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Chapitre I

Notions de base sur


les plans d’expériences (DOE )
*

*DOE : Design of Experiments


1. Historique
Les méthodes de planification et analyse d’expériences (ou
les plans d’expériences) ont été introduites pour la première
fois par le britannique Fisher (1925). Ensuite, l'américain Box
(1961) les a développées en posant les bases actuelles de la
méthodologie de la recherche expérimentale selon le principe :
« Hypothèse  Stratégie Expérimentale
Expériences – Analyse »
Mais ce sont certainement les travaux de l’ingénieur japonais
Taguchi (1961) qui ont permis une vaste diffusion des plans
d’expériences, notamment dans le milieu industriel.
2. Introduction
Les plans d'expériences fournissent aux scientifiques
une méthodologie rigoureuse en vue d'un objectif
précis et ceci avec un minimum d'essais évitant tout
tâtonnement qui conduit souvent à une pléthore
(excès) de résultats inexploitables.
3. Intérêts des plans d'expériences
Les plans d'expériences sont utilisés dans les études
industrielles en recherche-développement. Ils
interviennent dans de nombreux domaines industriels:
chimie, pétrochimie, agroalimentaire, pharmacie,
mécanique, automobile, métallurgie…
Leur utilisation vise aux buts suivants :
• minimisation du nombre d'expériences permettant
un gain en temps et en coût financier;
• détermination des facteurs clés dans la conception
d'un nouveau produit ou d'un nouveau procédé;
• optimisation des réglages d'un procédé de
fabrication ou d'un appareil de mesure;
• prédiction par modélisation du comportement d'un
procédé.
4. Contexte des plans d’expériences
Le contexte de l’utilisation des plans d’expériences
recouvre des phénomènes de type « boîte noire »
(Figure 1), que l’on cherche à éclaircir pour mieux
comprendre le fonctionnement et en optimiser
les performances.
La démarche est expérimentale : l’information sur
le phénomène est acquise à partir des essais. Cela
impose une connaissance minimale du phénomène
étudié avant d’entreprendre les essais.
La technique des plans d’expériences va permettre
de répondre à nos exigences.
Boîte noire

Figure I.1 : Système de boîte noire


Parmi les facteurs on distinguera :
• les facteurs contrôlables qui dépendent directement du choix
du technicien (pression, température, matériau …);

• les facteurs non contrôlables qui varient indépendamment


du choix du technicien (conditions climatiques, environnement
d'utilisation…);

• les facteurs d'entrée dont on cherche à analyser une


influence (matières premières, vitesse d'agitation,
température, …).
5. Principe de la méthode des plans d’expériences
De manière générale, la méthode des plans d’expériences cherchera
à déterminer et à établir les relations existant entre 2 types de variables :
- la réponse : grandeur physique étudiée (y);
- les facteurs : grandeurs physiques modifiables par l’expérimentateur,
sensées influer sur les variations de la réponse (xi).

Pour cela, la solution proposée consiste dans tous les cas à établir un
modèle, exprimant la réponse en fonction des facteurs.

Pour bâtir ce modèle, il faut appréhender ces variations.


Celles-ci sont déduites des résultats de séries de N expériences, c’est-à-
dire de plusieurs configurations pour lesquelles les valeurs des facteurs
sont différentes.
Sous une forme mathématique, on peut écrire que la grandeur
d’intérêt (réponse), y, est une fonction de plusieurs variables xi
(facteurs). On a :

y  f  x1 , x 2 , x 3 , ................. x i 

L’étude du phénomène se ramène à déterminer la fonction f


qui lie la réponse y aux différents facteurs x1, x2, …, xi.
6. Vocabulaire de base des plans d'expériences

a. Réponse : la grandeur numérique qui est observée pour


chaque expérience réalisée (y).
Exemples :
- Pour apprécier la qualité d’un jus de fruit, la réponse est donc
l’acidité du jus de fruit produit, mesurée par la valeur du pH.
L’objectif souhaité est alors la minimisation de la réponse.
- Pour le cas d’une production agricole la réponse est, par
exemple, le rendement à l’hectare et l’objectif est de
maximiser cette réponse.
6. Vocabulaire de base des plans d'expériences
b. Facteurs: toute variable, obligatoirement contrôlable,
susceptible d’influer sur la réponse observée.

Les facteurs peuvent être quantitatifs lorsqu’ils sont


naturellement exprimés à l’aide de valeurs numériques
(pression, température, durée, etc.), ou bien qualitatifs dans le
cas contraire (couleur, type de matériau, sexe, etc.)

c. Niveaux : valeurs prises par un facteur dans les expériences.

Lorsqu’un facteur varie on dit qu’il change de niveau. La


connaissance de l’ensemble de tous les niveaux utilisés par
chaque facteur est nécessaire pour la réalisation des
expériences.
Exemple
Supposons que le facteur quantitatif ”température” peut prendre
les valeurs suivantes :

Température (°C) 20 30 40 50
Ce facteur est alors à 4 niveaux. On qualifie souvent de niveau bas
la température minimale de 20°C et de niveau haut la température
maximale de 50°C.

Considérons cette fois le facteur qualitatif ”couleur” ayant les modalités


suivantes :
Couleur bleu vert rouge

Ce facteur est à 3 niveaux. Dans ce cas on ne parlera pas de niveau bas


et de niveau haut puisqu’il est impossible d’ordonner naturellement ces
diverses modalités.
d. Domaine du facteur
L'ensemble de toutes les valeurs que peut prendre le facteur entre
le niveau bas et le niveau haut, s'appelle le domaine de variation du
facteur ou plus simplement le domaine du facteur (Figure 2).

Figure I.2 : Le niveau bas du facteur est noté par ( 1) et le niveau haut par (+1)

Lorsqu'on étudie l'influence d'un facteur, en général, on limite ses


variations entre deux bornes. La borne inférieure est le niveau bas.
La borne supérieure est le niveau haut.
Remarque: S’il y a plusieurs facteurs, chacun d’eux à son domaine
de variation.
Exemple

Le domaine de variation de la vitesse est constitué de toutes


les vitesses comprises entre 80 et 120 km/h.
e. Espace expérimental
S'il y a un second facteur, il est représenté, lui aussi, par un
axe gradué et orienté.
On définit, comme pour le premier facteur, son niveau haut,
son niveau bas et son domaine de variation. Ce second axe est
disposé orthogonalement au premier.
On obtient ainsi un repère cartésien qui définit un espace
euclidien à deux dimensions. Cet espace est appelé l'espace
expérimental (Figure 3).
Figure I.3 : L’espace expérimental
f. Domaine d’étude (ou domaine expérimental)
Le regroupement des domaines des facteurs définit
le «domaine d'étude». Ce domaine d'étude est la zone de
l'espace expérimental choisie par l'expérimentateur pour faire
ses essais (Figure 4).

Figure I.4 : Les points expérimentaux sont disposés


dans le domaine d'étude défini par l'expérimentateur
Exemple du domaine expérimental

Figure I.4a : Plan d’expérience et domaine expérimental


g. Surface de réponse
À chaque point du domaine d’étude correspond une
réponse.
À l’ensemble de tous les points du domaine d’étude
correspond un ensemble de réponses qui se localise
sur une surface appelée surface de réponse (Figure 5).
Figure I.5 : L’ensemble des réponses qui correspond à tous
les points du domaine d’étude forme la surface de réponse
h. Notion d’interaction
Il y a interaction entre deux facteurs A et B si l’effet de A sur
la réponse dépend du niveau de B ou inversement (Figure 6).

Figure I.6 : Courbes d’interactions


i. Modélisation par les plans d’expériences
i.1. Modélisation mathématique
En l’absence de toute information sur la fonction qui
lie la réponse aux facteurs, on se donne a priori une loi
d’évolution dont la formulation la plus générale est la
suivante :

y  f  x1 , x 2 , x 3 , ................. x n 
Cette fonction est trop générale et il est d’usage d’en prendre
un développement limité de Taylor, c’est-à-dire une
approximation.
Si les dérivées peuvent être considérées comme des
constantes, le développement de Taylor prend la forme d’un
polynôme de degré plus ou moins élevé (équation de
régression) :

k k k
y  b0   b j x j  b x x j   b jj x j Eq. (1)
uj u
2

j 1 u , j 1 j 1
u j
k k k
y  b0   b j x j   uj u j  jj j Eq. (1)
b x x  b x 2

j 1 u , j 1 j 1
u j

où :
y : grandeur à laquelle s’intéresse l’expérimentateur
(la réponse mesurée au cours de l'expérimentation et est
obtenue avec une précision donnée).
xj, xu : niveaux attribués aux facteur j et u respectivement par
l'expérimentateur pour réaliser un essai. Ces valeurs sont
parfaitement connues.
b0, bj, buj, bjj : coefficients du modèle mathématique dit postulé
(ou à priori). Ils ne sont pas connus et doivent être calculés à
partir des résultats des expériences.
Remarque très importante
 L'intérêt de modéliser la réponse par un
polynôme est de pouvoir calculer ensuite toutes
les réponses du domaine d'étude sans être obligé
de faire les expériences.
i.2. Modélisation expérimentale
Deux compléments doivent être apportés au modèle
précédemment décrit :
1. Le premier complément est le « manque d'ajustement ».
Cette expression traduit le fait que le modèle à priori (Eq. (1))
est fort probablement différent du modèle réel qui régit
le phénomène étudié.
Il y a un écart entre ces deux modèles. Cet écart est le manque
d'ajustement.

2. Le second complément est la prise en compte de la


nature aléatoire de la réponse.
En effet, dans le cas général, si l’on mesure
plusieurs fois une réponse en un même point
expérimental, on n’obtiendra pas exactement
le même résultat.
Il y a une dispersion des résultats. Les
dispersions ainsi constatées sont appelées
« erreurs expérimentales ».
Ces deux écarts, manque d'ajustement et erreur
expérimentale, sont souvent réunis dans un seul
écart, notée .
Le modèle utilisé par l'expérimentateur (Eq. (1)) s'écrit ainsi :

k k k
y  b0   b j x j   uj u j  jj j   Eq. (2)
b x x  b x 2

j 1 u , j 1 j 1
u j

i.3. Système d'équations


Chaque point expérimental permet d'obtenir une
valeur de la réponse.
Cette réponse est modélisée par un polynôme dont
les coefficients sont les inconnues qu'il faut
déterminer.
A la fin du plan d'expériences, on a un système de n
équations (s'il y a n essais) à p inconnues (s'il y a p
coefficients dans le modèle choisi à priori).
Ce système s'écrit d'une manière simple en notation
matricielle :

y  X b Eq. (3)


y  X b Eq. (3)

Où,
y : vecteur des réponses.
X : matrice de calcul, ou matrice du modèle, qui
dépend des points expérimentaux choisis pour
exécuter le plan et du modèle postulé.
b : vecteur des coefficients.
 : vecteur des écarts.
Ce système possède un nombre d'équations inférieur
au nombre d'inconnues. Il y a n équations et (p + n)
inconnues.
Pour le résoudre, on utilise une méthode de régression
basée sur le critère des moindres carrés.
On obtient ainsi les estimations des coefficients que
l'on note :

Le résultat de ce calcul est :

b̂   X  X  X  y
1
Eq. (4)
b̂   X  X  X  y
1
Eq. (4)

X : la matrice transposée de X.
XX : la matrice de dispersion

XX 
1
: la matrice d’information

Remarque
De nombreux logiciels exécutent ce calcul et
donnent directement les valeurs des coefficients.

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