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dans l’Antiquité II
Types de tombes et traitement du corps
des enfants dans l’antiquité gréco-romaine
Pour les ventes en Égypte : Centre d’Études Alexandrines, 50 rue Soliman Yousri, 21131 Alexandrie, Égypte
Pour les autres pays : De Boccard Édition-Diffusion, 11 rue de Médicis, 75006 Paris, France – www.deboccard.com
Études Alexandrines 26 – 2012
Directeur de la collection : Jean-Yves Empereur
L’Enfant et la mort
dans l’Antiquité II
Types de tombes et traitement du corps
des enfants dans l’antiquité gréco-romaine
Monde égyptien
Yann Tristant
Les enterrements d’enfants dans l’Égypte prédynastique et pharaonique 15
Christiane Ziegler
Sépultures d’enfants à Saqqara au premier millénaire av. J.-C. 61
Hélène Silhouette
Le secteur 6 de la nécropole du Pont de Gabbari, Alexandrie :
une zone réservée aux enfants ? 139
Frédérique Blaizot
Le loculus A1 de la salle B28.3, nécropole du Pont de Gabbari, Alexandrie :
une sépulture collective réservée aux très jeunes enfants 151
Marie-Dominique Nenna
La fouille du secteur el-Manara dans la nécropole de Hadra, Alexandrie, en 1940 :
l’apport des documents d’archives (carnet de fouilles des inspecteurs
du Musée gréco-romain d’Alexandrie et photographies de Loukas Benakis) 209
L’ENFANT ET LA MORT DANS L’ANTIQUITÉ II
Amira Sabah
Burials of the Khalil el-Khayat site, Kafr Abdou District, East Alexandria 253
Maria Kaczmarek
Anthropological studies on juvenile skeletal remains from the necropolis
at Marina el-Alamein, Egypt 293
Gillian E. Bowen
Child, infants and fœtal burials of the Late Roman period at Ismant el-Kharab,
ancient Kellis, Dakhleh Oasis 351
Michel Chauveau
« Mort à huit ans, enterré à neuf... » Âge et mort prématurée en Égypte romaine 373
Monde grec
Sherry Fox
The bioarchaeology of children in Graeco-Roman Greece 409
Monde occidental
Paola Catalano, Valentina Benassi, Anna Buccellato, Carla Caldarini, Roberto Egidi,
Romina Mosticone, Stefano Musco, Walter Pantano, Rita Paris et Lisa Pescucci
Funere mersit acerbo : Rome impériale et ses enfants à travers la recherche anthropologique 461
Manuel Moliner
Typologie des tombes d’enfant et traitement du corps à l’époque gréco-romaine
en Provence, France. Les exemples de Fréjus, Saint-Paul-Trois-Châteaux,
Aix-en-Provence et Marseille 471
Solenn de Larminat
Gestes et pratiques funéraires autour des inhumations en fosse d’enfants
en Afrique romaine à l’époque païenne 501
Paul Bailet
Tombes à incinérations d’enfants dans la nécropole romaine de Pupput :
quelques cas particuliers 539
Virginie Fromageot-Lanièpce
La base de données du groupe de recherche sur L’ Enfant et la mort dans l’Antiquité 551
Résumés 575
Liste des contributeurs 601
Abréviations 605
Index des sites 609
Jean-Yves Empereur, Marie-Dominique Nenna
Avant-propos
ans le cadre du programme L’ Enfant et la mort dans l’Antiquité (EMA), soutenu par
D l’Agence Nationale de la Recherche durant les années 2008-2012, trois tables rondes
ont été organisées par les partenaires du programme, le Centre Camille Jullian 1, l’unité
mixte de recherche ArScAn 2 et le Centre d’Études Alexandrines 3. Elles étaient destinées à dis-
cuter et approfondir les principales thématiques relatives aux sépultures d’immatures dans la
Méditerranée antique et à les confronter avec les autres sources disponibles concernant le statut
des enfants dans les civilisations classiques.
La deuxième table ronde a été organisée à Alexandrie par le Centre d’Études Alexandrines 11
du 12 au 14 novembre 2009. Elle était consacrée aux types de tombes et au traitement du corps
des enfants. L’ accent a été mis sur les découvertes récentes dans plusieurs régions d’Égypte
– Alexandrie, Marina el-Alamein sur la côte méditerranéenne, Saqqara, Tebtynis dans le Fayoum,
oasis du désert Libyque (Bahareya et Kharga) –, couvrant une période allant du viie s. av. J.-C. au
ixe s. ap. J.-C., avec, en ouverture, une synthèse sur les tombes d’enfants dans le monde pharao-
nique. Durant la préparation de l’édition des Actes, se sont ajoutées cinq nouvelles études. Trois
sont consacrées à Alexandrie. La première est une revisite, à la lumière de documents d’archives,
d’un des secteurs de la nécropole de Hadra à Alexandrie daté de la haute époque hellénistique
et de la place qu’y ont les enfants. La seconde offre l’étude d’un contexte très particulier de la
nécropole du Pont de Gabbari, le loculus d’un hypogée où ont été placés pas moins de 35 enfants.
La troisième livre les résultats préliminaires d’une fouille de sauvetage menée par le Conseil
Suprême des Antiquités de l’Égypte en 2011, qui montre les vestiges d’un cimetière de l’époque
romaine tardive, où les sépultures d’enfants en amphore tiennent une grande place, dans une
zone qui n’appartient plus strictement aux nécropoles de la cité d’Alexandrie, mais correspond
sans doute à une des agglomérations qui se situaient dans les faubourgs de la cité. La quatrième
est dédiée aux enfants de la Kellis de l’époque romaine tardive (oasis de Dakhla) et la cinquième
livre une série d’étiquettes de momies, issues de la nécropole en face d’Akhmim, située près de
l’ancienne Athribis de Haute-Égypte, qui offrent un aperçu sur les conceptions de l’âge et de la
mort prématurée en Égypte romaine.
Pour les autres régions concernées par ce programme, une conférence introductive fait le
point sur l’anthropologie biologique en Grèce, particulièrement développée par le Wiener Labo-
ratory de l’American School of Classical Studies d’Athènes et des synthèses sont fournies sur les
types de tombes d’enfant dans les colonies grecques d’Italie du Sud, à Rome, dans le Midi de la
France et en Afrique du Nord.
Enin, deux contributions portent sur la base de données qui a été créée à l’occasion de ce
programme. La première en expose les principes d’analyses et le développement de l’applica-
tion ; la seconde montre comment cette base apporte de nouveaux critères pour identiier les
tombes d’enfant. La base EMA est désormais en ligne sur le site http://www.mae.u-paris10.fr/ema et
offre à la rélexion d’un vaste public plus de 3800 sépultures d’enfants décrites et illustrées.
Ces journées, fruits d’étroites collaborations entre les archéologues et les anthropologues, se
sont déroulées au siège du Centre d’Études Alexandrines, ainsi qu’à l’Institut français d’Égypte à
Alexandrie. Nous tenons à remercier vivement le directeur de l’Institut français pour son accueil,
ainsi que le personnel du CEAlex pour l’organisation matérielle de ces journées.
Merci à Amira Sabah et Mervat Seif el-Din pour la traduction des résumés en arabe, à Colin
Clement pour la traduction des résumés en anglais et à Fatiha Bouzidi pour la mise en forme de
ce volume.
12
L’ Enfant et la mort dans l’Antiquité I. Nouvelles recherches dans les nécropoles grecques. Le signalement
des tombes d’enfants. Actes de la table ronde internationale organisée à Athènes, École française d’Athènes,
29-30 mai 2008, sous la direction d’Anne-Marie Guimier-Sorbets et d’Yvette Morizot, Travaux de
la Maison René Ginouvès 12, Paris, De Boccard, 2010.
L’ Enfant et la mort dans l’Antiquité II. Types de tombes et traitement du corps des enfants dans l’an-
tiquité gréco-romaine. Actes de la table ronde internationale organisée à Alexandrie, Centre d’Études
Alexandrines, 12-14 novembre 2009, édité par Marie-Dominique Nenna, Études Alexandrines 26,
Alexandrie, Centre d’Études Alexandrines, 2012.
L’ Enfant et la mort dans l’Antiquité III. Le matériel associé aux tombes d’enfants, Actes de la table ronde
internationale organisée à Aix-en-Provence, Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme, 20-22 jan-
vier 2011, sous la direction de Antoine Hermary et de Céline Dubois, Bibliothèque d’archéologie
méditerranénne et africaine 12, Paris, Errance, 2012.
Yann Tristant
es enfants font partie des motifs iconographiques courants dans les représentations des
L tombes égyptiennes et sur les objets du quotidien, mais sont pour autant presque tou-
jours absents de la documentation anthropologique. On ne sait pratiquement rien des
rites qui entourent la mort et l’enterrement des enfants dans l’Égypte pharaonique alors que
l’iconographie de la maternité et de la petite enfance est pléthorique. Cet article propose de faire 15
le point sur les enterrements d’enfants à l’époque pharaonique. Il ne constitue pas une étude
exhaustive de la question, mais un aperçu global des différents types d’enterrements connus.
Figure 1 : Fouille au pinceau d’une sépulture d’enfant dans le sable (S763, Nagada III). Adaïma, Nécropole de l’Est. Cliché
Gamma, P. Aventurier
16
Figure 2 : Fouille à l’aspirateur d’une inhumation d’enfant en jarre (S728, Nagada III). Adaïma, Nécropole de l’Est. Cliché
Gamma, P. Aventurier
LES ENTERREMENTS D’ENFANTS DANS L’ÉGYPTE PRÉDYNASTIQUE ET PHARAONIQUE
de milliers d’individus, voire seulement quelques milliers quand on ne garde que les cas les mieux
publiés. La crémation est pourtant inconnue en Égypte avant la période hellénistique, et même
si certains chercheurs ont évoqué des méthodes alternatives pour faire disparaître les corps, tels
que les crocodiles pendant les périodes troubles 4, le constat est lagrant, notre connaissance du
monde des morts en Égypte ancienne, pourtant si superbement illustré par tous les aspects des
arts funéraires, est marquée par une absence signiicative des corps.
Deux raisons principales peuvent expliquer ce phénomène. D’une part tous les cimetières
n’ont pas été découverts et encore moins préservés, les luctuations du Nil, le développement
des sites urbains sur les sites archéologiques plus anciens ayant gommé toute trace de ces nécro-
poles. Il faut évoquer d’autre part le peu d’intérêt accordé par les chercheurs aux squelettes et
autres dépouilles humaines. Les momies ont fasciné l’imaginaire européen depuis les premières
explorations de l’Égypte, mais la véritable anthropologie de terrain n’a fait son entrée que très
tardivement dans la vallée du Nil. La majeure partie des squelettes et momies n’a pas été étudiée
et encore moins conservée, et des méthodes très approximatives ont fait dire aux chercheurs
que tel ou tel individu était de sexe féminin seulement à cause de la présence de bijoux dans une
tombe 5. On doit à H. Duday et ses élèves les premières véritables méthodes d’anthropologie de
terrain 6 (ig. 1 et 2). Si ces gestes font désormais partie intégrante de toute fouille archéologique
en contexte funéraire, il reste incontestable que, pour la plupart, les restes humains mentionnés
dans les rapports de fouille et les publications consacrés à l’Égypte ne peuvent être pleinement
utilisés. Les cimetières égyptiens ne sont donc pas représentatifs de la démographie réelle de la
population égyptienne. Les données publiées ne mentionnent ainsi que très peu de tombes d’en- 17
fants ou d’adolescents et, a priori, une proportion anormale de femmes par rapport aux hommes.
On connaît donc quelques dizaines de milliers d’individus, mais combien d’enfants ?
Un autre paradoxe est celui que pose la présence des enfants dans l’Égypte ancienne : ils sont
partout et nulle part à la fois. Très peu d’ouvrages leur sont consacrés, et tout aussi peu de livres
ne leur laissent ne serait-ce qu’un chapitre 7. D’autres vont même jusqu’à nier la place de l’enfant
dans la société égyptienne et laissent planer l’idée qu’ils n’ont pas bénéicié des mêmes soins
que les adultes 8. L’ enfance est pourtant le moment de tous les apprentissages, un temps d’ac-
quisition, celui des systèmes de croyances, de la personnalité, des attitudes et valeurs sociales 9.
On ne peut pas oblitérer le rôle économique des petits qui partagent avec leurs parents la garde
des troupeaux, les corvées d’eau ou de ramassage du bois de combustion, et occupaient dans les
sociétés anciennes une place à part entière. La compréhension de la place de l’enfant au sein des
sociétés anciennes nous apporte de nombreux renseignements sur la culture elle-même et sur
l’analyse de problèmes plus vastes. On ne peut qu’insister ici sur le manque d’études à leur sujet
et l’absence manifeste de reconstructions détaillées de l’enfance à partir des données biologiques
et culturelles disponibles. Le but de cette présentation n’est pas de dresser l’inventaire complet
des sépultures d’enfants 10, mais de proposer un bref aperçu des différents types d’enterrements
à l’époque pharaonique, et de rejeter par là même l’idée que les enfants n’ont pas bénéicié du
même soin que leurs parents dans la préparation de leur dernière demeure.
10. Voir pour cela la thèse de doctorat réalisée par Ronika Power à la Macquarie University de Sydney (POWer 2012).
11. Voir par exemple Philippe Ariès (1960) pour la France de l’Ancien Régime ; Danièle Alexandre-Bidon et Didier Lett (1997) pour
le Moyen Âge ; Jean-Pierre Néraudeau (1984) pour la Rome antique ; Gérard Coulon (1994) pour la Gaule romaine ; et plus
récemment Bernard Dedet (2008) pour la France méridionale durant la protohistoire.
12. Bárta 2000, p. 195 ; DeDet 2008, p. 6.
13. Le cycle le plus complet représentant l’enfant concerne la naissance divine du roi (cf. Hatchepsout et Aménophis III) ou le
dieu Horus (reliefs des temples romains et ptolémaïques). Voir strOuHaL 1992, p. 24.
14. rOBins 1994-1995, p. 26 ; strOuHaL 1992, p. 22.
15. Voir par exemple le papyrus gynécologique de Lahun, Moyen Empire (GriFFitH 1898).
16. Sur la mort des enfants dans l’Égypte ptolémaïque et romaine voir aussi DunanD 2004.
LES ENTERREMENTS D’ENFANTS DANS L’ÉGYPTE PRÉDYNASTIQUE ET PHARAONIQUE
type archaïque 17 ou « pré-jennérien » 18, dans lequel les facteurs endogènes qui menacent la survie
des sujets à leur naissance ou dans la première semaine de leur vie (mortinatalité et mortalité
néo-natale précoce), puis les facteurs exogènes (maladies épidémiques, affections de l’appareil
respiratoire ou digestif, etc.) sont nombreux.
Les informations concernant les femmes et la protection des dieux à leurs égards durant la
grossesse ou l’accouchement sont bien connues 19. On sait également que lorsque le bébé survivait
à sa naissance, infections et maladies nombreuses réduisaient rapidement son espérance de vie 20,
comme nous le rappelle par exemple l’une des maximes de La sagesse d’Ani 21. Les musées regorgent
aujourd’hui d’amulettes et de petits objets à caractère prophylactique placés autour du cou des
bébés (œil d’Horus, dieu Bès, textes magiques, etc.), de leur vivant sans doute, et qui les accompa-
gnaient dans la tombe 22. Aucun objet ou représentation ne nous donne d’indication véritablement
précise sur le taux de mortalité, mais on peut estimer qu’il était similaire à celui des sociétés pré-
modernes. On peut donc évaluer que 20 % des nouveau-nés mouraient durant la première année de
leur vie et que 30 % d’entre eux ne survivaient pas aux cinq premières années 23, ou plus simplement
que seul un individu sur deux pouvait atteindre l’âge de la procréation 24. Rappelons également que,
si seulement 9 enfants sur 1000 décèdent avant l’âge de cinq ans aujourd’hui en Europe de l’Ouest,
ils étaient près de 100 pour 1000 à mourir en Angleterre au début du Moyen Âge 25. D. Patch a ainsi
calculé pour la période du Nouvel Empire (v. 1550-1069 av.) et de la Troisième Période Intermé-
diaire (v. 1069-664 av.) que 50 % des 276 tombes de Gourob, 48 % des 233 tombes de Matmar et
42 % des 31 tombes de Mostagedda abritaient des enfants 26. Une mortalité aussi forte laisse effec-
tivement présager une surreprésentation des enfants en contexte funéraire, ce qui, comme on le 19
verra plus loin, n’est pas toujours le cas au vu des données aujourd’hui disponibles.
Cette situation pourrait laisser penser que la représentation de l’enfant mort ou des funérailles
est un thème ordinaire dans l’art égyptien. Il est pourtant très peu courant dans l’iconographie
pharaonique, qu’il s’agisse des enfants, mais aussi des adultes. Il n’existe en fait que de très rares
attestations d’enfants représentés morts, parmi lesquelles on peut citer une stèle funéraire en
calcaire de la XVIIIe dynastie (v. 1550-1295 av.), au nom de Merysekhmet, conservée au British
Museum, qui représente un enfant sur les genoux de sa mère, accompagné d’un court texte dédié à
la mémoire du petit 27 (ig. 3). Mais la plus fameuse scène du genre, sans aucun autre parallèle connu,
Figure 4 : Akhénaton et Nefertiti pleurent au-dessus de la dépouille de leur ille. Tell el-Amarna, tombe royale, chambre
gamma, mur B (d’après GaBOLDe 1998, pl. VI)
peuvent reléter. Le fait sépulcral reste le rite de passage le plus accessible aux archéologues, et
fournit des renseignements incomparables sur les rites funéraires et le statut social des individus 30. 21
Aussi, alors que l’aspect funéraire constitue sans conteste le volet le mieux connu et le plus
développé de l’archéologie égyptienne, il souffre de défauts à tout jamais irréparables. L’ égypto-
logie, née dans le courant du xixe siècle après la redécouverte de l’antiquité classique européenne,
a d’abord été une activité qui se rapprochait plus de la « chasse aux trésors » que de la discipline
scientiique que l’on connaît aujourd’hui. Financés par les musées pour ramener ces objets qui
forment aujourd’hui les grandes collections européennes et américaines, les premiers égyptolo-
gues, jusqu’au début du xxe siècle et parfois même bien plus tard, se souciaient peu d’enregistrer
le contexte exact des découvertes ou de décrire avec précision la position du mobilier funéraire et
ses liens avec le squelette. La diagnose sexuelle, par exemple, était plus souvent liée à la présence
de parure ou de bijoux trop rapidement attribués à la gent féminine qu’à des critères anthro-
pologiques. Les squelettes d’enfants étaient souvent confondus avec des ossements d’animaux
et n’ont été ni fouillés ni répertoriés. B. Dedet rappelle à juste titre pour la France méridionale
qu’avant les années 1960-1970, fouiller une sépulture signiiait récupérer des objets et seulement
mentionner si le sujet avait fait l’objet d’une inhumation ou d’une incinération 31. Ce n’est que
dans le dernier quart du xxe siècle que s’est faite entendre la nécessité de fournir des descriptions
plus détaillées et seulement depuis moins de vingt ans que la fouille stratigraphique et l’étude
anthropologique sont devenues des standards pour l’archéologie des tombes égyptiennes 32.
Un autre problème, plus spéciique cette fois aux enterrements d’enfants, est lié à l’identiication
de leurs tombes. En l’absence de données anthropologiques, les premiers archéologues ont suivi des
critères pour le moins empiriques dans la reconnaissance des tombes d’enfants. Elles ont trop sou-
vent été considérées comme « plus simples et moins riches » que celles des adultes, et n’ont de fait pas
bénéicié du même intérêt. La restitution approximative de la taille des fosses, sans attention parti-
culière portée aux restes osseux, a servi d’argument pour attribuer à tort des structures funéraires à
des enfants, ou inversement à des adultes. L’ absence d’ossements dans une fosse a tout aussi bien pu
faire ofice d’argument pour prouver la présence de tombes d’enfants, suivant en cela l’idée que, plus
petits et plus fragiles, leurs squelettes se conservent moins bien. Le mobilier funéraire, enin, a pu
entraîner des méprises dans l’identiication des individus, trop d’objets ayant été interprétés comme
des jouets ou des modèles miniatures pour enfants en considérant uniquement leurs dimensions.
On observe ainsi des divergences spectaculaires sur l’ensemble des données. E. Strouhal rap-
pelle qu’à Abydos pour les deux premières dynasties seule une tombe sur sept est celle d’un enfant,
alors que dans le Ouadi Qitna, en Nubie, pour les iiie et ve siècles on trouve 43 % d’enfants sur l’en-
semble du cimetière 33. Les nécropoles publiées incluent le plus souvent un nombre d’inhumations
d’enfants presque dérisoire au regard de la mortalité infantile très forte dans l’Égypte ancienne 34,
alors qu’un nombre trop élevé d’enfants au sein des cimetières semble faire igure d’anomalie
et conduit les archéologues à attribuer des caractères particuliers aux ensembles funéraires. À
22 el-Omari (v. 4700-4300 av.), par exemple, les archéologues insistent sur la sous-représentation
des enfants dans le cimetière néolithique, et généralisent à d’autres cimetières, en expliquant
l’absence de tombes d’enfants par la décomposition rapide et la mauvaise conservation des petits
squelettes, mais aussi par l’idée que les enfants pourraient être enterrés ailleurs 35. À Mirgissa, les
fouilleurs ont parlé de cimetière spéciique réservé aux enfants parce que la moitié des individus
inhumés avaient moins de 2 ans au moment du décès 36.
S’il est incontestable que les os d’enfants ne se conservent pas aussi bien que ceux des adultes,
et qu’ils ont généralement été enterrés moins profondément que ceux des adultes ou dans des sec-
teurs différents du cimetière, il n’en reste pas moins que le nombre d’enterrements d’enfants sur les
sites est plus faible que ce qu’une mortalité naturelle pourrait laisser attendre. Au inal, il apparaît
que sur l’ensemble des tombes d’enfants publiées une inime minorité peut être réellement utili-
sable. Il s’agit là d’une situation bien dommageable au regard de leur importance pour appréhender
l’évaluation du « recrutement » d’un lieu funéraire, la composition de la population par classes d’âge 37
32. Voir à ce sujet l’importance de l’anthropologie de terrain pour l’étude des sépultures, qui met au premier plan le mort lui-
même et non plus le matériel qui l’entoure (DuDay 1978 ; DuDay, seLLier 1990 ; Janin 1992).
33. strOuHaL 1992.
34. À condition que l’inhumation soit le mode de sépulture principal et que les enfants n’aient pas fait l’objet d’un traitement
particulier en dehors des nécropoles. On verra plus loin que ces deux propositions trouvent peu d’éléments contradicteurs.
35. DeBOnO, MOrtensen 1990.
36. verCOutter 1975.
37. Et si possible selon le genre, mais la diagnose sexuelle reste encore une question encore non résolue. Voir à ce sujet MaJO
1996 ; COQueuGniOt, GiaCOBini, MaLerBa 2002.
LES ENTERREMENTS D’ENFANTS DANS L’ÉGYPTE PRÉDYNASTIQUE ET PHARAONIQUE
Figure 5 : Sépulture d’enfant, Taramsa Hill, Paléolithique Figure 6 : Enfant inhumé dans une fosse de stockage réutili-
Moyen (d’après verMeersCH et al. 1998, p. 477, ig. 2) sée en tombe sur un secteur abandonné de l’habitat (B55).
El-Omari, Néolithique (d’après DeBOnO, MOrtensen 1990)
ou encore le classement des défunts en fonction des pratiques funéraires. L’ archéologie funéraire
constitue à ce titre, comme on va le voir, un apport bien plus important que les sources textuelles et
iconographiques pour la connaissance des enfants et leur place dans la société égyptienne.
23
Enterrements en pleine terre
La plus ancienne sépulture connue en Égypte, et sur le contient africain au nord de l’Équa-
teur, est celle d’un grand enfant inhumé en pleine terre. Découverte en 1994 par P. Vermeersch 38
et son équipe à Taramsa Hill, près de Qena en Haute-Égypte, à 2,5 km au sud-est du temple de
Dendara, la sépulture était installée dans un site d’extraction de silex. Le matériel dispersé sur
la localité la rattache au Paléolithique Moyen comme le prouve une datation absolue par OSL
située entre 49800 et 80400 BP, avec un âge moyen autour de 55000 BP. Le squelette était très
mal conservé et très fragile. Il a été déposé en position assise dans une fosse d’environ 1 m de
profondeur, sur une couche de 10 cm de débris d’extraction (ig. 5). Pour les inventeurs du site,
il s’agit indubitablement d’une sépulture et non d’une mort accidentelle. Le squelette est celui
d’un enfant anatomiquement moderne (Homo sapiens sapiens), aux caractères archaïques, de 8 à 10
ans considérant la dentition bien conservée. Des outils en silex et des déchets de taille ont été
découverts dans la tombe, mais rien ne permet de les associer à du mobilier funéraire 39.
Après un hiatus de plusieurs dizaines de milliers d’années, lié sans doute plus qu’à autre chose
à des problèmes de taphonomie causés principalement par les déplacements et l’alluvionnement
du Nil, les sites de Mérimdé Beni-Salâmé 40, sur les franges désertiques du Delta occidental, et
d’el-Omari 41, au sud du Caire, sont les plus anciens cimetières connus dans la partie égyptienne
de la vallée du Nil, respectivement entre 5000-3800 av. et 4700-4300 av. Parmi les quarante-
trois sépultures fouillées à el-Omari, douze étaient celles d’enfants. Ils étaient inhumés dans des
fosses de stockage abandonnées de la zone d’habitat (ig. 6), en position contractée sur le côté
gauche, la tête au sud et le visage vers l’ouest pour la plupart, protégés par une natte, à la manière
des adultes enterrés à proximité. Un seul vase servait de mobilier funéraire pour chacun des
individus, mais on note également la présence de cornes d’ibex dans l’une des tombes d’enfant 42.
L’ inhumation en pleine terre reste pratiquée tout au long de la période prédynastique. La plus
grande des tombes découvertes sur le cimetière d’Armant 43 est par exemple celle d’un enfant
(tombe 1461). Datée de Nagada IC (v. 3800 av.), cette tombe mesure cinq fois la taille de la plus pe-
tite tombe de la même période (tombe 1459), celle d’une femme, et est beaucoup plus grande que la
plus grande tombe d’adulte masculin (tombe 1424). Elle contient également plus de mobilier que les
sépultures d’adultes 44. Adaïma, au sud d’Esna, est un site prédynastique sur lequel B. Midant-Reynes
et son équipe ont mis au jour un village et deux cimetières associés 45. La spéciicité de cette loca-
lité est de couvrir l’ensemble de la phase prédynastique et de fournir des données à la fois d’ordre
domestique et funéraire dont le croi-
sement apporte des résultats totale-
ment inédits pour l’étude des sociétés
égyptiennes du ive millénaire. La né-
cropole de l’Est, datée Nagada IIIA-
24 D (v. 3350-2700), comprend près de
600 tombes, intactes pour la plupart,
avec la particularité d’abriter presque
exclusivement des enfants, sauf pour
la partie la plus récente du cimetière
(Nagada IIIC2-D). C’est la plus vaste
et la plus ancienne nécropole d’en-
fants connue à ce jour en Égypte. Les
conditions de préservation optimales
facilitent les études biologiques et
anthropologiques (ig. 7). Il faut noter
également que ce cimetière intact,
complet et entièrement fouillé apporte des indications exceptionnelles sur la démographie et l’éco-
logie humaine d’une population prédynastique. Les études démographiques menées sur le cime-
tière ont d’ores et déjà montré que la mortalité des enfants correspond à une population naturelle
et, d’un point de vue épidémiologique, que la nécropole est sans doute liée à une phase épidémique
de tuberculose bien mise en évidence 46. Une grande partie des enfants est inhumée dans de simples
fosses peu profondes creusées dans le sable ou l’argile rouge d’un ancien ouadi. Ils reposent en géné-
ral sur le côté gauche, tête au sud et regard vers l’est 47. Le matériel funéraire qui les accompagne
comprend généralement des récipients en terre cuite ou en pierre, des objets de parure et des objets
cosmétiques (palettes, peignes, épingles, etc.) (ig. 8 et 9). Les tombes d’Adaïma rappellent en cela
les sépultures d’enfants connues sur d’autres nécropoles prédynastiques, où l’on n’observe pas tou-
tefois la même séparation entre enfants et adultes. Sur le cimetière HK43 de Hiérakonpolis, par
exemple, les enfants sont enterrés parmi les adultes. La sépulture 165, pour n’en citer qu’une seule,
était celle d’un enfant de 6 ans enterré avec une palette rhomboïdale en grauwacke, un collier de
perles en cornaline, en feldspath blanc et vert translucide, et une pendeloque en pierre verte 48.
46. CruBézy et al. 1998 ; CruBézy, DuCHesne, staniaszek 2003 ; CruBézy et al. 2006 ; CruBézy, DuCHesne, MiDant-reynes 2008 ; DaBernat, CruBézy
en préparation.
47. CruBézy, DuCHesne, MiDant-reynes 2008 ; DuCHesne, staniaszek, CruBézy en préparation.
48. FrieDMan 2002, p. 9.
YANN TRISTANT
26
Figure 10 : Sépulture d’enfant dans une jarre (S721, Nagada III). Le nouveau-né a été inséré par le col de la jarre, ensuite
fermée par une pierre (encore en place). Un autre enfant a été postérieurement déposé à proximité de la sépulture, les
pieds au-dessus du col de la céramique, dans le sable, sans protection particulière ou mobilier (S738, Nagada III). Adaïma,
Nécropole de l’Est. Cliché L. Staniaszek
Enterrements en jarres
et en pots
Figure 13 : Inhumation d’un enfant dans une jarre (S759, Nagada III). Le col de la jarre était fermé par une coupelle (a). L’enfant
porte un bracelet au poignet droit (b). Deux autres bracelets étaient déposés à l’intérieur de la jarre sous le corps. Adaïma,
Nécropole de l’Est. Cliché L. Staniaszek
29
Figure 14 : Enterrement d’un enfant en jarre (S541, Nagada III). Un petit pot placé à l’extérieur du contenant sous le
col constitue le seul mobilier de la tombe (a). Une partie de la panse a été découpée pour y déposer un jeune enfant
(b). Adaïma, Nécropole de l’Est. Cliché L. Staniaszek
YANN TRISTANT
Figure 15 : Colliers découverts dans des tombes d’enfants. Le plus grand (a) est constitué de 1561 perles de terre cuite, grises
et bleues, montées en 15 rangs torsadés (S552, Nagada IIIA2). D’autres colliers sont composés de perles géométriques,
zoomorphes et végétales, ou encore d’éléments iguratifs tels que le pendentif dit en « bucrâne » (ivoire, associé à des
perles en fritte et en calcaire, S683, Nagada IID) ou en forme de faucon (cornaline, associé à des perles en fritte, cornaline,
serpentinite (?), diorite (?) et calcaire, S636, Nagada IIIA2). Adaïma, Nécropole de l’Est. IFAO, cliché A. Lecler
dans des fosses peu profondes au sud de la ville. Les récipients étaient fermés par un bouchon en
terre crue ou une vaisselle 66 (ig. 18). À Boubastis, toujours au Nouvel Empire, cinq enfants étaient
enterrés dans des jarres parmi les adultes inhumés dans des sarcophages. Les petits portaient des
colliers composés de perles en faïence de différentes couleurs et d’amulettes représentant un œil
oudjat ou des divinités telles que Thot, Bes et Bastet 67. Le cimetière de Deir el-Medina a, quant lui,
livré des inhumations d’enfants en jarres, en paniers ou dans des coffres végétaux déposés dans des
fosses peu profondes 68. On peut aussi citer le petit cimetière d’enfants, enterrés dans des jarres,
Figure 19 : Sépulture d’enfant dans un coffre en terre crue (S934, Nagada IIID). Le coffre était fermé par une couverture en
terre crue (a). Un modèle de bateau en ivoire et un petit pot globulaire en terre cuite étaient placés devant le visage du
défunt (b). Adaïma, Nécropole de l’Est. Cliché L. Staniaszek
32
mis au jour au sud de la ville de Gourob, ou bien encore la nécropole de Saft el-Henneh, dans le
delta du Nil, qui compte de nombreuses sépultures d’enfants en jarres de la in de la xviiie dynas-
tie jusqu’à l’époque romaine 69.
La plupart des auteurs s’accordent sur le fait que les pots et jarres servant de réceptacles pour
les sépultures ont d’abord été utilisés sur l’habitat pour le stockage ou la cuisson 70. Traces d’uti-
lisations répétées, cassures, réparations ou sucs de cuisson témoignent de leur fonction pre-
mière en contexte domestique, détournée pour une réutilisation comme contenant funéraire.
À Adaïma, ils représentent les modèles de céramiques de cuisson les plus courants à l’époque et
portent tous des traces d’utilisation primaire comme pots à cuire (dépôts carbonés internes et
externes) 71. Ce réemploi d’un récipient souvent grossier, utilisé et cassé est sans doute la prin-
cipale raison pour laquelle on considère trop couramment les inhumations en pots comme des
sépultures « pauvres » 72 auxquelles on associe également une quantité et une qualité de mobilier
moindres. Il s’agit là encore d’un postulat qui mériterait une argumentation plus fournie pour
inhumations d’enfants en coffre de papyrus (tombes 53/H7 et 54/H6 78) et de bois (tombe 597/H5 79,
636/H4 80). Ce mode d’inhumation est connu pour l’époque protodynastique sur les sites d’Abou
Rawach 81, de Maadi 82, de Tarkhan 83 et d’Elkab 84. Sur le site d’Adaïma, une trentaine de cas de cer-
cueils en terre sont répertoriés sur le cimetière de l’Est. Dans le cas de la sépulture S934 (ig. 19), par
exemple, rattachée à la IIe dynastie (Nagada IIID), un enfant de 3 à 4 ans était inhumé en position
contractée sur le côté droit, la tête au sud-est, dans un petit coffre de terre crue (L. 50 cm ; l. 33 cm ;
H. 40 cm). L’épaisseur très ine des parois, 2 à 3 cm seulement, tend à suggérer que le coffre a été
construit sur place et non pas transporté. Le sable aggloméré à la terre à l’extérieur du coffre, alors
75. Voir aussi l’étude exhaustive de C. Spieser (2008) entièrement consacrée aux cercueils d’enfants dans l’Égypte ancienne
et tardive.
76. Des coffres en vannerie ou en tiges de roseaux découverts sur des cimetières badariens pourraient indiquer une attestation
plus ancienne remontant au Ve millénaire (BruntOn 1937, p. 27, 37, 48). Mais l’état des publications ne permet pas de savoir
s’il s’agit d’éléments structurels de la tombe ou de véritables cercueils (HenDriCkX 1998, p. 127).
77. Voir HenDriCkX 1998, p. 127.
78. Greiss 1955, p. 231.
79. saaD 1951, p. 34.
80. saaD 1951 ; 1969.
81. kLasens 1957, p. 54 ; 1958, p. 22 ; 1960, p. 71.
82. BruntOn 1939, p. 421.
83. Petrie, WainWriGHt, GarDiner 1913.
84. HenDriCkX, HuyGe, WarMenBOL 2002, p. 48-50.
LES ENTERREMENTS D’ENFANTS DANS L’ÉGYPTE PRÉDYNASTIQUE ET PHARAONIQUE
Figure 23 : Fœtus momiiés et leurs sarcophages, XVIIIe dynastie, tombe de Toutankhamon, Vallée des Rois, Thèbes (d’après
Leek 1972, pl. XXIII, XXIV)
36
au jour durant ces dernières années 96, la sépulture no 4 est celle d’un enfant de 3 ans enterré sur le
dos, la tête au nord, dans un coffre rectangulaire en bois, déposé dans une fosse peu profonde creu-
sée dans le sable. Des éclats et un racloir en silex ainsi que des tessons de poterie étaient présents
dans le remplissage de la tombe. La sépulture no 12 abritait le corps d’un jeune enfant de 11 à 14 mois
inhumé, lui aussi, dans un cercueil en bois rectangulaire, la tête au sud-ouest, accompagné de brace-
lets composés de perles en faïence, cornaline et coquillages et de cinq amulettes oudjat, ainsi que de
trois lames et d’un racloir en silex 97.
Ce tableau rapide et incomplet des inhumations en coffres entre le Prédynastique et le Moyen
Empire montre que les inhumations en paniers, cercueils en tiges végétales, en bois et même en
pierre sont utilisées pour les enfants comme pour les adultes, avec ou sans mobilier associé. Rien
ne permet de distinguer des modes d’inhumations spéciiques pour les adultes et les enfants,
mais on remarque plutôt une tendance générale à utiliser les mêmes pratiques funéraires pour
toutes les classes d’âges, les enfants les plus jeunes étant peut-être plus souvent associés à des
inhumations d’adultes. Durant les fouilles qu’il a menées sur le cimetière de Téti, à Saqqara,
N. Kanawati mentionne la découverte des restes de 106 individus. Parmi eux, l’égyptologue a
reconnu 30 hommes, 33 femmes, 30 adultes de sexe indéterminé car trop partiellement conser-
vés, et 13 enfants, mal préservés eux aussi. Seuls 13,9 % de ces individus avaient plus de 46 ans, ce
qui est un âge moyen normal pour l’Antiquité. Les femmes étaient fréquemment accompagnées
37
Figure 24 : Cercueil anthropoïde de Ta-irit- Figure 25 : Cercueil en bois de Sipaari, XVIIIe dynastie, Cachette de Deir el-
sekheru, XIXe dynastie, musée national Bahari (d’après eLiOt-sMitH 1912, pl. XIX)
d’Écosse, Edimbourg, inv. 1887.597 (d’après
tayLOr 1989, ig. 24)
des restes d’un enfant ou d’un fœtus, enterré à côté d’elle ou parfois dans le même cercueil. Les
corps n’étaient pas momiiés, mais placés enroulés dans des bandages de lin, déposés directe-
ment dans le sable, dans des nattes de roseaux, ou bien encore dans des cercueils en bois, souvent
de forme anthropoïde. L’ une des tombes les mieux dotées est celle d’une femme inhumée avec
un périnatal dans un même cercueil rectangulaire. Elle était accompagnée d’un nécessaire de toi-
lette, de igurines de fécondité, déposées dans deux paniers, et de 25 amulettes posées à côté des
paniers 98. Cette sépulture n’est pas sans rappeler la découverte dans la tombe de Toutankhamon
des dépouilles momiiées de deux fœtus de sexe féminin, l’un de 5 mois, l’autre de 7 mois, pro-
bablement les enfants du jeune roi et de son épouse Ankhesenamon 99. Ils n’étaient pas dans le
sarcophage royal, mais à proximité de celui-ci, à l’intérieur d’un coffret en bois (L. 61 cm), dans
38
Figure 26 : Inhumation d’un enfant dans un coffre en bois à côté du sarcophage anthropoïde d’une femme, XVIIe dynastie,
Gourna (d’après Petrie 1909, pl. XXIII)
deux sarcophages anthropoïdes miniatures (L. 49,5 cm et 57,7 cm), placés l’un à côté de l’autre,
tête-bêche (ig. 23). La surface extérieure des sarcophages était peinte avec de la résine, relevée
de bandeaux d’inscriptions qui se réfèrent simplement à Osiris sans nom spéciique. Les fœtus
momiiés étaient conservés dans un autre cercueil, emboîté dans le précédent, entièrement cou-
vert de feuilles d’or. Les corps avaient subi les mêmes processus d’éviscération que les adultes
(crânes et corps emplis de linges imbibés de natron, soigneusement emmaillotés) 100.
À partir du Nouvel Empire, quand les cercueils des adultes ne sont plus de simples coffres
rectangulaires, mais adoptent des formes anthropoïdes qui montrent une image divinisée du
défunt, associé au dieu Osiris, on remarque que les mêmes types de sarcophages sont utilisés
pour les adultes et les enfants, avec une taille réduite adaptée aux petits corps. C’est le cas de la
101. Ce cercueil, qui provient peut-être de Deir el-Medina, est conservé au musée royal d’Édimbourg (1887.597). Voir tayLOr 1989,
p. 38, ig. 29 ; sPieser 2008, p. 514.
102. eLLiOt-sMitH 1912, p. 22-23, pl. XIX.
103. Voir à ce sujet sPieser 2008, p. 527-528.
104. Petrie 1909, p. 6-10, pl. XXIII-XXVI.
105. CHassinat 1909, p. 57-58, no6019a-b (JE 29728).
106. JanOt 2002, p. 73-75.
107. JanOt 2002, p. 76-78.
108. JanOt 2002, p. 78-79.
YANN TRISTANT
Figure 27 : Vases utilisés comme contenants pour l’inhumation des enfants, Cimetière de l’Est, Deir el-Medina, Nouvel
Empire (d’après Bruyère 1937b, ig. 2)
aussi modeste qu’il soit, a livré la sépulture de trois grands enfants. Le premier, un enfant de 7 à 8
ans enveloppé dans des bandes de lin 109, était inhumé dans un cercueil rectangulaire en bois stuqué
(L. 130 cm), sans décor. Le deuxième corps était celui d’un enfant de 4 ans, enroulé dans un linceul et
inhumé sur le dos dans un cercueil grossier, sans mobilier. Le contenant funéraire a été taillé avec une
herminette dans un tronc d’arbre (L. 90 cm ; l. 20 à 25 cm) scié dans la longueur, évidé ain de séparer
la cuve du couvercle. Le cercueil était badigeonné de lait de chaux et orné d’un visage grossièrement
40 taillé sur le couvercle 110. Le troisième cercueil (L. 114 cm ; l. 27 cm ; H. 30 cm), de type anthropoïde
comme les deux autres, est constitué de planches en bois assemblées par des chevilles, plâtrées, puis
enduites de lait de chaux. Le couvercle était orné d’une ébauche de visage rapporté et ixé au moyen
de chevilles. Le cercueil abritait le corps d’un enfant de 6 ans environ enveloppé dans un linceul. Une
paire de sandales en cuir était placée sur le couvercle, aux niveaux des pieds ; un panier à l’intérieur du
cercueil contenait un bracelet de perles rondes de couleur bleue 111.
Les rapports de fouille disponibles s’accordent sur le fait que les nécropoles de l’Égypte pha-
raonique comportent des tombes d’enfants à toutes les périodes. Toutefois deux grands cimetières
plus spéciiquement réservés aux enfants se détachent, celui d’Adaïma pour la période prédynas-
tique, et celui de Deir el-Medina pour le Nouvel Empire, plus exactement la première moitié de
la XVIIIe dynastie, avant le règne d’Akhenaton. Le versant oriental de Gournet Mareï, et princi-
palement sa partie inférieure qui domine l’extrémité sud du village, abritait le cimetière d’enfants
fouillé par B. Bruyère au tournant du xxe siècle. Il y a enregistré une centaine de sépultures d’en-
fants 112 inhumés dans différents types de réceptacles, à l’intérieur de fosses peu profondes (0,4 à
0,9 m) creusées dans le rocher et fermées par des pierres 113, qu’il a regroupées en cinq types 114 :
109. Les cheveux nattés de l’individu ont laissé le fouilleur penser qu’il s’agit de la dépouille d’une ille. Cet argument ne peut
être validé sans l’étude anthropologique du corps.
110. Bruyère 1937b, p. 163 ; JanOt 2003, p. 174-176.
111. Bruyère 1937b, p. 163 ; JanOt 2003, p. 173-177.
112. Toutes les classes d’âge étaient représentées, depuis les fœtus jusqu’aux grands enfants.
113. Bruyère 1937b, p. 11.
114. Bruyère 1937b, p. 11-14.
LES ENTERREMENTS D’ENFANTS DANS L’ÉGYPTE PRÉDYNASTIQUE ET PHARAONIQUE
Figure 28 : Corbeilles utilisées comme contenants pour l’inhumation des enfants, Cimetière de l’Est, Deir el-Medina, Nouvel 41
Empire (d’après Bruyère 1937b, ig. 3)
1) Enterrements en jarres : des vases en terre cuite, grossiers pour la plupart, parfois décorés,
tous usagés, étaient utilisés pour enterrer les très jeunes enfants, généralement des fœtus et des
nouveau-nés (ig. 27). Aucun ne porte une inscription qui renseigne sur l’identité du défunt ou
son devenir post-mortem. Bruyère note que certains vases ne contenaient que des linges ensan-
glantés et des éléments tels que la poche amniotique ou le placenta. Un silex taillé, identiié par le
fouilleur comme l’instrument qui a servi pendant l’accouchement, était presque toujours déposé
sur les chiffons 115.
2) Enterrements en faisceaux ou bourriches de jonc : paniers très rudimentaires fabriqués
à l’aide de tiges de jonc ou de papyrus liées entre elles par des cordes en ibre de palmier ou de
papyrus, dans lesquels un linge de rebut enveloppe les petits enfants. Les défunts étaient géné-
ralement enveloppés dans une pièce d’étoffe grossière, linge de rebut ou chiffon hors d’usage,
déposés sur le dos, les bras pendants, les mains devant le bas-ventre, sans parure, mais avec des
offrandes alimentaires à l’extérieur des paniers (pains, raisins, noix de palmier Doum, graines,
etc.) ainsi que des jarres ovoïdes 116.
jaune ou en rose pour bien marquer leur nouvelle utilisation en contexte funéraire 121. Bruyère 43
mentionne un coffre peint en jaune à bordures noires avec le nom de l’enfant, Ariki, inscrit en
hiéroglyphes 122 (ig. 30).
5) Enterrements en cercueils : seuls de rares enfants du cimetière de l’Est de Gournet Mourraï
étaient enterrés dans des caveaux. Les cercueils en bois, de facture modeste, étaient déposés dans
une pièce souterraine accessible par un puits bouché après les funérailles. Le mobilier comprend
comme pour les adultes des meubles (tabourets), des vases et jattes en terre cuite, des paniers
contenant des offrandes alimentaires (pains, noix de palmier Doum, pains et simulacres de vases
à bière) 123. La tombe 1386, par exemple, est un puits de 1,25 m de côté pour 1 m de profondeur
au fond duquel repose le cercueil anthropoïde d’un enfant. Le cercueil, inscrit et orné de per-
sonnages peints en jaune sur fond noir, était prévu pour un individu encore plus jeune, et a été
coupé aux pieds pour installer la petite momie (ig. 31). L’ enfant ne portait aucun bijou et n’était
accompagné d’aucun mobilier particulier. Il reposait sur deux momies d’adultes 124. La tombe de
Sennéfer, aux dimensions modestes, contenait les cercueils de l’artisan et de sa femme Nefertiti
placés côte à côte. Un petit cercueil rectangulaire en bois anépigraphe disposé à leur tête abritait
la dépouille d’un enfant, enroulé dans un suaire, sans parure (ig. 32). Le mobilier funéraire associé
aux trois occupants de la tombe comprenait un coffre, une chaise, des cannes et de la vaisselle en
Figure 33 : Dessin de B. Bruyère montrant la disposition des sarcophages dans la tombe, du mobilier et des bouquets de
leurs, tombe 1159, Deir el-Medina, Nouvel Empire (d’après Bruyère 1929, ig. 28)
44
terre cuite. Des bouquets de leurs déposés lors des funérailles étaient encore présents dans la
tombe malgré le pillage partiel du caveau (ig. 33) 125.
Pour les époques postérieures au Nouvel Empire 126, la documentation fournit un nombre encore
plus grand d’enterrements en cercueils pour les enfants, en raison notamment d’un corpus de maté-
riel plus fourni et mieux conservé qu’aux phases plus anciennes de la période pharaonique, mais
surtout d’une transformation des pratiques funéraires qui privilégient désormais les enterrements
collectifs, faisant du cercueil, sur lequel se concentrent les textes religieux, un élément presque plus
important que la tombe elle-même. Les sarcophages en cartonnages peints se généralisent, aussi
bien pour les adultes que pour les enfants. Dans la continuité de ce qui a été décrit précédemment,
les rituels attachés aux enfants reproduisent les gestes funéraires appliqués aux adultes sans véri-
table différence et avec tout autant de soins portés aux enfants qu’à leurs parents.
Figure 34 : Inhumation d’un enfant en pleine terre sur le Figure 35 : Inhumation d’un nouveau-né dans un pot sur le
secteur d’habitat de Maadi, Prédynastique (d’après rizkana, secteur d’habitat de Maadi, Prédynastique (d’après rizkana,
seeHer 1990, pl. III) seeHer 1990, pl. XXVII)
45
des enfants dans le corpus funéraire de l’Égypte ancienne, on a déjà évoqué les problèmes liés
à la reconnaissance des squelettes les plus petits, leur préservation et le peu d’intérêt qu’ils ont
suscité pour les pionniers de l’archéologie égyptienne. Un autre élément souvent cité concerne
l’inhumation des enfants en dehors des nécropoles, ce qui tendrait à justiier leur absence dans le
cimetière attenant. Ce phénomène existe bel et bien, mais ne peut à lui seul expliquer les lacunes
observées dans les données disponibles 127.
Pour la période prédynastique, des inhumations d’enfants en contexte d’habitat, mais aussi
de quelques individus adultes, sont connues sur deux sites seulement 128, Maadi et Adaïma. Sur
le premier site, Maadi, ce ne sont pas moins de 55 nouveau-nés et enfants qui ont été enterrés
dans l’habitat 129, alors que le reste de la population a été inhumé à une centaine de mètres plus au
sud (76 tombes parmi lesquelles 18 enfants) et dans le Ouadi Digla voisin (471 parmi lesquelles 9
enfants) 130. Aucun soin spéciique n’a été porté à ces enterrements, sinon le dépôt de récipients
en céramique et de meules pour mobilier funéraire (ig. 34 et 35). Sur la zone d’habitat d’Adaïma,
partiellement explorée, six sépultures d’enfants sont connues, toutes en pleine terre. Sur le sec-
teur 1001, trois nouveau-nés de 6 à 9 mois et un quatrième de 9 mois à un an ont été déposés
127. Il convient toutefois de rappeler ici les problèmes liés à l’archéologie des sites d’habitat en Égypte qui n’ont encore jamais
bénéicié de l’attention nécessaire. Voir à ce sujet keMP 1977 ; Bietak 1979 ; tristant 2004.
128. tristant 2004, p. 122-124.
129. rizkana, seeHer 1989, p. 65-66.
130. rizkana, seeHer 1990, p. 15-16.
YANN TRISTANT
Figure 36 : Sépulture d’enfant en contexte d’habitat, Nagada IIA, Adaïma, Secteur 9000. Cliché B. Midant-Reynes
46
individuellement dans des fosses peu profondes, en position contractée sur le côté gauche, la
tête au nord, le visage vers le nord-est. Le plus âgé d’entre eux était accompagné d’une petite
coupe posée sur un coquillage bivalve ; l’un des trois autres avait pour équipement funéraire un
pot black-topped de petite dimension et un collier de perles en cornaline 131. Ils sont rattachés par
leur mobilier à la phase Nagada IIB/IIC. Les deux autres enterrements, découverts sur les sec-
teurs 9000, sont contemporains. La sépulture U2.13B est celle d’un jeune enfant de 12 à 18 mois
inhumé en fosse, sur le côté gauche, la tête au sud, recouvert d’une natte. Il était accompagné de
deux vases black-topped, d’un vase en pierre derrière lequel se trouvait un peigne en ivoire (ig. 36
et 37). Un autre enfant (18 mois) était inhumé à moins de deux mètres de celui-ci. La sépulture
était malheureusement trop perturbée pour en tirer plus de renseignements 132.
Pour l’Ancien Empire, trois inhumations d’enfants en contexte d’habitat sont connues à
Kôm el-Hisn dans un niveau du début de la période 133, sept dans la ville de l’Ancien Empire/
début de la Première Période Intermédiaire à Balat. Dans le palais des gouverneurs d’Ayn Asil,
les corps de nourrissons et de très jeunes enfants sont inhumés en pleine terre et à l’intérieur
d’une jarre pour un seul des cas, dans des secteurs de l’espace domestique vierges ou abandonnés,
Figure 37 : Mobilier de la sépulture d’enfant du secteur 9000 à Adaïma : deux vases black-topped, un vase en pierre noire
(basalte ?), quatre bracelets en os et un peigne en ivoire. IFAO, cliché A. Lecler 47
mais toujours à proximité des zones habitées. Deux perles en cornaline près du poignet gauche
d’un nourrisson constituent le seul équipement funéraire identiié 134. À Abydos, les fouilles du
Cimetière Nord, principal lieu d’ensevelissement sur le site pour le Moyen Empire à partir de
la XIXe dynastie, ont révélé les sépultures de 6 enfants parmi lesquelles deux sont attribuées à
la XIIe dynastie. Sur l’habitat voisin contemporain, trois enfants sont enterrés sur un secteur
désaffecté de l’espace domestique, certains d’entre eux dans des jarres 135. La même pratique se
rencontre dans la ville de Kahun, toujours au Moyen Empire, où Petrie a trouvé des enfants
enterrés dans des coffres en bois sous le sol des maisons 136. Ne voulant pas considérer que les
Égyptiens pouvaient avoir des pratiques aussi « barbares », l’archéologue britannique a tenu
ces tombes comme celles d’une population étrangère habitant dans la ville. Mais des fouilles
récentes dans la ville ont conirmé que des bébés et des jeunes enfants étaient bien enterrés
dans l’habitat. Ces sépultures se présentent comme des inhumations en pleine terre ou dans
des pots dans l’angle de pièces apparemment abandonnées 137. On connaît le même phénomène
à Éléphantine pour la XIIe dynastie 138, à Tell el-Dab’a pour la Deuxième Période Intermédiaire
et Deir el-Medina pendant le Nouvel Empire 139. Il faut toutefois rappeler que sur le site Hyksôs
de Tell el-Dab’a, les inhumations syro-palestiniennes se distinguent de la tradition égyptienne
par des caractères bien spéciiques (position semi contractée des corps, inhumations d’ânes,
céramique et armement en bronze) et par le fait qu’elles se trouvent à la fois dans le cimetière
et dans l’habitat, près ou sous les maisons. Des inhumations d’enfants en jarres sont attestées
en contexte domestique ; d’autres étaient enterrés dans le cimetière à l’intérieur de tombes
construites en briques crues, parfois voûtées 140.
Aucune source écrite ne vient expliquer la présence d’enterrements d’enfants en secteur d’ha-
bitat dans l’Égypte ancienne. Mais il s’agit de toute évidence d’une pratique spéciale parce qu’il
est inhabituel d’enterrer des adultes en dehors de la nécropole même si des cas sont connus 141.
Cela peut arriver quand le village s’est étendu sur un ancien cimetière 142 ou dans des secteurs
abandonnés de l’habitat 143. À Tell el-Dab’a, en revanche, les niveaux palestiniens du Bronze
Moyen II offrent un contraste intéressant : les sépultures sont communes en contexte domes-
tique et incluent tous les âges jusqu’aux périnataux 144. B. Dedet rappelle que, dans les sociétés
pré-jennériennes, la mort du nouveau-né n’affecte que très peu les activités de la communauté
villageoise ou la cellule familiale, et que les nouveau-nés ne font l’objet ni de deuil ni de cérémo-
nie particulière. Il rappelle que l’inhumation des plus jeunes hors des lieux funéraires réservés
aux autres morts est une réalité bien connue dans les sociétés antiques 145 et traditionnelles, le
nouveau-né ou le jeune enfant n’ayant pas encore le statut d’un individu à part entière 146. Devant
48 le nombre très restreint des enterrements d’enfants sur le cimetière d’Abydos au Moyen Empire,
J. Richards propose de voir une pratique d’inhumation en contexte d’habitat liée à des impéra-
tifs économiques, certaines populations ayant choisi de ne pas dépenser en enterrant leurs plus
jeunes enfants dans le cimetière. L’ infanticide entre dans le même genre d’idée, permettant au
groupe de limiter le nombre d’individus à charge. Mais aucune preuve de cet usage n’est attes-
tée en Égypte ni par l’archéologie ni par les textes. En fait, si les inhumations hors du cimetière
peuvent effectivement suggérer des traitements différents pour les enfants de ceux appliqués
aux adultes 147, les raisons sont sans doute moins liées à une logique rentable qu’à un statut parti-
culier de l’enfant au sein de la société, et notamment à des conceptions sur la pleine personnalité
et sur l’âge auquel on l’atteint dans l’Égypte ancienne. Les explications concernant la présence
des enfants en contexte d’habitat se heurtent malheureusement à la proportion trop réduite des
habitations égyptiennes correctement fouillées et à la question fondamentale du statut de l’en-
fant et de son intégration au monde des adultes.
Conclusion
Malgré les sources archéologiques pour le moins déicientes, héritage de fouilles déjà bien
anciennes, et très loin des standards actuels de la recherche, les données disponibles peuvent
offrir un début de réponse aux questions principales touchant aux enterrements d’enfants dans
l’Égypte ancienne : Qu’est-ce qui caractérise les tombes d’enfants dans l’Égypte ancienne ?
Qu’est-ce qui les différencie des tombes d’adultes ? Quelle est la place des enfants dans la société ?
Le tableau qui vient d’être dressé montre déjà que des tombes d’enfants existent bel et bien,
dans les cimetières comme sur les habitats, et que le traitement funéraire accordé aux petits
était au moins égal à celui des adultes 148. Elles n’ont toutefois jamais encore reçu de la part des
chercheurs la même attention que celles des adultes. Pourtant, les enfants ont bénéicié de soins
particuliers dans la mort et non pas du désintérêt que certains auteurs leur ont trop souvent
prêté. Parfois même l’investissement en matière funéraire est beaucoup plus important pour les
enfants que pour les adultes 149. Tous les types d’enterrements sont représentés au il des époques
et suivent l’évolution générale des pratiques funéraires : ensevelissements en pleine terre, sans
cercueil, avec ou sans traitement d’embaumement ; ensevelissements dans des objets de réem- 49
ploi, tels que des vases en céramique, de l’époque prédynastique à l’époque copte, des paniers ou
des coffres domestiques ; développement et généralisation des enterrements dans un contenant
(pot, panier, cercueil) suivant en cela les modes d’inhumation des adultes.
Les tombes d’enfants montrent les signes de la piété et de l’affection de leurs parents, qui
n’ont économisé aucun effort pour protéger et conserver la dépouille des petits. Le mobilier
comprend principalement des récipients en terre cuite et des éléments de parure. Les travaux
menés à Adaïma ont montré tout l’intérêt de différencier les colliers et bracelets portés par les
petits dans la tombe de ceux qui ont été déposés sur le corps du défunt, souvent trop grands par
rapport à la taille des corps 150.
Les inhumations en contexte d’habitat ou la spéciicité des cimetières d’Adaïma et de Deir
el-Medina, réservés aux enfants, soulignent enin la place des enfants dans la société égyptienne.
Il ressort du panorama proposé que les enfants ne sont peut-être pas considérés comme des indi-
vidus à part entière ou du moins ont un statut social très spéciique, comme tendrait à le prouver
l’inhumation des plus jeunes en dehors de la zone funéraire commune. On pourrait reprendre
ici les différentes étapes sociales de l’enfance telles que les a décrites B. Dedet pour les sociétés
protohistoriques du Sud de la France 151. Les textes égyptiens, pourtant pléthoriques, ne disent
rien à ce sujet 152, et seules des données de terrains peuvent répondre à ce type d’interrogation.
L’ exploitation en cours des données disponibles, notamment sur un site comme celui d’Adaïma,
laisse espérer que des études futures pourront aider à mieux cerner la place des enfants au sein de
la société de l’Égypte ancienne.
151. Les nouveau-nés peuvent être considérés comme des êtres inquiétants, situés entre deux mondes, et qui de fait n’appar-
tiennent pas encore à la société des vivants ; le stade du nourrisson (moins d’un an) correspond à un début d’existence
sociale ; celui de jeune enfant, jusqu’à 6 ans, à celui d’une première éducation, donnée par les femmes ; et celui de grand
enfant, jusqu’à l’adolescence, à une seconde éducation, spéciique selon le sexe (DeDet 2008, p. 329).
152. On peut toutefois citer une lettre écrite par une femme de Deir el-Medina qui essaie de prendre contact avec ses deux
enfants morts (PinCH 1994).
Bibliographie
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ancient Egyptian society », Journal of Social Archaeo-
AdAms 1998 logy 2,1, 2002, p. 5-36.
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and First Intermediate Periode », in C.J. EyrE (éd.), B. BAkEr, « Contributions of biological anthropo-
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Egyptologists, OLA 82, Leuven, 1998, p. 19-30. Nubian societies », in J. lustig (éd.), Anthropology
and Egyptology : A Developing Dialogue, Monogra-
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Régime, Paris, 1960. logy, 54,3, 2001, p. 42-49.
BAcvArov 2008
K. BAcvArov, « A long way to the West : Earliest
jar burials in Southeast Europe and the Near
LES ENTERREMENTS D’ENFANTS DANS L’ÉGYPTE PRÉDYNASTIQUE ET PHARAONIQUE
Pollock 1999
S. Pollock, Ancient Mesopotamia : The Eden That
Never Was, Cambridge, 1999.
YANN TRISTANT
59
RéSUMéS
Frédéric aDam, Institut national de recherches Éric Boës, Institut national de recherches archéo-
archéologiques préventives et UMR 7044, Archéo- logiques préventives et UMR 7044, Archéologie et
logie et histoire ancienne : Méditerranée-Europe histoire ancienne : Méditerranée-Europe (ARCHI-
(ARCHIMEDE), Strasbourg MEDE), Strasbourg
Gersende alIX, Collaborateur du Centre d’Études Gillian E. Bowen, Monash University, Melbourne,
Alexandrines, USR 3134 du CNRS, Alexandrie Australia
601
Sylvie BaIBourDIan, UMR 6578 (Anthropologie Anna BuCCellato, Soprintendenza Speciale per i
bioculturelle), Université de la Méditerranée - Beni Archeologici di Roma
CNRS – EFS, Faculté de Médecine Nord, Marseille
Carla CalDarInI, Collaboratore esterno della
Paul BaIlet, Service Archéologie et Patrimoine Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici
– Communauté d’Agglomération Dracénoise, Dra- di Roma
guignan
Paola Catalano, Soprintendenza Speciale per i
Valentina BenassI, Collaboratore esterno della Beni Archeologici di Roma
Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici
di Roma Michel ChauVeau, EPHE, Sciences historiques
et philologiques, Paris
Frédérique BlaIZot, Institut national de re-
cherches archéologiques préventives et UMR 5199 Frédéric ColIn, Université de Strasbourg et UMR
PACEA du CNRS, Laboratoire d’anthropologie 7044, Archéologie et histoire ancienne : Méditer-
des populations passées et présentes, Université ranée-Europe (ARCHIMEDE), Strasbourg
Bordeaux 1
Wiktor Andrzej DasZewsKI , Professor emeritus,
University of Warsaw
L’ENFANT ET LA MORT DANS L’ANTIQUITé II
Françoise DunanD, Professeur émérite à l’univer- Maria KaCZmareK, Polish Centre of Mediterra-
sité de Strasbourg et UMR 7044, Archéologie et nean Archaeology, Warsaw University ; Institute
histoire ancienne : Méditerranée-Europe (ARCHI- of Anthropology, Faculty of Biology, Adam Mick-
MEDE), Strasbourg iewicz University, Poznań
Roberto egIDI, Soprintendenza Speciale per i Solenn De larmInat, Chercheur associé, Aix-Mar-
Beni Archeologici di Roma seille Université, CNRS, CCJ UMR 7299, 13094,
Aix-en-Provence, France
Diego elIa, Dipartimento di Studi Storici, Uni-
versità di Torino Roger lIChtenBerg, Docteur en médecine,
radiologue et ancien chef du service de radiologie
Jean-Yves empereur, Centre d’Études Alexan- de l’Institut Arthur Vernes de Paris
drines, CNRS, USR 3134, Alexandrie
Manuel molIner, Service archéologique munici-
Sherry C. foX, Wiener Laboratory, American pal (Atelier du Patrimoine, Ville de Marseille)
School of Classical Studies at Athens
Valeria meIrano, Dipartimento di Studi Storici,
Virginie fromageot-lanIèpCe, UMR Archéo- Università di Torino
logies et Sciences de l’Antiquité, Umr 7041,
CNRS, Université de Paris I, Université de Paris Romina mostICone, Collaboratore esterno della
602 Ouest Nanterre, Ministère de la Culture Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici
di Roma
Claudio gallaZZI, Università degli Studi di Milano
Stefano musCo, Soprintendenza Speciale per i
Patrice georges, Institut national de recherches Beni Archeologici di Roma
archéologiques préventives et UMR 5199 PACEA
du CNRS, Laboratoire d’anthropologie des popu- Marie-Dominique nenna, CNRS, UMR 5189,
lations passées et présentes, Université Bordeaux 1 Histoire et Sources des Mondes antiques, Maison
de l’Orient et de la Méditerranée, Lyon
Gilles gréVIn, CNRS – CEPAM, Université de
Nice / Sophia Antipolis, UMR 6130 Walter pantano, Collaboratore esterno della
Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici
Gisèle haDJI-mInaglou, Institut Français d’Ar- di Roma
chéologie Orientale, Le Caire
Rita parIs, Soprintendenza Speciale per i Beni
Antoine hermarY, Aix-Marseille Université, Archeologici di Roma
CNRS, CCJ UMR 7299, 13094, Aix-en-Provence,
France
LISTE DES CONTRIBUTEURS
Lisa pesCuCCI, Collaboratore esterno della Soprin- Christiane ZIegler, Directeur honoraire du
tendenza Speciale per i Beni Archeologici di Roma département des Antiquités égyptiennes du musée
du Louvre. Directeur de publication des Fouilles
Amira saBah, Conseil suprême des Antiquités, du Louvre à Saqqara
Alexandrie
Iwona ZYCh, Polish Centre of Mediterranean
Stéphanie satre, Aix-Marseille Université, CNRS, Archaeology, University of Warsaw
CCJ UMR 7299, 13094, Aix-en-Provence, France
603
Abréviations
BSAE : British School of Archaeology in Egypt and Egyptian Research Account (Londres)
BSFE : Bulletin de la Société française d’égyptologie (Paris)
BSEG : Bulletin de la Société d’égyptologie de Genève (Genève)
CahKarn : Cahiers de Karnak. Centre franco-égyptien d’étude des temples de Karnak,
Centre nat. de la rech. sc. (Paris).
CASAE : Cahiers. Suppl. aux ASAE (Le Caire)
CCE : Cahiers de la céramique égyptienne (Le Caire)
CEFR : Collection de l’École française de Rome (Rome)
ChronÉg : Chronique d’Égypte (Bruxelles)
CIL : Corpus inscriptionum latinarum, 1862- (Berlin)
CRAIBL : Comptes rendus de l’Académie des inscriptions et belles-lettres (Paris)
CRIPEL : Cahiers de recherches de l’Institut de papyrologie et d’égyptologie de Lille (Lille)
DFIFAO : Documents de fouilles de l’Institut français d’archéologie orientale (Le Caire)
DialArch : Dialoghi di archeologia (Rome, Milan)
EMC : Échos du monde classique. Class. Views. Dept. of Class., univ. d’Ottawa (Ottawa)
EES : Egypt Exploration Society (Londres)
EgArch : Egyptian Archaeology (Londres)
EgUit : Egyptologische uitgaven (Leyde)
ENIM : Égypte nilotique et méditerranéenne (Montpellier)
ÉtudAlex : Études alexandrines (Le Caire, Alexandrie)
606 ExcMem : Excavation Memoirs (Londres)
FIFAO : Fouilles de l’Institut français d’archéologie orientale (Le Caire)
IntJOsteoarcheol : International Journal of Osteoarcheology (Chichester)
JARCE : Journal of the American Research Center in Egypt (Boston, New York)
JAS : Journal of Archaeological Science (Londres, New York)
JDAI : Jahrbuch des deutschen archäologischen Instituts (Berlin)
JEA : Journal of Egyptian Archaeology (Londres)
JForensicSci : Journal of Forensic Sciences (Chichester)
JRA : Journal of Roman Archaeology (Ann Arbor)
JSSEA : Journal of the Society of the Studies of Egyptian Antiquities (Toronto)
MDAIK : Mitteilungen des deutschen archäologischen Instituts, Abt. Kairo (Wiesbaden, Mayence)
MEFRA : Mélanges d’archéologie et d’histoire de l’École française de Rome. Antiquité (Rome)
MIFAO : Mémoires publiés par les membres de l’Institut français d’archéologie orientale (Le Caire)
MonAnt : Monumenti antichi. Accad. dei Lincei (Rome)
NSA : Notizie degli scavi di Antichità. Accad. dei Lincei (Rome)
OBO : Orbis biblicus et orientalis (Fribourg, Allemagne, Göttingen)
OLA : Orientalia lovaniensia analecta (Louvain)
OMRO : Oudheidkundige Mededelingen vit het Rijksmuseum van Oudheden (Leyde)
PAM : Polish Archaeology in the Mediterranean (Varsovie)
P.L.Bat. : Papyrologica Lugduno-Batava (Leyde)
PN : H. ranke, Die ägyptischen Personennamen, 3 vol., 1935-1977 (G ckstadt, Hambourg)
PP : La Parola del passato. Riv. di stud. antichi (Naples).
ABRéVIATIONS
607
Collection Études Alexandrines
22. Delphine DixneuF, Amphores égyptiennes. Production, typologie et diffusion (IIIe siècle avant J.-C.-
IXe siècle après J.-C.), AmphorAlex 1, 2011.
23. Claude brixHe, Timbres amphoriques de Pamphylie, AmphorAlex 2, 2012.
24. Alexandrie médiévale 4 (Christian décobert, Jean-Yves EmPereur, Christophe Picard éd.), 2011.
25. Olivier Picard, Cécile bresc, Thomas FaucHer, Gilles gorre, Marie-Christine marceLLesi,
Cécile morrisson, Les monnaies des fouilles du Centre d’Études Alexandrines : Les monnayages de
bronze à Alexandrie de la conquête d’Alexandre à l’Égypte moderne, 2012.
26. L’ Enfant et la mort dans l’Antiquité II. Types de tombes et traitement du corps des enfants dans l’antiquité
gréco-romaine (Marie-Dominique nenna éd.), 2012.
Pour l’achat des 21 premiers titres de la collection des Études Alexandrines : Institut français
d’archéologie orientale, 37 rue Cheikh Aly Youssef, Mounira, Le Caire, Égypte – www.ifao.egnet.net
à partir du volume 22, pour les ventes en Égypte : Centre d’Études Alexandrines, 50 rue
Soliman Yousri, 21131 Alexandrie, Égypte
Pour les autres pays : De Boccard Édition-Diffusion, 11 rue de Médicis, 75006 Paris, France
– www.deboccard.com
The second international round table in the programme L’ Enfant et la mort dans l’Antiquité (Death and
the Child in Antiquity), inanced by the Agence Nationale de la Recherche, is dedicated to types
of tombs and the treatment of the child’s body. There is a concentration upon recent discoveries in
Egypt dated to between the seventh century BC and the ninth AD—Alexandria, Marina el-Alamein on
the Mediterranean coast, Saqqara, Tebtunis in the Fayoum, the oases of the Libyan Desert (Bahriya,
Dakhleh, and Khargeh)—with an introduction on children’s tombs in the Pharaonic world. In
addition, one contribution takes a look at biological anthropology in Greece, and regional studies
examine the types of children’s tombs in Greek colonies of southern Italy, in Rome, in the south of
France and in North Africa.
La deuxième table ronde internationale du programme L’ Enfant et la mort dans l’Antiquité, soutenu
par l’Agence Nationale de la Recherche, est consacrée aux types de tombes et aux traitements du
corps des enfants. L’ accent est mis sur les découvertes récentes en Égypte datées entre le VIIe siècle
av. J.-C. et le IXe siècle apr. J.-C., – Alexandrie, Marina el-Alamein sur la côte méditerranéenne,
Saqqara, Tebtynis dans le Fayoum, oasis du désert libyque (Bahareya, Dakhla et Kharga) –, avec
une introduction sur les tombes d’enfants dans le monde pharaonique. En outre, une contribution
fait le point sur l’anthropologie biologique en Grèce, et des études régionales portent sur les types
de tombes d’enfants dans les colonies grecques d’Italie du Sud, à Rome, dans le Midi de la France
et en Afrique du Nord.
،اقيم مؤمر امائدة امستديرة الدوى الثاي لرنامج )الطفل واموت ى العصور القدمة) تحت رعاية معهد اأبحاث القوميه
وركز اإهتام عى امكتشفات الحديثه مر.وكرست ابحاثه عى دراسة أنواع امقابر و طرق معالجة جثامن اأطفال امتوفين
، ومارينا العلمن عى الساحل الشاى،وامؤرخه ما بن القرن السابع قبل امياد والقرن التاسع اميادى بكل من اإسكندرية
والواحات اموجودة بالصحراء الليبيه )الغربية) كالواحه البحرية والداخله والخارجه مع إعطاء نبذه، وتيبتونيس بالفيوم،وسقارة
باإضافة اى مساهمه بحثيه ى الدراسات البيلوجيه اانربيولوجيه باليونان وكذا دراسات.عن مقابر اأطفال ى العر الفرعوى
. وجنوب فرنسا واخرا بشال أفريقيا،محليه عن أنواع مقابر اأطفال ى امستعمرات اليونانية بجنوب إيطاليا وحتى روما
CEAlex 0006-étAlex26-2012
ISBN 978-2-11-128615-3
ISSN 1110-6441