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malgré le changement de saison »

… pour servir à une reprise (future) de l’exégèse (minime) des Églogues :

« Et pourtant, malgré le changement de saison, tout avait continué à se dérouler de telle


manière que j’avais pu me figurer que rien, en somme, n’était changé. » (Le Jardin des
Finzi-Contini, traduction de Michel Arnaud. Gallimard, p. 126)

14:24 Publié dans Fall in Love | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Littérature

mardi, 22 mai 2007


Le Printemps ment
En attendant Travers IV, peut-être l'hiver est-il, avec toutes ses ambiguïtés, un avant-
printemps.
Georg Heym a écrit un poème qu'il a intitulé "Printemps", par le mot français, et qui est
tout autre chose que printanier. C'est encore plus vrai de son "Frühjahr", où la dissonance
est criante entre le titre et le sujet vraiment traité, qui est la montée, non de la sève, mais
de la mort. Ce que Kurt Mautz résume dans la pertinente formule : "Der Frühling lügt".
Et il cite à l'appui Kafka, mais non pas Trakl. (Robert Rovini. La fonction poétique de
l'image dans l'oeuvre de Georg Trakl. Les Belles Lettres, 1971, p. 46)

Je reste coi, dans mon coin, tandis que le texte belliqueux me fait la nique. (Elle refuse de
travailler plus longtemps au Printemps et s'envole pour San Francisco, enregistrer un
album de belle daube.)
00:55 Publié dans Fall in Love | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Littérature

dimanche, 20 mai 2007


Qu'en biais
À un point du récit, le narrateur rencontre, avec quelques réserves de principe, celui
qui ne cesse ensuite de réapparaître dans ses journaux, sporadiquement mais de façon
marquante, et dont le patronyme, transcrit par homophonie, s'écrit qu'en biais.
Ossip Mandelstam périt épuisé dans un camp de transit après avoir donné avec une
superbe effronterie le chant le plus pur et plus matinal d'un siècle épouvantable.
(Gérard Vincent. Sous le soleil noir du temps. L'Âge d'homme, 1991, p. 14)

C'est juste avant le printemps qu'il le rencontre, au temps de Cerisy.


14:40 Publié dans Fall in Love | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Littérature

dimanche, 29 avril 2007


Magnificat (Hommage au kazoo)
Le mois bientôt sera clos, qu’on s’y fasse. MAIS ENFIN LES DEUX COEXISTENT ! Le soir
même du jour où j’ai lu la page de L’Amour l’Automne où il est question
de l’affirmation de Pesson selon laquelle « septuor est l’anagramme de Proust au
subjonctif » (p. 408), je regardai Le Temps retrouvé de Raul Ruiz, que je n’avais pas
vu, en son temps. Ici Marcel enfant filme Marcel adulte (tout est
inversé). Dans J.R.G. il y a l’initiale de Gabriel, prénom caché de Renaud Camus , signe de
l’archange, arc bandé, statuaire sans fin, mais aussi le clin d’œil à Le Clézio et à
Godard. Marcel est Marcel Proust (tout est aplati) ; du grand n’importe quoi. Dans
cet Antoine-là, il y a le jardin aux carpes mais surtout l’amour avec Auguste (au printemps
estival de la vie). Je ne mange pas de ce pain-là. PUISQU’ON VOUS DIT QUE FALL IN LOVE C’EST
L’AUTOMNE EN AMOUR ET NON PAS TOMBER AMOUREUX ! Pesson, vous le savez, est sans espoir
(anglais latin de la Princesse Palatine). Quel dommage qu’il n’y ait pas de page 804 pour
greffer encore l’un de ces 173 textes de 937 signes (émois : noirs morts à
Rüggen). Gros pré danse, grand-père S.O.S. ! grand os perse, gardon pressé, perd sans
ogre, grès rond sapé, gré nord passé, Sponde regras. MAIS CELA FERAIT UN 174EME TEXTE QUI
FICHERAIT TOUT PAR TERRE, ENFIN !

10:20 Publié dans 1295, Fall in Love, Unissons | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags
: Littérature, écriture, Musique, Polices

dimanche, 22 avril 2007


Feuilletage de signifiance
Prenant mon courage à deux mains, et ne pouvant plus réfréner mes ardeurs, je me suis
« attaqué » avant-hier au chapitre de L’Amour l’Automne qui commence à la page 149 et
dont l'un des deux co-auteurs (Antoine du Parc) admet qu’il réclame ardemment la
lecture en ligne sous forme de liens hypertextuels, et que la forme hyperlivre ici est tout à
fait malcommode.
(Toutefois, cette passion des pages emberlificotées, riches d’ajouts et de notes et
requérant du lecteur un constant va-et-vient très suggestif d’avant en arrière et d’arrière
en avant, est inhérente au projet des Églogues, et, à tout le moins, à la série des Travers,
dont on peut lire Été en ligne sur le Forum de la Société des Lecteurs, grâce – si j’ai bien
suivi – au travail de fourmi de Madame de Véhesse. Inhérent au projet des Églogues, cet
éclatement du texte sous forme de notes vertigineuses, s’il appelle la lecture en ligne sous
forme de liens hypertextuels, est très largement antérieur à l’existence du Web et de ses
possibilités hypertextuelles, justement. En témoigne cet extrait du Journal de Travers,
où l’on voit Renaud Camus se débattre avec les épreuves d’Échange :
Passé ensuite l’après-midi à travailler sur les épreuves d’Échange, en particulier à tenter
de rééquilibrer le texte du haut et le texte du bas, à la fin, le premier étant en retard sur le
second, ce qui rend nécessaires des ajouts. (Journal de Travers, Fayard, 2007, p. 636)

À ces pages les plus rudes (et donc qui suscitent le plus violemment le désir du lecteur (le
mien en tout cas)), je me suis donc « attaqué », pour constater, avec amusement, alors
que je tournais les pages dans tous les sens pour retrouver un fil perdu, puis, dans l’ordre,
lisant une suite filet après filet (c’est-à-dire que, pour lire une des notes, je devais tourner
les pages toutes les cinq secondes puisqu’il n’y avait qu’une seule ligne de texte suivi
m’intéressant à ce moment-là par page), pour constater donc (disais-je) que
les Églogues inventaient, dans la lignée de Barthes et de son fameux « feuilleté de
signifiance », le feuilletage de signifiance » : le suivi des diverses notes ligne à ligne,
d’une page à l’autre, implique de tourner les pages très rapidement, et plus rapidement
d’ailleurs que les pages d’un catalogue, prestance ou précipitation qui est peut-être le seul
signe qu’il ne s’agit pas d’une lecture nonchalante ou vaine de catalogue (encore que j’en
connais des qui feuillettent frénétiquement leur catalogue et vont jusqu’à le réduire en
pièces à force de s’interroger sur les mérites comparés de telle ou telle chaîne stéréo (Jef
se reconnaîtra (sauf qu’il ne lit pas ce blog))).
11:00 Publié dans Fall in Love | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature, écriture

vendredi, 20 avril 2007


Silexpectatives / Progrès en pensée assez lents
Vendredi 13, onze heures du soir (puis par bribes de ci de là)

La nage entre deux univers, et même entre de multiples. Après lecture des trois
premiers chapitres de L’expectative de Damian Tabarovsky, jeudi 12 avril, s’être
retrouvé avec L’Amour l’Automne (Travers III), acheté au Livre, vers une heure et
demie vendredi 13. En avoir lu quelque 70 pages dans la foulée, bien sûr. Le soir, au
concert, dans le sixième chapitre de L’expectative, être tombé sur ça :
Il prend une brochure, la lit : Ushuaïa, la ville du cul du monde. (L’expectative, p. 73)

qui rappelle ça, quelques heures plus tôt :


Moi, dit Carlos, je viens d’une ville du sud du pays : quand on est là on a l’impression
que c’est le cul du monde. Eh bien en effet, quand je suis arrivé à Paris, on me
demandait d’où j’étais, je disais Lanus, tout le monde était plié en deux. (L’Amour
l’Automne, p. 72)

J’ai noté plusieurs autres collusions entre les deux textes, mais il me semble que, dans
l’extrait de Renaud Camus on pourrait aussi observer d’autres significations à
l’œuvre : ainsi, la phrase citée date de 1976 mais, recomposée pour figurer dans
l’églogue publiée cette année, pourrait tout aussi bien s’appliquer à Plieux, où Renaud
Camus s’est installé en 1992 et qui est, d’un certain point de vue, et comme il le
suggère notamment dans les premières pages du Département du Gers, une forme de
« trou du cul du monde ». Or, en réduisant l’expression plié en deux à ses trois
premières et ses trois dernières lettres (comme au jeu des papiers pliés), qu’obtient-
on ? Plieux, justement.
Ce sont éclats de silex, exils entre les pages, propos taclés de main de maître. Un
clavecin même nous amuse. (La main d’un maître anime etc. ?)

Sinon/ d’ailleurs/ entre autres choses, je ne suis pas sûr de saisir ce que l’on trouve de
si fort ou de si déroutant à ce texte de Damian Tabarovsky. Le chapitre sur l’absence
de morts visibles, de sang, lors des attentats du 11 septembre est franchement plat ; la
manière même de plaquer l’effondrement des Tours jumelles dans le monologue
intérieur de Jonathan est complaisante.
Le reste du récit exploite le filon des textes où l’on suit les méandres d’une pensée qui
se cherche : Jonathan, pensant beaucoup, puis de moins en moins, ne sait finalement
que penser. Tout se chamboule, du coup, non pas le chaos des
souvenirs remouvants au gré d’une stream of consciousness, mais bien la pensée –
ou les pensées. Jonathan doit beaucoup aux figures d’intellectuels désemparés ou
revenus de beaucoup, singulièrement à la Marelle de Cortazar.
Comme je déteste ces stylos plume de gamine qui ne donnent comme choix que :
1) d’écrire en posant le bouchon sur la table → dans ce cas, le stylo est trop frêle, ne tient pas en main
2) d’écrire en fixant le bouchon au-dessus de l’abdomen du stylo, à la place prévue → dans ce cas, le
bouchon tombe
3) de pousser le bouchon afin d’éviter le cas n° 2 → dans ce cas, il se coince, et on risque de tout casser
en le retirant

Damian Tabarovsky dresse le portrait d’un personnage traversé par un tumulte


intérieur plutôt gentillet, un trentenaire dans l’indécision. Rien de bien neuf à cela.
Pas pour le style, si la traduction est fidèle. Ni pour la froideur sèche avec laquelle
l’idylle à peine née, traduite en effets ménagers, s’émiette dans l’indécision
perpétuelle et le penchant de Jonathan pour une existence velléitaire. Ni encore pour
la façon dont Jonathan s’enfuit, part en vrille vers Berlin, sur la seule suggestion d’un
article de journal sur les chambres à gaz. Le récit s’achève sur l’intervention d’une
voix à l’origine énigmatique et qui prononce des avis complexes sur l’ironie absolue
des conditions de pensée (dans ce que l’on imagine le monde post-m od erne).

Le trajet de Jonathan l’amène à ne plus vouloir penser – et presque à y parvenir :


« simplement, il ne va pas » (p. 119). Il se retrouve à laver de petits avions en
Allemagne, coupé alors des autres par le barrage de la langue, et progresse encore
dans l’abandon de toute pensée : « Tout se passait comme si le seau et le chiffon
occupaient à présent la dimension absolue de son être, de l’être ouvert pour le seau. »
(p. 125). Nouvel épis od e convenu, plaqué ou complaisant, il y côtoie Mathias Rust
avant son périple en Cessna et son atterrissage inattendu sur la Place Rouge. ( À
l’époque, j’avais appris le mot Cessna ; aussi ai-je tout de suite compris que le jeune Allemand dont J.
fait la connaissance était cet énigmatique pilote amateur dont on n’a jamais bien compris les
motivations pour avoir pris tant de risques.) C’est convenu, parce que Tabarovsky n’en fait
rien, ne prend pas de parti esthétique, s’en tient à l’écume de l’événement. Si son
objectif était d’écrire un roman sur l’importance grandissante de pensées
superficielles, pourquoi ne pas l’avoir situé tout de go dans un salon de coiffure ?
(Je sais : on exagère.)

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