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L’impossible hégémonie 

: de la Guerre de Corinthe à la défaite de Chéronée

Texte 68
L’irrésistible ascension de Philippe de Macédoine (341 av. J.-C.)
Démosthène, Troisième Philippique, 21-27, en 341

Introduction
Démosthène (en grec ancien Δημοσθένης / Dêmosthénês), né à Athènes en 384 av. J.-C.,
mort à Calaurie en 322 av. J.-C., est un homme d'État athénien. Grand adversaire de Philippe II de
Macédoine, il est l'un des plus grands orateurs attiques. Ses problèmes d'élocution lui valurent
le surnom de « bègue », défaut qui, dit la légende, le contraignit à s'entraîner à parler avec des
cailloux dans la bouche. Démosthène naît dans une famille athénienne riche et commerçante, ce qui
lui vaut le mépris des vieilles familles aristocratiques ; son père, Démosthène de Péanie, possède une
manufacture d'épées. Sa mère aurait été d'origine scythe, mais ce ne fut jamais attesté et resta une
accusation calomnieuse et polémique de la part de ses adversaires lors des tensions avec la
Macédoine de Philippe II (si ce fait avait été avéré, cela lui aurait ôté ses droits de citoyen). À sept
ans, il devient orphelin. Son père, par testament, l'a confié à trois tuteurs : deux de ses neveux,
Aphobos et Démophon, et un certain Therippide. Ses tuteurs dilapident sa fortune, par erreur de
gestion ou par intention malhonnête. Le jeune homme se retrouve sérieusement appauvri. Il est
d'abord élève de Platon. À seize ans, il assiste au procès intenté à Callistratos, en -367, et devient son
élève. Fasciné par le talent de l'orateur, il décide d'apprendre la rhétorique et devient l'élève d'Isée,
un autre orateur attique, spécialisé dans les affaires de succession. Selon Plutarque, lors de son
premier discours en public, l'assistance se moque de son problème d'élocution — vraisemblablement
une difficulté à prononcer la lettre R — et de ses gestes maladroits. Démosthène s'efforce alors de
rectifier ces défauts, allant jusqu'à s'entraîner à parler avec de petits galets dans la bouche, ou même
en s'exerçant à dominer de la voix le bruit d'une mer furieuse. Il s'enferme régulièrement chez lui
pour étudier le style de Thucydide. À cause de toutes ces préparations, et de sa réticence à
improviser, les autres orateurs lui reprochent souvent de « sentir la lampe » et de n'avoir aucun don
naturel. Le fait est que pendant la suite de sa carrière, Démosthène accorde toujours beaucoup
d'importance à la forme du discours. Démosthène intente une série de procès contre ses anciens
tuteurs, avec son premier discours judiciaire, Contre Aphobos, suivi du Contre Onètor. Pourparlers et
discussions durent trois années au bout desquelles il gagne enfin sa cause en -363, mais ne peut
recouvrer qu'une partie de son héritage initial. Démosthène se lance ensuite dans la carrière de son
maître Isée. Il la mène avec un certain succès puisqu'il a comme clients certains des plus riches
Athéniens, comme Phormion, pour lequel il écrit le Pour Phormion. L'affaire porte sur la somme
considérable de 20 talents. À 25 ans, il fait de nouveau une apparition publique avec deux discours
politiques. Les deux, Contre Leptine et Contre les immunités, sont dirigés contre une proposition de
loi interdisant d'excepter aucun citoyen des liturgies, sauf les descendants d'Harmodios et
d'Aristogiton, les tyrannoctones, assassins du tyran Hipparque. À partir de -351, Démosthène
s'attaque à un défi d'une toute autre ampleur : il s'efforce de combattre le pouvoir de Philippe II de
Macédoine, devenu de simple souverain d'un royaume périphérique, la puissance majeure du monde
égéen. Le Macédonien vient d'intervenir en Thrace, menaçant ainsi les clérouquies d'Athènes et ses
routes d'approvisionnement en blé. Les Athéniens sont démoralisés et enclins au défaitisme. C'est
alors que Démosthène prononce sa première Philippique. Il commence par montrer à ses
concitoyens que la situation n'est mauvaise qu'en raison de leur inactivité, et qu'inversement un
sursaut d'énergie peut renverser les choses. En pratique, il propose d'envoyer un corps
expéditionnaire en Macédoine même. Démosthène s'oppose donc, par son volontarisme, à la
politique défensive prônée par l'orateur Euboulos. La majorité du peuple suit ce dernier.
Parallèlement, la cité d'Olynthe, alliée de Philippe, s'inquiète elle aussi de l'accroissement du pouvoir
du Macédonien. Elle a commencé à se rapprocher d'Athènes et a même signé une paix séparée
pendant l'hiver -352/-351. En -349, Philippe exige d'Olynthe qu'elle lui remette deux réfugiés
politiques macédoniens. Devant le refus de la cité, il envahit la Chalcidique. Olynthe appelle aussitôt
Athènes à l'aide. Démosthène soutient la requête de la cité dans sa première Olynthienne, où il
pointe de nouveau du doigt l'inaction de ses concitoyens. Il propose un plan double  : le premier volet
consiste à aider Olynthe en lui envoyant un contingent. Le second propose de nouveau de frapper le
royaume même du Macédonien. Si les Athéniens concluent bien un traité d'alliance avec Olynthe, ils
rechignent à expédier des troupes, effrayés par la perspective d'une guerre avec Philippe. Pour
achever d'emporter leur assentiment, Démosthène prononce sa seconde Olynthienne, dans laquelle
il entend démontrer la fragilité de la puissance de Philippe : ses alliés se retourneront contre lui,
promet-il, au premier échec. Ce second discours n'est suivi d'aucune mesure effective, aussi
Démosthène compose-t-il sa troisième Olynthienne, attaquant la loi d'Euboulos : cette loi imposait de
transférer les excédents du μερισμός / merismós (sorte de budget de la cité) au fonds des spectacles,
le θεωρικόν / theôrikón, alors que depuis Thémistocle ils étaient affectés aux dépenses militaires de
la cité. Les Athéniens refusent d'abroger cette loi, mais votent l'envoi de secours — si faibles qu'ils
n'empêchent pas Olynthe de capituler. Avant même la chute d'Olynthe, Philippe a proposé la paix à
Athènes, sans doute parce qu'il préfère se consacrer à l'expansion vers le sud et l'est. En réponse,
l'orateur Philocrate fait voter un décret autorisant le Macédonien à envoyer des hérauts.
Démosthène est associé depuis le début aux entreprises de Philocrate. Il ne s'agit pas d'une volte-
face : l'orateur entend profiter de ce répit pour renforcer les défenses d'Athènes. Parallèlement,
Athènes approche les cités grecques, en leur proposant un sursaut panhellénique anti-macédonien.
Cette initiative connaît l'échec, dans une relative indifférence athénienne. En effet, la cité a
désormais le regard tourné vers les protagonistes de la Troisième Guerre sacrée. Pour empêcher une
intervention macédonienne, les Phocidiens confient la garde du défilé des Thermopyles aux
Spartiates et aux Athéniens. La menace directe sur la Grèce centrale et le Péloponnèse semble
écartée. De nouveau, Athènes envoie des ambassades pour fédérer les cités grecques, que ce soit
pour la guerre ou pour la paix. Un retournement de situation survient alors  : un nouveau coup d'État
fait revirer les Phocidiens en faveur de Philippe. Les contingents spartiate et athénien se voient
interdire l'accès aux Thermopyles. Une ambassade comprenant Démosthène et Eschine est envoyée
d'urgence à Philippe, dans l'espoir de conclure une paix. Eschine prétendra que  « Démosthène fut si
décontenancé devant Philippe qu'il bafouilla un discours inintelligible ». Démosthène doit donc de
nouveau consentir une paix temporaire, compte tenu de la faiblesse dans laquelle se trouve Athènes.
Dès -344, la deuxième et la troisième Philippique exhortent de nouveau les Grecs à réagir. Malgré
l'alliance avec Thèbes, Athènes et les cités grecques sont vaincues à Chéronée en -338. Démosthène
continue à plaider en faveur de la résistance au Macédonien, par exemple dans son Oraison
funèbre des morts de la guerre. Nommé commissaire chargé de la surveillance des travaux de
reconstruction des fortifications, Démosthène y contribue sur sa propre fortune. En -
337, Ctésiphon propose que la cité lui décerne une couronne d'or, lors des Grandes Dionysies, pour
ses mérites. Eschine, un autre des orateurs attiques, attaque le projet comme illégal dans son Contre
Ctésiphon : Démosthène n'a en effet pas rendu de compte à l'issue de son mandat. Si Eschine a
raison d'un point de vue juridique, il s'agit de toute évidence d'attaquer Démosthène sur ses idées
politiques. Démosthène écrit lui-même le discours de son admirateur : c'est le Sur la couronne,
probablement son chef-d'œuvre. Eschine, désavoué, doit s'exiler. En -324, c'est au tour de
Démosthène lui-même de prendre le chemin de l'exil, à la suite de l'« affaire d'Harpale » : il est
accusé d'avoir détourné une partie de l'argent placé sous séquestre par le trésorier
d'Alexandre, Harpale. Il doit se retirer à Égine, puis à Trézène. Il est rappelé à Athènes par le peuple
en -323, à la suite de la mort d'Alexandre le Grand. Il y prononce de nouveau des discours anti-
macédoniens, mais la défaite de Crannon, lors de la guerre lamiaque, le force de nouveau à fuir, cette
fois en compagnie de l'orateur Hypéride, pour échapper aux soldats d'Antipater. En -322, il se réfugie
dans le temple de Poséidon situé dans l'île de Calaurie (aujourd'hui Poros), le long de la côte de
l'Argolide. Plutarque rapporte qu'il est abordé dans le temple par un dénommé Archias, ancien
acteur et affidé d'Antipater. Celui-ci veut attirer Démosthène hors de l'enceinte sacrée en lui
promettant la vie sauve. Démosthène refuse, et prétendant écrire une lettre à sa famille,
s'empoisonne en mordillant l'extrémité de son calame, comme il avait l'habitude de le faire en
réfléchissant. La dénonciation du danger macédonien constitue la clef de l'œuvre politique de
Démosthène. Selon lui, la puissance de Philippe est fondée sur deux facteurs, ses richesses tout
d'abord (sous forme de réserves d'or), puis sa tactique inédite. Démosthène constate qu'en face, les
Athéniens se distinguent par leur immobilité, leurs tergiversations et leur pinaillages politico-
législatifs. À ce sujet, Démosthène dénonce avec vigueur les travers du système démocratique
athénien : tout doit être longuement expliqué, débattu et voté avant qu'une action puisse se mettre
en place. Il accuse les « politiques » (πολιτευόμενοι / politeuómenoi) d'asservir le peuple à leurs
desseins, alors qu'auparavant le peuple lui-même était maître de son destin. De fait, il est difficile de
cerner exactement la position de Démosthène vis-à-vis des institutions athéniennes. Parfois, il se
rapproche des démocrates modérés, en s'opposant par exemple à la perception par le peuple d'une
indemnité pour les spectacles. Parfois, il se place parmi les radicaux en dénonçant l'égoïsme des
riches Athéniens qui refusent d'armer des trières et des troupes. Une forte tradition a vu en
Démosthène un homme guidé par l'appât du gain. De nombreuses anecdotes font part de son  amour
de l'argent. La Vie des dix orateursraconte qu'entendant un acteur se vanter d'avoir gagné un talent
pour jouer la tragédie, Démosthène réplique qu'il vient d'en gagner cinq fois plus, simplement pour
se taire. Plutarque note qu'il se compromet d'abord, dans l'affaire d'Harpale, en se laissant offrir par
ce dernier une riche coupe perse valant vingt talents. Eschine et Dinarque, pour leur part, accusent
tout bonnement Démosthène d'avoir été à la solde des Perses. Plutarque rapporte cette tradition,
expliquant que le Grand Roi payait l'orateur « parce qu'il était capable de détourner le Macédonien
d'Asie et de le retenir en fomentant des troubles en Grèce ». Dinarque accuse même Démosthène de
recevoir chaque année 1000 médimnes de blé des souverains du Royaume du Bosphore
Philippe II de Macédoine, né en 382 av. J.-C., mort assassiné en 336, est un roi
de Macédoine de la dynastie des Argéades qui a régné de 359 à 336. Il est le père d'Alexandre le
Grand. Initiateur de profondes réformes politiques et militaires qui ont permis l'émergence de la
Macédoine, il soumet les cités grecques, dont Athènes et Thèbes, et prépare l'expédition contre
les Perses achéménides qu'Alexandre dirige après sa mort. Philippe est l'un des trois fils du
roi Amyntas III et d'Eurydice. Par son ancêtre légendaire Caranos, fondateur de la
dynastie argéade descendrait d'Héraclès. Cette tradition est notamment rapportée par Isocrate dans
son Discours à Philippe, ou de façon postérieure par l'historien Plutarque dans la Vie d'Alexandre. Se
prévaloir d'une ascendance divine est un élément courant de propagande chez les monarques
antiques.
. En 352 av. J.-C., il investit la Thessalie et vainc Onomarchos à la bataille du Champ de Crocus. Il fait
crucifier le cadavre du stratège vaincu et fait jeter à la mer plus de 3 000 prisonniers phocidiens,
châtiment réservé aux sacrilèges. Dans la foulée, il s'empare de Phères et se fait élire à la tête de la
Ligue thessalienne. Alors qu'il poursuit les Phocidiens, il est arrêté dans le défilé des Thermopyles par
une coalition athénienne et spartiate alliée à la Ligue achéenne. Malgré cet échec, Philippe a marqué
les cités grecques par sa puissance et les menace désormais directement. À partir de 352, Philippe
reprend la politique d'expansion de son royaume vers le nord-est et se tourne vers la  Thrace, divisée
en trois royaumes depuis la mort de Cotys, roi des Odryses. À l'appel de l'un des rois, il assiège la
forteresse d'Héraion Teichos, au bord de la Propontide. Ce mouvement menace directement les
intérêts athéniens, à la fois à cause de leurs clérouquies de Chersonèse, mais aussi à cause de leur
approvisionnement en blé. Athènes vote d'abord l'envoi d'un contingent massif, mais la nouvelle
exagérée d'une maladie de Philippe les dissuade de l'envoyer effectivement, à tort : Philippe
prend Héraion Teichos et livre la forteresse à la cité de Périnthe, qui avait également fait appel à lui.
Alors que les cités grecques l'ont tenu pour quantité négligeable, elles le craignent désormais. C'est à
ce moment que Démosthène compose la première de ses Philippiques. Dans ces discours,
Démosthène présente Philippe comme un barbare et un ivrogne. Cette image de propagande est,
jusqu'au xixe siècle, prise comme une réalité, donnant la Grèce du Nord pour un pays sans une
culture digne de ce nom. La domination macédonienne en Chalcidique n'est pas assurée alors que la
puissante Ligue chalcidienne, dominée par Olynthe, s'oppose à lui et s'allie à Athènes. À l'été 349 av.
J.-C., Démosthène prononce la première de ses Olynthiennes  afin d'encourager les Athéniens à
soutenir militairement la Ligue. Philippe encourage l'Eubée à se révolter contre Athènes avec pour
objectif d'empêcher les Athéniens d'aider Olynthe. Dès lors, il peut s'en emparer facilement en  348 :
Olynthe et Stagire (cité natale d'Aristote) sont entièrement rasée et ses habitants vendus comme
esclaves. La Chalcidique devient définitivement macédonienne. Jusque-là, que ce soit par
l'intermédiaire d'Olynthe ou de l'Eubée, on voit que l'affrontement entre Athènes et la Macédoine a
surtout eu lieu par « alliés » interposés. En 346, Eubule, dirigeant athénien pro-macédonien, envoie
à Pella une ambassade (composée entre autres de Philocrate, d'Eschine et de Démosthène) afin de
négocier une trêve : ce traité, dit « paix de Philocrate » est un statu quo territorial, à travers lequel
Athènes reconnaît la domination macédonienne en Chalcidique et abandonne la Phocide. La même
année, à Athènes, le rhéteur Isocrate accueille favorablement cette paix en écrivant son discours
politique Philippe, dans lequel il s'adresse directement au roi de Macédoine, l'invitant à réaliser
l'union des cités grecques et à faire la guerre à la Perse achéménide, concrétisant ainsi
l'idéal panhellénique. Eubule et Isocrate incarnent donc l'existence d'un courant pro-macédonien
actif au sein de l'élite athénienne. En 342, Philippe fait de la Thrace une province de la Macédoine et
y fonde plusieurs cités. Cette volonté d'implantation macédonienne en Grèce du Nord-Est provoque
des révoltes, notamment celle de Byzance, soutenue par Athènes. En 341, Démosthène prononce
sa Troisième Philippique pour convaincre les Athéniens de la nécessité d'entrer en guerre contre
Philippe. Dès lors, l'affrontement direct entre Philippe et Athènes apparaît inévitable. En 338 av. J.-C.,
le Conseil amphictyonique, à l'initiative d'Eschine, décide une quatrième guerre sacrée contre une
cité de Locride, Amphissa, accusée d'avoir cultivé une terre sacrée. Philippe y voit l'occasion de
pousser son influence en Grèce-Centrale de façon définitive. Il se fait accorder la tête de l'expédition,
détruit Amphissa et progresse en Phocide et en Béotie jusqu'aux portes de l'Attique. Face à cette
menace, les cités rivales de Thèbes et d'Athènes finissent par s'allier. En août 338, les armées de
Philippe et de son fils Alexandre (à la tête de la cavalerie) battent les troupes grecques coalisées à
la bataille de Chéronée. Cette victoire lui assure l'hégémonie en Grèce. Athènes subit la perte d'un
millier d'hommes et compte plus de 2 000 prisonniers. Elle est contrainte de signer la paix
de Démade, d'intégrer la coalition macédonienne et d'accorder à Philippe la citoyenneté athénienne.
Elle peut néanmoins conserver sa flotte. Il est probable que Philippe songe à utiliser cette dernière
contre les Perses. Thèbes est plus sévèrement punie : la cité est occupée par une garnison
macédonienne, la Ligue de Béotie est dissoute. En 337, Philippe réunit les cités grecques lors
du congrès de Corinthe et fonde la Ligue de Corinthe ou Ligue des Hellènes. Il est fait interdiction aux
cités grecques de se battre entre elles mais elle conservent leur autonomie et leurs institutions
propres. Sparte, la Crète et les cités de Grande-Grèce, restées neutres, n'entrent pas dans cette ligue.
La Ligue de Corinthe, fondée en 337 av. J.-C., devient rapidement une alliance militaire (symmachie)
ayant pour finalité l'invasion de l'Asie Mineure alors sous la tutelle des Perses achéménides, le
prétexte étant de venger la profanation des sanctuaires grecs lors des guerres médiques et de
« libérer » les cités grecques d'Ionie et de Lydie notamment. Philippe fait donc appel au début de
l’année 336 à ses deux généraux de confiance, Parménion et Attale, pour diriger un corps
expéditionnaire, profitant de l'affaiblissement de l'Empire perse suite à la mort d'Artaxerxès III. À la
tête de 10 000 hommes et aidé par les cités d'Éphèse et Cyzique, Parménion remporte plusieurs
victoires, comme à Magnésie du Méandre. Il s’empare de Grynéion près de Pergame pour ensuite se
diriger vers Pitané où Memnon de Rhodes, alors à Cyzique pour réprimer la cité, revient pour en
assurer la défense. Mais le siège de Pitané échoue, malgré l’arrivée de renforts et il doit se replier
en Troade puis à Abydos. Cette première campagne n’est pas couronnée de succès, et rares sont les
cités grecques qui se déclarent en faveur des Macédoniens. Philippe est assassiné à l'été 336
par Pausanias, l'un de ses Sômatophylaques (gardes du corps), dans le théâtre d'Aigeai où il célèbre
ses victoires à l'occasion du mariage de sa fille Cléopâtre avec Alexandre le Molosse, roi d'Épire et
frère d'Olympias. Cet assassinat a peut-être été instigué par les Perses voire par Olympias afin
d'assurer l'accession au trône d'Alexandre. Aucune preuve ne vient faire corroborer ces suspicions,
Pausanias étant en effet immédiatement tué ; même si Plutarque mentionne une lettre adressée
par Alexandre à Darius, dans laquelle il blâme le Grand Roi (et Bagoas, son vizir), pour le meurtre de
son père, soutenant que Darius s'est vanté auprès des différentes cités grecques de cet assassinat. La
mort de Philippe ne change rien aux plans d'invasion : Parménion fait allégeance à Alexandre qui
rejoint le corps expéditionnaire à Abydos en mai 334. Par sa politique d'expansion, Philippe est
parvenu à tripler la surface du royaume de Macédoine en annexant la Haute-Macédoine (dont
la Lyncestide et Orestide), les territoires situés à l'est de l'Axios (dont la Thrace) et la Chalcidique. Il
entreprend dans ce contexte de profondes réformes administratives en mêlant les institutions
traditionnelles macédoniennes et celles de la Ligue chalcidienne : la Macédoine est ainsi divisée en
quatre districts régionaux (ou mérides) autour de communautés civiques (cités ou ethné).
L'équipement et la tactique de l'armée macédonienne connaissent par ailleurs des améliorations
décisives qui servent la domination militaire mais aussi de levier social pour les couches
« moyennes ». Les arts connaissent enfin un formidable essor comme en témoignent les tombes
royales d'Aigéai (actuelle Vergina) ; il montre aussi son attachement à la « sagesse grecque » en
accueillant Aristote à la cour de Pella. Finalement, Philippe a forgé l'outil politique et militaire qui
permet à Alexandre le Grand de conquérir l'immense Empire perse et faire de la Macédoine une
puissance hégémonique durant l'époque hellénistique. Il est considéré par le
philosophe péripatéticien Théophraste comme le plus grand des rois de Macédoine, non seulement
par sa fortune, mais encore par sa sagesse et sa modération.
Les Philippiques sont une série de quatre discours prononcés par l'orateur
athénien Démosthène entre 351 et 341 av. J.-C. dans lesquels il dresse une harangue contre Philippe
II de Macédoine. Démosthène dénonce les ambitions de Philippe II et critique avec véhémence
l'oisiveté des Athéniens, tout en éveillant chez eux des sentiments patriotiques. Ces discours
marquent l'apogée de la rhétorique athénienne. Le terme de « philippique » est resté pour désigner
une exhortation belliqueuse. La troisième Philippique a suivi de près le discours sur les affaires de
Chersonèse. Celui-ci avait été prononcé vers mars 341. Ce discours aurait été prononcé
vraisemblablement au mois de mai 341. Le contexte est particulier. Le général Diopithès est en
Chersonèse avec son armée afin de protéger les colonies athéniennes contre Philippe de Macédoine.
Il demande des renforts et de l’argent. Philippe, lui occupe Cardie, il avance en Thrace et menace de
loin Byzance, qui est pourtant son alliée nominalement. De plus, il installe des tyrans en Eubéen
presque aux portes d’Athènes. En face de ce danger grandissant, Démosthène voit la nécessité
d’obtenir du peuple un nouvel effort, et surtout de lui faire sentir la gravité de la menace qui est
suspendue sur sa tête. Il apporte donc à la fois une propisition précise et des avertissements
pressants. La proposition était formulée dans un projet de décret annoncé vers la fin du discours
mais dont le texte ne nous a pas été conservé. On peut admettre, d’après ce qui en est dit par
l’orateur, qu’il y demandait la formation d’une flotte et d’une armée, une contribution
extraodriniare, peut-être aussi l’envoi de députés dans le Péloponnèse, à Chois, à Rhodes, et même
auprès du roi de Perse. Ce n’était pas encore la déclaration de guerre, mais c’en était la préparation.
Toutefois, l’essentiel du discours est plutôt dans les avertissements et les admonestations
véhémentes qui en constituent la majeure partie. L’idée qui domine tout, c’est que l’ambition de
Philippe vise à soumettre tous les Grecs, qu’il s’agit par conséquent de le leur faire comprendre, pour
les associer à l’effort d’Athènes, et sue l’initiative de cette union en vue de la défense de la Grèce ne
peut venir que d’Athènes seule. Jamais Démosthène n’avait encore dégagé aussi nettement les
pensées directrices de sa politique, jamais il ne les avait développées avec autant de force.

I. L’échec de la Grèce : une hégémonie impossible


A. « Vous avez été pendant soixante-treize ans les premier entre les Grecs  »
Depuis la formation de la première confédération maritime en 477 jusqu’à la prise d’Athènes
par Lysandre en 404, à la fin de la guerre du Péloponnèe.
À la suite de ses victoires sur les Perses au cours des guerres médiques, Athènes devient la
puissance dominante du monde grec durant toute la période du ve siècle av. J.-C. En effet, la Ligue de
Délos, alliance militaire initialement créée pour repousser l'ennemi perse, évolue d'une coordination
de forces armées grecques sous l'égide des Athéniens vers une confédération étatique soutenue
militairement, financièrement, et culturellement par Athènes. Les liens qu'entretient cette cité avec
ses alliés sont donc à partir du milieu du siècle des rapports de cité mère à cités vassales. Ainsi,
en 454 av. J.-C., le trésor de Délos est transféré à Athènes. L'union entre la nouvelle métropole et ses
provinces est passée de mutuellement consentie à maintenue par la force. Cette nouvelle
configuration se traduit par une large diffusion du modèle athénien, avec entre autres, de  450 av. J.-
C. à 446 av. J.-C., l'obligation pour les alliés d'utiliser les monnaies et les unités de poids et de
mesures athéniennes, ainsi que par une centralisation du pouvoir, qui consiste notamment en un
transfert de l'autorité judiciaire vers Athènes : les historiens parlent dès lors d’« empire athénien ». À
partir de 478 av. J.-C., Athènes met en place la ligue de Délos, malgré la faible puissance de ses forces
terrestres, qui se résument à seulement 9 000 hoplites du fait de l'inexistence d'une armée
permanente, hors éphèbes. La puissance militaire athénienne est donc essentiellement navale : on
parle de thalassocratie, depuis la construction de la plus grande flotte de trières de l’époque
par Thémistocle en 483. Ce navire de guerre léger comporte trois rangées de rameurs, ce qui lui
permet d’être rapide et facilement manœuvrable même sans vent. À l'avant, se trouve un éperon de
bronze, destiné à couler les navires adverses, la tactique employée au cours des batailles navales est
donc d'écraser l'ennemi sous le nombre sans lui laisser la possibilité de réagir par une contre-attaque
organisée. Le financement reposait initialement sur les grandes capacités monétaires de la cité grâce
au gisement des mines du Laurion. Dès 483, la cité disposait de 200 talents d'argent (5 200 kg) de
très bonne réputation sur les marchés, car pur à 99 %. Les alliés ont aussi consenti un important
effort financier pour s’assurer de jouir d’une protection optimale de la part des Athéniens, à défaut
de pouvoir eux-mêmes superviser la production en série de ce type de navires. Après 440, il n'y a plus
aucune flotte capable de rivaliser avec celle d'Athènes qui contrôle intégralement le bassin égéen et
une grande partie de la Méditerranée orientale. La région des détroits est, elle aussi,
particulièrement surveillée pour assurer les approvisionnements. L’élément constitutif de la
puissance athénienne le plus négligé est d'ordre défensif, ce sont les fortifications extérieures qui
englobent l'ensemble de la ville et son port principal, le Pirée. Celui-ci fut bâti à l'initiative
de Thémistocle pour remplacer l'ancien port de Phalère, en même temps que la consolidation des
remparts était engagée à la suite de la bataille de Platées. Les garnisons installées en Ionie assurent
le maintien de l’ordre au sein de la Ligue de Délos. À la suite de la révolte que connaît cette région
lors des années 490, les Athéniens s'installent, chassant ainsi les tyrans pro-perses et instaurant un
régime démocratique, notamment à Milet. Ces nouvelles démocraties sont sous contrôle grâce au
grand nombre de citoyens athéniens fidèles à leur patrie implantés sur place. Leur utilité est visible
pendant la guerre du Péloponnèse, où, dans des cités comme Byzance et Mégare, des partisans
d'Athènes ont joué un rôle important pour soutenir les efforts militaires de leur patrie.
Les proxènes athéniens sont au cœur de ce système de contrôle et de surveillance des alliés de
l'intérieur. Les proxènes sont des étrangers à qui une cité accorde des privilèges, à condition que
ceux-ci acceptent de s'occuper des étrangers s’installant dans le lieu où ils exercent et qui leur sont
concitoyens. La proxénie est habituellement utile à la justice et à la diplomatie, mais les Athéniens se
servirent de leurs proxènes comme agents de renseignements. Ainsi, en 428, les proxènes athéniens
ont prévenu leur cité-mère de la révolte de Mytilène. L’implantation athénienne se traduit aussi par
des investissements de particuliers qui achètent une grande part des terres inoccupées situées en
territoires alliés, ainsi que par l'envoi de clérouques, qui fondent des colonies militaires. Sous l'effet
de sa protection navale, de l'installation de ses colonies militaires et civiles, de sa puissance
économique, de son rayonnement culturel, et de l'émigration de ses citoyens, Athènes assimila
progressivement les cités alliées à des territoires conquis. La guerre du Péloponnèse est le conflit qui
oppose la ligue de Délos, menée par Athènes, et la ligue du Péloponnèse, sous
l'hégémonie de Sparte. La guerre du Péloponnèse est la première guerre d'une série de conflits pour
l'hégémonie d'une cité sur l'ensemble du monde grec. Ce conflit met fin à la pentécontaétie et
s'étend de 431 à 404 en trois périodes généralement admises : la
période archidamique de 431 à 421, la guerre indirecte de 421 à 412, et la guerre
de Décélie de 412 à 404. La guerre du Péloponnèse se termine par la victoire de Sparte et
l'effondrement de l'impérialisme athénien. Cette victoire lui coûte cependant sa puissance
au ive siècle av. J.-C..
B. « Les Lacédémoniens l’ont été pendant vingt-neuf ans Sparte, le résultat de l’impossible
domination de Sparte
Les vingt-neuf sont comptés approximativement de 404, à 376, désastre des Lacédémoniens
à Naxos.
Au début du ve siècle av. J.-C., Sparte apparaît comme la championne de la Grèce face
aux Perses pendant les Guerres médiques. Elle devient progressivement la rivale d'Athènes à laquelle
elle livre la longue Guerre du Péloponnèse (431 à 404 av. J.-C.). Au cours de cette guerre, Sparte
bénéficie de l'argent de la Perse, hostile aux prétentions athéniennes en Ionie. Leur victoire de 404
av. J.-C. aiguise l'ambition des Spartiates, points de départ de l'expédition des Dix Mille (401-399).
Même si l'expédition est un fiasco, elle démontre l'affaiblissement de l'empire perse; cette
expédition démontre également les possibilités de conquête militaire, ce dont Alexandre le
Grand tire parti par la suite. Les Perses décident alors de financer les ennemis de Sparte (Athènes,
Thèbes, puis Corinthe et Argos). En 396, la même année, les Spartiates sont victorieux sur terre
à Coronée mais sont défaits sur mer à Cnide ; puis, la longue et indécise guerre de Corintheachève de
secouer le joug spartiate (396-387). Face à cet échec, Sparte reconnaît en Grèce l'influence perse.
Cette politique perse, de bascule entre les différentes cités, renforce Athènes, dont les prétentions
inquiètent les dirigeants perses. À l'occasion de ce réchauffement diplomatique, la Paix
d'Antalcidas de 387 av. J.-C. est jurée : Sparte est consacré hégémon de la Grèce et arbitre des
libertés du monde grec. Asseyant son nouveau statut, Sparte installe peu à peu dans toutes les villes
grecques des gouvernants à sa solde. En 382, elle prend le contrôle de Thèbes dont les opposants se
réfugient à Athènes. En 378 Thèbes est libérée, les Spartiates chassés avec l'aide discrète des
Athéniens. Sparte, incrédule sur le véritable rôle joué par sa rivale, lui déclare la guerre. La
confédération athénienne est reformée (377), à laquelle se joint Thèbes, contre Sparte. En 376 av. J.-
C. (bataille de Naxos), Sparte est défaite, sa flotte militaire coulée par la marine de la nouvelle
confédération athénienne, remettant définitivement en cause son hégémonie navale. En 375, Sparte
essaye vainement de reprendre Thèbes et est même peu à peu chassée de  Béotie (bataille
de Tégyres 375) ; elle tente sans succès de prendre Athènes par surprise (coup de Sphodrias) (375).
Sparte est aussi chassée de Corcyre, nouvelle alliée des Athéniens (375). Sparte est ensuite attaquée
en Phocide par les Thébains (375/4). Plus au nord, la Thessalie est unifiée par Jason de
Phères (375/4), constituant une nouvelle menace pour Lacédémone. Sparte est débordée sur tous les
fronts. Devant cette situation catastrophique, Sparte a besoin d'une pause et d'aide extérieure  :
l'aide est demandée à un vieil allié, Denys de Syracuse, qui la lui donne, et un armistice est demandé
à Athènes, qui y consent (paix de 374). Mais rien n'est réglé : Thèbes continue à reconquérir
la Béotie (elle rase Platées en 373) et Corcyre refuse toujours de rejoindre Sparte, obligeant Athènes
à la soutenir (373). Sparte est toujours embourbée en Phocide où les Thébains progressent. C'est
dans ce contexte que Sparte envoie une puissante armée pour écraser la puissance croissante de
Thèbes, mais cette armée est défaite à la bataille de Leuctres de 371 av. J.-C. et perd 400 de ses
2 000 homoioi. Sparte ne s'en remet jamais de cette saignée de son corps civique et militaire et se
replie sur le Péloponnèse, réduisant ses prétentions à la Laconie. Loin d'être un événement imprévu,
la bataille de Leuctres est un des résultats de l'instabilité politique qui a fait suite à la guerre du
Péloponnèse. En effet, après sa victoire sur Athènes en 404 av. J.-C., Sparte va imposer à travers
toute la Grèce de multiples régimes hostiles à la démocratie athénienne. Cette politique effraye les
autres grandes cités grecques, inquiètes à l'idée que Sparte puisse imposer son hégémonie. Un fort
sentiment anti-spartiate se répand en Grèce, alors même que Sparte n'a pas les moyens de sa
politique en raison des bouleversements sociaux et politiques dont elle est victime. Une coalition est
finalement formée par Athènes, Corinthe, Thèbes et Argos en 395 pour s'opposer à Sparte dans ce
qui sera connu comme la guerre de Corinthe. Thèbes est la cité la plus importante de la coalition, et
elle va de ce fait être la cible de plusieurs campagnes militaires spartiates. Le roi Agésilas II, toujours
roi en 371, mène plusieurs expéditions en Béotie à partir de 394. Lorsque la guerre de Corinthe
s'achève en 386, la querelle entre les deux cités semble loin d'être enterrée. Sparte n'est pas parvenu
à écraser militairement Thèbes mais parvient cependant à lui imposer de renoncer à ses projets de
domination de la Béotie, région de la Grèce centrale sur laquelle les Thébains souhaiteraient asseoir
leur hégémonie. Sparte semble finalement triompher de Thèbes en 382, lorsque les Spartiates
profitent d'une expédition contre la cité d'Olynthe pour s'emparer de Thèbes et renverser le pouvoir
en place. De nombreux chefs thébains sont alors exilés. Cette occupation spartiate de Thèbes vaut
cependant à Sparte d'être condamnée par les autres grandes cités grecques et par une partie de
l'opinion spartiate, dont le roi Cléombrote. Cette domination spartiate sur Thèbes ne dure toutefois
qu'un temps. En 379, des exilés thébains parviennent à libérer la cité avec l'aide d'Athènes et
massacrent la garnison spartiate. Ne pouvant tolérer cela, Sparte prend l'initiative d'organiser
plusieurs campagnes contre Thèbes, menées par Cléombrote, le second roi de Sparte, qui s'était
pourtant opposé à l'occupation de Thèbes. La première campagne a lieu en 379, mais le roi spartiate
refuse alors d'attaquer en territoire thébain et de dépasser les Cynocéphales, deux montagnes de la
Béotie situées entre Pharsale et Larissa. Cette répugnance de Cléombrote à attaquer Thèbes ne fait
qu'encourager cette dernière à accroître sa puissance, notamment par la formation d'une puissante
armée. Craignant que les Thébains ne prennent le contrôle de toute la Béotie, Sparte organise donc
une seconde expédition en 376. Encore une fois, Cléombrote en prend le commandement.
Cependant, la campagne tourne court car, comme le mentionne Xénophon, les Spartiates sont
repoussés devant le mont Cithéron, point d'accès à la Béotie que les Thébains occupent. La lutte se
poursuit cependant entre les deux cités. Elle prend un nouveau tournant en 373, lorsque Thèbes
rétablit la Confédération béotienne. Athènes craint alors une hégémonie thébaine et décide
d'entamer des négociations de paix avec Sparte. Thèbes, invitée à se joindre aux négociations, exige
alors la reconnaissance de son hégémonie en Béotie. Jugeant ses conditions inacceptables, les
Spartiates montent une nouvelle expédition contre Thèbes, dont Cléombrote prend la tête. Les
armées spartiates et thébaines convergent alors l'une vers l'autre dans l'espoir de s'affronter. Cette
défaite spartiate ne scelle pas pour autant la victoire définitive de Thèbes sur sa rivale spartiate.
Comme déjà mentionné, certains Spartiates songent même pour un temps à lancer une nouvelle
attaque contre l'armée thébaine, avant d'être freinés par leurs alliés, mais également par leur prise
de conscience de l'hécatombe frappant les Égaux. Il est finalement décidé d'accepter la trêve
traditionnelle entre les deux armées, après quoi les Spartiates se retranchent provisoirement dans
leur camp. Thèbes, bien que victorieuse et bénéficiant de l'avantage moral, ne peut alors pousser son
avantage. En effet, peu après la bataille, les Thébains sont rejoints par Jason de Phères, tyran,
régnant sur la cité thessalienne de Phères ayant accouru avec des renforts après avoir pillé la
Phocidie sur leur chemin. Avec ce renfort, les Thébains espèrent pouvoir enfin attaquer le camp
spartiate. Mais le tyran à d'autres projets en tête et va freiner les ardeurs de ses alliés, dont il est
possible qu'il craigne la montée en puissance qui ne peut que s'accélérer après leur victoire de
Leuctres. S'il ne parvient pas à obtenir une trêve, son action est cependant révélatrice de l'absence
d'impact décisif de la victoire des Thébains. Ces derniers doivent toujours composer avec leurs alliés,
et ne peuvent finalement se permettre de poursuivre les Spartiates vaincus lorsque ceux-ci entament
leur retraite en direction du Péloponnèse. Cette occasion manquée d'achever l'armée vaincue de
Cléombrote, les Thébains la doivent également à la réaction rapide de Sparte, qui va ajouter d'autres
soucis aux problèmes internes aux Béotiens. En effet, dès que la nouvelle de la défaite de Leuctres
arrive à Sparte, il est décidé de rassembler une deuxième armée, regroupant tous les hommes
mobilisables de moins de 60 ans. C'est cette force que Diodore mentionne lorsqu'il évoque par erreur
« une autre armée » que Cléombrote aurait rencontrée avant la bataille de Leuctres. En réalité, celle-
ci n'a été formée qu'en réponse à la défaite spartiate, et placée alors sous le commandement
d'Archidamos, le fils du roi Agésilas que Diodore présente à tort comme ayant participé à Leuctres.
Cette seconde armée envoyée en renfort va finalement rejoindre les troupes de Cléombrote en
pleine retraite, avant de se replier avec elles dans le Péloponnèse, mettant ainsi un terme à la
campagne de 371. Cette mobilisation rapide d'une seconde armée spartiate est en tout cas la preuve
que Sparte n'est pas abattue et détient encore d'importants moyens militaires. Leuctres, bien que
marquant un tournant par la victoire tactique de Thèbes, ne peut donc se transformer
immédiatement en un succès stratégique. Il faudra attendre une nouvelle campagne thébaine
en 370 pour que Thèbes impose enfin sa volonté à Sparte. La lutte va toutefois se poursuivre entre
les deux cités jusqu'à la victoire finale de Thèbes à Mantinée, en 362. Un succès éphémère, car la cité
perdra dans la bataille le brillant Épaminondas et ne sera pas en mesure d'imposer son hégémonie
dans une Grèce qui restera profondément divisée jusqu'à ce qu'elle tombe sous le joug macédonien.

C. « Les Thébains, à leur tour, ont eu quelque puissance quelques temps ». (373-362 av. J.-C.)
C’est à partir de 373 av. J.-C. que Thèbes montre sa puissance et sa volonté dominatrice en
détruisant Platées et en violant directement la paix commune de 386 av. J.-C. Un congrès est alors
réuni à Sparte, en 371 av. J.-C., et en présence des ambassadeurs perses afin de renouveler la Paix du
Roi et de mettre fin à la guerre qui secoue la Grèce. Mais les thébains, n’ayant pas été admis à prêter
sennent au nom de la ligue béotienne, rejettent l’accord. Sparte envoie donc son armée dirigée par le
roi Cléombrotos en Béotie, et elle prend position à Leuctres, de façon à faire pression sur les
Thébains. Mais l’armée de Thèbes dirigée par le stratège Epaminondas obtient une victoire
écrasante: sur 700 spartiates, 400 sont tués. En effet, Epaminondas a fait preuve d’une innovation
tactique: il concentre sur la gauche ses meilleures troupes, les dispose en profondeur et écrase l’aile
droite des spartiates sous une attaque massive, avant de prendre à revers l’autre aile ennemie. Par la
suite, Epaminondas envahit la Laconie durant l’hiver 370-369 av. J.-c., ravage le pays jusqu’à la mer,
puis libère la Messénie soulevée contre Sparte (cette libération verra la création de la ville de
Messène par les hilotes libérés). L’Arcadie, elle aussi libérée, organise une ligue arcadienne qui, par
synœcisme, crée sa capitale Mégalopolis. La situation créée par la montée en puissance thébaine
n’échappe pas à Artaxerxès II, qui donne mission à Ariobarzane, satrape de Phrygie et successeur de
Pharnabaze, de réconcilier les Béotiens avec les Lacédémoniens sur les bases de la paix commune.
Un rescrit royal cautionne les ambitions thébaines auprès de leurs nouveaux alliés de Grèce centrale
et du Péloponnèse. Cependant, Sparte, Athènes et la plupart des Arcadiens refusent de s’engager
dans la signature d’un traité d’alliance avec Thèbes. L’Arcadie, divisée entre la protection lointaine
des Béotiens et l’hostilité proche des Spartiates, voit sa confédération s’effriter, au profit d’une
alliance avec Sparte pour éviter tout conflit voisin. Epaminondas, à la tête de vingt contingents
béotiens, thessaliens et eubéens, attaque les coalisés lacédémoniens, athéniens et arcadiens à
Mantinée, en 362 av. J.-C. Epaminondas est vainqueur, de la même façon qu’à Leuctres, mais trouve
la mort dans la bataille. Les Thébains, dépourvus de stratège, ne parviennent pas à tirer parti de la
victoire. Une nouvelle redistribution des forces se met en place : Les principales régions du
Péloponnèse retrouvent leur indépendance ; Sparte perd définitivement la Messénie, qu’elle tenait
depuis l’époque archaïque ; La Ligue du Péloponnèse s’eftrite petit à petit; Thèbes conserve son
hégémonie sur la Grèce centrale. Ainsi, l’adversaire principal de Thèbes n’est plus Sparte, mais
redevient Athènes.
De 371 (bataille de Leuctres) à 362 (mort d'Epaminondas), Thèbes connaît son apogée : c'est
l'hégémonie thébaine. En 370, elle est la première cité à envahir et piller le territoire de Sparte dans
l'histoire. Elle libère la Messénie, refonde la cité de Messène, relève la ville de Mantinée et fonde la
cité de Mégalopolis. De 366 à 364, elle trouble l'hégémonie d'Athènes sur la mer Égée en lançant une
flotte de 100 navires. Malheureusement pour elle, cette aventure s'arrête avec la mort de son plus
brillant général (Epaminondas), mort à la victoire de Mantinée (362). Le deuxième meilleur général
de Thèbes (Pélopidas) était mort deux ans plus tôt. À mesure que les Thébains descendent dans le
Péloponnèse (371/370), qui se termine par la bataille de Leuctres, les alliés de Sparte se rallient à
eux, donnant l'hégémonie sur la Grèce à Thèbes. L'armée ennemie grossit tant et si bien, que la
Laconie est pillée par les Thébains et mise à sac sans que les Spartiates n'osent intervenir, chose
inédite jusqu'alors. Cette mise à sac matérialise la fin de la suprématie spartiate sur la
Grèce. Thèbes ruine sa domination sur ses esclaves périèques et hilotes : la Messénie est libérée
par Epaminondas et sa capitale (Messène) refondée pour faire contrepoids à Sparte. La fédération
arcadienne renaît comme sa capitale Mantinée (370). Mais Sparte n'est pas encore morte : l'assaut
thébain sur la ville est repoussé par la résistance héroïque organisée par Agésilas. Plusieurs
expéditions thébaines sont nécessaires pour l'empêcher de rétablir sa domination (en 370, 369...).
Sparte doit son salut à la politique de bascule pratiquée par les Thébains et à la nouvelle alliance avec
Athènes : en effet, Thèbes évite de trop renforcer les puissants Arcadiens, tandis que la nouvelle
alliance spartiate-athénienne est officialisée en 369. La tentative hégémonique maritime de Thèbes
(365/4) sur l'Égée et l'Asie mineure crée les conditions d'un soutien perse à cette alliance entre
Sparte et Athènes. Les Thessaliens parviennent à affaiblir Thèbes, en tuant Pélopidas (364). Deux ans
plus tard, Sparte retrouve son honneur à la bataille de Mantinée de 362 av. J.-C. : bien que peu
nombreux, les Spartiates parviennent à tuer le général Epaminondas et transforment ainsi une
bataille indécise en victoire. Cependant, cette victoire masque mal la réalité des rapports de force  : le
gros des troupes était athénien. 

II. L’ascension de Philippe


A. Un roi parti de rien
« Depuis treize ans qu’il émerge de son obscurité »
Son père étant assassiné en 370 av. J.-C., c'est son frère aîné Alexandre II qui est proclamé roi
de Macédoine. Celui-ci intervient dans un conflit en Thessalie, mais ne parvient pas à s'imposer. Il
doit se résoudre à accepter une alliance avec la cité de Thèbes, alliance qui est scellée par l'envoi de
son jeune frère comme otage. En 368, alors qu'il est âgé de 14 ans, Philippe est donc envoyé en
otage à Thèbes en Béotie. Bien traité, il y aurait appris l'art de la guerre en observant Épaminondas. Il
y reste jusqu'à l'âge de 17 ans, soit jusqu'en 365. De retour en Macédoine, Philippe prend le pouvoir
à la mort de son frère Perdiccas III en 359 av. J.-C. : il épouse la veuve de celui-ci, conformément à la
coutume, et au cours de l'été 360, il est désigné comme tuteur de son neveu, le fils mineur de
Perdiccas, Amyntas IV, qu'il écarte un peu plus tard en se faisant proclamer lui-même roi par
l'assemblée du peuple macédonien. Au moment de son avènement, Philippe n'a que 23 ans. Il se
trouve face à une situation difficile, puisque la survie du royaume de Macédoine est menacée par
les Illyriens. En outre, les Péoniens, les Odryses de Thrace, voisins de la Macédoine, ainsi que
les Athéniens, ont tout avantage à un affaiblissement du royaume. Philippe commence par éliminer
ses rivaux potentiels, dont le prétendant Argaios III de Macédoine, soutenu par Athènes, en 360. Il
doit ensuite se résoudre à accepter la suzeraineté de Bardylis, roi des Illyriens, dont il épouse la
fille, Audata. Il conclut également un traité de paix avec Athènes, à qui il laisse les mains libres
à Amphipolis. En 359, Philippe, de retour de son expédition contre les Scythes, se voit refuser le
passage du mont Hémos par les Triballes à moins de partager son butin. Au cours du combat qui
s’ensuit, Philippe est vaincu et perd l'usage d'une main et d'une jambe. Afin de renforcer la position
macédonienne, Philippe lance une vaste réforme de l'armée. Il augmente le nombre de fantassins et
crée un bataillon d'élite, les hypaspistes, calqué sur le Bataillon sacré de Thèbes. Il donne à son
armée un entraînement strict et un armement repensé : le soldat macédonien reçoit un armement
défensif (armure, cnémides, bouclier) plus léger que celui de l'hoplite, dont l'ensemble de
l'équipement pèse environ 35 kg. Cela permet de pouvoir équiper bien plus de soldats, sans porter
atteinte à la qualité de ses troupes. En effet l'allègement des armes permettait de charger plus vite et
en formation très compacte. La puissance de charge est alors accrue, d'autant plus que les masses de
tous les soldats se cumulent tant la formation est serrée. En outre, Philippe dote le fantassin d'une
longue pique de 7 mètres de long environ, la sarisse, établissant ainsi les fondements de la phalange
macédonienne. Les phalangites se déploient sur 16 rangées de profondeur, les 5 premières
seulement tenaient leurs gigantesques lances à l'horizontale, et les rangs de derrière à la verticale.
Cette impénétrable haie de lances brisait tous les assauts et permet de donner un avantage
d'infanterie décisif aux armées helléniques qui utilisent la phalange macédonienne pendant près de
trois siècles. Philippe estime que la Macédoine doit lutter contre la menace des peuples
voisins, Péoniens et Illyriens notamment. Fort d’une armée qu'il a reformée, Philippe affronte et
vainc d'abord les Péoniens qui menacent le Nord de la Macédoine. Au printemps 358 av. J.-C., il
remporte une grande victoire sur les Illyriens. Bardylis, le roi illyrien des Dardaniens, est tué et ses
troupes sont massacrées dans la vallée de l’Erigon. La frontière avec l’Illyrie est repoussée au-delà du
lac Lychnidos (lac d'Ohrid). En Haute-Macédoine, Philippe impose son autorité en éliminant les
dynastes et en les obligeant à s’installer à Pella. À l’automne, il intervient en Thessalie à l’appel de la
cité de Larissa, ennemie de Phères. Il épouse en troisième noces une princesse
thessalienne, Philinna, et réconcilie les deux cités. Philippe souhaite également doter son royaume
d'une grande façade maritime, la Macédoine n'ayant alors qu'un accès limité à la mer Égée. Il se
tourne alors vers l'est et occupe la Chalcidique. Il s'empare au passage de cités qui sont des colonies
ou des alliées d'Athènes, comme Amphipolis qu'il assiège en 357, Pydna ou Potidée. Il semble
probable qu'un traité secret ait lié Philippe à Athènes, comme l'affirme Théopompe, Philippe devant
prendre la ville d'Amphipolis pour le compte des Athéniens ; il y a là un renversement de rapport de
force net par rapport à la situation de 359, et ce d'autant plus que Philippe ne tient pas sa promesse,
et conserve la cité pour son compte. En 354, Philippe s'empare de la cité de Crénidès, sur l'île
de Thassos, et surtout de ses mines d'or, ce qui n'est négligeable pour le financement du conflit. Il
arrache également aux Athéniens la cité de Méthone sur le golfe Thermaïque, malgré l'envoi d'une
flotte par Athènes. Philippe perd un œil au cours de la bataille. Enfin, il prend Abdère, près de
l'embouchure du Nestos, et Maronée sur la côte thrace. Philippe intervient ensuite dans la troisième
guerre sacrée, à l'appel de Thèbes et de la Ligue thessalienne. Il est battu à deux reprises
par Onomarchos, stratège des Phocidiens, et doit battre en retraite, bien décidé cependant à revenir.

B. Les débuts de la puissance macédonienne


Philippe estime que la Macédoine doit lutter contre la menace des peuples
voisins, Péoniens et Illyriens notamment. Fort d’une armée qu'il a reformée, Philippe affronte et
vainc d'abord les Péoniens qui menacent le Nord de la Macédoine. Au printemps 358 av. J.-C., il
remporte une grande victoire sur les Illyriens. Bardylis, le roi illyrien des Dardaniens, est tué et ses
troupes sont massacrées dans la vallée de l’Erigon. La frontière avec l’Illyrie est repoussée au-delà du
lac Lychnidos (lac d'Ohrid). En Haute-Macédoine, Philippe impose son autorité en éliminant les
dynastes et en les obligeant à s’installer à Pella. À l’automne, il intervient en Thessalie à l’appel de la
cité de Larissa, ennemie de Phères. Il épouse en troisième noces une princesse
thessalienne, Philinna (en), et réconcilie les deux cités. Philippe souhaite également doter son
royaume d'une grande façade maritime, la Macédoine n'ayant alors qu'un accès limité à la mer Égée.
Il se tourne alors vers l'est et occupe la Chalcidique. Il s'empare au passage de cités qui sont des
colonies ou des alliées d'Athènes, comme Amphipolis qu'il assiège en 357, Pydna ou Potidée. Il
semble probable qu'un traité secret ait lié Philippe à Athènes, comme l'affirme Théopompe, Philippe
devant prendre la ville d'Amphipolis pour le compte des Athéniens ; il y a là un renversement de
rapport de force net par rapport à la situation de 359, et ce d'autant plus que Philippe ne tient pas sa
promesse, et conserve la cité pour son compte. En 354, Philippe s'empare de la cité de Crénidès, sur
l'île de Thassos, et surtout de ses mines d'or, ce qui n'est pas négligeable pour le financement du
conflit. « Je ne dis rien de Méthoné » Il arrache également aux Athéniens la cité de Méthone, en
Piérie, située entre Pydna et Pella, capitale des souverains madédoniens sur le golfe Thermaïque,
malgré l'envoi d'une flotte par Athènes. Philippe perd un œil au cours de la bataille. Enfin, il
prend Abdère, près de l'embouchure du Nestos, et Maronée sur la côte thrace. Alors que les cités
grecques l'ont tenu pour quantité négligeable, elles le craignent désormais. C'est à ce moment
que Démosthène compose la première de ses Philippiques. Dans ces discours, Démosthène présente
Philippe comme un barbare et un ivrogne. Cette image de propagande est prise comme une réalité,
donnant la Grèce du Nord pour un pays sans une culture digne de ce nom.

C. Un essor dangereux
Le dessein de Philippe est d’assurer sa suprématie en Grèce afin d’entreprendre ensuite, avec
les meilleures chances de succès, l’invasion de l’Asie. Pour le réaliser, il pensa qu’il devait d’abord
soumettre tous les royaumes thraces et parvenir ainsi jusqu’aux villes grecques de la Propontide et
du Bosphore, Périnthe et Byzance, ses futures bases d’opération. Une telle entreprises menaçait
directement Athènes, celle-ci faisait venir du Pont Euxin, par les détroits, la plus grande partie du blé
qui lui était indispensable. Philippe, une fois en possession de ce passage, devenait le maître de son
ravitaillement et de son commerce. Dans ces discours, Démosthène présente Philippe comme un
barbare et un ivrogne. Philippe intervient ensuite dans la troisième guerre sacrée, à l'appel
de Thèbes et de la Ligue thessalienne. Il est battu à deux reprises par Onomarchos, stratège
des Phocidiens, et doit battre en retraite, bien décidé cependant à revenir. « Mais la Thessalie, dans
quel état est-elle ? N’a –t-il pas dépouillé En 352 av. J.-C., il investit la Thessalie et vainc Onomarchos
à la bataille du Champ de Crocus. Il fait crucifier le cadavre du stratège vaincu et fait jeter à la mer
plus de 3 000 prisonniers phocidiens, châtiment réservé aux sacrilèges. Dans la foulée, il s'empare
de Phères et se fait élire à la tête de la Ligue thessalienne.  Au début de la Guerre du
Péloponnèse (431-404), vers 431 /430, la Thessalie s'allia avec Athènes. Le pouvoir des familles
aristocratiques semble avoir continué mais il déclina peu à peu jusqu'à vers la fin de Guerre du
Péloponnèse où les mouvements démocratiques commencèrent à apparaître. À Pharsale, à cette
période, l'État fut déchiré par des luttes intestines et, dans un souci de calme et de sécurité, les
citoyens confièrent l'acropole et toute l'orientation du gouvernement à Polydamas de Pharsale, qui
gouverna avec la plus stricte intégrité. Les Aleuades à Larissa et les Scopades à Crannon (ou Krannon
ou Krannonas) perdirent beaucoup de leur ancienne influence. Pharsale et Phères devinrent alors les
deux principaux États de Thessalie. Dans cette dernière une tyrannie, probablement résultante d'une
démocratie, fut créée par Lycophron (406-v.390), qui opposa les grandes familles aristocratiques et
visa à la domination de la Thessalie. Ce dernier but fut atteint par Jason de Phères (v.390-370), le
successeur de  Lycophron, qui effectua une alliance avec Polydamas de Pharsale et se fit élire Tage en
374. Sa tentative pour réaliser l'unité de la région provoqua les interventions des Thébains et
des Macédoniens ses anciens alliés. Sous son règne l'ensemble de la Thessalie fut unie comme un
seul pouvoir politique, mais, après son assassinat en 370, sa famille fut déchirée par les discordes
intestines et ne put maintenir sa domination très longtemps. Ses successeurs renforcèrent leur
tyrannie jusqu'à ce qu'enfin, les vieilles familles aristocratiques appellent à l'aide le Roi
de Macédoine,Philippe II (359-336), qui priva Lycophron II (355-352) de son pouvoir en 352, et
rétablit les anciens gouvernements dans toutes les villes de Thessalie. Philippe aurait ainsi préposé à
chacune des quatre régions thessaliennes un gouverneur choisi par le roi. Les Thessaliens éliront
alors Philippe II Tage (ou Tagos) à vie de la Ligue Thessalienne.    Quelques années plus tard en 344, il
rétablit les Tétrades (ou Tétrarchies), avec l'installation de Gouverneurs qui lui étaient complètement
dévoués et qui étaient probablement membres des anciennes familles nobles.  À la fin du VIe siècle,
sous l'un de ces "Princes/Rois", nommé Aleuas (ou Alevas, en Grec : 'Aλεύας) fondateur de la
dynastie des Aleuades de Larissa, le pays fut divisé en quatre "districts" ou "canton" (Les Tétrades ou
Tétrarchies) : La Phthiotide (ou Phthiotis, en Grec : Φθιώτιδα) ; La Thessaliotide (ou Thessaliotis) ; La
Pélasgiotide (ou Pelasgiotis, en Grec : Πελασγιῶτις) et l’Hestiaotide. Cette division continua tout au
long de l'histoire de la Thessalie. On en a donc conclu que ce ne fut pas seulement un nom donné à
des régions mais bien des entités politiques. Chaque "district" régissait peut-être ses affaires par une
sorte de conseil provincial, mais nous sommes pratiquement sans aucune connaissance concernant
le gouvernement interne de ces entités. La cavalerie Thessalienne devint également une partie de
l'armée Macédonienne et de nombreux Thessaliens prirent part aux campagnes d'Alexandre le
Grand (336-323). Alors qu'il poursuit les Phocidiens, il est arrêté dans le défilé des Thermopyles par
une coalition athénienne et spartiate alliée à la Ligue achéenne. Malgré cet échec,
Philippe a marqué les cités grecques par sa puissance et les menace désormais directement.
cette raison, en -423, Olynthe prit la tête d'une Ligue chalcidienne plus ou moins informelle,
constituée de ces différentes cités. La cité prit part à la guerre du Péloponnèse contre les Athéniens
d'abord, puis contre les Spartiates. À la tête de la Ligue de Chalcidique, elle accéda à l'indépendance
après la paix conclue entre Athènes et Sparte en -421. Alliée à Philippe, elle combattit encore contre
Athènes, obtenant en échange les villes d'Amonte et de Potidée. Dès 353, les olynthiens, inquiets de
l’accroissement de la puissance macédonienne, ont commencé à se rapprocher des Athéniens. Les
orateurs antimacédoniens, de plus en plus influents à Olynthe, poussent à une paix séparée avec
Athènes qui est sans doute conclue pendant l’hiver 352-351. Philippe réagit à cette rupture du traité
par une incursion en territoire chalcidien, accompagnée du pillage, peut-être lorsqu’il rentre en
Macédoine après sa campagne de Thrace. Il s’abstient cependant de toute annexion et retire ses
tropues après avoir fait la démonstration de sa force. Il semble que Philippe, en 351 et en 350
consacre l’essentiel de ses efforts à la consolidation des frontières septentrionales et occidentale de
son royaume (par des campagnes en Illyrie et en Epire) ainsi qu’à l’organisationde la Thessalie. Au
début de l’été 349, Philippe juge le moment venu de conquérir la Chalcidique. Il lance un ultimatum
aux Olynthiens, exigeant qu’ils lui livrent deux réfugiés macédoniens, ses demi-frères Arrhidée et
Ménélas. Le refus olynthien déclenche immédiatement l’invasion macédonienne. Il est vraisemblable
que la demande d’extradition n’était qu’un prétexte, mais on ne saurait exclure qu’il y ait eu des
troubles intérieurs en Macédoine en 350-351 et que les Olynthiens aient accueilli les deux princes
argéades avec l’intention d’appuyer leurs prétentions dynastiques contre Philippe. Les Olynthiens
menacés demandent l’aide militaire d’Athènes. Démosthène soutient avec vigueur la requête
d’Olynthe. Selon l’orateur, l’évolution du rapport de forces en faveur de Philippe s’explique par le
contraste avec l’activité de celui-ci et l’intertie des Athéniens. Si les adversaires gardent les mêmes
attitufdes, il est certain que l’évolution se poursuivra jusqu’à la fin. Après cette mise en garde,
Démosthène présente un plan d’action. Les Athéniens doivent envoyer dans le nord de l’Egée deux
corps expéditionnaires, l’un en Chalcidique pour défendre les cités menacées, l’autre en Macédoine
pour ravager le royaume. Cette double intervention est indispensable selon Démosthène pour
obliger Philippe à lâcher prise. Les Athéniens concluent rapidement l’alliance demandée par les
Olynthiens. Reste à honorer cette alliance et à envoyer des secours. Il semble qu’un certain nombre
de citoyens aient été été effrayés à l’idée d’engager à nouveau une guerre active contre Philippe.
C’est pourquoi Démosthène consacre l’essentiel de sa seconde Olynthienne à montrer que la
puissance de Philippe est fragile. Philippe a constitué son empire par le parjure et le mensonge  : ceux
qu’il a dupés se dresseront contre lui au plus léger échec. Peu de temps plus tard, alors que les
Athéniens n’ont encore envoyé aucun secours. Démosthène prononce la troisième Olynthienne. Il
attaque directement le principal obstacle légal à la politique énergétique qui s’impose, la loi d’Eubule
sur le théorikon. Démosthène ne parvient pas à convaincre le peuple d’engager la procédure
d’abrogation de cette loi mais les Athéniens, à la fin de l’été, envooient deux corps expéditionnaires
en Chalcidique. Ils auraient peut-être fait un effort plus important au printemps 348 si des troubles
en Eubée n’étaient pas venus détourner leur attention.
Pendant l’hiver 349-348, une révolution éclate à Eretrie et chasse le tyran Plutarque soutenu
par les Athéniens ; le mouvement prend rapidement l’allure d’un mouvement antiathénien. Les
Athéniens, engagés dans deux conflits sur deux deux fronts différents, doivent faire un choix
stratégique difficile : faut-il en priorité secourir les Olynthiens ou réprimer la révolte de l’Eubée  ?
Démosthène est partisan de la première solution, et il est facile de reconstituer son raisonnement.
De nouveaux délais dans l’envoi de secours athéniens à Olynthe risquent d’entraîner la perte
irréversible d’un allié important : quand Olynthe sera sauvée, il sera encore temps de rétablir l’ordre
en Eubée. Fidèle à sa stratégie étroitement défensive, Eubule est de l’avis opposé : Olynthe est loin
d’Athènes, alors que l’Eubée est toute proche et d’un intérêt fondamental pour la sécurité de la cité.
C’est l’opinion d’Eubule qui triomphe : le peuple vote la levée en masse des hoplites et des cavaliers
et leur envoi en Eubée. Après le succès sans lendemain de Talynae, l’armée athénienne subit en
Eubée défaite sur défaite et doit reconnaître l’indépendance de la grande île (pendant l’été 348). En
Chalcidique, Philippe enlève cité après cité les villes de la confédération et entreprend le siège
d’Olynthe au début de l’été. Les Olynthiens qui n’avaient reçu aucun secours athénien au printemps
348 à cause de l’affaire eubéenne, obtiennent finalement en juillet l’envoi d’un nouveau corps
expéditionnaire de 2000 hoplites citoyens et de 300 cavaliers. Le départ de ce contingent athénienne
est retardé par le meltem : quand il arrive enChalcidique, Olynthe est déjà aux mains de Philippe (la
trahison des cavaliers olynthiens ayant largement contribuée à la défaite de la cité). Olynthe est
traitée très durement : la ville est rasée, ses habitants sont réduits en esclavage. Le choix d’Eubule,
en faveur de la défense de l’Eubée a abouti à un double échec, en Eubée et en Chalcidique. Mais
craignant que Philippe II de Macédoine ne s'empare de son territoire, Olynthe fit alliance
avec Athènes. Le roi macédonien assiégea alors la ville et la détruisit complètement en -348. Les
habitants, réduits en esclavage, furent dispersés en Thrace et en Macédoine. La cité fut abandonnée.
Démosthène, dans son introduction aux Olynthiennes, prononcée l'été -349, quelques mois avant sa
destruction par Philippe II de Macédoine, demanda vainement l'intervention d'Athènes pour venir au
secours d'Olynthe.
À partir de 352, Philippe reprend la politique d'expansion de son royaume vers le nord-est et
se tourne vers la Thrace, divisée en trois royaumes depuis la mort de Cotys, roi des Odryses. À l'appel
de l'un des rois, il assiège la forteresse d'Héraion Teichos, au bord de la Propontide. Ce mouvement
menace directement les intérêts athéniens, à la fois à cause de leurs clérouquies de Chersonèse,
mais aussi à cause de leur approvisionnement en blé. Presqu'île de Thrace (actuellement Gallipoli)
qui fut colonisée par les Grecs dès la fin du ~ VIIIe siècle. Vers ~ 560, peu après la première prise du
pouvoir par Pisistrate à Athènes, une expédition conduite par Miltiade réussit à s'emparer d'une
grande partie de la péninsule où furent installés des colons athéniens. Jusqu'en ~ 493 la Chersonèse
demeura en fait le domaine privé de Miltiade l'Ancien, puis de son neveu Miltiade le Jeune, lequel
dut accepter la domination perse. Mais, après les guerres médiques, les Athéniens reprirent pied en
Chersonèse, établissant des colons à Sestos et à Callipolis, et, sauf pendant la courte période de vingt
ans qui suivit leur défaite d'Aigos Potamos (~ 405), la Chersonèse resta une des bases de la puissance
athénienne en mer Égée. De fait, non seulement les colons athéniens de Chersonèse envoyaient une
partie des grains qu'ils récoltaient en Attique, mais en outre la mainmise sur la Chersonèse située à
l'entrée de la Propontide permettait aux Athéniens de contrôler le passage des navires venant de la
mer Noire. Au ~ IVesiècle, en effet, la région des détroits était vitale pour assurer
l'approvisionnement d'Athènes en blé. La conquête de la Thrace par Philippe de Macédoine fit peser
sur la Chersonèse un grave danger que les efforts de Démosthène ne réussirent pas à conjurer : en ~
338, la Chersonèse passa aux mains de Philippe, et cette perte, autant que la défaite de Chéronée (~
338), marqua la fin de l'indépendance d'Athènes. Athènes vote d'abord l'envoi d'un contingent
massif, mais la nouvelle exagérée d'une maladie de Philippe les dissuade de l'envoyer effectivement,
à tort : Philippe prend Héraion Teichos et livre la forteresse à la cité de Périnthe, qui avait également
fait appel à lui. En Eubée, des contingents macédoniens interviennent à plusieurs reprises pour
établir des factions oligarchiques. Les partisans de l’indépendance et de l’unit eubéennes, ceux là
mêmes qui s’étaient révoltés contre Athènes en 346, notamment Callias de Chalcis, sollicitent et
obtiennent l’alliance athénienne grâce à l’appui de Démosthène. La nouvelle confédération
eubéenne est l’alliée d’Athènes mais les cités eubéennes n’entrent pas individuellement dans la
seconde confédération athénienne, et ne paient pas de contribution à Athènes.
La troisième guerre sacrée est très importante puisqu'elle toucha la majorité de la Grèce. Elle
se déroula entre 355 (ou 357) et 346 et se conclut par la victoire militaire de Philippe II de
Macédoine. Elle avait un motif différent : les Phocidiens auraient tout d'abord labouré un champ
consacré aux dieux, le conseil amphictionique les condamna à une forte amende qu'ils refusèrent de
payer et envahirent le sanctuaire de Delphes.
Les conditions qui sont imposées aux Phocidiens sont très dures : la Confédération
phocidienne est dissoute, les villes sont rasées, la population est dispersée en hameaux. Les
amphictions imposent au peuple sacrilège de payer une amende de 60 talents par an pendant
soixante-deux ans. Philippe reçoit les deux sièges amphictioniques qui sont retirés aux Phocidiens.
Malgré les concessions qu’il a du faire aux Thébains, il contrôle l’amhictionie grâce auxThessaliens (le
roi veille à ce que les délégués thessaliens à l’amphictionie soient toujours de ses amis. Le contrôle
de l’amphictionie lui assure une réelle prépondérance en Grèce centrale.
Le danger le plus grave, à partie de 342, vient de la campagne entreprise par Philippe en
Thrace orientale, en vue de la conquête systématique de la région jusqu’à la mer noire, qui menace
les détroits de la Chersonèseà Byzance, et qui inquiète à la fois les Athéniens et les cités grecques de
la région. Pour renforcer leurs positions en Chersonèse, les Athéniens envoient dans la presqu’île un
contingent de mercenaires placé sous la direction du stratège Diopeithès. A la suite d’un différend
relatif à la cité de Cardia, et pour payer ses troupes, Diopeithès met au pillage plusieurs localités
thraces du royaume de Philippe. Au printemps 341, Philippe adresse une lettre de protestation aux
Athéniens, qui réclame en particulier le retour de Diopeithès. Démosthène s’oppose vigoureusement
à cette demande, et aux Athéniens qui l’estiment justifiée. Il souligne que les Athéniens n’ont pas le
choix entre le paix et la guerre, puisque Philippe leur fait de facto la guerre  : il ne leur reste qu’un
parti, se défendre contre l’agresseur qui prend les devants. Meme si Diopeithes a pu commettre
quelques excès, il serait catastrophique de rappeler le corps expéditionnaire athénienne ; ce serait
abandonner la région des détroits, il est vain d’envoyer des troupes quand l’adversaire a attaqué, il
faut prévenir ses agressions par une présence militaire sur le terrain. Le peuple se range à l’avis de
Démosthène. La Troisième Philippique, prononcée quelques semaines plus tard, reprend et amplifie
la dénonciation des actes et des ambitions de Philippe, et propose un ensemble de mesures
militaires et diplomatiques pour sauvegarder la liberté d’Athènes et celles de tous les Grecs.

III. Les derniers sursauts de la cité d’Athènes


A. Une cité divisée
La politique de Philippe vis-à-vis d’Athènes n’est qu’un aspect parmi d’autres de la grande
partie diplomatique et militaire engagée par le roi de Macédoine. L’enjeu des relations avec Philippe
est en revanche crucial pour Athènes et fait l’objet de débats très vifs entre orateurs athéniens. A
partir de 346, la question des rapports avec Philippe domine la vie politique athéniennes. La
domination macédonienne en Chalcidique n'est pas assurée alors que la puissante Ligue
chalcidienne, dominée par Olynthe, s'oppose à lui et s'allie à Athènes. À l'été 349 av. J.-C.,
Démosthène prononce la première de ses Olynthiennes  (en) afin d'encourager les Athéniens à
soutenir militairement la Ligue. Philippe encourage l'Eubée à se révolter contre Athènes avec pour
objectif d'empêcher les Athéniens d'aider Olynthe. Dès lors, il peut s'en emparer facilement en  348 :
Olynthe et Stagire (cité natale d'Aristote) sont entièrement rasées et leurs habitants vendus comme
esclaves. La Chalcidique devient définitivement macédonienne. Jusque-là, que ce soit par
l'intermédiaire d'Olynthe ou de l'Eubée, on voit que l'affrontement entre Athènes et la Macédoine a
surtout eu lieu par « alliés » interposés. En 346, Eubule, dirigeant athénien pro-macédonien, envoie
à Pella une ambassade (composée entre autres de Philocrate, d'Eschine et de Démosthène) afin de
négocier une trêve : ce traité, dit « paix de Philocrate » est un statu quo territorial, à travers lequel
Athènes reconnaît la domination macédonienne en Chalcidique et abandonne la Phocide. La même
année, à Athènes, le rhéteur Isocrate accueille favorablement cette paix en écrivant son discours
politique Philippe, dans lequel il s'adresse directement au roi de Macédoine, l'invitant à réaliser
l'union des cités grecques et à faire la guerre à la Perse achéménide, concrétisant ainsi
l'idéal panhellénique. Eubule et Isocrate incarnent donc l'existence d'un courant pro-macédonien
actif au sein de l'élite athénienne. L’opposition entre les partisans de l’entente avec le roi –
notamment Eschine – et les partisans de la fermeté à son égard – en particulier Démosthène et
Hypéride – tend à reléguer au second plan tous les autres clivages. Eschine est un orateur athénien,
né en 389, mort en 314 av. J.-C. Son père était le maître d'école Atrometos; sa mère Glaucothea
gagnait sa vie comme prêtresse de mystères. Un de ses frères, Philocharès, fut peintre de vases,
autre, Aphobétos, fut scribe au service de l'État. C'est dans la même carrière que débuta Eschine,
puis il fut acteur, mais sans succès ; il ne remplit jamais que les troisièmes rôles. Il servit aussi comme
soldat et se consacra aux affaires publiques. Il débuta en 348 après la chute d'Olynthe, pour
recommander la réunion d'un congrès, puis se rangea complètement parmi les partisans de la paix à
tout prix. Il contribua puissamment à la conclusion de la paix de Philocrate (346). fut accusé de
prévarication pendant son ambassade, fit écarter d'abord par une contreaccusation l'accusateur
principal; mais Démosthène reprit l'accusation trois ans après; Eschine n'échappa qu'à grand peine à
une condamnation. L'influence de ses protecteurs, Eubule, Phocion, Aristophon, le sauva malgré
l'éloquence de son adversaire (343). Dans ce procès retentissant, on vit en présence les deux partis
qui se partageaient Athènes et les deux plus grands orateurs de la Grèce. Tout le reste de la vie
d'Eschine se résume dans cet antagonisme. Après Chéronée (338) et la décadence naturelle de son
parti, il fut de plus en plus soupçonné de s'être vendu à Philippe. On sait le procès de la couronne (à
la suite duquel, n'ayant pas obtenu le cinquième des voix, il fut condamné à l'amende. Ayant perdu
ainsi le droit de parler devant le peuple, il abandonna Athènes, se rendit à Ephèse, puis à Rhodes et à
Samos. Il fonda à Rhodes, suivant une tradition fort douteuse, une fameuse école d'éloquence, et il y
aurait débuté par la lecture de son dernier plaidoyer et du discours de son adversaire pour
Ctésiphon. Il ne rentra jamais dans Athènes. Nous avons de lui trois discours prononcés tous les trois
dans des procès où il eut Démosthène pour adversaire : un contre Timarque, un autre sur les
prévarications de l'ambassade et le troisième contre Ctésiphon. Ils nous permettent de comparer les
deux rivaux. Eschine reste loin derrière Démosthène. Le second de ses discours est généralement le
plus estimé. C'est vers l'époque de ces diverses entreprises du Macédonien qu'il y a lieu de situer sa
nouvelle et dernière tentative de rapprochement avec les Athéniens: il leur envoya une ambassade
chargée de leur apporter des offres nettementupérieures en clarté et en précision à celles du
printemps 343. Tandis que Python de Byzance, en effet, les avait invités à proposer les modifications
qu'il leur paraîtrait utile d'introduire dans le traité de 346, sans formuler lui-même d'offres positives
(4), l'ambassade de 342 usait d'une méthode très différente, plus franche, et aussi moins prudente,
certaines de ses propositions étant de nature, comme nous allons le voir, à inquiéter ou à irriter les
orateurs patriotes (5). Philippe offrait aux Athéniens de leur céder la petite île d'Halonnèse, que des
pirates leur avaient naguère enlevée et dont il s'était emparé à son tour (*) ; il leur proposait la
collaboration de sa flotte pour faire régner la sécurité dans la mer Egée (2) et il les invitait à conclure
des accords commerciaux intéressant, notamment, Potidée (3) ; il se déclarait prêt à laisser arbitrer
par un « tribunal impartial » (ϊσω και κοινώ δικαστηρίφ) le conflit qui opposait Athènes à la
Macédoine (4) ; il demandait également qu'un arbitrage réglât les différends territoriaux survenus
entre les Athéniens et les Cardiens au sujet d'une partie de la Chersonese (5), et il offrait d'obliger
Cardia à s'incliner devant la sentence des arbitres si cette ville ne s'y décidait de bon gré (6).Ces
propositions furent très bien accueillies par une fraction de l'opinion athénienne, comme le
reconnaît expressément un de leurs principaux adversaires : « il s'est trouvé des gens pour dire que
cette lettre (de Philippe) est fort bien tournée»^). Il est légitime de supposer qu'Isocrate figurait
parmi ces admirateurs des propositions royales ; tel fut certainement aussi le cas d'Eschine, qui, en
330, devait blâmer Démosthène d'avoir combattu au moins l'une des offres du Macédonien (8). Mais
l'opposition fut plus vive encore et, surtout, plus efficace que l'approbation : à Démosthène se joignit
en cette circonstance Hégèsippos (qui l'avait déjà secondé lors de son ambassade de 343-342 dans le
Péloponèse). L'attitude des approbateurs n'était d'ailleurs pas absolument injustifiée, comme on
pourrait le croire, de prime abord, d'après la harangue prononcée devant l'Ecclésia par Hégèsippos.
Cette fois, le Macédonien présentait à Athènes des propositions, qui pouvaient fournir au moins les
éléments d'une discussion, grâce à leur précision relative. et à leur nombre ; plusieurs d'entre elles
offraient même d'indéniables avantages pour les Athéniens : le moyen de recouvrer sans combat l'île
dont les pirates les avaient dépouillés ; la certitude ou, du moins, la promesse d'obtenir un appui de
tout premier ordre contre Cardia, dans la mesure où leurs revendications seraient jugées légitimes ;
la perspective d'une extension de leur trafic avec la Macédoine ; enfin, la proposition relative à
l'emploi de l'arbitrage s'inspirait évidemment du plus louable principe. On s'explique assez bien,
toutefois, l'hostilité que les offres du roi suscitèrent chez les orateurs anti-macédoniens, et il est
permis d'estimer que de solides raisons militaient en faveur d'un refus, au moins partiel (raisons qui,
d'ailleurs, ne sont peut-être pas toujours mises en très bonne lumière par l'argumentation quelque
peu rigide et sèche d'Hégèsippos).

B. La troisième Philippique
En 342, Philippe fait de la Thrace une province de la Macédoine et y fonde plusieurs cités.
Cette volonté d'implantation macédonienne en Grèce du Nord-Est provoque des révoltes,
notamment celle de Byzance, soutenue par Athènes. En 341, Démosthène prononce sa Troisième
Philippique pour convaincre les Athéniens de la nécessité d'entrer en guerre contre Philippe. Dès lors,
l'affrontement direct entre Philippe et Athènes apparaît inévitable. L'année même où Démosthène
avait parlé des affaires de la Chersonèse (ol. cix, 3 ; 342), et vraisemblablement peu de mois après, il
se leva encore une fois pour convaincre les Athéniens de la nécessité de la guerre contre le roi de
Macédoine. Philippe était encore occupé en Thrace, et il s'approchait, par des conquêtes faciles, des
côtes de la Propontide et des portes de Byzance que, depuis longtemps, il tâchait de se faire ouvrir
au moyen de l'or et de l'intrigue, ses armes favorites. A la même époque, il punit les Péparéthiens qui
s'étaient emparés d'Halonèse par force, il menaça plus vivement la Chersonèse, et étendit de tous
côtés son pouvoir et son influence. Du reste, nous ne connaissons pas le fait précis qui donna lieu à
cette nouvelle Philippique. La paix avec le conquérant, dit seulement Libanius, existait encore de nom
; mais dans la réalité, elle était violée par ses nombreuses injustices. Par des considérations déjà en
partie présentées à d'autres époques, mais rendues plus pressantes encore, l'orateur exhorte les
Athéniens à repousser le péril qui menace de plus près Athènes et la Grèce. Quelques mois à peine se
sont écoulés, depuis que Démosthène a prononcé le discours sur les affaires de la Chersonèse. Les
mesures conseillées n'ont pas été écoutées. Byzance et la Chersonèse sont de plus en plus
menacées ; mais, dans cette nouvelle harangue, où le génie de l'orateur s'élève à son apogée,
Démosthène s'occupe moins des faits particuliers que de la situation générale, du rôle patriotique qui
incombe à Athènes. Il n'y a plus à choisir entre la paix et la guerre : Philippe, abrité sous le traité de
346, agit en ennemi ; il pousse ses approches de tous côtés : en Thrace, en Eubée, jusqu'à Mégare et,
le jour où il lui plaira, il se démasquera, et Athènes, enveloppée de toutes parts, sera impuissante à
lui résister. La Grèce, si jalouse naguère de son indépendance, en face d'Athènes, de Sparte, de
Thèbes, n'a pas su se concerter pour arrêter l'essor de ce tyran, qui n'est pas même un Grec. Et
cependant Philippe n'a pas aujourd'hui la puissance qu'avait Sparte. Qu'on le veuille, et il est encore
facile de lui barrer la route, de le harceler jusque dans ses États. Pour cela, il faut, déclare l'orateur,
que la Grèce se coalise à notre appel ; il faut que nous occupions fortement la Chersonèse ; et que,
prêts à tous les sacrifices, nous ne nous laissions pas décevoir par les charmes éphémères d'une vie
douce et facile qui aboutit à l'abîme ; il faut, surtout, châtier les traîtres qui rongent le coeur de la
cité. Et, cette fois, ce ne sont plus seulement des conseils que l'orateur fait entendre à ses
concitoyens ; mais il prend la responsabilité d'une proposition de décret, qui les résume.
Les Athéniens tentent une voie , une alliance panhéllénique contre le roi de Macédoine.
L’indignation causée par la destruction d’Olynthe a pu un moment créer un été d’esprit favorable à
une telle alliance ; les intrigues de Philippe

C. Un dernier sursaut athénien


Nous savons par le témoignage de Philochroe que nous a conservés Didyme que sous
l’archontat de Sosigénès (342-341) les Athéniens, sous la conduite de Képhisophon, passèrent dans
l’île d’Eubée, appelés par les Chalcidiens, renversèrent le tyran d’Oréos, Philistidès, et rétablirent
dans cette ville la démocratie. Cette expédition eut lieu en juin 341, soit très peu de temps après le
discours de Démosthène ; il est vraisemblable qu’elle en fut la conséquence ; et ceci donne à croire
que le décret préparatoire proposé par lui avait été adopté. C’était un second succès après celui déjà
obtenu par le discours sur les affaires de Chersonèse ? In voit par là combien son influence
grandissait alors : il était en passe de devenir l’homme politique athénien le plus influent et le plus
écouté des Athéniens. Et en même temps que son rôle dans l’Etat s’amplifiait, so éloquence devenait
de plus en plus forte et puissante. En 340, un congrès se tint à Athènes, où se retrouvèrent des
délégués de Coritnhe, de Mégare, de la ligue achéenne ainsi que des cités de l’île d’Eubée. Une
alliance fut conclue, aux termes de laquelle on décida d’équiper une flotte de100 trières et de
rassembler une armée de 10 000 hommes auxquels s’ajouteraient 1 000 hommes. La même année,
Démosthène entreprend un voyage dans la région des Détroits pour allier à la cause athénienne, les
grandes cités qui s’en étaient détachés depuis 356, Byzance et Abydos, ainsi que les grandes îles de
Rhodes et de Chios. Depuis 342, en effet, Philippe fesait peser une lourde menace sur ces régions, et
singulièrement sur la Chersonnèse de Thrace, vieille possession athénienne. En dépit de l’opposition
d’une partie de l’Assemblée athénienne, Démosthène avait réussi à faire envoyer en Chersonnèse le
stratège Diopeithès à la tête d’une armée de mercenaires. Depuis sa victoire dans la troisième guerre
sacrée en 346 av. J.-C., Philippe II est membre du conseil amphictyonique de Delphes, et en tant que
tel partie prenante dans les affaires des Grecs. Entre -343 et -340, il s'en prend aux possessions
athéniennes en mer Égée et en Chersonèse, et annexe la Thrace. Pendant l’hiver 341-340, la
diplomatie athénienne connaît un nouveau succès. Byzance se sent de plus en plus menacé par
Philippe, et Démosthène se rend dans la plus grande cité du Bosphore pour y négocier une alliance.
L’attaque prévue ne tarde pas à se produire. Au printemps 340, Philippe entreprend le siège de
Périnthe – après avoir commis une violation caractérisée de la paix de Philocrate en faisant traverser
la Chersonèse à certaines de ses troupes. Périnthe, dont les habitants sont résolus à se défendre, est
bien ravitaillée par voie de mer (en partie grâce à la présence de la flotte de Cahrès dans le
voisinage) ; elle reçoit des renforts de Byzance et une aide, militaire et surtout financière, de starapes
perses voisins. Ne pouvant s’emparer de Périnthe, Philippe tente un coup de main contre Byzance,
espérant trouver la cité sans défenseurs. Le coup échoue et le siège de Byzance se présente encore
plus mal que celui de Périnthe, parce que les Byzantins, appuyés par les Athéniens, contrôlent
entièrement la mer. Philippe pour la première fois depuis 352, subit un grave échec (patent à
Périnthe, prévisible à Byzance),.il lui faut d’urgence restaurer son prestige aux yeux de ses troupes et
de ses alliés, et faire comprendre à ses adversaires qu’il a encore les moyens de leur causer de graves
dommages. Une imprudence du stratège athénien CHarés lui fournit l’occasion attendue. Charès a
été chargé d’escorter de la mer noire à la mer égée les 230 vaisseaux marchands qui transportent au
Pirée le blé de Scythie. Au milieu de sa mission , les satrapes perses qui aident Périnthe contre
Philippe, l’invitent à une conférence pour délibérer sur la suite des opérations. Charès abandonne
pour quelques jours les vaisseaux de blé, et Philippe s’en empare. Cet acte de piraterie à grande
échelle n’est pas la première violation à la paix de Philocrate, mais il en est une violation si flagrante
qu’on peut penser qu’il s’agit d’une provocation. Les Athéniens, agressés et spoliés ne peuvent que
déclarer la guerre
En Grèce même, il parvient dans un premier temps à obtenir l'alliance de Thèbes. Mais
Démosthène, inquiet de la montée en puissance macédonienne, engage une intense activité
diplomatique pour détacher les Thébains de Philippe II et y parvient en 339 av. J.-C. Le prétexte de
l'intervention de l'armée macédonienne est fourni par les Locriens d'Amphissa qui sont accusés par le
conseil amphictyonique d'usurper des terres sacrées : c'est le déclenchement de la quatrième guerre
sacrée à l'automne -339, Philippe II étant chargé de punir Amphissa qui a fait appel à ses alliés
athéniens. Malgré l'initiative thébaine consistant à bloquer le défilé des Thermopyles pour empêcher
l'invasion, l'armée de Philippe II franchit les cols à l'ouest de l'Œta et prend Élatée à la frontière de la
Béotie. Sous la houlette de Démosthène, une armée de coalisés venus de toute la Grèce se porte à sa
rencontre et occupe une forte position à Parapotamioï que Philippe II ne peut forcer. L'hiver force les
deux armées à l'inaction. Au printemps, Philippe II parvient à s'emparer d'Amphissa, de Delphes et de
Naupacte. L'armée grecque se retire de Parapotamioï vers Chéronée, où le 2 août 338 av. J.-C.2,
Philippe II accepte la bataille rangée.En 338 av. J.-C., le Conseil amphictyonique, à l'initiative
d'Eschine, décide une quatrième guerre sacrée contre une cité de Locride, Amphissa, accusée d'avoir
cultivé une terre sacrée. Philippe y voit l'occasion de pousser son influence en Grèce-Centrale de
façon définitive. Il se fait accorder la tête de l'expédition, détruit Amphissa et progresse en Phocide
et en Béotie jusqu'aux portes de l'Attique. Face à cette menace, les cités rivales de Thèbes et
d'Athènes finissent par s'allier. En août 338, les armées de Philippe et de son fils Alexandre (à la tête
de la cavalerie) battent les troupes grecques coalisées à la bataille de Chéronée. Cette victoire lui
assure l'hégémonie en Grèce. Philippe II sait se montrer habile politicien dans la victoire : il se
contente de contraindre Athènes à entrer dans la Ligue de Corinthe, une confédération d'États
helléniques qu'il dirige. Thèbes doit renoncer à sa domination sur la Béotie. La victoire de Philippe II à
Chéronée marque un tournant dans l'histoire grecque en consacrant la défaite des derniers
adversaires de poids à l'hégémonie macédonienne. Après la bataille de Chéronée, Philippe de
Macédoine épargne Athènes et s’en prend essentiellement à Thèbes. Il propose de donner à Athènes
un canton thébain qu’elle revendiquait. Athènes envoie Exenippos consulter l’oracle de Delphes.
Mais cet oracle est très ambigu. Lycurgue l’attaque dans son Contre Exenippos car selon lui il a
rapporté une réponse volontairement ambiguë. Athènes subit la perte d'un millier d'hommes et
compte plus de 2 000 prisonniers. Elle est contrainte de signer la paix de Démade, d'intégrer la
coalition macédonienne et d'accorder à Philippe la citoyenneté athénienne. Elle peut néanmoins
conserver sa flotte. Il est probable que Philippe songe à utiliser cette dernière contre les Perses.
Thèbes est plus sévèrement punie : la cité est occupée par une garnison macédonienne, la Ligue de
Béotie est dissoute. En 337, Philippe réunit les cités grecques lors du congrès de Corinthe et fonde
la Ligue de Corinthe ou Ligue des Hellènes. Il est fait interdiction aux cités grecques de se battre entre
elles mais elles conservent leur autonomie et leurs institutions propres. Sparte, la Crète et les cités
de Grande-Grèce, restées neutres, n'entrent pas dans cette ligue. La Ligue de Corinthe, fondée
en 337 av. J.-C., devient rapidement une alliance militaire (symmachie) ayant pour finalité l'invasion
de l'Asie Mineure alors sous la tutelle des Perses achéménides, le prétexte étant de venger la
profanation des sanctuaires grecs lors des guerres médiques et de « libérer » les cités grecques
d'Ionie et de Lydie notamment. Philippe fait donc appel au début de l’année 336 à ses deux généraux
de confiance, Parménion et Attale, pour diriger un corps expéditionnaire, profitant de
l'affaiblissement de l'Empire perse suite à la mort d'Artaxerxès III. À la tête de 10 000 hommes et aidé
par les cités d'Éphèse et Cyzique, Parménion remporte plusieurs victoires, comme à Magnésie du
Méandre. Il s’empare de Grynéion (en) près de Pergame pour ensuite se diriger
vers Pitané (en) où Memnon de Rhodes, alors à Cyzique pour réprimer la cité, revient pour en
assurer la défense. Mais le siège de Pitané échoue, malgré l’arrivée de renforts et il doit se replier
en Troade puis à Abydos. Cette première campagne n’est pas couronnée de succès, et rares sont les
cités grecques qui se déclarent en faveur des Macédoniens. Philippe est assassiné à l'été 336
par Pausanias, l'un de ses Sômatophylaques (gardes du corps), dans le théâtre d'Aigeai où il célèbre
ses victoires à l'occasion du mariage de sa fille Cléopâtre avec Alexandre le Molosse, roi d'Épire et
frère d'Olympias. Cet assassinat a peut-être été instigué par les Perses voire par Olympias afin
d'assurer l'accession au trône d'Alexandre. Aucune preuve ne vient faire corroborer ces suspicions,
Pausanias étant en effet immédiatement tué ; même si Plutarque mentionne une lettre adressée
par Alexandre à Darius, dans laquelle il blâme le Grand Roi (et Bagoas, son vizir), pour le meurtre de
son père, soutenant que Darius s'est vanté auprès des différentes cités grecques de cet assassinat. La
mort de Philippe ne change rien aux plans d'invasion : Parménion fait allégeance à Alexandre qui
rejoint le corps expéditionnaire à Abydos en mai 334.

Conclusion :
La Troisième Philippique a été considérée d !s l’antiquité comme un des plus beaux disocurs
de Démosthène. Ce jugement depuis lors semble avoir été ratifié par les meilleurs juges. Les idées
essentielles de l’orateur s’y développent avec plus d’ampleur que dans aucune des harangues
précédentes. L’argumentation plotique, toute nourrie de faits qu’elle interprête et commente, s’y
montre dans la plénitude de sa force, et aussi la sincérité ardente du patriote inquiet, qui voit à plein
l’imminence du danger, les avantages de l’adversaire, l’affaiblissement des volontés autour de lui,
toutes les difficultés extérieures, mais qui veut compter malgré tout sur la puissance de la vérité
hardiment énoncée pour réveiller les âmes somnolentes pour lutter victorieusement. A la vigueur
des pensées s’ajoute la véhémence des sentiments. L’amour enflamé de la liberté, le sens le plus
élevé de l’honneur, l’appel au plus nobles traditions, s’y mêlent à l’ironie mordante et à l’indignation,
et aussi à la tristesse que le spectacle de certaines injustices criante sont fait naître dans une nature
généreuse. Il fait dans le court de son discours un récit relatif à Euphracos, , un récit pénétré dune
émotion profonde, comme si l’orateur en parlant du sort de ce bon citoyen méconnu, avait eu un
lointain pressentiment de sa propre fin.
En -324, c'est au tour de Démosthène lui-même de prendre le chemin de l'exil, à la suite de
l'« affaire d'Harpale » : il est accusé d'avoir détourné une partie de l'argent placé sous séquestre par
le trésorier d'Alexandre, Harpale. Il doit se retirer à Égine, puis à Trézène. Il est rappelé à Athènes par
le peuple en -323, à la suite de la mort d'Alexandre le Grand. Il y prononce de nouveau des discours
anti-macédoniens, mais la défaite de Crannon, lors de la guerre lamiaque, le force de nouveau à fuir,
cette fois en compagnie de l'orateur Hypéride, pour échapper aux soldats d'Antipater. En -322, il se
réfugie dans le temple de Poséidon situé dans l'île de Calaurie (aujourd'hui Poros), le long de la côte
de l'Argolide. Plutarque rapporte qu'il est abordé dans le temple par un dénommé Archias, ancien
acteur et affidé d'Antipater. Celui-ci veut attirer Démosthène hors de l'enceinte sacrée en lui
promettant la vie sauve. Démosthène refuse, et prétendant écrire une lettre à sa famille,
s'empoisonne en mordillant l'extrémité de son calame, comme il avait l'habitude de le faire en
réfléchissant. « Démosthène, sûr désormais que le poison avait bien pénétré et était en train
d'opérer, se découvrit et, fixant son regard sur Archias : « Tu peux maintenant, lui dit-il, te hâter de
jouer le Créon de la tragédie et faire jeter ce corps sans sépulture. Pour moi, ô cher Poséidon, je sors
encore vivant de ton temple, tandis qu'Antipater et les Macédoniens n'ont même pas respecté la
pureté de ton temple. » Sur ces mots, il pria qu'on le soutînt, parce que déjà il tremblait et
chancelait, et dès qu'il fut sorti et eut dépassé l'autel, il tomba et rendit l'âme dans un
gémissement. » À sa mort, Démosthène possède 14 talents, somme considérable qui le met en
position d'être astreint aux liturgies. Pour l'essentiel, il s'agit d'esclaves, de matières premières et de
créances maritimes.

Bibliographie :
Carlier P., Le IVeme siècle grec jusqu’à la mort d’Alexandre, Paris, 1996.
Claude ORRIEUX & Pauline SCHMITT-PANTEL, Histoire grecque, PUF Quadrige, 1995

Chronologie indicative :
-358 Organisation de l’armée macédonienne. Prise des mines d’or du mont Pangée.
 -357 Voyage expiatoire de Philippe à Samothrace. Mariage de Philippe avec Olympias, soeur du roi
Alexandros d’ Épire.
 -356 Naissance d’Alexandre le Grand (22 juillet).
 -355 Soumission de la Péonie (Bulgarie) et de l’Illyrie (Yougoslavie et Albanie). Siège de Méthone (sur
le golfe de Salonique).
 -353 Expédition contre les colonies grecques sur les côtes de Thrace. Première apparition de Philippe
en Grèce.
 -352 Victoire sur la coalition thessalienne près du golfe de Pagase (Volos). Occupation de la
Magnésie. Les Athéniens interdisent le passage des Thermopyles. Soumission de la Thessalie à
Philippe.
 -351 Naissance d’Arrhidée (bâtard de Philippe et de Philémore de Larissa). Deuxième campagne de
Thrace et conquête de trente-deux établissements grecs. Démosthène prononce la le Philippique.
-350 Philippe dépose son neveu Amyntas et se fait couronner roi de Macédoine. Lysimaque et
Léonidas, précepteurs d’Alexandre.
 -349 Campagne de Chalcidique. Attaque d’Olynthe. Démosthène prononce la 1e Olynthienne.
 -348 Poursuite du siège d’Olynthe.
 -347 Prise d’Olynthe. Mort de Platon.
 -346 Ambassade de Démosthène à Pella.
Deuxième campagne de Philippe en Grèce.
Philippe siège au Conseil Amphictyonique de Delphes.
 -345 Deuxième campagne d’Illyrie. Poursuite des conquêtes de Thrace jusqu’à l’Hellespont (Turquie
d’Europe).
 -344 Philippe réorganise la Thessalie.
 -343 Aristote précepteur d’Alexandre.
Campagne d’Artaxerxès III Ochos en Égypte. Chute et fuite du pharaon Nectanébo 11.
 -342 Campagne de Philippe vers l’Ister (Danube).
 -341 Nouvelle campagne en Hellespont.
 -340 Alexandre au siège de Périnthe (sur la mer de Marmara).
Philippe le désigne comme régent.
 -339 Philippe ayant échoué devant Périnthe échoue devant Byzance. Expédition sur les rivages du
Pont-Euxin (mer Noire).

La Grèce à la mort de Philippe II

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