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Comptes rendus des séances de

l'Académie des Inscriptions et


Belles-Lettres

Sur la source du Songe de Scipion


Monsieur André Piganiol

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Piganiol André. Sur la source du Songe de Scipion. In: Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-
Lettres, 101ᵉ année, N. 1, 1957. pp. 88-94;

doi : 10.3406/crai.1957.10720

http://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1957_num_101_1_10720

Document généré le 04/06/2016


COMMUNICATION

SUR LA SOURCE DU SONGE DE SCIP1ON,


PAR M. ANDRÉ PIGANIOL, MEMBRE DE L* ACADÉMIE.

Le Songe de Scipion, au vie livre de la République de Cicéron,


est un poème cosmique dont on ne se lasse pas d'admirer la beauté
étrange. «Morceau troublant », écrit Cumont dans son livre posthume,
Lux Perpétua (1949). La recherche de la source que Cicéron a suivie
donna lieu à des travaux remarquables, au premier rang desquels
il faut mettre naturellement ceux de Cumont, Harder, Pierre
Boyancé, du R. P. Festugière1. Renonçant à découvrir une source
unique, ces savants s'entendent pour expliquer le Songe par l'influence
du platonisme ; des passages entiers du Phèdre y sont d'ailleurs
traduits mot à mot. Au second plan transparaît une influence
pythagoricienne.
Cependant les commentateurs ont beau insister sur l'origine
purement hellénique du Songet ils ont du mal, semble-t-il, à en
éliminer la couleur exotique. C'est la raison pour laquelle l'hypothèse
qui attribue à Posidonius la source dont dépend Cicéron eut tant
de succès. En vain, Harder et Pierre Boyancé ont-ils déployé leur
science à l'exorciser : le dernier mot de Cumont, dans Lux Perpétua,
est pour observer encore la « couleur posidonienne » du Songe.
C'est que Posidonius passe pour avoir été un intermédiaire entre la
pensée des barbares et celle des Grecs, un médiateur de l'Orient.
Ainsi Cumont n'a jamais complètement abandonné la théorie
exprimée dans le mémoire fameux sur la Théologie solaire : le Songe
de Scipion était pour lui le plus ancien document où s'exprimait
une théologie solaire issue de l'Orient.
Je n'ai pas l'intention de m'engager sur le terrain de l'exégèse
philosophique. Je voudrais aborder le problème d'un autre biais,
examiner si le Songe ne peut être considéré comme un document
historique, tenter cette voie aventureuse d'en admettre pour un
instant l'authenticité. Le De Republica mérite cet honneur : l'auteur
d'un récent ouvrage sur Cicéron et l'histoire romaine estime que ce
traité évoque correctement « un moment historique et un milieu
social ».
Dans quelles conditions eut lieu le Songe ? Lorsque Scipion Émi-
lien débarqua en Afrique, en 149, faisant partie de l'armée du
consul Manilius, il n'eut rien de plus pressé, dit Cicéron (nihil mihi

1. P. Boyancé, Études sur le Songe de Scipion (Paris, 1936) ; R. P. Festugière, La


thèmes du Songe de Scipion, dans ï'Eranos Rudbergianus, t. 44 d'Eranos, 1946, 370 ; du
même, Révélation d'Hermès Trismégiste, III, 27, 33 (Paris, 1953).
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fuit potius) que d'aller voir Massinissa, uni à sa famille par les liens
d'une amitié traditionnelle. Cette date de 149 n'est pas celle que
conserve la grande histoire : celle-ci enseigne que Scipion se rendit
auprès de Massinissa au printemps 150, envoyé auprès du Roi par
le proconsul d'Espagne pour quémander des éléphants ; elle
rapporte aussi qu'en 148 Massinissa, à la veille de sa mort, manda
auprès de lui Scipion, qui" arriva trop tard. L'épisode que Cicéron
date de 149 est inconnu de notre tradition, et celle-ci dérive de
Polybe ; il n'est pourtant pas invraisemblable encore qu'une
confusion soit possible avec la visite de 150.
Cicéron cite les paroles d'accueil de Massinissa : « Je te rends
grâces, Soleil très haut (Summe Sol), et vous, autres dieux du ciel,
de ce qu'avant de quitter la vie d'ici-bas je vois sous mon toit, dans
mon royaume, P. Cornélius Scipion ». M. Boyancé nous fait observer
que l'invocation de Massinissa au Soleil convient au rang éminent
du soleil dans le panthéon numide, et il nous invite à y voir un trait
de couleur locale, habilement introduit par Cicéron. Mais Appien
nous dit que Scipion parlait volontiers de sa visite auprès de
Massinissa ; pour recueillir ses paroles, il avait auprès de lui et Polybe
et Panétius et toute une famille dont Cicéron a pu recueillir encore
la tradition orale. Il n'est pas invraisemblable que les propres paroles
de Massinissa aient été correctement rapportées par Scipion.
Entre Scipion et Massinissa une conversation s'engagea, qui se
prolongea tard dans la nuit. De quoi parlèrent-ils ? Massinissa
songeait à sa mort prochaine, il évoquait le souvenir du premier
Africain. Admettons pour un moment la réalité de cette conversation.
Quels pouvaient être les thèmes du dialogue entre le Numide et le
Romain ?
Notre connaissance de la civilisation numide a fait de bien grands
progrès, dus à l'archéologie et même à l'épigraphie. Cette
civilisation n'a pas tout emprunté aux Puniques, elle les a même influencés ;
il est pourtant de fait que le Maghreb a toujours assimilé avec une
aisance surprenante ce qui lui venait de l'Orient. Les idées des
Numides sur lé sort de l'âme après la mort sont illustrées par des
centaines de stèles1. Ces documents sont difficiles à utiliser pour
deux raisons. D'abord il est difficile de distinguer stèles votives et
stèles funéraires. Ph. Berger étudiait en 1901 des inscriptions
néopuniques de Maktar, dont le type était : « Vœu qu'a voué (un tel)
à Baal Hammon ; il Va béni », et il observait : « La rencontre de cette
formule et de formules funéraires sur des inscriptions trouvées

1. M»e Hours-Miédan, dans les Cahiers de Bgrsa, I, 1950, p. 15-76 ; M»« C. Gilbert
Picard, Catalogue du Musée Alaoui, nouv. sér., collect. puniques, I (s. d.)> Pour le
commentaire, G. Picard, Les religions de l'Afrique antique (Paris, 1954) ; Le monde de Car-
thage (Paris, 1956).
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côté à côte, à Henchir Medid comme à Maktar, amène à se demander


si ces ex-voto n'avaient pas un caractère funéraire ». Au sanctuaire
de Gonstantine, dont les stèles ont été récemment publiées par
M. Berthier et par l'abbé Charlier, la formule que j'ai citée plus
haut est constante1. Elle figure sur des stèles qui peuvent remonter
au temps de Massinissa et qui portent en leur sommet le mystérieux
signe de Tanit. L'observation de Ph. Berger a été répétée par
H. I. Marrou, à propos des reliefs de la collection Gaston de Vul-
pillières à El Kantara : il considérait comme une découverte très
importante d'avoir reconnu que les stèles à Saturne avaient en
réalité une destination funéraire. Une deuxième difficulté provient
de notre embarras à dater les documents. La masse des stèles
néopuniques date de l'empire, mais il est des sanctuaires, comme celui
de Constantine, dont les origines remontent au temps des rois
numides, ou même, comme celui de Sousse, à l'époque de l'apogée
de Carthage. Il ne paraît point cependant qu'au cours d'une si
longue période les croyances numides, en partie héritées de Car-
Ihage, aient grandement évolué ; mais l'expression en a été modifiée
sous l'influence de la civilisation hellénistique et de la civilisation
romaine.
Si Massinissa et Scipion se sont entretenus du sort de l'âme après la
mort, ce sont ces stèles qui éclaireront pour nous le sens de leurs
discours. Mais, pour les comprendre, il faudrait d'abord connaître
quelle est la signification du signe mystérieux appelé signe de TaniU
qui se rencontre sur la plupart d'entre elles. On sait à combien
d'hypothèses divergentes a donné lieu l'interprétation de ce signe*
II se présente à nous comme un bonhomme abstrait, à la mode des
dessins enfantins. Les éradits y ont vu tour à tour une idole
archaïque schématisée, un autel à cornes portant un globe, un signe
correspondant à la croix ansée des Égyptiens et signifiant la force
créatrice et vivifiante de la divinité2. Il me semble que c'est une solu-^
tion différente que conseille l'analyse des représentations des stèles.
Celles-ci se présentent à nous en plusieurs registres superposés, où
l'on a eu raison de reconnaître, en bas, le plan humain, en haut, le
plan céleste3 ; c'est le même schéma qu'au Grand Camée de France.
Considérons une stèle particulièrement complète : tout en bas,
l'image du sacrifice ou tout au moins de la victime par
l'intermédiaire de laquelle est assurée l'héroïsation du mort. Plus haut, le
mort lui-même, debout dans un édicule. Plus haut encore, l'image

1. A. Berthier, abbé R. Charlier, Le sanctuaire punique d'El Hofra à Constantin*


(Paris, 1955).
2. Hypothèse du P. de Ronzewalle, acceptée par G. Picard.
3. Déjà le Dr Carton, dans son rapport sur les fouilles du sanctuaire de Dougga, dans
le Bulletin archéol. du Comité des Trav. Hist., VII, 1897, p. 367.
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de Tanit entre des symboles prophylactiques, la main dressée, la


palme, le caducée. Tout au sommet, le Père Éternel, Baal Hammon,
Saturne, entre le Soleil et la Lune1. Telle étant la structure générale
de la stèle, que peut être le signe de Tanit, sinon l'image de l'âme ?
Le tableau que figurent les stèles néo-puniques me paraît devoir
être presque toujours interprété comme figurant l'ascension de
l'âme vers les astres. Parfois même le signe de Tanit se décompose,
la tête du bonhomme est remplacée par une lune, par une étoile :
il ne s'agit plus seulement de l'ascension de l'âme vers les astres»
mais de sa transformation en astre.
Que le signe de Tanit, sur les stèles, symbolise l'âme, semble
confirmé par diverses observations. Entre ce signe et l'image d'un
homme il existe des transitions : M. et Mme Gilbert Picard l'ont
noté au sanctuaire de Constantine, dont ils ont pris soin de fixer la
chronologie. Les stèles les plus anciennes figurent le signe de Tanit
«ntouré de signes prophylactiques, caducée, main divine. Puis,
de 163 à 147 environ, ce signe devient un personnage humain
brandissant un caducée ou cette palme, qui ne peut signifier que la
victoire sur la mort. Plus singulier encore est l'exemple de la tombe de
Tipasa que découvrit en 1955 le colonel Baradez : dans la fosse,
une grande image de Tanit, couchée sur le sol et toute dessinée avec
des vases votifs, était comme une représentation idéalisée du mort.
Enfin, si le signe de Tanit manque, il est remplacé par un
personnage qui tient la palme, ou bien le raisin et la grenade ; on
l'interprète d'ordinaire comme un dieu, alors que c'est bien plutôt lé
défunt jouissant de sa vie nouvelle.
Citons encore, à cause de la richesse de leur décoration, malgré
leur date apparemment tardive, les stèles de la Ghorfa (entre Dougga
et Maktar), publiées dès 1897 par La Blanchère. En bas, la victime,
un taureau. Plus haut, un personnage dans un édicule, que l'on
prend pour la divinité ou pour le dédicant (L. Poinssot) et qui doit
être le mort. Plus haut, « un personnage étrange représenté d'une
façon géométrique comme un mannequin sans jambes » (A. Bruhl),
qui tient le raisin et la grenade : il correspond au signe de Tanit
des autres stèles et c'est apparemment l'âme figurée par un
bonhomme. Au sommet de la stèle, divers dieux, parmi lesquels sans
doute des dieux intercesseurs. M. Gilbert Picard décrit le champ
tout constellé d'étoiles, ou plus exactement percé de trous où avaient
été naguère enfoncés des clous dorés. Dans les angles supérieurs,
le soleil et la lune.
Figurer l'âme, double spirituel du corps, n'était pas chose aisée.
La solution punique est digne d'intérêt. Elle est singulièrement
1. J. Toutain, Les symboles astraux sur les monuments funéraires de l'Afrique du Nord,
dans la Revue des Études anciennes, XIII, 1911, p. 165.
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proche de l'image de YOrante, sur les peintures chrétiennes : De


Rossi pensait y reconnaître l'image de l'Église, mais il semble qu'on
s'accorde maintenant à y reconnaître l'image de l'âme. Au dernier
congrès d'archéologie chrétienne (Aix-en-Provence, 1954), M. Gerke
a étudié le groupe de l'Orante entre Pierre et Paul et l'a interprété
comme une introductio animae1.
Dans l'Afrique du Nord nous rencontrons donc deux thèmes
essentiels du Songe, la théologie solaire, l'ascension de l'âme vers
les astres. Il y faut joindre le thème de l'immortalité privilégiée,
qui est réservée, selon le Songe, aux chefs d'État. L'inscription
funéraire de Micipsa, expliquée par M. Février, lui donne le nom
de' Vivant des Vivants. Des inscriptions attestent le culte de Gulussa,
« roi de Numidie, fils du roi Massinissa », de Hiempsal n », roi des
Numides, fils du roi Gauda »2. La divinisation des princes maures
est attestée par un texte bien connu de Tertullien.
Il serait beau que le Songe de Scipion eût pour source un
authentique songe de Scipion, à la suite d'une conversation avec
Massinissa sur le thème de la mort, au lieu d'être, ce qu'il est
probablement, une invention littéraire, une rationabilis imaginatio, comme
dit Macrobe.
Cependant il n'est pas invraisemblable que les croyances
africaines aient été connues en effet du cercle des Scipions. En 217 Rome
avait adopté le culte de Baal sous le nom de Saturne et celui d'As-
tarté sous celui de Vénus Érycine. En 191 le premier Africain,
homme pieux qui chaque jour au temple de Jupiter s'absorbait
dans la méditation, construisit sur la pente du Capitole un fornix
décoré de l'image des sept dieux planétaires et de deux chevaux
(Liv., xxxvn, 3). Ce fornix rappelait à l'homme sa place dans lé
cosmos, exactement comme le Songe.
Le premier livre du traité de Cicéron dérive d'un ouvrage perdu
de Panétius de Rhodes sur la république, selon la conjecture
ordinairement admise. Il n'en est pas moins certain que le thème
essentiel du traité, la définition du princeps, a nécessairement sa source
dans le milieu des Scipions. N'en serait-il pas de même pour
l'inspiration religieuse ? « Le Songe n'a pas de sources », écrit avec force
M. Boyancé. Mais c'est peut-être que nous ignorons les idées
religieuses qui avaient cours dans le cercle intime des Scipions, et dont
le surprenant décor du fornix de 191 atteste l'intensité. Plutôt qu'à
une influence de l'Orient, c'est à une influence de la civilisation
d'Afrique du Nord qu'il semble permis de songer. Le thème de

1. Le signe de Tanit, s'il désigne l'âme sur les stèles funéraires, peut être aussi employé
ailleurs pour signifier simplement la présence d'un esprit.
2. J. G. Février, L'inscription funéraire de Micipsa, dans la Revue d'Assyriologie, 1951,
p. 139. — CIL, VIII, 17159 ; VIH, 8836.
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l'immortalité astrale, exceptionnel chez les Grecs, est populaire


chez les Numides.
Quant à l'orchestration de ces thèmes étranges, « troublants *,
pour répéter le mot de Franz Cumont, les commentateurs ont démon*
tré qu'elle était purement grecque. Ils ont exclu pourtant l'influence
de Panétius de Rhodes : celui-ci niait, en effet, l'immortalité de
l'âme et enseignait que la désagrégation de l'âme va de pair avec
celle du corps ; il était, comme le dit spirituellement un de ses
derniers biographes, un homme de ce côté-ci du monde, ein Diesseits»
mensch. Panétius n'a certainement pas fait sienne la conception
mystique qu'expose le de Republica. Pourtant il me paraît probable
que le tableau du cosmos, tel qu'il est présenté dans le Songe, dérive
de lui. Au début de son ouvrage, Cicéron traite déjà d'astronomie,
à propos de l'apparition de deux soleils en 129. « Quel dommage,
s'écrie Émilien, que Panétius ne soit pas là. Il s'intéresse tant aux
caelestia. II en parle avec une assurance à faire croire qu'il a vu de
ses yeux et touché de ses mains des choses sur la nature desquelles
nous pouvons à peine risquer des conjectures ». Voir de nos yeux,
toucher de nos mains, telle est l'illusion en effet que Cicéron nous
donne dans son merveilleux tableau de l'univers astral, et il me
semble que ses propres paroles nous ont, du moins sur ce point,
trahi sa source.

M. Jérôme Carcopino tient à féliciter M. André Piganiol de sa


communication si claire, si neuve, si suggestive.
Si vraiment le signe dit de Tanit n'intervient au sommet des
stèles que lorsqu'il y est isolé, l'interprétation que M. Piganiol eu
donne avec tant d'ingéniosité acquiert, par sa simplicité même, la
plus grande vraisemblance.
Mais, la Carthage où le signe s'est propagé, baignait dans l'atmo-.
sphère hellénistique et c'est dans l'ambiance des idées helléniques
que pouvaient le mieux se rencontrer Scipion Émilien, ami de Panae-
tius et de Polybe, et Massinissa, introducteur dans son royaume
du culte des Cereres graecae. .
M. Ch. Virolleaud rappelle qu'on a découvert en janvier 1923,
à l'Est de Tyr, tout près du tombeau dit « de Hiram », une sépulture
dont les six loculi étaient fermés par des dalles portant différents
symboles parmi lesquels il y avait le caducée et le signe de Tanit
(voir Syria, t. v (1924), p. 44). Ces symboles avaient donc un carac*
tère funéraire, en Phénicie, à l'époque romaine.
M. Dhorme rappelle que, chez les Nabatéens, qui sont les Sémites
de la Nabatène, capitale Pétra, le monument funéraire en forme de
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pyramide porte le nom de néphésh « âme », ce qui semble indiquer


qu'au moment de la mort, c'est l'âme qui désignait le personnage
de la tombe et que l'âme pouvait être représentée sur la stèle, de
même qu'elle était mentionnée sur les monuments en forme de
pyramide.
M. Dhorme ajoute que le mot néphésh « âme », pour désigner le
monument funéraire est employé en palmyrénien dans une
inscription de Gonstantine (CIL, vin, 2515) ainsi conçue : « cette néphésh
est celle de Sôraikon (latin Suricus), fils de Rubat, archer palmy-
rénien, centurie de Maxime, âgé de 45 ans. Hélas 1 » Nous sommes
loin de la Nabatène. Dans la Bible hébraïque, ce mot néphésh « âme »
est parfois employé pour représenter « la mort » : Lévitique, xix, 28 î
xxii, 4 ; Nombres, v, 2 ; ix, 6-7, 10. Ainsi l'âme était bien localisée
dans le monument funéraire. On pouvait donc la représenter sur,
la tombe. »

LIVRES OFFERTS

M. Albert Grenier a la parole pour un hommage :


« J'ai l'honneur de présenter à l'Académie, de la part de l'Université libre dé
Bruxelles, le beau volume des Mélanges Isidore Lévy, qui constitue le t. XIII
de l'Annuaire de l'Institut de Philologie et d'Histoire orientales et slaves.
Nous connaissons tous Isidore Lévy — directeur d'études — depuis toujours,
à l'École des Hautes-Études, maître de conférences à la Sorbonne et professeur
au Collège de France, qui était chargé de l'enseignement de l'histoire des
religions à l'Université de Bruxelles. Un Avant-Propos, savoureux en même temps
que documenté de notre confrère Henri Grégoire, esquisse le portrait
intellectuel d'Isidore Lévy, depuis le temps où il était, au collège de Montbéliard,. le
condisciple de Paul Perdrizet. Puis il alla préparer l'agrégation à la Faculté de
Lyon. Avec sa merveilleuse facilité d'assimilation et sa mémoire admirable, le-
jeune étudiant devint rapidement un maître dans toutes les disciplines qui
s'enseignaient à la Faculté : helléniste avec Legrand, épigraphiste avec Holleaux,
égyptologue avec Loret, en même temps que sémitisant. Il était prêt aux
recherches les plus fructueuses sur l'histoire, les institutions, la civilisation et
les religions du monde antique dans tout ce qui constitue aujourd'hui le Proche»
Orient. H. Grégoire parcourt l'essentiel de sa bibliographie. Je ne rappellerai
ici que ses recherches sur les sources de la légende de Pythagore et sa diffusion
de Grèce en Palestine. Les articles du volume de Mélanges, extrêmement divers,
marquent bien la diversité et l'étendue de l'érudition du savant à qui ils sont
offerts. La philologie, l'archéologie et l'histoire du monde sémitique, depuis les
Snmmériens, y tiennent naturellement une large place. Deux articles et non des
moins importants y traitent de linguistique pré-indo-européenne. : A. Carnoy,
Hiéronymie féminine grecque et L. Deroy, L'origine préheltêriiqûe de quelques
noms de peuples méditerranéens, le nom d'Egypte notamment et aussi ceux des
Bières, des Libyens et des Ligures. M. Février, d'après deux stèles de Constan*

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