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UNE NEWSLETTER ACTIVE DE

LES MOTS POUR LE DIRE

OBÉ-DUO
ÉCHANGES PROFESSIONNELS DE
S A N T É / PAT I E N T S S U R L ’ O B É S I T É

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#OBEDUO

AV R I L
2022 NEWSLETTER N°2
OBÉ-DUO

L’OBÉSITÉ

D ÉF I N I T I ON
L’obésité correspond à un excès de masse grasse et à un dysfonctionnement
du tissu adipeux, entraînant des inconvénients pour la santé et pouvant
réduire l’espérance de vie.

Près d’un Français sur deux (47 %) est soit en surpoids, soit en situation d’obésité.

À l’occasion de la journée mondiale de lutte contre l’obésité, le 4 mars 2022, la


revue Nutritions et endocrinologie a lancé Obé-Duo, un dialogue autour de
l’obésité.

En mobilisant les expériences et les savoirs de ceux qui la soignent, la vivent


ou l’ont vécue que ce soit au quotidien comme au sein des structures spécial-
isées.

Obé-Duo c’est un échange mensuel entre professionnels de santé et patients


autour d’un thème en rapport avec l’obésité. Ce mois-ci, nos experts se retrou-
vent autour de la stigmatisation.

Le dialogue s’effectue en deux temps. Tout d’abord, un patient et un profession-


nel de santé vont échanger pour mettre en avant les mots et représentations
qu’ils associent au thème. Au cours d’une interview, ils vont argumenter leurs
choix pour finir par faire ressortir 4 mots. Puis, ces mots seront décortiqués et
soumis à l’analyse d’un(e) psychologue et d’un(e) linguiste. Parce que pour sor-
tir des idées reçues, des formules toutes faites qui emprisonnent les personnes
atteintes d’obésité dans notre société il faut d’ores et déjà sortir des carcans de
la langue et du langage et s’ouvrir à l’autre... ce qui passe aussi par l’utilisation
d’un vocabulaire adapté.

Parler de la maladie obésité pour faire évoluer les modes de pensées, les
approches et changer les choses.

#OBEDUO
LE THÈME

INJONCTIONS PARADOXALES

D ÉF I NI T I ON
L’injonction — NOS EXPERT(E)S —
paradoxale naît
quand on ne peut BÉATRIX DE LAMBERTYE
pas obéir à une Consultant Obésité-TCA
La notion d’injonction paradoxale découle du
instruction sans y concept de double contrainte développé par
désobéir. l’école de psychologie de Palo-Alto aux Etats-
Unis. Elle est caractérisée par une instruction contenant deux élé-
ments antinomiques (par exemple : “il est interdit de lire cette
affiche”), ou encore une phrase accompagnée d’un geste contra-
dictoire (comme une mère dont le visage et la voix indiquent la
colère, qui appelle son enfant en lui disant qu’elle veut le câliner
parce qu’elle l’aime). Cette contradiction, lorsqu’elle est répétitive, a un impact négatif sur le psychisme de la
personne qui y est confrontée.

KATARINA MIHINDOU ET CHRISTINE RODRIGUEZ


Association Vivre Autrement Ses Formes (VASF)
Nous sommes hors normes, et dans notre société, on nous pousse à consom-
mer tout en nous demandant d’être dans les normes en restant minces… Il y
a de quoi être perdu ! Et pour ce qui est de la chirurgie bariatrique, on nous
demande de manger même quand on n’a pas faim pour éviter la dénutrition,
alors qu’avant on nous demandait de nous restreindre en écoutant notre satiété. D’autant qu’on nous apprend à
respecter nos sensations alimentaires et la chirurgie nous fait reperdre cet apprentissage. L’enfant a un fonction-
nement simple au départ, il mange uniquement quand il a faim. Mais selon son éducation dans la famille, il peut
perdre le fil conducteur d’écoute de son corps quand on va lui demander par exemple de finir son assiette, sinon il
sera privé de dessert, ce qui est paradoxal. Cela ancre un mode de fonctionnement et rend compliqué de revenir à
l’écoute de ses sensations.

STEPHANIE IRANI psychologue, psychothérapeute


Avec l’obésité, d’un côté, nous sommes face à un diagnostic médical établi entre autre grâce à
l’IMC qui est un outil de définition à la fois de l’obésité, de la maigreur et de la norme, et de l’autre
le patient qui ne se voit pas forcément comme malade. Ce dernier aura peut-être été victime
d’une injonction paradoxale entre “consommez” et “soyez mince” très caractéristique de notre
société de consommation, ou encore d’une croyance que lorsque l’on se nourrit “beaucoup” c’est
le signe d’une bonne santé, croyance souvent entretenue par les parents auprès de leurs enfants,
dans certains cas bien sûr. Qui n’a pas entendu cette expression “quand l’appétit va, tout va” ?

CAROLE LAILLER docteur en sciences du langage


Se voir donner des ordres, imposer une vision par un autre ou la société
n’est jamais bien agréable, qu’on s’y plie docilement, qu’on en reconnaisse
l’exigence ou qu’on ait envie de s’y opposer. Mais qu’en est-il lorsque ces
injonctions semblent pour le moins étranges voire contraires les unes aux
autres ? Comment naviguer à vue et garder le cap dans cet océan d’incer-
titudes et de paradoxes en tout genre ?
1 THÈME : 4 MOTS

INJONCTIONS PARADOXALES

A N TIN OMIE CONFUSION


Nom féminin (grec anti- Nom féminin
nomia, contradiction) (latin confusio, -onis)

1. Contradiction entre 1. Action de confondre, de


deux propositions de prendre quelque chose ou
significations opposées ; quelqu’un, pour quelque
plus spécialement, entre chose ou quelqu’un d’autre,
deux idées générales (ou abstractions) issues de la réalité. 2. État de ce qui est confus, indistinct, désordonné
2. Chez Kant, principe transcendantal contradictoire de 3. Situation d’un groupe où tout le monde s’agite de
la cosmologie, valable au plan de son argumentation manière désordonnée
logique, mais qu’on ne peut vérifier dans la réalité. 4. Embarras, trouble causé par le sentiment d’une
3. Contradiction qui surgit à l’intérieur d’une théorie naïve. maladresse, d’une faute
Synonymes : antilogie - paradoxe Synonymes : méprise - quiproquo - incohérence - chaos -
désordre - enchevêtrement - fouillis - mélange - pêle-mêle

A L I É N AT I O N S I D É R AT I O N
Nom féminin (latin juri- Nom féminin (latin sideratio,
dique alienatio) action funeste des astres)

1. État de quelqu’un qui Anéantissement subit des


est aliéné, qui a perdu forces vitales, se traduisant
son libre arbitre. par un arrêt de la respiration
2. Situation de et un état de mort apparente.
quelqu’un qui est dépossédé de ce qui constitue son Synonymes : anéantissement- dépression
être essentiel, sa raison d’être, de vivre.
Synonymes : assujettissement - démence - égarement

KATARINA MIHINDOU
CHRISTINE RODRIGUEZ
Présidente et secrétaire de l’association Vivre
Autrement Ses Formes (VASF)

ASSOCIATION VIVRE AUTREMENT SES FORMES (VASF)


L’association Vivre Autrement Ses Formes (VASF) a été créée en 2014 par des patients en situation d’obésité à
Feyzin. Katarina Mihindou est la présidente et Christine Rodriguez la secrétaire. VASF concerne des personnes qui
souffrent d’obésité et que nous accompagnons dans leur parcours (qu’il soit médical, chirurgical ou autre). Les pa-
tients viennent de toute la région Auvergne-Rhône-Alpes, et la crise sanitaire nous a fait développer la visioconfé-
rence pour toucher ce public parfois éloigné géographiquement. Nous comptons actuellement une cinquantaine
d’adhérents, mais il n’est pas obligatoire de l’être pour bénéficier de nos ateliers et conférences. Nos objectifs sont
d’informer sur la chronicité de la maladie, qui engendre d’autres pathologies évoluant à bas bruit, soutenir les pa-
tients par l’écoute et la bienveillance et des partages d’expérience, découvrir de nouvelles approches thérapeutiques
(sophrologie, hypnose...), accompagner les personnes par le biais de diverses activités et sorties. https://www.vasf.fr/
— L’INTERVIEW —

BÉATRIX DE LAMBERTYE KATARINA MIHINDOU


CHRISTINE RODRIGUEZ

ANTINOMIE VASF 69 : On est souvent considérés comme si c’était notre


B. L. : Pour les personnes en situation d’obésité, cela com- choix d’être gros. C’est difficile à vivre parce que les gens se
mence par la contradiction entre le discours public qui classe croient permis de nous faire des réflexions. Si on a un défaut
l’obésité dans le champ des pathologies, alors qu’il n’y a pas de physique, on ne le fera pas ressentir, mais dans l’obésité, on
reconnaissance institutionnelle de cette maladie métabolique pense que nous pouvons y faire quelque chose et qu’il suffit
chronique et qu’on pointe la responsabilité individuelle dans de s’y mettre. Mais non justement, on n’y arrive pas. On nous
un contexte où les recherches font émerger de plus en plus envoie en pleine figure que ce serait mieux si c’était autre-
de facteurs relevant du champ sociétal. Un autre paradoxe : ment. Et quand on nous dit : “faites attention à ce que vous
les personnes en obésité considérées comme extrêmement mangez mais faites-vous plaisir”… Que signifie “se faire plaisir”
vulnérables face au Covid-19, mais les dernières à figurer sur quand on a peur de prendre du poids ? Et quand on entre
les listes des personnes à vacciner. Huit millions de personnes dans un parcours de chirurgie bariatrique, on recommande
vulnérables qu’on ne vaccinait pas. Aussi beaucoup sont-elles au patient d’augmenter sa masse musculaire – pour augmen-
restées enfermées chez elles, car le traitement de l’information ter sa dépense énergétique de base et pour éviter la perte
par les médias était terrorisant. de muscles lors de l’amaigrissement. On demande donc de
VASF 69 : Dans l’injonction paradoxale, il y a deux termes anti- faire du sport, un mot difficile à entendre car souvent les per-
nomiques qu’on nous matraque dans les médias, la société, le sonnes ont eu un rapport au sport difficile, et on leur dit :
monde médical. On a l’impression d’avoir un double discours. “surtout prenez un sport qui vous fait plaisir”. Alors que fait le
Par exemple, on nous dit d’arrêter de contrôler notre alimen- patient quand aucun sport ne lui fait plaisir ?
tation, car c’est de la restriction cognitive. Néanmoins, on nous
demande de faire attention, donc de contrôler. Alors ? On le fait ALIÉNATION.
ou pas ? On a l’impression de ne pas avoir notre place dans la so- B. L. : L’injonction paradoxale subie répétitivement peut me-
ciété : vêtements, transports, médecin. Ce n’est pas adapté alors ner certains à s’évader dans la dépression voire la folie, à quit-
que ça l’est pour d’autres. Du coup, la culpabilité est toujours là. ter leur univers invivable pour s’en construire un autre. Les tra-
vaux de Gregory Bateson et Paul Watzlawick les ont conduits
SIDÉRATION à se demander si ce mécanisme, vécu dès le plus jeune âge,
B. L. : La sidération est un état de blocage mental qui naît de était à l’origine de la schizophrénie. Au minimum, cela peut
la confrontation à un choc, et ne permet pas de prendre une provoquer un état de perte de contrôle mental, une aliéna-
décision ; la personne se fige pour essayer d’éviter que quelque tion. On parlait autrefois des asiles d’aliénés où on enfermait
chose de pire arrive. L’injonction paradoxale crée ce méca- les gens considérés comme “fous”… Une expression que beau-
nisme de “lapin pris dans les phares d’une voiture” : quoi choi- coup de femmes en situation d’obésité entendent : “comme
sir ? Et pour les personnes en situation d’obésité, le fait d’être c’est dommage, tu as un si joli visage”. Mais au fond, qu’est-ce
confrontées à une abondance de choix alimentaires dans les qui est dommage ? D’avoir un joli visage sur un corps gros,
rayons d’un supermarché, avec au-dessus de leur tête le mes- ou un corps gros avec un joli visage ? Ce n’est pas tout à fait
sage qu’on leur a mille fois répété “tu n’y as pas droit, tu vas le même message et la personne se demande si elle gâche
prendre du poids”, cela crée un état de sidération. son joli visage avec son corps moche, ou bien est-ce qu’avec
VASF 69 : Il y a une phrase que l’on entend souvent : maigrir fait son corps moche elle ne mérite pas d’avoir un joli visage ?
grossir. Alors que faire avec ça ? Si je veux maigrir, je prends le C’est une injonction paradoxale terrible à entendre, parce
risque de regrossir voire grossir plus, et là je suis perdue. Quand que derrière, il y a le “je t’aime mais je te déteste” et c’est
on a deux instructions opposées, on ne sait pas comment se très grave. Et cela va bien au-delà de l’apparence. L’auteur de
positionner. Et la publicité pour les aliments industriels gras, cette petite phrase exprime le fond de ce qu’elle est ou ce
sucrés et salés, qui doivent afficher le message “mangez cinq qu’elle ressent à travers ces termes subjectifs banalisants. Et
fruits et légumes par jour” met en évidence une contradiction cela abîme beaucoup les personnes qui entendent ça. Parfois,
qui peut créer une sidération. après cette première phrase, on peut entendre : “mais je te dis
ça pour ton bien”. Si on décrypte, est-ce que ça veut dire que,
CONFUSION. pour le bien de la personne, on lui dit qu’elle est moche ? On
B. L. : Prenons la prévention en matière d’alimentation, comme en revient à la question de la responsabilité individuelle : “si tu
ce message de ne pas manger trop salé ou trop gras sous une es gros, c’est ta faute”. Cette vision n’est pas acceptable.
publicité pour une choucroute garnie… Plus grave : les publicités VASF 69 : D’où la perte de confiance, la perte d’estime de soi.
pour des fruits et légumes arborent également ces messages. C’est une phrase très forte dont on a du mal à se relever. Et
Or, nous avons tous intégré qu’en bas des publicités pour la lorsque la confusion s’installe, on perd ses repères, et on peut
nourriture il y a des messages de prévention qui contredisent en “perdre les pédales”. On nous parle d’être pris en charge,
l’image publicitaire de choses qu’on veut nous vendre, tout en en contradiction avec le fait qu’on nous demande d’être ac-
nous interdisant d’en manger ou d’en abuser ; mais il y a des teurs de notre santé. La prise en charge est une forme d’infan-
messages similaires sur des images d’aliments qu’on nous en- tilisation et les injonctions à suivre un parcours ou faire une
courage à manger. C’est de plus en plus compliqué et ça génère chirurgie s’opposent à l’autonomie. Une personne en obésité
une grande confusion. J’entends parfois la remarque : “il ne fau- a perdu confiance dans l’écoute de ses propres sensations,
drait pas dire aux gens qu’ils ont une maladie chronique, sinon devenir autonome n’est pas si évident. Aliénantes aussi ces
ils vont se laisser aller”. C’est difficile de trouver plus paradoxal images très culpabilisantes que l’on a vu fleurir pendant les
que cette affirmation. Si c’est chronique et que la personne n’y confinements de la crise sanitaire. Également, les messages
peut rien, en quoi se laisse-t-elle aller si elle continue à vivre avec sur la fragilité des personnes en situation d’obésité face au
son problème chronique ? Cela vient de l’ignorance du public, virus, et la saturation des services de réanimation. Beaucoup
parfois aussi de certains praticiens de santé de ce qu’est l’obésité de personnes ont dû ressentir le reproche non formulé des
en termes de pathologie chronique. soignants sur leur présence en réanimation.

RETROUVEZ LE PODCAST DE L’INTERVIEW


— NOS EXPERT(E)S —

STEPHANIE IRANI
Psychologue, psychothérapeute

ANTINOMIE
S. I. : L’antinomie est une contradiction, une opposition totale entre deux idées qui bien que paressant vraies
toutes les deux, se contredisent. Cela étant dit, comment pouvons-nous penser l’antinomie en lien avec l’obésité ?
La médecine classe l’obésité au rang des maladies, ce qui revient à faire le lien suivant : “être obèse” signifie
“être malade”. Or, il apparaît que beaucoup de patients en situation d’obésité ne se voient pas comme étant
malades.

CONFUSION
S. I. : La confusion représente un mélange d’idées qui n’est pas clair et qui peut empêcher la réflexion raisonnée
en ce sens où les choses sont embrouillées pour le sujet qui est confus. Afin d’illustrer ce propos, j’ai choisi de
rapporter une situation vécue au cabinet lors d’une consultation. Une patiente dira au sujet de son poids “j’ai
besoin de perdre au moins vingt kilos”, ce sur quoi je la questionne sur les raisons qui la poussent à vouloir
perdre du poids. Sans même réfléchir, elle me répondra “pour être belle !” avant d’ajouter “mais je me sens bien
comme ça, c’est mon corps, il m’appartient, j’en fais ce que je veux”.
Confusion - ambivalence apparaissent ici assez proches.

ALIÉNATION
S. I. : Instinctivement l’aliénation m’évoque l’aliénation mentale, la privation de liberté ou encore une relation
difficile entre des individus (par exemple dans l’aliénation parentale). Ainsi, une préoccupation excessive
à l’égard de son poids peut entraîner une privation de liberté en ce sens où la personne “aliénée” n’arrive pas à
avoir un rapport sain et serein à l’alimentation et où une dimension quasi obsessionnelle peut apparaître.
L’aliénation pourrait être également l’enchaînement du patient souffrant d’obésité à son propre corps, comme
s’il en était prisonnier.
Enfin, c’est l’émancipation qui représenterait la sortie de cet état d’aliénation en ce sens où par l’émancipation
le sujet s’affranchit de servitudes ou de préjugés.

SIDÉRATION
S. I. : Spontanément, j’associe le mot “sidération” à une situation de traumatisme psychique.
Rappelons qu’un évènement traumatique est un évènement dont la soudaineté, l’intensité et la violence
entraînent un choc psychique, une effraction (quelque chose qui ne peut pas être intégré, digéré par le
psychisme tellement le choc est violent). L’évènement traumatique surgit donc sans prévenir et est brutal.
L’on comprend ainsi que le sujet victime n’y est absolument pas préparé. Dans ce contexte-là, la sidération est
l’incapacité à réagir ou à ressentir quoique ce soit face au trauma. Le sujet est “sous le choc” comme tétanisé.

EN PARTENARIAT AVEC
— NOS EXPERT(E)S —

CAROLE LAILLER
Docteur en sciences du langage

ANTINOMIE que de se laisser happer par ce vide sidéral, retrouvons


Qu’elle soit solidement ancrée dans le réel ou qu’elle matière à dire pour ne plus rester bouche bée devant ce
joue gaiement avec les apparences, l’antinomie nous qui kidnappe ceux qui nous sont chers.
place face aux oppositions de nos principes et idées. Les
contradictions qui se glissent dans les lois de nos vies, CONFUSION
qui ne sont pas que des vues de l’esprit, hélas, et ne nous Qu’elle soit matricielle ou générale, intérieure ou men-
poussent pas toujours à nous opposer au monde, - hélas tale, la confusion s’applique aussi bien à l’individu trou-
bis ? - elles font certes notre charme mais ne sont pas blé qu’à la situation embrouillée. Elle en est le résultat
toujours faciles à appréhender, croiser et assumer… aussi bien que la sensation, aussi diffuse qu’insoupçon-
nable jusqu’à ce qu’on ne voie plus qu’elle. Elle s’insinue,
Alors comment les dépasser ou du moins les concilier ? s’installe puis règne en maÎtresse de nos rêves comme
La raison a beau se faire critique et vouloir s’épurer, les de nos sens. Elle se sème, à la jetée, sans ménagement
deux versants d’une même déclaration semblent aussi pour mieux pousser dans le brouillard et prêter, sans
fondés l’un que l’autre, nous plongeant dans des abîmes sourire, à conséquence…
de contradictions. Ce discours à plusieurs voix/voies, pe-
tites ou grosses, malgré la légitimité de chacune, semble Certes, dans son genre, elle réunit puisque la “confusion
soufflé par des vents contraires et nous déboussole. Pour- des peines”, “de dettes” ou “des pouvoirs” permet de re-
tant, retrouver le nord et son/le (bon) sens permet de trouver un seul dénominateur commun mais, elle divise
s’accommoder de ces différends qui ne doivent, jamais, aussi dans la mesure où elle entraîne un désordre, un
avoir rien d’irréconciliables. chaos qui nous laisse dans un embarras bien délicat à
supporter. L’ordre établi n’est plus et la perte de repères
SIDÉRATION ainsi induite déstabilise. On nage alors en pleine confu-
Si l’histoire abracadabrantesque racontée par un proche sion, pas comme un poisson dans l’eau, ah ça non, mais
nous sidère, c’est parce qu’elle nous frappe de stupeur toujours dans le brouillard, et la vague qui nous sub-
autant qu’elle nous abasourdit. Le trouble engendré est merge ne peut être dissipée qu’à grand renfort de sou-
telle que le chemin de notre raison semble brouillé, les tien, sans quiproquo aucun.
pistes, jusqu’ici si claires et dessinées, s’enchevêtrent
brusquement… Même les étoiles, d’ordinaire si bonnes ALIÉNATION
conseillères quant aux directions à suivre, ne nous L’aliénation, qui n’a rien d’un lien, s’évertue au contraire
portent plus aucun secours. On leur prête même par- à creuser un fossé : elle dessine un alter plus du tout égo
fois une action funeste sur notre santé et nous voici tout voire totalement étranger et nous éloigne de nos biens
à coup sidérés, saisis par une force contraire et invisible tout autant que de nous-même.
qui nous laisse abasourdis et cois, aussi muets que désar-
més. L’imprévisibilité règne, on ne sait plus à quel saint Qu’elle implique un droit, une propriété ou un individu,
se vouer puisque les astres nous font défaut ! elle dit la perte et la privation. Elle nous expose, une fois
encore, à l’abandon. Abandon de ses facultés mais aussi
Lorsque la foudre frappe, réellement ou virtuellement, abandon à l’autre qui prend possession de notre cœur,
comment sortir de cet état d’anéantissement de nos de notre corps et de notre esprit. L’hostilité se fait sentir,
fonctions vitales et recouvrer la santé ? Comment échap- l’asile n’a plus rien de salutaire et la folie nous étreint…
per à ce statut qui nous fige, moins sculptural que cari- L’aliéné devient alors aussi étranger à sa propre personne
catural, qui nous pétrifie comme le regard de Méduse qu’il nous semble éloigné de nous. Il paraît comme en-
(NDLR : figure mythologique à la chevelure de serpents fermé dans des ailleurs trop lointains pour en retrouver le
qui changeait immédiatement en pierre, le pétrifiait donc, chemin… Un hors-sol qui confine à l’extra-terrestre, le ren-
tout mortel qui osait croiser son regard.), qui trouble notre dant encore plus monstrueux que le plus terrifiant des
vue et nous laisse éberlué, qui nous frappe au creux du Aliens. Pourtant, en tentant coûte que coûte de retrou-
ventre et nous estomaque, qui nous paralyse et nous ver les routes de l’humanité, on fait advenir ces liens si
donne l’air ahuri. Organes et sens sont donc touchés, précieux comme autant de ponts au-dessus des abîmes.
interdisant tout mouvement salvateur. Pourtant, plutôt

“Qu’elle implique un droit, une propriété


ou un individu, elle dit la perte
et la privation. L’aliénation nous expose,
une fois encore, à l’abandon.”
#OBEDUO
#OBEDUO

R É F L É C H I S S O N S FAC E AU X
IN J O N CTI O N S PA R A DO X A L ES !

#AN T IN OM IE # CO NFUSI O N

# A L IÉ N AT IO N # SI DÉR AT I O N

AV R I L 2 0 2 2

L E P O I D S N ’ E S T PA S U N
MARQUEUR DE SANTÉ
“TOUT LE MONDE DOIT AGIR.”

REVUE.NUTRITIONS.FR

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