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PROJET DE FIN D’ETUDES EN VUE DE L’OBTENTION D’UN

DIPLOME DE LICENCE EN DROIT PUBLIC

Délivré par l’Université Ibn Tofail de Kénitra

LA FRAUDE FISCALE
AU
MAROC

Discipline : Droit

Spécialité : Droit Public

Rédigé sous la direction de Monsieur Yacine Tanane, Professeur de Droit à


l’Université Ibn Tofail de Kénitra, par Gligbé Kossi Boubounè

© Juillet 2020
Remerciements

Par les premières lignes de ce document, j’éprouve une immense gratitude


et une reconnaissance infinie à l’égard de Dieu, créateur des Cieux et de la
Terre, maitre des temps et des circonstances, à mes deux parents qui par leur
propos et encouragements me boostent et me poussent à aller aussi loin que
possible, à poursuivre mes ambitions même si elles sont enfouies dans des
constellations célestes. Je manifeste également une grande reconnaissance à tout
le corps professoral de la Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et
Sociales de Kénitra et plus spécialement à l’égard de mon encadrant, en
l’occurrence, Monsieur Yacine Tanane qui a toujours fait preuve de disponibilité
en me prodiguant des conseils O combien utiles, qui m’ont permis de parfaire la
rédaction et la conception du document que vous avez entre vos mains ou sous
vos yeux. Le chemin a été long et pavé d’arbustes peut-être, l’aventure, jonchées
d’adversités mais ce qui importe véritablement, c’est la finalité, le
dénouement…Et je suis de ceux qui croient que, la fin d’une chose vaut mieux
que son début…Au demeurant, que les bénédictions soient !
« Toutes les situations sont porteuses de sens et d’enseignement.

La principale difficulté qui subsiste, c’est d’attraper ce satané ascenseur social, encore

faut- il que le système le permette. Le prendre, n’appartient qu’à soi, en avoir un dépend

plutôt des

structures »

Me Éric Dupond Moretti, Le Dictionnaire de ma vie


Table des Matières

Partie I : Etude historique de diverses formes d’impôts du système fiscal Marocain........9

Chapitre I : Evolution du système fiscal marocain............................................................9

Section 1 : Le régime fiscal marocain avant le protectorat...........................................9

Section 2 : Le système fiscal marocain pendant la période du protectorat...............11

Section 3 : Le système fiscal marocain au lendemain du protectorat........................12

Chapitre II : Les sources du droit fiscal marocain..........................................................13

Section 1 : La constitution..............................................................................................13

Section 2 : La loi..............................................................................................................13

Section 3 : Les règlements et circulaires.......................................................................14

Section 4 : La jurisprudence fiscale..............................................................................14

Section 5 : Les conventions et traités internationaux..................................................14

Partie II : La fraude fiscale et ses modes de répression au Maroc.....................................15

Chapitre I : Formes et manifestations de la fraude fiscale au Maroc............................16

Section 1 : Les causes de la fraude fiscale.....................................................................16

Chapitre II : L’infraction de fraude fiscale en droit interne marocain.........................19

Section 1 : Les éléments constitutifs..............................................................................19

Chapitre III : La fraude fiscale dans l’économie marocaine..........................................24

Section 1 : Les pertes fiscales du Royaume marocain.................................................25

Section 2 : Moyens de lutte contre la fraude fiscale au Maroc...................................26

Section 3 : Regard critique sur les politiques de lutte contre la fraude fiscale.........27
Introduction
Nul n’est sans savoir qu’aujourd’hui, l’Etat moderne se définit par
l’existence et l’exercice de quelques missions qualifiées de régaliennes. En
l’occurrence, il s’agit, primo de la sécurité intérieure -par l’exercice du
monopole de la violence légitime1- et de la défense du territoire nationale contre
toute forme d’agression extérieure, secundo de dire le droit et rendre justice,
tertio la levée d’impôt par la mise en place d’un système fiscal équitable, juste et
cohérent. Selon la théorie de l’Etat-Providence, le pouvoir fiscal dont disposent
les pouvoirs publics est une des conditions d’existence de la souveraineté de
l’Etat. Autrement dit, un Etat qui n’est plus en mesure de faire respecter les
obligations fiscales qu’il a fixé, perd sensiblement un pan de sa souveraineté.
Dans une Afrique où le système économique est en perpétuelle mutation,
prenant l’exemple sur ce qui se fait dans les économies formalisées d’Europe et
d’Amérique, il urge de s’intéresser et d’évaluer les politiques économiques
mises en place par les Etats afin de renflouer leurs caisses. De par sa nature,
l’Etre humain, semble avoir un instinct de désobéissance ou de défiance à
l’encontre de toute forme d’autorité ou d’ordre établi. Cet aspect se révèle aussi
en matière de son adhérence aux obligations fiscales souverainement établies par
l’Etat.

1 Max Weber, Le savant et le politique, trad. de l'all. par Catherine Colliot-Thélène,


Paris, La Découverte, 2003, p. 118.
Délimitation du sujet

La présente recherche sera circonscrite aux thématiques suivantes :

 L’étude de l’impôt vu sous l’angle de ses principales


caractéristiques

 L’étude de l’évolution spatio-temporelle de la notion de


l’impôt et des différents régimes d’impositions.

 La présentation des grandes fonctions et des grandes missions


que les politiques d’impositions sont censées accomplir, ou
qu’elles accomplissent ; Autrement dit, il s’agira d’exposer les
grandes lignes relatives aux principales fonctions de l’impôt

 L’étude de l’infraction de fraude fiscale d’une manière


générale et objective puis sur la nature de cette infraction au
Royaume du Maroc.

 La présentation du regard du législateur marocain sur ladite


infraction et les retombées ou impacts qu’a cette dernière sur
la machine économique du Maroc.

 In fine de l’analyse, il s’agira tout simplement d’exposer la


nature des réponses de l’appareil d’Etat marocain contre la
fraude fiscale et enfin d’évaluer ses réponses afin de porter un
jugement critique sur leur efficacité ou non.
Intérêt du sujet
L’intérêt porté à ce sujet se justifie par la réalité selon laquelle,
l’économie marocaine, étant en plein essor, nécessite de faire face de manière
efficace à toute tentative de quelle que nature que ce soit, visant à réduire les
rentrées fiscales de l’Etat. Le moyen privilégié par « les citoyens indélicats » est
le recours à la fraude fiscale qui permet de se soustraire de manière consciente et
malhonnête à l’obligation de payer les impôts. Et pour lutter efficacement contre
ladite pratique, il faut d’abord la comprendre puis connaitre ses manifestations et
ses variantes. C’est suite à ce travail d’analyse, qu’il sera possible de trouver les
voies et moyens permettant à l’appareil d’Etat de mettre en place une stratégie
efficace de lutte contre ladite fraude.

Problématique

Le phénomène de la fraude fiscale apparait comme étant une sorte de


peste ou de cancer qui infecte en profondeur l’économie des pays auxquels il
s’attaque. Une autre réalité qu’il convient de rappeler ou de signaler est qu’elle
n’est pas qu’une pratique qui est circonscrite dans les « Pays du Sud » ou pays
du Tiers- Monde mais au contraire même les pays ayant une économie en
apparence très formalisée et policée subissent les affres de ce phénomène. D’où
la nécessité de s’y pencher en profondeur afin d’en connaitre les tenants et les
aboutissants. Un regard observateur sur les paysages sociologiques des nations
ou économies frappées par la fraude fiscale démontre à suffisance que l’écart
des classes sociales est bien patent et très visible. D’où la nécessité de se poser
des questions et de s’interroger sur les causes même insoupçonnées de ladite
fraude. Est-ce parce que les Etats peinent à mettre en place une meilleure
politique distributive des richesses et ressources que les basses et moyennes
classes se sentant marginalisées
n’ont d’autre choix que de se dérober à leurs obligations fiscales ? Le principe
du consentement l’impôt n’apparait-il pas dans les pays touchés par la fraude
fiscale comme étant beaucoup plus imposé qu’accepté ? Quand des
contribuables paient des sommes faramineuses au trésors public sans
véritablement savoir à quoi vont servir ces sommes, vers quelle destination se
dirigent-t-elles et ignorent totalement si on leur rendra compte de la manière
dont ces impôts sont utilisés, il y a réellement de quoi s’interroger. Et ces
interrogations méritent d’être au centre du débat public et des recherches
universitaires ou intellectuelles. Comme le dit un adage populaire, le mal étant
profond, pour l’éradiquer, il va falloir creuser très bas…
Partie I : Etude historique de diverses formes d’impôts du système
fiscal Marocain

Le meilleur moyen de comprendre le système fiscal du Maroc dans sa


globalité et dans sa constitution demeure une étude rétrospective de ladite
notion. Il s’agira principalement d’étudier en premier lieu, la chronologie de
l’évolution du système fiscal marocain (I) et secundo, ses éléments générateurs
c’est-à-dire les sources du droit fiscal (II)

Chapitre I : Evolution du système fiscal marocain

Selon le dictionnaire de la langue française Larousse, l’expression impôt


s’entend par une charge publique, un droit imposé sur certaines choses. Avant
d’approfondir cette notion aux acceptions diverses selon les époques et les
sociétés, il convient de remonter le temps afin d’étudier comment elle est née au
Royaume du Maroc c’est-à-dire ses origines, les diverses mutations et évolutions
qu’elle a connues au fil des années puis ses diverses fonctions. Plus précisément,
il s’agira d’étudier les diverses formes d’impositions du système fiscal marocain
avant la période de protectorat, pendant le protectorat ainsi que ce qu’il est
devenu après cette période.

Section 1 : Le régime fiscal marocain avant le protectorat

Il est connu de tous que le Maroc est un Royaume à tradition hautement


islamique. Par conséquent, la plupart des impositions ont tiré leurs origines des
prescriptions coraniques. Il s’agit entre autres de la Zakat, de l’Achour, de la
Jeyza, le Meks, le Tertib etc…

Paragraphe 1 : La Zakat

La Zakat est tout simplement une imposition instituée par le saint coran. Il
s’agit du troisième pilier de l’islam encore appelé « aumône légale ». Il s’agit
d’un
versement à effectuer par tout musulman productif en témoignage de solidarité
avec sa communauté.

Paragraphe 2 : L’Achour

Les terres productives soumises à l’autorité de l’Etat étaient frappées d’un


prélèvement équivalent aux 10% des récoltes et des fruits. Ce prélèvement
effectué sous le nom de l’Achour était une forme de Zakat sur les revenus
agricoles.2

Paragraphe 3 : La Jeyza

La Jeyza est imposé aux non-musulmans qui la versent à la trésorerie du


Royaume en reconnaissance à la protection que leur assure le Sultan. En effet,
outre le fait que la Jezya est considérée comme un symbole de soumission au
régime musulman, elle est en réalité une substitution financière au service
militaire obligatoire pour les musulmans.3

P aragraphe 4 : Le Meks

Le Meks est une forme de taxe varié imposée sur le commerce intérieur.
Son instauration a été possible grâce à un avis favorable des oulémas.4

Paragraphe 5 : La Hédya

Au tout début de son instauration, il s’agissait d’une donation volontaire et


libérale faite aux divers souverains. Mais par la suite, la Hédya a été rendue
obligatoire. Sa valeur pécuniaire était prédéterminée et imposée aux tributs qui
étaient dans l’obligation de s’en acquitter.

2
Rapport du Conseil Economique et Social, « Le système fiscal marocain, développement économique et
cohésion sociale »
3
Ibid.

Laarbi Essakali, Henri Maurin Le mémorial du Maroc. Editions Nord Organisations, 1985.Tome 4 p.119.
4
Section 2 : Le système fiscal marocain pendant la période
du protectorat

Le protectorat est la période qui a véritablement donné le ton à une


modernisation manifeste et expresse de la fiscalité au Maroc. Cela s’est traduit
par l’instauration de diverses réformes tendant à harmoniser les impositions et
aussi à les rendre semblables au système fiscal du pays protecteur qu’est la
France. Ainsi, les impôts directs et indirects ont foncièrement été formalisés à
cette période.

Les impôts directs tels que les prélèvements effectués sur les revenus
salariaux, la taxe d’habitation à laquelle étaient soumises les personnes ayant en
leur nom des propriétés immobilières dans les milieux urbains ou dans les villes,
ont été institués entre autres.

Quant aux impôts indirects introduits par le protectorat, il s’agissait


notamment des droits de douane, les taxes intérieures sur les biens de
consommation, la taxe sur les transactions avec exonération du commerce de
détail. La fiscalité indirecte comprenait également d’autres taxes dont les droits
de marchés ruraux, les droits de régie, les droits des pauvres, les vérifications
des poids et mesures.5

Toutes ces impositions taxes et prélèvements à cette période de l’histoire


du Maroc avaient un seul objectif : Redynamiser l’économie et financer les
travaux relatifs à la construction des infrastructures de communication telles que
les routes bitumées, les voies ferrées, les infrastructures portuaires et
aéroportuaires etc…

L'évolution de la fiscalité marocaine depuis l'instauration du Protectorat : Livre 4 : Le sort de la fiscalité dans
5

L’évolution du Maroc moderne. Jacques Jouannet. Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1953
Section 3 : Le système fiscal marocain au lendemain
du protectorat

Adoptée sous Hassan II par référendum le 7 Décembre 1962, la première


Constitution marocaine consacre formellement le principe de la légalité de
l’impôt. Ainsi, à son article 53, elle dispose et prévoit que « Le Parlement vote
la loi de finances dans les conditions prévues par la loi organique »

La loi de finances est par définition celle qui autorise le pouvoir exécutif à
percevoir l'impôt et à engager des dépenses publiques pendant une période
déterminée, et peut contenir d'autres dispositions relatives aux finances
publiques.

Les lois de finances votées annuellement au Maroc après l’indépendance,


se caractérisent par la formalisation légale des diverses impositions. Des
réformes et aménagements fiscaux ont été progressivement introduits dans ces
lois de finances. Les impositions sur les consommations ont été remodelées avec
l’introduction d’un tarif douanier modernisé synonyme de l’abandon du taux
uniforme d’imposition au profit des taux distincts (Les biens d'équipements et
les matières premières étaient taxés à des taux assez faibles (moins de 10%), les
demi- produits entre 5 et 20%, les produits de consommation entre 15 et 35% et
les produits inutiles de 50% à 100%.)

L’impôt sur le revenu a été institué formellement par les diverses lois de
finances. Il était qualifié de Prélèvement sur les Traitements et Salaires (PTS) et
s’appliquait sur les revenus des personnes physiques travaillant soit dans la
fonction publique ou en entreprise privée. Le taux de cette imposition croissait
avec le revenu imposable et était compris entre 6% à 36%.

Autre nouveauté apportée dans le système fiscal du Maroc au lendemain


de l’indépendance est l’imposition selon les régions ou zones géographiques. Le
territoire marocain se divisait ainsi donc en quatre régions fiscalement
différentes. Ce sectionnement avait pour objectif de promouvoir un
développement harmonieux du territoire national.
L’imposition sur le revenu global des personnes physiques résidentes à
raison de leur revenu global et non résidentes pour leurs revenus de source
marocaine non passibles d’imposition ou exonérés à l'étranger a vu le jour en
1972.

Chapitre II : Les sources du droit fiscal marocain

L’obligation fiscale qui pèse sur chaque citoyen au Maroc tire sa source
de plusieurs corpus constitutionnels, légaux et réglementaires. Le présent
chapitre vise à en faire une exposition précise.

Section 1 : La constitution

De toute évidence, le bloc constitutionnel est la source suprême du droit


fiscal au Maroc. C’est elle qui contient et énonces les principes généraux relatifs
à l’organisation et au fonctionnement du monument fiscal marocain. C’est ainsi
que le principe de légalité de l’impôt a été solennellement consacré par l’article
39 de la nouvelle constitution marocaine en ces termes « Tous supportent, en
proportion de leurs facultés contributives, les charges publiques que seule la
loi, dans les formes prévues par la présente Constitution, peut créer et répartir
»6.

Section 2 : La loi

Elle est la principale source du droit fiscal. Elle est constituée de plusieurs
dispositions expliquant et détaillant les modalités d’impositions, de fixation des
assiettes fiscales, de liquidation ainsi que de recouvrement de l’impôt.

Votée chaque année, la loi de finances « prévoit, évalue, énonce et


autorise pour chaque année budgétaire l’ensemble des ressources et décharges
de l’Etat »,

6
Dahir n° 1-11-91 du 27 chaabane 1432 (29 juillet 2011) portant promulgation du texte de la Constitution
(BO n° 5964 bis du 30 juillet 2011).
selon les termes de l’article 3 de la loi organique n° 130-13 relative à la loi de
finances promulguée par le Dahir n°1-15-62 du 2 juin 2015. Elle peut être
exceptionnellement modifiée par la loi de finances rectificative.

Section 3 : Les règlements et circulaires

Il s’agit des sources qu’on peut qualifier de sources subsidiaires ou


accessoires du droit fiscal. Les données réglementaires ne donnent pas naissance
à proprement parler au droit fiscal cependant elles constituent dans une moindre
mesure, des bases de référence et de documentation à la portée du législateur.

Section 4 : La jurisprudence fiscale

Elle est l’ensemble des décisions rendues par les tribunaux et cours, ayant
un rapport avec un contentieux fiscal. Elle sert également de source d’inspiration
et d’innovation en matière de création des normes fiscales en matière législative
pour le législateur.

Section 5 : Les conventions et traités internationaux

Ce sont également des références en matière d’édification de l’arsenal


légal en matière fiscale. Il s’agit des conventions fiscales passées par les Maroc
avec d’autres Etats dans l’optique d’établir une meilleure coopération fiscale,
d’éviter les doubles impositions et s’offrir mutuellement une meilleure
assistance administrative en matière fiscale. A titre d’exemple, la signature à
Paris le 29 mai 1970 d’une convention entre l’Etat Français et le Maroc en vue
d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière
d’impôts sur le revenu et sur la fortune. Cette convention est entrée en vigueur le
1er décembre 1971 ou encore la Convention entre le Royaume des Emirats et
celui du Maroc signée le 09 Février 1999 et rentrée en vigueur le 02 Juillet 2000
tendant à éviter la double imposition et à prévenir l’évasion fiscale en matière
d’impôts sur le revenu et sur la fortune.
Partie II : La fraude fiscale et ses modes de répression au Maroc

Afin de traiter cette thématique dans un souci d’éviter toute forme


d’incompréhension ou d’amalgame liée à la terminologie des différentes notions
à évoquer, il convient d’établir un distinguo entre le concept de fraude fiscale et
les autres concepts qui lui sont similaires tels que l’évasion fiscale ou encore
l’optimisation fiscale.

Evasion fiscale, fraude fiscale, optimisation fiscale ou encore évitement


fiscal… autant de termes employés pour désigner une réalité sociale qui ronge
l’économie des pays ou ces pratiques sont effectuées. Pour autant, il est difficile
au citoyen lambda de cerner la véritable signification sinon la quintessence
même de ces notions. D’où la nécessité de remonter aux origines de ces
expression afin de les éclaircir et en élucider le sens.

La fraude fiscale est définie comme la soustraction illégale à la loi fiscale


de tout ou partie de la matière imposable qu’elle devrait frapper.7

L’optimisation fiscale consiste à utiliser des procédés pour réduire au


minimum les charges fiscales d’une entreprise ou d’un particulier en se servant
des dispositions avantageuses de la loi sans se mettre en infraction avec les lois
fiscales en vigueur dans le pays8.

L’évasion fiscale c’est le fait de soustraire une matière imposable


(Revenu, capital) à l’application de la loi fiscale en général, ou d’un tarif
d’impôt particulier, sans transgresser la lettre de la loi – ce qui correspondrait
à la fraude

Lexique des termes juridiques, 25e Ed, 2017-2018


7

https://www.pagny-associes.com/fiches-techniques/optimisation-fiscale
8
fiscale- en mettant systématiquement à profit toutes les possibilités de minorer
l’impôt, ouvertes soit par des règles soit par des lacunes.9

Chapitre I : Formes et manifestations de la fraude fiscale au Maroc

« La fraude est au cœur de l’histoire de la finance… Elle n’est pas une


erreur mais un des fondements du système » estime le banquier d’affaires Omar
Fassal. Il a toujours été de la nature profonde des Hommes de se soustraire à
l’obligation de s’acquitter de leurs redevances fiscales. En effet, le phénomène
ne date pas de l’ère actuelle. Il a toujours existé et, sans abus de langage, il
existera probablement jusqu’à la fin des temps. D’où la nécessite ou
l’importance de s’interroger sur les causes dudit phénomène. Dans le cas du
Maroc plus précisément, qu’est-ce qui pousse les citoyens à se soustraire à leur
devoir fiscal ?

Section 1 : Les causes de la fraude fiscale

Ces causes peuvent être classées en trois catégories. Elles sont


d’ordre économique, psychologiques et enfin juridiques.

P aragraphe 1 : Les causes économiques

La situation économique personnelle défaillante ou sous-faible peut être


considérée à raison comme une cause probante de la fraude fiscale. Autrement
dit, un contribuable à faible revenu ayant des charges nombreuses, diverses et
variées relatives à l’entretien de sa famille ou de son activité génératrice de
revenue sera beaucoup plus enclin à se soustraire à son obligation de s’acquitter
de sa dette à l’égard du fisc. D’où la nécessité de rendre beaucoup plus concret,
le critère de personnalisation de l’impôt ; c’est-à-dire fixer les taux
d’impositions en prenant en considération la faculté contributive de chaque
contribuable.

Lexique des termes juridiques, 25e Ed, 2017-2018


9
La pression fiscale de plus en plus croissante sur les particuliers et
PME/MPI constitue une raison suffisante qui pourrait pousser les contribuables
à s’éloigner de tout consentement à l’impôt. Cet avis est bien partagé par Arthur
Laffer, économiste libéral américain et chef de file de l’Ecole de l’offre quand il
affirme qu’ « une pression fiscale élevée alourdit les coûts de l’entreprise et par
conséquent décourage l’entreprise à se développer et l’oblige à frauder »10 A.
Laffer a théorisé son idée par sa courbe dite « Courbe de Laffer » qui montre
bien que les rentrées fiscales diminuent à mesure que les taux d’imposition
croissent et à contrario, ces rentrées augmentent à mesure que les taux
d’imposition sont réduits. Abondant dans la même optique, M. V. TANZI estime
que " plus les taux d’imposition sont élevés, plus forte est la tentation de s’y
soustraire. Et plus les taux d’imposition augmentent, plus l’honnêteté se paie
cher… "11.

A cela, il est possible d’ajouter également l’impact malfaisant de


l’économie informelle dans laquelle règne une opacité absolue aux yeux du fisc.
Cette caducité tenant aussi bien aux salaires et bénéfices qu’aux transactions qui
échappent au contrôle du fisc entraine avec elle un manque à gagner pour la
trésorerie publique.

P aragraphe 2 : Causes psychologiques

On peut également assimiler cette catégorie de causes aux causes morales.


Dans la conscience collective en général et du contribuable en particulier, il y a
une tendance à se tolérer le fait de frauder que le fait de soustraire
frauduleusement un bien appartenant à autrui. Ainsi donc, la « conscience fiscale
» serait beaucoup moins rigoureuse que la « conscience morale ». Plusieurs sont
ces contribuables qui n’ont pas l’impression de s’adonner à un acte malhonnête
et répréhensible de

EL ABDAIMI M., « Maroc : Pays émergent ? », BERIPIE, 2001, p. 8 et S


10

11
« Finances et développement », vol 20 n°4 décembre 1983, p. 10 et S
la même gravité en fraudant le fisc qu’en allant voler des marchandises sur des
étalages commerciaux ou en allant vider une banque de ses substances
monétaires. Comme le disait déjà un auteur Anglais du XIV ème siècle, « Le
fraudeur fiscal me plaît, c’est un voleur honnête, car il ne vole que l’Etat qui
n’est qu’une abstraction. » Avec la croissance de la crise de conscience entre
gouvernés et gouvernants causée par les multiples scandales de corruption et de
délinquance en col blanc dans les plus hautes sphères du pouvoir, plusieurs
contribuables viennent à se convaincre que le voleur, c’est l’État et que ceux que
l’on qualifie de « fraudeurs » ne sont que des victimes non consentantes.

Paragraphe 3 : Les causes techniques

En matière technique, la fraude est beaucoup plus due à la complexité et à


l’extrême technicité du système fiscal en lui-même.

Il est vrai qu’à partir des années 80, des tentatives manifestes de reformer
le système fiscal afin de le rendre beaucoup plus simple, performant, rentable et
équitable ont été entreprises. Néanmoins, il faut reconnaitre qu’il y subsiste
encore à ce jour des dispositions assez complexes pour le contribuable lambda12.

P aragraphe 4 : Les causes juridiques

Ces causes tiennent beaucoup plus au fait que le principe du consentement


à l’impôt n’a pas une assise véritable dans nombre de pays du tiers monde dont
le Maroc. A cet effet, sans langue de bois, il est possible d’affirmer que la
prétendue légitimité de l’impôt est plus ou moins illusoire en ce sens que le
contribuable est très souvent mis hors du processus de préparation de la loi
fiscale. C’est fort de ce constat que le Professeur Pr. BENSALAH martèle que :
" La fiscalité dans les pays du tiers monde est non consensuelle, elle fait
rarement « l’objet de débat

N. Akesbi les coups tordus d'une politique fiscale mal ficelée, Libération du 12/2/1996 p. 1 et 3.
12
populaire »", il poursuit que " c’est un choix pur et simple des
gouverneurs".13Pour preuve, le Parlement qui est par essence le lieu où devrait
s’exercer la démocratie représentative n’a pas assez de pouvoir et de prérogative
en matière de législation fiscale. C’est ainsi que l’article 77 de la constitution
dispose que

« Le gouvernement peut opposer, de manière motivée, l'irrecevabilité à


toute proposition ou amendement formulé par les membres du Parlement lorsque
leur adoption aurait pour conséquence, par rapport à la loi de finances, soit une
diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation des
charges publiques ». Autrement dit, le Parlement (indirectement les citoyens) a
les pieds et mains joints en matière de proposition fiscale.

Chapitre II : L’infraction de fraude fiscale en droit interne


marocain

Section 1 : Les éléments constitutifs

S’il est vrai que le code pénal marocain ne dispose d’aucune disposition
définissant et réprimant de manière expresse l’infraction de fraude fiscale, il
n’en demeure pas moins vrai que le Code Général des Impôts a consacré certains
articles qui constituent un arsenal de répression non négligeable en la matière.
Par conséquent, il s’agira d’exposer ici la teneur de l’élément légal ainsi que le
régime répressif institué par la législation marocaine pour lutter contre ladite
infraction.

Paragraphe 1 : L’élément légal de l’infraction de fraude fiscale

La fraude fiscale telle que conçue au Maroc est prévue et sanctionnée par
les articles 184 et suivants Code Général des Impôts.

Anas Bensalah ZEMRANI « la fiscalité face au développement économique et social du Maroc », LGDJ 1981,
13

p. 51.
Paragraphe 2 : L’élément matériel de l’infraction de
fraude fiscale

Dans la pratique, l’infraction de fraude fiscale peut être consommée soit


par commission (de façon active) ou par omission (de façon passive).

A- La fraude fiscale par action

C’est celle qui nécessite le concours actif et manifeste de son auteur pour
être constituée. Il s’agit ici des manœuvres tendant à dissimuler, sous-évaluer ou
encore sous-estimer la matière imposable. La dissimulation peut être aussi bien
juridique que matérielle.

Du point de vue juridique, la fraude fiscale par action peut être assimilée à
un abus de droit. Autrement dit, le contribuable réalise un acte ayant un
caractère fictif ou pris uniquement dans le but d'éluder ou d'atténuer l'impôt. En
pratique, il s’agit de toute manipulation opérée par une personne physique ou
morale, en détourant habillement les mécanismes juridiques tout en les
respectant, dans l’optique de réduire considérablement sa contribution au Trésor
Public. Selon les termes du Professeur Jean Martinez, La fraude par action est
juridique
« lorsqu’elle s’opère par un acte déguisé ou un acte fictif »14

Matériellement, Jean Claude Martinez, analyse la fraude fiscale par action


comme celle qui : « porte notamment sur les bénéfices. Elle est obtenue
directement par la minoration de recettes ou de stocks et indirectement par la
majoration des charges. »15

B- La fraude fiscale par omission

Elle nécessite une absence d’action quand il le fallait. Il peut s’agir d’un
refus du contribuable de faire ses déclarations dans les délais légalement
prescrits c’est-à-dire quand il le fallait. Elle se décline en deux variantes :
L’omission de

14
J-C MARTINEZ, « La fraude fiscale », Collection Que sais-je, 1900, p85
15
J-C MARTINEZ, « La fraude fiscale », Op. Cit, p85
déclaration ou l’omission d’un élément d’assiette. La fraude par omission de
déclaration est beaucoup plus courante et pratiquée en matière de Taxe sur
Valeur Ajoutée (TVA). Selon les estimations, elle représente près de 50% des
motifs de redressement fiscal16. Quant à l’omission de déclaration d’un élément
de l’assiette fiscale, par exemple, pour l’impôt sur le revenu, l’omission
supposerait que le contribuable déclare uniquement son revenu imposable en
omettant de déclarer le bénéfice imposable qui fait partie intégrante de l’assiette
de l’impôt.

De manière résumée et aux termes des dispositions de cet article, les


comportements constitutifs de fraude sont entre autres :

 Le retard de déclarations et des actes de convention

 Le défaut de déclaration ou l’insuffisance de déclaration

 La communication délibérée d’informations erronées

 L’omission ou la minoration de recettes ou d’opérations


taxables, toute déduction abusive, toute manœuvre tendant
à obtenir indûment le bénéfice d’exonération ou de
remboursement

 La dissimulation des contrats et conventions ostensibles par


des contrats ou conventions apparents

 La dissimulation soit dans le prix ou les charges d’une


vente d’immeuble, de fonds de commerce ou de clientèle,
dans les sommes ou indemnités perçues par le cédant d’un
droit au bail ou du bénéfice d’une promesse de bail portant
sur tout ou partie d’un immeuble, ou dans la soulte d’un
échange ou

https://www.village-justice.com/articles/fraude-fiscale-etude-comparative-droit-francais-marocain,27831.html,
16

consulté le 12 Mars 2020


d’un partage d’immeubles, ainsi que dans les diverses
évaluations faites dans les actes ou les déclarations etc…

Section 2 : Le Régime répressif de la fraude fiscale

Le Code Général des impôts recèle une série de sanctions multiformes


allant des sanctions pécuniaires aux sanctions privatives de liberté contre les
agissements infractionnels des personnes physiques et morales reconnues
coupables d’actes de fraude fiscale, de tentative de fraude fiscale ou encore de
complicité de fraude fiscale

Paragraphe 1 : Cas des personnes physiques

Les personnes physiques reconnues contrevenantes aux dispositions


fiscales ou qui ont tenté de se soustraire à tout ou partie de l’impôt s’exposent de
toute évidence à la rigueur de la loi. A cet effet, les articles 184 et suivants du
CGI ont énuméré les sanctions applicables de manière commune à l’impôt sur
les sociétés, à l’impôt sur le revenu, à la taxe sur la valeur ajoutée et aux droits
d’enregistrement. En cas de retard ou de défaut de déclaration dans le dépôt des
déclarations fiscales et des actes et conventions, l’administration fiscale peut
appliquer des majorations variantes entre 5% et 20% sur la valeur initiale de
l’impôt. De même, une astreinte journalière de cinq cent (500) dirhams, dans la
limite de cinquante mille (50.000) dirhams, est appliquée aux personnes qui ne
communiquent pas les informations demandées dans le délai et conditions
prévus par le CGI. Bref, le CGI a prévu des sanctions afférentes à plusieurs
situations de fait telles que la non conservation des documents pendant les délais
requis, la rectification de la base imposable etc… Pour finir toute personne ayant
porté assistance, ayant conseillé ou ayant participé aux manœuvres tendant à se
soustraire à tout ou partie de l’impôt peut se voir appliquer une amende dont le
taux équivaut à 100% de l’impôt éludé selon l’article 187. Autrement dit,
législateur ne passe pas sous silence la complicité de fraude fiscale. Il la réprime.
Abstraction faite de ces sanctions de nature fiscale ou pécuniaires, le
redevable n’ayant pas payé ses impôts peut également se voir infliger une peine
privative de liberté si la créance exigible est supérieure à 8000 Dirhams. Cette
sanction privative de liberté ou contrainte par corps peut aller jusqu’à 15 mois
selon l’article 79 de la loi 15-97 formant code de recouvrement des créances
publiques. En tout état de cause, la contrainte par corps ne peut être appliquée
sur les personnes de plus de 60 ans et de moins de 20 ans, les femmes enceintes
et celles qui allaitent. De même, l’incarcération n’éteint pas la dette.

Paragraphe 2 : Cas des Personnes morales

Le Code Général des Impôts a émis une spécification quant à la nature de


de l’activité de la société pouvant être sanctionnée pour défaut de paiement de
l’impôt. Les sanctions sont nombreuses et variées. Cependant, sans rentrer dans
les détails, il s’agira d’exposer certains aspects plus ou moins révélateurs et
pertinents de ces sanctions.

Ainsi, aux termes de l’article 199 et suivants du CGI, les sociétés à


prépondérance immobilières qui ne produisent pas, dans le délai prescrit, en
même temps que la déclaration de leur résultat fiscal, la liste nominative de
l’ensemble des détenteurs de leurs actions ou parts sociales à la clôture de
chaque exercice sont sanctionnées d’une amende de 10.000 Dirhams

Quant aux organismes de crédit, et autres organismes, lorsqu’ils n’ont pas


déposé ou ont déposé hors délai la déclaration, lorsqu’ils déposent une
déclaration incomplète ou comportant des éléments discordants, ils encourent
une majoration de 15% du montant de l’impôt correspondant aux intérêts des
dépôts, objet des infractions précitées, qui aurait été dû en l’absence
d’exonération17.

17
Article 203, CGI-Maroc, 2020
Après ce tour d’horizon des différentes dispositions répressives mis
en place par le législateur et marocain contre l’infraction de fraude fiscale des
personnes physiques et morales, il s’agira à présent dans une démarche
analytique de mesurer l’impact qu’a cette infraction sur l’économie du royaume
marocain.

Chapitre III : La fraude fiscale dans l’économie marocaine

Des statistiques très importantes relatives aux rentrées fiscales dans


l’économie du Maroc laissent voir que « les ressources de l’État d’origine fiscale
se chiffreraient en 2016 à 192 milliards de dirhams (en hausse de 2,7% sur
2015). Elles représentent 88,7% de l’ensemble des recettes de l’État. Ainsi, les
impôts directs (impôt sur le revenu et impôt sur les bénéfices des sociétés)
constituent le premier poste des recettes du Budget général (41,3%), suivis par
les impôts indirects, constitués principalement de la TVA (39,1%), les droits
d’enregistrement (8,3%), les produits des monopoles (4,0%), les droits de
douane (3,8%) et enfin les dons et legs (0,6%) » 18. Autrement dit, malgré
l’existence de la fraude, des défauts de déclaration ou des déclarations quelques
fois sous- évaluées, il est bien possible de voir à quel point les rentrées fiscales
rapportent à la trésorerie. Par conséquent, c’est bien une certitude que ces
rentrées seraient d’autant plus énormes si tous les contribuables assujettis au
devoir de payer leurs impôts faisaient beaucoup plus preuve d’un civisme fiscal
sans équivoque. Afin de mieux aborder la problématique relative à la
consistance des pertes dues aux fraudes fiscales multiformes, un rappel très
important nécessite d’être fait : la fraude par définition est une action de
dissimulation. Par conséquent, il est illusoire d’évaluer avec précision et
rectitude ce qui échappe au véritablement au trésor public.

https://lematin.ma/journal/2016/la-complexite-fiscale-premier-talon-d-achille/241269.html, consulté le 15 Mai


18

2020
Section 1 : Les pertes fiscales du Royaume marocain

L’existence même de la fraude fiscale dans une économie est un facteur


de déséquilibre immense de l’équité et surtout de l’égalité qui sont censé être des
principes fondamentaux attaché à la personnalité de chaque citoyen devant la
loi. Aussi faut-il ajouter que le fraude, par sa faculté à compromettre sévèrement
les rendements fiscaux des trésors publics, met l’Etat face à une situation de «
précarité institutionnelle » en ce sens qu’il lui devient plus ou moins difficile de
couvrir les charges publiques, de subventionner les projets entrepreneuriaux
d’intérêt national, de pourvoir à la construction des infrastructures socio-
collectifs (Ecoles et instituts de formation, centre de loisirs, etc…)

Dans sa parution en ligne Edition N° :5407 du Décembre 2018, le journal


L’économiste révèle des données importantes par rapport aux estimations
chiffrées de la fraude fiscale au Maroc. Ainsi, au regard des chiffres de la
Direction Générale des Impôts publiés par ledit journal, dans le commerce des
grossistes, l’évasion de l’Impôt sur le Revenu est estimée à 6 milliards de
Dirhams19. Les sociétés de promotion immobilière constituent également un
autre pan des contribuables fraudeurs. Sur une échelle de 170.000 promoteurs
immobiliers, 47.000 d’entre eux excellent par un défaut de déclaration fiscale.
D’après les vérifications, « Nous avons découvert 53 milliards de DH en fausses
factures auprès des 47.000 entreprises. Nous les avons trouvées dans les états
de déduction des autres entreprises qu’elles intègrent dans les charges. Rien
que pour la TVA, le manque à gagner s’élève à près de 8 milliards de DH, sans
parler de l’IS. » révèle le Directeur général des Impôts20

https://www.leconomiste.com/article/1037615-fraude-fiscale-l-incroyable-industrie-des-fausses-
19

facturesconsulté le 29 Mars 2020

Ibid.
20
Section 2 : Moyens de lutte contre la fraude fiscale au Maroc

Le Royaume du Maroc a prévu toute une armada de mesures pour lutter


contre la fraude fiscale. Le Code Général des Impôts en a fait notamment cas
dans plusieurs de ses articles. Inutile de rappeler ces dispositions car elles ont été
précédemment évoquées. Cependant, les moyens de lutte contre la fraude ne
sont pas que législatifs.

L’exécutif, de concert avec les partenaires sociaux a organisé le 3 et le 4


Mai 2019, les Assises de la fiscalité qui se sont tenues à Skhirat-Rabat autour du
thème « L’équité fiscale ». Cette conférence avait pour but de vulgariser les
fondamentaux du macrocosme fiscal marocain en vue de la préparation du projet
de loi-cadre relatif à la réforme fiscale du Maroc qui était censé entré en vigueur
avec la Loi des finances 2020 mais a connu un retard quant à sa matérialisation.
En tout état de cause, les Assises fiscales ont fait des recommandations
importantes en matière de lutte contre la fraude fiscale. Elles préconisent entre
autres, l'élargissement de l’assiette permettant une réduction de la pression
fiscale et la mise en place d’un impôt lié à la faculté contributive de chacun21.

Les modalités de contrôle et de l’audit fiscal ont été endurcies et élargies


afin d’anticiper la fraude. Pour les personnes morales telles que les entreprises,
sociétés ou groupement d’intérêt économique, l’audit fiscal permet de faire
ressortir une estimation chiffrée des risques fiscaux de l’entreprise sur la
période ouverte à contrôle d’une part et de mettre la lumière sur ses mauvaises
pratiques fiscales d’autre part. Il s’agit autrement dit d’un contrôle fiscal «
blanc » permettant à l’entreprise de connaitre son exposition en termes de
risques fiscaux et de mettre en place d’éventuelles actions correctives. 22 Ainsi
Le contrôle fiscal

https://www.leconomiste.com/article/1041281-3es-assises-nationales-sur-la-fiscalite-retablir-la-confiance-d-
21

abordconsulté le 27 Mars 2020

https://wecount.ma/fr/controle-fiscal-au-maroc-quels-sont-les-facteurs-susceptibles-de-declencher-une-
22

verification-comment-la-prevenir-ou-tout-du-moins-en-limiter-les-consequences-6consulté le 27 Mars 2020


a rapporté 17,7 milliards de DH à la DGI en 2018, en hausse de 46% par rapport
à 2017 selon les chiffres révélés par le Ministère de l’économie et des finances
et publiés23 par le Média24.com. Les contrôles et vérifications effectués pour
aboutir à ces chiffres sont entre autres, des contrôles sur pièce, sur place et du
recouvrement forcé.

Dans le même ordre d’idées, le projet de loi-cadre issu des Assises de la


Fiscalité propose également la mise en place d’un guichet de régularisation
fiscale qui permettra aux personnes exerçant dans activités fictives, informelles
ou non déclarées, de régulariser leur situation, moyennant des pénalités réduites
afin de lutter contre le défaut de déclaration qui est aussi une forme de fraude.

Section 3 : Regard critique sur les politiques de lutte contre la fraude


fiscale

Après l’exposition des différentes facettes de la politique mise en place


par les pouvoirs et décideurs publics afin d’endiguer le phénomène de fraude
fiscale qui gangrène l’économie des économies modernes, la présente section
vise à s’interroger sur l’efficacité avérée de ces politiques et aussi à faire des
propositions et suggestion supplémentaires en la matière.

A priori, les politiques établies pour juguler l’infraction de fraude fiscale


paraissent convenables et adaptées. Toutefois, la suggestion qui mérite d’être
faite est beaucoup plus orientée vers un durcissement de l’application de ces
mesures.

Premièrement, il faudrait beaucoup plus accentuer et vulgariser la


pédagogie sur l’impôt en intégrant des modules expliquant le bien-fondé de
l’impôt, son importance, ses buts et finalités. La presse doit être mise à
contribution pour que le message atteigne la quasi-totalité des citoyens. La
société civile ne doit pas être mise à la marge dans ce processus. Au contraire,
elle doit

https://www.medias24.com/controle-fiscal-les-recettes-de-la-dgi-ont-explose-en-2018-2019.html consulté le 27
23

Mars 2020
être associée à la « pédagogie fiscale » car elle peut faire office d’un meilleur
relais de cette pédagogie auprès des couches sociales productrices de richesses
les moins instruites. Les pouvoirs publics et les dirigeants des institutions
étatiques doivent donner le la c’est-à-dire faire preuve d’exemplarité.

Quant à l’administration fiscale, elle doit être encore plus « transparente


» sur ses résultats et notamment ceux relatifs au contrôle fiscal et à la lutte
contre la fraude 24

Les recommandations issues des Assises sur la fiscalité doivent impérativement


faire l’objet d’une mise en pratique progressive et graduelle.

Sur le plan législatif, il est fortement souhaitable que la Loi-Cadre relative


à la Programmation fiscale soit adoptée dans les plus brefs délais afin que la
politique fiscale soit mieux encadrée et nettement efficiente.

Dans une démarche de prévention et de vérification, il sied de renforcer


les mécanismes de contrôle dans les Entreprises par l’extension du pouvoir de
perquisition des contrôleurs ou inspecteurs fiscaux.

Une autre préconisation qui mériterait d’être faite est sans aucun doute
l’importance de simplifier le système et les procédés fiscaux. Ceci passerait
inévitablement par des réformes tendant à uniformiser progressivement les taux
d’imposition et aussi à réduire drastiquement les dépenses fiscales et les
privilèges fiscaux

L’Etat doit également s’investir de plus en plus dans une véritable


politique de normalisation des secteurs informels car c’est souvent le lieu de
toutes les formes magouilles relatives au défaut de déclaration ou de sous-
évaluation des assiettes. C’est souvent le terreau fertile des activités qui
échappent à toute régularisation institutionnelle ou étatique. Il s’agit notamment
des entreprises qui

Sivieude, O. (2018). Comment lutter efficacement contre la fraude fiscale aujourd’hui ? Gestion & Finances
24

Publiques, 3(3), 35-42. doi:10.3166/gfp.2018.00032.


ne font l’objet d’aucune immatriculation au Registre du Commerce et qui
s’adonnent ainsi en toute illégalité au Travail au Noir.

Les institutions publiques devraient de plus en plus travailler à


l’instauration d’un climat de confiance entre, d’une part, l’administration les
établissements publics et collectivités locales et d’autres parts les contribuables.

Les sanctions pénales ou fiscales qui pourraient résulter des procès ou


contrôles fiscaux doivent être lourdes afin de dissuader toute personne qui serait
tenté de frauder le fisc aussi.

Aussi faut-il ajouter que les moyens de contrôles et de vérification


beaucoup plus performants et ergonomiques (Logiciels et systèmes automatisés
de détection des fraude) doivent être mis à la disposition des agents de la
Direction Générale des Impôts ainsi que des Inspecteurs. Ceci permettra
notamment de rendre le contrôle plus ciblé et juste tout en réduisant les
contraintes du temps et de l’espace.
Conclusion
La problématique de la fraude fiscale surtout à l’ère de l’avancée
galopante des Nouvelles Techniques de l’Information et de la Communication
(NTIC) devient de plus en plus vaste et présente dans le débat public. La
présente étude n’a pas la prétention d’explorer tous les aspects de la notion
toutefois il fut question dans ce document d’en aborder les lignes directrices qui
pourraient guider la réflexion. S’il est vrai que le phénomène n’est pas l’apanage
de la modernité et qu’il a toujours existé dans les sociétés primitives et temps
anciens sous diverses formes, il est nécessaire de rappeler qu’il a pris une
ampleur sans précédent ces dernières décennies. Par conséquent, cette fraude
constitue une fuite énorme de capitaux et des manques à gagner pour la
Trésorerie des territoires où elle est effectuée. Dans le cas du Royaume du
Maroc, des efforts ont été consentis par les pouvoirs publics cependant ces
démarches sont manifestement insuffisantes et d’énormes échelons restent
encore à gravir afin que le phénomène de la fraude fiscale soit foncièrement
réduite afin d’amortir son impact sur la jeune économie du Maroc. Pour ce faire,
s’inspirer des efforts des autres pays en la matière, parait important. Trouver des
solutions innovantes et adaptées au contexte marocain est meilleur. Privilégier le
contrôle afin d’anticiper toute fraude ou début de de fraude semble efficace aussi
bien à court qu’à long terme. Pour finir, reformer en profondeur le système fiscal
du Maroc afin d’en accroitre le caractère juste et équitable permettrait beaucoup
de mettre un point à cette satanée peste des économies modernes d’une manière
générale et en particulier, celle du Maroc…
BIBLIOGRAPHIE

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Libération du 12/2/1996 p. 1 et 3.

 EL ABDAIMI Mohamed., « Maroc : Pays émergent ? », BERIPIE, 2001,


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 ESSAKALI Laarbi, MAURIN Henri, Le mémorial du Maroc, Editions


Nord Organisations, 1985.Tome 4
 JOUANNET Jacques, L’évolution de la fiscalité marocaine depuis
l'instauration du Protectorat : Livre 4 : Le sort de la fiscalité dans
l’évolution du Maroc moderne, Librairie générale de droit et de
jurisprudence, 1953
 Lexique des termes juridiques, 25e Ed, 2017-2018

 MARTINEZ Jean-Claude, « La fraude fiscale », Collection Que sais-je,


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 SIVIEUDE Olivier, Comment lutter efficacement contre la fraude fiscale


aujourd’hui ? Gestion & Finances Publiques, 2018 3(3), 35-42.
 WEBER Max, Le savant et le politique, trad. de l'all. par Catherine
Colliot- Thélène, Paris, La Découverte, 2003, « La politique comme
profession et vocation »
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économique et social du Maroc », LGDJ,1982
DOCUMENTATION LEGALE

 Dahir n° 1-11-91 du 27 chaabane 1432 (29 juillet 2011) portant


promulgation du texte de la Constitution (BO n° 5964 bis du 30 juillet
2011).

 Rapport du Conseil Economique et Social, « Le système fiscal marocain,


développement économique et cohésion sociale », Autosaisine No09/2012.

Webographie

https://www.pagny-associes.com/fiches-techniques/optimisation-fiscale
consulté le 09 Mai 2020

https://www.village-justice.com/articles/fraude-fiscale-etude-comparative-droit-
francais-marocain,27831.html, consulté le 12 Mai 2020

https://lematin.ma/journal/2016/la-complexite-fiscale-premier-talon-d-
achille/241269.html, consulté le 15 Mai 2020

https://www.leconomiste.com/article/1037615-fraude-fiscale-l-incroyable-
industrie-des-fausses-factures consulté le 19 Mars 2020

https://www.leconomiste.com/article/1041281-3es-assises-nationales-sur-la-
fiscalite-retablir-la-confiance-d-abord consulté le 27 Avril 2020

https://wecount.ma/fr/controle-fiscal-au-maroc-quels-sont-les-facteurs-
susceptibles-de-declencher-une-verification-comment-la-prevenir-ou-tout-du-
moins-en-limiter-les-consequences-6 consulté le 12 Avril 2020
https://www.medias24.com/controle-fiscal-les-recettes-de-la-dgi-ont-explose-en-
2018-2019.html consulté le 03 Mai 2020

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