
traitée plus longuement que je ne peux le faire ici (j'écris un mémoire sur Je n’ai jamais entendu parler de cette affaire, mais
mon affaire, pas sur celle de Noblia…). Ceux que cela intéresse peuvent c’est logique! Car, pour eux, en parler cela aurait été
se procurer le numéro 93 de Révision en écrivant à la revue située au 11
rue d'Alembert * F – 92130 Issy-les-Moulineaux. 35 FRF franco de port, avouer qu’ils savaient tout depuis des mois et même
règlement à l'ordre d'Alain Guionnet. peut-être depuis 1984. Dans un procès, si cela avait
Mémoire de Michel Lajoye page 21
été révélé qu’ils savaient tout depuis bien longtemps, ogives de balles logées dans ce qui m’avait servi de
un avocat aurait pu demander: « Pourquoi vous ne cible pour envoyer cela à la balistique.
l’avez pas arrêté avant? Pourquoi l’avoir laissé poser Même si je n’ai jamais remarqué être suivi, ayant
sa bombe? » Réponse: « Pour le faire condamner au été de la DPSD, je sais que les émetteurs que l’on
maximum, évidemment! ». dissimule dans le véhicule de quelqu’un que l’on veut
Car il n’y a pas que cette mystérieuse disparition suivre, c’était très courant en 1986. Il n’y avait plus
d’une voiture piégée. J’avais remarqué des détails qu’au cinéma que, pour les filatures, on "collait au
troublants sur les lieux où j’avais coutume d’aller cul" de la personne suivie. Par conséquent il suffisait
m’entraîner au tir. Sur le coup je n’avais pas prêté à la DPSD de placer un émetteur dans mon véhicule
attention, mais, avec le recul, j’ai compris que lorsque pour le suivre soit en procédure GPS (Guidage Par
j’avais le dos tourné des "fouineurs" venaient, sans Satellite qui indique la position du "bip") ; soit en
aucun doute, voir si je n’avais pas égaré des douilles procédure Radar moins performante, mais assez
éjectées, ou s’il y avait moyen de récupérer des efficace pour localiser la "cible" à quelques centaines
de mètres près.

Chapitre 4

MA PREMIÈRE INCARCÉRATION (janvier 1987)

(par hélicoptère, c’était urgent!) deux "spécialistes ès-


1. L'ARRESTATION extrême-droite"! Notamment un major qui s’y
connaissait bien en "milieux néonazis": il connaissait

L
e 25 janvier 1987, au matin, j’ai été arrêté dans
le département de la Manche par la tout le monde, ou presque! J’ignore d’où venait ce
gendarmerie alors que je me trouvais au volant major, mais il parlait des "activistes connus" en les
d’une voiture (la mienne) contenant des armes. désignant paternellement par leurs prénoms…
En plus j’étais recherché pour désertion (c’était Vraiment le brave papy qui veillait sur ses petits-
d’ailleurs cela le motif d’arrestation). enfants extrémistes… avant de les envoyer en tôle!
La voiture qui contenait les armes était une Seat Il est aussi venu deux fonctionnaires des
Ronda (l’équivalent espagnol de la Fiat Ritmo) diesel Renseignements Généraux, mais la gendarmerie
de couleur bleu azur immatriculée 9597 SM 64 (j’étais était jalouse (ou avait-elle plutôt des consignes de la
domicilié dans les Pyrénées-Atlantiques). DPSD pour limiter les dégâts?), elle voulait me garder
Au niveau armement, il y avait ce qu’il fallait: cela rien que pour elle! Le capitaine a même dit (devant
allait du fusil de guerre à la grenade9. Il y avait aussi moi) au commandant qu’il fallait éviter que les RG
des minuteries (réveils bricolés en système de mise à débarquent car après la gendarmerie risquait de se
feu), sans oublier divers documents (j’y reviendrai trouver dessaisie et ils voulaient garder cette affaire
plus loin). pour eux (pour la minimiser?). Et, effectivement, tout
Il y avait également des moyens radios: talkies- le week-end la gendarmerie m’a gardé rien que pour
walkies. elle, puisque ce n’est seulement que le lundi, en
Divers éléments me font penser que cette toute fin d’après-midi, juste avant de me présenter au
arrestation n’a pas enchanté la DPSD, c’était trop tôt! Parquet, que le duo des RG a pu me voir très
Je n’avais encore rien commis qui pouvait me valoir brièvement. Et encore: sans pouvoir m’interroger
un passage en Cour d’Assises. officiellement, puisqu’il n’y a pas eu de procès-verbal.
Mon arrestation fut un hasard d’après ce que j’ai
2. LE PROCÈS "ARRANGÉ" DE COUTANCES
cru comprendre. Sur cette route 4 gendarmes
(4 août 1987)
opéraient des contrôles de routine. Je pensais
d’ailleurs le passer sans problème exactement Suite à mon arrestation, j’ai été placé, le 26
comme j’en avais passé beaucoup d’autres. Ce qui janvier 1987, en détention provisoire à la Maison
explique que je sois sorti de mon véhicule d’arrêt de Coutances (département de la Manche). Et
normalement. Mais comme le monde est petit, l’un cela sous l’inculpation de détention d’armes. Je
des gendarmes était originaire du même village que devais y attendre le procès.
moi, et… me connaissait! Ce dernier a eu lieu au Tribunal correctionnel de
Très vite ces gendarmes ruraux 10 ont appelé les Coutances le 4 août 1987. J’y ai été condamné à 2
"chefs" en découvrant que cette arrestation pour ans, dont un avec sursis, ce qui faisait qu’avec les
désertion levait une autre affaire eu égard au remises de peine automatiques, j’en avais pris pour 9
contenu de mon véhicule… mois pleins. De fait, compte tenu de la préventive:
Un capitaine est venu spécialement de Caen, un libération pour le 26 octobre 1987.
commandant est arrivé de Saint-Lô, et il fut envoyé C’était un verdict bizarre, je pensais prendre plus.
Car quand même, la voiture contenait beaucoup
9
Pour l’anecdote: c’est le "Contrôleur" Arcini qui, dans le cadre de son d’armes: des armes de guerre notamment dont ils
travail de démineur, s’occupera de désactiver cette grenade. La n’ont pas pu établir la provenance puisque je ne l’ai
gendarmerie la lui fera porter…
10 pas donnée ou plutôt si: « J’ai acheté ces armes à
De la brigade de Saint-Clair-sur-Elle, dans le département de la
Manche. un type que s’appelle José [variante de Momo], un
Mémoire de Michel Lajoye page 22
petit au teint mat, je l’ai rencontré dans un bar à Je pense réellement qu’à Coutances, le 4 août
Pau… » Le pire c’est qu’ils m’ont cru, ou du moins ils 1987, on ne m’a fait condamner que légèrement pour
ont fait semblant de me croire, parce que cela les me faire sortir très rapidement de prison afin que je
arrangeait. passe à l’action le plus vite possible. J’évoquerai au
De plus, il y avait des minuteries de bombes dans chapitre 5 section 14, la visite à la prison d’un
cette voiture! inspecteur. C’était peu après l’attentat de Caen
Alors avec 9 mois de prison, je m’en tirais bien: commis par Arcini en juin 1987 et il venait voir où j’en
trop bien pour que cela soit honnête! étais…
J’ai donc été libéré le 26 octobre 1987, et de la
3. UN PROJET D'ATTENTAT Maison d’arrêt de Caen, car 3 semaines avant ma
Mais je m’en tirais d’autant mieux qu’il n’y avait libération, j’avais été transféré de Coutances à Caen.
pas que les armes et ces minuteries! À croire que "certains" voulaient que je sorte de taule
En effet, dans le véhicule, il avait été découvert à Caen: cela leur éviterait le déplacement jusqu’à
des documents: un repérage complet, démontrant Coutances pour me prendre en filature à ma sortie…
qu’une action était en préparation. Dans ces Lorsque j’ai consulté le dossier du procès
documents, la cible était désignée sous la lettre B, d’Assises jugé à Caen en juin 1990, j’ai pu constater
donc non désignée clairement, et impossible pour un que le dossier de l’affaire jugée à Coutances en août
non initié de savoir ce dont il s’agissait. La 1987, était bel et bien joint au dossier des attentats
documentation retrouvée était le "plan à suivre". Arcini/Lajoye. Mais cette affaire jugée à Coutances
C’était de la logistique pure, un passage en revue de n’a pas été détaillée lors du procès de Caen! Ce qui
tout le matériel nécessaire à l’opération (et le matériel se comprend, car s’il avait été détaillé cette affaire
était dans la voiture!). Il était mentionné la conduite à jugée à Coutances, des gens auraient pu s’étonner
tenir de chacun durant l’opération. Il y avait des qu’un type arrêté au volant d’une voiture bourrée
consignes pour chacun des deux opérants (l’autre d’armes (et il fallait voir l’armement!), contenant
c’était Arcini, hasard...). autant de munitions, équipé de puissants moyens
Ces documents étaient au dossier jugé à radios, renfermant surtout des documents
Coutances, mais je n’ai pas été interrogé démontrant qu’une action était imminente, n’ait
particulièrement sur eux durant l’instruction. J’ai juste effectué que 9 mois de prison et que l’on n’ait pas,
répondu que ce n’était pas des documents sérieux, officiellement, cherché à en savoir plus!
et finalement je n’en ai pas entendu beaucoup
4. VISITE D'UN COLONEL EN PRISON ET
parler. Ils se contentaient, un peu trop facilement, de
DÉMISSION DE L'ARMÉE
ma version disant que c’était une sorte de scénario…
En réalité, seule mon arrestation en janvier 1987 Lorsque j’ai été incarcéré en janvier 1987, j’étais
a fait annuler "l’opération" qui devait avoir lieu dans encore "militaire sous contrat". Celui-ci n’ayant pas
les jours suivants. Car pour passer à l’action, il fallait été cassé après ma désertion, ce qui démontre que
une amélioration météo, il y avait eu pas mal de l’armée m’aimait bien et était prête à me pardonner
neige début 1987 en Normandie et cela rendait ma "petite escapade"… Ce contrat fut cassé après
l’opération délicate. que j’ai signé une démission officielle, car c’est moi
Le fait que durant l’instruction, puis lors du procès, qui ai quitté l’armée et non eux qui m’ont radié des
il n’ait pas été fait une fixation sur ces documents est cadres! J’ai démissionné en mai 1987, soit avant le
pour le moins étonnant. Car quand même, c’était procès de Coutances.
évident qu’ils avaient une grande importance. Malgré L’armée souhaitait, apparemment, que j’aie
cela, au procès, pas un mot et résultat: 9 mois démissionné avant mon passage au Tribunal
effectifs de prison en comptant les remises de peine! correctionnel pour août 1987, mais ce n’était pas un
Soit les juges étaient sympathisants, ce que je préalable, je pouvais refuser m’a-t-on dit.
n’ose évidemment pas penser11 ; soit ils avaient des Celui qui m’a affirmé cela est un militaire venu me
consignes d’y aller doucement pour que je sois vite visiter, il s’agissait d’un colonel, qui, hasard, était de
de nouveau libre de commettre quelque chose de la DPSD (mais j’ignore de quelle Antenne et son
plus intéressant pour la DPSD… identité)! Nous avons évoqué "l’affaire", puis il a sorti
Le procès de Coutances a eu lieu en août 1987, une lettre de démission que je n’avais plus qu’à
soit juste 2 mois après un attentat commis à Caen signer si je souhaitais en rester là (officiellement) avec
par Christophe Arcini (j’aborderai cet attentat au l’armée.
chapitre 5). Territorialement, le Parquet de Coutances C’était une lettre adressée à un général de
dépend de la Cour d’appel de Caen, et, lors de mon Bordeaux12 (dont j’ai malheureusement oublié le nom)
procès, même un juge très bête aurait dû se et ce document manuscrit, officiellement écrit par moi
demander s’il n’y aura pas un lien… (mais que je n’ai fait que signer), demandait que mon
contrat soit cassé "pour raisons personnelles". Il l’a
11
Pour information: le Tribunal était présidé par une femme, une certaine
12
Matho. C’est cette même personne qui en 1996 présidait le Tribunal de Ce qui confirme que je ne faisais guère partie du 5ème Régiment
Caen qui a condamné sévèrement le révisionniste Vincent Reynouard. d’Hélicoptères de Combat de Pau, lieu où, officiellement, j’étais affecté.
Lors d’audiences précédentes, elle avait eu la main lourde contre des En effet, cette unité dépendait à l’époque de la 4ème Division Aéromobile
nationalistes. Cette Matho est une hystérique envers tout ce qui est avec son état-major basé à Nancy, pas à Bordeaux! Donc "mon" général
nationaliste et/ou révisionniste, ce qui n’en rend que plus étonnant qu’en aurait du être à Nancy! Or, pour démissionner, il a fallu que je signe une
1987 elle ait été aussi "arrangeante" avec moi… lettre adressée à "mon" général qui se trouvait à Bordeaux…
Mémoire de Michel Lajoye page 23
été à compter de la date de la lettre que j’ai disponibilité" faite à ma demande. C’est quand même
paraphée, puisque tout était prévu d’avance. C’est le étonnant que dans mon dossier militaire la désertion
23 mai 1987 que je suis redevenu civil. n’apparaisse pas officiellement, et soit simplement
Accessoirement, mais c’est intéressant, j’ai pu voir remplacée par une formule neutre…
en 1987, dans mes états de service, que je suis Quant à une condamnation pour cette désertion,
déclaré militaire du 3 avril 1985 au 23 mai 1987, mais on peut toujours fouiner pour tenter de la trouver!
avec "interruption de service actif" des premiers jours Rien de tel n’apparaît dans mon casier judiciaire!
de novembre 1986 au 25 janvier 1987 (ma désertion En juin 1990, lors du procès aux Assises, un
de la DPSD). Mon contrat a par conséquent été psychiatre mandaté par la "justice" pour examiner le
suspendu dès que mon absence a été constatée, et sujet, est venu à la barre faire son compte rendu.
il a été "réactivé" le jour de mon arrestation par la Comme nous avions discuté de choses et d’autres, je
gendarmerie. Ce qui veut dire que mes mois lui avais parlé de cette désertion (je ne m’en suis
d’incarcération ont compté comme service actif à part jamais caché), et cela avait été inclus dans le rapport
entière dans l’armée! Et, ce qui est incroyable, c’est d’expertise psychiatrique, puis évoqué à la barre par
que durant mon incarcération où j’étais considéré le médecin… Aussitôt le président de la Cour l’a
comme militaire, qui plus est en activité, j’ai touché interrompu pour indiquer: « Mais Lajoye n’a pas
sur mon compte bancaire un virement de solde déserté! ». C’était clair, je n’ai pas déserté, on ne
exactement comme si j’avais été réellement en veut pas en entendre parler! Ce qui se comprend, car
service actif! Et ce ne fut pas une erreur! si l’on évoquait cette désertion, une question
Dans mes états de service, du moins tels qu’ils devenait inévitable: « Pourquoi avez-vous déserté
étaient rédigés fin 1987 (maintenant cela a peut-être alors que vous étiez militaire engagé? ». Cette
été modifié...) le mot "désertion" n’apparaît pas, question aurait dû alors m’être posée! Et,
simplement une "interruption de service actif" entre évidemment, on n’avait pas envie que je commence
novembre 1986 et janvier 1987. Et les raisons de à parler de la DPSD, du commandant Février qui
cette "interruption" n’étant pas indiquées, cela m’avait proposé la mission sur les GAL, etc, etc…
pourrait être médical par exemple, ou une "mise en

Chapitre 5

LES ATTENTATS COMMIS PAR ARCINI (1987)

J’ignore les raisons précises de cet attentat, cela


1. RAPPEL DE MA SITUATION À L'ÉPOQUE DE n’a pas été détaillé plus que ça lors du procès qui a
CES ATTENTATS suivi.

J
e rappelle brièvement ma situation pénale de
3. LE SECOND ATTENTAT (5 juin 1987)
l’époque. Comme précisé au chapitre précédent
4, « Ma première incarcération ». J’ai été Le second attentat fut un délire médiatique, la
emprisonné du 26 janvier 1987 au 26 octobre 1987. raison en est qu’Edouard Balladur, alors Ministre de
Donc lorsque Christophe Arcini, officiellement l’Economie du gouvernement Chirac, effectuait une
fonctionnaire du Ministère de l’Intérieur (il est bon visite officielle en Normandie et il traînait derrière lui
durant ce récit de toujours garder à l’esprit qui était des nuées de journalistes qui ont pu faire des
son employeur officiel !), a commis ses attentats en reportages.
Normandie, j’étais en prison. Ceci à son importance Le 5 juin Arcini avait décidé (ou plus
puisque cela exclut totalement ma participation! vraisemblablement, on lui a "suggéré"!) d’abattre le
propriétaire de l’épicerie Aux épices de l’Atlas à
2. LE PREMIER ATTENTAT (6 mars 1987) Caen. Cette personne, Rahmani Abdeslem Ben Ali,
Le premier attentat connu officiellement (car il y en était (et est peut-être encore) surtout le responsable
a peut-être eu d’autres avant, j’y viendrai plus loin...) local de l’Amicale des Marocains en France.
commis par Arcini a eu lieu le 6 mars 1987, en soirée, Autrement dit une organisation sensible, puisque
de nuit. Cela visait un bar arabe, L’Epoque, à Petit- cette "Amicale" marocaine, à l’image de celle des
Quevilly, près de Rouen. Arcini a tiré avec un pistolet Algériens en France, est là pour encadrer la
Lüger P08 à travers les vitres. communauté immigrée dans l’hexagone! Notamment
Il y a eu un blessé léger, un certain Mohamed "s’occuper" des opposants "exilés" chez nous et qui
Bedani, qui sera partie civile au procès qui suivra. critiquent un peu trop le régime chérifien que
Cet attentat n’a eu aucun impact médiatique, car l’Amicale représente…
le soir même un car-ferry coulait à Zeebrugge et cela D’après ce qui fut débattu lors du procès qui a
faisait la une de la propagande. Mais même s’il n’y suivi, vers les 10 heures 15, lorsque Arcini est entré
avait pas eu ce navire qui a coulé, je ne pense pas dans l’épicerie du Marocain Rahmani, il s’y trouvait
que cela aurait fait beaucoup de mousse ces balles trois personnes: l’une était l’employé, l’Algérien
tirées contre un bar. Abdelkader Moussaoui (le futur mort) ; l’autre un
client, le Tunisien Mohamed Ayari (qui sera partie

Mémoire de Michel Lajoye page 24


civile) ; et la dernière un représentant, un certain Joël ce récit, j’écrirai que le tueur a tiré "un certain
Leconte (qui sera témoin au procès). nombre" de fois, et que les victimes ont encaissé "un
Arcini a sorti un Lüger P08. D’après la version certain nombre" de balles… Car ce dernier point est
officielle (mais peut-on la croire?), c’était la même aussi fluctuant d’un document à l’autre! Par exemple,
arme que celle utilisée pour l’attentat du 6 mars dans l’Arrêt de renvoi, le nombre d’impacts sur
précédent à Petit-Quevilly. Une fois le pistolet en Moussaoui (le mort) est tantôt de 6, plus loin de 4,
main, il s’est adressé au représentant en lui disant: puis cela devient 5! La "justice" sait associer rigueur
« Toi, le Blanc, casse-toi », ce qu’il a fait… Ensuite et précision dans un Acte d’accusation, cela se voit!
Arcini se serait adressé à Moussaoui en lui Quoi qu’il en soit de ces "fluctuations", après avoir
demandant s’il était bien Rahmani. Et, comme l’a tiré "un certain nombre" de coups de feu sur
raconté Arcini par la suite lors du procès, Moussaoui Moussaoui pour le faire s’écrouler au sol, Arcini a tiré
n’aurait rien trouvé de mieux que de répondre sur Ayari, le client, qui s’agitait (paniquait...) et qui
« Oui », qu’il était bien Rahmani! Peut-être a-t-il mal sera donc blessé. Mais le tueur n’achèvera pas au
compris? Moussaoui voulait peut-être dire à son sol Ayari comme il a achevé Moussaoui en lui tirant,
interlocuteur armé qu’il était effectivement dans en pleine tête, "un certain nombre" de balles
l’épicerie de Rahmani… expansives pour lui faire "exploser" le cerveau.
Mais quoi qu’il en soit, Moussaoui a été abattu Le geste de mansuétude envers Ayari démontre
aussitôt puisque le tireur pensait (de bonne foi!) être bien qu’Arcini venait abattre une personne précise, et
en présence de Rahmani! Arcini aurait vu ce dernier non pas "casser de l’Arabe". Sinon Ayari aurait été,
entrer dans son épicerie, mais, au moment des faits, lui aussi, achevé au sol, c’est évident! Si, par
il se serait trouvé dans la réserve. C’est du moins ce hypothèse, le chargeur se trouvait vide, en une
qui fut dit, au procès, y compris par le témoin fraction de temps, le fonctionnaire du Ministère de
Rahmani, lorsqu’il fut débattu des circonstances de l’Intérieur pouvait en engager un nouveau pour
cet attentat. Mais pour ce qui est du dossier officiel, achever ce client… Ce n’est pas un problème
ce dernier affirme, lui, que Rahmani était "absent de matériel qui a fait que ce dernier fut épargné… Il y a
l’établissement" lors de l’attentat. Je ne sais qui et forcément une autre raison!
que croire… Cela voudrait sans doute dire qu’Arcini avait eu
Il y avait (parait-il) une ressemblance physique des consignes très strictes pour ne tuer que la
entre Rahmani et Moussaoui. Cette épicerie n’était personne initialement visée! De ne surtout pas
pas plus éclairée que ça, et comme le tueur portait liquider l’autre Arabe présent! Car moi qui connaissais
des lunettes de soleil très foncées, cela ne lui mon camarade, je peux dire que cet Ayari c’est
auraient pas permis de bien discerner les traits du véritablement le miraculé! Pour qu’Arcini ait laissé
visage de son interlocuteur! De plus, ce dernier derrière lui un témoin (Arabe de surcroît!), il faut
affirmant être Rahmani, il n’y avait pas à avoir de vraiment qu'on lui ait dit de ne pas trucider l’autre
doute! C’est du moins l’explication qu’Arcini a Maghrébin!
donnée, lors du procès, pour "justifier" sa méprise. Et Pour ma part je ne vois que des consignes
je crois que c’est ce qui s’est déroulé! Moralité: quand particulières pour expliquer cette différence de
une personne armée vous demande si vous êtes traitement qui fait que l’un a reçu `"un certain
bien Untel, il faut répondre « Non »! nombre" de balles (dont au moins une en pleine
Avant de continuer le récit de ce crime, j’ouvre tête!) et l’autre juste "un certain nombre"
une parenthèse pour préciser que, pour ce qui est du (apparemment un seul projectile) dans le bras! Arcini,
nombre de coups de feu tirés, c’est fluctuant! Par étant très bon tireur: s’il a atteint le bras, c’est qu’il
exemple dans l’Arrêt de renvoi devant les Assises, visait le bras!
c’est-à-dire l’Acte d’accusation, il est écrit (page 8) Reste à savoir pourquoi il ne fallait pas tuer
qu’Arcini a tiré 8 fois, autrement dit qu’il a vidé son l’autre! Dans cette épicerie, normalement, le meurtrier
chargeur. Je vois mal le très professionnel Arcini aurait dû avoir face à lui Rahmani (celui qui était
commettre une maladresse de ce genre. Car si l’un visé), et Moussaoui (l’employé abattu par erreur). Le
des présents avait sorti une arme (on ne sait premier devait donc, visiblement, être abattu, alors
jamais...), il aurait été fort dépourvu! Puis, plus loin, que le second devait, apparemment, être épargné.
page 13 du même Arrêt, il est dit en parlant du tueur: C’est d’autant plus vrai et démontré, qu’Arcini a
« Lorsqu’il avait tiré 5 à 6 coups ». tué Moussaoui car il l’a confondu avec Rahmani. Et,
Il faudrait savoir! L’assassin a tiré 8 fois en vidant prenant Ayari pour Moussaoui, il a épargné celui-là.
son chargeur (ce qui m’étonnerait beaucoup!), ou 5 à Alors, comme le tireur s’est trompé et a abattu
6 fois? celui qu’il fallait, apparemment, épargner, je me
Compte tenu qu’un Lüger c’est un pistolet, les demande si cette erreur n’explique pas ce qui va
douilles sont éjectées et retrouvées sur le sol. Il était suivre dans ce récit!
dès lors aisé de savoir, précisément, combien de En effet, Arcini a-t-il commis une énorme gaffe? A-
coups furent tirés. Cela ne fait quand même pas très t-il abattu un "honorable correspondant" chargé de
sérieux qu’une consultation du dossier officiel ne surveiller son patron? Rahmani étant le responsable
permette pas de savoir, précisément, combien il y eut local de l’Amicale des Marocains en France
de coups de feu! (organisation étrangère qui intéressait forcément des
Au procès, ils ont affirmé qu’il a été tiré à 5 services), il se pourrait que feu Moussaoui, son
reprises. Alors devant l’incertitude, dans la suite de employé algérien, ait eu pour mission de le surveiller.
Mémoire de Michel Lajoye page 25
C’est très fréquent dans le milieu du Renseignement "modèle rare", d’une couleur spéciale, un mélange
de faire surveiller un patron, "accessoirement" ocre-bronze. C’était, en quelque sorte, avant la mode
responsable d’une association "sensible", par un de actuelle, une automobile dite de série limitée de par
ses employés et/ou associés… sa couleur.
Lorsque cette action fut commise, la presse Plus précisément, le dossier officiel affirme que les
algérienne, notamment le quotidien El Moudjahid, enquêteurs, aussitôt après l’attentat, en ont conclu
organe proche des militaires, a publié des articles que cette Simca 1100 TI était soit l’une de la série
hystériques! Ce n'était quand même pas la première "Terre de Feu" fabriquée en 1977 à très peu
fois qu'un épicier algérien se faisait abattre en d’exemplaires par Simca-Matra ; soit une de la
France. Mais il faut croire que pour celui-là, c'était un gamme "Armagnac" construite à très peu
cas spécial puisque les média proches du pouvoir d’exemplaires également, par Talbot-Simca en 1980.
militaire hurlaient au scandale. Un de leurs agents Comme l’attentat a eu lieu en 1987, soit 10 ou 7 ans,
aurait été abattu lors d'une bavure commise par leurs après la sortie d’usine de ces Simca 1100 TI, cela
collègues français, ils n'auraient pas hurlé plus! donne une idée du faible nombre d’exemplaires qui
Quand on connaît les relations entre l'Algérie et le restaient encore en circulation!
Maroc, il n'est pas du tout extravagant de penser que D’ailleurs le dossier officiel dit bien qu’il n’en restait
ce Moussaoui travaillait pour la Sécurité Militaire seulement que « quelques modèles en
algérienne (qui compte de nombreux agents opérant circulation »… Autant dire que pour utiliser un tel
en France!) et que sa mission consistait à surveiller véhicule pour une action criminelle, il faut être sûr de
son ennemi, le Marocain Rahmani, responsable local son coup!
de l'Amicale des Marocains en France. Le fait qu’Arcini ait utilisé sa voiture personnelle
Seulement, si c’est la bonne hypothèse, cela a dû pourrait passer pour un amateurisme plus
chauffer pour le matricule d’Arcini s’il a descendu qu’excessif. Mais je ne suis pas si catégorique! À
(même par erreur!) un "honorable correspondant" mon avis cela démontre, surtout, qu’il était certain de
(voire un agent!) d’un service quelconque! Cela ne pas se faire prendre! C’est un excès de confiance
pourrait expliquer pourquoi la "protection" du manifeste! Exactement comme en commettent ceux
fonctionnaire n’a pas joué totalement ensuite… qui ont l’habitude d’opérer! La routine finit par faire
Quoi qu’il en soit de tout cela, après avoir commis que l’on ne prend même plus les précautions
son crime, Arcini a abandonné un tract de élémentaires…
revendication sur le sol de l’épicerie, et il l’a quittée Je crois que si Arcini en avait été à ses "coups
pour rejoindre, à pied, une voiture se trouvant à d’essais", il serait allé voler une voiture… Utiliser son
quelques centaines de mètres. automobile personnelle est une bévue que je
Mais, durant sa fuite pédestre, il a été suivi par pourrais admettre si elle avait été le fait d’un abruti
deux hommes, l’un est Macedo Diamentino, l’autre quelconque, mais pas venant d’Arcini! Là non, il ne
est Godfroy Philippe (ils seront témoins au procès). Ils faut pas pousser quand même! Il était beaucoup trop
ont vu le tueur monter dans une voiture: une Simca méticuleux, perfectionniste (il était artificier-
1100 TI de couleur verte et l’ont suivi à bord d’une démineur!), pour faire une connerie aussi grosse.
504. Pour moi c’est bien la preuve qu’il était si sûr de
Arcini, voyant qu’il était filé, a stoppé son véhicule, lui, si sûr de ses protections, qu’il n’a pas jugé
en est sorti, et a ouvert le feu "un certain nombre" de nécessaire de se procurer un véhicule pour
fois sur ses suiveurs. Au moins une balle traversera l’opération…
leur pare-brise. Les poursuivants prendront la fuite Mais qui pouvait bien être ce service qui donnait à
bien rapidement. Mais leurs témoignages permettront Arcini une telle certitude de ne pas être inquiété?
de savoir que le "tueur raciste" s’est enfui dans une C’est là toute la question!
Simca 1100 TI verte.
Comme aucun véhicule de ce modèle n’avait été 5. ARCINI A-T-IL OPÉRÉ SEUL?
signalé volé: la police en concluait, forcément, que La version officielle dit que le meurtrier a agi seul,
l’automobile utilisée ne pouvait être que la voiture mais rien ne prouve qu’il ait réellement agi seul.
personnelle du meurtrier préalablement munie de Certes, les témoins qui ont assisté à la scène et qui
fausses plaques d’immatriculation. ont suivi le tueur, n’ont remarqué personne d’autre.
Partant de là, pour la police, cela devenait très Seulement je connais Arcini, beaucoup trop "pro"
simple (c’était même enfantin!) de retrouver l’auteur pour prendre le risque, en sortant de l’épicerie, de
de cet attentat. Il suffisait de "visiter" tous les tomber nez à nez avec un îlotier faisant le trottoir!
propriétaires d’un véhicule de ce type… Il semble logique que, rue d’Auge, là où se
trouvait l’épicerie, il y ait eu un ou des "guetteurs"
4. ARCINI A UTILISÉ SA VOITURE
prêts à faire le coup de feu afin de couvrir la sortie
PERSONNELLE
d’Arcini s’il était apparu un îlotier attiré par les
Dans cette action, ce qui semble vraiment détonations.
incroyable, c’est qu’Arcini a bel et bien utilisé sa Cela me semble aller de soi, mais rien ne vient
voiture personnelle! Il s’était juste contenté d’en étayer cette thèse. Arcini a pu agir seul, c’était un
changer les plaques d’immatriculation (2612 QJ 14 "pro" et un habitué de ce genre d’opération…
au lieu de 2700 SN 14)! En plus son véhicule était un

Mémoire de Michel Lajoye page 26


6. LE JOUR DE L'ATTENTAT, ARCINI Corse. Mais il aurait (soi-disant...) refusé de donner le
PROTÉGEAIT BALLADUR nom du vendeur. Cependant, la police a pu identifier
que c’était André Franceschi qui avait mis en contact
Le jour où l’attentat de Caen a été perpétré,
l’acheteur avec Serge Costa. Franceschi est décrit
Edouard Balladur, alors Ministre de l’Economie du
comme n’ayant pas assisté à la transaction.
gouvernement Chirac, était en visite en Normandie.
Le dossier officiel nous présente ce dernier
Et… c’est Arcini qui, entre autres, assurait sa
comme un "pompier d’Ajaccio". J’ignore ce que l’on
protection! Car comme je l’ai relaté au chapitre 1
doit entendre par là. Car Arcini, artificier-démineur du
section 5, il faisait également de la protection
Ministère de l’Intérieur, était également détaché à la
rapprochée dans le cadre de son travail de
Sécurité Civile, par conséquent: pompier. Il n’est pas
fonctionnaire dépendant directement du Ministère de
précisé dans le dossier officiel si Franceschi était un
l’Intérieur.
"pompier-flingueur" du calibre d’Arcini…
Cette protection qu’Arcini assurait ce jour-là réduit
J’avoue quand même que cela me semble curieux
à néant les affirmations des "minimisateurs" qui l’ont
cette version officielle, car des armes, notamment des
toujours présenté (et l’on comprend pourquoi!)
Lüger P08, nous en avions suffisamment pour nos
comme un simple employé de la Sécurité Civile de
besoins. J’ai expliqué dans le chapitre 1, section 6,
Caen… Il est rare que l’on envoie de vagues
que l’on pouvait se procurer des armes facilement
employés de Sécurité Civile comme garde-du-corps
grâce au travail de mon coaccusé et à tout ce que la
d’un Ministre d’État! Et plus particulièrement du
Wehrmacht avait laissé!
Ministre de l’Economie et des Finances… Surtout à
Alors je me demande bien pourquoi Arcini aurait
une époque où les menaces terroristes étaient
été dépenser de l’argent (3.000 francs) pour acheter
nombreuses! C’est forcément quelqu’un de
un Lüger à un type (Costa) qui aurait pu lui vendre
particulièrement sûr, au-dessus de tout soupçon, que
une arme "sale", qui avait déjà servi dans une autre
le Ministère de l’Intérieur (à l’époque occupé par les
affaire. Tout cela alors que les armes que l’on pouvait
duettistes Pasqua et Pandraud) avait détaché pour
se procurer par ailleurs étaient sûres au point de vue
protéger ce « Cher Edouard », alors l’ami de 25 ans
passé balistique. Lorsque l’on s’approvisionnait en
de Chirac…
armement dans ce qu’avait laissé la Wehrmacht en
Donc ce 5 juin 1987 c’était Arcini qui, dans le
Normandie, au moins nous n’avions pas le risque de
domaine des explosifs, mais aussi autres, assurait la
tomber sur une arme au passé douteux!
protection rapprochée d’Edouard Balladur. Ce dernier
Dès lors, cet "achat" d’un Lüger alors que ce
témoignera d’ailleurs, par la suite dans un procès-
n’était pas nécessaire matériellement, est pour le
verbal, que l’artificier que lui avait détaché le
moins étonnant. Il y a forcément une autre raison
Ministère de l’Intérieur était effectivement présent à
(que j’ignore!) au fait que ce soit ce Costa, via
l’heure.
Franceschi, qui ait fourni l’arme du crime.
Arcini devait rejoindre Cherbourg pour prendre en
Je précise que Franceschi n’a pas été inculpé
compte Balladur à 13 heures. Moussaoui a été
pour les affaires ayant eu lieu en Normandie, et qu’il
abattu à Caen vers 10 heures 15. Compte tenu qu’il
n’était pas cité comme témoin au procès de Caen.
faut environ une heure trente pour faire Caen-
J’ignore, de ce fait, ce qu’il est devenu par la suite.
Cherbourg en voiture, le tueur avait largement le
En écrivant cela, je me pose des questions sur son
temps d’abandonner chez lui sa Simca 1100, de se
sort, eu égard à ce qui suit…
changer et de prendre son véhicule de service pour
se rendre à Cherbourg. Pour ce faire il devait partir, 8. CELUI QUI A FOURNI L'ARME ABATTU
au plus tard, un peu avant 12 heures de Caen pour PAR LA SUITE
être à 13 à Cherbourg. Au besoin il pouvait utiliser sa
sirène et son gyrophare amovible pour gagner En effet, Serge Costa, celui-là même qui aurait
Cherbourg plus rapidement et être à l’heure à son fourni le Lüger à Arcini, a ensuite été retrouvé abattu!
rendez-vous ministériel. Il est écrit dans l’Arrêt de renvoi devant les
En conclusion, c’est très important pour la suite, la Assises en tout et pour tout ceci: « Serge Costa a
protection de Balladur ne constituait en rien un alibi été tué par balle le 18 février 1987 »! Rien de plus!
pour l’heure du meurtre de Moussaoui. D’après certaines sources privées, ce Costa aurait
été abattu dans un attentat revendiqué par le FLNC
7. PROVENANCE ÉTRANGE DE L'ARME DU (j’ignore le canal, mais à l’époque ce n’était pas
CRIME encore trop canalisé) au motif que cela aurait été
une… barbouze ! Comme le FLNC a parfois
Maintenant voyons la provenance de l’arme du
revendiqué (ou l'on a revendiqué pour lui) tout et
crime de Caen. C’était un Lüger P08, et d’après la
n’importe quoi, Costa a peut-être été abattu par
version officielle de cette affaire, il est dit qu’Arcini
d’autres… Ce n’est pas parce que la version officielle
s’est procuré cette arme en Corse où il séjournait
dit FLNC que je crois que c’est le FLNC qui l’a
souvent pour son travail. Il l’aurait achetée à un
exécuté…
certain Serge Costa, via André Franceschi. Il n’est
Le plus étrange, c’est qu’aux audiences, lors du
donné aucune date quant à l’achat de cette arme!
procès de Caen en juin 1990, l’assassinat de Costa
Plus précisément, le dossier officiel affirme que
n’a pas été détaillé! La Corse a quand même été
suite à son arrestation, Arcini a accepté de révéler
évoquée pour la provenance de l’arme, il a même été
que le Lüger était une arme achetée 3.000 francs en
Mémoire de Michel Lajoye page 27
cité le nom de Costa, mais pas ce qui lui est arrivé que ses services avaient pu déterminer que c’était
après. Costa qui avait "vendu" l’arme à Arcini ; que ce
J’avoue que cela m’a étonné: celui qui, dans la dernier l’avait achetée lors d’une mission de
version officielle de cette affaire, fournit à Arcini l’arme déminage en Corse ; et que c’était un pompier qui
qui a servi à tuer Moussaoui s’est lui-même fait avait mis en contact les deux hommes.
abattre, et ce n’est pas évoqué, en détail, aux Le témoignage sous serment d’Etcheberry est
audiences?! Pas un avocat des parties civiles pour légèrement différent de la version se trouvant dans le
faire un bel effet de manche avec ça?! Et l’avocat dossier officiel ! Dans ce dernier, il est précisé
général ainsi que le président de la Cour: muets sur qu’Arcini a collaboré, et indiqué que l’arme venait de
ce point! Il y avait quand même de quoi faire frémir Corse (cf. section précédente de ce chapitre). Or,
l’assistance avec « ce témoin [un complice? Un dans son témoignage, Etcheberry, le chef des
“donneur d’ordres" peut-être?] devenu gênant » enquêteurs, à, au contraire, affirmé qu’Arcini fut muet
prestement, et fort opportunément, supprimé! comme une carpe: rien à en tirer sur la provenance
Certes, Costa a été tué avant les attentats de l’arme. C’est pour le moins contradictoire!
commis en Normandie, cela exclut sa participation. Suivons le témoignage du commissaire Etcheberry
Mais je soupçonne Arcini de ne pas en avoir été à qui fut la version servie aux jurés lors du procès, le
ses coups d’essai! Costa a très bien pu être un président de la Cour félicitant même le policier pour la
complice pour d’autres actions. précision de sa déposition…
De plus, c’est le 18 février 1987 (sauf erreur dans Lors de ce (faux) témoignage Etcheberry a
la date figurant dans le dossier officiel) que Costa fut pourtant oublié de préciser un petit détail: Costa est
liquidé, et c’est le 6 mars 1987 que le premier mort assassiné! Dès lors, la provenance de ce Lüger
attentat connu en Normandie fut perpétré. Un peu est un grand mystère qui a été résolu en faisant,
comme si, avant de commencer, on avait supprimé sans doute, appel aux sciences occultes: puisque
un "témoin gênant", voire liquidé une barbouze selon ce policier, Arcini refusait (soi-disant!) de révéler
récalcitrante qui refusait de collaborer à cette où il a eu l’arme, et puisque Costa était déjà mort, il a
opération (ou une autre)… bien fallu recourir à la divination, voire au spiritisme
En tout cas, il est totalement surréaliste que l’on en faisant tourner les guéridons pour "faire parler" le
n’ait pas précisé, lors du procès, que le fournisseur mort Costa!
de l’arme du crime a été lui-même abattu, alors que En effet, dans cette version d’Etcheberry, c’est
c’est dans le dossier! Si au procès, l’assassinat de quand même surnaturel que la police ait pu savoir
Costa n’a pas été détaillé, c’est qu’il ne devait pas que c’est le mort qui a "vendu" (à quelle date?) l’arme
être détaillé, c’est é-vi-dent! Donc, si cela ne devait à quelqu’un qui n’a "rien voulu révéler2… Arcini
pas être abordé, c’est qu’ils ont quelque chose de habitait Caen, sa famille dans le Nord, rien ne le liait
très important à nous cacher. à la Corse! Hormis son travail de fonctionnaire du
Pour ma part, je n’aurais pas lu dans l’Arrêt de Ministère de l’Intérieur! Puisque effectivement, son
renvoi devant les Assises que Costa a été lui-même employeur l’envoyait souvent dans l’île pour y
abattu, je n’aurais jamais eu connaissance de cela. effectuer des missions délicates de déminage (et de
En effet, c’est lors de la lecture de l’Arrêt de renvoi déminage à minage, il n’y a qu’un "dé"!)…
devant les Assises, et seulement à ce moment, que Par conséquent il fallait plus que du "flair policier"
j’ai appris que c’est ce Serge Costa qui aurait fourni à pour deviner qu’Arcini, au cours d’une de ces
Arcini l’arme du crime! Durant l’instruction, je n’ai "missions spéciales", en avait profité pour "acheter"
jamais été interrogé sur ce Costa, ni sur André une arme à un dénommé Costa!
Franceschi d’ailleurs! Il ne m’a jamais été demandé si Surtout que la logique voulait que la police pense,
je connaissais ces personnes! tout de suite, au travail routinier d’Arcini qui lui
Pourtant, puisqu’Arcini était en relation avec permettait de récupérer, en Normandie, nombre
Costa et Franceschi, la logique aurait voulu que l’on d’armes de la dernière guerre, notamment des Lüger
me demande si, par hasard, moi aussi, je n’aurais P08 (cf. section 6 du chapitre 1)…
pas connu ces types. Après tout les fréquentations Il est plus que manifeste, comme dit plus haut,
d’Arcini auraient pu être mes fréquentations. Or, on que la police (qui a donné une version) et la
ne m’a rien demandé durant l’instruction, ni au "justice" (qui en a donné une autre) en savent
procès! Preuve qu’ils savaient que je ne connaissais beaucoup plus qu’elles n’ont voulu en dire…
pas ces gens, et cela démontre surtout que la police Quoi qu’il en soit, peu après le jugement de Caen,
(et la "justice" !) en savent beaucoup plus qu’elles l’hebdomadaire caennais Liberté, dans son édition
n’ont voulu en dire… du vendredi 29 juin 1990, a fait le compte-rendu du
C’est d’autant plus vrai qu’en juin 1990, lors du procès. Et la journaliste, Marie Plante, a fait état de
procès de Caen, le commissaire Etcheberry patron du l’exécution de Costa (pourtant non détaillée lors des
SRPJ de Rouen a donné, lors de son témoignage, le audiences!) en précisant, de façon ironique, qu’il fut
récit d’enquête suivant, contredisant le contenu du « assassiné par l’ex-FLNC, dit-on »… Le "dit-on"
dossier officiel: laisserait à penser que cette Marie Plante n’y croyait
Il a dit, à la barre des témoins, qu’Arcini avait pas vraiment… Compte tenu que le sort de Costa ne
refusé de révéler ou il s’était procuré le pistolet Lüger fut pas abordé, comment cette journaliste (très
qui a servi aux attentats en Normandie, notamment à locale!) a pu savoir, d’une part que Costa avait été
l’assassinat de Moussaoui. Mais, le policier a précisé abattu ; d’autre part que c’est par le soi-disant FLNC?
Mémoire de Michel Lajoye page 28
A-t-elle recueilli, sur l’oreiller, les confidences de [notez ce qui suit...] ultérieurement décédé, Raymond
certains policiers chargés de cette manipulation? Ziegler. Il en possédait une quarantaine. » Rien de
Dans la suite de ce récit, nous verrons que cet plus!
hebdomadaire caennais Liberté a, à plusieurs Chacun a pu lire le très pudique "ultérieurement
reprises, publié des informations réduisant à néant la décédé"! C’est joliment dit! Après Costa, le
version officielle de cette affaire. Cet hebdomadaire, fournisseur de l’arme, qui a été liquidé, c’est Ziegler,
très local, avait, apparemment, une source le fournisseur des munitions, qui est lui aussi:
d’information de premier ordre sur les affaires "ultérieurement décédé"! Eh bien, approvisionner
Arcini/Lajoye! Arcini en matériel, cela nuit gravement à la santé!
Il ne nous est pas précisé de quoi ce Ziegler est
9. DES MUNITIONS IDENTIQUES DANS mort, ni surtout quand il est mort ! Il serait pourtant
DIVERSES AFFAIRES intéressant de savoir s’il est décédé avant ou après
Mais il n’y a pas que l’exécution de Costa! les attentats commis en Normandie! Et nous ne
En effet, des documents affirment que la mort de savons pas non plus où il était domicilié. Nous
cette barbouze est liée à celles de deux Arabes à savons juste qu’il était collègue d’Arcini autrement dit
Ajaccio en août 1986! Les munitions qui ont servi à artificier-démineur du Ministère de l’Intérieur.
abattre Costa proviendraient du même lot que celles Nous n’en saurons pas davantage, si ce n’est que
qui ont servi à abattre ces deux Arabes! Ce double cela fait un mort de plus! Vu l’hécatombe, comme je
crime d’Ajaccio, lui, n’a pas été revendiqué. l’écrivais à la fin de la section 7 de ce chapitre, il
Mais cela irait encore bien plus loin! Car si des serait intéressant de savoir si André Franceschi est
documents affirment que c’est le même lot de encore de ce monde!
munitions dans ces affaires corses, un correspondant L’autre version, pour la provenance des
(très au fait de la vie criminelle dans l’Ile de Beauté) munitions, fut donnée à la barre des témoins par le
m’a fait informer que non seulement c’était bien les spirite commissaire Etcheberry. Il dira qu’ils n’ont pas
mêmes munitions, mais qu’en plus cela serait pu déterminer la provenance du lot de munitions
également la même arme pour ces trois assassinats ayant servi à tuer Moussaoui. Donc exit Ziegler, mort
qui ont eu lieu dans l’île! une seconde fois!
Pour ma part je n’ai pas été entendu sur cette Et en disant que l’on ne pouvait pas savoir d’où
affaire de Maghrébins abattus à Ajaccio, alors qu’en venaient les munitions, ce commissaire a doublement
août 1986 j’étais en vacances, de ce fait absent de menti! D’une part, elles auraient été fournies par ce
mon poste militaire. Ce qui aurait pu faire tiquer la PJ Ziegler ; d’autre part les douilles retrouvées sur le sol
(car elle s’est forcément renseignée sur les dates de après les attentats, si l’on en croit le dossier officiel,
mes congés) qui aurait alors pu me demander si, par sont des munitions militaires et/ou de police. Et,
hasard, je n’avais pas passé mes vacances d’août comme toutes les douilles de l’armée et/ou de la
1986 du côté d’Ajaccio. police, elles étaient dûment immatriculées !
Car, tout de même, deux Arabes abattus "sans D’ailleurs, dans le dossier officiel, des documents
raison", de cette façon, à Ajaccio en août 1986, répertorient "clairement" l’immatriculation des douilles
"c’est signé": cela ressemble étrangement aux éjectées par le pistolet Lüger P08 utilisé par Arcini.
affaires Arcini/Lajoye… Mêmes méthodes, mêmes Cette immatriculation, mentionnée dans l’Acte
cibles! d’accusation, est « 4-75.SF.9.1. » à un endroit, et
Si la police, et/ou le juge d’instruction, ne m’ont « SF 4 - 75 X 9 » à un autre (toujours la stricte
rien demandé sur le sujet, c’est qu’ils savaient tous rigueur et la haute précision proverbiale de la
que je n’y étais pour rien. Par conséquent, ils "justice" !).
savaient pertinemment qui est celui, ou ceux, qui ont Mais, effectivement, le dossier officiel ne précise
commis ces actions en Corse. pas l’affectation de ces munitions avant d’avoir
Pourtant, à ma connaissance, personne n’a été "appartenu" à ce Ziegler qui les aurait remises à
officiellement interpellé et encore moins jugé pour ces Arcini!
crimes! Je me permets d’exposer, pour les non-initiés, que
les munitions fabriquées en France pour l’armée
10. LES MUNITIONS QUI ONT SERVI AU CRIME et/ou pour la police sont toutes immatriculées sur les
DE CAEN douilles. Tous les X mille (ou toutes les X cents pour
certaines munitions spécifiques), il est changé
Quant aux munitions, des 9 millimètres
l’immatriculation. Avec ce numéro, il est aisé,
parabellum, qui ont servi aux attentats commis en
enfantin, de savoir à quel régiment, ou unité de
Normandie, c’est comme pour la provenance de
police, le lot a été envoyé initialement puisque le
l’arme du crime, il y a aussi deux versions: celle du
munitionnaire de l’armée, et/ou de la police, a toutes
dossier officiel et celle de la police, en l’occurrence le
ses archives depuis 1945.
commissaire Etcheberry, chef du SRPJ de Rouen!
De ce fait, il ne faut pas venir nous dire, comme l’a
Voyons d’abord celle contenue dans l’Arrêt de
fait le commissaire Etcheberry lors du procès, que l'on
renvoi devant les Assises. Il est précisé en tout et
n’a pas pu établir la provenance des munitions, car
pour tout, ceci:
en vérité c’est que l'on n’a pas voulu révéler l’unité
« Les munitions utilisées, les S.F.M. 75 lui [Arcini]
militaire, ou à quel service de police, elles avaient été
avaient été données par un collègue démineur
initialement destinées.
Mémoire de Michel Lajoye page 29
En conséquence, nous pouvons légitimement Le journaliste, Gérard Laurent, qui a écrit cela
penser que ces munitions venaient d’une unité dans son article, l’a fait après avoir assisté à la
particulière! Peut-être une "unité très spéciale" de conférence de presse du Procureur de Caen. Durant
l’armée ou de la police et, pour eux, dire, lors du cette dernière, le magistrat relatait l’arrestation et
procès, devant la Cour, devant le public, qu’elles faisait le point sur les affaires Arcini/Lajoye. À
avaient initialement été mises en dotation dans telle première vue, la source du journaliste est fiable!
unité militaire, ou tel service de police, cela aurait été Les précisions recueillies par Gérard Laurent
gênant… portent notamment sur deux points:
Si cela n’avait pas été gênant pour eux de nous Le premier: un lot de « millions de munitions ».
dire à qui avait été, initialement, envoyé ces balles, ils Cela me semble beaucoup, car il n’est pas attribué
nous l’auraient dit, cela semble là aussi é-vi-dent! qu’un seul numéro de série pour une telle quantité.
Il faut bien voir qu’Arcini a été assez fou d’utiliser Tous les X mille l’immatriculation est changée.
sa voiture personnelle pour commettre l’attentat de C’est d’autant plus vrai pour les "munitions
Caen. Alors qui sait, il a très bien pu, aussi, être spéciales". Et il semblerait que les projectiles utilisés
assez toqué pour utiliser des munitions provenant, par Arcini aient été des "balles expansives" que
via Ziegler, du Ministère de l’Intérieur: Ministère l’armée ne doit, en théorie, pas posséder, encore
auquel ils appartenaient tous les deux… moins utiliser, puisque la France a ratifié la
Je n’ose quand même pas penser qu’Arcini aurait "Convention..."! À moins qu’il ne s’agisse d’un lot de
utilisé les "munitions de service" de son collègue « millions de munitions » de ce type destinées à être
Ziegler! Les artificiers-démineurs du Ministère de stockées (plus ou moins secrètement) en vue d’une
l’Intérieur sont dotés d’une arme de service de leur mobilisation très "spécifique"… Dans ce cas, il a pu
choix (revolver ou pistolet) et ils reçoivent pour cette être mis le même numéro de lot à ces millions de
dernière une dotation en munitions. Ce serait quand cartouches.
même incroyable qu’Arcini ait utilisé les munitions de Si c’est le cas, je sais que les munitions de
service de son collègue! Si c’était le cas (ce que je ne mobilisation sont stockées "un certain temps" (disons
crois quand même pas!), il y aurait eu de quoi en 10 ans) et après elles sont détruites, remplacées par
émotionner Ziegler qui, justement, est "ultérieurement un lot fabriqué plus récemment. Pour détruire les
décédé"… munitions, on les envoie (en général) à des unités qui
Au procès de Caen, il a par ailleurs été précisé en consomment beaucoup en entraînement.
qu’Arcini a utilisé des balles expansives (ce que l’on En admettant que le journaliste dise vrai, et que le
désigne "populairement" sous le terme de balles lot était de plusieurs millions, il a pu être détruit en
explosives). Celui qui a donné cette précision est le étant alloué à une "unité spéciale" qui consomme
médecin légiste qui a autopsié Moussaoui. Il reste à 200 à 500 cartouches par homme et par
savoir si c’est Arcini qui a rendu expansives des entraînement. Ziegler et/ou Arcini auraient alors reçu
munitions classiques, ou si ces balles étaient ces munitions comme leurs collègues d’entraînement,
expansives à l’origine. mais en auraient rempli leurs poches au lieu de tout
Si c’est cette seconde hypothèse, Arcini aurait tirer. C’est plausible! Cela expliquerait pourquoi ils ne
alors utilisé des munitions très particulières, et bien nous ont rien précisé quant à la provenance initiale
peu "militaires"! En effet, ce genre de projectiles est de ces munitions! Car dire que ce lot a été attribué à
contraire aux conventions "machin" et "truc" sur les telle "unité spéciale", cela serait reconnaître que les
"lois de la guerre" et il va de soi que l’armée régulière fonctionnaires Ziegler et Arcini en faisaient partie!
du pays des "Droits de l’Homme" n’en utilise point et Second point: le journaliste prétend que « la
ne possède, évidemment, pas ça en stock! destination [initiale] de ces cartouches avait été en
De ce fait, si Arcini a bien utilisé des munitions de partie éclaircie ». Il a écrit cela en décembre 1987 en
ce genre, elles proviendraient de certains "services prenant sa source auprès du Procureur de Caen qui
spéciaux" (militaires ou civils) qui peuvent, tenait une conférence de presse!
contrairement à l’armée régulière (du moins Or, comme dit plus haut, au procès de juin 1990, il
officiellement...), se permettre d’utiliser des munitions y a le fameux commissaire Etcheberry (celui qui a
très spéciales! pourtant fait parler le mort Costa pour savoir qu’il
avait vendu l’arme à Arcini qui ne voulait rien dire!)
11. PRÉCISIONS DE LA PRESSE CONCERNANT qui est venu affirmer à la barre des témoins qu’il était
LES MUNITIONS impossible de savoir précisément d’où venaient ces
À propos de ces munitions utilisées, notamment à munitions, et même de déterminer à quelle unité elles
Caen pour tuer Moussaoui, dans l’hebdomadaire avaient été initialement allouées… Quant au dossier
caennais Liberté en date du 18 décembre 1987, il officiel, s’il mentionne bien Ziegler, il n’est nullement
est écrit que ces balles proviennent « d’un lot de précisé l’allocataire antérieur de ces munitions!
plusieurs millions » de cartouches « fabriquées il y a Il faudrait quand même accorder les violons entre
une dizaine d’années » (exact, elles étaient bien de la version de décembre 1987 rendue publique par le
1975, si l’on en croit l’immatriculation), et que « la Procureur Général et qui fut reprise par la presse ; la
destination [initiale] de ces cartouches avait été en version du coordonnateur des enquêteurs ; et la
partie éclaircie ». version du dossier officiel !
Il est évident qu’ils nous cachent la vérité!
Puisque les munitions, les douilles pour être précis,
Mémoire de Michel Lajoye page 30
retrouvées sur le sol de l’épicerie où Moussaoui a été Dès lors que Costa (présenté par certains comme
abattu, comportent toutes une immatriculation une barbouze) a été en contact avec Arcini, il ne
militaire et/ou de police, ils se foutent du monde peut être exclu que ce soit le second, fonctionnaire
lorsqu’ils nous affirment que l’on ne peut pas savoir à très spécial du Ministère de l’Intérieur, qui ait liquidé
quel régiment, quelle unité de police, quel "service un "collègue" devenu, pour une raison ou une autre,
spécial", ces munitions avaient été allouées! Il est gênant ou récalcitrant! Ce n’est qu’une hypothèse!
aussi aisé de retrouver le destinataire initial d’un lot Cependant si je suis dans le vrai avec cette
de munitions numérotées qu’il est simple de retrouver théorie, si c’est bien Arcini qui a abattu Costa, c’est
le propriétaire d’une voiture dont on a aussi lui qui a forcément abattu les deux Maghrébins
l’immatriculation! à Ajaccio, puisque c’est le même lot de balles et il
Que l’on me laisse consulter les archives du semblerait, aussi, que cela soit la même arme!
munitionnaire de l’armée et/ou de la police, et je vais Et puis le fait que le cas Costa et l’affaire d’Ajaccio
très vite trouver le destinataire! Hormis si les archives n’aient pas été détaillés, lors du procès Arcini/Lajoye
ont fort opportunément pris feu depuis! C’est que, vu organisé à Caen juin 1990, cela ne fait que renforcer
les ennuis de santé de Costa, de Ziegler, et peut-être mon sentiment qu’il nous a été caché des choses
de Franceschi, je crains le pire pour certaines (très gênantes pour eux!) sur ce qui s’est déroulé en
archives! Corse.
De plus, dans l’Arrêt de renvoi devant les Assises,
il est énuméré les numéros qu’avaient, ou qu’auraient 13. ARCINI FORCÉMENT IDENTIFIÉ PAR LA
eu, les douilles retrouvées après les attentats, mais POLICE DÈS JUIN 1987
est-ce qu’ils n’ont pas falsifié les chiffres? Car ils nous Je reviens sur l’attentat de Caen commis en juin
ont menti sur plein de choses, et je doute qu’ils aient 1987. Arcini a donc utilisé sa voiture personnelle, une
pris le risque énorme de mentionner le véritable Simca 1100 TI d’une couleur très rare.
numéro d’enregistrement. La version officielle de l’affaire dit que le tueur a
En effet, il nous suffirait d’avoir un sympathisant été identifié grâce à cela. Seulement la version
aux archives du munitionnaire, il consulte les registres officielle dit que c’est en décembre 1987 que la
pour voir à qui le lot de 9 millimètres parabellum police, après avoir épluché le fichier des cartes
immatriculé « 4-75.SF.9.1. » (ou « SF 4 - 75 X 9 ») a grises, est remontée à lui.
été alloué, et nous serions renseigné! De ce fait, je 6 mois pour éplucher les cartes grises, ils espèrent
doute fort que, puisque l’on ne doit pas savoir d’où que nous allons les croire?
viennent les munitions, qu’ils aient pris un tel risque! Il est évident que la PJ a dû mettre des
Je suis persuadé que les numéros des douilles inspecteurs au service des cartes grises et ils ont sorti
qui figurent dans l’Arrêt de renvoi (ainsi que dans du fichier toutes celles concernant les Simca 1100 TI
d’autres documents) ne sont pas ceux qui figuraient de la couleur recherchée.
sur les étuis retrouvés après les attentats. Ces Et, détails intéressants: la PJ de Caen était à
cachotteries expliqueraient pourquoi, d’une page à l’époque (sans doute encore maintenant), une
l’autre de l’Acte d’accusation, le numéro de série antenne du SRPJ de Rouen. À Caen la PJ n’avait
varie (« 4-75.SF.9.1. » à un endroit puis « SF 4 - 75 pas de locaux spécifiques pour elle. Et où la PJ de
X 9 » à un autre) alors que toutes les douilles sont Caen était-elle logée à l’époque? Tout simplement
censées provenir du même lot! Par conséquent, avoir dans un bâtiment administratif dépendant de la
la même immatriculation… préfecture de Calvados. Pour être précis, la PJ
occupait l’étage tout en haut (au troisième), alors que
12. ARCINI A PEUT-ÊTRE COMMIS DES
le premier et second étage étaient occupés par des
ATTENTATS EN CORSE
services administratifs de la préfecture, dont celui
Maintenant il faut bien en venir à la question qui des… cartes grises!
vient à l’esprit, à savoir: est-ce qu’Arcini a commis Ce qui veut dire que pour effectuer leurs
d’autres attentats, notamment en Corse avant, voire recherches dans ce fichier, les fonctionnaires de la
après, ceux commis en Normandie? PJ n’ont eu juste qu’à descendre à l’étage du
Car après tout, c’est peut-être Arcini qui a abattu dessous…
Costa? Je n’ai pas eu connaissance que le tueur de Alors la version qui veut qu’ils aient mis 6 longs
cette barbouze ait été arrêté et jugé. En tout cas mois pour éplucher le fichier des cartes grises qu’ils
dans le dossier officiel jugé à Caen en juin 1990, s’il avaient sur place, c’est vraiment se foutre du monde!
est mentionné que Costa a été abattu en février Admettons qu’en 1987 la préfecture du Calvados
1987, il n’est pas précisé que l’auteur de ce crime a n’ait pas eu de fichier informatisé et qu’il ait fallu tout
été identifié, du moins officiellement. trier à la main. En 1987, des Simca 1100 dans le
Et comme les deux Arabes d’Ajaccio (évoqués Calvados (qui n’est quand même pas un
plus haut) et Costa ont été abattus avec des département très peuplé), il n’en restait pas
munitions provenant d’un même lot, et (d’après une beaucoup en circulation. Il y en avait moins de 4.000
source bien informée) avec la même arme, cela (si l’on en croit l’hebdomadaire caennais Liberté du
laisserait supposer que c’est le même tueur pour ces 18 décembre 1987) pour les départements du
affaires corses. Calvados, de la Seine-Maritime et de l’Eure. Et des
Simca 1100 de la série TI et du vert recherché, il y en

Mémoire de Michel Lajoye page 31


avait moins de 400 pour les trois mêmes l’Intérieur… Et d’autres fonctionnaires de ce Ministère
départements si l’on en croit le même Liberté qui y déjeunaient également, notamment la plupart des
était sous perfusion policière pour ses informations… inspecteurs de la PJ de Caen!
De ce fait, au grand maximum, les inspecteurs Ce qui veut dire que les policiers, chargés de
chargés de trier les cartes grises ont dû mettre deux rechercher le tueur, avaient pour indication que ce
jours (admettons trois) pour noter tous les noms des dernier circulait dans une Simca 1100 TI d’une
400 propriétaires de Simca 1100 TI de la couleur de couleur bien particulière. Or, un type se déplaçant à
celle recherchée. bord d’un tel véhicule, et correspondant précisément
Et cela d’autant plus que cette affaire faisait un au signalement physique du meurtrier, ils en avaient
foin pas possible, on réclamait l’arrestation rapide du un sous le nez tous les midis: 5 jours par semaine,
tueur! Il avait été mis de gros moyens de recherche puisqu’Arcini partageait la table des inspecteurs de la
sur cette affaire. Robert Pandraud, complice de PJ…
Pasqua au gouvernement de l’époque, avait même Arcini a (c’est irrécusable) forcément été arrêté par
déclaré qu’il avait mis tout en œuvre pour retrouver la police judiciaire dans les jours suivants l’attentat de
l’auteur de ce crime. Voir, pour avoir une idée des Caen! Puis il a été fait le lien avec certaines affaires
moyens énormes mis sur cette enquête, les journaux corses (et sans doute d’autres affaires que
parus après l’attentat du 5 juin 1987! j’évoquerai plus loin!). Mais ils ont gardé Arcini sous la
Ce qui veut aussi dire, qu’au besoin, ils pouvaient main, car ils en avaient besoin pour me faire
utiliser tous ces renforts pour trier le fichier des cartes commettre un attentat. J’étais déjà en tôle à
grises. Cela a dès lors été forcément très rapide de l’époque, mais plus pour longtemps, j’allais bientôt
"sortir" toutes les adresses des propriétaires des sortir.
Simca 1100 TI de la couleur recherchée. Certains répondront que cette hypothèse est du
Pour le département du Calvados, au plus, il cinéma que je me fais, pensant qu’ils se sont donné
devait y avoir une centaine de voitures de ce type en de biens grands moyens pour m’avoir. Mais, je ne
circulation puisqu’il n’y en avait moins de 400 pour le crois pas une seconde qu’il ait fallu 6 mois à la PJ
Calvados, l’Eure et la très peuplée (avec Rouen et Le pour remonter à Arcini comme le dit la version
Havre!) Seine-Maritime. Le dossier officiel ne officielle de l’enquête!
mentionne pas le nombre de véhicules de cette série Je suis maintenant persuadé, avec le recul, qu’ils
encore en circulation dans le Calvados, il affirme ont utilisé Arcini pour m’atteindre, et qu’en
simplement qu’il n’en restait encore que « quelques contrepartie, il a vu une partie de ses crimes
modèles en circulation », c’est dire! Alors, en estimant "disparaître". Une sorte d’amnistie très particulière! Je
que le Calvados comptait encore une centaine de pense notamment aux affaires corses (et à d’autres
Simca 1100 TI du vert recherché, je suis forcément que j’aborderai plus loin), car si ces affaires n’ont pas
très au-dessus du nombre réel! été évoquées au procès de Caen, alors que toutes
Ensuite, admettons qu’Arcini n’ait pas été un sont "liées" entre elles, c’est qu’il y a bien une raison!
agent infiltré, mais un simple activiste. Il fut facile à la Une raison inavouable!
police de prendre la liste des activistes d’extrême- Et si Arcini a commis diverses actions criminelles
droite "fichés" aux RG (et Arcini était forcément fiché dans un peu toutes les régions de France, cela lui
depuis au moins 1984 comme je l’ai expliqué au aurait valu 4 à 5 (si ce n’est plus!) procès un peu
chapitre 1 section 4) et de la comparer avec la liste partout dans le pays. Dans ces procès (tous de
des heureux propriétaires de Simca 1100 TI de la procédure criminelle), il était susceptible d’être
couleur recherchée. condamné à chaque fois à la réclusion criminelle à
Donc, soyons larges, et disons que pour le 15 juin perpétuité assortie d’une peine incompressible
(dix jours après l’attentat de Caen), Arcini était maximale de 30 ans. Autant dire qu’en cumulant
forcément identifié et arrêté! Même des policiers très deux condamnations de ce type, c’est l’assurance de
mauvais, et sans grands moyens, auraient remonté à ne jamais être libéré de prison.
lui très rapidement! Alors, à la mi-juin 1987, après avoir logiquement
Si Arcini n’était pas un activiste, mais un agent identifié, et forcément arrêté Arcini, on a pu très bien
infiltré, c’est pareil! Les enquêteurs, en consultant la lui proposer le marché suivant: « Un seul procès
liste des propriétaires de Simca 1100 TI, auraient arrangé à Caen, une seule condamnation à
sursauté en voyant le nom de leur collègue Arcini. Ils perpétuité avec 18 ans de sûreté. Peine
se seraient demandé si l’agent Arcini, chargé “incompressible” que l’on réduira ensuite pour réaliser
d’infiltrer les milieux d’extrême-droite, ne s’était pas un une discrète libération. Mais, en contrepartie, il faut
peu trop "pris au jeu", sachant que la peste brune pousser Lajoye.... »
c’est très contagieux… Ce marché a pu être d’autant plus proposé et
Dans n’importe quel cas de figure, pour le 15 juin conclu avec Arcini que c’était un agent d’un service,
1987 l’assassin de Moussaoui était forcément entre c’est clairement démontré dans les faits (son travail
les mains de ses collègues de la PJ. notamment)! Il n’était certes pas du service qui lui
En plus, détails intéressants, Arcini avait assurait une totale impunité (mais n’a-t-il pas commis
l’habitude de prendre ses repas du midi dans un une bavure impardonnable en abattant Moussaoui
"restaurant administratif", où pouvaient aller manger au lieu de Rahmani?). Cependant, le service auquel
tous les employés des administrations de l’État. Je appartenait Arcini lui a "arrangé le coup" comme
rappelle qu’il était artificier-démineur du Ministère de nous le verrons dans la suite de ce récit.
Mémoire de Michel Lajoye page 32
14. NOUVELLE VOITURE POUR ARCINI Or, jamais, ô grand jamais, dans le dossier officiel
jugé à Caen en juin 1990, ces précédentes auditions
La version officielle de l’affaire dit qu’Arcini,
et même cette précédente arrestation, réalisées
quelques jours après l’attentat de Caen, sachant que
après l’attentat de juin 1987, et complaisamment
sa Simca 1100 TI était recherchée, a acheté une
décrites avec force détails dans la presse, ne sont
autre voiture. Il est vrai que par la suite il a eu une
apparues! Dans le dossier officiel sur lequel j’ai été
Ford Escort.
condamné, le "premier contact" d’Arcini avec la PJ
Mais cela ne change rien, car il restait toujours
débute en décembre 1987! Rien de rien avant !
propriétaire de sa Simca 1100 TI qui sera
Ce qui s’est déroulé, c’est que les journalistes
découverte, à la fin de 1987, cachée à Mourmelon
locaux ont des contacts quasi-amicaux avec les
(version officielle). Il se retrouvait de ce fait
policiers et, autour d’un verre, les langues se délient,
propriétaire, dans le fichier des cartes grises de la
et apparemment, comme à leur habitude, certains
préfecture du Calvados, de deux véhicules. Ce qui
policiers ont beaucoup bu, par conséquent trop
pour un célibataire faisait suspect, et le rendait
parlé…
encore plus suspect!
Ce n’est que très récemment que j’ai eu
En effet, ce subit changement de voiture, aussitôt
connaissance des articles de ces journaux. Car suite
après l’attentat, était un aveu! Cela n’en rend aussi
à mon arrestation en décembre 1987, une fois
que plus loufoque la version disant qu’il ait fallu 6
incarcéré, j’avais été placé en isolement doublé d’une
mois aux enquêteurs pour identifier Arcini. Car les
"mise au secret" me privant d’accès à la presse, à la
inspecteurs de la PJ, avec qui il mangeait le midi, lui
télévision, à la radio… Cela a duré près de trois
auraient alors demandé en le voyant arriver au volant
semaines. Je pensais que c’était une lubie du juge
de sa nouvelle automobile: « Tiens, t’as changé de
d’instruction. Pas du tout, maintenant je comprends: il
bagnole, t’as plus ta Simca 1100? ».
était vital, pour eux, que je n’aie pas connaissance
Mais à part ça, il faut croire que ce n’est qu’en
de la désastreuse fuite dans les média! Cette fuite
décembre 1987, 6 mois après l’attentat de Caen, que
qui révélait qu’Arcini avait déjà été interpellé bien
la police est remontée à Arcini! Et cela bien qu’il n’y
avant son arrestation officielle en ma compagnie en
ait eu que quelques Simca 1100 TI de la couleur
décembre 1987! Si j’avais su qu’il avait déjà été
recherchée encore en circulation dans le
interpellé avant, j’aurais tout de suite compris la
département du Calvados!
supercherie!
15. UNE FUITE MALENCONTREUSE DANS LA Et, évidemment, les journaux parus en juin 1990
PRESSE au moment du procès de Caen, ont "gommé la
tâche" de décembre 1987, à savoir tut la vérité sur
D’ailleurs la presse locale fait s’écrouler cette cette fameuse première interpellation d’Arcini peu de
version officielle. En effet, en décembre 1987, les temps après l’attentat de juin 1987.
journaux du Calvados, que cela soit le quotidien Quant au fait que cette précédente interpellation
Ouest-France ou le très local hebdomadaire n’apparaît pas au dossier officiel, c’est la logique
caennais Liberté, faisaient tous état de la même. Si c’était apparu, un avocat aurait alors
précédente audition (après l’attentat de juin 1987) demandé pourquoi la PJ avait relâché Arcini! Comme
d’Arcini. Certains journaux comme Liberté du 11 il n’avait aucun alibi, je vois mal les autorités répondre
décembre 1987 affirmant même qu’il avait été relâché « Nous avons relâché Arcini pour mieux faire tomber
(et s’il a été "relâché", c’est qu’il était arrêté et pas Lajoye! »
simplement auditionné !) car il avait "l’alibi Balladur". En conclusion, il apparaît que j’ai été condamné
Or nous avons vu plus haut que cet alibi ne tenait sur un dossier totalement bidonné! Pire: on a utilisé
pas, car le crime a eu lieu vers 10 heures 15 à Caen, un interpellé depuis 6 mois pour me faire commettre
et Arcini devait être, seulement pour 13 heures, à un attentat… et me piéger!
Cherbourg. De plus, pour l’attentat du 6 mars 1987 à
Petit-Quevilly, il n’avait aucun alibi. Donc les 16. LES REVENDICATIONS SIONISTES
journalistes locaux sont passés à côté du scoop, et
Les attentats commis par Arcini en Normandie ont
ils auraient dû penser que la police avait relâché
eu des revendications très étranges. Il aurait
Arcini pour une autre raison!
revendiqué des choses comme Irgoun Reconstituée !
Si certains sont sceptiques sur mes affirmations,
J’avoue ne pas bien comprendre pourquoi il a fait ça,
qu’ils aillent consulter le quotidien Ouest-France (les
et s’il l’a réellement fait de sa propre initiative. Je ne
éditions du Calvados) s’étalant du 9 au 13 décembre
vois aucune raison à ces revendications. Pensait-il
1987. Ainsi que l’hebdomadaire caennais Liberté
faire accuser des juifs? Les attentats ont tous eu des
dans ses numéros du 11 et du 18 décembre 1987.
revendications sionistes! Arcini, durant les audiences
Ces journaux, très locaux, ne vivant que grâce à la
du procès, et même avant en procédure d’instruction,
"perfusion policière" pour les faits-divers, ont, tous,
a prétendu être membre d’un groupe sioniste. Disait-il
avec des précisions qui se recoupent, donné moult
la vérité? Arcini, fonctionnaire du Ministère de
détails sur la précédente audition, voire la
l’Intérieur, était-il, aussi, un goy utilisé comme agent
précédente arrestation d’Arcini. Un précédent
sioniste? Ou, tout simplement, est-il juif?
intervenu aussitôt après l’attentat de juin 1987, soit
Les textes de revendication sioniste étaient écrits
bien avant la première audition officielle de décembre
au normographe et/ou à la machine à écrire. Le
1987!
Mémoire de Michel Lajoye page 33
contenu laissait penser que le rédacteur avait un état avec une Simca 1100 TI de la couleur annoncée,
mental assez dérangé. Sur le coup, lorsqu’aux susceptible de descendre des Arabes, j’avais
audiences du procès, j’ai entendu la lecture des justement ça dans mes relations! Pour moi le tueur
textes de revendication, j’ai eu du mal à croire ne pouvait être qu’Arcini. Alors, dès le 5 juin 1987,
qu’Arcini, de lui-même, avait écrit ce genre de choses dès après l’attentat, dès que les média ont donné
totalement incohérentes compte tenu de sa des détails, j’avais deviné que c’était lui qui était
personnalité. derrière cette affaire de Caen.
Au sujet des revendications, je n’en sais pas plus, J’ai donc eu la visite d’un inspecteur qui a discuté
je n’ai pas participé à ces attentats (je rappelle que amicalement et longuement avec moi de choses et
j’étais en tôle!), et tout ce que j’en sais c’est par la d’autres, il me testait, cela se sentait. Il m’a précisé
propagande des média, le dossier officiel, et le aussi que je n’avais pas trop à m’en faire, que je ne
procès auquel j’ai assisté. prendrais pas trop à mon futur procès en
Quant aux motivations profondes d’Arcini, ses correctionnel (je devais comparaître moins de 2 mois
contacts avec les milieux sionistes qu’il a invoqués, plus tard) et que je serai libéré dans quelques mois
cela reste un mystère que l’on s’est bien gardé de (ce qui s’est révélé exact). Cela confirme ce que je
tenter d’éclaircir de crainte de trouver certaines relatais au chapitre 4, section 2 où j’évoquais
implications gênantes. précisément ce procès "arrangé" de Coutances qui a
C’est d’autant plus vrai, que, lors du procès eu lieu le 4 août 1987 et qui avait bien pour but de
devant les Assises du Calvados, l’un des policiers me faire sortir de prison le plus vite possible.
témoins, le commissaire Etcheberry (encore lui!), À la date de cette visite, la police judiciaire tenait
affirmera, après avoir prêté serment de dire la vérité, forcément Arcini, et cet inspecteur est, sans aucun
qu’aucun groupe sioniste n’existe ou n’a existé dans doute, venu voir si je le balançais ou pas. Ainsi, je
la région normande… pense que c’est après cette visite qu’ils ont dû
Après une telle déclaration, je pensais que la salle pendre leur décision. C’est-à-dire garder Arcini sous
allait éclater de rire, mais non, j’ai été le seul à le coude, ne pas l’arrêter officiellement, car ils en
m’esclaffer! Pourtant, un tel parjure prononcé à avaient besoin pour la suite.
Caen, si près des territoires occupés de Deauville, En effet, il ne fait aucun doute qu’ils savaient que
c’était désopilant! Chacun sait que, grâce à j’avais connaissance, ou du moins forcément deviné,
l’autoroute de Normandie, Deauville est au bout du que c’était Arcini le tueur. Car une fois l’assassin
Sentier et de ses milices armées… arrêté après l’attentat de Caen, il leur a forcément dit
En tout cas cette déclaration du comique spirite qu’il me connaissait (il n’avait même pas besoin de
Etcheberry, prouve, s’il en était besoin, que l'on avait leur dire: des éléments matériels démontraient que
donné des consignes claires pour ne pas impliquer nous étions en contact). Donc cet inspecteur venait
"certains groupes"… pour voir si j’allais être coopératif et lui balancer le
nom d’Arcini.
17. VISITE D'UN INSPECTEUR À LA PRISON OÙ Comme je ne le lui ai pas donné, cela leur a
J'ÉTAIS DÉTENU confirmé qu’ils auraient des problèmes avec moi et
Lorsque l’attentat de Caen a été commis le 5 juin qu’aussitôt libéré j’allais reprendre mon activisme.
1987, je me trouvais alors en prison: à la Maison Puisque, sans doute pour eux, si j’avais décidé de
d’arrêt de Coutances, dans la Manche. "raccrocher", il aurait été logique que je balance
Étrangement, peu de temps après le crime, j’ai eu Arcini ne serait-ce que pour être libéré dans les jours
la visite d’un individu qui s’est présenté comme étant suivants pour "services rendus". D’ailleurs cet
un inspecteur de la PJ de Caen, mais qui, inspecteur me faisait miroiter la chose! Il ne se
évidemment, ne m’a pas laissé son identité. Il venait cachait pas que si je lui rendais service, il me
au sujet de cet attentat. Je n’ai plus en mémoire la renverrait l’ascenseur tout de suite.
date exacte de cette visite, mais à cette époque ils En quelque sorte, cette visite était pour eux un
avaient déjà forcément identifié et arrêté Arcini. bon moyen de voir où j’en étais. S’ils avaient eu la
C’était une dizaine de jours après l’attentat que j’ai vu conviction que j’allais me calmer une fois sorti de
cet inspecteur 13. prison, Arcini aurait été (je pense) officiellement arrêté
Ce dernier avait en main le portrait robot du tueur et inculpé pour diverses affaires. Voire purement et
et il m’a demandé si, par hasard, je n’aurais pas une simplement supprimé comme l’a été Costa, et sans
petite idée sur son identité. Le croquis n’était pas très doute quelques autres! Mais, comme ils ont eu la
bon (comme toutes choses de ce genre), mais j’ai conviction que je n’allais pas me calmer en sortant de
tout de suite eu la confirmation de ce que je pensais: taule, on a décidé de garder Arcini sous le coude et
c’était bien Arcini qui avait commis cela puisque je le de l’utiliser pour me faire mettre en taule
reconnaissais sur la fiche de recherche que l’on me définitivement.
présentait. Là encore certains affirmeront que je me fais du
De plus, de ma cellule, j’avais suivi l’attentat car cinéma, car finalement pour m’éliminer définitivement
les média en parlaient abondamment. Et un type il aurait suffi de m’abattre comme l’a été Costa! Mais
apparemment on a préféré me faire condamner.
13 Quant à savoir pourquoi, on aurait préféré me
Il serait possible d’avoir la date précise de cette visite, et l’identité de
l’inspecteur visiteur, en consultant le registre de la Maison d’Arrêt de faire condamner plutôt que m’abattre, je n’en sais
Coutances. rien!
Mémoire de Michel Lajoye page 34
Mais que certains aient préféré une Il se peut également, que le "plan initial" ait prévu,
condamnation, cela peut sembler logique, puisque qu’après "utilisation", je sois abattu, et que cela ait
cette affaire montée contre moi, relève cafouillé dans l’organisation… Difficile de le savoir!
(apparemment) de la vengeance afin de me faire Quoi qu’il en soit, c’est quand même troublant
payer ma défection de la DPSD (cf. section 11 du cette visite de cet inspecteur que je viens de relater
chapitre 2)! Et qu’est-ce qui est le plus raffiné: se dans cette section, surtout à une date où, fort
faire abattre ou être condamné à perpétuité avec logiquement, et comme l’a d’ailleurs révélé la presse
l’assurance, avec le régime actuel, de ne jamais être locale de décembre 1987, ils avaient déjà arrêté
libéré? Arcini !

Chapitre 6

MA SORTIE DE PRISON (26 octobre 1987)

hasard total, que j’aurai connaissance que les


1. REPRISE DE CONTACT AVEC ARCINI journaux locaux de l’époque faisaient état de points
capitaux qui font s’écrouler la version officielle de

L
e 26 octobre 1987 j’ai été libéré de prison
après 9 mois plein puisque avec les remises de cette affaire.
peine automatiques cela me faisait, Le créneau d'octobre à décembre 1987 est
virtuellement, 12 mois accomplis. particulier, car comme Arcini a été identifié aussitôt
J’ai repris contact avec Arcini. Tout me semblait après l’attentat de Caen commis en juin 1987, mais
normal. J’étais loin de me douter qu’il était tenu en remis en liberté contre petit accord sur mon dos, tout
laisse par ses collègues du Ministère de l’Intérieur, et ce qui a suivi ma libération du 26 octobre 1987 était
aussi par certains fonctionnaires du Ministère de la sous contrôle de ceux qui tenaient Arcini en laisse.
Défense auquel appartient la DPSD… En conséquence, tout ce que j’ai fait à partir du 26
Certes, j’avais été étonné qu’après l’attentat de octobre 1987 l’a été sous l’œil d’observateurs, et
juin 1987 la police n’ait pas remonté au tueur parfois même fait selon les directives qu’ils donnaient
sachant qu’il avait utilisé sa propre voiture. Mais à Arcini.
jamais je n’aurais imaginé qu’ils l’avaient interpellé Normalement si, suite à l’attentat de Caen de juin
pour le relâcher afin de l’utiliser contre moi. 1987, Arcini avait été officiellement arrêté, et écroué,
Une fois que j’ai revu Arcini, nous avons je ne serais sans doute pas sorti de prison le 26
simplement fait le point sur ce qui s’était déroulé ces octobre 1987. Je pense que j’aurais été inculpé pour
derniers mois. Il a abordé l’attentat de Caen de juin "association de malfaiteurs", puisqu’il aurait été
1987, ainsi que celui de mars précédent à Petit- démontré que j’étais en contact avec Arcini. Cela
Quevilly. Mais, évidemment, il s’est bien gardé de me m’aurait sans doute valu quelques mois de prison
parler de son audition par la PJ telle que l’a relatée la supplémentaires, mais sans plus, n’ayant en rien
presse de décembre 1987. À aucun moment, je participé aux attentats commis par ce fonctionnaire
n’apprendrai cette fameuse précédente très spécial du Ministère de l’Intérieur…
interpellation ! C’est 10 ans plus tard, et par un

Chapitre 7

L'ATTENTAT QUI M'EST REPROCHÉ

dernier. Je les inclus dans ce récit à titre


1. AVANT TOUTE CHOSE d’information, et surtout pour démontrer que cette
affaire est loin d’être éclaircie.

I
l y a plusieurs versions de cet attentat. Certaines
sont les versions développées au procès de Caen Pour ma part je ne privilégie aucune des versions
en juin 1990, autrement dit ce sur quoi j’ai été par rapport à une autre, sachant que toutes, sans
condamné. Je les désignerai dans ce récit sous le exception, comportent de nombreuses incohérences,
vocable version officielle. On peut même parler des et des impossibilités techniques. Toutes ces
versions officielles! allégations contradictoires laissent surtout à penser
Puis, il y a un autre récit, récent, qui émane d’un qu’il y a eu mise en scène, et que ce ne fut qu’un
témoin de cet attentat, et qui contredit radicalement "attentat virtuel".
les versions officielles du Ministère Public. Mais les Je vais relater chacune des versions, et détailler
affirmations de ce témoin ont été recueillies en juillet chacune des hypothèses qui apparaissent. Dans un
1998 et janvier 2000, soit 10 ans et demi après premier temps, nous verrons les faits que j’ai commis,
l’attentat dans le premier cas, et plus de 12 ans dans comment j’ai opéré ; le récit que le Ministère Public a
le second. Ces témoignages sont aussi intervenus donné de l’explosion qui aurait suivi, et ce que j’en
plus de 8 et 10 ans après le procès. Ce qui veut dire pense. Puis, nous verrons les déclarations que ce
qu’elles ne furent pas prises en compte lors de ce témoin a faites en juillet 1998 et la version qu'il a

Mémoire de Michel Lajoye page 35


donnée en janvier 2000, ainsi que ce que je pense repérages, pour établir ces fiches, avaient été
également de ses deux récits. effectués auparavant, en général courant 1986, soit
Voyons donc cet attentat, à commencer par son par Arcini, soit par moi.
organisation.
3. TRAJET CAEN-CHERBOURG
2. ARCINI N'Y A PAS PARTICIPÉ (vendredi 20 novembre 1987)
DIRECTEMENT
Le vendredi 20 novembre 1987 je me suis rendu
Arcini n’a pas participé directement à cette action. dans une cache située à Caen pour prendre de quoi
De même, qu’il n’a pas pris part à l’assemblage de la confectionner une bombe. Tout était déjà prêt. Un
bombe. Je le spécifie puisque la version officielle dit réveil était déjà transformé en minuterie (il y en avait
que c’est lui qui l’a assemblée. Il m’a juste fourni le plusieurs prêts d’avance dans cette cache). J’ai pris
matériel (explosif, etc) qui était nécessaire pour la aussi une charge de plastic, et divers autres
conception. accessoires nécessaires pour réaliser cela.
Pour eux, qu’Arcini ait assemblé cette bombe, Ensuite j’ai quitté Caen pour me rendre à
c’était nécessaire pour joindre cet acte aux autres. Cherbourg, où je suis descendu dans un hôtel sous
Sans cela, comme Arcini n’a pas participé à cet un nom d’emprunt. Arcini connaissait mon point de
attentat, j’aurais dû être jugé à part dans une chute, par conséquent la police qui le tenait en laisse
audience séparée. Or on voulait me faire juger en sa aussi…
compagnie et pour ce faire on lui a dit d’affirmer que
c’était lui le concepteur de la bombe. Ainsi, il devenait 3. ASSEMBLAGE DE LA BOMBE
LE complice direct et un procès commun se justifiait. (dimanche 22 novembre 1987)
Plus loin je reviendrai sur ces artifices et La bombe a été assemblée le dimanche 22
manipulations de procédure qui ont été utilisés pour novembre, dans l’après-midi, en présence d’Harlem
me faire condamner au maximum. Désir! En effet, à la télévision, sur La 5 de l’époque,
Il va de soi que, si la police n’avait pas sciemment Guillaume Durand recevait Désir!
relâché Arcini quelques mois plus tôt, cet attentat En réalité j’ai assemblé deux engins explosifs:
n’aurait, évidemment, jamais eu lieu. Les problèmes l’un, la bombe destinée à l’attentat, l’autre à un test,
qui seraient survenus suite à l’arrestation officielle du une "bombe-test".
tueur de Moussaoui m’auraient coupé de bien des Ce qui était destiné à l’attentat, se composait
sources d’approvisionnement. Sans oublier les d’une charge explosive mise dans une boîte
éventuels problèmes judiciaires pour moi-même. métallique (boîte de conserve). Environ 500 tronçons
Mais après tout si on a relâché Arcini, après qu’il métalliques entouraient le plastic. Le système
ait accepté le petit accord, c’était pour me faire d’amorçage était électrique: composé de deux
commettre une action criminelle. En conséquence, détonateurs couplés. Par sécurité, j’en avais mis
que mon "complice" m’ait poussé pour que je passe deux pour le cas où l’un d’eux aurait eu un problème.
à l’acte est dans l’ordre des choses. Cela faisait Ces détonateurs étaient alimentés par une pile 9
partie du petit accord… volts incluse dans le système de mise à feu. Ce
L’idée que je commette un attentat, seul, s’est dernier constitué par un réveil mécanique transformé
décidée "normalement". Arcini m’en a entretenu, il de façon à ce qu’il fasse office de "ferme-circuit".
était passé à l’action, et souhaitait vivement que j’en Autrement dit une bombe à retardement tout ce
fasse de même… Ou plus exactement ceux qui le qu’il y a de plus classique. Voir ci-dessous le schéma
tenaient en laisse, depuis son arrestation initiale, global de la bombe destinée à l'attentat:
souhaitaient vivement que j’en fasse de même!
Arcini me recommandait de passer à l’acte avec
une bombe, "pour changer". Les deux autres
attentats connus en Normandie ayant été des
"mitraillages", il fallait "changer", selon lui… En fait je
comprends le pourquoi d’une bombe, car cela
permettait de faire échouer cet attentat! Ce qui
n’aurait pas été le cas si j’avais utilisé une arme à
feu. Car à moins de me mettre des "balles à blanc",
ce qui aurait rendu évidente la supercherie, je vois
mal comment on aurait pu me faire échouer… Tandis
qu’avec une bombe, comme nous le verrons plus
loin, ce fut très simple.
Je me suis décidé pour fin novembre. La cible qui
me fut désignée: le bar Au Pavillon d'Alger à Petit-
Quevilly (227 rue Kennedy), près de Rouen. Action
prévue pour le lundi 30 novembre 1987. Cet
établissement faisait l’objet d’une "fiche" complète
indiquant comment il fallait opérer. Nous avions "en
boîte" un tas de cibles diverses de ce genre. Les
Mémoire de Michel Lajoye page 36
La charge explosive que j’ai mise (nous verrons 6. POSSIBLE SUBSTITUTION DE L'EXPLOSIF
plus loin qu’elle a pu être changée), était de la Tolite
Après le test, je suis rentré à l’hôtel où je n’avais
(un plastic dérivé du TNT). Elle peut être évaluée à
plus qu’à attendre une semaine pour passer à
150 grammes, je n’ai pas pesé, mais à vue de nez
l’action puisque c’était prévu pour le lundi 30
c’était ça. J’avais un pain qui provenait d’une
novembre 1987.
"récupération".
La bombe était placée dans un attaché-case
La provenance de cette charge de plastic était
fermé, et régulièrement je m’absentais, la mallette
assez spéciale. En 1986, lors d’un week-end, la
restait, elle, dans ma chambre. Si, comme nous le
gendarmerie maritime du Havre a trouvé, devant
verrons plus loin, ce qui a explosé lors de l’attentat
l’embarcadère des car-ferries, un pain de Tolite sans
n’est pas l’explosif avec lequel j’ai assemblé la
doute jeté par des "touristes" qui ont eu peur de
bombe, la substitution a pu s’opérer au cours d’une
prendre le ferry avec. Comme l’artificier-démineur de
de mes sorties qui parfois duraient quelques heures
permanence pour toute la Normandie (et la Bretagne)
quand même…
ce week-end là c’était Arcini, il est arrivé avec son
Pour cette opération, il suffit de deux personnes,
véhicule de fonction, a embarqué la découverte, et
l’une qui me suit et qui indique par radio à une autre,
selon les lois de "l’évaporation": en route cela a
que je me trouve à l’autre bout de la ville et que c’est
fondu!
le moment d’y aller.
Il avait été attendu les analyses chimiques pour
Il est tout à fait possible que ces messieurs de la
mettre cet explosif, ainsi récupéré, "en cache". Car
DPSD et autres, aient envoyé quelqu’un dans l’hôtel,
une partie de ce qu’Arcini avait rapporté à son atelier
dans une chambre voisine. Par radio, il était aisé de
(il n’avait quand même pas tout détourné!), avait été
prévenir ce complice pour lui dire que j’étais à l’autre
envoyé en laboratoire afin de tenter d’en établir
bout de la ville, qu’il devait entrer dans ma chambre,
l’origine. C’est revenu "inconnu": aucune signature
et modifier, vite fait, la bombe.
chimique n’avait été ajoutée lors de la fabrication de
Le temps d’ouvrir l’attaché-case (fermé à clé, mais
cet explosif. Donc impossible d’établir le numéro du
simple à déverrouiller pour un professionnel), de
lot. C’était de l’explosif étranger, sans doute d’Europe
déballer la bombe, de changer la charge, etc, c’était
de l’Est, et bon pour le service. Ce qui a été récupéré
faisable en largement moins de 30 minutes pour
au Havre a été mis dans une cache, et c’est ce
quelqu’un qui s’y connaît. Et s’ils ont fait cela, ils ont
plastic-là, testé en laboratoire, que j’ai utilisé.
dû envoyer un technicien des explosifs.
5. ESSAI AVEC LA BOMBE-TEST J’ignore à quel moment cela a été fait (et
(lundi 23 novembre 1987) notamment si cela a réellement été fait ! Car ce n’est
qu’une hypothèse pour expliquer un point qui sera
Comme dit plus haut, j’ai en fait assemblé deux examiné plus loin dans ce récit!), mais cette
engins, l’un (la bombe) avec système de mise à feu substitution a pu être faite à de très nombreuses
électrique: un réveil, une pile et double détonateur reprises, et notamment une qui semblerait tout
électrique. L’autre (la bombe-test) avec un système indiquée.
de mise à feu pyrotechnique: une mèche avec un
seul détonateur. 7. CABINES TÉLÉPHONIQUES TOUTES "EN
Le lundi 23 novembre 1987, soit juste 7 jours PANNE"
avant l’attentat, je suis parti en voiture de Cherbourg
Le lundi 23 novembre 1987, après avoir effectué
en direction de Saint-Vaast-la-Hougue. J’avais avec
mon essai avec la bombe-test, le soir, je devais être
moi un attaché-case qui contenait mes deux bombes.
dans une cabine téléphonique de Cherbourg pour y
Arrivé à mi-chemin de Cherbourg et Saint-Vaast, je
recevoir un appel d’Arcini. À l’heure dite, rien. 30
me suis arrêté pour aller sur une plage déserte que je
minutes plus tard j’étais à une autre cabine, toujours
connaissais et qui avait de nombreux blockhaus.
rien, et ainsi de suite avec changement de cabine
J’ai placé dans l’un d’eux ma bombe-test, j’ai
toutes les 30 minutes pendant 2 heures, soit 5
allumé la mèche qui me donnait 30 bonnes
possibilités.
secondes, et j’ai filé dans un autre blockhaus. Cela a
Nous avions ce système pour communiquer. Dans
explosé, test concluant, aucun dégât extérieur sur le
chaque ville d’importance en Normandie nous avions
béton, la charge était évidemment trop faible pour le
établi des séries comprenant une liste de 5 cabines.
"briser". Je ne faisais qu’un test, je m’assurais que
Alors, pour se fixer un rendez-vous téléphonique,
tout était en ordre. Cet essai probant signifiait que la
c’était (par exemple): « À Cherbourg, 21 heures, série
sœur jumelle de la bombe-test était bonne pour le
A. » Donc à l’heure H il fallait être dans la bonne ville,
service.
dans la première cabine de la série indiquée. Si on
Si j’insiste bien sur le fait que l’explosif avec lequel
avait manqué le rendez-vous, à H + 30 minutes il
j’ai constitué la bombe était bon, c’est que dans la
fallait être dans la seconde cabine de la série
version officielle de cette affaire (comme nous le
mentionnée ; et ainsi de suite jusqu’à H + 2 heures.
verrons plus loin), ce qui aurait explosé le lundi 30
Comme ce soir-là je n’ai pas eu le contact, je suis
novembre 1987 à Petit-Quevilly était défectueux.
rentré à l’hôtel. Et peu de temps après, le téléphone
Il y a là un mystère qui ne peut s’expliquer que
a sonné dans la chambre, c’était Arcini qui
par une substitution!
m’appelait. Il savait que j’étais descendu ici puisque
Mémoire de Michel Lajoye page 37
je lui avais dit, ainsi que le nom (d’emprunt) sous comme le veille! Je n’ai en conséquence pas eu le
lequel j’allais y descendre. contact à l’heure H.
Il m’a dit à mots couverts (car je craignais les Je suis rentré à mon hôtel, et à H plus 30 minutes,
écoutes) qu’il ne pouvait pas me joindre, que les j’ai demandé à la réception d’avoir tel numéro. Cette
cabines « sonnaient toutes “occupé” », et qu’il fallait fois cela a fonctionné, j’ai eu Arcini. Comme je
que je vienne le voir à Caen. Je lui ai répondu que je n’appelais plus depuis une cabine de Cherbourg, j’ai
le contacterai le lendemain, soit le mardi 24 pu avoir un téléphone public de Caen. C’était la
novembre 1987, à 21 heures, sur telle série de confirmation que seules les cabines téléphoniques
cabines de Caen. de Cherbourg étaient en dérangement. Voilà un
Cependant, après l’appel d’Arcini, je suis sorti problème technique qui, avec le recul, me semble
immédiatement pour m’assurer que l’on ne pouvait très étrange, trop opportun!
pas appeler les cabines de Cherbourg. Je suis allé En tout cas, ce mardi 24 novembre 1987, j’ai eu
vers un groupe de téléphones où il y en avait au Arcini au téléphone, comme il m’avait appelé la veille
moins deux côte à côte. J’en ai utilisé un pour et qu’il voulait me voir, je lui ai demandé si c’était
appeler celui d’à côté et écouter si cela sonnait. « vraiment important », et cela l’était (disait-il), il fallait
Impossible, cela donnait une tonalité comme que je vienne absolument à Caen le plus vite
"occupé" alors que le combiné de l’autre poste était possible. J’ai alors pris rendez-vous pour le
pourtant bien raccroché… Je suis passé dans une lendemain, soit le mercredi 25 novembre. Je décidais
autre cabine pour réaliser la même opération: même de me rendre à Caen par le train.
échec. Je me suis alors déplacé pour tester un autre Si l’hôtel était sur écoute (et il l’était, c’est même
groupe de téléphones, et j’ai ainsi pu constater que pour ça que toutes les cabines étaient
le dysfonctionnement était général. "neutralisées"!), ils ont eu la conversation de la veille,
En effet, c’était toutes les cabines téléphoniques puis celle du jour, et savaient que le lendemain j’irai
qui étaient "en dérangement". On pouvait appeler un voir Arcini.
particulier depuis un téléphone public (cela
fonctionnait car j’avais testé en composant un 8. OBLIGÉ DE PARTIR POUR CAEN
numéro pris au hasard dans l’annuaire), mais (25 novembre 1987)
impossible d’appeler quelqu’un se trouvant dans une Ce déplacement ne faisait pas mon affaire, je ne
autre cabine ! Et cela quelle que soit la ville, car j’ai pouvais quand même pas me balader avec une
appelé, à tout hasard, des téléphones publics de bombe assemblée dans un attaché-case, surtout que
Caen, Saint-Lô, Rouen et Le Havre (dont j’avais les je devais être mobile pour aller à Caen.
numéros), et cela sonnait "occupé" partout! J’avais le choix entre laisser la mallette dans la
Du coup, c’était tout le réseau de communication chambre d’hôtel, ou aller la cacher. J’ai opté pour la
mis en place entre Arcini et moi qui se trouvait seconde solution et le matin je suis allé mettre la
inutilisable! bombe dans une cache qui ne contenait rien d’autre.
Sur le moment j’ai mis cela sur le compte d’un Après j’ai pris le train Cherbourg-Caen, et pour
problème technique des cabines situées à certains c’était l’assurance que je ne rentrerais pas
Cherbourg. Mais, je me demande, avec le recul, s’ils avant tard le soir: Cherbourg étant en bout de ligne,
(DPSD RG, et autres!) n’avaient pas déconnecté tous les trains sont rares!
les téléphones publics afin que l’on puisse s’en servir Une fois à Caen, je suis allé voir Arcini à un lieu
normalement (pour joindre des particuliers), mais pas convenu, et en fin de compte cela n’avait rien
y être appelé et/ou appeler une autre cabine. d’urgent! C’était un rendez-vous de routine dans
C’était simple à réaliser, il suffisait de débrancher lequel nous avons juste abordé des problèmes de
quelque chose au central régional, et le tour était stockages de matériel. Nous avons aussi parlé de
joué. Les téléphones publics sont un réseau à part, il l’attentat futur.
peut être déconnecté aisément. C’est d’autant plus Encore aujourd’hui je ne vois que deux raisons à
vrai qu’il suffit de se souvenir qu’au début des ce rendez-vous. Soit Arcini, ou plus exactement ceux
années 80, il était encore impossible d’appeler des qui le tenaient en laisse, avaient besoin d’une
personnes se trouvant dans des cabines confirmation: celle que je passerai bien à l’action. Soit
téléphoniques publiques. L’attribution de numéros à ils voulaient m’éloigner de la bombe.
ces dernières était une chose assez récente au En effet, il serait tentant de penser qu’Arcini m’a
milieu des années 80. Ce qui veut dire que le boîtier attiré pour m’éloigner de l’engin assemblé. C’est
commutateur, empêchant les cabines de recevoir des possible, mais pas certain, car j’aurais pu venir avec,
appels, était encore aisément accessible… rien ne disait que je n’allais pas venir avec mon
Quoi qu’il en soit, le lendemain, c’est-à-dire le attaché-case et ils ne pouvaient pas le prévoir à
mardi 24 novembre 1987, à 21 heures, je devais l’avance. Ils ne pouvaient pas être certains que
appeler Arcini. J’étais dans une cabine de Cherbourg j’allais le laisser à Cherbourg. De plus m’éloignant
pour l’appeler à Caen, dans le premier poste de la régulièrement de la bombe aux cours de sorties, ils
série indiquée. Mais, avant de me rendre au rendez- n’avaient pas réellement besoin d’Arcini. Mais, on a
vous, j’avais de nouveau testé les téléphones très bien pu profiter de cette occasion (idéale!) pour
publics, et ils étaient toujours en dérangement, changer l’explosif et/ou trafiquer les détonateurs!

Mémoire de Michel Lajoye page 38


Il se peut aussi fort bien qu’ils aient demandé à électriques étaient alors reliées comme sur le schéma
Arcini de me faire venir à Caen afin qu’il puisse me qui est à la section 4).
demander, de vive voix (car au téléphone, je n’en Arrivé à Petit-Quevilly, je suis passé à pied devant
aurais pas parlé), si j’étais bien décidé pour cet le bar, tout était en ordre. Il y avait du monde (cela se
attentat… Ce que je lui ai confirmé. Nous étions le 25 voyait à travers les vitres tintées) et je suis entré dans
novembre, c’était pour le 30! l’établissement. Il était 14 heures.
Je suis rentré assez tard dans la soirée à Une fois entré Au Pavillon d'Alger, j’ai trouvé la
Cherbourg, je suis allé récupérer l’attaché-case, je disposition que j’ai indiquée sur le plan suivant. Il
n’ai rien remarqué. La bombe y était, et je ne l’ai pas n’est pas à l’échelle précise. J’ai mis une disposition
ouverte, notamment je n’ai pas ouvert la boîte symbolique pour les tables. C’est juste pour montrer
métallique contenant la charge de plastic pour voir si où elles étaient par rapport au bar. De même que le
c’était le même type d’explosif! Je n’avais pas de "percolateur" (il s'agit du distributeur de
raison logique de faire cela. La charge était dans une bière/limonade pression et non de la machine à café)
boîte fermée par un couvercle en bois enchâssé était peut-être 50 centimètres plus à gauche. Ce
dedans (cf. schéma à la section 4 de ce chapitre) et plan sommaire est là pour donner aux lecteurs une
c'était "du boulot" à ouvrir. Tout était assemblé, il n’y idée générale de la configuration des lieux:
avait plus qu’à relier les prises électriques et à libérer
la trotteuse du réveil, point.
En quelque sorte, une fois la bombe assemblée
définitivement, c'était comme un pli qu'il n'y avait plus
qu'à poster. Aucune raison logique d'ouvrir à
nouveau pour vérifier puisque cela avait déjà été
vérifié, à moult reprises, avant fermeture définitive…
Pour ouvrir ma boîte de conserve, et aller vérifier si
c'était toujours de la Tolite qui y était, il aurait fallu
que j'aie des doutes: que j'imagine qu'on ait pu me
saboter mon engin. Mais qu'est-ce qui aurait pu me
faire penser une chose pareille? Il aurait fallu faire
une crise de paranoïa aiguë pour cela!
De même que je n'avais aucune raison d’aller
vérifier si on ne m’avait pas, par hasard, "bidouillé",
voire "crevé" les détonateurs!

9. TRAJET CHERBOURG-ROUEN
(27 novembre 1987)
Le vendredi 27 novembre 1987 j’ai quitté
Cherbourg pour gagner Rouen où je suis descendu
dans un hôtel 0ù j’avais réservé jusqu’au lundi.

10. DERNIERS REPÉRAGES


(29 novembre 1987)
Le dimanche 29 novembre 1987 je suis allé Si j’en crois la version officielle de cette affaire, les
effectuer les derniers repérages, à savoir une visite 9 personnes qui se trouvaient dans ce bar lorsque j’y
de la cible à Petit-Quevilly. Je m’y suis rendu en bus. suis entré, sont: Jelassi, Belghazi, Bounifia (c’est le
Je suis entré dans le bar vers les 15 heures, j’y ai pris serveur), Chouikh, Darcy, Fenet, Baahmed, Poyac et
une consommation. Cela m’a permis de voir que tout Laoudj.
était bien conforme aux indications que j’avais sur la Ce sont ces 9 noms qui figurent sur des
"fiche de repérage" qu’Arcini m’avait remise. Vers les documents officiels de cette affaire, mais pour ma
15 heures 15 je suis ressorti et je suis rentré à Rouen part j’ignore si ce sont, réellement, ces 9 personnes
par le bus. qui étaient dans le bar. Je n’ai pas demandé les titres
de séjour en entrant… Mais il y avait bien 9
11. L'ATTENTAT EN LUI-MÊME, TEL QUE J'AI personnes lorsque je suis entré.
OPÉRÉ (30 novembre 1987) Il n’y avait pas un seul Européen dans cet
établissement lorsque j’y suis entré. Je le stipule car
En fin de matinée (vers midi) le lundi 30 novembre
des noms pourraient prêter à confusion. Pour ma part
1987, j’ai quitté l’hôtel où j’étais descendu, et je suis
si j’avais remarqué qu’il y a un ou des Européens
allé mettre mon sac d’affaires à la consigne de la
dans ce bar infâme, cela n’aurait rien changé.
gare, puis j’ai mangé au buffet. Après je suis parti, en
Seulement je m’étonne quand même de voir des
bus, avec sous le bras un sac en plastique (à
noms à consonance européenne dans ce lieu où il
l’enseigne d’un supermarché) emballant une boîte en
n’y avait que des Arabes. Il peut être évoqué la
carton dans laquelle j’avais mis la bombe (les prises
francisation des noms d’immigrés pour expliquer cela,

Mémoire de Michel Lajoye page 39


mais je ne suis pas si sûr! Il y a de quoi se poser des Il n’y avait pas de fenêtre entre la partie "bar" et la
questions, notamment si la liste officielle des présents partie "cour", dès lors ils ne pouvaient pas me voir
dans ce bar est réellement ceux qui y étaient lorsque partir. La "sortie vers rue" indiquée sur le plan, c’est
j’y suis entré. Vu l’ampleur de la manipulation et des un portail qui était ouvert.
moyens mis en œuvre, cela ne peut être exclu. Car, Lorsque je suis sorti dans la rue je n’ai rien
comme nous le verrons plus loin, ces présents dans remarqué d’anormal, ce n’était pas un endroit très
cet établissement, ces témoins, nous ne les reverrons passager (coin très malfamé...). Juste deux petites
pas lors du procès qui suivra… rues (le bar étant à l’angle des deux ruelles), l’une
Quoi qu’il en soit, le plan précédent montre ou j’ai venant se terminer dans l’autre comme indiqué sur le
déposé la bombe. Je l’ai mise sur la gauche entre plan.
l’espace séparant le bord du comptoir du bord du Ce qui s’est déroulé dans ce bar après mon
"percolateur" à bière qui était surélevé de plusieurs départ, je l’ignore totalement !
centimètres. Le paquet ne dérangeait personne, il y Car après avoir déposé et mis en œuvre ma
avait juste la place pour lui et il n’était pas bombe, ou ce que je croyais être ma bombe, je suis
volumineux. parti dans la direction indiquée sur le plan précédent.
Une fois au zinc, j’ai commandé un café que j’ai J’ai tourné à l’angle d’une rue plus loin (environ 200
bu, puis j’en ai commandé un second, j’ai payé14, et mètres), et je me suis dirigé, en traversant un
j’ai sucré ce second café. boulevard à grande circulation, vers un quartier
Ensuite j’ai ouvert mon sac, j’ai enroulé dans ma d’immeubles résidentiels. Je suis entré dans l’un
main le fil rigide qui bloquait la trotteuse du réveil, et d’eux par la porte de derrière donnant sur les
j’ai roulé la boîte en carton et le sac ensemble. Ce caves/garages à vélos. Il fallait un code d’accès pour
qui fait que ce paquet piégé, posé sur le bar, avait accéder au hall d’entrée (par la face avant du
l’apparence d’une poche de plastique bien ajustée bâtiment), mais par l’arrière (par le garage à vélos), la
qui emballait une boîte quelconque. serrure de la porte avait été préalablement
Après je suis sorti par la porte des toilettes "neutralisée".
(indiquée sur le plan précédent). Mais cela ne Théoriquement j’aurais dû "faire sauter" cette
donnait pas réellement directement sur les toilettes, il fermeture la veille (juste après les derniers repérages
y avait un petit couloir avec une autre porte qui dans le bar) pour tout préparer. Mais j’ai eu de la
donnait sur la cour dans laquelle il y avait un chance, car je n’en ai pas eu besoin, puisque lorsque
bâtiment "toilettes". j’y suis allé le dimanche, j’ai constaté qu’il n’y avait
Sur le plan suivant il n’est pas indiqué ce petit déjà plus de serrure! Je présume que des "jeunes"
couloir pour sortir dans la cour. Là aussi j’ai réalisé un étaient passés par là. Je n’imagine quand même pas
plan très symbolique pour donner une idée générale. que ceux qui tenaient Arcini en laisse, ayant lu les
De même dans la cour il y avait des abris pour les plans de repérage et d’action, avaient décidé de
réserves du bar avec des caisses empilées. m’aider et d’ouvrir cet accès. Serviables, mais peut-
Je suis parti comme c’est indiqué sur le plan être pas à ce point quand même! Quoique…
suivant: Le "plan de repli" était bien mis au point car cela
avait été préalablement repéré et minuté puisque,
comme je l’ai indiqué plus haut, ce bar faisait l’objet
d’une fiche détaillée. Cette dernière, évidemment,
accessible à ceux qui tenaient Arcini en laisse…
Une fois dans le garage à vélo, et constaté qu’il
n’y avait personne, j’ai ôté mon blouson beige,
dessous j’en avais un couleur bleu nuit. J’ai ôté mon
pantalon noir qui recouvrait un jean bleu. J’ai mis ces
affaires ôtées dans un sac poubelle que j’avais avec
moi. Ainsi, s’il avait été diffusé le signalement
vestimentaire du poseur de la bombe, je n’y
correspondais plus du tout.
C’est à ce moment-là, 14 heures 10, que la
bombe aurait dû exploser, soit à H plus 5 minutes.
Mais je n’ai rien entendu! J’ai mis cela sur le fait que
j’étais dans un sous-sol d’immeuble. Cependant, cela
m’a semblé étrange de ne rien entendre…
Après avoir ôté mes vêtements, je suis sorti par la
porte de devant de ce bâtiment, exactement comme
si j’habitais la résidence ou que j’en sortais à l’issue
d’une visite. J’avais à la main mon sac poubelle
contenant les vêtements ôtés. Je l’ai déposé dans un
conteneur près du jardin d’agrément situé devant.
14
Le serveur s’est même trompé (en ma faveur) en me rendant la Ces affaires sont ainsi parties (je suppose) à
monnaie… Etait-il au courant de quelque chose qui l’a fait être
"impressionné" au point de ne plus savoir compter? l’incinérateur au ramassage suivant des ordures.
Mémoire de Michel Lajoye page 40
12. RETOUR À CAEN (30 novembre 1987) officielles (il y en a plusieurs!) développées au procès
de Caen en juin 1990:
Ensuite j’ai pris le bus, direction la gare de Rouen
(c’était direct), afin de prendre le train pour regagner
Caen. Mais cela n’a pas été comme prévu, car j’ai
loupé mon train initial: il y avait une énorme
manifestation d’agriculteurs dans Rouen, ils ont
bloqué la circulation des bus. Sinon c’était
chronométré pour que je prenne tel bus, que je sois
à telle heure à la gare car il y avait un train qui partait
pour Caen quelques minutes après.
Comme je n’ai pas pu prendre le train prévu, je
devais attendre le soir (la liaison Rouen-Caen
suivante) et cela posait un très gros problème de
sécurité. Le plan initial prévoyait qu’avant qu’un
éventuel ordre de bouclage soit donné, j’aie déjà
quitté Rouen. Ce plan mettait en avant qu’ils
n’auraient pas pensé que le poseur de la bombe
avait pu filer si vite et être déjà hors de la ville
lorsqu’ils l’auraient bouclée. En étant bloqué dans
Rouen jusqu’au soir, cela rendait toute présence
statique à la gare dangereuse puisque la police
pouvait venir la boucler.
Pour pallier ce problème, j’ai récupéré mon sac
d’affaires à la consigne de la gare, je l’ai mis sur mon
dos, et je suis allé manifester avec les agriculteurs.
Meilleur moyen de passer inaperçu. Le soir comme
un groupe d’agriculteurs rentrait sur Caen, je suis
rentré tout simplement avec eux.
Apparemment aucun bouclage de l’agglomération
L’une des versions officielles dit que le serveur
n’avait été mis en place.
Bounifia, voyant le paquet et pensant que je l’avais
Je signale, car cela a son importance, qu’après la
"oublié", l’a pris aussitôt après mon départ et mis
pose de la bombe, j’ai pris le bus à un arrêt d’une
sous le bar. Oui, mais où ça sous le bar, au milieu, à
artère principale et en descendant vers Rouen et sa
droite, à gauche? C’est vague, plusieurs possibilités
gare SNCF, je n’ai croisé aucune force de police
que j’ai symbolisées sur le plan par trois bombes. Une
remontant à plein gyrophare vers le lieu de l’attentat.
des versions, la plus répandue, a dit que la bombe a
Mais comme devant il y avait une manifestation, ils
été mise sous le percolateur [à bière/limonade] (donc
auraient eu sans doute du mal à passer, ils ont dû
vers le milieu du bar) ; une autre dit sous le tiroir-
contourner, ce qui expliquerait que je n’ai rien vu. Où
caisse) ce qui est vague! Mais il me semble qu’il était
alors il n’y avait rien à voir car il ne s’est rien déroulé!
sur la gauche, sous la machine à café.
13. RÉCIT DE L'EXPLOSION DE LA BOMBE Quant au fait, qu’il aurait pensé, que j’avais
(version officielle) "oublié" le paquet et qu’il l’aurait ôté aussitôt après
mon départ, c’est un peu gros! J’étais parti aux
C’est le lendemain, par la presse régionale, que toilettes, j’avais mon café fumant sur le bar, et vu le
j’apprendrai que cette bombe aurait fait trois blessés retard qu’avait encore la bombe lorsque je suis sorti, il
légers et cela m’a semblé incroyable! restait dans les 4 minutes avant l’explosion. Une
La presse du 1 er décembre ne publiera qu’un très absence de 4 minutes était encore normale…
court entrefilet pas de détail: black-out sur cet Surtout que j’avais fait en sorte de faire le benêt
attentat dans l’édition de Ouest-France du mardi. Il qui ne savait pas lire en lui demandant: « Les
était seulement mentionné une explosion faisant 3 toilettes, SVP? », afin qu’il m’indique la porte où
blessés légers, ainsi que le lieu de la déflagration. c’était marqué dessus, et qu’il voit bien que j’y allais.
C’est tout! Apparemment les journalistes, lorsqu’ils Et j’indique bien que j’avais réglé les cafés pour
ont bouclé leur édition vers les 22-23 heures, qu’il ne pense pas que je m’en allais sans payer!
n’avaient pas encore les détails autorisés de cette Dès lors, cette histoire du paquet mis prestement
explosion intervenue, officiellement, vers 14 heures! de côté par le serveur, car il a pensé que j’étais parti
Cela peut sembler bizarre quand même! et que je l’avais "oublié", ce n’est pas très crédible.
Ce n’est que dans le quotidien suivant, c’est-à- Ensuite, il y a deux versions officielles. L’une dit
dire dans le Ouest-France du mercredi 2 décembre qu’après avoir déplacé la bombe, le serveur est parti
1987, que j’ai eu des détails et que j’ai appris que le servir un client à une table et que l’explosion s’est
bar en zinc avait "fait écran"… produite. L’autre dit qu’après avoir déplacé le paquet,
Le plan suivant montre la disposition lorsque la il est parti essuyer une table et que la déflagration
bombe aurait explosé, et cela, selon les versions s’est produite.
Mémoire de Michel Lajoye page 41
Dans les deux cas (sur le plan précédent) j’ai Pourtant, dans ce bar, lorsque la bombe aurait
symbolisé le serveur au milieu des tables. Voilà donc explosé (selon la version officielle), il y avait, si j’en
comment était ce bar, avec ses occupants, lorsque crois les documents judiciaires, 9 personnes ayant
cela aurait explosé, du moins dans les diverses ces noms: Jelassi, Belghazi, Bounifia, Chouikh,
versions officielles développées lors des débats du Darcy, Fenet, Baahmed, Poyac et Laoudj. Par
procès. conséquent, 9 témoins qui m’ont vu entrer, qui ont vu
Quant à la version d’aller servir des clients, pas et surtout subi l’explosion qu’il y aurait eu. Ces gens
très crédible, il y avait 9 présents, tous autour du auraient pu, et même dû, venir nous relater à la barre
comptoir! Il faudrait alors que certains soient sortis et des témoins ce qui a bien pu se dérouler dans cet
qu’ils aient été remplacés par le même nombre de établissement une fois que j’en suis sorti.
nouveaux venus qui se seraient installés à une table, Bounifia, le serveur, n’était même pas cité à
afin de toujours faire 9 présents dans l’établissement. comparaître pour nous raconter comment il avait
C’est possible, de même que certains qui étaient au déplacé la bombe! C’est dire si ceux qui ont monté
zinc ont pu s’asseoir, mais il faut une sacrée toute l’affaire craignaient que la vérité n’apparaisse si
coïncidence. La bombe n’avait plus que 4 minutes de les témoins venaient déposer à la barre!
retard lorsque je suis sorti et apparemment aucun Mais "encore mieux": durant l’instruction, je n’ai
client du bar ne s’apprêtait à sortir ou à bouger. jamais vu ces témoins! Aucune confrontation en
L’autre version qui dit que le serveur est parti présence du juge! Ce sont 9 témoins qui auraient
essuyer une table, pas crédible non plus. Car lorsque pourtant dû raconter (au juge d’instruction) 9 fois la
je suis entré les tables étaient propres, elles étaient même chose à savoir l’explosion qu’ils ont subie.
toutes inoccupées (j’avais envisagé de consommer à J’ai eu beau feuilleter le dossier officiel, je n’ai
une table plutôt qu’au bar), et le serveur jouait aux trouvé aucun procès-verbal d’audition de ces 9
dés avec des clients. Il aurait fallu qu’il abandonne sa témoins par le juge d’instruction! Est-ce normal qu’un
partie pour pendre une éponge et aller essuyer une magistrat instructeur, dans une telle affaire, ne
table… convoque pas les témoins pour les entendre dans
Mais je comprends l’embarras des tenants des son cabinet?
versions officielles, car comme, officiellement, la Les seuls témoignages des 9 personnes
bombe a été déplacée et mise derrière (ou sous) le officiellement présentes dans ce bar sont contenues
comptoir, il faut obligatoirement que le serveur soit uniquement dans des procès-verbaux de police
dans la salle, de l’autre côté du bar. réalisés après cet attentat! Ces témoins n’ont jamais
En effet, si, lors du procès, toutes les versions été interrogés par la suite! Ce sont simplement des
officielles avaient situé Bounifia derrière son zinc "procès-verbaux" de police qui ont servi de "preuves"
(avec la bombe à côté de lui), nous aurions pu pour me faire condamner! Qui prouve que ces
demander (juste comme ça, par pur mauvais esprit) procès-verbaux de police judiciaire sont LA vérité?
comment il a fait pour ne pas être gravement blessé Les faits qu’ils contiennent sont très contradictoires
par cet engin lui explosant dans les jambes! en tout cas.
En conséquence, il faut, il est impératif même, Et qui prouve que, par exemple, l’individu nommé
que toutes les diverses versions officielles Jelassi (qui a déposé dans un procès verbal de
(développées au procès) situent le serveur Bounifia police après l’attentat) était réellement dans ce bar?
dans la salle, du "bon" côté du bar. Ce dernier étant Qui me dit que ce ne sont pas des "auxiliaires" de
ce qui est censé avoir fait "écran total" entre la police, des "indics", etc, que l’on a fait témoigner
bombe et les personnes présentes dans la pièce. dans ces procès-verbaux?
Et là j’en reviens au fait que certains qui ont
14. LE PARQUET N'A JAMAIS CONVOQUÉ LES déposé dans ces procès-verbaux, et qui ont
TÉMOINS! prétendu être dans ce bar, ont des noms à
Évidemment, nous aurions pu en savoir plus (et consonance européenne! Pourtant il n’y avait aucun
éclaircir certains points!) si, au procès qui a suivi, le Européen dans ce bar…
Parquet avait fait citer les témoins! Et tout ce que je sais, c’est que si ces 9 témoins
Car, c’est bien cela qui est suspect, le récit de n’ont pas été convoqués pour déposer lors du procès
l’attentat, donc de ce qui se serait déroulé après mon de Caen, c’est que l'on nous cache, évidemment,
départ du bar, a été relaté par le président de la Cour quelque chose! Un procès aux Assises sans les
d’Assises! Ce dernier s’appuyait, pour son compte dépositions, à la barre, des témoins directs qui ont
rendu, sur des documents qu’il avait entre ses mains. assisté aux faits criminels, c’est rare! 15
Aucun témoin direct n’est venu, à la barre, confirmer
ou infirmer les dires du Ministère Public! 15
Même si cela tend à se généraliser! En effet, en décembre 1997, lors
Moi-même, n’ayant pas assisté à l’explosion (et du procès de l’affaire de la rue Toullier (en 1975, 22 ans avant le procès,
pour cause!), j’ignorais totalement si la version que des agents de la DST/Mossad et un de leurs indicateurs furent retrouvés
abattus), le Ministère Public a refusé de faire déposer, à la barre, les
relatait le président de la Cour était la vraie. Comment témoins oculaires! Lors de ce procès, l’accusé Ilich Ramírez Sánchez,
aurais-je pu le savoir? Aucun témoin direct des alias Carlos, a par conséquent été condamné à la réclusion criminelle à
événements n’était là pour nous donner sa version! Il perpétuité sans que les témoins des faits (pourtant encore en vie,
clairement localisés, et en mesure de venir témoigner) ne viennent
n’y avait qu’une version, qu’une vérité: celle du déposer à la barre pour donner "leur version"… Ainsi est rendue la
Ministère Public! Justice en France!
Mémoire de Michel Lajoye page 42
15. BILAN DE L'EXPLOSION: TROIS BLESSÉS 16. "BIZARRERIES" DES VERSIONS
(version officielle) OFFICIELLES
Quant aux victimes, officiellement, il y en aurait eu Ce sont les questions que l’on peut se poser
trois. Mais blessées à quel niveau? Je voudrais le lorsque l’on passe en revue les "bizarreries" (pour ne
détail des blessures! Ce qu’il est impossible d’avoir pas dire plus!) des versions officielles. Jusqu’en 1990
dans la version officielle ! je ne me suis pas posé trop de questions. J’avoue
L’Arrêt de renvoi devant les Assises (qui est le que j’ai cru à la version officielle que le Parquet m’a
seul document que les jurés ont avec eux lors de leur servie durant l’instruction: le serveur dans la salle, la
délibéré!), précise juste que l’explosion a fait trois bombe mise sous/derrière le comptoir, et celui-ci qui
blessés. Ces derniers, mentionnés nominativement fait "écran". Cela me semblait possible. Pour moi le
dans la synthèse du dossier officiel, sont: Jelassi, zinc avait pu se déformer, accompagner en quelque
Belghazi et Bounifia. sorte le souffle. Même si cela me semblait un peu
Toutes les versions officielles affirment: gros, car si ce métal avait de telles propriétés, les
« L’attentat a fait trois blessés »! Mais encore une blindages seraient en zinc!
fois: quelle fut la nature des blessures? Ce ne fut pas Je cherchais une explication rationnelle,
développé! Il y a eu trois blessés, point! Impossible technique, à la chose. À l’époque je ne pensais pas
d'en savoir plus! comme maintenant, à savoir que l'on a trafiqué ma
Mais là aussi il y a "encore mieux": lors du procès bombe, et/ou qu’elle n’a pas sauté du tout: que tout
de juin 1990, aucune victime de cet attentat à la a été mis en scène après…
bombe ne sera partie civile! La version officielle J’avais juste eu un léger doute durant l’instruction,
affirme qu’il y a eu trois victimes, mais nous ne les lorsque le juge m’a lu le rapport du laboratoire qui a
avons jamais vues: ni chez le juge d’instruction, ni au analysé les restes de la bombe qui avait, soi-disant,
procès! Ce sont donc des victimes qui n’ont existé explosé dans ce bar. Le rapport affirmait que c’était
que sur le papier: uniquement dans l’Acte du plastic qui était désigné comme de la Gomme 14.
d’accusation. Je connais cet explosif.
C’est d’autant plus vrai, qu’apparemment la Seulement la Gomme 14 c’est un explosif civil de
Caisse Primaire d’Assurance Maladie n’a jamais vu chantier (carrières, mines, etc). Je n’ai jamais eu de
ces blessés non plus! Car s’il y avait eu une dépense Gomme 14! J’ai toujours eu de l’explosif militaire,
de soins et/ou même une simple visite de routine, la normal, vu les opportunités de provenance.
CPAM n’aurait pas omis de se porter partie civile pour Et même si j’avais eu de la Gomme 14 je n’en
se faire rembourser par le Fonds de garantie… Cela aurais pas utilisé sans savoir comment elle avait été
n’a pas été fait! Alors ce sont des victimes qui n’ont stockée. Car cet explosif craint l’humidité! S’il a été
reçu aucun soin? mouillé, il ne souffle plus, mais entre en fusion et
Quant à l’exploitant du bar, il ne s’est pas dégage une très forte chaleur, c’est tout!
constitué partie civile. Idem pour son assureur. Ce qui Sur le coup je n’ai pas trop tiqué, du moins pas
est pour le moins étonnant! Car, pour mettre en plus que ça, je me suis gentiment foutu du
scène cette "explosion" (je détaillerai cette mise en laboratoire. Je me disais que la bombe avait été
scène à la section suivante), il a forcément fallu détruite lors de son explosion, faisant éclater au
détériorer quelques bricoles. Et si l’assureur ne s’est passage une bouteille de pastis (ou autres) et qu’elle
pas retourné contre moi, c’est que ce n’est pas lui qui avait dû couler dans les débris. Ce qui fait que le
a payé pour la remise en état… laboratoire avait analysé de la Tolite au Pastis, et
Si cela avait été l’assureur, il se serait constitué cela avait donné de la Gomme 14. Je n’ai pas
partie civile pour se faire rembourser par le Fonds de cherché à approfondir plus.
garantie! Par conséquent, il semblerait que dans Puis arrive le 8 juin 1990 (un peu avant le procès)
cette affaire (si nous suivons la version officielle), et j’ai eu le dossier quelque temps (durant l’après-
l’assurance n’ait pas joué… Pourquoi? Craignait-on midi). Je l’ai feuilleté, et j’ai trouvé un "album de
que les experts de la compagnie ne découvrent la photos" montrant le bar après l’attentat. Lorsque j’ai
supercherie s’ils avaient expertisé le bar? vu les photographies, j’ai tout de suite vu que cela
Mais alors qui a bien pu payer pour la remise en n’avait pas explosé! Car, c’est une véritable
état de cet établissement puisque ce n’est pas plaisanterie, sur les clichés figurant au dossier jugé à
l’assureur? Y a-t-il eu, réellement, besoin de remettre Caen, il est montré un environnement vaguement
en état ce bar? a-t-il eu, réellement, des dégâts noirci! C’est comme si une forte chaleur avait été
matériels? dégagée dans un rayon de 50 centimètres autour
d’un point. À la vue de telles photos, j’en reviens à la
Gomme 14. Car de la G14 mouillée, cela provoque
Édité et mis en ligne par:
ce qui est sur les clichés figurant au dossier officiel.
L'Église Mondiale du Créateur Seulement si c’est de la G14 qui a explosé, il a
P.O. Box 2002 bien fallu que l'on ôte ma Tolite pour la remplacer par
USA – East Peoria, IL 61611 de la G14 préalablement "mouillée" pour l’empêcher
http://www.creator.org de souffler ! (la substitution a pu s’opérer comme je
http://www.wcotc.com/france l’ai relatée à la section 6 de ce chapitre.)
Mémoire de Michel Lajoye page 43
Et ce qui m’a étonné le plus sur ces cette boîte une apparence visuelle pour le moins
photographies, c’est que le bar en zinc, notamment anormale !
le métal lui-même, ne comporte aucune marque ou Et, dans ses déclarations (si j’en crois ce qui a été
déformation. Ce qui est très étonnant alors que, soi- dit au procès aux vues des procès-verbaux de
disant, selon la version officielle, l’explosion s’est police), le serveur aurait dit qu’il a vu, par un trou
produite derrière/sous le comptoir. Comment se fait-il dans le carton, une partie métallique (cela n’aurait pu
que celui-ci soit rigoureusement intact? être que le boîte de conserve) qui lui aurait fait croire
Cela démontre surtout que ce n’est pas la bombe qu’il s’agissait d’un autoradio…
que j’avais confectionnée qui a explosé dans cet Seulement ceux qui ont écrit la « vérité qu’elle est
établissement. La charge était faible, mais elle faisait vraie », ignoraient que le matin, juste après avoir relié
150 grammes quand même! Ce qui en explosant les prises électriques, j’ai pris du ruban adhésif et j’ai
aurait fait se "déchirer" le zinc du bar! Exactement scotché toutes les ouvertures du carton contenant la
comme une feuille de papier aluminium tendue se bombe. En conséquence, il n’y avait aucune
déchire lorsque l’on donne un coup de poing ouverture, aucun trou ! Pour ouvrir la boîte il aurait
dedans. fallu prendre un couteau et couper le scotch. Le seul
Sur les photos, il ne nous est rien montré de tout "trou" qu’il y avait dans cette boîte, c’est celui par
cela, juste quelques impacts dans des boiseries se lequel passait le fil rigide qui bloquait la trotteuse du
trouvant près de la porte qui conduit aux toilettes (cf. réveil! Autrement dit un orifice d’un millimètre de
le plan précédent pour situer). Ces impacts auraient diamètre… Alors je voudrais bien savoir par quel trou
été causés par des particules, soi-disant projetées le serveur a pu jeter un œil!
par le souffle de la bombe. Mais si cette dernière Mais bon, admettons qu’il y ait eu une ouverture
avait projeté des éclats dans ces boiseries se qui n’a jamais existé et suivons cette version relatée
trouvant éloignées, c’est qu’elle aurait soufflé ! Et, si au procès. Le serveur regarde donc par "un trou", et
elle avait soufflé, elle aurait au minimum déformé le il n’a pas été plus curieux?
zinc du bar derrière/sous lequel elle a soi-disant Imaginons, et même visualisons cette scène:
explosé… Techniquement l’un ne peut pas aller sans Bounifia jette un œil par ce "trou". S’il en était là, c’est
l’autre! qu’il avait le nez sur la boîte si j’ose dire, puisque
Sur l’une des photos, il est même montré un c’est par ce "trou" qu’il a vu une "partie métallique".
impact, soi-disant un éclat arrivé dans le dossier Dans ce cas, cette version officielle s’écroule! Car, en
d’une chaise (se trouvant dans la salle, à une table) regardant par un trou du carton, le serveur aurait été
qu’il aurait perforée. Là cela ne va plus, car la bombe si près qu’il aurait forcément entendu que cela faisait
nous a été décrite mise sous/derrière le comptoir, et « tic-tac »là-dedans!
les chaises étaient dans la salle, de l’autre côté. Pour Ce réveil, pour faire « tic-tac », il faisait « tic-tac »!
arriver ici cet éclat aurait dû, d’abord, traverser le zinc Lors de l’assemblage de la bombe, cela m’avait
du bar. Or il n’y a aucun trou dedans! À moins que même inquiété qu’il fasse autant de bruit, et c’est
l’éclat ne soit monté à la verticale vers le plafond pour pour cette raison que je l’avais incrusté dans un bloc
éviter le bar, puis ait obliqué pour passer au-dessus de polystyrène (cf. schéma à la section 4 de ce
des clients, avant de redescendre avec force (grande chapitre). Malgré l’isolation ses « tic-tac » étaient
force même!), pour faire un trou dans un dossier en audibles à 30 centimètres environ dans un
bois d’une chaise, et en traverser le rembourrage! environnement de silence total, et à 10 centimètres
C’est totalement farfelu! Cette perforation dans ce dans un environnement normalement bruyant.
dossier de chaise qui était dans la salle, on l’a fait À cause de cela, la version du serveur regardant
après! Probablement avec un clou de 180 millimètres ce que c’est que ce paquet ne tient pas. Ceux qui
et un marteau… ont écrit le récit de cette version officielle ont
Tout le reste est de la même eau: lorsque l’on totalement omis de prendre en compte les « tic-tac »
regarde les photos, cela pue la mise en scène. Par du réveil. C’est que l’on ne peut pas penser à tout
exemple sur un cliché, pris lors de la "reconstitution lorsque l’on écrit ce genre de choses…
policière"16, il est montré le serveur qui mime le geste
qu’il aurait fait avant de mettre la bombe 17. UN EXPLOSIF DÉFECTUEUX, SELON LA
sous/derrière le comptoir. On y voit Bounifia, l’œil VERSION OFFICIELLE
soupçonneux, qui regarde ce qu’il y a dans cette Au procès de juin 1990, l’expert qui est venu
poche en plastique… parler de la bombe c’est Claude Calisti et il faut voir le
S’il a fait ça, il a forcément été intrigué, il a dû pedigree! À l’époque il était ingénieur en chef - chef
regarder ce que c’était que cette boîte de couleur du service des explosifs du laboratoire central de la
verte. Car la boîte était en fait du carton provenant Préfecture de Police de Paris. C’était donc LE grand
d’un grand emballage qui avait été découpé, plié, spécialiste des explosifs qui est venu à ce procès,
collé, et scotché pour être ajusté à la taille de la quel honneur ils m’ont fait! Ils n’ont pas envoyé le
bombe. Ce qui faisait que cet assemblage conférait à sous-fifre du laboratoire comme c’est d’usage
habituellement pour témoigner. Et l’on va croire, bien
sûr, que l’étude des débris de cette bombe a été
16
Il n’y a pas eu de reconstitution en ma présence, uniquement une réalisée par cet ingénieur en chef qui plus est: LE
"reconstitution policière"… chef du laboratoire lui-même! Je plains Calisti lorsqu’il
Mémoire de Michel Lajoye page 44
y a des "nuits bleues" en Corse, car s’il analyse tout C'était digne d'un Ex Libris avec PPDA recevant
lui-même, quel travail il doit avoir le lendemain… Sullitzer pour qu'il parle de "son" dernier livre.
Le pire, c'est que lors du procès, personne ne En tout cas c’est ainsi qu’ils ont emballé l’affaire
s'est étonné que ce soit Calisti qui vienne témoigner. dans la version officielle, le peu d’impact de la bombe
À titre de comparaison, le médecin légiste qui est est dû à un mauvais explosif (Arcini l’a reconnu lors
venu parler de Moussaoui, tué par Arcini le 5 juin du procès, et s’il l’a reconnu, c’est que c’est vrai...)!
1987 à Caen, est celui qui a examiné le cadavre. Pas Et soit dit en passant, lors des audiences,
le directeur du CHU de Caen! Si cela avait été ce puisque tout le monde affirmait que c’était Arcini le
dernier, tout le monde aurait rigolé, car chacun sait concepteur de la bombe, cela aurait été bien qu’il lui
qu'un directeur de CHU ne pratique pas d'autopsie. soit demandé d’où venait cette Gomme 14! Car c’est
Eh bien pour Calisti, personne ne s'est esclaffé dans un explosif civil utilisé dans des carrières, mines, etc,
la salle, car le public trouvait apparemment normal non en dotation (officiellement) au Ministère de
que celui qui vienne déposer au sujet de cette l’Intérieur (dont dépend la Sécurité Civile), et que l’on
bombe, cela soit LE chef du service des explosifs du ne trouve pas sur les plages qui ont servi à l’invasion
laboratoire central de la Préfecture de Police de de 1944, lieux où Arcini opérait ses déminages
Paris… routiniers. Et où est le reste du pain de Gomme 14?
Il va de soi que cette analyse des débris a été Arcini a affirmé avoir mis « environ 100 grammes »,
réalisée par un laborantin de base, c'est évident. donc il devait lui en rester de cette G14. Cela aurait
Calisti ne devait jamais sortir de son bureau, et été quand même bien, pour la crédibilité de leurs
surtout pas se salir les mains à examiner les restes mensonges, qu’ils aillent mettre, chez Arcini, de la
d'une bombe. Un chef de service, ça n'analyse pas, G14 du même lot que celle qui a officiellement
ça commande… explosé le lundi 30 novembre 1987 dans ce bar de
Le fait qu’ils aient fait venir, pour témoigner, le Petit-Quevilly.
"plus grand artificier de France", le chef suprême du Quant à moi, il ne m’a jamais été demandé où
"département explosif" du laboratoire central de la j’avais eu l’explosif pour la bombe puisqu'on ne
Préfecture de Police de Paris, c’était pour couvrir cela voulait pas que je l’aie assemblée! Il est dès lors
d’une haute autorité que personne n’oserait logique qu’il ne m’ait rien été demandé.
contester! Si Calisti l’a dit, qui allait oser dire le De toute façon, il ne m’a jamais été demandé si
contraire? On n’allait quand même pas écouter j’avais fabriqué cet engin! Dès mon arrestation, l a dit
Lajoye qui forcément n’y connaît rien… que c’était Arcini le concepteur. Ce que j’avais à dire
Calisti, lors de son témoignage, a parlé d’une n’intéressait personne.
bombe à l’explosif défectueux et qui n’aurait pas J’anticipe sur le reste de ce récit, mais dans le
soufflé. Ceci devait expliquer les faibles dégâts que chapitre 11, section 10, je relate l’incident qui a eu
l’on voyait sur les photos prises après l’attentat. J’ai lieu lors d’une des audiences du procès aux Assises,
alors pris d’office la parole lors de sa déposition pour lorsque j’ai fait demander à Arcini de décrire la bombe
dire que cette bombe n’était pas défectueuse (mais de façon technique (couleur des fils, des prises
je n’ai pas parlé de la bombe-test que j’avais fait électriques, marque et type de la pile, etc). Il en a été
sauter dans un blockhaus), que je n’avais pas les incapable, c’est l’avocat général et le président qui
compétences d’Arcini, mais que j’en connaissais pas l’ont sauvé en venant à son secours.
mal sur le sujet. De plus j’ai précisé que je n’avais pas Ce qui est logique, car entre ce qui est dans le
mis de la Gomme 14 et qu’il devait faire erreur dans dossier officiel, ce qui s’est dit au procès, et ce qui
son analyse. est la vérité, il y a une marge. Car le 22 novembre
Il m’a alors été répondu, pas par Calisti, mais par 1987, comme relaté dans ce chapitre à la section 4,
l’avocat général que je n’avais pas été sonné, que ce j’ai assemblé deux bombes: l’une pour l’attentat,
n’était pas moi qui avais assemblé cette bombe mais l’autre pour le test. Deux charges explosives
« Monsieur Arcini » et que dès lors je ne pouvais pas identiques provenant de même lots de plastic Tolite.
savoir. Les bombes étaient jumelles pour ainsi dire. L’une, le
C’est vrai que dans la version officielle, c’est 23 novembre a parfaitement soufflé, et une semaine
"l’autre" qui, officiellement, a assemblé cette bombe! plus tard, l’autre, identique, aurait été faire un
Et durant le procès, intervenant en chœur avec vulgaire "plouf" comme on peut le voir sur les photos
Calisti, Arcini a surenchéri en disant qu’effectivement, dans le dossier garant de la version officielle.
lorsqu’il a assemblé la bombe, il y a mis de la Gomme Lorsque l’on voit les photographies prises par la
14 et qu’elle était, comme il l’avait constaté, police après la déflagration et qui figurent au dossier
défectueuse! Ce qui ne manquait pas de saveur, car officiel, on se demande si ce ne sont pas deux gros
cette version affirme alors que mon coaccusé m’aurait "pétards à corbeaux" qui ont sauté dans ce bar!
remis sciemment une bombe défectueuse! D’où
manipulation! 18. RÉCIT DE L'ATTENTAT
Au procès c’était bien: l’expert Calisti et l’expert (version du témoin Bounifia)
Arcini (qui se connaissaient d’ailleurs fort bien pour Comme précisé à la section 1 de ce chapitre, il y a
avoir déjà travaillé ensemble!) d’accords sur une un témoin qui a donné son récit. Il y a même eu deux
bombe que ce dernier n’avait pas assemblée et que récits qui se recoupent, à un "détail" près et que
l’autre n’avait certainement pas analysée lui-même! nous verrons plus loin. Le premier récit fut recueilli en
Mémoire de Michel Lajoye page 45
juillet 1998 (soit plus de 10 ans après les faits, et plus
de 8 ans après le procès), et l'autre en janvier 2000 Je veux bien croire que la mémoire du témoin ait
(soit plus de 12 ans après les faits, et près de 10 ans quelque peu flanché, plus de 10 ans après les faits.
après le procès). Car il nous situe un total de 13 personnes (avec lui)
Ce témoin qui a été interrogé, à titre privé, n’est présentes dans ce bar… Pourtant, lorsque j’y suis
autre que Rabia Bounifia, le serveur (et aussi le entré, il n’y en avait que 9 (je sais compter jusqu’à 8
patron) du bar! Celui qui, dans les versions officielles, + 1!).
a déplacé la bombe! C’est le témoin-clé que le Et je précise, également, que tous les documents
Ministère Public n’avait pas cru bon (et l'on se judiciaires affirment qu’étaient présentes ces 9
demande bien pourquoi...) de faire citer lors du personnes: Jelassi, Belghazi, Bounifia (le serveur,
procès de juin 1990. autrement dit le témoin), Chouikh, Darcy, Fenet,
Ses deux récits sont très étranges, et parfois, Baahmed, Poyac et Laoudj.
disons le, franchement extravagants. Difficile de leur Comment expliquer cette erreur qui situe 13
accorder beaucoup de crédit. Ils me confortent personnes là où je n’en ai vu que 9 et où la "justice"
surtout dans l’idée que cet attentat n’est qu’une mise en situe également seulement 9 en les désignant
en scène… nominativement? J’ai une hypothèse que j’évoquerai
Mais voyons plutôt, jusqu'à la section 27 incluse, en fin de chapitre…
ce que le témoin-clé Bounifia a relaté dans son De même, dans son témoignage de juillet 1998, le
premier récit recueilli en juillet 1998 (à la section 28, serveur a situé toutes les personnes à ma gauche,
j'aborderai son autre témoignage, celui recueilli en aucune à ma droite.
janvier 2000)17: Or, il y avait du monde à ma droite (comme je l’ai
indiqué sur le plan situé à la section 11 de ce
19. DISPOSITION DE CHACUN (selon Bounifia) chapitre). Il y avait notamment un homme d’une
Puisque le serveur a été interrogé (à titre trentaine d’années, qui portait un blouson de cuir
"journalistique"), il lui a été demandé de mettre sur un noir. Je m’en souviens fort bien! J’aurais même pu
schéma la disposition de chacun. D’après ses identifier cet individu si je l’avais revu ensuite.
déclarations, et ses indications, 7 clients se Si je n’en souviens autant, c’est que son allure
trouvaient au bar, 3 à une table, et 2 autres à une (disons "sportive") tranchait beaucoup comparé à
autre. l’aspect des autres présents. Ce voisin direct de
Ce qui fait qu’avec lui, il y aurait eu 13 présents droite m’avait semblé quelque peu "bizarre". Il m’avait
dans cet établissement lorsque j’y suis entré. fait être sur mes gardes… C’est pour cette raison que
Voici un plan comportant les dispositions de je me souviens de lui à ce point.
chacun, moi compris: En conséquence, sur le plan réalisé selon les
indications du témoin, comme il n’y a personne
indiqué à ma droite (entre moi et la porte des
toilettes), cela ne colle pas. Mauvaise mémoire du
patron du bar peut-être…

20. CE QUI A SUIVI MON DÉPART


(version Bounifia)
Ensuite il fut demandé au témoin à quelle heure
cela a explosé. Réponse: vers 14 heures 50.
Il indique que je suis entré dans son
établissement vers les 14 heures (ce qui est vrai),
que je suis parti aux toilettes (cf. section 11 de ce
chapitre) quelques minutes plus tard (autrement dit
vers les 14 heures 05). Le témoin poursuit son récit
en affirmant qu’environ 20 minutes après ma sortie
(soit, en comptant large, vers les 14 heures 30) un
client a fait remarquer que j’avais oublié un paquet
sur le bar et le patron dit avoir regardé dans le sac. Il
donne la même version que celle relatée dans la
section 16 de ce chapitre. J’ai donc les mêmes
commentaires et remarques à formuler, que ceux que
j’ai détaillés plus haut, au sujet de ce prétendu trou
dans la boîte et de cette histoire de partie métallique
qui lui aurait fait penser qu’il s’agissait d’un autoradio.
Puis, c’est là que la version change beaucoup!
Car le serveur ne met plus le paquet « sous le
17 comptoir » (c’est-à-dire sous le bar), mais à droite,
Je rappelle bien que j’ai été condamné sur la version officielle que nous
venons de voir, et non pas sur la version de Bounifia que nous allons dans un casier se trouvant au sol, à l’angle des murs.
maintenant aborder!
Mémoire de Michel Lajoye page 46
Dans la version officielle (et surtout au procès de
Caen lors du récit de cette action), il a été dit que le
paquet gênait, que le patron l’a ôté aussitôt après
mon départ!
Or, en juillet 1998, lors de son "interrogatoire
privé", le témoin a bien affirmé que c’est une
vingtaine de minutes après mon départ qu’un client
lui a montré le paquet, qu’il l’a déplacé, et que cela a
explosé (d’après Bounifia) environ 5 minutes après ce
déplacement.
Faisons une addition: 14 heures 05 (je sors) + 20
minutes plus tard (déplacement de la bombe) + 5
minutes après (explosion), cela nous porte à 14
heures 30! J’arrondis et compte large, et je vais
jusqu’à 14 heures 35.
14 heures 35, cela ne va pas! Car le patron du
bar a bien stipulé que l’explosion a eu lieu vers les 14
heures 50! Il nous manque 15 minutes dans ce récit!
De toute façon, le fait que la bombe n’ait eu,
lorsque je suis sorti (aux toilettes) à 14 heures 05,
encore que 4 minutes de retard, fait s’interroger! Pour
14 heures 10, tout aurait dû être réglé (cf. le récit
section 11 de ce chapitre).
Mais bon, admettons que le témoin Bounifia ait
une mauvaise mémoire et situe mal la chronologie…

Il n’y a plus que 11 personnes dans


21. DISPOSITION DE CHACUN LORS DE l’établissement, car deux des clients (dont l’un de
L'EXPLOSION (version Bounifia) ceux qui, selon le témoin, ont fait remarquer que
j’avais "oublié" un paquet) ont eu la bonne idée de
Lors de son "audition privée", il fut demandé au sortir avant l’explosion…
serveur où il se trouvait, et où se situaient les autres On peut quand même s’étonner, la bombe, dans
présents lorsque cela a explosé. ce témoignage, est là précisément où elle aurait dû
Bounifia affirme que lui se trouvait derrière son bar être placée pour "limiter les dégâts". Et les deux
à préparer un thé. Donc pas dans la salle (à servir un clients attablés (cf. plan section 19) qui lui faisaient
client ou essuyer une table) comme ce fut relaté dans face ont eu la bonne idée de s’en aller…
toutes les versions officielles relatées au procès de Et, comme dit plus haut, j’affirme qu’en fait il y
juin 1990! avait du monde au comptoir, sur la droite, lorsque je
Pourtant, dans les débats devant la Cour suis entré dans ce bar. Mais le témoin, lui, situe tout
d’Assises du Calvados, le patron du bar a toujours le monde à gauche. Logique!
été situé dans la salle, de l’autre côté du bar. En effet, compte tenu de comment aurait eu lieu
Logique! Puisque les versions officielles l’explosion (selon ce témoin), pour rendre crédible sa
affirmaient que c’était le bar en zinc qui avait fait version, il ne faut personne là ! Il ne faut pas, il ne
écran, le patron ne pouvait pas, ne devait pas, être doit pas, y avoir du monde à droite! À droite, c’est en
derrière son comptoir, sinon nous aurions demandé plein dans le rayonnement de la bombe qui, dans sa
comment il a fait pour ne pas être gravement blessé version, a explosé là: dans l’angle du mur de droite
avec un engin lui explosant dans les jambes! (la bombe venait de, et a été placée à, l’extrême-
Maintenant que la bombe n’est plus sous/derrière droite...).
le bar, l’emplacement du patron a aussi changé en Si le témoin avait situé du monde là, à la droite du
conséquence. Ça change! comptoir, cela aurait été si proche de la bombe que
Quoi qu’il en soit, voici la disposition de chacun et l’on en serait venu à la question embarrassante:
l’emplacement de la bombe, selon le récit du témoin comment se fait-il que personne n’ait été blessé?
Bounifia: Car, comme nous le verrons plus loin, personne ne
fut blessé!
Quoi qu’il en soit, cette nouvelle version diffère de
la version officielle sur laquelle j’ai été condamné! Au
procès, on a toujours dit que la bombe avait été
déplacée aussitôt après mon départ (soit vers 14
heures 05) et mise sous/derrière le bar. « Sous le
comptoir » pour être précis!
De plus, selon le témoin, il y aurait eu 11
personnes dans cet établissement lorsque cela a
Mémoire de Michel Lajoye page 47
explosé. Je rappelle que la "justice" a toujours situé, affirme que l’explosif utilisé était de la Gomme 14
en les désignant nominativement, 9 personnes dans défectueuse (cf. section 17 de ce chapitre). Or, de la
ce bar lorsque j’y suis entré! Et, apparemment (mais G14 cela ne souffle pas des masses, et de la
ce n’est pas très clair), selon le Ministère Public, ce défectueuse encore moins! Pour souffler autant cela
sont les 9 mêmes personnes qui se trouvaient aurait donc bien été de la Tolite qui aurait explosé
présentes lors de l’explosion et qui auraient subi dans cet établissement… Mais encore faudrait-il que
cette dernière. cela ait, réellement, soufflé comme le décrit ce
Le témoignage de Bounifia contredit, sur tous les témoin! La suite de ce récit nous démontrera que
points, toutes les versions officielles développées lors cette explosion relève du fantasme pur et simple!
du procès qui a suivi cet attentat. Mais qui et que En effet, le témoin affirme que la déflagration de
croire? la bombe a été telle, qu’en plus de renverser les
clients, cela a soufflé presque toutes les vitres des
22. EFFETS MATÉRIELS DE L'EXPLOSION fenêtres en emportant même certains renforts!
(selon Bounifia) Or, ce débit de boisons n’avait pas de vitrine, ni
Quant aux effets de l’explosion que le témoin a des grandes vitres, mais plein de petites vitres
décrit et que je vais détailler maintenant, j’affirme teintées sur des fenêtres classiques situées dans les
d’entrée que c’est techniquement impossible! murs faisant face aux routes (cf. plan plus haut).
Entendons nous bien, je n’ai aucun intérêt C’était de la vitre épaisse sur laquelle il faut exercer
particulier à démolir ce témoignage de Rabia Bounifia une très forte pression pour la faire sortir (en
puisqu’il me sert. En effet, il indique « aucun blessé » emportant des morceaux des renforts en plus!).
(je détaillerai plus loin!) ce qui contredit radicalement Le témoin indique également que des lambris
la version du Ministère Public! J’ai été condamné recouvrant les murs ont été arrachés! De sérieux
pour avoir blessé trois personnes! Cependant je ne dégâts ont été occasionné au plafond (je rappelle
crois pas que le témoin ait dit la vérité, et voyons que la bombe est présumée avoir explosé à un
pourquoi: niveau proche du sol!), et l’habitation se trouvant au-
Rabia Bounifia a été interrogé sur l’explosion qu’il dessus de l’établissement a été "secouée". Et pour
aurait subie. Il décrit un souffle phénoménal! Au point illustrer ce propos le témoin affirme que des objets
que, comme il l’a affirmé, ce souffle a renversé (tels posés sur une table dans la pièce du premier étage
des fétus de paille!) les clients assis sur des (au-dessus du bar) ont été renversés… Fichtre!
tabourets et/ou accoudés debout au bar. Mais il À écouter ce témoin, la bombe a causé de
indique que lui-même, derrière son comptoir, ne sera nombreux dégâts! Et étrangement, "l’album de
pas projeté à terre. Pas plus que les trois autres qui, photos" figurant au dossier officiel et censé
selon lui, étaient assis à une table. représenter le bar après l’explosion, ne montre rien
Il faut "visualiser", car les présents (le serveur de cet ouragan! C’est quand même étonnant que les
indique 7 personnes) au bar sont sur la gauche dégâts aient été si apocalyptiques et que les policiers
(j’affirme qu’il y avait du monde sur la droite, mais le aient oublié de les photographier… Si les
témoin situe tout le monde à gauche. Nous avons vu destructions avaient été telles, je crois, quand même,
plus haut pourquoi il ne faut pas, il ne doit pas, y qu’ils ne nous l’auraient pas caché lors du procès!
avoir du monde à droite...). Compte tenu de la Qu’ils auraient, au contraire, bien appuyé sur le côté
hauteur du bar, et du gabarit moyen d’une personne puissant de cette bombe. Pourtant c’est l’inverse qui
(70 à 80 kilos), il faut un souffle inouï pour renverser s’est déroulé!
quelqu’un. Le seul "point d’appui" pour le souffle En effet, pour expliquer le peu d’impact (visible sur
étant ce qui dépasse des corps au-dessus du les photos se trouvant au dossier officiel), on a
comptoir, autrement dit les torses. délégué Calisti pour nous expliquer que si les dégâts
De plus, ces gens au bar devaient être dans la ont été minimes, pour ne pas dire insignifiants, c’est
position adéquate: penchés en avant, voire appuyés parce que l’explosif était défectueux (cf. section 17
sur le zinc. Pour les renverser, il faut un fort 2coup de de ce chapitre).
vent", pas une légère brise… Seulement il faudrait savoir! C’était défectueux où
D’autant que les clients sont assez éloignés du cela a ravagé le bar? Car si on écoute Bounifia, à 14
point de l’explosion qui serait intervenu sur la droite, heures 50, ce fut un remake de l’explosion de
à plusieurs mètres, avec le souffle partant du sol (la Hiroshima dans son établissement!
bombe aurait été déplacée et mise dans un casier au Et c’est bien ça qui me chagrine. Car les explosifs,
sol), et forcément atténué par le zinc du bar, qui lui, je connais un peu. Lorsque du plastic explose, le
étrangement, ne sera pas détérioré! Alors que l’angle souffle "rase" les murs (ceux qu’il n’arrive pas à briser)
du comptoir ne se trouvait à guère plus de 50 et "polit" la surface en s’écrasant contre. Ce qui fait
centimètres de la bombe (cf. le plan précédent)! "dégager" toutes les aspérités fixées aux murs. Le
Pourtant, aucun élément du bar (si proche!) ne sera souffle agit comme un rabot le long des parois. Dans
arraché! Il ne subira aucune déformation! Le zinc le cas de ce bar, c’était justement un bar! Par
c’est du solide quand même, pourquoi ne l’utilise-t-on conséquent des bouteilles en pagaille, des lustres,
pas pour concevoir des blindages?! etc… Le souffle de la bombe (qui avait été déplacée
Ce souffle que décrit le témoin, contredit, près du sol!) aurait fait remonter une telle pression
"accessoirement", la version officielle ! Cette dernière d’air, de souffle, derrière le bar que l’ensemble des
Mémoire de Michel Lajoye page 48
bouteilles (et autres) entreposées derrière le comptoir En effet, cette dernière en soufflant aurait projeté
(comme c’est d’ordinaire dans un bistrot!) auraient été les éclats vers le haut, le bas, à l’ouest, à l’est, au
propulsées vers le plafond. Une fois atteint la voûte, sud, au nord: partout autour, exactement comme le
elles auraient été pulvérisées par le choc et seraient fait une bombe!
retombées avec une grande violence au sol en Ce "rayonnement" en tous sens de ces particules
milliers d’éclats. Au sol, là où le souffle avait aurait dû être d’autant plus concrétisé que, dans le
"renversé" les clients… même temps, le témoin nous décrit bel et bien un
Passe encore que ces derniers aient pu échapper souffle qui renverse des clients (se trouvant fort loin
à la "grêlée" des centaines de tronçons métalliques sur la gauche) ; fait sauter les vitres avec leur
(puisque la bombe contenait ce genre d’extra!), mais encadrement (fenêtres donnant sur les rues) ;
échapper à une "grêlée" de milliers de bouts de verre arrache des lambris (sur les murs autour) ; "secoue"
qui auraient dû (si cela avait explosé comme l’a l’habitation au-dessus (le plafond du bar). Il est pour
affirmé ce témoin...) partir de toutes parts: c’est aussi le moins étonnant que cela ait soufflé dans toutes les
gros qu’un "témoignage" d'Elie Wiesel! directions, mais projeté que dans une seule!
Ensuite, ce souffle est parti du sol, car la bombe Et toujours à propos de ces éclats métalliques, le
nous a été décrite déplacée et mise dans un casier zinc du bar aurait dû en être truffé! Il suffit de
se trouvant à terre (dans le coin à droite de la pièce). regarder le plan qui précède pour en avoir la
Dans ce cas, si ce souffle a renversé des clients (se certitude! Car, si la bombe avait explosé là, dans
trouvant assez loin sur la gauche de la pièce) l’angle de la pièce, le coin du bar se trouvant à
accoudés au zinc du bar, les chaises de la salle environ 50 centimètres, aurait encaissé de nombreux
auraient été sorties! Le souffle, en rasant le sol, éclats! Hé bien non! Les éclats iront (si on en croit ce
aurait pris les chaises par en dessous, les aurait témoin!) tout droit: tous en direction d’un mystérieux
soulevées et propulsées par les fenêtres vers panneau, se trouvant dans la salle, sur un moignon
l’extérieur du bar, sur la chaussée des deux rues! de mur, faisait face à la bombe!
Logique, si le souffle a renversé (comme des fétus de Ayant une certaine expérience du maniement, et
paille!) des clients de 70 à 80 kilos, ce n’est pas une de l’effet, des explosifs, cela me permet peut-être
malheureuse chaise de même pas 10 kilos qui va d’être plus "critique". Pour d’autres personnes, cela
rester sagement à sa place: elle "décolle" et passe peut sembler "normal" ces détails sur le matériel…
par la fenêtre, c’est évident! Mais voyons le traitement qu’a subi l’humain dans le
Le patron du bar aurait dit que la bombe a été récit de cette explosion hallucinante…
déplacée, et que cela a fait "plouf"!, cela aurait été
crédible. Mais là il a décrit un souffle qui, s’il avait eu 23. AUCUN DÉGÂT HUMAIN (selon Bounifia)
lieu, aurait totalement détruit son établissement. Tout Ce qui est capital dans le témoignage de Rabia
objet non solidement fixé aurait été mis en Bounifia, c’est qu’il a affirmé que cet "attentat" n’a
mouvement par cette déflagration. Un simple verre causé aucun blessé ! Nous y voilà! Cela explique, du
serait devenu un projectile meurtrier. coup, pourquoi la Caisse Primaire d’Assurance
Il faut bien analyser ce que c’est qu’un tel souffle Maladie (ainsi que les "victimes") ne se sont jamais
dans un bar: un endroit où tout est mobile, où il y a constituées partie civile lors du procès de Caen en
plein de bouteilles, de verres, tables, chaises, juin 1990. Selon Bounifia, il n’y a eu aucun frais
tabourets, etc, toutes choses forcément propulsées d’hospitalisation et/ou de soins divers!
par la déflagration d’une explosion, et cela donne Même pas d’admission aux urgences, puisque le
des milliers d’éclats divers. témoin a déclaré que ce sont les pompiers qui ont
Et à propos d’éclats, puisque la bombe a autant effectué, eux-mêmes, dans un camion, le "check-up"
soufflé, tous les éclats métalliques qu’elle contenait de chacun!
auraient dû être projetés fort loin! Les tronçons de Le patron déclare, en outre, que ce n’est que le
métal entouraient totalement la charge explosive! lendemain qu’il s’est rendu compte qu’il avait un
Dès lors, ils devaient "décoller" (dans toutes les hématome à la cuisse.
directions!) avec une puissance phénoménale: Donc il est clair que Bounifia ne fut jamais blessé!
propulsés par 150 grammes de plastic! Hé bien tous Pourtant, comme je l’ai mentionné dans la section 15
ces éclats ont été arrêtés (selon ce témoin) grâce à de ce chapitre, ce même Bounifia est nominativement
un « panneau en face » (?) se trouvant sur un désigné sur la liste des blessés figurant dans le
moignon de mur situé dans la salle, près d’une des dossier officiel ! Ce dernier affirme que furent blessés
tables et de la porte des toilettes (cf. plan précédent les dénommées Jelassi, Belghazi et Bounifia!
pour situer en gros). Et ce serait ce mystérieux Je fais par ailleurs remarquer que dans tous les
panneau (situé quand même assez loin!), qui, à lui documents judiciaires la liste des 9 présents dans le
seul, aurait attiré (il était magnétique peut-être?), puis bar est donnée dans cet ordre: Jelassi, Belghazi,
recueilli et enfin stoppé net, la totalité de cette Bounifia, Chouikh, Darcy, Fenet, Baahmed, Poyac et
"grêlée" métallique… Laoudj. Chacun peut ainsi constater,
Mais, pour ce faire il aurait fallu que tous les éclats qu’étrangement, les trois premiers de la liste sont
aient été projetés dans la même direction! Ce qui est aussi ceux que la "justice" a comptabilisé comme
évidemment rigoureusement impossible puisque les "blessés"! Un peu comme si on avait dit « il faut
éclats entouraient totalement la charge explosive! inventer trois blessés », et que l'on avait pris les trois
Mémoire de Michel Lajoye page 49
premiers noms figurant sur la liste des présents dans Alors, là encore, cela ne colle pas, car le témoin
l’établissement… affirme qu’il n’y a eu aucun blessé, pas le moindre
Quoi qu’il en soit, avec le témoignage de Rabia tympan n’a été crevé, et personne ne fut admis aux
Bounifia, nous avons une preuve de la manipulation urgences de l’hôpital du coin, puisque chacun s’est
judiciaire qui apparaît au grand jour! Puisque le contenté d’aller faire un petit tour dans le camion des
patron du bar ne fut pas blessé, comment se fait-il pompiers pour un rapide examen… Voilà son
que la "justice" l’ait compté, dans l’Acte d’accusation témoignage! Je suis plus que sceptique!
et autres, comme victime? Qui l’a ajouté sur la liste? Les musulmans croyants y verront, peut-être, une
Ou plus exactement: qui a inventé cette liste de trois intervention d’Allah qui a pu multiplier ses doigts afin
blessés? d’en mettre un dans chacune des oreilles des
Lors de son audition privée, le témoin a présents pour protéger leurs tympans…
également déclaré (très important!): aucun tympan Autre "point de détail", lors de l’explosion d’un
n’a été crevé. Là, avec cette dernière affirmation, il pain de plastic, le souffle et l’intensité déchirante de
est clair que l’on approche, de très près, l’intensité la détonation ce sont deux choses qui vont
d’un délire wieselien… ensembles, mais la chaleur en est une troisième
En effet, voilà 9 personnes (selon la "justice"!), 11 indissociable! La charge provoque une flamme…
personnes (selon le témoin Rabia Bounifia), qui sont Dans ce bar, ils ont dû, si cela a explosé, être tous
dans un lieu clos où vient de se produire une rasés gratis! De la Tolite (ce que j’avais mis dans la
explosion provoquant un souffle inouï (d’après le bombe) cela ne dégage pas une grosse intensité de
témoin!). L’onde de choc a tout balayé sur son chaleur, mais l’espace d’une fraction de seconde l’air
passage! Sur la gauche, 7 personnes accoudées au ambiant est enflammé à cause des gaz dégagés (et
bar sont renversées, plaquées à terre par le souffle soufflés) par l’explosif. Le témoin n’a rien précisé
de la bombe qui a explosé dans l’angle, à l’extrême- quant à ce qui est arrivé à son système pileux… Cela
droite de la pièce! Tous les tympans auraient par voudrait donc dire qu’il n’a subi aucun dommage!
conséquent forcément éclaté! Affirmer le contraire Pourtant, il a déclaré, dans son "interrogatoire
c’est se foutre du monde! privé" de juillet 1998, qu’à l’endroit où a explosé la
Surtout que Bounifia raconte, de lui-même, que bombe, il y avait une forte flamme! Mais il ne dit rien
les deux clients sortis juste avant l’explosion, et qui de plus!
avaient eu le temps de faire 500 mètres (c’est lui qui Je stipule bien que la logique des explosifs veut,
le dit!), ont entendu la détonation et qu’ils en sont qu’en général, toute personne "décoiffée", par le
(apparemment) revenus au bar. Que cela ait été souffle d’une charge de plastic, n’ait pas besoin de
audible à 500 mètres, c’est normal. Mais cette beaucoup se "recoiffer" après…
déclaration du témoin signifierait qu’en plein milieu
urbain, à travers les rues, malgré la circulation intense 24. HYPOTHÈSE D'UNE DÉFAILLANCE DU
des deux grands boulevards proches, cela s’est SYSTÈME DE MISE À FEU
entendu distinctement… Ce fut même si tonitruant Il y a aussi une hypothèse que vient à l’esprit (et
que ces deux personnes éloignées (d’un demi- que certaines personnes m’ont signalée comme
kilomètre!) du point sismique ont pu en déterminer, "possible"): celle d’une défaillance du système de
avec précision, que l’épicentre était bien le fameux mise à feu de cette bombe (elle était programmée
établissement qu’elles venaient juste de quitter pour exploser 4 minutes après mon départ).
puisqu’elles y sont (apparemment) revenues… Un dysfonctionnement qui pourrait expliquer que,
Il est plus qu’évident que lorsqu’une telle selon le témoin Rabia Bounifia, cela n’ait explosé
détonation se produit, si elle a lieu dans une pièce qu’à 14 heures 50 et non à 14 heures 10 comme
bien close, elle fait "sauter" les tympans des initialement prévu. C’est ce "retard à l’allumage" qui
personnes présentes! D’autres lésions sont aurait permis de déplacer la bombe, puisque Bounifia
obligatoirement occasionnées aux gens qui subissent affirme ne l’avoir déplacée qu’une vingtaine de
une telle commotion! Dans le cas de cet attentat, minutes après mon départ.
n’importe quel médecin aurait fait "embarquer", pour J’avoue qu’à première vue cette hypothèse peut
les garder en observation à l’hôpital, les clients sembler séduisante. Mais, elle ne résiste pas à une
soufflés et projetés au sol. Aucune personne n’est analyse, point par point, du témoignage de Bounifia.
soufflée, plaquée à terre, par la déflagration d’une En effet, admettons que le système de mise à feu
bombe, sans être au moins retenue à l’hôpital! C’est de la bombe ait eu un problème. Qu’est-ce que cela
la logique même! change? En quoi c’est différent que la bombe ait
Le souffle d’une bombe est tel (surtout celui décrit explosé à 14 heures 50 au lieu de 14 heures 10?
par le témoin!), la détonation si terrible, si déchirante, Cela change juste l’emplacement, au lieu d’exploser
que cela cause des lésions neurologiques, voire des sur le zinc du bar, elle le fait là où elle fut déplacée
hémorragies internes. De ce fait, les médecins (plus de 20 minutes après mon départ). Mais elle
gardent toujours (voir les attentats de Paris) en explose quand même!
observation toutes les victimes qui se trouvent dans Qu’elle soit à un bout ou à l’autre de la pièce,
un certain rayon de la bombe. Même ceux qui sont c’est kif-kif pour ce qui est de l’intensité en décibels
apparemment en "bonne santé" sont gardés en de la détonation et de la pression d’air qu’a dégagé
observation à l’hôpital. Ce qui va d’ailleurs de soi. la déflagration de ce plastic. Je rappelle que le
Mémoire de Michel Lajoye page 50
témoin Bounifia a décrit une apocalypse dans son Malgré cela, je ne fus jamais contacté, et aucune
établissement! compagnie d’assurance ne fut partie civile au procès
Que le déplacement de la bombe ait protégé les qui suivra cet attentat!
présents des projections de cette dernière, d’accord, Pourtant, la compagnie aurait dû me contacter
admettons. Mais le souffle et la détonation qui ont pour savoir si j'étais solvable ou non… C'est une
fait sauter les vitres et leur encadrement, auraient procédure automatique ! Malgré cela, je ne fus jamais
aussi fait sauter les tympans des présents et cela contacté, et aucune compagnie d'assurance ne fut
que ce soit à 14 heures 10 ou 14 heures 50, voire à partie civile au procès qui suivra cet attentat!
n’importe quelle autre heure! Alors questions: est-ce qu’un assureur a
En conclusion, que le système de mise à feu de la réellement (et à quel moment?) expertisé le bar? Ou
bombe ait eu une défaillance, cela se pourrait car est-ce qu’il a remboursé ce qu'on lui a dit de
c’est du domaine du techniquement possible. Mais, rembourser, afin "d’enrichir" la crédibilité de la mise
puisque le témoin nous décrit une bombe qui en scène?
explose, cela ne change rien, strictement rien, à ce En tout cas, AXA c’est une chouette compagnie,
techniquement impossible que constitue le non- car voilà un assureur qui (selon le témoin Bounifia)
déchirement des tympans des personnes débourse beaucoup d’argent, et qui ne se retourne
présentes… même pas contre le vilain méchant néonazi qui a tout
cassé dans le bar. Hé ho, chez AXA ce ne seraient
25. BOUNIFIA NE SAVAIT PAS… pas des sympathisants qui répugnent à se retourner
En juillet 1998, lors de son "interrogatoire privé", il contre "l’extrême-droite"?
fut aussi demandé au patron du bar pourquoi il ne L’assureur était certain de se faire rembourser par
s’est jamais constitué partie civile contre moi. Car il a le Fonds de garantie (pour les victimes d’actes de
subi un préjudice commercial. Si son bar a subi les terrorisme), il n’avait juste qu’à se manifester.
dégâts qu’il décrit, il a dû fermer le temps des travaux Bah, les compagnies d’assurances étaient encore
de rénovation… Sans oublier que, comme précisé à philanthropiques à l’époque, cela ne peut être que
la section 15 de ce chapitre, la "justice" comptabilise ça…
Bounifia comme un des blessés! Sa réponse pour
27. CONCLUSIONS SUR LE TÉMOIGNAGE DE
expliquer sa non-constitution de partie civile, fut qu’il
BOUNIFIA
ne savait pas qu’il pouvait le faire!
Ouais, ouais, bien sûr! Car, comme toute "victime Que penser du témoignage de Bounifia recueilli
des racistes", il a forcément vu débarquer un cabinet en juillet 1998? À quel moment dit-il la vérité? Très
conseil type MRAP, LICRA, LDH et compagnie! J’ai compliqué de faire la part de vrai et du faux…
du mal à y croire à son, « j'savais pas, M’sieur! »… Nous avons vu qu’il parle d’un souffle énorme, de
Je crois plutôt qu'on lui a dit de rester chez lui, car gens balayés, reversés, projetés à terre, de vitres et
si au procès il était venu à la barre (en tant que partie leur encadrement soufflés, de lambris arrachés,
civile) nous raconter "l’ouragan" qu’il a décrit, en d’habitation au-dessus du bar secouée, pour au final:
précisant qu’il n’y a eu aucun blessé, j’aurais été pour même pas un tympan crevé, et pour toute
le moins soupçonneux. Je me serais sans doute hospitalisation une simple petite visite dans un banal
permis de lui demander s’il ne se foutait pas de moi camion de pompier garé devant!
avec cette version de l’explosion… Compte tenu du niveau de décibels auquel un
Des témoins de ce genre, je comprends pourquoi tympan se déchire, il est dès lors totalement
on s’est bien gardé de les faire venir au procès de fantaisiste d’affirmer que 150 grammes de plastic
Caen! Dans un procès-verbal, auto-rédigé par la détonnent et soufflent dans un bar bien clos de 30
police politique, ça va, cela "tient la route". Mais dès m3 (autrement dit 75 m 3, soit une moyenne de 2
qu’un témoin de ce genre témoigne oralement cela grammes d’explosif par m3, ce qui est une proportion
devient assez surréaliste comme peut l’être cette énorme!) sans faire sauter les tympans des présents.
déposition privée qui a été recueillie en juillet 1998. C’est matériellement, techniquement, etc, impossible !
Même Wiesel (LA référence en matière de faux-
26. UN ASSUREUR FANTÔME… témoignages) n’oserait pas affirmer un truc pareil!
Quant aux dégâts dans le bar, le patron a affirmé En tout cas cette "déposition" de Bounifia,
que c’est un entrepreneur de Sotteville (près de recueillie en juillet 1998, même si elle est
Rouen) qui s’est occupé de la remise en état. Et c’est manifestement fausse, car totalement délirante,
la compagnie d’assurance AXA qui a payé, 6 mois contredit quand même la version officielle sur laquelle
plus tard, les frais. j’ai été condamné en juin 1990! Nous sommes même
Mais pourquoi l’assureur ne s’est jamais retourné très loin de la version du Ministère Public sur laquelle
contre moi en se constituant partie civile? Mystère! j’ai été condamné et qui fait état de trois blessés!
Jamais je ne fus contacté par un assureur! Des victimes que, bien sûr, comme dit plus haut,
Pourtant, la compagnie aurait dû me contacter nous n’avions jamais vues au procès, mais elles
pour savoir si j’étais solvable ou non… C’est une étaient bien là, virtuellement, sur le papier de
procédure automatique! l’accusation! l’Arrêt de renvoi devant les Assises fait
bien état de blessés!

Mémoire de Michel Lajoye page 51


Or, en juillet 1998, le patron du bar a affirmé (ou Je rappelle que ces derniers affirment qu'étaient
avoué, c’est comme on veut...) que personne ne fut présents les dénommés: Jelassi, Belghazi, Bounifia,
blessé, pas un seul tympan crevé, et que Chouikh, Darcy, Fenet, Baahmed, Poyac et Laoudj.
l’hospitalisation a juste été une "visite médicale" dans Cela change! Car en juillet 1998, le témoin Bounifia
le camion sanitaire des pompiers… avait situé, en les mentionnant sur un plan, un total
Encore une fois: qui et que croire? (lui compris!) de 13 personnes (cf. ce chapitre,
section 19 et suivantes).
28. TEMOIGNAGE DE BOUNIFIA Cette variation dans le nombre des présents
(version janvier 2000) s'explique par le fait que, suite au témoignage de
Voyons maintenant l'autre témoignage de Bounifia recueilli en juillet 1998, j'ai inclus cela dans
Bounifia. Le 16 janvier 2000, des journalistes du le mémoire qui a été diffusé. Dès lors, on est
mensuel Révision, en vue de préparer leur numéro forcément allé expliquer au patron du bar que c'était
93 (avril 2000) consacré au "Terrorisme made in 9 présents et non 13…
France", sont allés interroger le patron du bar Au Pour le reste, le témoignage de Bounifia version
Pavillon d'Alger. janvier 2000 est similaire à celui de juillet 1998. Il a
Tout d'abord, ils ont ramené une information répété les mêmes choses, les mêmes incohérences.
inédite, un scoop: le bar visé n'en est pas vraiment Je ne reviens pas sur ces dernières. Cessons de
un, c'est un foyer! Lors du procès de Caen en juin "disséquer" les wieseleries de Bounifia, je l'ai
1990, il ne fut pas précisé que cet établissement était suffisamment fait à partir de la section 19 de ce
aussi un "centre d'hébergement"! Cela change tout! chapitre.
Reste, aussi, à savoir pourquoi, dans le dossier Le plus important, c'est que dans son récit de
officiel, il n'apparaît nulle part que c'était un "foyer janvier 2000, le patron de bar affirme, encore une
d'immigrés" qui a été la cible de cet attentat! fois, que personne ne fut blessé. Or, j'insiste bien, le
Ces "cachotteries" peuvent se comprendre dossier officiel contient, à de multiples endroits
aisément: ce "foyer d'immigrés" comporte 28 (notamment dans l'Arrêt de renvoi devant la Cour
chambres (et combien de résidents dans chaque d'Assises), l'affirmation qu'il y a eu trois blessés dans
piaule?) en plus du bar. En conséquence, nous l'attentat qui m'est reproché! Les dénommés Jelassi,
pouvons estimer que l'établissement est à problèmes. Belghazi, Bounifia (les 3 premiers de la liste présents
Il doit bien y avoir quelques clandestins, de la dans le bar…) sont nominativement désignés comme
drogue, toutes choses qui sont courantes dans un "blessés"!
foyer d'immigrés. Aussitôt après l'attentat, dans son édition du 1 er
Dès lors, Rabia Bounifia, le patron de ce "centre décembre 1987, le quotidien Ouest-France faisait un
d'hébergement", est forcément quelqu'un que la compte-rendu très sommaire de l'attentat et précisait,
police et les autorités préfectorales tiennent! Ne lui aussi, qu'il y avait eu trois blessés. Affirmations
serait-ce que pour ses autorisations d'ouverture reprises dans les éditions suivantes. Ce qui veut dire
nocturne durant le Ramadan (car le patron a déclaré qu'avant même d'avoir tous les détails de cette
que, lors de cette période, il restait ouvert toute la explosion, la presse a claironné qu'il y avait eu trois
nuit. Tolérance rarissime pour un débit de boisson). blessés, ce que la "justice" a accrédité par la suite.
Un simple arrêté préfectoral pourrait faire fermer son Signe qui laisserait à penser qu'avant même que je
commerce, lui supprimer sa licence de cafetier… ne dépose ce que je croyais être ma bombe, on avait
Si nous avions su ces choses plus tôt, nous prévu qu'elle ferait trois blessés… sur le papier!
aurions découvert que Bounifia avait (et a encore?) En conclusion, il faut surtout retenir de cette visite,
un profil-type pour prêter son concours, contraint et opérée en janvier 2000 par les enquêteurs de
forcé, à une manip'! D'où des investigations plus Révision, que: les bars L'Époque et Au Pavillon
poussées dans sa direction. d'Alger sont plus des foyers d'immigrés que de
Même découverte de l'équipe de Révision pour le simples estaminets; puis qu'il est, une nouvelle fois,
bar L'Époque, qu'Arcini a "attaqué" le 6 mars 1987 confirmé que personne ne fut blessé dans
(cf. chapitre 5, section 2, de ce mémoire). Il apparaît l'explosion. Ce dernier point démontre clairement que
qu'il s'agit également d'un "foyer d'immigrés" le dossier sur lequel j'ai été jugé, et condamné, a été
comprenant un bistrot, ce que ne mentionne à aucun manifestement gonflé au niveau des accusations.
moment le dossier officiel, et là aussi, ce ne fut jamais Sans parler des autres manipulations.
évoqué au procès qui a suivi. Pour l'anecdote, je relate aussi que l'équipe de
Donc, au final, hormis l'attentat de Caen (commis Révision a eu quelques problèmes dans ce bistrot.
le 5 juin 1987, voir ce document au chapitre 5, L'un des journalistes a demandé s'il pouvait prendre
section 3) qui a visé une personne précise (mais une photo du bar, cela lui a été accordé, mais dès le
Arcini s'est trompé de cible), les deux autres attentats premier flash des clients se sont manifestés et ont
connus perpétrés en Normandie (à Petit-Quevilly), ont exigé que les journalistes paient une tournée
visé des foyers d'immigrés et non de simples bistros générale pour prix de ce cliché. S'en sont suivis des
comme on l'a dit. palabres, et durant ces derniers, l'un des sacs des
Par ailleurs, dans son témoignage du 16 janvier journalistes a été fouillé. C'est à son retour à Paris
2000, Bounifia a situé 9 personnes dans son bar, qu'il s'est rendu compte de la "réquisition" d'une
soit le même nombre que les documents judiciaires. partie de ses affaires, et qu'il lui est revenu en
Mémoire de Michel Lajoye page 52
mémoire l'altercation suite à la photo, puis l'animation façon certaine) combien de retard il reste avant
autour de son sac dont il ne pouvait s'occuper, l’explosion! Mais c’est techniquement possible.
employé qu'il était à protéger son appareil. Ceux qui Il faut bien garder à l’esprit qu’ils savaient, via
veulent tous les détails, que je ne peux reproduire ici Arcini, où j’allais intervenir. Ce bar faisait l’objet d’une
car ce n'est pas le sujet, pourront consulter le numéro "fiche de repérage" complète indiquant clairement
93 (avril 2000) de Révision (adresse en bas de la qu’il fallait laisser au moins 4 minutes de retard à la
page 15 de ce document). bombe de façon à faire le trajet du bar jusqu’à
Dès lors, avec cette mésaventure, il apparaît que l’immeuble (là où j’ai changé de vêtements).
cet établissement mauresque est une vraie zone de En conséquence, ceux qui ont lu la fiche savaient
non-droit! Et nous en revenons à ce que j'écrivais d’une part où j’allais intervenir (simple pour eux d’être
plus haut: le patron d'un tel bouge est forcément présents sur place) et d’autre part ils savaient, grâce
tenu, rien n'est gratuit! Si la Préfecture lui délivre à la fiche (que j’allais, évidemment, respecter à la
actuellement des autorisations d'ouverture nocturne, lettre!), que lorsque je sortirai du bar, ils auraient
ce n'est pas sans contrepartie. Ces autorisations dans les 4 minutes pour neutraliser la bombe!
actuelles ne sont peut-être qu'une partie des Autrement dit plus qu’il n’en faut pour ouvrir le sac,
"avantages en nature" octroyés pour d'anciens puis la boîte en carton, et débrancher les prises
services rendus. Je pense notamment à ceux de électriques.
1987… Si cette hypothèse est la bonne, ils ont eu tout le
"Accessoirement", ce journaliste qui s'est fait loisir, ensuite, de: soit faire sauter ma bombe (après
dépouiller fait penser à ce qui aurait dû se produire le l’avoir réactivée) ; soit faire exploser un "pétard
30 novembre 1987 lorsque j'ai "oublié" dans ce bar mouillé" de Gomme 14 (ce qui expliquerait, du coup,
un sac en plastique. Compte tenu que tout client le rapport du laboratoire...) à eux, moins puissant afin
(non habitué des lieux) se fait "réquisitionner" ses de limiter les dégâts dans le bar 18.
affaires, il va de soi que, si cela avait été la faune Et, dans tous les cas, l’établissement était vide
habituelle présente dans ce bar, dès que j'aurais lors de l’explosion. Cette mise en scène expliquerait
tourné les talons, mon sac aurait été "visité". Cela aussi pourquoi c’est à 14 heures 50 (si l’on en croit
voudrait donc dire que, comme je le mentionnais plus les dires de Bounifia), soit 45 minutes après mon
haut à la section 14, les présents dans ce bistrot, départ, qu’il y a eu une explosion dans ce bar.
lorsque j'y suis rentré, n'étaient sans doute que des Pour ma part je crois qu’une déflagration (ou plus
"figurants" (des "auxiliaires de police"?). vraisemblablement une détonation) a bien eu lieu, il
serait très hasardeux pour eux de mentir sur ce point.
29. CE QUI A PU SE DÉROULER DANS CE BAR Ne serait-ce que pour rendre crédible la mise en
LE 30 NOVEMBRE 1987 scène auprès des voisins de ce quartier qui, s’ils
Nous pouvons imaginer ce qui s’est déroulé n’avaient pas entendu de détonation, auraient pu
réellement: s’interroger sur ce mystérieux attentat si silencieux…
Soit ils (la DPSD, les RG ou autres), m’ont changé Pour moi il n’y a vraiment rien de compliqué dans
mon explosif pour de la Gomme 14 préalablement cette "mise en scène". Ce sont quand même des
"mouillée", et cela avant que je ne dépose le paquet professionnels et une intervention de ce genre est
(cf. la section 6 de ce chapitre). De même que les simple. C’est un cas d’école si j’ose dire. Rien n’est
détonateurs ont pu être trafiqués. Ainsi ils pouvaient plus aisé à neutraliser qu’une bombe à retardement
me laisser commettre un attentat puisque cela allait si on connaît le retard qu’il lui reste. Et là ils le
faire "plouf"! Si la Tolite que j’avais mise a été connaissaient via la fameuse fiche! Et de toute
remplacée par de la Gomme 14 mouillée, cela allait façon, ouvrir le sac, la boîte en carton et neutraliser
émettre une intense chaleur, mais rien projeter. Cela en débranchant les prises, c’est l’affaire de quelques
expliquerait pourquoi le rapport du laboratoire et secondes…
Calisti le jour du procès, ont affirmé que c’est de la L’impératif pour réaliser une telle opération, c’est
Gomme 14 qui a explosé dans ce bar. Cette d’être présent sur place, afin de désactiver la bombe
hypothèse expliquerait la version officielle dès que le poseur a tourné les talons.
développée au procès de Caen. (cf. section 17 de ce Si je suis dans le vrai avec cette hypothèse, cela
chapitre.) pourrait expliquer pourquoi le patron du bar situe 13
Soit, aussitôt après que j’ai eu tourné le dos à présents dans la salle, là où la "justice" en situe
l’angle de la rue, ils ont fait sortir tout le monde du seulement 9! (cf. section 19 de ce chapitre.) Bounifia
bar, ils en avaient le temps, il leur restait dans les a peut-être gaffé, et compté « présents dans la salle
quatre minutes. Et ils ont mis sur la bombe un du bar », 4 membres des RG et/ou de la DPSD qui
"couvercle blindé" que l’on utilise pour "tuer" le étaient présents dans le bâtiment, mais planqués
souffle et les projections. dans une autre pièce à attendre que je sorte du bar
Soit encore, j’ai eu à faire à des "pros" qui ont pour vite venir neutraliser ma bombe… Ce n’est
déballé le tout vite fait, et qui ont ôté la prise mâle de qu’une hypothèse!
la prise femelle. Une fois les prises débranchées (ou
les fils coupés!), le réveil pouvait se déclencher, il n’y 18
Je rappelle que sur "l’album de photographies" prises après ce soi-
avait plus aucun risque. C’est possible, cela peut disant attentat, et qui figurent au dossier officiel, les dégâts apparaissent
sembler bien risqué pour un artificier, car il ignore (de comme minimes.
Mémoire de Michel Lajoye page 53
Cette version de la "mise en scène" intervenue le Un engin explosif équipé de la sorte ne peut plus
jour de l’attentat, peut sembler ardue, car elle être bougé, une fois "amorcé". Ce que j'aurais fait,
implique qu’ils aient mis dans la confidence le patron c'est qu'après avoir activé la minuterie, j'aurais roulé
du bar (les autres présents peuvent fort bien avoir la bombe dans le sac plastique. Puis, je l'aurais mis
été des "figurants-auxiliaires de police"). D’où le "dans le bon sens", tâtonné à travers le sac pour
risque que certains ne tiennent pas leur langue! m'assurer que le tube était très légèrement incliné de
Risques aussi, en cas "d’interrogatoire privé", d’avoir façon que la bille d'acier soit bien dans le fond. Une
des témoignages fantasmagoriques. Mais nous y fois ce contrôle effectué, il m'aurait suffi d'ôter,
sommes! toujours à travers le sac, la tige de sécurité
En effet, j’ai relaté à partir de la section 18 de ce (constituée, par exemple, avec un bâtonnet de
chapitre le témoignage wieselien qu’en juillet 1998 coton-tige). Éventuellement la retirer en la faisant
Rabia Bounifia a tenu! percer le plastique. Une fois cette sécurité enlevée, il
De toute façon, dans tous les cas de figure n'y aurait plus eu moyen de bouger ce sac, sinon la
(bombe modifiée avant que je ne la dépose ou bille d'acier aurait roulé dans le tube, vers les deux
neutralisée après), il leur a fallu mettre au point le clous, et fermé le circuit électrique qui alimentait les
scénario écrit dans les procès-verbaux de police, détonateurs.
notamment ce serveur qui déclarera avoir regardé Ce système est particulièrement "vicieux". Arcini
dans le sac, etc… Car dans ses déclarations, me l'avait fortement déconseillé, pour une raison
Bounifia a affirmé (y compris lors de ses simple selon lui: il y avait le risque que le serveur,
"interrogatoires privés" de juillet 1998 et de janvier voyant partir son client, prenne le sac en disant «,
2000) avoir regardé par « un trou du carton » et « vous oubliez ça! ». C'est vrai que c'est une
aperçu une partie métallique qui lui a fait penser qu’il probabilité. Cependant, dans ce cas, on ne dépose
s’agissait d’un autoradio. pas un tel paquet sur un comptoir, sous le nez des
Or, comme précisé à la section 16 de ce chapitre, clients et du serveur, mais sur une table. Ce que
ce "trou" n’a jamais existé puisque le matin, après j'aurais bien sûr fait. Et puis j'ai quitté le bar pour les
avoir relié les prises électriques de la bombe, j’ai toilettes, je ne partais pas vraiment, du moins je ne
copieusement scotché l’emballage! devais pas donner cette impression au serveur...
Donc, le patron du bar ment avec cette histoire de Maintenant, avec le recul, je me demande si Arcini
trou et d’autoradio! S’il ment sur cela, il ment ne m'a pas déconseillé d'ajouter ce système "à bille",
forcément sur le reste! car il savait qu'on devrait désamorcer cette bombe
après mon départ du bistrot.
30. ARCINI M'A DÉCONSEILLÉ UN SYSTÈME DE En effet, pour neutraliser un engin équipé d'un tel
MISE À FEU "À BILLE" système de mise à feu, c'est très délicat. Il faut
Je me dois de mentionner un point: avant la pose découper méticuleusement l'emballage, en prenant
de cette bombe, j'en ai discuté avec Arcini. Je lui soin de ne surtout pas le faire bouger, car le
avais notamment fait part de mon intention de démineur ne sait pas où est précisément le tube qui
"doubler" le système de mise à feu. C'est-à-dire qu'en contient la bille. "Palper" le sac pour le trouver est
plus de la minuterie, je voulais y inclure un système très risqué, car si on fait pivoter le tube: adieu veaux,
"à bille2 entièrement autonome en alimentation vaches et moutons (nous sommes dans un bar
électrique. La bombe aurait ainsi eu deux systèmes maure, point de cochon...)! Un artificier professionnel
de mise à feu distincts: l'un (le réveil) qui se serait est rompu à une tâche de ce genre, mais cette
déclenché à l'heure prévue; et l'autre ("à bille") qui dernière demande du temps en plus d'un doigté
aurait fait exploser immédiatement la bombe si certain. Sachant qu'il ne resterait que quelques
quelqu'un l'avait déplacée, ou même touchée, avant minutes à la minuterie avant son déclenchement, un
que la minuterie ne la fasse exploser. professionnel n'aurait jamais eu le temps de la
Ci-inclus deux schémas qui montrent ce système neutraliser à cause du système d'amorçage "à bille".
"à bille": Dès lors, si j'avais ajouté ce dernier à ma bombe, il
aurait été, à coup sûr, totalement impossible à
quiconque de la neutraliser rapidement après mon
départ (si tenté que cela ait été fait! Ce n'est que
l'une des hypothèses).
Par conséquent, il n'est pas impossible, qu'en
prévision de la neutralisation sur place de mon engin,
mon camarade m'ait déconseillé d'ajouter ce
système. À plusieurs reprises, lors de notre dernière
rencontre avant cet attentat (le 25 novembre 1987,
cf. section 8 de ce chapitre), il m'a posé la question
de savoir ce que j'allais mettre comme système de
mise à feu. Bien sûr, il me demandait cela car il
prétendait s'inquiéter pour moi, il avait peur que je
saute avec une bombe si, en plus du réveil, je lui
adjoignais un système de mise à feu "à bille"... Mais
Mémoire de Michel Lajoye page 54
je crois maintenant qu'il s'inquiétait, surtout, de savoir J’indique aussi que dans son témoignage recueilli
comment on pourrait neutraliser mon engin, en moins en juillet 1998, Rabia Bounifia a déclaré que la police
de trois minutes, si jamais j'y ajoutais ce système... a récupéré « des pleines poignées de ferraille ».
Ce comportement d'Arcini accréditerait alors Effectivement la bombe contenait bien des morceaux
l'hypothèse que ma bombe a été neutralisée après de métal. Mais des pleines poignées, cela me semble
mon départ du bar, et non à l'hôtel de Cherbourg. beaucoup. J’avais mis environ 500 tronçons
Il se peut aussi que l'intervention ait été double: métalliques de 1 centimètre de long et 5 millimètres
un sabotage à l'hôtel, avant que je ne dépose la de diamètre (disons de la taille d’une balle de 22 long
bombe; puis une neutralisation après la pose, dès rifle pour simplifier). Alors 2 à 3 poignées, pas plus.
que j'ai quitté le bar. Pour eux, dans ce genre Des éléments, qui de toute façon (là encore on se
d'opération quand même délicate, mieux vaut avoir demande vraiment pourquoi!), n’étaient pas parmi les
deux fers au feu: si le "plan A" échoue et/ou est pièces à conviction au procès de Caen!
insatisfaisant, le "plan B" est là pour suppléer et/ou Pourtant, il aurait été bien (pour eux) de pouvoir
compléter! montrer aux jurés la perversité de l’individu qui
Arcini a très bien pu, aussi, me déconseiller de dépose une bombe contenant des tronçons
mettre un système "à bille" en prévision de la version métalliques comme ceux, soi-disant, récupérés après
officielle. Cette dernière dit que la bombe a été cette prétendue explosion…
déplacée et mise derrière/sous le bar et que c'est
celui-ci qui a fait écran. Avec un dispositif de mise à 32. CONCLUSIONS SUR CET
feu "à bille", ce ne serait plus du tout crédible. Car "ATTENTAT VIRTUEL"
dans ce cas comment Bounifia aurait-il pu déplacer la Conclusions: ils (la DPSD, les RG et compagnie!)
bombe sans en déclencher immédiatement m’ont laissé faire, m’ont surtout, via Arcini qu’ils
l'explosion? tenaient en laisse, fait commettre une action me
Difficile de dire ce qu'il en a été des vraies faisant entrer dans une procédure de condamnation
motivations d'Arcini lorsqu'il m'a dissuadé d'utiliser, en criminelle. Mais ils ont fait en sorte qu’il n’y ait qu’un
plus de la minuterie, un système de mise à feu à bille. attentat virtuel. Car s’il y avait des vraies victimes, et
Je ne fais que relater ce qui s'est déroulé, chacun en si cela s’était su qu’ils m’ont encouragé et laissé faire,
pensera ce qu'il veut. cela aurait causé un scandale énorme!
Les preuves que tout a été "mis en scène "; que
31. AUCUN DÉBRIS DE LA BOMBE NE SERA
ce qui s’est déroulé le 30 novembre 1987 dans ce
PRÉSENT AU PROCÈS
bar n’est pas du tout ce qui est relaté dans les
Une autre chose qui démontre que, quelle que procès-verbaux de police contenus dans le dossier
soit la bonne hypothèse, tout n’est qu’une fumisterie, officiel, sont: les déclarations de Rabia Bounifia dans
c’est que théoriquement, en cas d’explosion, les lesquelles il infirme la version de la "justice" qui l’a
spécialistes arrivent avec des sacs en plastique et ils comptabilisé parmi les blessés ; l’absence des
ramassent les morceaux de la bombe. L’engin témoins aux audiences devant la Cour d’Assises ;
contenait un réveil mécanique, une pile, des prises l’absence de victime présente au procès ; l’absence
électriques, etc, des choses qui restent! Du moins de partie civile constituée par ces victimes et/ou la
que l’on retrouve. Eh bien nous ne les avons jamais CPAM ; absence de partie civile constituée par
revus au procès! Les débris de la bombe n’étaient l’exploitant du bar et/ou son assureur. Toutes ces
pas dans les pièces à conviction présentes au absences sont d’une implacable logique! Car si ces
procès! gens avaient été présents au procès, ils auraient été
Mais s’ils ont fait sauter un pétard de Gomme 14 interrogés. Si l’un d’eux avait "bafouillé", c’était la
afin de mettre en scène il n’y avait aucun débris de catastrophe pour ceux qui ont monté cette
bombe à présenter ensuite! manipulation!
Et si ma bombe a été modifiée avant que je ne la En effet, nous avons vu à partir de la section 18
dépose, et si c’est de la Gomme 14 (je rappelle que de ce chapitre à quel point le récit de Rabia Bounifia,
Calisti a affirmé que la bombe était composée de qui est censé avoir assisté et subi l’explosion, est
G14 alors que j’ai mis de la Tolite!) qui est entrée en rocambolesque! Si cette personne, ce rescapé qui
fusion, la chaleur dégagée et le manque de souffle aurait pu aussi être partie civile, nous avait tenu un
de la G14 mouillée a soudé cela d’un bloc. Comme tel récit à la barre des témoins (situant 13 personnes
l’aurait fait un chalumeau! Au procès s’il avait été dans son bar alors que la "justice" en compte 9… Et
apporté un bloc soudé, cela aurait fait mauvais genre décrivant un "ouragan" là où les photos prises après
car cela aurait prouvé que la bombe n’avait pas l’attentat montrent juste du "noirci"...) il est clair que la
soufflé, mais simplement émis une très intense supercherie n’aurait pas pu tenir très longtemps…
chaleur. Cela aurait réduit à néant une partie de Voilà pour l’attentat qui m’est reproché, c’est
l’accusation et démontré le côté totalement inoffensif vraiment très contradictoire, impossible actuellement
de cette "bombe"… de savoir ce qui s’est réellement déroulé dans ce bar
Dans les deux cas de figure, cela explique bien le lundi 30 novembre 1987!
pourquoi aucun débris n’a été présenté aux jurés du Cependant, c’est bien cet attentat, qui aurait fait
procès qui a suivi cet attentat! trois blessés (selon le Ministère Public) et aucun
(selon le témoin Bounifia, lui-même comptabilisé
Mémoire de Michel Lajoye page 55
comme victime par la "justice"), qui a servi de base à blessés), qui n’a peut-être, et même sûrement, jamais
ma condamnation. J’ai par conséquent été eu lieu!
condamné pour un fait (une explosion faisant trois

Chapitre 8

DERNIERS JOURS AVANT L'ARRESTATION

Quant à la revendication expédiée à Ouest-


1. VENDREDI 4 DÉCEMBRE 1987 France, c’est encore mieux: elle ne semble jamais
avoir existé! En effet, dans son numéro du 12-13

C
e jour-là j’ai retrouvé Arcini dans la soirée. Il
habitait un petit pavillon dans Caen, au 3 rue décembre 1987 (soit après l’arrestation puisque j’ai
Rouget de Lisle. C’était la première fois que je été interpellé le 10), Ouest-France édition de Caen,
le revoyais depuis la bombe du 30 novembre (les affirmera n’avoir jamais reçu la moindre lettre de
jours qui ont suivi l’attentat sont sans importance). revendication! Pour expliquer cela, comme à leur
Nous ne nous étions pas revus depuis le 25 habitude, les tenants de la version officielle ne se
novembre, et les seuls contacts que nous avons eu démonteront pas: ils affirmeront alors que si le
c’est via le téléphone, de cabine à cabine. courrier n’est pas arrivé, c’est qu’il s’est perdu car
Il était prévu que je reste quelques jours chez lui, envoyé à une "mauvaise adresse"… Très crédible en
il m’avait dit de passer afin que l’on mette au point effet! Dans l’Ouest, n'importe quel facteur connaît
diverses choses. Ouest-France, et toute lettre adressée à Ouest-
France, sans autre mention sur l’enveloppe, serait
2. SAMEDI 5 DÉCEMBRE 1987 certaine d’arriver à destination tellement ce journal
(envoi d’une revendication) est connu.
Apparemment il semble y avoir eu un manque de
Dans l’après-midi, Arcini a dû s’absenter, pour voir
coordination entre ce que devait raconter Arcini, pour
un collègue (prétexte invoqué). Je suis resté seul
que cela "colle" avec la version officielle, et ce qui
chez lui durant tout l’après-midi.
s’est réellement déroulé !
La version officielle de cette affaire dit que c’est le
C’est plus qu’évident qu'on a dit à Arcini de
samedi 5 décembre qu’Arcini s’est rendu de Caen à
s’accuser, comme prévu dans le plan, d’avoir expédié
Rouen pour y poster la revendication de cet attentat
une revendication le samedi à Ouest-France et
à la bombe du 30 novembre.
Libération. Seulement c’est bien connu: on est un
Je n’ai jamais eu l’intention de revendiquer quoi
con! Car comme nous venons de le voir, la
que ce soit, et je n’ai pas été consulté pour cela. Je
revendication expédiée à Libération n’a été postée
n’ai appris l’existence de ce texte de revendication
que le lundi dans l’après-midi! Quant à celle destinée
qu’une fois arrêté! Dans tous les jours qui vont suivre
à Ouest-France, au mieux elle est restée sur le
et que je relate dans ce chapitre, j’ignore que
bureau de l’agent des RG, ou de la DPSD, qui devait
l’attentat que j’ai commis a été revendiqué.
la poster ; ou au pire, elle n’a jamais été rédigée…
D’après la version officielle, cette revendication,
Autre couac important: dans cette revendication,
en double exemplaire, a été adressée par voie
faite à mon insu, et arrivée à Libération, il est
postale aux quotidiens Ouest-France et Libération.
mentionné un réveil mécanique bleu composant la
Seulement il y a des couacs, et non des moindres!
minuterie de cette bombe, ainsi qu’une pile 9 volts.
Car Libération dans son édition du jeudi 10
Ce sont d’ailleurs les deux seules indications
décembre 1987 fera bien état d’une revendication.
techniques données pour "authentifier" la
Mais, le document lui a été expédié depuis la Poste
revendication.
principale de Saint-Étienne-du-Rouvray (près de
Or, je suis formel, je n’ai pas dit un mot à Arcini sur
Rouen), lors de la levée postale de 16 heures 45, le
la composition technique de cette bombe quant à la
lundi 7 décembre 1987 (cachet de la Poste)!
couleur du réveil et à la pile utilisée surtout!
C’est assez étrange, car la version officielle, elle,
Ainsi, si nous reprenons à nouveau la version
situe très clairement la remise à la Poste d’une
officielle de cette affaire, le samedi 5 décembre 1987
revendication le samedi après-midi. Mais,
Arcini rédige une revendication qu’il va poster près de
apparemment, selon Libération qui, lui, a reçu le
Rouen en utilisant sa voiture (la Ford car la Simca
texte, ce n’est que le lundi suivant, à 16 heures 45,
1100 il ne roulait plus avec, voir chapitre 5 section
que le contenu de la boîte aux lettres de la Poste
14, pour le changement de véhicule). Mais dans ce
principale de Saint Etienne de Rouvray aurait été
cas nous sommes bien obligés de nous interroger:
relevé… Il n’y aurait donc pas eu de levée du courrier
comment aurait-il pu savoir que le réveil était bleu et
le lundi matin à l’ouverture de la Poste? Faites
que l’alimentation électrique pour la mise à feu était
l’expérience, postez-vous, à vous-même, une
une pile 9 volts?
correspondance un samedi après-midi dans une
La version officielle dit que c’est Arcini qui a
Poste principale et vous verrez qu’elle sera oblitérée
assemblé la bombe, mais c’est faux, c’est moi et je ne
avant le lundi après-midi suivant…
lui ai rien détaillé!
Mémoire de Michel Lajoye page 56
Il apparaît clairement, dans tous les cas, que ceux 5. PLAN POUR FAIRE ÉVADER ARCINI DES
qui tenaient Arcini en laisse depuis environ la mi-juin, LOCAUX DE LA PJ
ont revendiqué eux-mêmes en mentionnant un réveil
Devant les événements, vite fait, nous avons
bleu et une pile 9 volts. Ce qui explique, qu’en
élaboré un plan d’action, c’est surtout moi qui le
réalité, la seule lettre de revendication arrivée à
mettais au point. Ce plan visait à libérer Arcini s’il était
destination n’ait été postée que le lundi 7, avant la
retenu à la PJ et c’était possible, car nous avions une
levée de 16 heures 45, cachet de la Poste faisant foi
bonne connaissance des lieux.
comme on dit… Or le lundi 7 décembre 1987, si l’on
Je conseillais à Arcini de se rendre à sa
en croit le dossier officiel de cette affaire, Arcini n’a
convocation et de voir sur place. Soit il était
pas quitté la zone de Caen. De fait, il n’a pas pu être
convoqué pour une affaire anodine, dans ce cas, il
à Saint-Étienne-du-Rouvray pour y poster ce qu’a
serait ressorti rapidement ; soit c’était pour l’affaire
reçu Libération…
des attentats, dans ce cas, il devait braquer les
Cette revendication est capitale pour eux, car en
policiers et s’enfuir.
revendiquant, en utilisant le même matériel pour cela,
J’estimais que c’était mieux de se rendre à la
il était établi un lien avec les autres attentats commis
convocation plutôt que de s’enfuir tout de suite, ce
en Normandie par Arcini.
lundi soir. Car, pour moi, il pouvait être convoqué
Ainsi, pour la "justice", tous les attentats étaient
pour une autre affaire banale sans importance et se
liés par des revendications émanant du même
mettre en cavale pour une peccadille, ce n’était pas
groupe. Dès lors, cela justifiait un procès commun
le mieux.
puisque c’était la même organisation derrière les trois
Quant au fait que je proposais à Arcini d’aller
actions qui ont eu lieu en Normandie! Finement joué!
l’aider à se libérer de la PJ s’il y était retenu, c’était
3. DIMANCHE 6 DÉCEMBRE 1987 techniquement possible, et même assez simple. La
PJ de Caen est un détachement du SRPJ de Rouen.
Le dimanche s’est déroulé normalement, rien à en Il logeait au dernier étage d’un bâtiment administratif
dire. de la préfecture du Calvados. Ce n’était pas un
bâtiment de police proprement dit, il n’y avait aucune
4. LUNDI 7 DÉCEMBRE 1987
protection comme dans une PJ normale.
(convocation à la PJ)
Cette PJ de Caen il faut la voir juste comme un
Le lundi Arcini a dû se rendre à son travail, c’était couloir, quelques bureaux, pas la moindre porte
le dernier jour que je passais chez lui, j’avais prévu blindée à l’entrée, encore moins de sas de sécurité
de partir le mardi. En fin d’après-midi, retour de mon pour filtrer les visiteurs. Il suffisait de pousser la porte
camarade. Mais il est revenu en ayant à la main une à l’entrée du couloir pour s’engager dans la partie PJ
convocation de la PJ de Caen qui lui aurait été de ce bâtiment préfectoral! C’était une antenne
remise sur son lieu de travail, à la Sécurité Civile. Il administrative, et lorsqu’il y avait des gardés à vue,
était convoqué à la PJ pour le lendemain matin, 8 ceux-ci étaient "logés" au commissariat central de
heures 30. Caen.
La version officielle de cette affaire veut qu’il ait Côté occupants: 5 inspecteurs et 1 commissaire
été convoqué parce qu’il était l’un des propriétaires travaillaient dans ces lieux, mais certains étaient
d’une Simca 1100 TI de la couleur de celle qui était partis pour enquêtes, par conséquent il y avait
recherchée après l’attentat de Caen, en juin 1987. rarement plus de 3 policiers présents. Ces derniers
En effet, comme je l’ai relaté au chapitre 5, la version étaient certes armés, mais une telle sortie était
officielle, que l’on doit croire, veut que ce ne soit faisable.
qu’en décembre 1987 (6 mois après) que la PJ se Cette opération envisagée n’était pas l’attaque
soit, enfin, intéressée à Arcini! d’une place forte, avec au final un échec assuré.
Toujours est-il que lorsque j’ai appris la C’était l’assaut d’un service administratif, et il ne faut
convocation, j’ai demandé à "mon hôte" s’il en pas oublier que, dans ce plan, il était pris en compte
connaissait les raisons. Évidemment il m’a répondu l’effet de surprise. Car c’était Arcini qui aurait sorti son
qu’il n’en savait rien. Nous avons évoqué l’attentat de arme le premier!
juin, et celui de mars précédent. Je lui ai conseillé ne J’estimais que mon plan tenait la route et, à mes
pas "paniquer", nous aviserions sur place, car je me yeux, si Arcini était bien convoqué pour les attentats,
disais que la convocation était peut-être pour une il lui serait facile de s’évader, cela ne tenait qu’à lui.
autre raison. Mais à mes yeux cela ne pouvait être
que les "attentats" l’objet de cette "invitation" à se 6. MARDI 8 DÉCEMBRE 1987, CONVOCATION
rendre à la PJ. À LA PJ (suite)
Lorsque Arcini affirmait ne rien savoir du motif de Le mardi 8 décembre 1987, pour les 8 heures 30,
cette convocation, il mentait! Car si l’on en croit les comme prévu, avant d’aller à son travail, Arcini s’est
journaux parus en décembre 1987, notamment rendu à sa convocation de Police Judiciaire. Il était
l’hebdomadaire caennais Liberté en date du 11 porteur d’une grenade, de son revolver et de
décembre 1987, il avait déjà été interpellé pour cette suffisamment de munitions. Je l’ai vu partir avec cet
affaire, et relâché parce qu’il avait l’alibi Balladur… armement.
(cf. chapitre 5 section 15). De mon côté, je le suivais, et lorsqu’il est entré à
l’étage de la PJ, je me suis installé à l’accueil des
Mémoire de Michel Lajoye page 57
cartes grises, c’est-à-dire à l’entrée du couloir de la Seulement, comme dit plus haut, je n’ai pas vu
PJ puisque c’était un hall commun d’accueil pour tous Arcini ressortir de la PJ, que cela soit seul ou
les étages de ce bâtiment préfectoral. Il y avait plein accompagné de deux inspecteurs, et j’ai surveillé
de gens, j’ai pris un numéro d’attente puisque c’était jusqu’à 11 heures.
chacun son tour et cela m’arrangeait qu’il y ait Mais, comme dit plus haut aussi, ils auraient pu
beaucoup du monde, je passais plus inaperçu: j’étais s’éclipser pendant que j’entrais dans la bibliothèque.
une personne comme une autre qui attendait son Cela m’a pris dans les 5 minutes pour entrer et
tour pour une affaire administrative à la préfecture. monter à l’étage, puis de m’installer à une table, un
J’étais assis sur un banc avec à mes pieds un sac de journal à la main, mais avec les yeux rivés sur la
sport ouvert et contenant ce qui, éventuellement, sortie du bâtiment préfectoral.
serait utile à l’opération. De ce fait, pour qu’ils aient échappé à ma
J’avais bien dit à Arcini qu’il allait être très surveillance, la perquisition chez Arcini aurait dû partir
rapidement fixé et que s’ils lui demandaient de vider vers les 9 heures 25, moment où j’entrais dans la
ses poches, c’est que sa convocation devenait une bibliothèque. Or la version officielle de cette affaire
garde-à-vue, dans ce cas: il devait passer à l’action. affirme que c’est « vers les 9 heures 45 » qu’ils sont
Donc, à 8 heures 30, j’ai vu Arcini entrer dans la partis! C’est par conséquent la confirmation de ce
partie PJ du bâtiment préfectoral, tout était prêt, je ne que l’on sait déjà: tout est bidon!
pouvais pas faire plus pour lui. Maintenant qu’il était De toute façon c’est n’importe quoi cette version
entré là-dedans, cela dépendait de lui et de l’objet de officielle contenue dans le dossier que l’on en juge:
son "invitation".
Mais, il avait été convenu aussi qu’à 9 heures 15 7. ARCINI "S'ÉVADE"
je quitterais les lieux. Comme à 9 heures 15 Arcini Cette version officielle, telle qu’elle a été détaillée
n’était toujours pas ressorti (et n’avait pas tiré non au procès, et qui figure au dossier dans des versions
plus!), j’ai alors pensé qu’il avait dû être convoqué parfois différentes (notamment pour les horaires!)
pour une affaire anodine parce que si cela avait été d’un document à l’autre, dit en gros ceci:
grave, si cela avait été l’affaire des attentats, il y a « Vers les 9 heures 45 », après son audition à la
longtemps que cela se serait "agité" dans ce PJ, deux inspecteurs ont emmené Arcini dans une
couloir… 205 banalisée. Arcini était libre, pas de menottes, il
De plus, comme Arcini était copain avec certains n’a même pas été fouillé puisqu’il était encore armé
inspecteurs (du moins il les connaissait puisqu’ils (ce qui fait très crédible: ils ne lui auraient donc pas
étaient du même Ministère de l’Intérieur et demandé de vider ses poches à la PJ?). Ils sont allé
mangeaient ensemble), je me disais qu’il devait être chez lui et ont commencé « vers les 10 heures » une
en train de tailler la bavette avec eux autour d’un perquisition qui leur aurait fait découvrir une balle de
café. revolver dans un tiroir. De là, Arcini se voyant
Alors, puisque cela faisait 3/4 d’heure qu’il était là- démasqué (pourquoi?), sort son revolver justement,
dedans sans qu’il ne se soit déroulé quelque chose, puis une grenade qu’il dégoupille (avec les dents
c’est que tout allait bien, et je suis parti comme peut-être?). C’est techniquement peu vraisemblable
convenu. (j’y reviens après). Il y a aussi la version inverse:
Cependant, je ne suis pas beaucoup éloigné, car l’autre inspecteur (les deux "braqués" étaient cités
cela m’intriguait. Puisqu’il y avait à côté un comme témoins et ce que je relate c’est ce qu’ils ont
département annexe de la bibliothèque de Caen, j’y raconté à l’audience) qui a déposé à la barre des
suis allé. Je me suis installé près d’une fenêtre où témoins a parlé de la grenade d’abord (probablement
l’on voyait l’entrée/sortie (il n’y en avait qu’une) du dégoupillée avec son autre main) et le revolver
bâtiment préfectoral. Je suis resté jusqu’à 11 heures exhibé ensuite.
à la bibliothèque, et je n’ai pas vu ressortir Arcini. Lors du procès, l’un des deux inspecteurs a donc
Mais, il aurait pu quitter les lieux alors que j’entrais donné une chronologie de sortie différente pour la
dans la bibliothèque, car pendant quelques minutes grenade. Cela à son importance, car comment
je n’ai pas eu l’entrée du bâtiment préfectoral dans dégoupiller une grenade si on a, déjà, un revolver
mon champ de vision. Je précise bien que ce dans l’autre main? Bonne question, mais lors du
bâtiment n’avait qu’une entrée/sortie. procès, personne ne l’a posée et l’on ne me donnait
Si j’insiste sur ce point c’est qu’il y a la version pas la parole pour que je la pose.
officielle de tout cela! Cette dernière dit qu’Arcini Certes, c’est possible de tenir un revolver et de
s’est rendu à sa convocation, qu’il a été interrogé sur dégoupiller une grenade, mais pendant que l’on fait
son emploi du temps le jour des attentats, et plus cela, la garde est baissée et les personnes tenues
particulièrement sur l’assassinat de Moussaoui. Et en joue ne sont alors plus sous la menace directe de
cette vérité vraie dit qu’ensuite, après son audition, l’arme. Elles peuvent "tenter leur chance"…
pour compléter celle-ci, Arcini a été conduit à son La grenade d’Arcini était américaine avec une
domicile par deux inspecteurs (un certain Christian goupille à pince ressort non modifiée (je l’ai vue). Je
Morin et Didier Lefeuvre qui seront témoins au m’en étais d’ailleurs étonné auprès de lui, car
procès) qui y ont opéré une perquisition. Cela serait normalement, soit il aurait dû mettre une goupille
lors de cette fouille domiciliaire, qu’Arcini aurait alors classique ; soit la pince de sécurité aurait dû être
braqué les policiers, et qu’il se serait enfui avec la coupée et remplacée par un élastique de
voiture de la PJ (j’y reviendrai en détail plus loin).
Mémoire de Michel Lajoye page 58
caoutchouc. Ceci afin de pouvoir, justement, Visualisons la scène: Arcini a alors le revolver
dégoupiller la grenade d’une seule main en s’aidant dans une main, la grenade dégoupillée dans l’autre.
avec les dents ou en accrochant l’anneau de goupille C’est bien ainsi qu’à l’audience les deux inspecteurs
dans un crochet quelconque. Sur une grenade l’ont décrit. Dans ce cas s’il avait un revolver dans
américaine qui a une goupille à pince ressort (comme une main, une grenade dans l’autre, il les a fouillé
pour les grenades de l'armée française), il faut mettre avec quoi et surtout comment? Grâce à sa troisième
le doigt dans l’anneau et tourner en faisant pivoter main peut-être?
l’axe afin de faire s’écarter la pince-ressort de sécurité Poursuivons encore: après la "fouille", il les
qui empêche la clavette de sortir de son logement. enferme, mais sans verrouiller la porte car il les a
Pour cela il faut ses deux mains: l’une (en général la "séquestrés" dans une pièce (laquelle?) dont la porte
droite) tenant la grenade et notamment sa "cuillère", ne fermait pas à clé (ce n’est pas un gag, c’est la
l’autre avec un doigt passé dans l’anneau de goupille version officielle !).Il leur a juste dit qu’il piégeait
que l’on fait pivoter de 45 degrés (pour faire écarter l’entrée ce qui se révélera faux! La porte n’avait pas
la pince-ressort) avant de tirer dessus. été piégée! C’est que cela aurait pu mettre en
Il est techniquement impossible de dégoupiller danger la vie des deux inspecteurs, alors pas de ça!
une grenade qui a une sécurité à pince ressort Cette porte sera moralement, virtuellement, piégée,
(comme celle qu’avait Arcini ce matin-là) d’une seule ils feront comme si! Ils ont joué à « on dirait que la
main puisque, dans ce cas, comment on fait pour porte, elle est piégée »!… L’histoire ne dit pas si,
faire opérer la rotation de 45 degrés à la goupille tout dans cette pièce (non désignée!) où ont été
en tenant bien fermement la grenade? "enfermés" les policiers, il y avait une fenêtre. Mais il
À la rigueur, on peut faire sauter la clavette d’une devait y en avoir une, car moi qui connaissais le
seule main en écartant la pince-ressort entre deux pavillon d’Arcini, je ne vois vraiment pas dans quelle
doigts (pouce-index) et en poussant sur l’axe. pièce il a pu les enfermer: toutes, à part les toilettes,
Seulement, dans ce cas, la cuillère de la grenade avaient des fenêtres! L’une des versions officielles
n’est plus tenue par aucun doigt et elle remonte, d’où affirme qu’ils ont été "enfermés" dans la cuisine. Une
l’amorçage de l’engin, et l’impérative nécessité de pièce du rez-de-chaussée dont il suffisait d’ouvrir la
s’en débarrasser très rapidement (surtout que les fenêtre pour sortir…
grenades que l’on utilisait avaient des mèches très Après avoir "enfermé" ses "visiteurs", Arcini
écourtées, ce qui leur donnait trois secondes de s’enfuit avec la voiture de la PJ, car lors de la fouille
retard maximum !)... des policiers, et comme le dit le dossier officiel, il a
Or, dans la version officielle, Arcini a toujours « volé les clés de leur voiture de service Peugeot 205
gardé sa grenade dégoupillée dans sa main (rien n’a dans la poche de l’un d’eux »…
explosé!) et il a remis la goupille après (ça aussi c’est Ensuite il faudra un long, très long moment pour
très difficile à faire d’une seule main car il faut bien que les deux inspecteurs (même pas attachés) se
écarter la pince-ressort pour tout remettre en place!). décident à sortir de la pièce (au risque que cela
L’inspecteur qui a parlé du revolver sorti avant la explose puisque dans la version officielle Arcini leur a
grenade et celle-ci dégoupillée après sa sortie, dit qu’il piégeait la porte!) où ils étaient "cloîtrés" et
pouvait, s’il était contre-interrogé sur le champ, être donnent l’alerte. Et, contrairement à ce qu’affirme la
pris en flagrant délit de mensonge s’il maintenait sa version officielle, aucun barrage de police ne sera mis
version. Mais l’on ne m’a pas donné la parole en place dans la zone urbaine de Caen. Pourtant en
puisque la partie de ce dossier ne me concernait juin 1987, lors de l’assassinat de Moussaoui, il y avait
pas… eu des barrages dans l’agglomération pour
C’est vrai ça, de quoi je me mêlais d’aller vouloir rechercher la Simca 1100, ce qui avait donné des
démontrer que l’inspecteur mentait? Et Arcini disait embouteillages dans Caen (je l’avais vu à la télé !).
que c’était bien ainsi que cela s’était déroulé. Il Là, cette fois, Arcini braque la police, vole la 205 de
reconnaissait la chronologie des faits pour chacune la PJ, mais l’on ne va pas bloquer la ville pour le
des versions différentes ! Ce "braquage" n’était pas retrouver?! Ce n’est que « vers 11 heures » que la
la partie de mon affaire, c’était celle d’Arcini. Je voiture sera retrouvée "par hasard" près de la gare
n’étais accusé que de la pose d’une bombe, pas de Caen (d’après la version officielle).
d’avoir "braqué" des policiers pour "m’évader"! Alors Et Arcini, l’honnêteté même, et qui pense à tout,
je n’étais pas invité à m’exprimer sur un sujet ne me avait bien pris soin (d’après la même version officielle)
concernant pas directement… Lorsque cela les de fermer l’automobile à clé. Sans doute de crainte
arrangeait: les affaires étaient dissociées! que l’on ne la vole, réellement, cette fois! Arcini n’a
Pour information, et même confirmation, je même pas dérobé le scanner radio dans la voiture et
mentionne que l’Arrêt de renvoi devant les Assises, tous les accessoires divers de police qui devaient se
qui relate cette "évasion", donne, lui aussi, une trouver dans la boîte à gant de la 205 ou dans le
chronologie irréalisable: « Arcini exhibait un revolver coffre. Le véhicule était celui du commissaire
et une grenade qu’il dégoupillait aussitôt. » Gaillardon 19(qui sera témoin au procès), il aurait dû,
Poursuivons la version officielle telle que relatée
19
aux audiences du procès de Caen: une fois les Dans Le Crapouillot n° 86 de février 1986, il est question de
armes en main, Arcini menace les inspecteurs, les l'assassinat, près de Rouen, de François Duprat (l'un des fondateurs, en
1972, du Front National. Il en était le n° 2 á sa mort, en 1978, survenue
fouille l’un après l’autre (mais les policiers ne sont pas dans une voiture qu'on [ce on dans le cas présent pourrait bien désigner
armés, j’y reviens plus loin). les "mil ices juives"…] avait piégée). Ce numéro du Crapouillot parle du
Mémoire de Michel Lajoye page 59
logiquement, être bien pourvu en équipements perquisition chez un type soupçonné d’avoir commis
toujours utiles. Mais "l’évadé" ne touchera à rien, il ne des attentats et qu’ils savaient forcément armé de
prendra rien. par son travail! On se demande bien avec quoi les
Tout cela c’est la version officielle de cette policiers comptaient arrêter le suspect si la
"évasion". Et l'on est prié de la croire! C’est bien perquisition s’avérait fructueuse!
simple: à côté de "l’évasion" d’Arcini, celle de Cette version officielle contenue dans le dossier,
Raymond Samuel dit Aubrac fait crédible, c’est dire! puis racontée à l’audience, et dont j’étais le seul à
Ce fut un grand moment de détente aux rire, c’est le scénario mal ficelé qui était destiné au
audiences du procès lorsque les deux inspecteurs futur procès. Car il fallait bien expliquer telle ou telle
sont venus raconter la scène de "l’évasion" d’Arcini et chose. Comme il allait y avoir procès, il leur fallait bien
que l’on détaillera le reste! Les journalistes, qui ont expliquer, officiellement, comment ils étaient
suivi les débats, ont écrit dans leurs feuilles que remontés à Arcini début décembre 1987. Et très fort:
j’étais « goguenard », « un sourire permanent au ils l’ont officiellement identifié, mais, mais, mais…
coin des lèvres » durant les récits! Mais c’est eux, sans l’arrêter puisqu’il s’est "évadé"! Il devait leur
tous ces faux-témoins, qui faisaient rien qu’à me faire "échapper", puisqu’ils allaient en avoir besoin pour
rigoler! Au lieu de s’occuper de moi, tous ces m’appréhender!
scribouillards auraient mieux fait de noter les De plus, si Arcini avait été "de bonne foi". si j’ose
invraisemblances contenues dans ces témoignages dire, c’est-à-dire non coopératif, non manipulé, et pas
rocambolesques. avec une laisse depuis 6 mois. S’il avait eu vraiment
Car, pour cette affaire "d’évasion", ce qui est l’idée de s’enfuir comme il l’a fait (du moins dans la
hautement savoureux c’est que les policiers n’étaient version officielle !), il l’aurait fait entre 8 heures 30 et
pas armés! Dans la version officielle, il est dit qu’Arcini 9 heures 15: lorsqu’il savait que j’étais dans le Centre
a fouillé les inspecteurs pour les désarmer. Au administratif, au bout du couloir donnant sur
passage, comment Arcini, homme seul, a fait pour l’antenne de la PJ.
"palper" (avec sa troisième main puisque les deux En effet, il faut être logique, une fois dans la
autres étaient occupées: l’une par un revolver, l’autre place, et voyant qu’il était bien convoqué pour
par une grenade) un policier tout en surveillant l’autre l’affaire de l’assassinat de Moussaoui, Arcini savait
pour qu’il ne lui saute pas dessus? qu’il était foutu ! Qu’il ne pourrait pas faire illusion
Quoi qu’il en soit, la version officielle, qui fut longtemps et que dans les minutes qui allaient suivre
relatée lors des audiences du procès, dit bien ils allaient lui demander de vider ses poches, de leur
qu’Arcini n’a pas eu à désarmer les deux enquêteurs, remettre son arme de service! Bien malin celui qui
puisqu’ils n’avaient pas d’arme… Je le crois sans aurait pu lui prédire qu’il aurait l’opportunité (officielle)
problème! Voilà deux inspecteurs de la PJ, qui vont de s’évader lors de la perquisition qui suivrait cette
faire, sans arme, une perquisition chez un type audition. Alors, ses meilleures chances de fuite, il les
suspecté d’attentats, dont un où il y a eu un mort!20 avait entre 8 heure 30 et 9 heures 15. Créneau
Ils y sont allés les mains dans les poches pour ainsi durant lequel il n’avait juste qu’à sortir son arme,
dire! Quand on sait qu’un fonctionnaire de PJ va neutraliser d’une façon ou d’une autre les
facilement aux toilettes avec son arme, affirmer qu’ils inspecteurs présents avec lui dans la pièce, et
sont allés chez Arcini sans leur artillerie, c’est la j’arrivais pour l’aider. Il ne l’a pas fait, preuve, à mes
chose la plus grotesque qui soit! yeux, qu’il n’envisageait pas de s’échapper des
Surtout que ces inspecteurs de la PJ mains de la PJ!
connaissaient fort bien leur collègue Arcini: lui aussi Il faut aussi remettre cela dans son contexte, à ce
fonctionnaire du Ministère de l’Intérieur, Contrôleur moment Arcini est quelqu’un qui est déjà passé à
artificier-démineur de la Préfecture pour être précis ; l’action, qui a tué. Dès lors, sortir son arme devant les
qui, très souvent, assurait des protections inspecteurs (et les neutraliser!) ce n’était pas une
rapprochées de personnalités, ministres notamment, chose qui le paralysait de peur. Moussaoui (et
et qui à ce titre était, cela va de soi, armé ! Ainsi, ce probablement d’autres) en "témoignaient". Aux vues
matin-là, des trois fonctionnaires du Ministère de des entrées/sorties que j’avais constatées à la PJ, il
l’Intérieur, le seul qui n’avait pas oublié son arme n’y avait que 4 policiers durant le créneau horaire
c’était le Contrôleur artificier-démineur Arcini… prévu pour la sortie en force. Autant dire qu’avec
Mais ce n’est pas tout! Mon camarade a l’effet de surprise, c’était simple de s’évader. Arcini
"enfermé" chez lui les deux inspecteurs, mais sans était puissamment armé avec son Magnum il avait au
les attacher car lorsqu’il les a fouillés, il n’a pas trouvé moins deux enquêteurs avec lui dans le bureau où il
leurs menottes (version officielle). Ce sont donc deux se trouvait, simple de les neutraliser avant qu’ils
inspecteurs (expérimentés!) sans arme et sans une n’aient réagi. Après il n’en restait plus que deux
paire de menottes qui sont allés opérer une autres dans un ou deux bureaux. Nous aussi nous
étions deux, et côté armement il y avait une
commissaire Gaillardon, du SRPJ de Rouen, chargé de l'enquête sur cet disproportion écrasante en notre faveur grâce à des
assassinat. Ce policier, fort impliqué dans les affaires Arcini/Lajoye
comme nous le verrons dans la suite de ce récit, est donc l'enquêteur qui grenades et un fusil d’assaut que j’avais avec moi
a fait en sorte que les investigations sur la mort de Duprat n'aboutissent dans un sac de sport.
jamais, puisque plus de 22 ans après: les coupables sont "inconnus"… Si Arcini s’est "évadé" à un autre moment que le
20
Les inspecteurs" braqués" avaient, au moins chacun, dans les 20 ans
de maison! Il ne s’agit nullement de deux "jeunes" inspecteurs sans créneau 8 heures 30 - 9 heures 15, c’est qu’il estimait
expérience qui ont oublié, tous les deux en même temps, leurs armes… qu’il valait mieux "s'enfuir" lorsque je ne serais pas là!
Mémoire de Michel Lajoye page 60
Il avait peur que je ne vienne l’aider comme je l’avais On se demande pourquoi, dans l’après-midi, la
prévu. Il a dû dire aux inspecteurs (qui le tenaient en Ford d’Arcini était encore devant le bâtiment
laisse depuis 6 mois) que j’étais dans l’entrée, préfectoral puisque "l’évasion" est censée s’être
puissamment armé, prêt à bondir! Il savait produite « vers les 10 heures ». Ils n’avaient donc
précisément ce que j’avais comme armement avec pas emporté la voiture du fuyard pour la fouiller? Elle
moi et il l’a forcément détaillé à ses collègues aurait pu être piégée et/ou contenir des armes ou
policiers! autres! Les inspecteurs de la PJ savaient que cette
Et à propos de ce matériel, je me souviens que le Ford était à Arcini. C’est un manque d’intérêt très
matin, avant que l’on aille à la PJ, j’avais retrouvé étonnant quand même! Et le matin, comme j’ai
Arcini à une cache d’armes histoire de "faire le plein". surveillé jusqu’à 11 heures le bâtiment préfectoral où
Cela l’avait un peu effrayé de me voir remplir mon sac se trouve la PJ, j’aurais dû constater une
de sport avec des grenades (c’est vrai que j’avais fait effervescence, des allées et venues de policiers tout
fort!). Ainsi que de me voir prendre un fusil d’assaut agités, puisque la version officielle dit que "l’évasion"
pensant que mon Lüger et mon Ruby comme "arme a eu lieu « vers les 10 heures ». Il n’en a rien été, je
de secours" (en cas d’enrayage de l’arme principale), n’ai rien remarqué!
ne suffiraient pas. Il avait eu comme commentaire Vers les 21 heures, je suis repassé dans la rue et
« on n’a pas besoin de tout cela » qui, avec le recul, cette fois la Ford n’était plus là. Reste à savoir si c’est
est significatif! Car pas besoin d’un fusil d’assaut pour la PJ qui l’a faite enlever ou si c’est Arcini, lui-même,
mener un assaut, c’était nouveau! Finalement, cela qui est ressorti tranquillement de chez ses collègues
ne l’avait pas emballé plus que ça que je lui propose pour reprendre sa voiture et aller je ne sais où.
d’aller lui prêter assistance en cas de problème et de Ces petits détails supplémentaires démontrent
le faire évader… que la version officielle n’est pas du tout crédible.
Par conséquent, si Arcini a informé les inspecteurs Quoi qu’il en soit, ce mardi 8 décembre 1987 je perds
de la PJ sur la nature de mon armement, il leur a le contact avec Arcini.
précisé que si je le voyais "s’évader" là maintenant,
j’allais forcément l’aider! De ce fait, il valait mieux qu’il 8. MERCREDI 9 DÉCEMBRE 1987
"s’échappe" plus tard lorsque je serais parti, cela (trajet Caen-Le Havre)
serait moins dangereux. Il est plus que probable Le mercredi matin, je décidais de quitter Caen
qu’ils n’avaient pas du tout envie de me voir surgir pour Le Havre. Je comptais y aller en train.
dans la PJ avec un fusil d’assaut dans les mains. Et Alors que je me rendais à pied à la gare, en
c’est pour cette raison, à mon avis, qu’Arcini est resté passant devant un vendeur de journaux (tout près de
bien sagement à l’étage de l’antenne de la Police la gare) je vois une affichette des "informations
Judiciaire. locales" de Ouest-France avec le titre « Crime raciste
Ils ont peut-être eu à ce moment l’idée de de la rue d’Auge: le suspect s’enfuit » et en une il
m’arrêter. C’est même plus que probable! Cela aurait était relaté "l’évasion", mais sans citer le nom du
accéléré les choses. Mais il y avait plein de monde à suspect. En apprenant cela, il n’était plus question
l’accueil dans ce bâtiment préfectoral, et aucun effet pour moi de prendre le train pour Le Havre, car je
de surprise à espérer pour eux: j’étais fin prêt, tendu pensais que la gare ferroviaire devait être truffée de
par le "stress d’avant-assaut". Arcini me connaissant policiers à la recherche de "l’évadé". Quant à partir
bien, leur a certainement dit que l’arrestation se en voiture, cela ne me disait rien, puisque je
déroulerait sans doute très mal (et pas que pour supposais que les routes devaient avoir des barrages
moi!). Appeler des renforts pour cerner le bâtiment afin de, normalement, rechercher le fuyard.
n’aurait rien changé. Le mieux était de me laisser Je suis alors reparti pour retourner où j’avais
partir, ce qu’ils ont fait, mais normalement, dès ce passé la nuit précédente, et en route j’ai croisé Arcini!
mardi 8 décembre 1987, l’arrestation aurait pu se
faire. J’étais forcément bien localisé dans Caen. Mais 9. JE CROISE ARCINI "PAR HASARD"
apparemment ils n’étaient pas chaud.
Ce qui s’est déroulé, c’est que vers les 10 heures
J’évoque aussi un fait qui est très troublant: dans
30, au moment d’arriver à la "planque", j’ai croisé
l’après-midi du mardi 8 décembre 1987 (jour de
Arcini qui, comme moi, marchait à pied, un sac en
"l’évasion"), je suis passé à deux reprises dans la rue
bandoulière. Nous sommes allé là où j’avais passé la
où il y avait le bâtiment préfectoral où se trouvait la
nuit, puis nous avons fait le point sur ce qui venait de
PJ. J’ai pu y voir que la voiture Ford d’Arcini était
passer ces dernières heures.
toujours garée, bien sagement, devant la porte
Avec le recul, je ne pense pas du tout que ce soit
d’entrée pour ainsi dire. Le véhicule avait une
le hasard qui ait fait que j’ai croisé Arcini. J’avais dû
contravention sur le pare-brise, ce qui veut dire qu’il
être repéré à la gare de Caen, et ceux qui le tenaient
n’était pas ressorti mettre de l’argent dans le
en laisse ont dû partir bien vite avec lui en voiture
parcmètre.
pour le "larguer", en amont de la rue que je
Mais surtout, cela veut dire que sur le coup de 15
remontais, afin qu’en marchant je le croise 2par
heures, et même à 18 heures lorsque je suis passé à
hasard".
nouveau, il ne semblait s’être rien déroulé, puisque
Caen est grand, et c’est quand même une sacrée
sa voiture était toujours garée devant l’antenne de la
coïncidence que ce matin-là, en remontant de la gare
PJ.
en direction d’une "planque", je le croise

Mémoire de Michel Lajoye page 61


précisément. Il se baladait en ville alors qu’il était d’emmener Arcini (ce que je n’aurais pas fait si je ne
censé avoir toutes les polices aux fesses… l’avais pas rencontré "par hasard"!). Je ne pouvais
Arcini connaissait des "planques", alors se quand même pas le laisser. Je me suis rendu seul à
sachant recherché, il aurait dû (s’il n’avait pas été la gare routière pour acheter 2 billets d’autocar pour
tenu en laisse) à ce moment, y être terré comme tout Le Havre car je pensais que l’autocar serait mieux
fugitif en attendant que cela se calme! Au lieu de que le train. La raison en est que la gare routière
cela, il arpentait le trottoir au risque de croiser une était plus difficile à surveiller et je me disais que si
patrouille de police… nous étions repérés, la police n’oserait rien tenter
Cette rencontre est très importante, car sans ce dans un car avec tous ces gens autour.
hasard, je n’aurais pas retrouvé Arcini! Et sans ce Vers les 13 heures, nous sommes partis pour Le
"hasard", la police aurait, sans doute, perdu ma trace Havre, le trajet Caen-Le Havre s’est déroulé sans le
pour quelque temps. moindre problème. Il y avait bien un contrôle de
Certes, mon compagnon d’armes aurait pu gendarmerie au pont de Tancarville, mais ils ne
reprendre contact avec moi, mais seulement via des contrôlaient, apparemment, que les véhicules des
"boîtes aux lettres". particuliers. Ils ont laissé passer l’autocar régulier
En effet, dans des immeubles de diverses villes, Caen-Le Havre sans s’y intéresser…
nous avions des boîtes à lettres desservies en Une fois arrivé au Havre, nous sommes allés dans
courrier par la Poste. Les noms sur les boîtes étaient une "planque".
bidons et pour se contacter simple: il suffisait
d’envoyer un courrier dans la ville où l’on savait que 10. JEUDI 10 DÉCEMBRE (l’arrestation)
l’autre se trouvait. Ce dernier passant régulièrement Le lendemain, dans la journée, nous avons quitté
relever les correspondances, savait alors qu’il était Le Havre pour une petite localité à côté, Octeville, il
demandé à tel endroit, telle heure. En général un se trouve là une ancienne base de l’OTAN habitable.
contact téléphonique fixé pour telle date, dans telle Du moins certains bâtiments et un en particulier prévu
cabine. pour cela. C’était en réalité une ancienne base de la
Dans mon cas, pour me contacter à nouveau, marine allemande, récupérée et transformée en 1944
Arcini aurait dû envoyer des messages dans toutes par les américains, puis par l’OTAN, en terminal
les villes où j’étais susceptible de m’être retiré. Ce qui pétrolier.
aurait pris pas mal de jours (peut-être plusieurs Cette base avait été choisie, car nous étions
semaines, tout aurait dépendu du moment où je deux, et il fallait un logement pour deux. Si j’avais été
serais allé relever les "boîtes aux lettres") avant que seul, ce n’est pas à Octeville que je me serais rendu.
nous puissions nous retrouver à nouveau ensemble. Nous avions prévu de rester un bon moment ici, le
Ce qui, évidemment, ne faisait pas les affaires de temps que cela se calme! Je devinais que l’on devait
ceux qui tenaient Arcini en laisse. Ils ne voulaient pas avoir un paquet de monde aux fesses et que c’était
perdre ma trace, et le meilleur moyen, pour eux, de miraculeux que l’on ait pu sortir de Caen aussi
me "pister", c’était de me coller, tout de suite dans les facilement! Trop facilement même…
pattes, leur complice ! C’est uniquement pour cette En fin d’après-midi, nous sommes arrivés sur
raison qu’il y a eu ce "hasard". place. Seul problème, la base n’avait pas de vivre. Il
Après avoir retrouvé "par hasard" mon camarade, fallait que nous allions en chercher et pour cela nous
j’ai fait le point avec lui et il m’a raconté sa version de attendions la nuit pour nous rendre au supermarché
son "évasion". J’avoue que je l’ai cru (mais il ne m’a du coin. C’était en décembre, il faisait nuit tôt.
pas tout détaillé quand même...), car je me disais qu’il En attendant nous avons décidé de faire un peu
avait dû ressortir de la PJ alors que j’entrais dans la de ménage, et à un moment, je me suis demandé où
bibliothèque. À l’époque je n’avais pas le recul que était passé Arcini! Je ne l’ai plus vu pendant assez
j’ai maintenant sur cette affaire. Je n’avais aucune longtemps (environ 3/4 d’heure), et je ne savais pas
raison de mettre en doute la parole d’Arcini, j’ignorais depuis combien de temps il était déjà parti. Il m’a dit,
tout ce que j’ai appris par la suite. à son retour, qu’il avait été inspecter les alentours. Je
Je lui ai quand même demandé pourquoi il ne ne me suis pas méfié, j’aurais dû!
s’était pas évadé entre 8 heures 30 et 9 heures 15, Maintenant, je suis persuadé qu’il est allé
créneau qui était normalement prévu pour cela. Il m’a téléphoner pour signaler où nous étions! En courant,
alors répondu que son interrogatoire se déroulait il avait largement le temps d’aller au village voisin et
bien et qu’il pensait s’en tirer. J’avoue que je l’ai cru d’en revenir, voire plus simple: entrer dans une
aussi, c’était plausible. Lorsqu’il m’a raconté son habitation la plus proche (un kilomètre environ) pour
évasion, je lui ai quand même demandé ce qu’il avait demander s’il pouvait téléphoner.
fait des armes des inspecteurs, c’est là qu’il m’a dit Il est aussi possible qu’il ait été réellement faire un
qu’ils n’étaient pas armés. J’ai aussi demandé s’il tour et que la police nous ait suivi depuis Caen. Mais
avait volé des choses dans la voiture de police, et il j’en doute, car à un moment dans Le Havre nous
m’a répondu qu’il n’y avait pas pensé. Je lui ai avons emprunté un dédale de sous-sols
également demandé où il avait passé la nuit, il m’a d’immeubles, ce qui fait que nous sommes ressortis
répondu que c’était au dépôt ferroviaire, dans un assez loin de là où nous étions entrés. Impossible
train non fermé. Je l’ai vraiment cru sur tout cela! pour des suiveurs de garder un contact visuel. Il est
Toujours est-il que j’ai décidé de quitter Caen de ce fait douteux que la police ait pu nous suivre
(comme j’avais de toute façon prévu de le faire), et
Mémoire de Michel Lajoye page 62
jusqu’à Octeville. Pourtant elle a su que nous y En tout cas, au retour du supermarché,
étions! comportement très bizarre d’Arcini. Qui ne me semble
J’exclus qu’Arcini ait pu avoir un téléphone encore plus bizarre maintenant que j’ai du recul sur
portable dans son sac, à l’époque cela ne se faisait l’affaire. Nous revenions à pied, et lorsque nous nous
pas comme actuellement. Je ne pense pas non plus sommes engagés sur le chemin menant à la base
qu’il ait eu un scanner radio, mais je ne l’exclus pas (environ un bon kilomètre), il traînait derrière moi!
totalement. La veille, lorsque je l’ai retrouvé par Plusieurs fois je l’ai attendu, il marchait parfois plus
hasard, il avait un sac de sport en bandoulière et je de 50 mètres derrière moi.
ne me suis pas occupé de savoir ce qu’il avait La raison, j’en suis certain, c’est qu’il savait que
dedans. À bien y réfléchir je me demande ce qu’il j’allais me faire sauter dessus, et éventuellement
pouvait bien contenir, car Arcini n’avait pas d’arme abattre, car une embuscade était précisément
autre que son revolver et une grenade qu’il avait sur tendue sur ce parcours! Ce n’est quand même pas
lui. Il n’avait aucune affaire personnelle… innocent que du libre-service au chemin nous ayons
Toujours est-il qu’arrive l’heure de partir aux marché côte à côte à discuter de choses et d’autres,
courses. Je prends donc mon sac de sport contenant et dans le chemin, il prenait tous les prétextes
diverses grenades, et là, Arcini m’a dit qu’il valait possibles pour traîner derrière moi à une distance
mieux que je le laisse ici, car nous serions allant de 10 à parfois 50 mètres. Il est évident qu’il
suffisamment chargés comme cela avec les craignait les "balles perdues".
provisions puisque l’on allait en rapporter pour au Il faisait nuit noire, on n’y voyait vraiment rien, à
moins deux semaines. C’était la seconde fois en 48 peine si l’on distinguait où l’on posait les pieds. À un
heures qu’il voulait que: soit que je mette moins moment, vers 20 heures, j’ai pris un "flash aveuglant"
d’armes dans mon sac ; soit que je laisse ce dernier. parti de je ne sais où! En même temps il y a eu une
Avec le recul que j’ai maintenant de cette affaire, détonation (le signal) j’ai entendu crier « Police! »
je peux dire qu’Arcini m’a bien désarmé. Car du coup, (tout cela en même temps). J’ai tout de suite lâché le
puisque je n’emportais pas mon sac, je n’avais sur sac à provision que je tenais "à bras-le-corps" pour
moi que mon Lüger son chargeur engagé et un autre tenter de prendre mon arme, mais ils m’ont attrapé
de rechange, c’est tout! Et, c’est important, c’était la les mains avant. Ce qui était facile puisque je tenais
première fois depuis plusieurs jours que j’étais aussi le sac à bras le corps, ayant même croisés mes
peu armé. doigts à l’avant pour mieux le serrer contre ma
Je n’ai pas pris de grenade dans mes poches car poitrine. Les assaillants, munis de lunettes de vision
j’évitais d’en avoir lorsque j’allais dans un nocturne, avaient bien vu que j’avais les mains en
supermarché, cela donnait parfois des renflements à avant autour de ce gros sac de toile! C’était le RAID
mes poches qui pouvaient laisser à penser à un vigile venu spécialement pour l’arrestation, donc ils
que j’avais volé quelque chose dans le magasin et connaissaient leur affaire, embuscade rondement
celui dans lequel nous allions n’avait pas bonne menée.
réputation… Aucun coup de feu ne fut tiré. Mais si j’avais eu le
Si ce soir-là, pour aller au supermarché, j’avais temps de prendre mon pistolet, il est évident que cela
prévu d’emmener des grenades dans mon sac, c’est aurait tiré de tous côtés dans ma direction. Ce qui
que dans cette grande surface, que je connaissais explique que mon compagnon d’armes,
un peu, il y avait à l’entrée des consignes, comme apparemment bien informé, avait pris la sage
dans une gare, afin que les clients y laissent leurs précaution de rester assez loin derrière moi…
affaires encombrantes avant d’entrer faire leurs La version officielle dit qu’Arcini a eu le temps,
courses. Le sac contenant les grenades, aussi qu’un avant sa neutralisation, de dégoupiller une grenade
pistolet Ruby, je l’aurais laissé à la consigne le temps (décidément expert dans la goupille cet Arcini!), mais
de faire les achats… pas de la lâcher, car un type du RAID lui tenait la
Nous sommes allés faire les courses, et je n’ai pas main (version officielle) empêchant la cuillère de
eu tout le temps Arcini avec moi. Alors il n’est pas remonter. C’est faux, il ne s’est rien déroulé de cela
exclu qu’il ait pu parler à quelqu’un dans le sur place. J’ignore pourquoi la version officielle
supermarché, car lorsque j’étais au rayon "truc", lui affirme qu’une grenade a été dégoupillée et qu’il a
était au rayon "machin". Nous nous étions réparti une fallu la "regoupiller".
liste de provisions pour aller plus vite et nous devions Il a même été dit qu’Arcini avait une grenade
nous retrouver à la sortie du magasin. Si dans attachée, avec un lacet, autour de son cou et qu’il
l’après-midi Arcini a été téléphoner pour dire que comptait se faire sauter avec. C’est faux aussi, il
nous étions à Octeville, dans l’ancienne base OTAN, n’avait rien de tout cela il n’avait qu’une grenade
et que nous allions aller faire les courses au américaine sur lui: la même depuis sa convocation à
supermarché du coin, il fut aisé à la police de mettre la PJ et il l’avait, d’après ce que j’ai vu, dans une
quelqu’un, connu de lui, dans ce magasin. Cette poche.
personne n’aura eu juste qu’à pousser son chariot à Arcini s’est tout simplement fait neutraliser derrière
côté du sien pour qu’ils discutent et mon camarade moi et ce fut banal. Ils lui ont sauté dessus et c’est
de dire un truc du genre: « C’est bon, il n’a qu’un tout, rien de plus, je n’ai rien constaté d’autre. Alors
Lüger sur lui. » Ce n’est qu’une hypothèse que je les "faux détails", je crois que c’est surtout pour
formule. Je n’ai aucune preuve. accréditer qu’il a résisté, par conséquent qu’il n’était
pas complice des assaillants…
Mémoire de Michel Lajoye page 63
Après l’arrestation, nous avons été conduits à le monde aurait alors demandé comment des
Rouen dans un premier temps. Puis, après 24 heures policiers désarmés (et sans menottes!) ont bien pu
de garde-à-vue, direction Caen pour la suite de cette aller oser faire une perquisition chez un tel suspect,
dernière. qu’ils savaient forcément armé de par son travail…
Par ailleurs, je signale que dans le dossier officiel, En conclusion, finalement, le dossier officiel est
il est mentionné que lors de son arrestation, Arcini "logique". Il s’efforce, péniblement, de rendre crédible
était porteur d’une grenade anglaise. Or, j’étais sur la version officielle.
place, et j’ai vu que c’était une grenade américaine!
La confusion n’est pas possible, car j’ai vu, cette 11. ARRÊTÉS SUR "RENSEIGNEMENT"
arme. Après l’interpellation, l’hebdomadaire caennais
Les grenades américaines ont un bouchon Liberté en date du 11 décembre 1987, a affirmé
allumeur vissé sur le corps de l’engin, exactement que, selon son confrère Le Havre Libre (qui vit sous
comme les grenades françaises. En revanche, les perfusion policière pour ses faits-divers), c’est une
grenades anglaises (les "Mills") que nous avions ont "information" arrivée aux Renseignements Généraux
un système d’amorçage interne. Pour y avoir accès, il de Paris qui a indiqué où nous nous trouvions…
faut dévisser l’engin par son dessous. Impossible de De plus, au procès, le commissaire Etcheberry
confondre une grenade anglaise "Mills" avec une (SRPJ de Rouen) qui relatait notre arrestation à
grenade américaine. Et, je suis formel, Arcini avait sur laquelle il n’a pas assisté 21, a affirmé que l’on a été
lui, lors de son arrestation, une grenade américaine localisé sur "renseignement", autrement dit balancés.
(re)peinte en vert! J’ignore pourquoi "dans la réalité" Il a précisé que c’était la police (sans référence à un
du dossier, cela a changé. service) qui avait obtenu le "renseignement". Il a
Il en est de même pour l’arme de poing qu’avait ajouté que la police protégeait ses indicateurs, et
Arcini sur lui. Il était porteur, lors de son arrestation qu’il ne révélerait pas à la Cour d’Assises qui nous
(j’y étais!) de son revolver de service qu’il détenait en avait donnés. Son petit numéro sentait la diversion à
tant qu’artificier-démineur du Ministère de l’Intérieur! plein nez, car il n’avait pas à parler d’indicateur, nous
Mais, étrangement, dans le dossier officiel, exit avions été localisés, arrêtés, c’était tout! Personne ne
"l’arme de service", puisqu’il affirme que mon lui demandait comment ils avaient trouvé notre
"complice" fut interpellé porteur d’un revolver Partner "planque". Par contre son petit numéro du « je
calibre 22. D’ailleurs à chaque fois que le dossier connais l’indicateur, mais je ne dirai pas qui c’est »
mentionne qu’Arcini était armé, que cela soit pour se était logique.
rendre à sa convocation le 8 décembre ou autres, En effet, il était vital pour eux, après la fuite dans
c’est ce Partner qui est mentionné! la presse du Havre, de me faire croire que la balance
Je crois savoir pourquoi ils ont "collé" cette arme était extérieure ! Que je ne pense pas qu’elle était
dans le dossier alors qu’Arcini ne l’avait pas sur lui intérieure, puisque c’est Arcini lui-même qui a avisé
lors de son arrestation! Ainsi cela évite de ses collègues!
mentionner, dans le dossier officiel, qu’il était armé de D’ailleurs la presse, après avoir écrit la vérité sur
par son travail ! De toute façon à aucun moment cette affaire, est revenue à une version plus
dans le dossier, cette "arme de service" n’est conforme à la vérité officielle, et elle a écrit que ce
répertoriée! Alors, comme elle ne devait pas sont les RG du Havre qui ont eu l’information. Ouf, on
apparaître, on a décidé que mon camarade s’était respire, car vraiment Direction Centrale des RG à
fait arrêter au Havre avec un Partner qui était, Paris, cela faisait trop haut niveau…
pourtant, d’après ce que je pense en savoir, dans C’est qu’à savoir où se trouvaient Arcini et Lajoye,
une cache à Caen… il y avait Arcini et Lajoye, plus une "autre personne"
Ils sont forcés de dissimuler l’arme de service qui habitait Le Havre. Cette "autre personne",
d’Arcini, sinon le "scénario" de la version officielle admettons que ce soit elle qui ait balancé. Dans ce
s’écroule. En effet, cette dernière affirme que ce n’est cas, elle aurait contacté les RG du Havre, de Rouen,
que 6 mois après l’attentat de Caen, qu’enfin, la ou de Caen. Or, il y a cette désastreuse fuite dans la
police s’est intéressée à lui. Cette version ne serait presse locale du Havre qui, aussitôt après
plus du tout crédible si le dossier officiel mentionnait l’arrestation, a bien précisé que c’était à Paris,
que, vu sa profession, il était copain avec les directement à la "maison-mère" des RG, que le
inspecteurs de la PJ. Dans ce cas, tout le monde "tuyau" est arrivé. Il est rare que la Direction Centrale
demanderait comment après l’attentat de juin 1987, des Renseignements Généraux s’occupe des
les policiers n’ont pas fait le rapprochement entre le indicateurs locaux du Havre!
suspect et leur collègue Arcini roulant dans une En revanche, vu l’ampleur et les implications de
voiture Simca 1100 TI de la couleur de celle qui était cette manipulation, il ne fait aucun doute que c’est la
recherchée… Direction Centrale des Renseignements Généraux,
Sans oublier qu’il y a la suite, il faut aussi rendre elle-même, qui a cordonné certains points. Il est de
crédible "l’évasion" du 8 décembre! Par exemple le ce fait tout-à-fait logique que ce soit là qu’Arcini ait dû
dossier officiel ne précise pas que les policiers qui
21
ont, soi-disant, opéré la perquisition chez Arcini, Nous avons été arrêtés par le RAID, et les policiers de la PJ étaient
n’étaient pas armés, et qu’ils n’avaient pas de bien "planqués aux abris", donc ce commissaire n’a rien vu. Ce qui ne l’a
pas empêché de raconter, à la Cour d’assises, l’arrestation avec moult
menottes non plus! Si c’était mentionné, et si en plus détails que personnellement je n’ai pas vus, mais il savait, forcément,
il avait été fait état de "l’arme de service" d’Arcini, tout mieux que moi…
Mémoire de Michel Lajoye page 64
aviser ses collègues de l’endroit précis où nous nous de la gendarmerie, et ils nous avaient caché ça aux
trouvions… audiences du procès de Caen? Non mais là c’est
D’ailleurs, durant la garde-à-vue, des inspecteurs surréaliste! Surtout qu’aux audiences, à chaque fois
du Service Régional de la PJ de Rouen, un peu trop qu’Arcini parlait de ses "groupes sionistes" (cf.
enthousiasmés par la conclusion de l’affaire, ont section 16 du chapitre 5), l’avocat général lui
laissé échapper des petits détails qui démontrent répliquait que non, non, nous étions des isolés et
bien qu'on leur avait donné des ordres pour ne pas qu’il n’y avait aucun groupe armé (quel qu’il soit!)
intervenir eux-mêmes en cas de localisation. Et qui dans la région normande! Apparemment, ce n’est
pouvait leur donner ces ordres si ce n’est leurs pas la version des témoins, riverains de l’ancienne
supérieurs de Paris? Certains autres inspecteurs base de l’OTAN, qui eux ont bien vu un, ou des
faisaient, parallèlement, état de leur amertume d’avoir groupes armés s’entraîner ici! Pourquoi, aux
été "doublés" par le RAID pour cette arrestation. Car audiences de procès de Caen, et même auparavant
ce n’est pas le SRPJ qui a demandé l’assistance du en procédure d’instruction, il ne fut jamais mentionné
RAID! On a imposé le RAID! Ce dernier avait été ce, ou ces groupes? Là je me doute un peu!
héliporté au Havre dans deux Puma (les gros En effet, comme je l’ai relaté dans le chapitre 5,
moyens!), et il était commandé par Ange Mancini en section 16, eux, ne voulaient surtout pas entendre
personne, à l’époque le chef de l’unité. Preuve que parler de ces "groupes sionistes" dont Arcini faisait
cette affaire dépassait, de très loin, les compétences mention! Ils ont même fait peu de cas, au passage,
en manipulation des modestes inspecteurs de la PJ des revendications sionistes concernant ces
locale. Ces derniers avaient été relégués au rang attentats!
"d’observateurs" avec pour ordres de ne surtout pas Pour situer cela dans son contexte, je rappelle
s’occuper de cette arrestation. que le quotidien Le Monde, du 11 février 1986,
Je mentionne aussi, à titre d’information, que la publiait la déclaration de Françoise Castro (épouse
presse de l’époque a diffusé une autre version pour de Laurent Fabiusida, élu de l’agglomération
expliquer la "localisation". Cet autre récit dit que c’est rouennaise, là où ont eu lieu certains attentats...) qui
un promeneur (que je n’ai pas croisé...) qui, voyant a affirmé que le gouvernement de l’époque « a
que je ressemblais au portrait-robot (qui n’avait pas permis à des milices juives de s’installer dans des
été diffusé dans les média et qui de toute façon ne quartiers à Paris, mais aussi à Toulouse, à Marseille,
me ressemblait pas du tout!), aurait avisé lui-même à Strasbourg et d’avoir des contacts réguliers avec le
les Renseignements Généraux du Havre… Ben tiens, Ministère de l’Intérieur… » Certes, dans son
c’est bien connu, en décembre, sur les plages, tous énumération, l’épouse Castro de Fabiusida ne cite
les promeneurs ont en poche le numéro de aucune ville normande… Mais elle même occupe une
téléphone des RG… habitation de la région de Rouen, en Normandie22!
Elle affirmait également que les contacts sont
12.. UN OU DES MYSTÉRIEUX GROUPES ARMÉS réguliers avec le Ministère de l’Intérieur qui était le
En juillet 1998, plus de 10 ans après l’arrestation, Ministère de tutelle d’Arcini! Ce dernier en dépendait
des gens se sont rendus à Octeville, près du Havre. directement, et c’est en 1987 qu’il a commis des
Précisément là où Arcini et moi fûmes interpellés par attentats revendiqués de façon sioniste…
le RAID, afin de collecter d’éventuels Alors, ce, ou ces "groupes armés" que les
renseignements. Sur place il fut rencontré des riverains de l’ancienne base de l’OTAN ont vu à
riverains, et il en fut appris de belles! plusieurs reprises, pourraient bien être les mystérieux
En effet, des habitants ont affirmé, qu’en ce "groupes sionistes" évoqués par Arcini! Cela pourrait
temps-là (1986/1987), l’ancienne base de l’OTAN, être des p’tits gars du Sentier (qui comprend
servait de centre d’entraînement… Ces témoins plusieurs milices juives armées), en virée dans leur
parlent d’un "groupe armé" (ou de plusieurs groupes, ghetto de Deauville, qui avaient cette base
car il est impossible de savoir si c’était le même à d’Octeville (près du Havre) comme "centre
chaque "apparition"!) qui s’entraînait ici! Les riverains d’entraînement"… Il faut dire qu’avec ces falaises,
précisent en outre que les gendarmes, et donc par c’est un merveilleux centre d’exercices militaires qui a
extension les RG, la DPSD et toute la clique, avaient de quoi faire rêver les amoureux de Tsahal!
connaissance de l’existence de ce, ou ces groupes! Certaines personnes m’ont affirmé que ce sont
Moi j’ignorais! Pourtant en juin 1990 j’ai assisté au des "néonazis" qui s’entraînaient ici. Je veux bien le
procès de Caen en étant aux premières loges! croire, mais j’avoue que je suis dubitatif!
Voilà un procès où l’on examinait des affaires des Soyons bassement logiques: imaginons un instant
plus étrange, "terrorisme", et ils n’ont pas évoqué ce que ce, ou ces groupes aient été composés de
ou ces groupes armés?!
22
Et nombreux avec ça! Les témoins parlent de N'oublions pas, non plus, que deux des trois attentats normands ont été
dizaines d’activistes parfois présents et qui perpétrés sur la commune de Petit-Quevilly dont le maire n'était autre que
François Zimeray, encarté au Parti Socialiste, ancien président des
s’entraînaient au tir (armes de guerre!), et même au Étudiants Juifs de Sciences-Po, mais surtout membre des B'nai B'rith.
maniement d’explosif! Alors là c’est plus Cette secte maçonnique (uniquement réservée aux juifs) voue une haine
qu’incroyable! rabique aux nationalistes français. Elle a même rappelé par voie de
presse, notamment dans Le Monde du 26 mars 1986, le serment prêté
Remettons cela dans son contexte: voilà un, ou par les responsables des partis "de droite" de ne jamais s'allier avec le
des groupes armés qui s’entraînent aux vues et sus Front National. La secte des B'nai B'rith peut être considérée comme la
"vitrine légale" du terrorisme sioniste: des milices juives!
Mémoire de Michel Lajoye page 65
"néonazis" (ou assimilés!)! On imagine le tintamarre, Car, compte tenu de l’hystérie qui agite certains,
le délire, que cette affaire aurait fait! Je vois d’ici les j’estime que si un, ou des groupes "néonazis"
titres de la propagande: « Des néonazis en armes en composés de dizaines d’activistes (selon les riverains
Normandie »! Qui plus est: pile là où Arcini et Lajoye témoins des tirs et explosions diverses!) s’étaient
se font arrêter! Le "rapprochement" aurait tout de entraînés là (avec un tel armement de guerre!), cela
suite été fait! Au procès de Caen, on n'aurait parlé se saurait su, et pas qu’un peu! Au minimum cela
que de ça, et rien que de ça ! Cela aurait été le délire aurait été évoqué au procès de Caen en juin 1990,
total! Tandis que là: rien! Alors que la gendarmerie et pas que là, à mon humble avis!
savait tout! Les riverains spectateurs de ces Au procès de Caen, ils avaient déjà omis de nous
entraînements paramilitaires (fait à l’arme de guerre parler de ce Costa, fournisseur de l’arme du crime
selon les témoins!), ont bien certifié que les utilisée par Arcini, et lui-même abattu (cf. chapitre 5,
"autorités" surveillaient ce ou ces groupes, et que la section 8). Silence également sur les autres morts.
gendarmerie a procédé, au moins une fois, à des Mais, ils ont aussi "oublié" de nous préciser que nous
contrôles d’identité. De ce fait, on sait qui sont "ces avons été arrêtés dans ce qui semble avoir été un
gens"… centre d’entraînement d’un ou plusieurs groupes
Si, comme cela m’a été indiqué, il s’était agi des paramilitaires…
"néonazis", il est évident qu'on les aurait embarqués Arcini connaissait la base, connaissait-il aussi ce
vite fait. Ou alors: ce sont des "néonazis spéciaux", ou ces groupes qui s’y entraînaient? Et, surtout, qui
qui sont utiles, qu'on protège… sont ces activistes?
Mais tout de même, je pense que, puisqu'on Pour ma part j’ignorais que cette base servait de
surveillait ces gens (sans les arrêter!), ce sont des centre d’entraînement à des "unités" bien peu
activistes qui jouissent d’une "certaine bienveillance" régulières, sinon je n’aurais pas été candidat pour
de la part des "autorités"… Ce qui, évidemment, fait aller m’y réfugier!
regarder dans une certaine direction…

Chapitre 9

LA GARDE-À-VUE ET L'INSTRUCTION

En effet, il est paru, dans le quotidien Ouest-


1. IL MANQUE DES ARMES ET LES EXPLOSIFS France (édition du Calvados) du mardi 26 juin 1990
ONT DISPARU et l'hebdomadaire caennais Liberté du 29 juin 1990,
des photos de presse montrant les pièces à

D
urant la garde-à-vue, pour ce qui est des
armes, il s’est déroulé de drôles de choses… conviction exposées lors du procès. Nous y voyons
D’après le dossier officiel de cette affaire, trois armes d’épaule et cela ne colle pas du tout avec
Arcini aurait "spontanément", durant sa garde-à-vue, le contenu de l’Arrêt de renvoi devant les Assises!
indiqué où nous avions des caches d’armes dans C’est le moins que l’on puisse dire, puisque pages
Caen. Celles-ci furent "visitées" le samedi 12 23 et 24 de l’Arrêt il est mentionné les armes
décembre 1987. d’épaule saisies. Idem page 36 et 37. Il n’a été mis
Mais, au procès qui a suivi en juin 1990, je n’ai sous scellé (officiellement!) en tout et pour tout,
pas vu ces armes, du moins pas toutes! Et dans le comme arme d’épaule, qu’un misérable fusil de
dossier, dans l’Arrêt de renvoi devant la Cour chasse, qui plus est, détail important, "à canon scié".
d’Assises, il est énuméré à "détention d’armes", ce Or, sur la photo de presse, on peut constater que
que l’on nous reproche d’avoir détenu. Mais c’est le fusil au centre n’a pas l’air d’avoir le canon scié!
dérisoire! Ensuite, sur la droite des clichés, il y a, ce que (du
En effet, au niveau des armes saisies, il n’y a rien box des accusés), j’ai identifié comme l’US M1
pour ainsi dire. Juste ce que l’on avait avec nous lors évoquée plus haut. Mais cette carabine n'est pas
de l’arrestation et ce que j’avais dans mon sac resté mentionnée dans l’Arrêt!
à l’ancienne base de l’OTAN. À cela s’en ajoute Sur la gauche de ces photos de presse, on voit
quelques autres (des grenades notamment) trouvées distinctement un fusil d’assaut, c’est une arme de
à Caen selon les indications d’Arcini, mais guère plus. guerre: un SIG Manurhin qui n'est pas non plus
Pourtant, il était exposé au procès, parmi les répertorié dans l’Arrêt!
pièces à conviction, un fusil US M1. Je l’ai vue ! Donc, pour résumer: l’Arrêt fait mention d’une
Je suis formel, j’ai reconnu cette arme qui était seule arme d’épaule, un fusil de chasse "à canon
stockée initialement dans une cache qui comprenait scié", mais celui qui se trouvait parmi les pièces à
également 3 pistolets Lüger. Ces derniers n’étaient conviction, présentes au procès, n’avait,
pas, eux, parmi les pièces à conviction! Ils apparemment, pas le canon scié! Quant aux deux
n’apparaissent pas, non plus, dans le dossier! autres armes d’épaules, c’est encore mieux, elles ne
De toute façon, ils ne peuvent nier une "certaine figurent pas du tout dans l’Arrêt!
valse" avec l’armement, puisque je peux en apporter Lors du procès, je ne me suis pas rendu compte
la preuve par des documents photographiques. de cette non-concordance! Je n’avais pas le dossier
en main! Je pensais naïvement que ces armes,
Mémoire de Michel Lajoye page 66
exposées dans la salle, étaient répertoriées au dire la vérité, lorsque le président lui a rituellement
dossier! Cela d’autant plus qu’elles venaient bien des demandé s’il connaissait les accusés, il a répondu
caches d’armes qu’Arcini et moi possédions. J’ai « non » (même chose pour les inspecteurs, alors
reconnu ce matériel! qu’ils mangeaient le midi avec Arcini au restaurant
Il semblerait que cet armement n’ait été là que administratif...). Son « non » pour dire qu’il ne
pour assurer la "décoration"! Sans doute pour connaissait pas les accusés est vrai, Gaillardon ne
"impressionner" le public, qui pouvait admirer me connaissait pas, mais ce commissaire fréquentait
l’équipement ainsi étalé. Les armes avaient été en suffisamment Arcini pour lui demander, amicalement,
outre disposées de telle façon que les canons sans contrepartie financière, de lui fournir des obus
"braquaient" les jurés! Ce qui démontre un certain complets pour la décoration de sa maison (et/ou
sens de la mise en scène… celles d’autres).
Autre signe qui montre qu’il s’est déroulé de Lorsque Gaillardon a dit qu’il ne connaissait pas
choses étranges avec l’armement, c’est que durant la Arcini, j’ai trouvé ce reniement tellement lamentable
garde-à-vue (le matin du samedi 12 décembre) j’ai vu que j’ai voulu lui rappeler qu’il le connaissait pourtant
passer, dans le couloir de la PJ de Caen, des suffisamment pour lui demander des obus! Mais je
policiers (je présume que cela en était, bien que je ne n’ai pas eu la parole, et après il était trop tard, le
sache pas qui étaient ces gens habillés en civil) avec témoin s’était retiré. De toute façon, ils m’auraient
dans les mains des armes diverses à nous. Tout cela tous traité de menteur si j’avais dit cela.
n’apparaît nulle part dans le dossier officiel, et c’était Le fait que ce commissaire, puis les inspecteurs,
encore moins présent au procès puisque j’ai même aient affirmé ne pas connaître Arcini s’explique par le
souri lorsqu’ils ont parlé de notre "arsenal". Compte besoin de rendre crédible la version officielle. Celle-ci
tenu de ce qui était exposé là (3 armes d’épaule, 3 dit que c’est en décembre 1987 (6 mois après
armes de poing, quelques grenades: une misère!), et l’attentat de Caen) qu’ils ont identifié le tueur de
ce que nous possédions en réalité, s’ils avaient tout Moussaoui en épluchant le fichier des cartes grises.
amené je me demande le qualificatif qu’ils auraient S’ils avaient dit à l’audience qu’ils connaissaient
employé… Arcini, et mangeaient en sa compagnie le midi, un
Alors où sont passées les autres armes? Et saloupiaud aurait alors pu leur demander comment
pourquoi les armes d’épaule présentes au procès, cela se faisait qu’en juin 1987, aussitôt après
parmi les pièces à conviction, n’apparaissent-elles l’attentat de Caen, ils n’ont pas fait le rapprochement
pas répertoriées dans le dossier officiel ? Certaines avec leur collègue, propriétaire d’une Simca 1100 TI
d’entre elles avaient-elles servi dans d’autres verte, avec qui ils mangeaient tous les midis… Voilà
attentats? Si c’est le cas, il convenait de les faire qui aurait été un bel "outrage à la Cour" et qui
disparaître car une saisie officielle aurait impliqué une m’aurait fait expulser immédiatement!
expertise balistique qui aurait pu être gênante si De plus, les policiers ont été gonflés d’affirmer,
Arcini a commis d’autres actions avec. sous la foi du serment, ne pas connaître mon
Autre hypothèse qui n’est pas à négliger: c’est coaccusé. Je rappelle que ce dernier était artificier-
que nous ayons eu à faire à des policiers démineur du Ministère de l’Intérieur, et qu’il avait le
collectionneurs ! Voyant des "armes de collection" grade de Contrôleur. Qu’il assurait la protection de
(des Lüger à l’état neuf en plus, c’est très prisé!) ils ministres (et non des moindres!), qu’il intervenait
ont pu les garder pour eux! même souvent avec la gendarmerie, la police
Je sais par exemple que Dominique Gaillardon urbaine, et la PJ lors d’arrestation de suspects
(dont il était déjà question dans la note de bas de la détenant des grenades ou des explosifs. Alors, que
page 60 concernant son "enquête" sur l'assassinat des policiers de la PJ de Caen aient affirmé, devant
de François Duprat), commissaire de l’antenne de PJ la Cour, ne pas le connaître et que le président n’ait
de Caen, est un "collectionneur". Je le sais car, pas bronché devant ce parjure, cela en dit long sur
début janvier 1987, j’ai vu Arcini avec deux obus cette farce judiciaire!
d’artillerie complets (douille + ogive), qu’il avait Autres détails concernant la garde-à-vue: les
neutralisés en ôtant les charges explosives des caches d’armes étaient toutes piégées, règle absolue
ogives et les amorces des douilles. Je lui ai demandé entre Arcini et moi. Et lorsque mon camarade a révélé
si c’était « pour nous » ces obus, et il m’avait où il y avait des caches dans Caen, il me semble
répondu que non, c’était pour Gaillardon, le étonnant que l’on n’ait pas dû faire venir le
commissaire de la Police Judiciaire de Caen! Ainsi, déminage. Ces dépôts contenaient des pièges, et il a
Arcini fournissait (amicalement!) des obus neutralisés bien fallu les neutraliser! Soit c’est Arcini qui l’a fait lui-
à ce commissaire (et peut-être à d’autres policiers!) même (après tout il était artificier-démineur!), dans ce
pour que, je suppose, il décore sa maison, et/ou les cas, elle était bizarre sa garde-à-vue puisqu’ils lui ont
donne à des amis.
Et à propos de l’honnête Gaillardon23, lorsqu’il a très courant ces pratiques durant les garde-à-vue car en janvier 1987, lors
témoigné au procès, après avoir prêté serment de de mon arrestation par la gendarmerie, certaines armes que j’avais dans
la voiture étaient dans des housses de protection. Ces dernières (de
qualité...) disparaîtront toutes "mystérieusement" durant la garde-à-vue…
23
Pour l’anecdote: après mon arrestation, j’ai été conduit au SRPJ de Idem pour une cassette audio de Jean-Pax Méfret que j’avais dans ma
Rouen. Là, tard dans la soirée, le commissaire Gaillardon est venu me voiture et qui a ravi les oreilles d’un mélomane de la gendarmerie! Donc
voir pour remplir une fiche. Et pour cela, il a sorti de sa poche un stylo! un conseil que je donne à tous: au moment de sortir d’une garde-à-vue (ou
Mon stylo qu’il avait volé dans mes affaires que l’on m’avait retirées! Et d’une simple convocation), n’oubliez pas de bien fouiller les gendarmes et
évidemment: « Qui vole un stylo, vole une arme »… Apparemment c’est les policiers pour récupérer tout ce qu’ils vous ont forcément volé!
Mémoire de Michel Lajoye page 67
"libéré" les mains afin qu’il démine le site de Récemment, le journaliste-écrivain Henri de
stockage. Soit ils ont fait venir un artificier-démineur Fersan a publié le livre L comme Lajoye. Analyse
qui a travaillé selon les indications d’Arcini, mais dans d'un complot d'Etat. L'ouvrage est consacré à mon
ce cas, pourquoi cela n’apparaît pas au dossier de affaire, et dedans l'auteur mentionne ces actions
garde-à-vue? contre des diplomates tunisiens en remettant cela
Il n’est venu au procès aucun témoin pour dans son contexte géopolitique. Il développe en quoi
raconter comment il a fallu neutraliser les pièges! la France (qui aime jouer le sabbat-goy d'Israël!) avait
Pourtant la police est bien allée dans ces caches: à un grand intérêt à privilégier Ben Ali et aider au
l’audience, comme dit plus haut, parmi les pièces à renversement du vieux Bourguiba24.
conviction, j’ai vu une US M1 qui en venait! Ces autres attentats expliqueraient, du coup,
Et chose qui pourrait frapper l’observateur qui pourquoi tout l'explosif qu'Arcini et moi possédions a
consulterait le dossier officiel, c’est l’absence totalement "disparu"! Car une saisie officielle aurait
d’explosif saisi! Rien, pas de pain de plastic dans les inclus une analyse chimique, et comme c'est sans
pièces à conviction! Alors que des explosifs nous doute le même explosif que celui qui a servi ailleurs,
pouvions en avoir facilement! Plus aisément que des dans des affaires ayant des implications
armes, et que nous en avions quelques kilos diplomatiques avec certains pays dit "sensibles", cela
d’avance… aurait obligé la "justice" à juger Arcini pour cela aussi.
Ce que je pense c’est que de l’explosif de ces Et ça, il ne fallait pas! Car cela aurait été violer le petit
mêmes lots, de ces mêmes pains, a servi dans accord passé avec lui (sur mon dos!). . .
d’autres affaires et qu’il valait mieux ne pas en Sans oublier le scandale énorme que cela aurait
parler… causé si l'on avait révélé que certains attentats des
En effet, en décembre 1987, lorsque je me suis années 80 ont été perpétrés par des services
rendu chez Arcini, et que j'y ai passé quelques jours, gouvernementaux, et non pas par ceux qu'on a
il m'a confié des choses concernant divers attentats. désignés au "bon peuple"! Car Arcini était tellement
J'étais en train de perfectionner un cours sur les blasé par la routine qu'on lui faisait faire, qu'il en
lettres piégées, et, comme ça, je lui ai dit que cela évoquait facilement certaines actions (il n'y a pas que
devait être compliqué d'envoyer ce genre de cette campagne contre des proches de Bourguiba, je
«missives» à des représentations diplomatiques, car suis au courant d'autres "bricoles" de ce genre). Il ne
ces dernières devaient forcément avoir des s'agissait pas de "vantardises" de la part d'Arcini,
détecteurs. Mon vis-à-vis m'a spontanément répondu c'était toujours purement anecdotique. Il ne disait
que « nôôôn », pas de problème pour les jamais « j'ai commis… » ou « nous avons
représentations de certains pays "arriérés", ainsi que commis… », il citait seulement en exemple une
pour les domiciles hors ambassades des a1faire précise pour illustrer un propos, apporter une
"Excellences". Voulant me démontrer que ces rectification. Si cela avait été de la vantardise, cela
dernières ne se méfiaient pas, il me cita alors comme aurait été raconté avec moult détails imaginaires et il
exemple une campagne de lettres piégées envoyées se serait attribué ces actions. Là, ce n'était pas le
à divers diplomates en poste en France, ainsi qu'à cas! C'était le professionnel qui parlait, et qui me
des proches de Bourguiba, le chef de l'Etat tunisien. mentionnait, par un exemple concret et précis, que
Cela s'était déroulé courant 1987, au moment de la j'avais dit une connerie en affirmant que les
révolution de palais à Tunis, afin de faire place nette ambassades étaient équipées de "machines à
pour que Ben Ali réussisse, plus facilement, son rayons" pour détecter si des lettres suspectes étaient
putsch et devienne calife à la place du calife. piégées ou non…
Arcini m'a parlé de cette affaire avec le même Pour en revenir au matériel saisi par la police suite
détachement blasé que celui avec lequel il m'a parlé à mon arrestation et l'auto-capture d'Arcini,
des actions commises en Normandie, que ce soit finalement, lorsque l'on voit ce qui a été découvert,
l'attentat du 6 mars ou celui du S juin 1987 que j'ai nous pourrions penser que mon binôme était plus
détaillé au chapitre 5 de ce document. armurier qu'artificier-démineur! Car s'il y a bien été
Bien sûr on pourrait se dire que c'est via son saisi quelques armes, en revanche, aucun explosif
travail d'artificier-démineur du Ministère de l'Intérieur ne l'a été! Du moins… officiellement ! Dans les motifs
qu'Arcini a eu vent de ces actions des services contre d'inculpation il n'y a pas de « détention d'explosif »!
des proches de Bourguiba. Mais peut-être aussi (et je Alors, où est passé tout l'explosif que nous avions
penche pour cette hypothèse) qu'Arcini, agent d'un et que les policiers ont récupéré ? Qu'en ont-ils fait ?
service, a fait partie de l'équipe qui a réalisé cette Je n'ai pas souvenir non plus qu'il ait été analysé
"campagne d'éliminations"! ce qui se trouvait dans les grenades! Car elles
Le fait que cette dernière n'ait jamais été étaient recyclées avec une charge neuve provenant
mentionnée dans la presse de 1987 est logique. Les des pains de plastic que nous avions. Il aurait pu être
média ne relatent que ce qu'on leur dit de rapporter à très intéressant de savoir si l'explosif, contenu dans
la "masse goye". Cette dernière n'a pas à savoir telle ou telle grenade, a servi ailleurs…
certaines choses! Surtout que la France n'a pas
24
intérêt à informer son opinion publique que des Ceux intéressés par le livre L comme Lajoye. Analyse d'un
(ses?) "services" ont donné un "petit" coup de pouce complot d'État, peuvent le commander à l'adresse suivante:
Publications HdF * Boîte Postale 18 * 63670 Le Cendre, au prix de 125
à Ben Ali… FRF franco de port. Il est également disponible dans les bonnes librairies
nationalistes.
Mémoire de Michel Lajoye page 68
De même que je voudrais aussi bien savoir où "chez lui" à cause des revendications sionistes
sont passées les mines antichars transformées en d’Arcini. C’est certain que des "mauvais esprits"
"grosses grenades" ainsi que les obus! Mais peut- auraient pu faire le lien avec les milices juives
être que, là également, l'explosif qui servait à évoquées, en son temps, par Françoise Castro,
recharger ces mines et ces obus provenait du même épouse Fabiusida (cf. section 12 du chapitre 8)…
lot de plastic que celui utilisé lors d'autres attentats ? Arcini a toujours affirmé être en contact avec des
Dans ce cas, là encore, cela expliquerait le pourquoi groupes sionistes, et, en effet, un tel procès "chez"
de la disparition de ce matériel lourd. Fabiusida cela aurait fait mauvais genre… Surtout
Tout ce que je peux dire, c'est qu'il s'est déroulé que deux des trois attentats ont eu lieu à Petit-
des choses très bizarres durant cette garde-à-vue, Quevilly, dont le maire était (est?) François Zimeray,
puisque la majorité des armes a disparu, ainsi que membre "éminent" de la secte des B'nai B'rith, "aile
tous les explosifs. politique" des terroristes des milices juives.
Mais ce que je ne m'explique pas trop, c'est Quoi qu’il en soit, l’instruction s’est déroulée
pourquoi il a été attendu la garde-à-vue pour faire (officiellement) comme elle apparaît au dossier, mais
disparaître ce matériel ? Ils auraient pu le récupérer ce fut un délire total. Car Arcini racontait n’importe
avant, dès juin 1987, lorsque Arcini fut identifié et quoi, ou plus exactement ce que je pensais être
arrêté, juste après l'attentat qui a coûté la vie à n’importe quoi. À l’époque je n’avais pas le recul que
Moussaoui. j’ai maintenant, et j’admirais la façon dont il les menait
La seule explication que je vois, c'est qu'ils en bateau, en fait c’était moi qui me faisais mener en
pensaient que j'aurais trouvé étrange de voir les bateau…
caches vides de certaines armes et de ne plus y Durant l’instruction (et même durant la garde-à-
trouver un gramme d'explosif. Idem chez Arcini alors vue) il a été question sans cesse d’un groupe appelé
qu'il vivait au milieu d'un stock incroyable! Pour eux, la Main Blanche. Il y a même eu un moment Voie
mieux valait tout laisser en place pour que je ne me Lumineuse. C’était ce que nous avions, soi-disant,
doute de rien, il serait toujours temps, après mon constitué Arcini et moi. Pour ma part je n’étais pas au
arrestation, durant la garde-à-vue, de tout faire courant que nous formions ce groupe-là à nous
disparaître. Et qui m'aurait cru si j'avais dit au procès deux!
qu'il manquait plein d'armes et que tout L'explosif Cependant, au début j’ai joué le jeu, car je n’avais
que possédait Arcini s'était "volatilisé" ? pas de raison de mettre en doute la sincérité d’Arcini
Si nous prenons en compte le fait qu'Arcini était et notamment de me méfier de lui. Je pensais qu’il
tenu en laisse, qu'il y avait un accord "d'amnistie" était en train de faire diversion. Donc la Main
pour certains actes, contre une "petite aide" pour Blanche, j’ai enchaîné dessus. Idem pour tout le
m'avoir, tout ce que je trouve bizarre est d'une reste, je faisais en sorte que cela "colle" le plus
logique implacable… possible à ce que racontait mon co-inculpé.
En réalité tout est bidon, il n’y a jamais eu de
2. L'INSTRUCTION groupe constitué entre Arcini et moi. Il faisait ce qu’il
L’instruction s’est déroulée à Caen, le magistrat- voulait de son côté, et moi de même du mien. Il est
instructeur était une femme, une certaine Fabienne certain que l’on se voyait souvent, que l’on
Janocka. Pendant l’instruction, j’ai fait pas mal de s’entraînait ensemble, il y avait la fourniture de
"caprices", refusant d’y aller! Le juge était d’obligé de matériel, etc, mais nous n’avons pas été complice
délivrer des mandats d’amener à chaque fois pour dans nos actions respectives. Il y avait des actions
me faire venir. Ils devaient aller m’arrêter à la prison… prévues en commun, mais elles ne se sont jamais
Cela m’a étonné que toutes les affaires soient réalisées.
instruites à Caen, car l’attentat qui m’était reproché a Quant à la documentation qui aurait été retrouvée
été commis à Petit-Quevilly. C’est de fait le Parquet chez Arcini, cela ne correspond à rien, c’est du vent
de Rouen qui était territorialement compétent pour qui, j’en suis sûr, a été rédigé entre juin 1987,
me juger! Je n’ai rien commis dans la zone du époque où Arcini a été identifié après l’assassinat de
Parquet de Caen! Il est étrange que j’aie été jugé par Moussaoui, et décembre 1987, époque où il a été
les Assises du Calvados pour des faits relevant des arrêté avec moi.
Assises de Seine-Maritime. Mais toute cette affaire de Main Blanche n’était
De plus, le tout premier attentat, commis en pas là par hasard. C’était destiné à lier toutes les
Normandie, l’a été à Petit-Quevilly. C’est le affaires et à me faire juger en même temps qu’Arcini,
"mitraillage" d’un bar arabe le 6 mars 1987. Par puisque grâce à cela je formais avec lui une
conséquent, si l’instruction devait se dérouler là où a "association de malfaiteurs" dénommée la Main
commencé l’infraction, c’était en Seine-Maritime que Blanche. Sans l’association Main Blanche, les
cela devait être instruit et jugé. Au total deux affaires auraient dû être dissociées c’est évident, cela
attentats ont été commis en Seine-Maritime, contre aurait dû être des affaires distinctes.
un dans le Calvados. En effet, je n’ai pas participé aux actions d’Arcini,
Peu après le procès aux Assises, l’hebdomadaire j’étais en prison. Lui n’a pas participé directement à
Rivarol a écrit que si l’affaire a été jugée à Caen l’attentat que j’ai commis. Nous nous sommes juste
c’était parce que le Normand de Rouen qu’est fait arrêter ensemble. Et si Arcini s’est fait arrêter avec
Fabiusida ne voulait pas d’un procès de ce genre moi c’est uniquement parce que le mercredi 9
décembre 1987 je l’ai croisé "par hasard" dans une
Mémoire de Michel Lajoye page 69
rue de Caen. Sans cela je ne l’aurais pas eu dans participé à l’assassinat de Moussaoui! Et même que
mes pattes à ce moment. c’est moi qui l’ai abattu comme on peut le lire
Mais si cela avait été dissocié, mon affaire serait régulièrement dans certains "journaux de référence",
apparue comme dérisoire, ridicule même! Difficile de comme Le Monde. Beaucoup de gens pensent, de
me condamner à perpétuité pour si peu, tout le bonne foi, que j’ai bel et bien abattu l’épicier
monde aurait trouvé ça louche. C’est pour joindre les Moussaoui car ils l’ont lu dans le journal!
affaires qu’il fallait aussi qu’Arcini soit celui qui ait, Les motifs d’inculpation (publiés dans la presse au
officiellement, assemblé la bombe que j’ai déposée. moment du procès) me concernant sont donc une
Et si on lit les déclarations d’Arcini avec à l’esprit que savante manipulation, car ils comprennent bien la
le but était de me "lier" aux autres attentats, ses « complicité d’assassinat » (troisième motif
dépositions deviennent très claires. Il ne fait aucun d’inculpation!). Or, le seul mort (officiel puisque l’on
doute qu'on lui dictait ce qu’il devait dire. ne parle pas de Costa et des autres) est Moussaoui.
Pendant l’instruction, du moins dans les premiers Il a été abattu le 5 juin 1987 et j’étais en prison du 26
mois, Arcini était détenu à la Maison d’arrêt de janvier 1987 au 26 octobre 1987… Ce qui constitue
Lisieux. Le monde des prisons étant petit, alors que quand même un alibi en béton!
j’étais quant à moi à celle de Rennes, un détenu Pourtant, si on prend des documents officiels me
transféré de Lisieux m’avait donné comme "tuyau" de concernant et qui figurent dans le dossier (par
« faire gaffe à [mon] pote Arcini »… En effet, il exemple ma citation à comparaître) on y lit bien que
recevait régulièrement au parloir avocats la visite de je suis inculpé pour « complicité d’assassinat » (de
deux hommes habillés en civil, et qui n’étaient pas du Moussaoui) et que je vais être jugé pour cela! Mais
cabinet de son avocat, et ce n’était pas ce dernier… aussi que je vais l’être pour « assassinat » (de
Alors qui étaient ces hommes? Ceux qui venaient lui Moussaoui). Ce qui est quand même humoristique,
dire de raconter telles choses? car du coup j’étais accusé (sur la citation à
Autres détails troublants, au début de sa comparaître) d’être mon propre complice dans un
détention, il s’est retrouvé au mitard. N’ayant pas assassinat commis par moi-même…
goûté cela, il a écrit une lettre au Parquet affirmant On mélange sciemment les affaires d’Arcini à la
qu’il voulait être entendu (sur quoi?) et qu’il avait des mienne et il y a même mentionné contre moi une
« révélations à faire » (termes employés par lui!)! accusation de « vol » (la 205 de la PJ qu’Arcini aurait
Évidemment, on s’est bien gardé de l’entendre, on a dérobée lors son "évasion" et une « résistance à la
dû lui envoyer les deux civils pour le remettre en Force Publique » ("l’évasion")! Même les menaces
condition… Cette lettre d’Arcini est étrangement au proférées (qui ne l’ont jamais été en réalité!) par
dossier (ils ont dû oublier de l’ôter), je l’ai lue, Arcini aux policiers lors de "l’évasion" figurent à mon
apparemment il n’était pas content et il semblait crédit!
réellement disposé à tout raconter… Heureusement, Encore récemment, en 1996, puis en 1998, suite
par la suite, on l’a changé de prison! Il a été envoyé, à diverses procédures devant la juridiction
chose jamais faite pour un détenu en préventive, administrative, j’ai pu lire dans plusieurs documents
dans un Centre de Détention tout neuf à Lorient où produits par le Bureau des Affaires Juridiques du
ne s’y trouvaient que des condamnés à moins de 5 Ministère de la Justice, que je suis condamné, entre
ans! Cela offrait des conditions de détention bien autres, pour « assassinat ».... À force de répéter un
meilleures (4 étoiles!) qui étaient susceptibles de lui mensonge, cela devient une vérité! Celui qui a
faire oublier ses velléités de "révélations" qu’il produit ces multiples documents, est un certain Didier
menaçait de faire… Safar Chef du "Service Contentieux" du Garde des
Sceaux. Que ce dernier en soit arrivé à fournir, au
3. LES MOTIFS D'INCULPATION Tribunal Administratif de Strasbourg, puis à la Cour
Officiellement, si on lit le dossier, l’information qui administrative d’appel de Nancy, de faux documents
a été ouverte contre moi l’a été pour: me concernant et mentionnant que je suis condamné
« Assassinat, tentatives d’assassinat, complicité pour « assassinat »..., démontre qu’à très haut
d’assassinat, fabrication d’engin explosif, résistance à niveau, on continue encore aujourd’hui la savante
la Force Publique, menace d’atteinte aux personnes, manipulation. Cela démontre surtout qu’ils ont
vol, détention et transport d’armes et de munitions de tellement conscience que ma condamnation apparaît
1 ère catégorie, association de malfaiteurs. ». Pas comme disproportionnée aux observateurs, qu’ils
moins! jugent préférable d’en rajouter un peu afin que cela
Encore aujourd’hui ma fiche pénale, de passe mieux…
condamné, comprend cet énoncé, et ce n’est pas un
4. SOI-DISANT ARRÊTÉ AVEC L'ARME DU
hasard. Car une personne qui verrait que je suis
CRIME DE CAEN
condamné à perpétuité avec 18 ans de sûreté pour
au final la simple « dégradation d’un bien immobilier » Durant l’instruction, j’ai appris une chose qui m’a
trouverait ça louche. Tandis que là, si l’on prend ma étonné, et que je ne crois pas! Officiellement, le
fiche, on se dit que, certes, je suis condamné à pistolet Lüger, que j’avais sur moi, lors de mon
perpétuité, mais il y a matière à condamnation. arrestation par le RAID, c’est celui qui a servi à tuer
Et cette affaire a été présentée médiatiquement Moussaoui. C’est-à-dire l’arme que Costa a remise à
et judiciairement de façon à accréditer l’idée que j’ai Arcini (cf. chapitre 5, section 7). Il a aussi été affirmé

Mémoire de Michel Lajoye page 70


que les munitions que j’avais étaient le reste du lot type qui auraient été appréhendés, et non seulement
qui avait servi aux attentats en Normandie. deux !
Autrement dit les munitions que Ziegler aurait Bien sûr, ils peuvent prétendre que je m’en suis
fournies à Arcini (cf. chapitre 5, section 10). séparé, que j’ai caché, dans l’intervalle, les deux
C’est totalement faux! Car cette arme, j’étais allé pistolets "manquants" et que j’ai remplacé mes armes
la chercher dans une cache en octobre 1987, juste du 8 décembre par celles du 9 qu’Arcini m’aurait, soi-
après ma libération de prison (cf. chapitre 6 pour disant, remises. Mais dans ce cas, il est pour le moins
cette libération). étonnant que les policiers ne m’aient pas "cuisiné"
Ce que je crois, et ce dont je suis même pour tenter de retrouver ces deux autres armes… Il
absolument certain, c’est qu'on a changé l’arme est évident que la police aurait tout fait pour les
après mon arrestation pour mettre celle qui avait servi retrouver!
à abattre Moussaoui. Rien ne ressemble plus à un Lorsque Arcini raconte que le 9 décembre, il m’a
Lüger P08 qu’un autre Lüger P08. Durant l’instruction remis le Lüger (arme du crime), c’est comme pour la
(et même au procès) il ne m’a pas été remis en main confection de la bombe, il s’accuse sur ordres!
l’arme. Dès lors, je n’ai pas pu voir si c’était un autre Preuve qu’il était plus que complice avec ceux qui
Lüger que celui que j’avais sur moi lors de mon sont derrières cette manipulation.
arrestation. Et d’ailleurs je ne suis pas convaincu que Il fallait que je sois arrêté avec l’arme du crime, et
j’aurais pu affirmer, de façon certaine, que c’était avec des munitions identiques à celles qui ont tué
cette arme-là que j’avais lors de mon interpellation. Moussaoui, alors ils ont substitué! Ils ont fait
Hormis, bien sûr, s’il y avait eu une grosse différence, disparaître le Lüger que j’avais pour le remplacer par
comme une marque spéciale sur la crosse ou autres. un autre plus intéressant pour eux…
De toute façon nous avons, dans l’Arrêt de renvoi Pour les munitions, j’en suis d’autant plus certain
devant les Assises, la preuve de la substitution, leur encore! Le dossier officiel prétend que les cartouches
version ne tient pas! Ils affirment que c’est Arcini (et que j’avais sont le reste du lot que Ziegler avait remis
ce dernier le reconnaît!) qui m’a remis lui-même ce à Arcini et qui a servi, notamment, à tuer Moussaoui.
Lüger le 9 décembre! Mais il y a un couac énorme Je sais que c’est faux pour la simple et bonne raison
dans leur récit! Page 27 de l’Arrêt, il est écrit que le 8 que les munitions de mon arme, que j’avais
décembre, pour aller au centre administratif (antenne réellement lors de mon arrestation, étaient des balles
de la PJ à Caen), j’étais porteur de 2 pistolets, ce qui allemandes recyclées. J’avais le matériel pour
est vrai. Ainsi ce mardi 8 décembre, pour prêter fabriquer mes munitions, alors je prenais des
assistance à Arcini (cf. chapitre 8 section 6), j’avais 2 cartouches allemandes pour les Lüger, et je les
pistolets. On retient bien le chiffre 2! Plus loin, sur recyclais en remplaçant la poudre, ainsi que l’amorce
cette même page du même Arrêt, il est menti en d’origine, par du neuf. Ce sont des projectiles de ce
disant que le lendemain 9 décembre au matin, Arcini genre que j’avais avec moi lors de mon interpellation,
est allé récupérer un pistolet Ruby plus le Lüger aucune confusion de ma part sur ce point.
(arme du crime) qu’il m’a remis après m’avoir Le fait que j’aie, officiellement, sur le papier, été
rencontré "par hasard". arrêté avec l’arme du crime, et le reste des munitions
Donc, le 9 décembre, il y a, dans cet Arrêt, un ayant servi aux attentats en Normandie, n’en
total, pour Arcini et moi, de 4 pistolets ! Les 2 accréditait, évidemment, que plus la collusion
pistolets que j’avais avec moi le 8 décembre + les 2 Arcini/Lajoye! Objectif où l’on voulait en arriver pour
pistolets qu’Arcini récupère le 9 décembre = 4 joindre toutes les affaires dans un procès commun.
pistolets à partir du 9 décembre! Au risque de peiner On peut dire qu’ils se sont donné du mal pour
Big Brother, j’affirme que 2 + 2 = 4! faire que toutes les affaires normandes soient liées
Or le 10 décembre, suite à l’arrestation, l’Arrêt entre elles! Seul moyen de faire oublier l’indigence de
(dans ses pages 25 et 26) fait état, pour Arcini et mon attentat, et de me faire condamner au maximum
moi, de seulement deux pistolets, un Lüger et un en profitant de l’importance des accusations pesant
Ruby! Il n’y a pas d’autre pistolet (l’autre arme de sur Arcini.
poing saisie est un revolver)! Ce dont fait mention Et, soit dit en passant, heureusement que j’étais
l’Arrêt ce sont les armes que mon complice est censé en prison du 26 janvier 1987 au 26 octobre 1987!
être allé récupérer, la veille, le 9 décembre! Mais, Sinon il ne fait aucun doute que j’aurais été
dans ce cas, où sont passés les pistolets que j’avais condamné pour avoir abattu Moussaoui, à Caen, le 5
avec moi le 8 décembre? juin 1987! Je n’aurais pu "nier les faits" compte tenu
Pour les rédacteurs de cet Arrêt, 2 + 2 = 2! Il des "preuves accablantes" contre moi! En effet, le
manque 2 pistolets! Ou plus exactement il n’en dossier officiel affirme que je fus interpellé avec l’arme
manque pas, puisque jamais Arcini ne m’a remis ce du crime et le reste des munitions tueuses. Des
Lüger et il n’a jamais été récupérer ce Ruby le 9 "preuves" largement suffisantes pour forger l’opinion
décembre. Ils ne se sont, apparemment, pas rendus d’un jury sous influence! Ajoutez un "témoin" qui
compte qu’une simple addition suffit à démontrer que m’aurait "reconnu" et c’était emballé! Cela démontre,
le récit contenu dans l’Arrêt ne colle pas. Imparable! surtout, qu’en matière de "preuve", quelles que
Puisque si Arcini avait réellement récupéré deux soient les affaires, il faut être très prudent! Ils savent
pistolets le 9 décembre, lors de l’arrestation en fabriquer!
intervenue le 10, ce sont bien quatre armes de ce

Mémoire de Michel Lajoye page 71


Chapitre 10

LE DOSSIER

maternelle (ça ne se faisait pas au début des années


1. SA REMISE (8 juin 1990) 70 dans la France rurale).
Nous allons donc voir le contenu de "l'Enquête de

U
ne copie du "dossier complet", ou plus
exactement présenté abusivement comme tel, personnalité", et je remercie ceux qui l'ont établie!
m’a été remise le 8 juin 1990, un peu avant Car s'il me fallait encore des preuves de la
midi. C’était le lendemain de mon transfert de la falsification du dossier, ils m'en ont fourni plus qu'il
Maison d’arrêt de Rennes à celle de Caen. m'en faut.
Je n’ai pas pu le consulter longuement car je
2. "L'ENQUÊTE DE PERSONNALITÉ" A ÉTÉ EN
devais l’envoyer à Maître Burdeyron (mon avocat à
PARTIE RÉDIGÉE PAR LA GENDARMERIE
l’époque) qui, lui, ne l’avait pas (et je ne pouvais le
photocopier, faute de moyens techniques pour cela)! Si avant le procès de juin 1990, je n'ai pas eu le
Comme à la Maison d’arrêt de Caen le courrier est temps de consulter le dossier officiel dans sa totalité,
ramassé vers les 17 heures, j’ai eu le dossier juste en revanche j'avais eu le temps de lire le contenu de
quelques heures en début d’après-midi, ce qui "l'Enquête de personnalité" me concernant et j'avais
explique que je n’ai pas pu le consulter à fond avant été édifié!
le procès. Le temps que la Poste achemine les En effet, lorsque j'ai lu les déclarations de mes
documents à Maître Burdeyron, celui-ci les a eus parents, cela m'a fait bondir! Car ma mère disait (je
moins de deux semaines avant l’ouverture du procès. résume) que je m'absentais souvent et notamment
Ce qui fait catastrophique pour préparer une telle une fois où je suis parti pendant plusieurs jours, en
affaire. Bretagne, et qui plus est pas chez n'importe qui:
De plus, ce dossier est constitué de telle façon chez Jean-Marie Le Pen lui-même! Ce qui est bien
qu’un avocat qui le consulte ne sait pas par quel sûr totalement faux!
bout commencer. Cela part dans tous les sens, pour Par la suite (après le procès de juin 1990), j'ai écrit
au final n’arriver qu’à du vent. à mes parents pour leur demander quelles étaient
En effet, comme Arcini a en réalité été identifié ces choses racontées dans leurs procès-verbaux
dès juin 1987, juste après l’assassinat de Moussaoui, d'audition. Ils ont fini par me répondre, après que
et qu’il a été tenu en laisse jusqu’en décembre 1987, j'aie insisté dans plusieurs lettres, que ce sont les
il faut bien se rendre à l’évidence que dans ce cas: gendarmes qui avaient écrit cela eux-mêmes ! Ce
tout le dossier jugé à Caen est un faux ! sont eux, au moment de consigner les déclarations
Quant à ceux qui pourraient s’étonner que ce ne de mes parents, qui ont rajouté ces éléments en
soit que le 8 juin 1990 (soit 15 jours avant le procès!) affirmant à ma mère que cela pourrait m'aider de
que j’ai eu accès au dossier, je leur répondrai qu’en "décharger" ma responsabilité et de dire que j'avais
France c’est quand ils le veulent qu’ils daignent en été "entraîné", "influencé", et patati et patata. Donc,
remettre une copie à l’accusé! Les "Droits de la c'était bien la faute à Le Pen et j'étais même,
défense" et le "Droit à un procès juste et équitable" apparemment, allé chez lui, en Bretagne (à La
etc, sont des arguments de propagande destinés Trinité-sur-Mer, je suppose!), prendre les dernières
aux gogos, et je dirais même destinés aux goyim ! Je consignes… Les gendarmes ont aussi précisé à mes
me permets de plagier l’excellente formule de parents qu'il fallait me présenter "comme ci et comme
François Brigneau: « À quoi reconnaît-on, en France, ça".
un imbécile? C’est celui qui dit “j’ai confiance dans la Je ne crois pas un instant que ce soient les
Justice de mon pays!” ». On ne saurait mieux dire! gendarmes qui aient eu cette idée-là tout seuls. Car
Et pour la remise de cette copie, encore dois-je ceux qui ont réalisé ces auditions ce sont (c'est
dire merci, car je l’ai eue deux semaines avant mentionné sur les procès-verbaux) des gendarmes
l’audience! Ils auraient pu me la remettre le matin du de la brigade de Saint-Jean-de-Daye (département
procès! Voire ne pas m’en remettre du tout! Et 15 de la Manche), du chef-lieu de canton (500
jours avant, c’était suffisant, le dossier remis ne faisait habitants)! Par conséquent, des pandores de la
que dans les 3.000 pièces, une paille à consulter! campagne, forcément pas vraiment au fait des
Ce dossier, comme tous ceux de Cours d'Assises, subtilités politiques liées à "l'extrême-droite"… On
se décompose en deux parties: la première est avait, c'est manifeste, briefé ces militaires en leur
consacrée aux faits criminels (je n'y reviens pas, précisant ce qu'ils devaient obtenir et faire signer aux
puisque ce fut développé au fur et à mesure de ce parents. Car c'est l'ensemble des auditions de mes
mémoire); la seconde est intitulée "Enquête de parents qui est ainsi bidonné puisque totalement, ou
personnalité". Comme son nom l'indique, cela presque, écrit par la gendarmerie!
concerne la personnalité. Ces investigations sont Par exemple, dans le procès-verbal d'audition de
destinées à savoir si l'accusé a fait pipi au lit lorsqu'il ma mère, il est question de la Corse. D'un séjour que
était gosse, et/ou s'il a tiré sur les couettes d'une j'y aurais fait. C'est exact, puisque je suis bien allé
copine de maternelle ou de CP pour ceux qui, dans l'île en 1983. Mais, je suis formel, mes parents
comme moi, ne sont jamais allés en classe de l'ignoraient totalement, et n'avaient aucun moyen de
Mémoire de Michel Lajoye page 72
le savoir! À l'époque où je m'y suis rendu (été 1983), que j'avais commis des actions en Corse, puisque je
j'avais 16 ans depuis avril et j'étais parti en Corse m'y rendais de temps en temps. Pour les "preuves"
"comme ca" (vers 13/14 ans, je suis devenu "très de ma participation à de quelconques actions, je leur
mobile", mes parents me voyaient de moins en fais confiance, ils auraient fabriqué cela… J'ai
moins. J'ai abordé cela au chapitre 1, section 1 de ce expliqué dans ce mémoire, au chapitre 9 section 4
document). Je suis resté en Corse tout l'été. (« Soi-disant arrêté avec l'arme du crime de Caen »),
Cependant, dans le procès-verbal de ma mère, il comment on s'y prend pour fabriquer des "preuves
est précisé que c'est en 1984 que je m'y suis rendu. accablantes".
Ils se seraient apparemment trompés puisque c'est En tout cas, il est évident que la gendarmerie n'a
en 1983 que j'ai effectué ce séjour. D'ailleurs, dans pas ajouté ce "séjour en Corse" sans avoir sous le
l'hebdomadaire caennais Liberté en date du képi une raison bien précise!
vendredi 29 juin 1990 qui faisait le compte rendu du En outre, d'après ce même procès-verbal
procès de Caen, il est fait état de ce tourisme d'audition autodictée, je suis revenu de Corse « le
insulaire. Il est précisé également que cela a eu lieu crâne rasé »… Je me retrouvais par conséquent
lorsque j'avais 17 ans (donc en 1984). L'erreur de décrit comme un skinhead, ce que je n'ai jamais été!
date a ainsi été reprise par la presse "bien" informée Mais qu'importe, dans cette audition, il fallait qu'il y ait
sur ce qu'elle devait écrire. tous les éléments du fantasme: nous avons Le Pen
Si mes parents ne savaient pas que je me suis (qui ne peut être, évidemment, que l'instigateur des
rendu en Corse, et par conséquent qu'ils n'ont pas actes que j'ai commis!), nous avons la Corse et ses
pu l'indiquer d'eux-mêmes dans leur procès-verbal mystérieuses exécutions, et nous avons les
d'audition, en revanche Christophe Arcini a su que je "skinheads"! Ne manquait, dans ce document,
suis allé dans l'île! Je ne le connaissais pas en 1983, qu'une allusion au Ku Klux Klan et à Odessa !
mais en 1984, lors d'une conversation portant sur la Le reste des auditions de mes parents est de la
Corse, je lui ai dit que je connaissais un peu, puisque même eau: tout y est totalement bidon, ou alors
j'y avais séjourné durant tout l'été 1983. présenté d'une façon plus que tendancieuse.
Alors je ne vois qu'Arcini pour avoir raconté (à Mais, ce qui est significatif, c'est que lors du
ceux qui le tenaient en laisse sans doute…) que je procès de Caen, ils n'ont pas exhibé certaines
m'étais rendu en Corse en 1983. Et ce sont les déclarations contenues dans ces procès-verbaux des
gendarmes (renseignés probablement par la DPSD parents. C'est dire si c'était gros! Même la licrasse qui
et/ou autres…) qui, sachant qu'ils devaient ajouter était partie civile et qui pourtant ne recule devant
certaines choses aux procès-verbaux d'audition des rien, a préféré s'abstenir de sortir ce "séjour chez Le
parents, l'ont ajouté en faisant une faute de frappe: Pen"! Idem pour la LDH et le MRAP qui, comme les
en tapant 1984 au lieu de 1983. À moins que l'erreur licrasseux, ont finalement considéré que, sur ce
ne soit volontaire, mais comme je ne me suis pas coup-là, la gendarmerie y était allée un peu fort
rendu en Corse en 1984, je ne vois pas, au premier quand même et que cela se voyait vraiment
abord, l'intérêt de cette "faute de frappe"… Il peut beaucoup qu'il y avait eu de l'autodictée! L'avocat
aussi s'agir d'Arcini qui a mal transmis, et indiqué général, ainsi que le président de la Cour, se sont
1984 au lieu de 1983. Difficile de le savoir… aussi abstenus de sortir cette déposition, ce
Mais ce séjour en Corse n'a pas été inclus de "témoignage", pourtant si accablant pour Jean-Marie
façon innocente dans cette audition parentale. C'est Le Pen…
évident! Au besoin cela "prouvait" (c'est ma mère qui
l'indiquait, alors c'était forcément la "vérité vraie", une 3. LES PARENTS
mère ne mentirait pas aux gendarmes sur cela1 Qui Eu égard à la personnalité de mes parents, il fut
croirait le contraire?) que je me rendais en Corse de aisé pour la gendarmerie de leur faire signer
temps à autre. Et qu'est-ce qu'il y a eu dans cette n'importe quoi! Ou plus exactement, pas n'importe
île? L'assassinat de Costa qui aurait fourni à Arcini le quoi: des “indications“ qui auraient pu éventuellement
Lüger P08 utilisé pour commettre deux des trois servir!
attentats normands. Et aussi ces deux Arabes Mon père est maintenant décédé, il est mort au
abattus à Ajaccio en août 1986. (Ces affaires ont été début 1995. Je dois dire que c'était des parents
abordées au chapitre 5 de ce document) spéciaux (ma mère vit encore). Lorsque je suis né,
En mentionnant dans ce procès-verbal ce "séjour mes parents avaient tous les deux 44 ans (ils sont
en Corse", il semble manifeste qu'on voulait en faire nés en 1923). Il y a une grande différence d'âge
conclure certaines choses… Je pense sincèrement entre mes frères, mes sœurs et moi (j'y reviendrai plus
qu'on voulait établir une sorte de "connexion" avec loin).
divers crimes qui ont eu lieu dans l'île, notamment Mon père: alcoolique total. Quant à ma mère, elle
ceux que j'ai mentionné dans ce mémoire. est un peu retardée, un brin “simple d'esprit“ comme
En effet, en quelque sorte, les gendarmes avaient on dit. Ce qui fait qu'avec deux personnes de ce
"préétabli" dans cette déposition un lien imaginaire genre, les gendarmes jouaient sur du velours, ils
avec Le Pen lui-même (on se demande ce qu'il vient pouvaient leur faire avaler n'importe quoi et les
faire là-dedans!), et surtout avec la Corse! Ainsi, pour persuader de signer des procès-verbaux d'audition
le cas où l'on aurait eu besoin de charger "un peu qu'ils avaient en partie rédigés eux-mêmes.
plus" les accusations contre moi afin d'obtenir une
condamnation maximum, il était aisé de "démontrer"
Mémoire de Michel Lajoye page 73
Ma mère ne pensait évidemment pas à mal, elle a à mort avec mon père, ce qui fait que "ce type", je le
accepté (certainement sans se rendre compte de ce voyais de loin, je savais que c'était l'un de mes frères,
qu'elle faisait!) pour « être utile », comme elle me l'a mais c'est tout!
précisé dans une lettre. Les gendarmes Et ce qui est étonnant, c'est que, lors de son
(« aimables ») lui ont dit que cela m'aiderait, alors elle audition, cet "inconnu" aurait raconté des choses
l'a cru et a signé les déclarations que les pandores comme s'il me connaissait très bien! Il est écrit qu'il a
avaient rédigées… déclaré avoir vécu chez mes parents jusqu'à assez
Et compte tenu que ma mère est un peu “simple tard. Ce qui est rigoureusement faux! Il habitait une
d'esprit~ (c'est suite à ma naissance, problèmes dû à maison, dans la même commune, mais à 1 kilomètre
l'accouchement), j'estime qu'ils auraient pu s'abstenir de celle qu'occupaient mes parents et je ne l'ai
d'aller recueillir sa déposition, ou alors mettre une jamais côtoyé!
réserve à ses déclarations en précisant un peu les Mais lui c'est peut-être spécial, car il était
choses sur son état. Mais ces "gens-là~ n'ont aucune mécanicien "à son compte" (non-déclaré), et il
pudeur, et ils ont, au contraire, sauté sur l'occasion! traficotait (paraît-il…) dans les pièces détachées
Mon père travaillait dans une usine, une laiterie volées. En conséquence, cela a pu être du donnant-
située à Pont-Hébert, dans le département de la donnant avec les gendarmes: « Tu signes le procès-
Manche. Il avait un emploi d'ouvrier de chaufferie. verbal que l'on a écrit nous-mêmes, et l'on ne parle
Quant à ma mère, elle était ce que l'on appelle “mère pas des pièces de voitures volées qu'on a trouvées
au foyer“. chez toi… ».
Donc milieu parental très modeste, et même plus Pour Marie-Thérèse, l'une de mes deux sœurs et
que très modeste. qui est aussi le second enfant de la fratrie, elle est
plus âgée que moi (plus de 15 ans), et elle s'est
4. LES FRÈRES ET SŒURS mariée en 1972. À cette époque, j'avais… 5 ans!
L'audition des parents a été de "l'autodictée", Après son mariage, je n'ai pas dû la revoir plus
mais pour les frères est sœurs, ce fut la même chose, d'une dizaine de fois juste comme ça en "coup de
du moins pour certains. vent". Et depuis l'âge de mes 12/13 ans (soit depuis
Mais avant tout, je précise que je suis le dernier 1980 en gros), je me demande si je l'ai revue plus
de 7 enfants nés, et dont l'un est mort en bas âge il y d'une fois, c'est dire si, en 1988, elle était habilitée à
a très longtemps, bien avant ma naissance. Un des parler de moi dans un procès-verbal! Et pourtant, elle
autres, mon frère Émile, est décédé en 1992 de je ne l'a fait! Du moins on a fait dire à cette sœur des
sais trop quelle maladie, il avait la quarantaine. choses sur l'adolescence extrémiste, néonazie, etc,
Comme spécifié plus haut, il y a une grande de son petit frère pas sage…
différence d'âge entre mes frères et sœurs et moi. Il m'est très aisé de démontrer qu'ils en ont trop
Lorsque je suis né, en 1967, certains étaient encore fait dans ce procès-verbal de Marie-Thérèse, car il y a
là mais peu de temps après, ils ont quitté mes une impossibilité temporelle dans cette déposition!
parents. À tel point que, hormis ma sœur Odile, qui Ceux qui ont auto-dicté sont de piètres calculateurs:
est l'enfant née juste avant moi (elle a vu le jour en ils n'ont pas pris en compte la différence d'âge entre
1960), j'étais incapable de préciser l'année de ma sœur aînée et moi! Puisqu'elle est partie tôt de la
naissance de mes frères et sœurs: je ne les ai pas "maison familiale" (il est déclaré qu'elle a été placée
connus du tout pour certains. Pour avoir ces « en pension »), qu'elle s'est mariée en 1972, et que
éléments, il m'a fallu consulter les procès-verbaux je suis né en 1967: comment aurait-elle pu prétendre
d'audition de "ma famille"! m'avoir côtoyé durant mon adolescence, et cela dans
La raison de cette ignorance est que mon père une relation frère/sœur élevés ensemble? Ceux qui
mettait ses enfants (les garçons) dehors à 16 ans, ont auto-dicté cette déposition, ont pris comme base,
âge minimum pour travailler, donc du vent… Les filles pour leurs falsifications, la normalité: savoir que dans
avaient le droit de rester un peu, mais juste un peu. une famille ordinaire, la sœur aînée grandit avec le
(Aucun des enfants dans la famille n'a pu faire petit frère! Manque de chance pour eux, ce ne fut
d'études. De toute façon, je vois mal comment nos pas le cas dans la famille Lajoye!
parents auraient pu les payer…) Ce qui veut dire que Parmi mes deux autres frères, il y a Alain
le premier enfant de la famille (mon frère Émile, (troisième enfant après Émile et Marie-Thérèse) et
décédé en 1992 alors qu'il avait la quarantaine) est son procès-verbal semble correct. Il a déclaré qu'il ne
parti lorsqu'il a eu 16 ans! Idem pour mes deux pouvait rien dire sur moi car il ne m'avait pas connu.
autres frères, Alain et Gustave. Et comme il y a de 15 Ce qui est exact! Il semble que cela soit le seul qui ait
à prés de 20 ans entre mes frères et moi, dit la vérité (ou plus exactement le seul a qui l'on a
automatiquement, comme ils sont partis à leurs 16 laissé dire la vérité; ou le seul dont on n'ait pas
ans, je ne les ai pas réellement connus: j'étais bien falsifié, après coup, l'audition).
trop petit (voire même pas encore né lors du départ Quant à mon frère Gustave (né quelques années
de certains!) pour m'en souvenir. après Alain), apparemment la gendarmerie ne l'a pas
Je n'ai, de fait, pas connu ces frères et sœurs, trouvé puisqu'il ne figurait pas au dossier. C'est
hormis Émile (décédé en 1992), qui était l'aîné de la dommage, cela aurait été marrant. Car bien que je ne
famille et qui habitait la même commune que mes l'aie pas connu, j'en ai juste un vague souvenir (la
parents. Mais je l'ai "connu" de vue, car il était fâché dernière fois que je l'ai vu, je devais avoir 7 ou 8
ans), il paraît que c'est un gauchiste qui a séjourné
Mémoire de Michel Lajoye page 74
dans des mouvements et des maquis de guérilla en d'une probité au-dessus de tout soupçon, incapables
Amérique du Sud et qu'il y serait encore, s'il ne s'y de se livrer à de telles forfaitures…
est pas fait tuer. C'est ce qui se disait la dernière fois Mais je ne comprends pas pourquoi ils ont
que l'on a eu de ses nouvelles. bidonné les procès-verbaux d'audition de mes frères
Odile, ma seconde sœur, est l'enfant née juste et sœurs pour leur faire dire que j'avais des "activités
avant moi et que j'ai connu puisque seulement 7 ans d'extrême-droite" connues et affichées. À croire que
nous séparent. Mais, elle est partie travailler, en ce n'était pas évident, à première vue… J'estime
Seine-et-Marne, comme vendeuse lorsqu'elle avait 17 qu'ils se sont donné beaucoup de mal, et pris de
ans, donc en 1977. À cette époque, j'avais 9/10 ans. gros risques (car je peux prouver la falsification!),
Par la suite, je ne l'ai pas revue plus de quelques pour faire "confirmer" par la famille ce qui était
fois, mais juste comme ca en "coup de vent" aussi. flagrant.
Comme pour mon autre sœur, je ne pense pas l'avoir En revanche, plus grave est la manipulation des
revu depuis mes 12/13 ans, si ce n'est pour son procès-verbaux de mes parents car elle, elle visait bel
mariage qui était en 1980 (c'est là que j'ai revu mes et bien à impliquer Jean-Marie Le Pen, et à établir
deux sœurs pour la dernière fois). Par conséquent, une connexion avec la Corse!
avant que je ne milite à quoi que ce soit! En conclusion, cette "Enquête de personnalité"
Alors, ce qui est incroyable, et qui m'a paru faite auprès de ma famille et qui figure au dossier
initialement d'un culot monstre de sa part, c'est que officiel est, c'est aisé de le démontrer, falsifiée! Ma
ma sœur Odile déclarait, dans son procès-verbal personnalité devait correspondre à un certain profil
d'audition (si j'en crois ce qui est mentionné!), que préétabli (par qui?), alors ils ont fait en sorte que cela
mes "activités extrémistes de droite" étaient connues, colle parfaitement à l'image qu'ils voulaient donner de
et qu'ils en parlaient (s'inquiétaient même!) en famille! moi, et qu'ils avaient besoin de faire "apparaître"
Lorsque l'on connaît la famille, ceux qui ont dicté cela pour le cas où… Je sais que dans les affaires
ont été particulièrement gonflés! Puisque ma dernière judiciaires ordinaires, la famille, c'est ce qu'il y a de
sœur est partie définitivement de la "maison familiale" plus proche et qui peut témoigner. Mais pas dans
en 1977 alors que j'avais 9/10 ans, l'image qu'elle a mon cas!
gardé de moi, c'est celle d'un gosse de cet âge! Dès
lors, comment aurait-elle pu déclarer, lors de son 5. PROCÈS-VERBAUX SUR LA PÉRIODE
audition, qu'effectivement, ayant été élevée en ma SCOLAIRE
compagnie, elle avait constaté que je faisais dans Il y a d'autres procès-verbaux dans cette
"l'extrémisme de droite" et que, précisément, ils en "Enquête de personnalité“, ils viennent de personnes
parlaient lors de "réunions de famille" pour s'en censées être plus éloignées de moi, mais qui en
"inquiéter"? réalité m'ont bien mieux connu que mes frères et
Je précise bien que, si je n'avais pas lu leurs sœurs.
procès-verbaux mentionnant leur "situation", j'aurais Par exemple, il y a un procès-verbal d'audition
été incapable de parler, avec précision, de mes frères d'Henri Turgis, mon instituteur de CM2. Il m'a bien
et sœurs (profession, etc…). Donc, si je n'étais pas connu, ainsi que sa femme, puisque cette dernière
capable d'en parler, eux ne pouvaient pas être en était l'institutrice de CM1. En outre, Henri Turgis,
mesure de parler de moi! Ils ne m'ont pas plus côtoyé c'était le directeur de l'école du village. Et ce couple
que je ne les ai connus! Pourtant, si on lit les procès- habitait juste à côté de chez mes parents. Alors, en
verbaux de mon frère Émile et de mes deux sœurs plus de m'avoir eu dans son école (depuis mes 4/5
(Marie-Thérèse et Odile), on a la sensation de lire des ans jusqu'à mes 11/12 ans), de m'avoir vu dans la
déclarations de gens qui ont été élevés à mes côtés, classe de sa femme, et de m'avoir eu dans sa classe
durant mon adolescence. Ce qui est totalement à lui, le reste du temps, hors de l'école, il me côtoyait
faux ! puisque que nous étions voisins directs.
Dès lors, dès que j'ai pris connaissance de ces Et, étrangement, si on prend ce procès-verbal
procès-verbaux, j'ai eu la certitude, la preuve, que: d'audition d'Henri Turgis, le portrait qu'il donne de moi
soit on avait tout "auto-dicté" et fait signer ensuite; ne colle pas du tout, mais alors pas du tout, avec ce
soit on avait carrément auto-écrit et auto-signé ces qu'on a fait décrire aux autres: la famille!
documents! Voire falsifié des déclarations initiales La raison est simple: Henri Turgis est quelqu'un
sachant que, de toute façon, si elles étaient utilisées d'évolué intellectuellement, un instituteur "vieille
au procès, les frères et sœurs ne seraient pas là pour école“, pas le genre à se faire dicter sa déposition
dire que ce n'est pas ce qu'ils ont déclaré lors de par qui que ce soit. Et avec lui, il ne fallait pas que
leurs dépositions. les gendarmes, même en étant très “aimables“,
Il faut savoir que dans des interrogatoires de ce espèrent pouvoir rajouter des “petites choses“ ça et
genre, aucune copie des procès-verbaux n'est là et lui faire signer le tout à la fin. De même, s'il avait
laissée aux auditionnés. Il est, par conséquent, aisé appris, par hasard, qu'ensuite on a modifié ses
de falsifier leurs déclarations! Et même si une déclarations, il n'aurait pas été sans réagir vivement.
personne affirmait ne jamais avoir déclaré ce qu'on lui Dans cette “Enquête de personnalité“, dès qu'il a
a ensuite "fait dire", après falsification, cela serait sa été auditionné des gens d'un certain niveau
parole contre celle des gendarmes et/ou des intellectuel (instituteurs, ou lors de l'enquête réalisée
policiers. Or, comme chacun doit le savoir: la au collège auprès de professeurs), cela a changé du
maréchaussée et la police sont composées de gens
Mémoire de Michel Lajoye page 75
tout au tout. C'est l'avis qui ressort nettement en évidemment pas gardé dans ses rangs...), mais bien
lisant les documents. comme "suivi d’un agent".
Il faut bien mesurer l’importance constituée par
6. PROCÈS-VERBAUX MILITAIRES ces propos de Duranton! C’est un militaire, pas
Dans cette "Enquête de personnalité", il y a aussi n’importe lequel: le Chancelier du régiment, celui qui
l'audition de l’adjudant-chef Duranton qui occupait les a accès aux dossiers sensibles sur les personnels
fonctions de Chancelier du 5 ème Régiment composant l’unité, qui affirme à la gendarmerie que
d’Hélicoptères de Combat basé à Pau. C’est l’unité à j’étais bel et bien lié à la DPSD!
laquelle j’étais officiellement affecté "en couverture" Autres déclarations très intéressantes de cet
de mes activités pour l’APSD de Tarbes. Cet adjudant-chef: il affirme dans son procès-verbal que
adjudant-chef Duranton a probablement été maudit tous ceux qui m’ont côtoyé au sein des Services
par la DPSD qui a dû s’occuper, ensuite, de l’envoyer Techniques du 5 ème RHC ont été mutés ou sont partis
prendre une retraite anticipée "bien méritée"! Que à la retraite.
l’on en juge par ses déclarations suicidaires: Tiens, tiens, pourquoi l’éclatement du personnel
Pour débuter, il m’a tressé des lauriers sur mon des ST du 5 ème RHC? Pourtant aucun n’était proche
commandement et mon service. Alors qu’il aurait dû de la retraite (hormis le commandant Drulhe dont le
savoir que j’étais, forcément, un militaire nul, départ était prévu pour janvier 1987) et/ou mutable
indiscipliné, et patati et patata… prochainement. Au contraire, puisque certains
Mais il a fait bien pire encore: il a précisé que avaient été affectés en juin/juillet 1986 ils n’étaient
l’armée avait parfaitement connaissance de mes pas mutables avant au moins 5 à 7 ans de présence
"opinions extrémistes"! Ce qui signifie que les au régiment. Quant aux autres, en octobre 1986,
autorités militaires savaient (depuis le début!) à qui lorsque j’ai déserté la DPSD, et par la même les ST
elles avaient à faire et m’employaient, de ce fait, en du 5 ème RHC, il leur restait dans les deux à trois ans
conséquence! avant d’entrer dans la période qui fait que l’on est
Et, enfonçant le clou en ruinant par la même muté automatiquement.
définitivement sa carrière, Duranton s’est mis à Il n’est pas stupide de penser que, si on a éclaté
déclarer que j’étais lié à la DPSD. Certes, il ne fait les Services Techniques en mutant et/ou en mettant
que parler d’un lien, il ne va pas jusqu’à dire "agent à la retraite tous ceux qui m’ont connu (comme le
de la DPSD"! Mais bon, lorsque l’on est en relation précise Duranton dans son procès-verbal), c’est
avec cette maison, ce n’est pas pour rien… qu'on avait peur que certains de mes anciens
En effet, il est hors de question de voir ce "suivi" collègues ne se mettent à parler!
de la DPSD comme un 2suivi d’un militaire extrémiste En effet, ces militaires des Services Techniques
de droite". J’étais officiellement secrétaire-comptable du 5 ème RHC auraient pu raconter qu’effectivement,
aux Services Techniques du 5 ème RHC, un "poste- en juillet 1985, je les ai rejoints, mais qu’à compter de
clé", dans cette unité prétendument d’élite. Jamais mars 1986 j’étais plus souvent parti "en mission" pour
un militaire fiché comme "activiste néonazi" et le compte de la DPSD qu’à travailler aux ST du
uniquement cela, n’aurait occupé cet emploi. Si je l’ai régiment…
occupé c’est parce que l’on avait d’autres projets à Dans cette base d’hélicoptères de Pau où j’ai
mon sujet. La Banque Rothschild ne mettrait pas un servi, il est certain qu’après mon arrestation, qui a été
goy, braqueur (notoire) de banque, convoyeur de ses médiatisée, des langues ont dû se délier. Au Mess,
fonds! De même, l’Armée française ne met pas un entre deux verres, il a forcément été évoqué
militaire fiché comme "néonazi notoire" au secrétariat "l’affaire"! D’où l’éclatement des ST, ce service
des Services Techniques d’un régiment: là où il y a composé de fonctionnaires qui n’y étaient pour rien,
les clés des soutes à munitions, la gestion des armes mais qui en savaient beaucoup trop sur mes contacts
etc… avec l’APSD de Tarbes.
Compte tenu de ces opinions, connues de Mais ce n’est pas tout, l’adjudant-chef Duranton,
l’armée, j’aurais dû être "déplacé", affecté à un autre décidément très en verve, précisait également dans
service moins sensible. Ou plus simplement et plus son procès-verbal d’audition que celui qui pourrait
logiquement: renvoyé de l’armée pour "activisme mieux, et surtout plus, parler de moi c’est l’ancien
néonazi". Je rappelle que c’est un motif d’exclusion chef des ST: le commandant Pierre Drulhe qui est à
des rangs de la milice supplétive de l'US Army! la retraite. Et Duranton donnait ses coordonnées
Je crois qu’à l’époque (1985/1986) il devait y avoir pour que les gendarmes puissent aller lui rendre
une place pour 40 demandes d’engagement militaire. visite, comme il le leur suggérait ouvertement…
Ce qui veut dire que si l’armée tenait tellement à me Et là, très étrangement, c’est la fin de "l’Enquête
garder, alors que je n’étais pas irremplaçable comme de personnalité", il n’y a pas d’autre procès-verbal
secrétaire-comptable, et que j’étais "à risques" après celui de Duranton!
compte tenu de mes opinions (parfaitement connues
7. L'ENQUÊTE FUT MANIFESTEMENT STOPPÉE
de l’armée comme l’a stipulé Duranton...), c’est qu’ils
avaient bien des projets précis à mon sujet. Cela ne colle évidemment pas, car celui qui lit le
Alors, lorsque le Chancelier du régiment parle d’un dossier officiel de mon affaire se met à saliver! Dans
"suivi" par la DPSD, il ne peut être pris dans le sens le dernier procès-verbal, le Chancelier du régiment
"suivi d’un militaire extrémiste" (que l’armée n’aurait vient d’évoquer de mystérieux contacts avec la DPSD

Mémoire de Michel Lajoye page 76


(qui sont quand même les services spéciaux de permis de conduire et mes divers documents
l’armée!), "d’opinions extrémistes" parfaitement d'identité. Mais, dans la réalité, lorsque j'étais
connues des "Autorités militaires", de collègues tous militaire, je ne logeais pas dans la base du RHC.
mutés et/ou mis à la retraite, etc… Le lecteur aimerait J'habitais dans un appartement (civil, bien entendu!)
en savoir plus, il a envie d’en savoir plus! Mais rien, que j'avais loué dans le centre ville de Pau.
pas d’autre procès-verbal: l’enquête est finie! Cela ne fait quand même pas très crédible de
Soit le juge d’instruction n’était vraiment pas penser que le juge d'instruction, dans “l'Enquête de
curieux ; soit le magistrat instructeur savait personnalité“ (et dans le dossier des faits en eux-
pertinemment ce qui allait être découvert en faisant mêmes), n'ait pas commencé par demander au
auditionner le commandant Drulhe! Il se pourrait bien régiment (où j'avais été en poste) si je logeais dans la
qu'on ait fait stopper l’enquête… base. Cela semble “un peu“ aberrant que ce robin de
Durant un temps, j'ai pensé que ces investigations service n'ait jamais cherché (du moins
s'étaient poursuivies et qu'on avait, heu disons, dit officiellement…) à savoir où je pouvais bien habiter!
"d’oublier" d’inclure ces autres procès-verbaux dans Après tout, l'appartement que j'occupais aurait pu
le dossier officiel jugé à Caen… En réalité, il semble être un vaste dépôt d'armes, et cela n'intéressait pas
bien que l'enquête n'ait pas été plus loin! le magistrat instructeur?! Il faut le croire, puisqu'il
semblerait qu'il n'ait jamais voulu découvrir où je
8. PAS D'AUDITION D'AMI(E) OU DE VOISIN demeurais! Je n'ai rien vu là-dessus dans le “dossier
Je précise, car cela pourrait sembler étrange, qu'il officiel“! Absence de curiosité révélatrice… En fait la
n'a pas été entendu d'ami(e) pour cette “Enquête de raison est simple: il ne fallait pas parler de ce
personnalité“. Le juge d'instruction m'a demandé si logement dans le dossier, car c'est la DPSD qui m'a
j'avais des noms d'amis et d'amies à donner (moi- pistonné pour l'obtenir! L'agence immobilière aurait
même!) pour qu'il soit réalisé cette “Enquête de pu le révéler.
personnalité" (et sans doute aussi pour les interpeller Lorsque je me suis fait arrêter une première fois
et les incarcérer pour “association de malfaiteurs“…). en janvier 1987 (cf. chapitre 4), quand la
Je lui ai dit que non (j'ai répondu au juge: « Amis, gendarmerie m'a demandé où je résidais, je leur ai
amies, qu'est-ce donc que cela? »). Et comme le répondu spontanément en rigolant: « Dans ma
magistrat ne pouvait pas savoir qui je fréquentais, ce voiture! ». Tous, ensuite, se sont contentés de cette
fut réglé. “réponse“…
Ensuite pour les voisins, là c'est différent… Mon Voilà pour “l'Enquête [officielle] de personnalité“.
“adresse administrative“ était au 5ème RHC de Pau Elle a été bidonnée au niveau “famille“, et elle a été
où j'étais en poste (officiellement!) avant ma stoppée par le magistrat instructeur dès que la DPSD
défection des rangs de la DPSD. La carte grise de est apparue dans un procès-verbal, en l'occurrence
ma voiture portait cette domiciliation, idem pour mon celui de l'adjudant-chef Duranton.

Chapitre 11

LE PROCÈS AUX ASSISSES (juin 1990)

longue date", ce n’était pas mon cas et pas celui de


1. DATES. LIEU, AMBIANCE mon avocat non plus!
Car, pour mon défenseur de l’époque, Maître

L
e procès s’est tenu au Palais de Justice de
Caen les lundi 25, mardi 26, et mercredi 27 juin Burdeyron, c’est le 18 mai 1990 qu’il m’a écrit pour
1990. Les audiences duraient la journée m’informer qu’il venait juste de recevoir un courrier du
entière: de 9 heures jusqu’à en moyenne 21 heures Greffe de la Cour de Caen lui annonçant les dates
(avec pause le midi évidemment), soit plus de 30 du procès. Ce qui veut dire que l’on a dû écrire à
heures d’audience sur les 3 jours. l’avocat vers le 15 mai 1990, soit un mois avant la
Ce procès était inscrit en seconde semaine (et en première l’audience.
clôture) de la session d’Assises, car cette dernière Pour ma part, c’est le 8 juin que j’ai eu le tout
avait débuté en fait le 18 juin. premier document officiel m’avisant que j’allais passer
Quant à ma citation à comparaître, elle m’a été aux Assises à compter du 25 juin. En effet, le 7 juin,
remise par huissier le… 11 juin! Soit juste une j’avais été transféré de la prison de Rennes à celle
semaine avant l’ouverture de la session d’Assises et de Caen (je suis retourné à Rennes quelques jours
exactement deux semaines avant la première après le procès) et le lendemain de mon transfert,
audience! Ce qui sentait un peu le procès ajouté en soit le 8 juin, j’ai eu la visite du président de la Cour
catastrophe au rôle pour que les convocations aient d’Assises qui est venu me voir comme c’est d’usage
été délivrées si près de la date d’ouverture des avant un jugement aux Assises.
débats. La raison de cet ajout du procès à cette session
Il a été dit que ce procès était fixé de longue de juin 1990 est, évidemment, liée à la profanation
date. Peut-être, mais pour ma part je n’étais pas au du cimetière juif de Carpentras… Cette manipulation
courant. Alors si des gens étaient informés "de a eu son point d’effervescence médiatique vers le 10
mai 1990, certains se sont alors dit que cela serait
Mémoire de Michel Lajoye page 77
une bonne idée que d’organiser le procès sont tués. De nombreux autres furent blessés,
Arcini/Lajoye à la session d’Assises de juin, car ils ne certains pilotent aujourd'hui des fauteuils roulants!
retrouveraient pas de si tôt un climat pareil. Ce qui Durant plusieurs jours, ces drames de l'inconscience
explique pourquoi c’est vers le 15 mai (soit 5 jours ont donné lieu à un gros battage médiatique, car il
après le point culminant de la carpentrasserie), que s’est avéré que le procureur n’avait pas pris les
l’on ait écrit à Maître Burdeyron pour lui préciser que mesures élémentaires de sécurité, comme faire
le procès, cela serait dans un mois! mettre en place des points de contrôle de police pour
L’ambiance suscitée par la manipulation de empêcher les "rodéos" et faire signer au préfet un
Carpentras faisait que durant les audiences il y avait décret interdisant la vente d’alcool. Après une telle
des manifestations tout autour du Palais de Justice incurie (9 morts), on aurait pu penser que Bot allait
de Caen. Il y avait même des appels à l’attroupement voir sa carrière "un peu" freinée… Or pas du tout!
publiés, sous forme de "communiqués associatifs", En 1993, lors de la cohabitation
dans le quotidien Ouest-France. La Préfecture avait, Mitterrand/Balladur, le Ministre de la Justice
de son côté, autorisé des manifestations dans la ville (Méhaignerie à l’époque) avait décidé de nommer
de Caen! Yves Bot au poste très sensible (et très convoité!) de
Mais, étonnamment, le procès n’a pas été Directeur des Affaires Criminelles et des Grâces. C’est
médiatisé à outrance au niveau national, il n’y a ce que l’on appelle de la promotion fulgurante!
qu’au niveau régional où ce fut le délire. Rivarol du 6 C’est le moins que l’on puisse dire! Car Bot n’était
juillet 1990, page 4, s’en étonnait même en titrant encore, en juin 1990, qu’un obscur et énième
« Le mystère du procès de Caen ». Dans cet article, substitut du Procureur de Caen, pas vraiment le
Camille-Marie Galic s’étonnait qu’en pleine hystérie poste important, et moins de 3 ans plus tard, après
antiraciste les débats d’un tel procès aient été un passage désastreux par Le Mans, il était pressenti
occultés alors qu’il s’agissait de vraies affaires pour occuper un poste hautement stratégique ! La
racistes. direction des Affaires Criminelles et de Grâces c’est
de là que partent les ordres de classement de
2. LE PRÉSIDENT DE LA COUR "certaines affaires", et c’est là que sont instruits les
Le président de la Cour d’Assises était un certain dossiers de recours en grâce… Par conséquent c’est
Bernard Salmon. Il a fait parler de lui tout un poste plus que sensible!
récemment… Cependant, en 1993, c’est François Falletti qui a
En effet, tout le monde a encore en mémoire la été désigné à la place de Bot directeur des Affaires
libération de Patrick Henry, qui vient d'intervenir, alors Criminelles et des Grâces. La raison en est que
qu'il était incarcéré au centre de détention de Caen. Mitterrand, en tant que Président de la République,
L'élargissement de l'assassin du petit Philippe était aussi le Président du Conseil Supérieur de la
Bertrand a été rendu possible grâce à une décision Magistrature, et il s’est catégoriquement opposé à la
prise par la Commission régionale pour les libérations promotion de Bot pour un motif bien précis…
conditionnelles. Cette dernière, siégeant en Basse- En effet, c’est le juge Jean-Pierre qui, en 1992, a
Normandie, était présidée par un magistrat "lancé" l’instruction de l’affaire dite du « prêt
"normand", en l'occurrence un conseiller auprès de la Pelat/Bérégovoy ». Et le juge Jean-Pierre était au
Cour d'Appel de Caen qui n'était autre que Bernard Mans, sous la coupe de Bot! Ce dernier, en bon
Salmon. procureur serviteur de l’État, aurait dû empêcher le
Ainsi, celui qui a obtenu ma condamnation en juge de mettre son nez dans ce dossier! C’est que
1990 est celui qui, onze ans plus tard, a ordonné la l’instruction de cette affaire de "prêt" a plus que nuit
libération de Patrick Henry… à Pierre Bérégovoy qui était alors le Premier Ministre
Accessoirement, le fait que Salmon soit toujours de Mitterrand! Bot n’a pas pu empêcher le juge Jean-
magistrat auprès de la Cour d'Appel de Caen Pierre de fouiner, mais, heureusement, cela faisait
démontre que ce sioniste rabique préfère nos plus de 2 ans que Pelat était déjà mort (fort
territoires occupés à ceux, tout aussi occupés, de la opportunément dans un hôpital militaire!) et, le 1 er mai
Palestine, où il aurait pu faire son Alyah… 1993, il fut rejoint outre-tombe par Bérégovoy qui, lui,
s’est suicidé de deux balles… Du coup: affaire
3. L'AVOCAT GÉNÉRAL classée pour le « prêt Pelat/Bérégovoy ».! Ouf!
(promu après le procès) Cette opposition de Mitterrand à la nomination de
Bot au poste de directeur des Affaires criminelles et
Quant à l’avocat général, c’était Yves Bot. Alors
des grâces est totalement liée au fait que ce
lui c’est particulier, il a bénéficié d’une cascade de
procureur n’a pu empêcher le juge Jean-Pierre de
promotions peu de temps après.
s’intéresser au financement de la galaxie
C’est indéniable puisqu’en 1990, date du procès,
mitterrandienne. Le Franciscain était connu pour être
il était simple substitut du Procureur de Caen, autant
un brin rancunier…
dire pas grand-chose. Peu de temps après le
Cependant, Bot a eu un joli lot de consolation!
jugement, il a été promu Procureur Général au Mans.
Car après le veto élyséen, il n’est pas reparti
Dans cette ville, il s’est plutôt illustré par son
s’occuper de rillettes au Mans! En compensation il a
incompétence. En 1992, lors des 24 Heures du Mans
été désigné "conseiller spécial" auprès de Pierre
Moto, il y a eu beaucoup d’accidents et 9 (neuf!)
Méhaignerie, Ministre de la Justice!
motards (parmi ceux venus assister à la course) se

Mémoire de Michel Lajoye page 78


Il est évident que cela cache quelque chose! On bien dire qu’avec Balladur comme Premier Ministre du
avait promis une récompense à Bot, et faute de gouvernement (et un Pasqua à l’Intérieur…), c’était
pouvoir lui donner celle qu'on lui avait promise (la tout bon pour Bot! Mais un fois Balladur parti, et
direction des Affaires criminelles et les Grâces), on lui certains autres en "disgrâce", il est reparti (a été
a offert un lot de consolation en créant pour lui ce renvoyé !) dans le circuit normal de la magistrature
poste de "conseiller spécial" auprès du Garde des couchée…
Sceaux. C’est même Bot qui, de ce fait, a été le Il y a quelque chose là-dessous, c’est l’évidence
rapporteur du projet de réforme du Code Pénal même. Qu’il y ait eu pour Bot "coup de piston" durant
envisagé par Méhaignerie. la période Balladur comme Premier Ministre, c’est
Ce dernier était donc Ministre de la Justice, et cela irrécusable !
dans un gouvernement dont Edouard Balladur était Je porte également à la connaissance du lecteur
le Premier Ministre. Ce même Balladur qu’Arcini un fait qu'il est libre d'interpréter comme une simple
protégeait le 5 juin 1987 (cf. chapitre 5, section 6) coïncidence ou, au contraire, permettant de mesurer
lorsqu’il a abattu (par erreur) Moussaoui… Étrange l'organisation de ces "gens-là" qui n'ont rien laissé au
quand même cette coïncidence! hasard:
Et, en 1993, le gouvernement de cohabitation Chapitre 5, sections 7 & 8 de ce document, il est
avait, quasiment, les mêmes ministres que ceux qui question de Serge Costa qui aurait fourni à Arcini
étaient en place lors de la cohabitation précédente l'arme utilisée lors du crime de Caen commis le 5 juin
(1986 à 1988). Autrement dit durant la période où 1987. Costa lui-même assassiné. Or, qui officiait au
ont été commis les attentats relatés dans ce Parquet de Bastia au moment de l'exécution de
document! Par exemple, en 1993, c’était notamment Costa le 18 février 1987? Vous l'avez deviné: Bot!
le même Pasqua à l’Intérieur que celui qui y était en Ce renseignement hallucinant m'a été transmis
1987! Époque où Arcini fut relâché par la police par un "anonyme", après lecture d'une précédente
après son arrestation initiale (cf. le chapitre 5, section édition de ce mémoire. Cette information figurait dans
13 et suivantes)… une édition du Who's Who où l'actuel procureur de
Alors je suppute la chose suivante: Yves Bot Nanterre mentionnait dans sa fiche qu'avant son
savait pertinemment, pour s’en être personnellement affectation à Caen, il était en poste à Bastia. Dès
occupé, ce qu’il y avait derrière « l'affaire lors, c'est sans aucun doute Bot lui-même qui a
Arcini/Lajoye ». Et, pour avoir sa promotion supervisé, pour le compte du Ministère Public,
fulgurante, il a très bien pu faire "chanter" Balladur! Il l'enquête sur la mort de Costa! Ainsi, Bot a "suivi"
y avait de quoi: Arcini, son garde-du-corps de 1987, Arcini. À moins que cela ne soit celui-ci qui ait "suivi"
impliqué dans des "affaires racistes" plus que celui-là?
gênantes! Cela aurait suffi à couler politiquement Quoiqu'il en soit, je mentionne bien que lors de ce
Edouard Balladur pour sa course à la présidentielle procès, la liquidation de Costa ne fut pas détaillée,
de 1995… alors qu'il y avait avocat général, Yves Bot, fort au
Mais Balladur n’aurait pas été le seul à être gêné courant de cette Affaire Costa…
par d’éventuelles "révélations", puisque, comme dit Pour en finir avec cette présentation de Bot, je
plus haut, les ministres de la cohabitation de 1993 à signale qu'en tant que procureur de Nanterre, il s'est
1995 étaient pratiquement les mêmes que lors de la opposé à des poursuites contre Jacques Chirac. Ceci
précédente de 1986 à 1988. Notamment Pasqua! dans le cadre d'un des multiples dossiers concernant
Même si mon hypothèse de chantage peut l'ancien maire de Paris.
sembler très ardue, elle s’appuie sur la logique!: en
1990 (en juin) Yves Bot n’était que simple énième 4. COMPORTEMENT "ANORMAL" DES JURÉS
substitut auprès du Procureur de Caen, et moins de Les jurés ont eu un comportement très étrange,
trois ans plus tard, il devenait l’un des magistrats les de vrais "pots de fleurs!" Ils ne semblaient être là que
plus "en vue" de France! Il est impossible de gravir pour assurer le décor!
les échelons si vite! Il faut avoir eu plusieurs postes Je n’ai pas l’habitude des Cours d’Assises, mais
de Procureur Général pour avoir une promotion de ce une chose m’a semblé anormale, c’est que durant
type. Il serait totalement farfelu de penser que le tout le procès pas un n’a posé une question! À
passage désastreux de Bot au Mans (avec en 1992, chaque fois que le président Salmon demandait à la
durant les 24 Heures, ces 9 morts qui ont été victimes cantonade, en s’adressant aux jurés, s’ils avaient des
de son incompétence!), aurait pu lui valoir sa questions, invariablement, ils secouaient tous la tête
prestigieuse ascension. La magistrature est régie par pour dire « Non, non, pas de question ».
un tableau d’avancement, et l'on ne peut pas être en Voilà un comportement plutôt curieux compte tenu
bas de tableau (voire même: pas inscrit du tout au que parfois c’était très confus et que tout le monde
tableau d’avancement), et passer en tête de la devait avoir envie de poser des questions pour
confrérie, sans un sacré coup de piston… éclaircir un point. Tout le monde: sauf les jurés!
De plus, lorsque Balladur ne fut plus Premier Mais "encore mieux": devant chaque juré il y avait
Ministre (en 1995, après l’élection à la Présidence de un petit tas de feuilles blanches avec posé au travers
la République de Jacques Chirac), Bot a été un stylo bic. C’était à leur disposition pour qu’ils
"rétrogradé" en étant désigné Procureur Général au puissent prendre des notes. Ce qui semble
Parquet de Nanterre (il occupe encore ce poste indispensable dans un procès durant trois jours
minable au moment où j'écris: avril 2001). Ce qui veut
Mémoire de Michel Lajoye page 79
complets. Eh bien, pas un n’a pris la moindre note n’avaient pas encore été emprisonnés à cette date),
durant les audiences! Rien de rien! J’ai bien fait pour leurs écrits ! Mon objectif était le suivant:
attention à ce détail: aucune note n’a été prise. démontrer par ces témoignages qu’en France la
En conclusion, nous pouvons nous interroger sur liberté d’opinion n’existe pas, et que de ce fait, la
le comportement de ces étranges jurés et notamment violence armée est légitime puisque tout autre moyen
nous demander s’ils n’avaient pas été d’expression nous est impossible.
soigneusement sélectionnés, avec pour consignes Tout le long du procès, j’ai d’ailleurs bien précisé
de la fermer! De ne surtout pas poser la moindre que puisque l’on ne pouvait pas diffuser d’opinion
question qui aurait pu être gênante. nationaliste sans être poursuivi par la juiverie, la
violence armée devenait alors un recours légitime! Je
5. LES TÉMOINS CITÉS revendiquais un droit à l’insurrection face à
Au niveau des témoins cités par le Parquet, il y l’Occupation sioniste de mon pays.25
avait des policiers. Mais aucun de ceux cités n’est Mais le président Salmon m’a vu arriver avec mes
venu parler en détail de la bombe. Seuls le témoins, et il a refusé qu’ils déposent sur le fond. Il a
commissaire Etcheberry et l’inspecteur Tejada (tous exigé qu’ils se cantonnent au rôle de "témoin de
les deux du SRPJ de Rouen) en ont vaguement moralité"! Je ne les avais pas fait citer pour ça, mais
parlé, mais ils n’étaient pas venus pour mon affaire, Salmon étant LE président, il avait décidé, en toute
mais pour celles d’Arcini. impartialité évidemment, que cela serait comme ça et
C’était surtout le cas pour les inspecteurs Morin et pas autrement.
Lefeuvre qui sont ceux qui ont été, soi-disant, Lorsque j’ai fait remarquer à Salmon que je
"braqués" par Arcini lors de son "évasion" à la n’avais pas fait citer des "témoins de moralité", mais
Samuel-Aubrac (cf. chapitre 8 section 7). des "témoins de fond", il m’a répondu « C’est moi qui
Les autres policiers cités étaient venus parler sur conduis les débats ici! ». Il n’a pas ajouté « Silence,
le fond de l’affaire, notamment le commissaire misérable goy! », mais il l’a sans doute pensé très
Meunier (police urbaine de Caen) qui est celui qui est fort!
arrivé sur les lieux peu après l’assassinat de Les témoins que j’ai fait citer ont donc été
Moussaoui et qui a avisé ses collègues de la PJ. "éjectés" par le président Salmon. Alain Guionnet se
Donc aucun policier n’est venu parler, dans les verra même menacer d’un an de prison ferme s’il ne
détails, de mon affaire. quittait pas la salle immédiatement! Il voulait
Quant aux autres témoins cités: Godfroy Jean, réellement témoigner sur le fond et s’accrochait un
c’est un de ceux qui a poursuivi Arcini après l’attentat peu trop à la barre des témoins au goût de Salmon
du 5 juin 1987. Idem pour Macedo Diamentino. qui lui avait déjà dit de disposer… Salmon lui a même
Leconte Joël, c’est le représentant qui se trouvait ordonné un retentissant « Silence, ça suffit! » lorsqu’il
dans l’épicerie de Caen le 5 juin 1987 et à qui Arcini a commencé à détailler ses condamnations pour ses
à dit: « Toi, le Blanc, casse-toi! » (à moins que ce ne écrits! L’impartial président fera finalement signe à
soit: « Toi, le blond, casse-toi! »). ses golem de la police de "raccompagner" dehors ce
Rahmani Abdeslem Ben Ali, c’est le propriétaire malotru!
de l’épicerie, autrement dit le responsable de Cette affaire aura eu, au moins, le mérite de
l’Amicale des Marocains de Caen, celui qui devait se montrer au public présent dans la salle ce que c’est
faire abattre. que l’impartialité, un procès équitable, etc… Les
Il n’y a pas eu d’autre témoin cité par le Parquet! média, évidemment, cela va de soi, ne relateront pas
Ce qui veut dire que, comme je l’ai relaté au chapitre cet incident, ou alors ils le relateront, mais pas
7 section 14, les 9 personnes qui étaient dans le bar conformément à la vérité…
où j’ai déposé la bombe n’ont pas été appelées à Pour information et pour comparaison, le matin
témoigner! C’est plus que manifeste que si ces 9 même, c’est-à-dire avant qu’il ne fasse chasser les
personnes n’ont pas été citées, c’est qu'on avait témoins de la défense, le président Salmon avait
quelque chose à cacher! Que ce qui s’est déroulé le invité à la barre un individu qui n’était pas cité sur la
30 novembre 1987 dans le bar Au Pavillon d'Alger liste des témoins. C’était une personne qui voulait
n’est pas conforme à la vérité officielle ! témoigner sur le fond et qui avait fait remettre, par un
J’ai, par conséquent, été condamné sans que les comparse, un "mot" à l’avocat de la LICRA ; qui lui l’a
témoins des faits (ou prétendus faits!) ne déposent à transmis à l’Avocat Général Bot ; qui l’a ensuite fait
la barre! parvenir jusqu’au président Salmon. Ce mot disait
qu’une "personne" attendait dehors (la pôvre!) et
6. LES TÉMOINS QUE J'AVAIS FAIT CITER qu’elle souhaitait témoigner sur le fond…
Ce témoin qui s’invitait carrément, c’était le
J’avais demandé (comme j’en avais le droit!) qu’il
responsable du… Consistoire israélite de Caen,
soit fait citer des témoins de fond, à savoir les
autrement dit le rabbin du coin! Alors pensez que le
personnes suivantes: Claude Cornilleau, Olivier
président Salmon a laissé venir témoigner, sur le
Devalez, Mark Fredriksen et Alain Guionnet.
fond, son rabbin! Cela devenait surréaliste ce procès,
Ce que je voulais, c’est les faire témoigner de
leurs expériences. Toutes ces personnes ont été
25
poursuivies, et pour certaines lourdement Ce qui explique, sans doute, l’occultation du contenu des débats par les
condamnées (Alain Guionnet et Olivier Devalez média d’audience nationale, dont Rivarol s’étonnait à la page 4 de son
numéro du 7 juillet 1990.
Mémoire de Michel Lajoye page 80
et l’on imagine les moqueries si, dans une affaire 8. LES EXPERTS CITÉS
criminelle quelconque, un religieux catholique voulait
Rien de particulier à dire sur la liste des experts
s’inviter pour témoigner sur le fond comme l’a fait ce
cités. Cela concerne surtout Arcini. Hormis des
rabbin…
psychologues et psychiatres qui étaient venus nous
Pour l’anecdote, à l’issue de son "témoignage", le
voir, puisque ce sont les mêmes qui avaient été
rabbin est allé s’installer dans la salle. Et, à plusieurs
désignés pour "examiner" les deux.
reprises, cela m’a beaucoup amusé, j’ai vu l’avocat
Claude Calisti, dont il a déjà été question au
de la LICRA, après ses interventions, jeter un regard
chapitre 7 section 17, est venu parler de la bombe.
en direction de ce lévite comme s’il en attendait un
C’est le seul expert qui soit venu spécialement pour
signe approbateur…
mon affaire. Tous les autres (médecin légiste,
7. LES PARTIES CIVILES QUI S'ÉTAIENT ophtalmologiste, armurier) n’étaient là que pour les
CONSTITUÉES affaires de mon coaccusé.

Pour les parties civiles, outre les charognards 9. COMPORTEMENT D'ARCINI DURANT LE
habituels des "ligues" qui étaient venues se faire de PROCÈS
l’argent, et de la publicité, sur le cadavre de
Le comportement d’Arcini a été plus que trouble
Moussaoui, il n’y a pas grand monde.
et cela sentait vraiment les textes récités. Les
Mohamed Bedani est une des victimes d’Arcini. Il
dialogues étaient surréalistes entre mon "complice" et
se trouvait dans le bar qu’il avait "mitraillé" le 6 mars
le président Salmon. Ce dernier disait des choses du
1987 à Petit-Quevilly. Cette partie civile ne me
genre: « C’est bien comme ça que cela s’est
concernait pas.
déroulé? » en énumérant lui-même les faits contenus
Mohamed Ayari, c’est le client blessé dans
dans des documents qu’il avait en main. Et Arcini de
l’épicerie de Caen le 5 juin 1987. Là aussi, cette
toujours, bien poliment, lui répondre par l’affirmative.
partie civile ne concernait qu’Arcini.
À aucun moment, il n’a répondu de façon négative, il
Marie-Noëlle Catherine, c’était la concubine de
était toujours d’accord avec la version qui lui était
Moussaoui, l’épicier abattu par Arcini le 5 juin 1987.
relatée. Cela se voyait vraiment que le président
Là encore, cela ne concernait pas mon affaire26.
aidait Arcini dans son rôle d'accusé qui s'auto-
Il n’y a pas eu d’autre partie civile constituée parmi
accusait.
les victimes. Notamment aucune de la part des
Mais le plus délirant, c’est que c’est Arcini qui a
personnes que se trouvaient dans le bar où j’ai
"décrit" la façon dont j’ai commis l’attentat. Or, il n’y a
déposé la bombe, et dans lequel, officiellement,
pas assisté, mais il connaissait bien son texte sur ce
selon la version officielle, il y aurait eu trois blessés!
point! Le président Salmon lui a par exemple
Et comme je le relatais dans le chapitre 7 section
demandé des choses du genre: « Lajoye a déposé
25, le propriétaire de l’établissement ne s’est pas
le paquet sur le bar et est parti par la sortie des
constitué partie civile!
toilettes? » et Arcini de répondre: « Oui, M’sieur le
Même l’assureur de ce bar ne s’est pas retourné
président! ».
contre moi, il ne s'est jamais manifesté!
C’était totalement surréaliste de voir qu’à chaque
Idem pour la Caisse Primaire d’Assurance Maladie
fois qu’il était question de l’attentat à la bombe,
qui était partie civile contre Arcini (elle s’est constituée
c’était à Arcini que l’on demandait de confirmer… et il
à l’audience), mais pas contre moi!
le faisait! J’ai bien sûr signalé à Salmon que je
Ce qui démontre bien, encore une fois, qu’il n’y a
trouvais étonnant sa façon de conduire les
eu aucun blessé lors du prétendu attentat du 30
interrogatoires, il a néanmoins poursuivi! Il m'a juste
novembre 1987! Sinon ils auraient occasionné des
rappelé que c'est le président qui conduit les débats.
frais médicaux, et la CPAM en aurait réclamé le
En conséquence un accusé pas d'accord n'a que le
remboursement en se portant partie civile.
droit de se taire, sinon: expulsion!.
J’ai par conséquent été condamné alors qu’il n’y
Au cours du procès, il m’est apparu manifeste qu’il
avait pas la moindre partie civile constituée contre
avait été prévu une "contrepartie" pour Arcini. Ce qui
moi (outre celles des ligues: LICRA, LDH, MRAP et
explique qu’il ait accepté de donner les répliques à
toute la clique...)!
Salmon et Bot.
Le seul qui m’ait "poursuivi" dans l’affaire, c’est le
Ministère Public ! Et je n’ai pas la sensation que ce 10. ARCINI INCAPABLE DE DÉCRIRE,
dernier ait agi « au nom du Peuple français », comme TECHNIQUEMENT, LA BOMBE
il l'a prétendu…
Mais si mon coaccusé connaissait bien son texte,
j’ai pu tous les "coincer" sur un point: la version
officielle veut que ce soit Arcini qui ait assemblé la
bombe. Ce qui a permis de le désigner comme
26
Pour information: cette Marie-Noëlle Catherine s’est vue attribuer, par "complice direct" afin de joindre toutes les affaires.
le Fonds de Garantie (celui pour les victimes d’actes de terrorisme), 1
400 000 francs de dédommagements pour la mort de son concubin et non Cependant, c’est moi qui ai assemblé l’engin (cf.
de son mari comme les média l’ont affirmé… Les Français victimes de chapitre 7 section 4). Et lors du procès, alors que les
l’immigration-invasion, qui eux ne sont jamais indemnisés, apprécieront! dialogues pré-appris Salmon/Arcini y allaient bon
Mais, en dédommageant copieusement cette femme, on était assuré
qu’elle ne chercherait pas à en savoir plus sur cette affaire plus que train, j’ai demandé au président de la Cour si l’on
trouble.
Mémoire de Michel Lajoye page 81
pouvait demander à Arcini de décrire techniquement la minuterie). Autant dire que cela faisait un peu
la bombe. léger! De mon côté, j’ai décrit à la Cour, de façon très
Puisque c’était lui qui l’avait, soi-disant, précise, cette bombe: modèle et référence de la pile,
assemblée, il allait pouvoir nous en donner les détails marque des prises électriques, leur matière, couleur,
comme la marque et le type de la pile, les couleurs etc. Ce qui fait que celui qui entendait cela en
des fils électriques, et aussi la façon dont les fils du concluait que c’est bien moi qui l’avais assemblée
détonateur étaient reliés aux fils de la minuterie (pile), puisque j’étais le seul des deux à décrire de mémoire
etc, etc… les parties techniques.
Là, j’avais mis le doigt sur le gros problème, car Mon intervention a créé un incident. J’ai même
aussitôt l’avocat général Bot a vu le danger, et il a frisé l’expulsion. L’avocat général et le président ont
ironisé sur mon côté provocateur qui faisait de totalement changé de sujet, je n’ai pas pu finir de
l’esbroufe pour faire son intéressant. Et il a ajouté décrire la bombe: ils ne voulaient pas que j’en parle.
que « cette diversion » ne le surprenait pas vu le peu Ils ont vu qu’Arcini avait un "coup de fatigue", qu’il se
de respect que j’avais pour les institutions sentait mal (c’était vers les 18 heures, il avait été
judiciaires… Je ne voyais pas le rapport! Le président sollicité depuis le matin 9 heures!) et qu’il était sur le
Salmon de son côté en a rajouté, l’essentiel étant de point de s’effondrer, de reconnaître qu’il n’avait pas
faire sourire la salle, et d’éviter qu’Arcini doive assemblé cet engin, qu’il ne l’avait jamais vu!
répondre à ce que j’avais demandé. Les jurés, quant Ce que je voulais faire, c’est démontrer, sur place,
à eux, n’ont pas pensé que j’avais soulevé là une lors de l’audience, qu’Arcini n’avait pas assemblé la
très bonne question puisqu’ils n’ont pas demandé bombe. Cela aurait fait apparaître comme totalement
que l’on approfondisse… anormal que je sois jugé en même temps que lui
Car, à cette question, mon coaccusé était bien puisque je n’avais rien à voir avec ses affaires et lui
incapable de répondre et pour cause! Il savait son rien à voir avec la mienne. Et surtout cela aurait fait
texte, mais n’avait pas en mémoire l’intégralité du apparaître que mon camarade récitait un texte où il
dossier et il ne pouvait tout de même pas le consulter devait s’attribuer, s’accuser de la confection totale de
avant de répondre! Comme j’insistais, Arcini a cette bombe et cela aurait été déterminant!
totalement perdu pied, cela se voyait bien, il En effet, il y avait quand même du public dans la
cherchait ses mots (cherchait son texte), et il a donné salle (on refusait même du monde et j’aurais dû faire
un prétexte qui aurait dû être évoqué en dernier payer les entrées au spectacle!) qui aurait compris la
recours. supercherie. Il fallait en conséquence "jouer" le public
En effet, il a alors dit: « Lajoye a peut-être modifié contre la Cour! Cette dernière n’aurait pas pu, devant
la structure électrique » (ce ne sont pas ses paroles tous ces gens, continuer à ignorer l’évidence, cela
exactes, cependant c’était ça le sens)! Mais ce n’était aurait fait trop de « hoooo! » dans la salle.
pas tout de suite qu’il fallait qu’il dise cela, c’était Le lendemain c’était le défilé des témoins, et si
après : en dernier recours! j’avais pu démontrer qu’Arcini mentait sur l’affaire de
Car il devait, d’abord, d’écrire une bombe, en la bombe et qu'on lui avait fait apprendre un texte, le
disant (éventuellement m’importe quoi) que c’était lendemain je faisais pareil avec le récit de "l’évasion"
telle pile, telle couleur de fils, etc, cela n’avait aucune et c’était gagné. S’il avait été démontré que
importance s’il n’avait plus en mémoire le dossier. Car "l’évasion" d’Arcini était bidon, dans ce cas c’est
si cela n’avait pas correspondu à la réalité de cette absolument toute la supercherie qui serait apparue
bombe, pour expliquer la différence entre la version au public, et il aurait "grondé"! Une fausse évasion, il
donnée par Arcini et la conception technique de la y aurait eu de quoi! Très rapidement le président
bombe "officielle", la parade était de dire: « Lajoye a Salmon aurait fermé sa boutique et renvoyé l’affaire
peut-être modifié la structure électrique ». pour "supplément d’informations", seule façon de se
Cela veut dire qu’ils avaient répété cette scène, ils dégager de ce guêpier et de tenter de la reprendre
avaient prévu le coup d’un avocat demandant à mon plus tard.
coaccusé de décrire cette bombe (sans regarder le Mais je n’avais pas le pouvoir de "secouer" Arcini.
dossier)! Mais Arcini s’est totalement emmêlé les En matière de Cour d’Assises, c’est le président qui
pieds, et a commencé par donner l’explication de conduit les débats, et pour poser les questions, il faut
non-concordance avant la description. Ensuite, en passer par lui ! J’ai découvert beaucoup de
voyant sa gaffe (c’en était une belle!), il a bredouillé choses aux cours de ces trois jours d’audience, et je
qu’il ne savait plus. À ce moment, il était mûr, il allait rappelle que ce n’est que 15 jours avant l’ouverture
s’écrouler, il était au bord de la crise de nerfs… du procès que le Parquet de Caen a remis à la
Pour le faire "s’écrouler", il aurait suffit de lui défense le dossier officiel qui fait près de 3.000
répondre que ce n’était pas crédible car on pièces. Je n’avais donc pas pu le consulter, et Maître
n’assemble pas une bombe tous les jours, et l'on se Burdeyron, mon avocat de l’époque, n’avait pas
souvient de détails comme le type de la pile, etc, et vraiment pu préparer l’affaire de son côté, faute de
de réitérer les questions en le "secouant" un peu. temps. Comme moi, l’avocat découvrait un tas de
Mais je n’avais pas ce pouvoir et l’impartial président choses en cours d’audience.
Salmon jouait dans le même camp que mon Par exemple ce n’est que lors de l’ouverture des
coaccusé… débats que nous avons découvert que les personnes
Ce dernier n’avait retenu de cette bombe que présentes dans le bar ne seraient pas citées à la
"boîte de conserve" et "réveil mécanique bleu" (pour
Mémoire de Michel Lajoye page 82
barre des témoins! Le Parquet s’était bien gardé de par cette clause. J’ignorais ce point de Droit, je ne l’ai
révéler cela avant! appris qu’à l’audience. Sans lui il aurait été requis 30
De plus, il faut bien voir que dans ce procès ans de sûreté, et je les prenais sans problème
stalinien nous étions seuls contre tous, ce n’était pas puisque le but, c’était d’obtenir la plus grosse
un procès impartial avec un président cherchant à condamnation possible.
faire "éclater la vérité". C’était un procès où tous
faisaient partie de la manipulation: du président à 12. LE RÉQUISITOIRE CONTRE ARCINI
l’avocat général en passant par les faux témoins et Dans le cas d’Arcini, il a été requis perpétuité,
mon coaccusé, sans oublier la nuée d’avocats des mais avec les 30 ans de sûreté. Ce réquisitoire était
ligues! possible puisqu’il avait contre lui de multiples affaires
J’ai parfaitement conscience que le procès a été (par armes à feu), donc, elles, toutes passibles de la
perdu le premier jour, en fin d’après-midi, quand réclusion criminelle à perpétuité avec peine
Arcini était sur le point de craquer nerveusement et incompressible de 30 ans. Et, en prime, il avait (c’était
qu’il n’a pas été poussé dans ses derniers la version officielle) la fabrication de la bombe que
retranchements pour lui faire dire qu’il n’avait pas j’avais déposée, ce qui lui donnait du coup une
confectionné cette bombe… « complicité de tentative d’assassinat ». Alors 30 ans
Cela n’a pas empêché, qu’à l’arrivée, c’est bien à de sûreté, vue l’ambiance d’après Carpentras, il
Arcini qu’a été imputée la « fabrication d’engin devait, normalement, s’il n’y avait pas eu le "petit
explosif » ! Ce qui prouve que les jurés ont signé là accord", les prendre sans problème.
où on leur a dit de signer, puisqu’ils ont condamné Le réquisitoire de l’avocat général contre Arcini
un type incapable de décrire cet "engin explosif" et sentait le creux, car finalement il a requis plus
reconnu innocent de cela celui qui le décrivait longuement, et plus haineusement, contre moi que
techniquement. contre mon coaccusé. Et s’il a réclamé 30 ans contre
En général, dans les Cours d’Assises, lorsqu’il y a lui c’est pour faire diversion et donner l’illusion qu’il ne
plusieurs accusés, ils se rejettent mutuellement les faisait pas une fixation sur ma personne.
responsabilités. Là c’était le contraire, nous affirmions
chacun avoir assemblé la bombe! 13. LES PLAIDOIRIES DE LA DÉFENSE
Suite à cet incident, où j’ai voulu démontrer
Maître Burdeyron, qui m’assistait durant ce show,
qu’Arcini s’accusait sur ordre, je n’ai plus eu le loisir
n’a pas remis en cause la réalité des faits de l’affaire
de poser des questions. Lors du second jour du
en elle-même, il a plaidé l’atténuation du réquisitoire.
procès c’était le défilé des témoins, le président et
Il a bien plaidé dans ce domaine, mais, peut-être, et
l’avocat général, qui avaient été échaudés par ma
même sûrement, que ce n’était pas sur l’atténuation
question de la veille au sujet de la bombe, étaient sur
qu’il fallait plaider, mais la véracité des faits qui n’était
la défensive. Je n’ai jamais eu la parole lors de ce
pas prouvée.
défilé!
Cependant, à l’époque, nous n’avions pas la
Ils ont notamment fait déposer les inspecteurs
vision que j’ai actuellement de cette affaire.
"braqués" lors de "l’évasion" d’Arcini, puis les ont fait
De plus, comme il semblerait que les jurés avaient
partir (« Vous pouvez disposer... »), et ce n’est
été soigneusement sélectionnés, l’affaire était
qu’après le départ du dernier témoin que le président
entendue, et cela ne servait à rien de leur demander
Salmon a demandé à la défense si elle avait des
de me condamner à « un peu moins » comme l’a fait
questions à poser. C’était se foutre du monde,
l’avocat.
interroger qui? Il n’y avait plus personne à la barre!
De toute façon lors des plaidoiries, il était aussi
11. LE RÉQUISITOIRE CONTRE MOI trop tard pour mettre en avant l’absence de preuves
de l’explosion et de "jouer" le public contre la Cour.
Lors de son réquisitoire Yves Bot a précisé qu’en Ce n’était pas à la fin qu’il fallait faire dans le
ce qui me concernait, « la loi ne fait pas de différence "révisionnisme actif", mais dès le début en exigeant
entre la tentative et l’assassinat » (pour citer ses que l’on aille chercher les témoins de cette l’explosion
propos) et que je devais être condamné comme si la pour les amener à la barre afin qu’ils nous donnent
bombe avait tué. Je n’étais dès lors pas jugé sur des leur version des faits. S’ils avaient refusé d’aller
faits qui s’étaient produits, mais sur des chercher les témoins, automatiquement le public
conséquences qui auraient pu se produire si cela aurait flairé l’imposture.
s’était déroulé comme ci et/ou comme ça… Et en cas de refus d’aller chercher les témoins, il y
Il a demandé pour moi la perpétuité assortie d’une avait aussi moyen de faire théâtral: à savoir que
peine de sûreté de 18 ans. Mais il a bien précisé qu’il Maître Burdeyron aurait pu prendre ses affaires et
regrettait beaucoup de ne pouvoir requérir une peine quitter la salle (après que je l’ai récusé), et à moi de
de sûreté de 30 ans. Il a même parlé de peine de rester dans ma cellule et ne plus revenir à ces
mort, expliquant que cette peine de sûreté de 30 ans pitreries tout le temps qu’on n'aurait pas amené les
la remplaçait. témoins.
À l’époque, le Code Pénal en vigueur (il a été Mais, pour faire tout cela, il aurait fallu que nous
"réformé" depuis) prévoyait que pour les attentats à sachions, avant le procès, qu’ils n’allaient pas
l’explosif la peine de sûreté ne pouvait excéder 18 apporter la preuve de l’explosion et qu’ils n’allaient
ans! Partant de là, l’avocat général s’est trouvé limité pas faire citer les témoins. Comme ce n’est qu’à la fin

Mémoire de Michel Lajoye page 83


que nous avons compris, et eu la certitude, qu’il y 15. LE VERDICT
avait eu manipulation, il était trop tard.
Les jurés ont délibéré pendant 1 heure 30, ce qui
Il est aisé, après coup, de dire qu’il fallait faire
me semble court compte tenu de la longueur
"comme ci" ou "comme ça"! À l’époque si cela n’a
impressionnante de l’Arrêt de renvoi devant la Cour
pas été fait c’est que nous n’avons n’a pas pu le
d’Assises qu’ils ont dû, normalement, consulter à
faire.
nouveau. Et comme ils n’avaient pris aucune note
Quant à Arcini, il était défendu par un avocat de
durant les trois jours complets de débats, il a bien
Caen qu’il avait choisi, un certain Caratini, gendre de
fallu qu’ils se remémorent les différentes accusations
Jean-Marie Girault (le maire de Caen27). Lui je ne sais
en relisant ce document.
même pas ce qu’il a plaidé, je n’ai pas compris où il
À moins que tout n’ait été prévu d’avance, car un
voulait en venir avec ses "démonstrations" sur la
verdict, pour une affaire pareille, qui a duré 3 jours
« permissivité de l’extrême-droite » qui m’ont plus fait
complets (10 heures de débats par jour), emballé
bâiller qu’autre chose. En un mot: nul!
pesé en 1 heure 30, c’est bien court je trouve…
14. J'AI PRIS LA PAROLE PENDANT PRÈS DE Il y avait, semble-t-il, uniquement deux questions
DEUX HEURES pour chaque accusé, car à l’énoncé du verdict le
président les a rappelé. J’ignore s’il y en avait
Comme les accusés ont la parole en dernier, d’autres, mais toujours est-il que ce ne sont que deux
lorsque je l’ai eue, Salmon a compris son malheur. questions qui ont été lues lors de l’énoncé des
Pendant deux heures, je leur ai fait un "exposé" sur condamnations. La première était de savoir si j’étais
la chose. Ce texte a été publié en deux parties, la déclaré coupable d’avoir déposé une bombe à Petit-
première dans Tribune Nationaliste numéro 46 de Quevilly le 30 novembre 1987. La réponse fut « oui »
septembre/octobre 1990 et la seconde dans le à 8 voix. L’autre question demandait si je pouvais
numéro 47 de novembre 1990. Ils n’ont pas pu me bénéficier des circonstances atténuantes, et la
faire taire, bien que cela les démangeait, comme j’ai réponse fut « non » à 8 voix aussi.
pu le voir puisqu’ils ouvraient tous leur Code de En conclusion, j’ai été condamné à ce que
procédure pénale à la recherche de l’article qui aurait réclamait l’accusation puisqu’il n’y avait aucune
pu me réduire au silence en limitant le temps de atténuation reconnue.
parole d’un accusé. Même type de questions concernant la culpabilité
Lorsque j’ai commencé à m’exprimer, dès que j’ai d’Arcini sur les faits qui lui étaient reprochés (et il y en
prononcé des mots comme juif, juiverie, etc, ils m’ont avait beaucoup...), et même réponse: 8 voix pour le
fait un "mini-exodus": tous les avocats (sauf un!) des déclarer coupable. 8 voix également pour lui refuser
parties civiles ont quitté la salle en signe de toute circonstance atténuante.
protestation car mes propos étaient, selon eux, Donc, mon coaccusé aurait dû être, fort
"insoutenables"! Qu’un accusé ait la parole, je logiquement, comme moi, condamné
comprends parfaitement que cela ait choqué tous automatiquement selon ce qu’avait demandé
ces humanistes! Le seul avocat des parties civiles qui l’accusation puisque les jurés n’ont rien atténué.
est resté pour "m’écouter2, c’est l’avocat de la Or, Arcini a eu 18 ans de sûreté au lieu des 30
LICRA, un certain Badache (celui-là même qui a ans réclamés. C’est totalement illogique puisque pour
laissé un trou énorme dans la trésorerie du Club de prendre moins, il aurait fallu que les jurés atténuent
basket de Caen...), mais il a souffert le martyre! en reconnaissant des circonstances atténuantes, ce
Théoriquement l’avocat de la licrasse aurait dû être qu’ils n’ont pas fait! Il est manifeste qu’Arcini a passé
Libmann, mais il s’est "décommandé" au dernier un accord pour bénéficier d’une réduction de 12 ans
moment… par rapport à ce qu’avait requis l’avocat général! Et
Ma déclaration a bien plu à une partie du public! entre une peine incompressible de 18 ans et une de
En effet, après le procès, j’ai reçu quelques cartes 30, il y a une grosse différence!
anonymes de spectateurs qui, venus en curieux, Il semblerait qu’Arcini ait passé un double accord
avaient bien aimé ce que j’ai dit et m’ont envoyé un en fait. Un premier prévoyait "l’oubli" d’une partie de
mot à la Maison d’arrêt de Caen pour me le faire ses affaires contre une aide pour mon arrestation. Le
savoir! Certaines cartes revenaient aussi sur second prévoyait la compression de 30 à 18 ans de
l’expulsion des témoins que j’avais fait citer, cela avait la peine de sûreté s’il se comportait "comme il fallait"
choqué. Preuve que le citoyen caennais de base, durant le procès. Ce qui fut fait!
venu en spectateur, n’était pas foncièrement hostile! Comme je n’ai pas été condamné pour la
Ce qui était le plus inquiétant pour eux ! fabrication de la bombe, puisqu'on ne voulait pas
que je l’aie assemblée: j’ai donc été condamné
uniquement pour la pose d’un paquet piégé qui n’a
peut-être même pas explosé!
27
À l’issue du procès, la mairie de Caen m’a envoyé une facture
concernant des "frais d’entretien de la voirie". En effet, les services de la 16. ARCINI EST TOUJOURS EN PRISON
voirie de la ville avaient été mobilisés d’urgence pour aller décoller des
affiches apposées en zone urbaine. Ces dernières, collées par des "mains Je me suis demandé à un moment si Arcini était
anonymes", réclamaient ma libération! Cela en avait outré (et pas qu’un bien en prison, ou encore en prison car avec eux, on
peu!) les avocats des parties civiles pourtant habitués à pétitionner pour ne sait jamais…
réclamer la libération de certains prisonniers. Exemple d'une "cause" de
l'époque: l'innocent multirécidiviste Knobelpiess pour la LDH, etc…
Mémoire de Michel Lajoye page 84
Je me suis demandé à un moment si Aricini était parlé et du coup révélé ce qui devait rester
bien en prison, ou encore en prison, car avec eux, on totalement secret!
ne sait jamais… Si j’avais ces doutes, c’est que je Frédérique Germain a reçu une nouvelle identité
pensais au cas de Frédérique Germain, dite Blond- pour aller refaire une autre vie. C’était la première fois
Blond, de la branche lyonnaise d’Action Directe – qu’en France il était adopté un système similaire à ce
Canal Mossad, c'est-à-dire Rouillan et ses acolytes qui se fait aux USA ou en Italie concernant les
(cf. chapitre 2, section 13). C’est elle qui est derrière repentis. J’ignore si d’autres personnes en ont
l'arrestation de plusieurs des "sabbat-goyim" d'AD bénéficié en France depuis Frédérique Germain.
(fusillade de l'avenue Trudaine, etc). Elle a été jugée Dès lors, compte tenu du "précédent Frédérique
avec ses "camarades" qu'elle a trahis et balancés, Germain", à un moment j’ai eu de sérieux doutes sur
elle a été condamnée, mais… par décision spéciale l’incarcération réelle d’Arcini. Mais j’avais tort de
(et secrète), elle a été dispensée de peine! Pourtant, douter, puisqu’il est actuellement en prison. Aux
elle avait été lourdement condamnée! Elle a eu une dernières nouvelles, il avait le matricule 3632 et
sorte de "grâce spéciale" dont les média n’ont jamais occupait la cellule 207 à la Maison centrale de Saint-
fait mention de cela, hormis la radio RTL qui en avait Maur, près de Châteauroux.

Chapitre 12

LE POURVOI EN CASSATION

procès! Car, si j’avais fait cassation et pas Arcini, et si


1. JE N'ÉTAIS PAS POUR j’avais eu satisfaction, j’aurais été à nouveau jugé,
mais seul cette fois! Dans ce cas, le dossier aurait

A
l’issue de la condamnation, il me fut proposé
un pourvoi en cassation. Je ne souhaitais pas apparu bien léger, l’absence de témoins se serait
en déposer un, car c’était leur donner le plaisir remarquée, idem pour les parties civiles!
de le rejeter… De plus, c'était leur donner une Donc il paraît évident qu'on a précisé à mon
légitimité, reconnaître cette "justice"! Finalement, des "complice" qu’il "fallait me suivre" et déposer un
camarades ont insisté en me disant que faire casser pourvoi.
le verdict, cela m'offrirait un second procès où, Cependant, Arcini est un malin, car sa requête n’a
d'entrée, je pourrais exiger de voir les témoins pas été examinée puisqu’il a "oublié" (sciemment
présents dans le bar, ainsi que les prétendues bien sûr!) de signer le Mémoire ampliatif.
victimes! Je suis persuadé qu’il l’a fait exprès! C’est même
J’ai donc accepté d’entamer cette procédure bien évident! Comme ça il avait bien fait cassation, comme
particulière, car la Cour de Cassation ne se prononce on le lui avait dit, afin de ne pas me laisser aller seul
pas sur les faits jugés, mais uniquement sur à un éventuel nouveau procès. Mais, il a fait en sorte
d'éventuels "vices de procédure" survenus durant le de ne pas prendre le risque de voir son recours
déroulement du procès. En 1990, il n'existait pas accepté, en "oubliant" de signer la pièce de
encore la Cour d'Appel pour les Assises. Elle n'a été procédure essentielle qu’est le Mémoire ampliatif.
instituée que le 1 er janvier 2001 et je ne peux pas en Cela prouve bien qu’Arcini n’était quand même
bénéficier rétroactivement… pas inconscient, et il n’avait pas envie d’être jugé à
nouveau au risque de prendre, cette fois, 30 ans
2. ARCINI DÉPOSE UN POURVOI incompressibles… En bon artificier-démineur, il a
neutralisé le "piège"!
Arcini qui ne souhaitait pas déposer de pourvoi à
De plus, il n’était pas assisté d’un avocat pour
l’issue du procès, et pour cause, il avait eu 12 ans de
cette procédure devant la Cour de cassation, alors
réduction par rapport à la peine de sûreté requise,
qu’il en avait les moyens financiers.
s’est décidé à aller en cassation également lorsqu’il a
De ce fait, que l’on ne vienne pas me dire
su que j’y allais… Ce qui était contre toute logique et
qu’Arcini, de lui-même, souhaitait véritablement
n’était pas un comportement très cohérent!
déposer cette requête, car s’il l’avait souhaité
En effet, compte tenu du nombre d’accusations
réellement, il se serait assuré le concours d’un
contre lui et de l’ambiance d’après Carpentras, Arcini
professionnel.
devait s’estimer heureux! Il s’en était tiré plus que
bien! Il ne pouvait quand même pas espérer être 3. L'AVOCAT, QUI AVAIT ACCEPTÉ, SE
condamné à moins de 18 ans! DÉSISTE
Alors pourquoi Arcini, de lui-même, serait allé
déposer un pourvoi en cassation pour être jugé à Pour mon pourvoi, Maître Burdeyron avait
nouveau, avec le risque énorme d’être cette fois contacté Maître Chantal Urtin-Petit, avocat à la Cour
condamné à 30 ans incompressibles ? Je ne crois de cassation, avec qui il avait déjà travaillé. Maître
pas du tout qu’il ait effectué cette démarche de lui- Urtin-Petit avait accepté, par lettre, l’affaire et tout
même! Ce que je pense, c’est que certains ne allait pour le mieux.
voulaient pas me laisser aller seul à un nouveau

Mémoire de Michel Lajoye page 85


Puis, peu de temps après, elle a écrit qu’elle ne pour tous les autres arguments avancés par la
souhaitait plus s’en occuper… Du coup plus d’avocat requête…
pour la cassation. A-t-elle subi des pressions?
Finalement c’est Rivarol, et plus particulièrement 5. DES JOURNAUX ONT LES ATTENDUS
Charles Filippi, qui m’a alors envoyé un mot me AVANT NOUS
signalant de faire appel à Maître Jacques Guinard, L’audience de la Chambre criminelle de la Cour de
avocat à la Cour de cassation. Ce dernier acceptait cassation a eu lieu le 23 avril 1991. Maître Guinard,
aussitôt de s’occuper de cette requête. qui me représentait en Cassation, m’a écrit peu
après, le 26 avril 1991, pour me signaler le rejet et
4. MON POURVOI, ÉVIDEMMENT, REJETÉ
me préciser que dès qu’il aurait connaissance des
Évidemment mon pourvoi a été rejeté, ce qui est attendus, c’est-à-dire dès qu’ils seraient disponibles
logique. Ils s’étaient donné suffisamment de mal pour au Greffe de la Cour de Cassation, il me les
me faire condamner, ce n’était pas pour remettre ça communiquerait.
dans un autre procès avec le risque que cela se Je stipule, pour les non-initiés, qu’il faut un
déroule mal pour eux. "certain délai" pour que les attendus soient
Maître Guinard avait déniché six moyens et disponibles, il faut le temps de les rédiger! Les
chacun d'eux justifiait, à lui seul, la cassation du magistrats rejettent et/ou condamnent d’abord, ils
verdict. Je ne les détaille pas tous, un seul suffit argumentent officiellement sur le papier après…
puisque cet avocat avait soulevé "l'argument- C’est dans un courrier du 5 juin 1991 que Maître
massue": la feuille signée par les jurés et le texte Guinard m’envoyait copie des attendus qu’il venait
d’Arrêt de la condamnation ne concordent pas! En tout juste d’obtenir (il les avait eus le 3 juin 1991)
effet, ce qu’ont signé les jurés n’est pas conforme au auprès du Greffe de la Chambre criminelle de la Cour
texte de condamnation… Ce qui laisse songeur… de cassation. Mais, entre temps, certains ont commis
Cela voudrait-il dire que l’Arrêt de condamnation, lu à une bourde énorme!
l’audience, n’a pas été rédigé par les jurés qui, En effet, le 3 mai 1991 (soit un mois plus tôt !),
apparemment, ont signé un autre document? Je l’édition du Calvados de Ouest-France et
n’ose y penser… l’hebdomadaire Liberté de Caen, publiaient un texte
Quoi qu’il en soit, dans ce cas, la jurisprudence quasiment identique (une sorte de communiqué de
est plus que centenaire, c’est même automatique et presse) qui annonçait le rejet de mon pourvoi en
fort logique: est cassé tout procès d’Assises dont cassation. Cela passionnait apparemment la région
l’Arrêt de condamnation lu à l’audience n’est pas puisque c’était donné à grand renfort de publicité!
conforme au document signé par les jurés. Ces deux journaux publiaient cela en reprenant les
Dans le cas du procès de Caen, la feuille rédigée motifs de rejet et en s’appuyant sur quoi? Eh bien,
(ou plus exactement signée) par les jurés mentionnait les attendus évidemment!
la saisie des armes (ce qui paraît évident...), mais Seulement il faudrait que l’on nous explique
étrangement, la feuille du verdict officiel lu à comment ces journaux, en date du 3 mai 1991, ont
l'audience ne contenait pas, ou plus, ce paragraphe fait pour avoir le texte des attendus que Maître
ordonnant la saisie définitive de l’armement et Guinard, pourtant avocat à la Cour de Cassation, n’a
matériels divers! obtenu, lui, que le 3 juin 1991!
Encore une fois, cela conduit à s’interroger sur le Pour information, l’hebdomadaire Liberté de Caen
fait de savoir si, par hasard, le verdict n’a pas été est une petite feuille citadine qui n’a aucun moyen
rédigé avant, et indépendamment, de la feuille d’investigation. Il faut lui donner une information pour
signée par les jurés… qu’il la publie. Par conséquent, on a fourni à cet
Heureusement la Cour de Cassation, la plus hebdomadaire de Caen (en même temps qu'à
haute juridiction française en matière de "justice", est l'édition locale du quotidien Ouest-France) les
là pour garantir la bonne administration de ce dont attendus! Mais dans ce cas, question: qui a bien pu
elle est garante. Donc, elle a répliqué qu’en l’état, la les avoir en sa possession avant leur rédaction
cassation n’était pas due, un point c’est tout! Idem officielle? Il a malheureusement été impossible de
savoir qui a informé la presse…

Conclusion

L
e moins que l’on puisse dire c’est que cette recruté, qu’est-ce qu’ils attendaient de moi? Qui a tiré
affaire est loin d’être éclaircie! Il y a beaucoup les ficelles de cette manipulation?
de "zones d’ombre". Cependant, vu les Je ne crois pas vraiment que la DPSD m’ait
implications, il ne faut pas rêver et il est douteux de recruté pour que je fasse partie de la DPSD. J’estime
penser connaître la vérité, du moins avec le régime que j’étais beaucoup trop jeune et trop "bleu" pour
actuel! être envoyé si rapidement sur des missions de
De plus, quelle était la véritable finalité de cette barbouzerie! Je pense plutôt que j’ai été recruté pour
manipulation? Qui était visé? Lorsque la DPSD m’a être utilisé par la DPSD. Cela, évidemment, dans un
but bien précis de manipulation.
Mémoire de Michel Lajoye page 86
Comme relaté au chapitre 2, je les aurais bien vu hypothèse (qui n’est qu’une hypothèse!) est loin
me faire commettre une action quelconque, me d’être à exclure. Actuellement il n’est pas impossible
liquider dans la foulée, et l'on aurait pu lancer une que les RG ne soient pas mécontents de voir leurs
campagne médiatique contre les nationalistes, et à rivaux de la DPSD empêtrés avec cette "Affaire
tous les coups contre le FN qui, évidemment, aurait Lajoye". La police politique civile pourra ainsi faire
été l’inspirateur des actes commis par Lajoye… valoir, avec des arguments, que la police politique
D’ailleurs, au final, l’opération a été partiellement militaire a été minable, qu’elle est composée de nuls,
réussie, on m’a fait commettre un attentat. Seulement et qu’il faut, pour éviter que cela ne se renouvelle,
on n’a pas pu mettre cela sur le dos du FN car j’étais confier la police politique aux civils…
là pour dire qu’il n’y était pour rien. Ce qui fait penser Mais si cette hypothèse est la bonne, les civils
à beaucoup que, sans aucun doute, le "plan initial" auraient tort de se réjouir de voir les militaires enlisés
(conçu par la DPSD?) prévoyait que je sois abattu avec ce dossier! En effet, pour ma part, je fais partir
lors de mon arrestation. Ainsi, il aurait été simple pour cette "Affaire Lajoye" en 1984: date de ma rencontre
eux d’impliquer, ensuite, le FN! Je n’aurais pas été là avec l’agent civil Arcini, officiellement fonctionnaire du
pour dire le contraire! Ministère de l’Intérieur, et non pas uniquement à
Or, je n’ai pas été abattu! Reste à savoir partir de 1985/1986, époque de mon recrutement par
pourquoi, et notamment si le plan initial prévoyait que la DPSD!
je le sois. Est-ce qu’il y a eu "rivalité" entre les De plus, tout au long de ce récit, nous avons vu
services spéciaux militaires et civils? L’un a-t-il que les civils, que ce soient les RG et/ou la Police
savonné la planche à l’autre? C’est fort possible! Il Judiciaire, sont loin d’être innocents!
faut savoir qu’il y a un antagonisme (pour ne pas dire Quoi qu’il en soit, rivalité inter-services ou non, il
conflit ouvert!) entre les civils et les militaires des est indéniable qu’il y a bel et bien eu une "haute
services spéciaux. Chaque camp voulant éliminer autorité" derrière les faits relatés dans ce mémoire!
l’autre pour avoir "l’exclusivité du marché". Il se Prenons l’exemple de l’attentat qui m’est
pourrait que mon affaire ait été utilisée dans cette reproché. Il apparaît qu’il n’y a jamais eu de blessé,
"guerre" qu’ils se livrent. le témoin Rabia Bounifia le confirme. Cependant, des
En effet, si nous analysons rationnellement les blessés existent sur le papier, dans des procès
éléments, nous pouvons dire qu’il a été commis des verbaux, l’Arrêt de renvoi devant les Assises, etc. Je
erreurs énormes! La preuve avec ce mémoire! Une doute que ce soient des officiers de police judiciaire
décennie après, il m’a été possible de démontrer la et/ou des magistrats qui, d’eux-mêmes, ont pris
manipulation. Cette dernière apparaît tellement l’initiative de "faire monter la sauce" et d’inventer des
cousue de fil blanc que personne ne peut la nier. victimes!
C’est un peu comme si un service avait laissé traîner D’autant plus que ces faux blessés, ces
des indices, commis sciemment des bourdes, pour mensonges qui ont été formulés dès le début par la
que je puisse, ensuite, remonter les tenants et police judiciaire, ont été couverts par tous les
aboutissants afin de montrer du doigt ceux qui sont magistrats qui, par la suite, sont intervenus dans ce
derrière tout cela. dossier. C’est que cela en fait du monde!
Compte tenu que j’ai été interpellé par le RAID, Il a bien fallu qu’un service, qu’une "autorité
policiers civils, que c’est Ange Mancini lui-même (à supérieure", leur ordonne de couvrir cette
l’époque le chef de cette unité) qui menait le manipulation. Et pour que tous ces policiers, tous ses
commando, il se pourrait que les civils aient joué un magistrats, obéissent il faut que le service et/ou
"sale tour" aux militaires (les rivaux honnis!) en ne "l’autorité supérieure" soient très puissants! Qu’ils les
tirant pas! Mancini était-il là, personnellement, afin de craignent!
bien contrôler qu’aucun de ses hommes ne Cette terreur qu’inspirent ceux qui sont derrière
commettrait de "bavure"? Il est en tout cas pour le cette manipulation, rend hypothétiques les chances
moins étonnant que ce soit Mancini, en personne, de voir "réviser" le jugement me condamnant.
qui ait opéré mon arrestation… J’avoue que croire à une révision me semble
Car, encore une fois, si j’avais été liquidé en 1987 totalement utopique. Car pour qu’une telle chose soit
lors de cette interpellation, il aurait été impossible (à acceptée, entreprise, il faudrait que la "justice"
qui que ce soit!) de remonter "l’affaire" et de reconnaisse son erreur, sa participation active dans
démontrer la manipulation impliquant les services cette manipulation! Autant dire que c’est du domaine
spéciaux de l’armée! Alors qu’aujourd’hui, à cause de l’illusoire! Je vois mal la magistrature, la police
des civils du RAID qui n’ont pas tiré, c’est bel est bien judiciaire, la police politique civile et militaire, etc, se
la DPSD que je montre du doigt! Qui m’a recruté? La couvrir la tête de cendres puis avouer, publiquement,
DPSD! À la base de cette affaire, ce sont bien les qu’elles sont allées jusque-là ! Le reconnaître, cela
services spéciaux de l’armée, et non pas les serait convenir que la France n’a rien à envier aux
Renseignements Généraux! pires pays totalitaires que l’hexagone se complaît à
Il se peut fort bien que certains militaires se montrer du doigt! Les "initiés" savent ce qu’il en est,
mordent aujourd’hui les doigts d’avoir laissé envoyer, réellement, de la situation en France. Mais le grand
pour mon arrestation en 1987, les civils du RAID et public, cette "masse goye", n’a pas à le savoir et ne
non les militaires du GIGN! doit surtout pas le savoir!
Ceux qui connaissent la rivalité entre les services
spéciaux civils et militaires, comprendront que cette
Mémoire de Michel Lajoye page 87
Si on acceptait d’instruire objectivement cette Le Pen) l’agent infiltré Devaux va assassiner (sur
"Affaire Lajoye", c’est-à-dire les faits relatés dans ce ordre de qui?) un militant du PS!
mémoire, cela serait ouvrir la boîte à Pandore! Le crime de Croisy, médiatisé à outrance durant la
En effet, dans cette affaire, les RG (police campagne des législatives de 1986, puisque imputé
politique civile) sont impliqués, mais la DPSD (police à un militant du FN, a fait perdre à ce mouvement un
politique militaire) l’est aussi et même apparemment nombre considérable de voix! Ce qui était l’objectif à
beaucoup plus! Les premiers dépendent du Ministère atteindre! Ce pourquoi on a envoyé "en mission" le
de l’Intérieur, la seconde du Ministère de la Défense. sergent Devaux! Ce pourquoi le gouvernement, issu
Il faudrait alors expliquer, au public, cette du Parti Socialiste, a fait tuer un de ses militants!
collaboration inter-services et même interarmes! Cet assassinat éclaire ma propre affaire, car cette
Cette collaboration démontre qu’il y a eu cellule, située à Vanvres et à laquelle appartenait
coordination au sein d’une cellule… Une sorte de Régis Devaux, ressemble beaucoup à ce que j’ai
"Cellule de lutte contre l’extrême-droite"… Cette connu à l’APSD de Tarbes!
dernière un peu calquée sur le modèle de la "Cellule Il serait intéressant de savoir combien il y a de
élyséenne", le cabinet noir de Mitterrand, qui était cellules interarmes de ce genre en France!
composé de militaires (GIGN, DGSE, DPSD) et de Il serait tout aussi intéressant de savoir qui les
civils (RG, DST, PJ). La Cellule Elyséenne démontre commande. Car ces opérations de manipulations
bien que, lorsqu’ils le veulent, ils savent faire travailler s’inscrivent dans la continuité politique. La preuve en
militaires et civils. est mon cas: cela s’est poursuivi quels que soient les
En conséquence, chercher qui est derrière mon gouvernements! Aucun n’a dit « Stop! » et ordonné
affaire, cela serait donner un coup de projecteur sur la dissolution de toutes ces cellules! Les faits relatés
ces cellules interarmes de lutte contre l’extrême-droite dans ce mémoire se sont étalés de 1984, date de ma
qui existent bel et bien! Car mon cas n’est pas isolé, rencontre avec l’agent Arcini, jusqu’à 1991, date du
loin de là! rejet du pourvoi en cassation.
À Croisy, le 7 mars 1986 (soit à une époque Ce qui veut dire que cela a débuté sous un
contemporaine des faits relatés dans ce mémoire), gouvernement "de gauche" avec un Premier Ministre
quelques jours avant les élections législatives, un qui n’était autre que Laurent Fabiusida, l’époux de
certain Régis Devaux a poignardé à mort Philippe Françoise Castro, celle des "milices juives armées"!
Brocard, un militant du Parti Socialiste dont il collait Le Ministre de l’Intérieur (celui qui a "engagé" Arcini
les affiches. Les média, lors d’une campagne en 1982/1983!) était Pierre Joxe, fils de Louis, lui-
haineuse, ont affirmé que ce Devaux était un militant même fils d’Halévy.
du Front National. Ce qui est "vrai", il était encarté au Cela s’est prolongé en 1987, année où furent
FN, mais… sous une fausse adresse! commis les attentats relatés dans ce mémoire. À
En fait ce Devaux (dont l’affaire fut totalement cette date (depuis les élections législatives de mars
étouffée ensuite, et pour cause!) était (à l’époque) le 1986) c’était un gouvernement de cohabitation "de
sergent Devaux! Affectation militaire: Fort de droite", dirigé par Jacques Chirac, un membre du
Vanvres! Sous les ordres du colonel Morel. Devaux Comité d’honneur de la LICRA. À l’Intérieur y étaient
appartenait à une "Section spéciale" de l’armée les duettistes Pasqua (membre d’honneur du
(apparemment une Antenne de la DPSD...) casernée Mossad) et le franc-maçon Pandraud qui occupaient
à Vanvres et composée de 120 hommes spécialisés un "super-Ministère" de la sécurité.
dans l’infiltration des groupes d’extrême-droite! Ensuite, cela s’est poursuivi sous un
Compte tenu que les services spéciaux de l’armée gouvernement "de gauche" (qui fut de retour en
n’ont aucun pouvoir judiciaire, ces infiltrations ne 1988), avec le procès de Caen tenu en juin 1990.
peuvent avoir comme finalité que la provocation ! Autrement dit un mois après la manipulation de
Pour la "couverture judiciaire", cette compagnie, à Carpentras (mai 1990) où Joxe s’est tant illustré et un
laquelle appartenait Devaux, travaillait à l’époque mois avant l’adoption de la Loi Fabius-Gayssot (juillet
(sans doute encore maintenant!) en liaison avec des 1990)…
officiers de gendarmerie de la brigade de recherche Preuve qu’il y a bien eu continuité dans cette
de Paris-Minimes. Ainsi qu’avec le Deuxième Bureau affaire! Gauche et droite ont couvert! De ce fait, cela
de la Direction Centrale des Renseignements tendrait à prouver que "l’autorité supérieure" qui est
Généraux! derrière cette manipulation est "apolitique", si j’ose
Voilà qui constitue une belle "cellule interarmes de dire… Gauche et droite lui obéissent, collaborent, et
lutte contre l’extrême-droite"! Elle allie les militaires utilisent des cellules spéciales dans leur guerre à
des services spéciaux (une compagnie complète: 120 mort contre les nationalistes!
agents, ce n’est pas rien!) et ceux de la gendarmerie, Mais qui sont donc ceux qui ont à leurs pieds
avec les civils des Renseignements Généraux! Et toute la classe politique française? Qui sont ceux qui
cette cellule de Vanvres est une unité qui assassine! exècrent les nationalismes (hormis le leur...)? Cela
En effet, le cas de Devaux est très significatif. Car pourrait bien être eux l’aiguillon, eux qui exigent que
voilà un militaire, des services spéciaux, qui s’encarte l’on recoure, en France, chez nous, aux mêmes
(dans le cadre de son travail!) au FN, parti méthodes que celles qui sont utilisées, par eux, en
démocratique. Puis, la veille d’élections législatives Palestine occupée!
(très importantes pour le mouvement de Jean-Marie Je sais que certaines personnes s’étonnent, ont
même du mal à croire, que la DPSD (par conséquent
Mémoire de Michel Lajoye page 88
leur armée chérie!) puisse s’impliquer dans des très rurale, il est difficile à l’inspecteur des RG d’avoir
affaires de basse police politique. Pourtant c’est ses renseignements. Il se fait repérer rapidement
logique! Il y a bien en France, pour le "maintien de dans un village de quelques centaines d’habitants.
l’ordre" (défense de rigoler!), une police civile (police Tandis qu’avec la DPSD, c’est simple! Comme c’est
nationale) et une police militaire (gendarmerie). Il est l’armée et que la gendarmerie, c’est militaire: chaque
dès lors normal qu’en matière de police politique il en gendarme est un agent en puissance, il suffit de
soit de même. "l’activer".
Et à ces sceptiques qui pensent encore que leur Ces pratiques de la DPSD sont totalement
armée vénérée ne tremperait pas là-dedans, je leur inconnues de la "masse goye". Les livres sur les RG
demanderai de se souvenir de l’époque de l’OAS: la pullulent, mais la DPSD est inconnue du grand
Sécurité Militaire (qui est devenue la DPSD en public. Gageons que cela continuera! C’est à cela
novembre 1981) traquait les membres de l’OAS, ainsi que l’on reconnaît d’ailleurs la puissance de ce
que les militants d’autres organisations et cela même service: il sait rester dans l’ombre et sait faire
s’ils étaient civils! respecter, par les média, la loi du silence!
En outre, dans le milieu des années 60 (soit après En effet, plus de 35 ans après "l’Affaire Saint-
la fin, officielle, de la guerre en Algérie), c’est bien la Aubin", alors que des documents prouvent
Sécurité Militaire (c’est-à-dire l’armée républicaine du l’implication de la Sécurité Militaire, que les noms des
pays des "Droits de l’Homme"!) qui a perpétré ce que donneurs d’ordres sont connus, quel est le journal,
l’on connaît sous le vocable de "l’Affaire Saint- quel est l’éditeur, qui a publié ces preuves
Aubin"! Du nom de ce jeune homme assassiné par disponibles? Aucun! Le silence de la terreur!
erreur, car les tueurs de la SM l’ont confondu avec un Idem pour le crime de Croisy commis en 1986!
avocat qu’ils avaient ordre de supprimer! Quel est le média qui a osé braver l’interdit et
Ce qui démontre, par l’exemple, que dans les mentionner que Philippe Brocard, militant du Parti
années 60 la Sécurité Militaire était très active en Socialiste, a été poignardé à mort, non pas par un
matière de police politique, n’hésitant pas à liquider militant du Front National, mais par le sergent Régis
des civils! Et pas n’importe quels civils puisque, dans Devaux, membre des services spéciaux de l’armée,
ce qui a débouché sur "l’Affaire Saint-Aubin", c’est un chargé d’infiltrer l’extrême droite? Aucun!
avocat qui, initialement, était visé! Cela ne se En France, dès que l’on parle police politique, la
déroulait pas en URSS, ou dans un de ses pays "masse goye" pense Renseignements Généraux! Le
satellites, mais en France! conditionnement pavlovien est parfait! Remarquable!
Alors il faut être bien naïf pour penser que Tout le monde croit qu’il n’y a qu’une police politique
certaines pratiques ont été abandonnées à compter dans ce pays: la civile, avec les RG! Grave, très
de novembre 1981. Date où les socialistes (ces grave erreur qu’un certain mouvement, lancé dans
vertueux!) ont restructuré la Sécurité Militaire pour en une conquête démocratique du pouvoir, a déjà payé,
faire la DPSD! Bien au contraire même! Cela s’est et paiera encore, très cher!
intensifié puisque la restructuration était destinée à Cette implication militaire, dans les affaires
faire de la "vieillotte" SM une police politique militaire politiques intérieures de ce pays, est d’autant plus
moderne! C’en est à un tel point qu’aujourd’hui vraie qu’elle est aisément mesurable. En effet, qu’est-
l’armée est très impliquée dans des affaires de ce que l’on voit depuis quelque temps? Que c’est la
manipulation politique, dans des crimes politiques! La gendarmerie qui s’occupe d’affaires d’ordinaire
preuve avec "l’Affaire Devaux", cet assassinat dévolues, voire réservées, aux Renseignements
commis à Croisy le 7 mars 1986 et que j’ai relaté plus Généraux! Le cas le plus significatif, et qui est encore
haut! dans toutes les mémoires, c’est "l’Affaire des
L’existence même d’une cellule comme celle à Paillotes" en Corse. Des gendarmes, donc des
laquelle appartenait Devaux, suffit à donner une idée militaires (par conséquent l’ombre de la DPSD
de l’implication de l’armée en matière de police plane...), étaient bien constitués en unité de police
politique! politique pratiquant le terrorisme gouvernemental!
J’ai par ailleurs reçu, il y a quelque temps, le Même si mon exemple des paillotes est mauvais,
témoignage d’un ancien militaire qui, lui aussi, a été puisque dans cette affaire corse, ce n’est pas l’action
utilisé, récemment, par la DPSD dans des affaires de en elle-même qui est significative. C’est une
basse police politique ("surveillance/infiltration" de opération très banale pour qui connaît, et a été de la
mouvements politiques). En conséquence, l’utilisation DPSD! En revanche, ce qui l’est moins, c’est que des
de l’armée à des fins de basse police politique est arrestations d’agents soient ainsi révélées, détaillées
plus que démontrée. Elle ne fait aucun doute! au public, via les média. Si ces derniers en ont parlé,
Il faut que les naïfs ouvrent les yeux et réalisent c’est qu’ils ont été "autorisés" à le faire, sinon ils en
que l’armée qu’ils ont connue n’existe plus! auraient fait état de la même manière qu’ils ont traité,
Aujourd’hui elle ne défend plus la nation! Elle sert le en 1986, l’affaire de Croisy en faisant le silence sur
pouvoir politique qui, lui, est aux ordres de ceux qu’il l’appartenance du sergent Devaux à une unité très
est interdit de nommer! spéciale. Dans l’affaire Corse, sans doute qu'on a
La DPSD est d’autant plus utilisée par "certains", même donné des ordres aux journalistes pour qu’ils
qu’il faut bien voir que, pour les Renseignements "fassent mousse".
Généraux, c’est délicat de surveiller des dissidents Dès lors, cette "Opération Paillotes" semble bien
réfugiés à la campagne. La raison en est qu’en zone être un règlement de compte entre civils des RG (qui
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ont sous leur contrôle pas mal de "journalistes interpellé suite à ces provocations. Effectivement,
mondains") et militaires de la DPSD, puisque ces Michel Gouge (frère de Nicolas, lui aussi impliqué
deux polices politiques se détestent cordialement et dans cette affaire) fut prestement libéré, et par la
se font les pires vacheries afin de tenter de suite condamné (comme convenu, selon les dires de
discréditer l’autre! Decloedt) à seulement 6 mois de prison avec sursis
Restons donc plutôt dans les affaires dont les pour « association de malfaiteurs », alors que ces
média n’ont pas parlé, ou alors pour les présenter de attentats avaient causé un mort et plusieurs blessés
la façon qui arrangeait le plus les services très graves!
gouvernementaux qui en sont les auteurs. Comment ne pas faire le lien entre le dossier de la
J’ai relaté plus haut "l’Affaire Devaux", mais si SONACOTRA et "mon" affaire?
nous reprenions toutes les "affaires politiques En effet, j’ai relaté chapitre 9, section 1, de ce
criminelles d’extrême-droite" de ces dernières document que les armes et explosifs que nous
années, des affaires Arcini/Lajoye à Carpentras, en possédions, Arcini et moi, avaient été "récupérés"
passant par les attentats contre des foyers durant la garde-à-vue, après avoir transité par
SONACOTRA de la Côte d’Azur, nous constaterions l’antenne de la PJ de Caen. Exactement comme la
qu’il y a toujours un militaire, ou un ex-militaire, qui y DGSE a récupéré les armes et les explosifs utilisés
est impliqué. Jamais un bidasse de la "régulière", sur la Côte d’Azur dans les attentats contre les foyers
mais toujours un militaire d’une unité en cheville avec d’immigrés!
la DPSD! Troublant quand même! Et, justement, puisque le déménagement en
Je vais développer l’affaire de la SONACOTRA, Normandie a eu lieu en décembre 1987 (suite à mon
puis celle de Carpentras, pour illustrer ces propos. arrestation et l’auto-capture d’Arcini), comment ne
"L’Affaire de la SONACOTRA", pour ceux qui pas avoir à l’esprit que c’est peut-être bien "notre
auraient oublié ce dont il s’agit, je rappelle que ce matériel" qui a ainsi été transféré sur la Côte d’Azur
sont plusieurs foyers d’immigrés qui ont été plastiqué pour servir aux attentats contre la SONACOTRA qui
en 1988. On nous a présenté cela à l’époque, dans ont eu lieu en 1988. Nous retrouvons, dans cette
un battage médiatique auquel nous avons droit en salade niçoise, les mêmes ingrédients que ceux
pareil cas, comme des attentats perpétrés par des mitonnés en Normandie: les services spéciaux de
"néonazis". Singuliers "néonazis" aux vues du l’armée ; des policiers de la Police Judiciaire qui
rebondissement intervenu par la suite! opèrent des forfaitures ; la magistrature couchée qui
En effet, le Journal du Dimanche du 5 exécute les ordres et rend un verdict négocié par
septembre 1999 nous apprenait qu’en 1989, après avance ! Et en prime, une étrange similitude: comme
l’arrestation des poseurs de bombes, la DGSE (à ceux commis en Normandie, les attentats contre la
laquelle est liée la DPSD!) a "recélé" leurs matériels! SONACOTRA ont été revendiqués de façon sioniste!
La raison en est que l’un des terroristes, Michel Pour l’anecdote, je me permets de signaler que le
Gouge (le Arcini local!), appartenait à ce service! JDD du 5 septembre 1999, qui révélait le
D’après des informations que j’ai pu recueillir, c’est rebondissement dans l’affaire de la SONACOTRA,
un hallucinant concours de circonstances qui a mis tentait quand même d’atténuer les choses! Michel
en lumière ce rebondissement: un certain Huy Deléan, auteur de l’article, prenait pour argent
Decloedt, policier à Nice, fut interpellé en 1994 en comptant la version officielle qui veut que le dépôt
possession d’armes et d’explosifs. Son arrestation est d’armes et d’explosifs (d’où provient le matériel avec
due à une de ses amies trop bavarde au téléphone lequel Decloedt fut interpellé) soit un stock officiel de
(Big Brother vous écoute!). Pour ne pas plonger, ce la DGSE, mais… dissimulé dans une villa située sur
fonctionnaire du Ministère de l’Intérieur (qui a été les hauteurs de Nice!
jugé le 26 janvier 2000 à Paris pour « détention Tous ceux qui ont été militaires apprécieront ce
d’armes, de munitions et d’explosifs », je reviendrai "comique troupier" que le JDD a repris à son compte!
plus loin sur ce procès) s’est "confessé" à un juge D’ordinaire les soutes [ou dépôts] à munitions, et les
d’instruction auquel il a avoué avoir "emprunté" ce armureries de l’armée (qui plus est de la DGSE!) se
matériel dans un dépôt de la… DGSE! trouvent dans des établissements gardés
À ce niveau, ce n’est déjà pas banal! Mais là où militairement, jamais dans des villas de la Côte d’Azur
cela se gâte, c’est que l’analyse de l’explosif, que forcément peu sûres, puisque susceptibles d’être
détenait Decloedt, a révélé qu’il provenait du même cambriolées par des "jeunes".
lot que celui qui a servi à perpétrer les "attentats Il va de soi que cette cache azuréenne des
racistes" commis en 1988 sur la Côte d’Azur! Ce services spéciaux de l’armée a été constituée aussi
policier avait tout bonnement gardé par devers lui "officiellement" que celles qu’Arcini et moi possédions
une partie de l’armement que la DGSE a fait en Normandie et dont le contenu fut, lui aussi,
soustraire à la "justice"! récupéré.
Et je précise, pour faire bonne mesure dans cet Autre enseignement à tirer de ce rebondissement
incroyable imbroglio barbouzard, que c’est Decloedt dans l'affaire de la SONACOTRA: le contrôle que les
qui était chargé de coordonner l’enquête sur ces services exercent sur les média! C'est le moins que
attentats! Interrogé sur cette dernière, il a avoué l'on puisse dire puisque l'arrestation de Decloedt a eu
qu’un accord fut conclu, à très haut niveau, entre les lieu en 1994. Comment se fait-il qu'il ait fallu attendre
services spéciaux de l’armée, la PJ et la Justice afin 1999, soit 5 années après l'interpellation, pour
d’obtenir la libération de l’agent de la DGSE, qu'enfin un média officiel, en l'occurrence le JDD du
Mémoire de Michel Lajoye page 90
5 septembre 1999, en parle? Et comment ne pas Monfort qui a la particularité d'avoir été, jusqu'en
s'étonner que, dans un premier temps, il n'y ait que la 1985, juge d'instruction à Grasse. C'est-à-dire que le
presse militante qui se soit fait écho des "révélations2 président de la 17 ème Chambre Correctionnelle de
du JDD? Il a en effet fallu trois mois pour que la Paris, qui a jugé cet ex-enquêteur de la PJ de Nice,
grande presse reprenne à son compte ce que le JDD est quelqu'un qui a forcément travaillé avec ladite PJ,
du 5 septembre avait publié! et plus particulièrement avec Decloedt.
Et encore, ce ne fut "médiatisé" que parce qu'en Sans oublier que cette affaire implique aussi le
septembre 1999, à la suite du déballage opéré par le juge Murciano, qui est toujours en poste à… Grasse,
JDD, le Ministère public s'est senti contraint d'ouvrir et Farret, l'ex-procureur adjoint de… Grasse. C'est-à-
une nouvelle information contre les complices de dire que le premier a été un ex-voisin de bureau de
Decloedt qui, jusque-là, "étrangement", n'avaient pas Monfort, et le second l'ex-procureur auquel il était
été inquiétés! Cela a abouti, fin 1999, à la mise en soumis lorsqu'il était juge d'instruction à Grasse!
examen des consorts Jean-Pierre Murciano (le juge Pour le "comique" de la situation, et mesurer la
grassois qui a instruit le dossier des attentats contre vassalité de la presse qui n'a pas dénoncé ce procès
les foyers de la SONACOTRA) et Bernard Farret qui à très fraternel, il est bon que je mentionne que si
l'époque de ces forfaitures était le procureur-adjoint l'Institution judiciaire a fait dépayser ces affaires
de Grasse. Ces deux magistrats sont à l'affaire de la azuréennes à Paris, c'est pour ne pas faire juger les
SONACOTRA ce que la juge d'instruction Fabienne protagonistes par des magistrats de la même
Janocka et le procureur Yves Bot sont aux affaires juridiction que celle où ils officient, ou ont officié!
Arcini/Lajoye. La seule différence, c'est que les Difficile, en l'état, de jouer plus au Tartuffe!
seconds ne sont pas (encore?) mis en examen pour Et comment justifier le "saucissonnage" de la
« faux en écritures publiques »… procédure? Pourquoi avoir jugé, en janvier 2000,
Je stipule bien que cette instruction (ouverte en Decloedt alors qu'une instruction visant ses complices
septembre 1999), visant Farret et Murciano, concerne Farret et Murciano est encore en cours? Elle pourrait
les mêmes faits que ceux qui ont été instruits (à partir mettre en lumière des faits nouveaux qui éclaireraient
de 1994) contre Decloedt. La procédure a été le rôle joué par Decloedt. Or on ne peut être jugé
"saucissonnée", et le volet du dossier concernant les deux fois pour les mêmes faits. Un procès commun
deux robins est donc encore pendant. C'est même aux trois protagonistes s'imposait, et, évidemment,
parti pour durer longtemps, très longtemps. Sans devant un autre magistrat que leur ami (et sans
doute jusqu'à un oubli total. Voire un "égarement" du doute F .˙.) Monfort!
dossier (comme dans l'affaire de la secte de l'Eglise Cependant, ce procès Decloedt (qui a duré 8
de Scientologie…) qui le fera classer. heures!) aura quand même permis d'en apprendre un
Quoi qu'il en soit, le procès du lampiste Decloedt peu plus sur ces attentats de la Côte d'Azur, et cela
(et de lui seul!) s'est tenu le 26 janvier 2000 au Palais en dépit des diversions de Monfort qui, dès que les
de Justice de Paris, devant la 17 ème Chambre débats arrivaient sur un point embarrassant, gratifiait
Correctionnelle présidée par Jean-Yves Monfort. Les l'assistance d'une saillie de diversion. Le prévenu, qui
débats furent, bien évidemment, totalement occultés de son côté faisait monter la pression pour obtenir un
par les "grands média"! Pourtant, la DGSE impliquée verdict clément, a donné des détails fort intéressants
dans des attentats commis en France; la PJ et les sur ces explosions. Il a notamment affirmé que le
RG complices; plus la "justice" qui entérine le tout: ce système de mise à feu des bombes était composé,
n'est quand même pas rien! Cela aurait dû, en toute outre d'un détonateur pyrotechnique, de mèche lente
objectivité, alimenter la chronique journalistique et d'un boutefeu militaire. Accessoires que des
durant un "certain temps"! amateurs, comme ceux qui ont (officiellement…)
Ce mutisme des média, sur un pareil perpétré ces actions, pouvaient difficilement se
rebondissement concernant des "attentats racistes", procurer sans une "certaine aide".
contraste par rapport à l'hystérie qui s'est emparée C'est encore plus vrai pour l'explosif utilisé:
des journalistes après "l'affaire des paillotes" en artisanal à base de chlorate de soude selon la
Corse… Preuve, comme je l'indiquais précédemment, version officielle servie, en 1992, lors du procès des
que l'affaire Corse est avant tout un règlement de poseurs de bombes; coupé avec de la Pentrite selon
compte (pour neutraliser le préfet Bonnet qui Decloedt qui s'est exprimé récemment sur le sujet. Et
s'intéressait d'un peu trop près à la barbouze Yvan lorsque l'on voit, sur photos, les dégâts provoqués
Colonna?), sinon elle aurait été traitée en sourdine, aux foyers de la SONACOTRA, difficile de croire qu'il
comme l'arrestation, puis le procès et la n'y avait que du désherbant dans cette bombe! Seul
condamnation de Decloedt! un explosif surpuissant comme de la Pentrite peut
Si le procès de ce dernier s'est tenu le 26 janvier causer de tels dommages.
2000, ce n'est que le 1 er mars que le verdict fut Or, la Pentrite est à l'explosif ce que le caviar est
rendu. Il est très modéré puisque cet ex-enquêteur à l'alimentation. C'est l'explosif le plus puissant, et
de la PJ de Nice (il est aujourd'hui fonctionnaire des surtout le plus coûteux dont dispose l'armée! Rares
RG du Var!) a été condamné à un an de prison avec sont les unités qui en ont en dotation, l'armée (qui
sursis et non suspension, encore moins révocation, est économe…) utilise plutôt du plastic classique. Ce
de la police! qui démontre, par ce matériel que n'ont donc pas les
Ce verdict n'est pas une surprise, puisque comme unités régulières, que ceux qui ont fait sauter ces
je l'ai indiqué, le Tribunal était présidé par Jean-Yves foyers d'immigrés étaient bel et bien approvisionnés
Mémoire de Michel Lajoye page 91
par des services spéciaux, et appartenaient même, bloc de béton au pied, et divers projectiles dans la
pour au moins l'un d'entre eux, auxdits services. Lors tête… Mais, pas de quoi intéresser les média!
de son procès, Decloedt a confirmé que l'un des Pensez donc, des broutilles que tout cela!
protagonistes, Michel Gouge, appartenait Des protagonistes survivants (c’est bien le cas de
effectivement à la DGSE. Ce qui n'empêche pas la le dire!), et qui seront jugés en 1997 pour cette
grande presse, et plus particulièrement Le Monde carpentrasserie, on trouve un certain Olivier Fimbry.
("journal de référence"), de continuer à nous le Ce dernier, en 1990, au moment de la profanation,
présenter comme un "prétendu agent". On voit qui était "militaire appelé"! Caserné en Allemagne. À
tient la laisse des journalistes mondains28… cette époque, Fimbry était dûment fiché comme
Par ailleurs je signale, toujours dans le cadre de "activiste néonazi"! Ce qui ne l’empêchait nullement
cette "Affaire SONACOTRA", qu'en décembre 1999, d’accomplir son service militaire…
peu avant le procès de Decloedt, j'ai écrit au juge Mais, encore plus étonnant, à l’issue de son
parisien Michèle Colin. Cette dernière était chargée service national, Fimbry devient militaire de carrière,
de l'instruction de la partie Murciano/Farret de ce qui plus est: sous-officier instructeur. Ce qui aurait été
dossier, et je voulais lui signaler toutes les similitudes rigoureusement impossible sans "certaines
qu'il y avait entre les attentats commis en Normandie protections"! Jamais l’armée n’aurait accepté dans
en 1987 et ceux perpétrés sur la Côte d'Azur en ses rangs un tel individu fiché de la sorte (son nom
1988 (cibles et revendications similaires, était apparu lors de l’enquête initiale sur la
protagonistes qui viennent des mêmes milieux, carpentrasserie...), s’il n’avait été qu’un "militant
implications des services, disparitions d'armes et néonazi"!
d'explosifs, etc…). Ma missive était accompagnée Pour un engagement il y a une période de
d'un exemplaire de ce présent mémoire, arrêté dans probation de 3 mois (6 mois pour les engagés qui
sa version décembre 1999. Ce document a fort sont encore mineurs), et si durant cette période
intéressé le magistrat puisqu'elle a même déploré, l’engagé peut résilier son contrat sur simple décision
par la suite, que sa hiérarchie n'ait pas étendu sa de sa part, c’est aussi valable dans l’autre sens.
saisine à ces "affaires normandes". Puis, à la mi- L’armée peut mettre fin à un contrat dans les 3
janvier 2000, rebondissement, ou plus exactement premiers mois sans donner de raison. Chose très
vaporisation du juge Colin! simple à faire avec Fimbry, car comme il avait déjà
En effet, mi-janvier 2000, quelqu'un a voulu lui accompli son service national, l’armée n’aurait même
téléphoner au Palais de Justice de Paris, mais on a pas eu à le garder pour qu’il effectue celui-ci.
répondu que Michèle Colin n'était plus là, qu'elle a Alors, on ne me fera pas croire que ce Fimbry
quitté les services de l'instruction début janvier, n’était pas en "contact" (pour ne pas dire plus...)
comme convenu "de longue date". Pourtant il avec la DPSD!
semblerait que cette juge ne comptait, apparemment, En outre, il était sous-officier instructeur, ce qui me
pas quitter son poste, du moins pas si rapidement: semble étrange vu sa personnalité, du moins celle
c'est elle-même qui avait fixé ce rendez-vous à cet affichée au Tribunal lors du procès de 1997 (mais il
interlocuteur pour la mi-janvier! Et comment peut-on faisait peut-être le demeuré!). Car il donnait l’image
croire qu'un dossier ultrasensible comme celui qui d’un simplet, particulièrement benêt, qui ne savait
vise Murciano, Farret et la DGSE, aurait pu être même pas ce qu’il y a eu le 8 mai 1945, ni ce qu’est
confié en septembre 1999 à un juge sur le départ le 14 juillet… Ce qui fait difficilement crédible! Car je
pour janvier 2000? À la fin 1999, ce dossier était me demande bien comment il a pu passer les tests
devenu si explosif, que le juge Colin s'était faite de sélection pour être sous-officier, étant entendu
assister de sa consœur Muriel Josié. On s'orientait, à qu’il faut un "NG" d’au moins 14/20 pour accéder à
très court terme, vers un déballage judiciaire de ce rang. Qui plus est, pour être sous-officier
"l'Affaire Lajoye", via celle de la SONACOTRA! instructeur, il faut avoir soi-même une certaine
Mais…ouf on respire, il n'en sera rien, puisque c'est instruction!
dorénavant un certain Charbonnier qui remplace, à Alors Fimbry a forcément dû soit passer par une
lui seul, ses consœurs Colin et Josié. école militaire (Saint-Maixent) ; soit être plus que
Venons en maintenant à Carpentras: une "pistonné" par la DPSD pour se retrouver à ce poste.
profanation est découverte le 10 mai 1990. Les Il faut bien voir qu’avec le chômage de l’époque,
auteurs en seraient, soi-disant, cinq hommes d’un l’armée des années 80 et du début des années 90,
groupe animé par un certain Jean-Claude Gos. Ce regardait un peu qui elle engageait et elle pouvait se
dernier sera mystérieusement tué le 23 décembre permettre de sélectionner…
1993, par Rachid Belkir, dans un "accident" de la Dans la carpentrasserie, tout le monde est bien
route (très similaire à celui de "l’Affaire Saint- d’accord pour y voir l’implication de la police politique,
Aubin"...)! Belkir, quant à lui, sera retrouvé le 16 mais tous regardent du côté des RG. Ce qui est, là
septembre 1995 faisant trempette dans le Rhône, un aussi, à mon humble avis, une très grosse erreur.
Seule la revue Révision et Alain Guionnet ont
28
Dans ce mémoire, j'ai déjà fait état du livre Guerres secrètes à précisé qu’il faudrait enquêter du côté de ce Fimbry,
l'Élysée (aux Éditions Albin Michel) signé du capitaine Paul Barril. Mais militaire assez spécial… Tellement spécial qu’il
je le recommande aussi pour la retranscription d'écoutes téléphoniques pourrait bien être membre d’un service de la même
qui concernent des conversations entre des journalistes du Monde et
ceux qui leur donnent leurs ordres. Cela instruira ceux qui croient encore texture!
que la presse est libre et non soumise à des "maîtres occultes".
Mémoire de Michel Lajoye page 92
Je pourrais citer d’autres exemples que ceux de la puisque policier au "prestigieux" OCTRIS (brigade
SONACOTRA et de Carpentras, ce n’est pas ce qui anti-stupéfiants).
manque! Dans toutes les affaires médiatisées à Or, par la suite, il fut découvert que le président
outrance ces dernières années, et utilisées entre du FNP était en réalité un agent des services
autres contre le Front National, l’implication de la spéciaux de l’armée!
police politique militaire apparaît! Dès lors, avec cet exemple, nous voyons qu’un
Tout cela démontre que penser obtenir la révision fonctionnaire du Ministère de l’Intérieur peut se
de mon procès, c’est se bercer d’illusions! Nous révéler être, au final, un agent de la DGSE/DPSD. Et
venons de voir que si l’on commence à "sortir" mon force est de constater qu’Arcini est le clone parfait de
affaire, toutes les autres sont à "ressortir"! Pas Jamet!
uniquement les affaires d’extrême-droite, car, en Que l’on en juge par les similitudes: au moment
face, chez nos camarades de la gauche antisioniste, de son arrestation, Jamet était fonctionnaire du
il y a aussi un tas de "cellules de manipulation" qui Ministère de l’Intérieur (comme Arcini!) ; chargé
sont actives. d’infiltrer l’extrême-droite (comme Arcini!) ; passé par
Par ailleurs, certaines personnes, après avoir lu l’Œuvre Française (comme Arcini!) et non couvert
un premier tirage du mémoire, m’ont suggéré suite à une mission un peu plus pourrie que les
qu’Arcini aurait pu être manipulé par un groupe autres (comme Arcini!).
sioniste opérant au sein du Ministère de l’Intérieur 29. Je sais en outre que les deux agents se sont
C’est possible. Je n’ai pas à rejeter cette côtoyés. Dans le chapitre 1, à la fin de la section 4,
hypothèse. Arcini était un agent, c’est évident, mais j’ai évoqué ma présence, en octobre 1984, dans un
de quel service précisément? Il était du Ministère de camp "paramilitaire" (si je puis dire...) qui était
l’Intérieur, mais c’est vague! Et ce n’est pas parce organisé en forêt de Fontainebleau. Je m’étais rendu
quelqu’un est du Ministère de l’Intérieur qu’il ne à ce rassemblement en compagnie d’Arcini, qui y a
travaille pas en fait pour les services spéciaux de retrouvé quelqu’un qu’il connaissait apparemment
l’armée. Je sais que cela peut sembler étonnant, bien. Cette personne m’était à l’époque inconnue,
surtout lorsque l'on connaît la rivalité entre ces deux mais j’ai pu l’identifier, 13 ans plus tard, grâce à une
services. Je vais donc démontrer que ce n'est pas photo parue dans National Hebdo, qui consacrait un
parce qu'Arcini était officiellement fonctionnaire du article au FNP: il s’agissait de Frédéric Jamet!
Ministère de l'intérieur qu'il n'était pas, en réalité, une Par conséquent, Arcini/Jamet, Jamet/Arcini, sont
barbouze de celui de la Défense: interchangeables. Même si l’un a été plus malin que
En février/mars 1998, il y a eu une affaire qui a son collègue, puisque Jamet fut remis en liberté
défrayé la chronique puisqu’elle intervenait, comme courant 1999 (après plus d’une année de détention
par hasard, peu de temps avant les élections préventive). Il a visiblement su se garder par devers
régionales. Il s’agit de Frédéric Jamet, président- lui des garanties pour négocier une "libération
fondateur du syndicat Front National Police, qui fut provisoire" en attentant un hypothétique procès qui
interpellé, en compagnie d’autres, puis mis en mis en n’aura, sans doute, jamais lieu!
examen pour des actes relevant pour certains de la Ce qui me fait croire que le procès ne s’ouvrira
Cour d’Assises: braquages (pour, semble-t-il, financer jamais, c’est qu’il s’est déroulé quelque chose de
des activités barbouzardes) détention d’armes, significatif et qui démontre la puissance des services:
d’explosifs, liens avec ce qui furent les GAL, etc, etc, lors de l’arrestation de Jamet, en février/mars 1998, la
la liste était très longue… presse grand public avait quand même copieusement
Ce Jamet, au moment de son arrestation, était, parlé de ce "policier ripoux", président-fondateur du
officiellement, fonctionnaire du Ministère de l’Intérieur FNP (mais en se gardant bien de préciser qu’en
réalité Jamet était un agent de la DGSE/DPSD,
chargé d'infiltrer le FN!). Cette médiatisation allait de
29 soi, puisqu’il fallait bien nuire un peu, juste avant les
C'est aussi l'hypothèse qui est développée dans le livre L comme
Lajoye – Analyse d'un complot d'État (voir bas de page 55 de ce document élections régionales de mars 1998, à ce qui était à
pour avoir l'adresse de l'éditeur). Henri de Fersan y écrit qu'Arcini a pu l’époque le FN unifié. Et, ce qui est révélateur, c’est
être sous les ordres de Sarah Ouaknine (qu'il désigne, pour éviter les que des personnes ont voulu aller rechercher, à ma
procès, sous le pseudonyme de "Champagne"). Cette fille et sœur de
rabbin, commissaire aux RG, dirigeait au Ministère de l'Intérieur les demande, sur les sites Internet des agences de
"Libertés Publiques", c'est-à-dire en bon français: le service de la censure presse et des journaux qui en avaient parlé à
d'État (interdiction de livres, revues, mouvements politiques, et l’époque, les dépêches et articles divers concernant
éventuellement actions/provocations pour monter l'opinion contre les
partis nationalistes…). Elle a finalement démissionné (des états d'âme?) ce policier. Mais… de Jamet, il n’y a point, ou plus
de son poste pour devenir juge à l'application des peines à Châteauroux. exactement: il n’y a plus!
Elle y est morte peu après (en janvier 1999), renversée en plein jour par Non seulement il a été remis en liberté, mais Big
un "chauffard" qui n'était pas ivre, dont on connaît le nom et qui, à ma
connaissance, n'a jamais été poursuivi pour ce "Crime contre Brother a gommé la tache, car si on consulte les
l'Humanité". Cette mort est quand même étrange, car elle fut à peine archives Internet de la presse de l’époque, il n’y a
relatée par la presse locale (un petit entrefilet qui jouxtait la rubrique jamais eu d’"Affaire Jamet"!
"fourre-tout" encore appelée "chiens écrasés"). Or, compte tenu des
fonctions qu'avait occupées l'écrabouillée (de ses origines!), cela aurait Quoi qu’il en soit, partant du fait où Jamet est le
dû faire un "certain bruit", y compris (surtout!) dans la presse clone parfait d’Arcini, bien malin celui qui pourrait dire
"parisienne". On a semble-t-il ordonné de ne point parler de ce qui semble pour quel Ministère, Intérieur ou Défense, travaillait
bien être une "liquidation" de quelqu'un qui en savait trop sur 15 ans de
barbouzeries en France, et qui semblait devenue "psychologiquement mon co-accusé! Il était d’un service, c’est évident.
fragile"… Mais est clair qu’il n’était pas du service lui assurant
Mémoire de Michel Lajoye page 93
une totale impunité puisqu’il s’est retrouvé en tôle et militants, et cela avec le concours des services qui le
y est encore! A-t-il fait du zèle? A-t-il pris des tiennent toujours!
initiatives personnelles qu'on ne lui a pas Ce dont il s’agit est "banal": Arcini a fait parvenir
pardonnées? A-t-il commis une "bavure" inexcusable un message à "quelqu’un". Ce document, bel et bien
en abattant Moussaoui au lieu de Rahmani? Le rédigé par celui qui fut mon camarade, disait qu’il
mystère demeure entier! fallait aller récupérer des armes et des explosifs dans
Cependant, Arcini était d’un service qui l’a fait une cache clairement mentionnée sur un plan qui
bénéficier d’un arrangement. Car après l’attentat de était joint.
juin 1987, il s’est fait arrêter, mais il fut relâché Or, ladite cache en question fut vidée le samedi
comme l’a précisé la presse locale de décembre 12 décembre 1987, lors de la garde-à-vue (cf.
1987! Ils l’ont arrêté, mais lui ont "arrangé le coup" chapitre 9, section 1 de ce mémoire).
en échange d’une aide pour me "faire tomber"! Donc, elle ne pouvait plus contenir d’armes et
Ce qui expliquerait, de ce fait, ses menaces de d’explosif après! Sauf… si la police politique en a
faire des "révélations" qu’il a agitées régulièrement… remis dans le but de servir de gruyère pour attraper
En effet, au procès de Caen, la pression a monté quelques souris…
de part et d’autre. Ceux qui tenaient Arcini en laisse Aucune confusion n’est possible: c’est bien Arcini
voulaient bien lui faire comprendre que s’il "faisait le qui a fait parvenir le message et le plan! Il ne s’agit
con", s’il "mangeait le morceau", il allait "morfler"! pas de gens qui se sont fait passer pour lui. Il a été
Pour ce faire, on aurait ressorti ses autres affaires déterminé de façon irrécusable, qu’il y a eu complicité
puisque je suis persuadé qu’il en a commis d’autres, active de sa part dans cette tentative visant à "faire
et que s’il n’avait pas "joué le jeu", on le jugerait pour tomber" des militants!
tout! Dès lors, il aurait été condamné à au moins 4 à Dans le cas de cette "récupération" d’armes et
5 fois (si ce n’est plus!) perpétuité avec 30 ans de d’explosif demandée par certains, via Arcini, je peux
sûreté à chaque fois. prédire ce qui se serait sans doute déroulé:
Mais Arcini, loin d’être un idiot, a aussi fait monter Soit une fois le matériel récupéré les militants se
la pression de son côté lors du procès de Caen! À seraient fait appréhender. Dans ce cas, je suis
plusieurs reprises il a agité le « je pourrais faire des persuadé que les armes que les services avaient
révélations » en se mettant à parler de "groupes remis dans cette cache sont celles qui ont servi à
sionistes" avec qui il était en contact, et d’origine de d’autres actions, idem pour les explosifs (lot identique
ses actions qui prennent leurs sources dans les à celui utilisé lors de certains attentats). De ce fait, les
attentats commis à Paris en 1986… Qu’est-ce qu’il "récupérateurs" se seraient fait imputer ces affaires
voulait dire par là? Que ces attentats n’ont pas été criminelles, puisque qu’interpellés avec l’armement
commis par ceux qu'on a désigné comme coupables? ayant servi à les perpétrer.
Mon co-accusé faisait, sans doute, cela pour bien Soit, c’était plus subtil! Car cette récupération
montrer à ceux qui le tenaient en laisse que s’ils ne devait fournir, à un "commando", le matériel pour
tenaient pas parole (sur le "petit arrangement"...), il permettre "l’exfiltration" d’Arcini, ainsi que celle d’un
allait tout déballer! Il a brandi cette menace de droit-commun détenu avec lui. Si cela s’était
"révélations" à plusieurs reprises, de façon concrétisé, sans doute que cette libération aurait
récurrente: dès que cela sentait le roussi pour lui… réussi (certains services auraient tout fait pour la
C’était donnant-donnant: « Verdict clément ou je faciliter!), l’oiseau se serait envolé, mais pas le
balance tout »! "commando" (et sans doute le "droit-co") qui, eux,
Cependant, il ne peut être exclu qu’Arcini ait été, auraient été arrêtés.
au final, le dindon de la farce kashère… Il est plus Ainsi les services s’en sortaient "avec le cul
que probable que "l’arrangement" prévoyait, outre un propre", leur agent était "exfiltré", et en prime ils
verdict mesuré, une discrète libération une fois faisaient mettre en taule des militants, et surtout un
l’affaire tassée. Mais il l’attend toujours! Ce qui en particulier qui était visé par ce piège!
confirmerait que, comme l’a si bien dit Pasqua qui Car ce dernier avait bien pour but de faire mettre
était le ministre de tutelle d’Arcini au moment de ces en prison une personne précise! Heureusement, les
attentats: « Les promesses n’engagent que ceux qui activistes contactés, par Arcini (et ses complices!)
les reçoivent »! pour constituer le "commando", ont flairé la
Dès lors, qu’Arcini ait été manipulé par des manipulation.
groupes sionistes, c’est fort possible. Il a lui-même Avec cette affaire de récupération, nous avons
manipulé, c’est clair! Puisque pour me "faire tomber", quand même bien la preuve, qu’une fois en prison,
il a fallu qu’il participe activement. Mais le ou plus exactement: que même incarcéré, l’agent-
manipulateur a pu se faire manipuler par plus provocateur Arcini continue (contre quoi? Quels
vicieux… avantages? Quelles promesses?) a être un zélé
Et pour éclairer le comportement de mon co- serviteur des services! Quelle abnégation de la part
accusé, je signale que, même en prison, il n’est de celui qui fut mon compagnon d’armes!
apparemment pas dégoûté du tout de ses Pour conclure, je vais parler un peu de ce qui
mésaventures, puisqu’il continue à servir! s'est déroulé durant ma détention. Dans le chapitre
C’est indéniable puisque je peux démontrer qu’il 9, à la fin de la section 3, j'ai évoqué rapidement les
a, depuis son lieu de détention, tenté de piéger des recours déposés devant la juridiction administrative.

Mémoire de Michel Lajoye page 94


Je vais détailler, car c'est lié à mon affaire, et cela à n'en avais pas plus écrit que lors des précédentes
sa place dans ce mémoire. années!
Ce qui a motivé ces recours administratifs, ce sont En revanche, dans divers numéros de la revue
des censures arbitraires sur mon courrier. Des L'Empire Invisible parue tout au long de 1992, il y
détournements, pour ne pas dire des vols, de avait des articles qui revenaient sur mon affaire. Pour
correspondance. Pour sa défense, notamment la première fois, l'hypothèse de la manipulation d'Etat
devant la Cour administrative d'Appel de Nancy, le était avancée publiquement. Ces articles accusaient
Ministre de la Justice a présenté des "notes" qui des institutions, notamment les Ministères de
datent de 1992. On y apprend ainsi que le directeur l'Intérieur (tiens, tiens!) et de la Défense,
de cabinet du Ministre de l'Intérieur a demandé à son Et, comme par hasard, c'est peu de temps après
homologue de la Justice de mettre en place une ces parutions, que le directeur de cabinet du Ministre
censure sur mon courrier. Fichtre! Depuis quand le de l'Intérieur réclama une stricte censure sur mon
Ministre de l'Intérieur demande à son directeur de courrier selon des critères tellement inavouables qu'ils
cabinet de contacter son alter ego de la Justice pour n'ont pas été transmis par écrit, mais par téléphone…
interférer sur les conditions de détention d'un Difficile de ne pas y voir un lien de cause à effet!
détenu? Cela laisserait à penser que mon courrier Dès lors, il semble bien qu'après la publication
portait (porte!) atteinte à la sécurité dudit Ministère de d'articles dans L'Empire Invisible, on ait eu peur
l'Intérieur (ou de ceux qui lui donnent des ordres…)! que je ne me mette à collecter des renseignements.
Mais qu'est-ce que ces gens ont à cacher? Craignait- Et, effectivement, cette censure politique, qui me
on que je ne découvre quelque chose de gênant privait de la réception d'une grande partie de mon
pour eux ? courrier (contenant "certaines informations"…), m'a
Quant aux critères de cette censure politique (il pénalisé. Ce fut une véritable atteinte aux droits de la
faut appeler ça par son nom!), ils ont été transmis défense, car on m'empêchait de communiquer avec
verbalement, par téléphone, si l'on en croit le "certaines personnes", et l'on m'interdisait, ni plus ni
contenu d'un document produit par la défense du moins, de recevoir "certaines lettres et documents"!
Garde des Sceaux devant la Cour administrative À cause de cette censure politique, ce n'est qu'en
d'Appel de Nancy. C'est dire si ces critères sont 1997 que j'ai pu produire la première édition de ce
gênants puisque le Ministère ne voulait pas en laisser mémoire. Sans les ordres ministériels de détourner
de trace écrite. En 1992, on s'est contenté de une partie de mon courrier, c'est sans doute dès
téléphoner au directeur de la prison d'Ensisheim, où 1993 que j'aurais pu produire une première mouture
je suis détenu, pour lui "expliquer" ce qu'il ne devait de ce document!
pas laisser "passer" dans mon courrier. Et encore, si ce mémoire a pu être rédigé, c'est
Officiellement, cette censure fut demandée pour parce Maître Éric Delcroix (qui est mon avocat depuis
m'empêcher d'écrire des articles dans diverses 1995) a "dégagé la voie". C'est lui qui a, en effet,
revues. Ce qui n'est pas crédible, car la prison engagé des procédures contre ces censures
détournait plus fréquemment ce qui venait de arbitraires en assignant le Ministre de la Justice. Cela
l'extérieur que ce que je voulais y envoyer. C'est-à- s'est soldé par deux condamnations du Garde des
dire qu'il semble plus que ce qu'on voulait, c'est Sceaux prononcées par le Tribunal administratif de
m'empêcher d'apprendre quelque chose en le Strasbourg. La première fut rendue le 20 février 1998
recevant… (audience du 19 précèdent); la seconde le 15
Par ailleurs, cette censure renforcée (mon courrier septembre 2000 (audience du 30 juin de la même
était contrôlé par la direction même de la prison!), n'a année). Dans le premier cas, il me fut octroyé 8000
été demandée qu'au second semestre de 1992, de dédommagement + 5000 francs pour les frais;
alors que je suis en prison depuis 1987 et que j'ai dans le second 5000 francs pour les frais.
toujours écrit des articles depuis mes lieux de Dès fin 1995, dès 1'ouverture des procédures par
détention. Certains furent même primés par divers Maître Delcroix, les censures avaient quasiment pris
tribunaux, puisque olivier Devalez, directeur des fin, car on se méfiait de ce recours qui était instruit
publications qui en publiaient, a été condamné à par le Tribunal administratif. Cette pause dans les
plusieurs reprises à de la prison ferme. Je n'avais pas détournements de courrier m'a permis de collecter
été poursuivi à l'époque par le Parquet puisque une bonne partie des renseignements (mais pas
l'auteur d'un article n'est que le complice. C'est le tous!) dont j'avais besoin pour écrire ce présent
responsable juridique de la revue qui est pénalement mémoire. Mais ça et là, de fin 1995 et début 1998, la
considéré comme auteur principal du délit de presse. prison pratiquait encore 1'arbitraire et retenait des
Par conséquent, dès 1989, et encore plus en lettres et documents très importants, au risque
1990, le Ministère de le Justice savait que j'écrivais d'aggraver leur cas compte tenu de la procédure
des articles depuis ma cellule, puisque le Ministère administrative qui était en cours! C'est la première
Public diligentait des poursuites, et condamnait condamnation du 20 février 1998 (à me verser un
régulièrement à de la prison ferme Olivier Devalez qui total de 13 000 francs) prononcée contre le Ministre
les publiait. Ce n'est donc pas ça qui a fait que, de la Justice qui a mis fin à toutes ces pratiques
subitement en 1992, le directeur du cabinet du arbitraires.
Ministre de l'Intérieur a pris la plume pour contacter Ce qui veut dire que depuis février 1998 je suis un
son confrère de la Justice. Surtout qu'en 1992 je détenu libre… de faire rechercher des informations
sur ce qui a abouti à sa condamnation! Mais pour en
Mémoire de Michel Lajoye page 95
arriver à ce qui est un droit élémentaire de la découvrir! Pour les obtenir il a fallu livrer une lutte
défense, il a fallu que Maître Delcroix fasse acharnée afin de vaincre une censure politique, mise
condamner, en personne, le Ministre de la Justice! en place, je le rappelle, par décision ministérielle
C'est dire si ce mémoire que vous avez lu contient spéciale !
des informations qu'on ne voulait pas me voir
_________________________________

Voilà pour "l’Affaire Lajoye". Dans ce mémoire, je n’ai fait que relater ce que j’ai commis,
ce qui s’est déroulé en parallèle, ce que j’ai vu et entendu au procès de Caen en juin 1990.
Je ne prétends pas détenir toute la vérité. Certains pans de cette affaire ont pu m’échapper,
d’autres ont pu être mal interprétés.
Mais, sur le fond, il est impossible de balayer tout cela! Les faits parlent d’eux-mêmes!
Ces derniers doivent, surtout, avoir des vertus pédagogiques afin de montrer qu’ils nous
livrent une lutte à mort et qu’ils nous mènent cette guerre en utilisant tous les moyens!

Achevé en avril 2001, à la Maison Centrale d'Ensisheim


(Haut-Rhin), dans ma 14ème année de détention…

Version Digitale 2.8 © Michel Lajoye, août 2001


Reproduction autorisée et encouragée, revente interdite

Édité et mis en ligne par:

L'Église Mondiale du Créateur


P.O. Box 2002
USA – East Peoria, IL 61611
http://www.creator.org
http://www.wcotc.com/France

Mémoire de Michel Lajoye page 96


La Santé, le 12 octobre 1999
à Michel Lajoye

Cher Camarade,

Je viens d'entrer dans ma 50 ème année.


Peu avant minuit, j'ai regardé sur la chaîne câblée sioniste "Planète", un reportage sur
le "Che" en Bolivie, qui m'a plongé dans une courte rêverie, nostalgique de mon
adolescence, quand j'achevais de charger, dans l'exemple du "guerrillero heróico", mes
batteries révolutionnaires, lesquelles fonctionnent toujours à fond, renouvelant leur énergie
dans l'inépuisable source qui jaillit de l'esprit de chaque vrai militant de la Révolution.

Ta première carte postale (du caricaturiste Konk) était datée du 24 décembre 1997,
immédiatement après le verdict programmé des Assises de Paris. S'en est suivi une
correspondance régulière après ma brève enquête de moralité sur toi, auprès de
connaissances mutuelles.
Je découvre qu'un garçon de 20 ans fut condamné à la perpétuité avec 18 ans de
sûreté, pour avoir déposé un pétard dans un café maure de Petit-Quevilly, sans avoir fait de
blessé, ni causé de dégât.
Or, ce jeune homme termine ses missives avec des sonores "amitiés Nationales-
Socialistes".
À priori, il doit être une sorte de "cuir" ivrogne au crâne rasé, tatoué et "piercé",
consommateur de substances interdites, mal lavé et mal rasé, sadomasochiste bisexuel,
maniaque du fouet, sataniste profanateur de tombes israélites... ouf!
Mais, il était soldat, agent de la Sécurité Militaire en action commandée!
Il paraît être un vrai nazi ; à son âge?
L'image de feu mon beau-père Otto Kopp m'apparaît, d'après les monologues de sa
fille favorite, la cadette, mon épouse Magdalena, gauchiste allemande aujourd'hui devenue
repentie, qui ne pouvait s'empêcher d'aimer son père, nazi dès ses 16 ans, "Partei Genosse"
avant 1933, un des premiers 100 mille (son svastika d'or l'atteste), ancien du "Sturm
Abteilung" des temps durs, grand blessé au front russe, vétéran des transmissions, qui a
terminé en poste au centrale téléphonique d'Ulm, et est sorti indemne de l'occupation ; cet
homme doux, chef pâtissier de formation, qui n'aurait fait de mal à personne, chaque soir à la
"fermeture" du "Kneipe" de sa propriété dans la banlieue d'Ulm, restait avec ses camarades
du coin (policiers en ronde nocturne inclus) pour ressasser leurs exploits de jeunesse et les
bons jours de fraternité, avec soirée bien arrosée les 20 avril.
Pour nous, les communistes, le nazisme est l'ennemi, ou plus exactement, il l'était.
Mon père a bien caché un client escroqué par un curé indigne, en découvrant que c'était
un Allemand recherché, et lui a fait passer la frontière vers la Colombie avec un garde-du-
corps croate et un chien berger allemand.
En 1965 est tombé héroïquement en Saint-Dominique, sous le feu des Yankees, le
Capitaine italien Ilio Capozzi, qui fut détaché auprès des nageurs de combat des "Waffen SS"
et portait leur tatouage fièrement sous l'aisselle ; réfugié chez le dictateur Trujillo, il fonde,
entraîne et commande le corps des hommes-grenouilles, meilleure unité de commandos
d'Ibéroamérique. à la tête de ses hommes, il défendit la Révolution Constitutionnaliste,
payant de sa vie sa dette de gratitude envers le peuple dominicain, sans renier ses idéaux de
jeunesse.
Des anciens "Frei Arab" ont combattu à nos cotés en Jordanie en 1970/71, ils gardaient
intacte leur mystique guerrière.
Mes relations avec mon cher camarade disparu François Genoud, appartiennent à
l'Histoire, il s'est battu pour les bonnes causes sans renier ses idéaux.
J'ai reçu pendant des années des renseignements des services de police régionale
("LKA") d'Allemagne Fédérale, grâce à des anciens des "Waffen SS" qui avaient gardé une
profonde sympathie pour la Cause Palestinienne, suite à leur compagnonnage d'armes avec
Mémoire de Michel Lajoye page 97
les fidèles du grand Mufti de Jérusalem, Hajj Amine El Hesseini. Et là je suis tombé sur un
obstacle insurmontable: toutes nos tentatives d'établir in situ un système permanent de
communications avec ces vieux militants nationaux-socialistes, ont été infructueuses devant
les réactions de quasi-hystérie de nos camarades et sympathisants légaux en Allemagne.
Quel gâchis!

La guerre s'est terminée en 1945, et par héritage, j'appartiens au camp des vainqueurs.
Je ne suis pas la mode en reniant mes idéaux communistes, je les revendique.
Je n'arrive pas à comprendre le volet raciste de l'idéologie nationale-socialiste.
Aujourd'hui les peuples d'Ibérie et d'Amérique célèbrent le "Jour de la Race", en
référence à notre métissage amérindien-africain-ibérique, dans chaque anniversaire de la
découverte de l'Amérique.
Je ne connais qu'une seule race, la race humaine, composée d'ethnies plus ou moins
mélangées.
Je suis internationaliste et "fédayi" palestinien, tout en étant patriote vénézuélien, et je
lutte pour que les peuples puissent sublimer leurs cultures, espoirs et ambitions, dans des
structures nationales historiques, égales en droits et en devoirs, devant Dieu et les hommes.

J'ai vécu en Algérie, et j'aime son peuple fier et courageux. Je comprends la déchirure
des mal-nommées rapatriés, puisque la plupart n'ont pas de liens ethniques avec la France ;
mais je dois te rappeler l'évidence que la Guerre d'Algérie est finie depuis 1962, et ses cruels
combats en kaléidoscope, doivent servir à nourrir la réflexion des anciens combattants qui
militent encore pour une cause.
Tu t'étais trompé de guerre, ce qui a servi à te manipuler par les ennemis de la France,
qui sévissent dans les services plus ou moins spéciaux (foi de l'affaire de la rue Toullier), et
dans tout l'appareil d'État et du pouvoir réel.
Un phénomène similaire afflige la gauche révolutionnaire, de manière moins encadrée
institutionnellement.
Nos erreurs sont excusables seulement si elles servent à corriger nos actions futures.

Je disais souvent aux miens qu'il nous faut arrêter de refaire en boucle les batailles de
Madrid et de Stalingrad, pour nous concentrer sur celles d'aujourd'hui et de demain.
L'homme a besoin de mythes fondateurs pour se structurer, encore plus s'ils ont des bases
historiques récentes.
Préservons volontiers notre folklore cérémonial, nos traditions ancestrales dans ce
qu'elles ont d'héroïques et de spirituelles, et ces dates de souvenir qui nous font vibrer du
tréfonds de notre âme. Gardons nos spécificités et idiosyncrasies, mais unissons nous pour
le bien commun, contre l'ennemi de l'humanité, celui d'aujourd'hui et de toujours:
l'impérialisme yankee, le sionisme et leurs séides.
Ouvrons nos esprits à ceux qui doivent se trouver du même côté du front que nous.
Ton erreur et ton sacrifice ne doivent pas être en vain, tu dois sortir libre, en homme
plus sage et en militant plus décidé, sans sectarisme autodestructeur.

J'entre dans l'âge de la sagesse, avec cette lettre politiquement incorrecte selon les
canons de la mode, mais pour moi de grande humilité symbolique, parce qu'elle n'est pas
adressée à un grand de ce monde (et j'en connais...), mais à un jeune et méconnu
prisonnier, voué aux gémonies nazies ; un combat par avance perdu... non! Sauf si la France
est, elle, irrémédiablement perdue.
Le peuple français est loin d'avoir épuisé ses réserves humaines, je suis optimiste, il
marchera triomphant à côté d'autres grands peuples, pour le bien de l'humanité toute entière,
c'est son destin historique ; c'est le tien, c'est le nôtre, vers la Liberté.

Amitiés révolutionnaires,
Carlos
Mémoire de Michel Lajoye page 98

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