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Introduction 1
Introduction
Ce rapport regroupe les observations faites lors du stage réalisé à l’observatoire de Ville-
franche sur mer dans le cadre de l’UE Méthode d’observation géologique à terre et en mer.
Nous commencerons par décrire le principe des techniques permettant l’acquisition et le
traitement d’un profil de sismique réflexion.
Puis nous nous intéresserons à l’interprétation d’un profil de sismique réflexion Nord-Sud
réalisé à bord du Thétys II en Méditerranée, au large de Villefranche-sur-mer et de Monaco.
Malheureusement, suite à un problème matériel, ce profil n’est pas celui que nous avons
acquis lors du stage de terrain.
Enfin, nous replacerons nos observations dans l’histoire de la marge Nord-Ligure.
Aquisition du signal
La Source : à bord du Thetys II, nous avons utilisé un canon à air de type GI-Gun. Ce
canon possède deux chambres qui se remplissent d’air comprimé (figure 1(b)).
Lorsque la pression est indentique dans les deux chambres (environ 130 Bar), la chambre
inférieure libère l’air ce qui crée une puissante impulsion comprise entre 5 et 80 Hz. Cependant,
en raison de la pression hydrostatique, cette bulle oscille, ce qui perturbe le signal incident.
C’est à ce moment qu’intervient la deuxième chambre : elle libère l’air qu’elle contient 6 milli-
secondes après la première chambre, ce qui permet de stabiliser la bulle et de se rapprocher
d’un signal impulsionnel, de meilleure qualité pour l’acquisition sismique.
En jouant sur le volume des deux chambres, il est possible d’améliorer la qualité du si-
gnal incident (donc la précision du profil) ou d’augmenter son intensité (ce qui augmente
la pénétration, i.e. la profondeur observable, du signal). Dans le cas d’un profil de moyenne
résolution haute pénétration, comme celui que nous avons effectué en Méditerranée, le volume
des deux chambres est identique. D’autre part, le compresseur utilisé pour établir ce profil nous
permettait de tirer un coup de canon toutes les 6 secondes.
Les récepteurs, la flûte : nous avons vu que le signal émis par le canon se réfléchit sur
des miroirs (strates, changement de lithologie...) puis remonte vers la surface. Une fois à proxi-
CHAPITRE 1. ACQUISITION ET TRAITEMENT D’UN PROFIL SISMIQUE 2
Fig. 1: Schéma et photo du canon à air utilisé sur le Thetyss II : le GI-Gun. (Photo Romain
Bouchet)
mité du bateau, des hydrophones, regroupés en traces, enregistrent ce signal réfléchi afin de
permettre le traitement.
La flûte du Thétys est constituée de 12 traces de 8 mètres comprenant chacune 16 hydro-
phones et de deux traces de 25 contenant chacune 48 hydrophones. En jouant sur la configura-
tion de la flûte, il est possible de modifier la définition obtenue lors de l’acquisition. Ainsi, pour
obtenir un profil de moyenne résolution et de forte pénétration, il faut regrouper les traces de
8 mètres par 3 ce qui permet d’obtenir 6 traces de 25 mètres. Si nous utilisons uniquement les
12 traces de 8 mètres, le profil obtenu sera de haute résolution et de faible pénétration.
Un des facteurs important lors de l’acquisition du signal est l’ordre de couverture (nombre
de fois qu’un même point miroir est enregistré par la flûte). Plus la couverture est importante,
plus le signal final est de bonne qualité (amélioration du rapport signal sur bruit : Signal =
√ Bruit
Couverture).
L’ordre de couverture est obtenu de la manière suivante :
N × dT R
C= (1)
2 × dtirs
Avec N le nombre de traces, dT R la distance entre les traces et dtirs la distance parcourue
par le bateau entre deux tirs successifs.
Dans le cas du profil tiré en Méditerranée (moyenne résolution, haute pénétration), nous
avions N = 6, dT R = 25m et dtirs = 12.5m ce qui correspond à une couverture d’ordre 6.
Traitement du signal
Une fois acquis sous forme analogique grâce à la méthode expliquée précédemment, le signal
est filtré, numérisé puis enregistré sur un disque dur afin de pouvoir être traité puis analysé.
Premier filtrage : après avoir été mesuré par les hydrophones, le signal est filtré une
première fois afin d’éliminer une partie des bruits parasites. On distingue alors deux types
CHAPITRE 1. ACQUISITION ET TRAITEMENT D’UN PROFIL SISMIQUE 3
La numérisation : les hydrophones enregistrent l’onde réfléchie sous forme analogique. Pour
en faciliter le traitement et le stockage, le signal doit être numérisé. La numérisation consiste
à discrétiser le signal continu en un nombre fini de points. Il est donc nécessaire de choisir un
pas d’échantillonnage adapté. Un pas trop grand entraı̂nerait une perte de données, un pas
trop petit multiplierait de manière inutile le nombre de données et donc le volume à traiter.
On considère généralement que la fréquence du pas d’échantillonnage doit être au moins deux
fois supérieure à la plus haute fréquence enregistrée sur le signal analogique. Dans la cas d’un
signal bruité, on peut même aller jusqu’à une fréquence quatre fois plus élevée.
Une fois enregistré, le signal numérique est traité grâce à la suite de logiciels SU (« seismic
unix ») développée par la Colorado School of Mines.
Triage par points miroir : nous l’avons vu dans le chapitre 1, en raison de la couverture
multiple, chaque point miroir est enregistré six fois par six traces différentes.
Par exemple, considérons des flûtes de 25 mètres et une avancée du bateau de 12.5 mètres
entre deux tirs. Ainsi, un point à la verticale de la trace numéro 1 lors du premier tir sera vu de
la même manière par la trace n˚2 lors du tir n˚3, par la trace n˚3 lors du tir n˚5 ...etc. (chaque
point miroir sera alors représenté par un nombre de traces égales à la couverture).
Il est donc important de regrouper les traces en fonction du point miroir qu’elles représentent.
Stack : une fois les traces regroupées par point multiple, il faut corriger le décalage qu’elles
ont entre elles en raison des différences d’éloignement par rapport à la source. Une fois cet
écart corrigé, nous pouvons sommer les six traces afin d’améliorer le rapport signal sur bruit.
Fig. 2: Schéma expliquant la formation des hyperboles de diffraction. (Source : Poly de l’Uni-
versité Pierre et Marie Curie)
Autres traitements possibles : il est possible d’effectuer d’autres traitements afin d’améliorer
la qualité et la définition d’un profil sismique. On peut citer par exemple le filtrage en domaine
(non réalisé lors du stage). Il est également possible de « découper »la mer afin que le profil
soit plus facile à lire.
Si les vitesses de propagation des ondes sismiques sont connues dans les sédiments (elles
peuvent être déterminées par la sismique réfraction ou suite à un forage), il est possible de
faire « migrer »le profil afin que l’échelle verticale soit une échelle en profondeur et non plus
en temps double.
CHAPITRE 2. INTERPRÉTATION DU PROFIL SISMIQUE MIG M1-EOST
7ST101 JX 5
2 Interprétation du profil sismique Mig M1-EOST
7st101 JX
Lors de l’étude de ce profil sismique, nous commencerons par nous intéresser à la partie
Nord, caractérisée par une pente plus importante, puis nous étudierons la partie Sud, plus
plane, dans laquelle passe le chenal du Var.
La partie Nord
La partie Nord correspond à la Marge Nord-Ligure ; elle s’étend entre 200 et 2100 mètres
de profondeur sur une distance d’environ 19 km. Elle est marquée par une nette discordance
entre deux familles de réflecteurs.
En bas de notre pente, un bloc semble séparé du reste de la marge par un « trou », ce qui
s’explique par le fait que l’on croise un affluent du chenal principal du Var.
Les réflecteurs de la famille inférieure sont continus et ressortent assez nettement sur le
profil ; ils sont séparés de 20 ms temps double. Ils dessinent un grand synclinal (en vert sur le
profil) que l’on voit en tranche sur environ 4,7 km et que l’on peut suivre sur une profondeur
correspondant à 500 ms temps double. Il est possible de voir une faille verticale dans la charnière
de ce pli (perte de la continuité des réflecteurs).
Nous verrons dans le chapitre suivant (3) que ces sédiments sont anté-messiniens.
En pied de pente, nous observons des réflecteurs grossiers discontinus (en violet). Ces
réflecteurs témoignent de dépôts sédimentaires grossiers sur une longueur d’environ 3.7 km
et sur une épaisseur de 250 ms temps double. Ils correspondent à un cône détritique Messinien
dont la signification sera développée dans le chapitre 3.
Les strates du synclinal anté-messinien ont été tronquées par l’érosion lors de la crise
Messinienne (voir chapitre 3) et viennent buter sur la famille de réflecteurs supérieure de la
partie Nord.
Cette famille de réflecteurs présente de fines strates séparées de 10 à 15 ms en temps double
sur une épaisseur d’environ 400 ms temps double. Elles se déposent en onlap sur les séries
anté-messiniennes.
Il est possible d’observer dans les sédiments plio-quaternaires au moins deux slumps (petit
glissement de terrain formant une loupe, en traits noirs discontinus sur le profil).
Ces sédiments sont plio-quaternaires et se sont déposés sur la pente dégagée par l’érosion
lors de la crise Messinienne.
La partie Sud
La partie Sud du profil a, quant à elle, une topographie beaucoup moins marquée. Elle se
situe à une profondeur d’environ 2100 mètres, à l’exception de l’extrême Sud qui remonte de
manière très raide sur plus de 200 mètres de dénivelé.
Dans cette zone, nous pouvons distinguer trois unités sédimentaires. En profondeur, nous
trouvons des réflecteurs assez grossiers, séparés de 20 à 30 ms temps double, que l’on peut
décrire comme des réflecteurs en « code barre »(en rose sur notre profil).
Ce type de réflecteurs caractérise des alternances entre des strates d’évaporites et de pélites
déposées suite à des remises en eaux partielles lors de la crise Messinienne.
CHAPITRE 3. REPLACEMENT DANS L’HISTOIRE GÉOLOGIQUE RÉGIONALE 6
Au dessus des réflecteurs en « code barre », nous pouvons voir le lit du Var (en orange)
sur une largeur supérieure à 12 km. Les réflecteurs sont assez fins et continus. Ils sont séparés
d’environ 10 à 15 ms temps double. A certains endroits, il est possible d’observer des paléo
chenaux. L’épaisseur de ces sédiments varie de 300 à 700 ms temps double. C’est à l’extrême
Nord du lit du Var que son épaisseur est la plus importante. Cela peut être expliqué de deux
manières différentes :
– Une faille normale a pu jouer créant une dépression comblée par les sédiments. Cependant,
si cette faille existe, les réflecteurs ne la font pas apparaı̂tre clairement.
– Un paléochenal très important a creusé dans les évaporites supérieures. Cette hypothèse
semble la plus probable dans la mesure où les réflecteurs en « code-barre »semblent venir
buter sur les sédiments du Var.
Comme nous l’avons déjà vu, à l’extrême Sud de notre profil, la topographie remonte
brusquement sur plus de 200 mètres. Il s’agit de la levée du Var, constituée de sédiments fins
déposés par les courants de turbidité. Les réflecteurs y sont continus et séparés par environ 20
ms temps double.
l’ordre de 1500 mètres. Ceci dégage alors les marges en amont du bassin profond et les expose
aux phénomènes d’érosion. Cette limite d’érosion est représentée en rouge sur le profil.
La diminution du niveau marin (baisse de l’exutoire) va également entraı̂ner un rééquilibrage
du profil d’équilibre des rivières (figure 3). Ce rééquilibrage est à l’origine de la formation de
canyons (tel que le canyon du Var) et les sédiments érodés lors de la formation de ces canyons
forment des éventails sédimentaires (Nil, Var...). Une partie du cône détritique du Var et les
sédiments dus aux processus gravitaires lorsque les marges étaient émergées sont figurés en
violet sur le profil.
Cette remise en eau brutale est confirmée par la présence de Gilbert-Deltas pliocènes : des
sédiments se déposent à l’horizontale sur des sédiments inclinés progradant (série en topset
sur des sédiments en foreset). Ce type de figure sédimentaire ne peut s’expliquer que par une
remontée brutale de l’exutoire.