Vous êtes sur la page 1sur 88

Période des

Royaumes
combattants

Période des Royaumes


combattants

Géographie

Partie de Dynastie Zhou


Fonctionnement

Statut Période historique, ancien État


chinois
Histoire

Origine du nom Zhanguoce

La période des Royaumes combattants (chinois simplifié : 战国 ; chinois traditionnel : 戰國 ;
pinyin : zhànguó ; litt. « pays (guó) en guerre (zhàn) ») s'étend, dans l'histoire de la Chine, du
ve siècle av. J.-C. à l'unification des royaumes chinois par la dynastie Qin en 221 av. J.-C. Ce
nom lui est donné tardivement, par référence aux Stratagèmes des Royaumes combattants,
ouvrage portant sur cette période. Elle correspond dans la chronologie dynastique à la fin de
la période des Zhou orientaux ( 東周, Dōng Zhōu, 771-256 av. J.-C.). Cette chronologie, qui
repose sur l'historiographie traditionnelle, ne correspond pas nécessairement à la datation
précise des évolutions sociales, politiques, économiques et culturelles : ce qui caractérise les
Royaumes combattants date principalement du début du ive siècle av. J.-C.

Cette dernière période de l'ère « pré-impériale » de l'histoire chinoise est immédiatement


postérieure à la période des Printemps et Automnes qui voit le déclin de la dynastie Zhou et
le renforcement du pouvoir des princes. À partir du milieu du ve siècle av. J.-C., sept grands
États émergent : Chu, Han, Qi, Qin, Wei, Yan et Zhao. Ils s'affranchissent définitivement de la
tutelle symbolique des Zhou : leurs souverains prennent le titre de « roi » (wang) et se livrent
des guerres incessantes qui stimulent en même temps qu'elles accompagnent de nombreux
progrès typiques de cette période. C'est alors que se constituent des États centralisés,
dirigés par une administration et une classe politique de mieux en mieux formées et
organisées.

La période des Royaumes combattants voit se produire des progrès techniques et


économiques déterminants. C'est aussi la période de naissance puis de développement de
plusieurs écoles de pensée qui ont profondément influencé l'histoire de la Chine
(confucianisme, taoïsme, légisme, etc.). Les textes antiques relatifs à cette période sont
marqués par des personnalités de différents types. Certaines de celles-ci comptent parmi les
plus importantes de la civilisation chinoise : les souverains (le Premier Empereur Qin Shi
Huangdi), leurs ministres réformateurs (Shang Yang), les stratèges militaires (Sun Bin), les
spécialistes de la persuasion et les penseurs (Lao Zi, Mencius, etc.). Les découvertes
archéologiques effectuées depuis plus d'un siècle sur le sol chinois, surtout des sépultures et
des villes, font considérablement progresser les connaissances sur cette époque.

Les sources
Laissez-passer inscrit sur du bronze retrouvé dans une tombe de Chu en 1957, exemple des découvertes modernes de
textes administratifs des Royaumes combattants dans des tombes antiques.

Les textes de la tradition chinoise

Les sources qui traditionnellement permettent de se faire une idée de la période des
Royaumes combattants sont des sources littéraires conservées depuis l'Antiquité[1]. Elles ont
été rédigées ou compilées durant la période pré-impériale ou sous les premiers empires
chinois. De toutes ces sources, les Mémoires historiques (Shiji) de Sima Qian (145-86),
rédigées au début de la dynastie Han, sont les plus importantes pour l'histoire des Royaumes
combattants. La première partie des Mémoires se fonde sur les chroniques du royaume de
Qin auxquelles l'auteur, archiviste à la cour des Han, avait accès, et raconte l'histoire de la
Chine depuis les origines. La dernière partie de l'ouvrage consiste en des biographies narrant
la vie de personnages éminents dont certains sont contemporains des Royaumes
combattants[2]. D'autres chroniques complètent l'œuvre de Sima Qian, comme les Annales de
Bambou (Zhushu Jinian), retrouvées dans une tombe à la fin du iiie siècle apr. J.-C. de notre
ère, contenant les annales du royaume de Wei[3]. Il semble que chaque État faisait rédiger sa
propre chronique, mais la plupart d'entre elles ont été perdues. Il s'agit de textes produits par
les officiels de ces États, donc de sources biaisées, plus encore chez Sima Qian qui a désiré
dispenser des leçons de morale à travers les récits qu'il rapporte. Mais la description des
événements de la période des Royaumes combattants y est généralement fiable,
contrairement à celle des périodes antérieures qui comprend des récits légendaires ou semi-
légendaires.
Le même problème se pose pour les autres sources écrites de la période, conservées par la
tradition chinoise ultérieure. Une partie de celles-ci sont des écrits d'hommes politiques
décrivant leurs projets ou leurs stratagèmes politiques, une autre, des traités militaires écrits
par des stratèges. Les textes les plus nombreux qui aient été sauvegardés sont ceux des
penseurs ou philosophes des Royaumes combattants, qui avaient la volonté de les archiver
contrairement à d'autres et parce que cette période a été très productive dans ce domaine[4].
Cependant, beaucoup de ces textes posent un problème de contextualisation historique
puisqu'ils ont souvent été très remaniés a posteriori ; l'auteur auquel ils sont attribués n'est
pas forcément celui qui les a rédigés dans leur totalité. Le même type de problème se pose
pour les textes rituels datant de la période des Royaumes combattants ou qui lui
préexistaient et qui ont survécu à l'épreuve du temps ou encore d’autres productions
littéraires comme des traités de médecine, de lexicographie, des poésies ou des récits. Ces
œuvres sont souvent composites et difficiles à dater. Cependant, la compréhension de leur
genèse et du contexte de leur rédaction progresse grâce aux méthodes modernes d'analyse
critique.

Les sites archéologiques

L'essor de l'archéologie de la Chine ancienne est déterminant pour la connaissance des


Royaumes combattants[5]. Les fouilles portent avant tout sur deux types de sites. D'abord les
sépultures, très nombreuses sur les terres de l'antique pays méridional de Chu, où ont été
mis au jour des objets d'art et des textes. Leur analyse permet de mieux connaître les
croyances et aussi la hiérarchie sociale des anciens Chinois, même si leur interprétation
reste complexe[6]. Ensuite, ce sont les villes et surtout les capitales qui ont fait l'objet de
campagnes de fouilles, quand elles ne sont pas recouvertes par les villes actuelles leur ayant
succédé.

Les textes retrouvés par l'archéologie

Textes sur lamelles de bambou retrouvés à Geling, Zhumadian (Henan).


Un apport important des fouilles archéologiques est la découverte, dans des tombes
antiques, de textes de nature variée, rédigés sur des supports divers, généralement à l'encre,
qui résistent plus ou moins bien à l'usure du temps[7]. Les plus répandus sont ceux
constitués de lamelles faites à partir de bambou coupé en deux, allongé puis poli, liées
ensemble par des fils ou rubans de soie, permettant d'en faire un rouleau. Les textes écrits
sur du bois qui sont connus pour cette période prennent l'aspect de tablettes. Le troisième
support le plus répandu est celui qui a le moins bien survécu aux outrages du temps, la soie,
support plus fragile mais plus cher que les deux autres, qui servait aussi pour des
peintures[8]. Le bronze pouvait également être gravé, plutôt pour des textes solennels que l'on
voulait durables et qui sont moins nombreux.

Grâce à ces découvertes, il est possible de connaître l'état antérieur de certains textes que la
tradition chinoise a « canonisés » par la suite. Cela permet aussi d'accéder à une plus grande
variété de textes, notamment des écrits administratifs et juridiques mettant en lumière des
pratiques sur lesquelles les seules sources écrites connues avant ces découvertes donnaient
très peu d'informations. D'autres études de ces textes anciens ont une approche
épigraphique et linguistique, ces textes témoignant d'un état de l'écriture chinoise où
plusieurs variantes régionales coexistent (styles de la « grande écriture sigillaire », dazhuan)
avant l'uniformisation de l'écriture sous la dynastie Qin (le petit style sigillaire)[9],[10].

Le cadre géopolitique et culturel

Localisation des principaux États de la période des Royaumes combattants au milieu du ive siècle av. J.-C.
Diversité et unité

Au milieu du ve siècle, sept grands royaumes dominent la Chine, les « Sept héros » (qixiong)
des Royaumes combattants. Ces royaumes se caractérisent par leur puissance militaire : ils
disposent chacun de plus de 10 000 chars de bataille[11]. Ce sont les Wei, Zhao, Han, Qi, Yan,
Chu et Qin. À côté de ces grands royaumes subsistent plusieurs autres royaumes de moindre
importance militaire, parmi lesquels se trouvent d'anciens États prestigieux situés dans la
Plaine centrale autour du territoire de la dynastie des Zhou, dans les actuelles provinces du
Shandong et du Henan. Ces États possèdent des identités propres et se distinguent même
parfois par des cultures spécifiques. Les études en matière d'archéologie et d'art, combinées
à celles des textes, permettent de définir plusieurs aires culturelles relativement stables
durant la période de la dynastie Zhou. Certaines d'entre elles bénéficient d'un très grand
rayonnement à l'époque des Royaumes combattants : elles correspondent souvent à des
unités géographiques naturelles homogènes[12].

Pour autant, les frontières sont très poreuses et beaucoup de personnes et d'idées les
traversent[13]. La conception d'un espace homogène, Tianxia (« Tout ce qui se trouve sous le
Ciel »), s'impose, correspondant à une sorte de « monde civilisé » chinois opposé à celui des
peuples considérés comme « Barbares » dont les entités politiques se trouvent en périphérie,
notamment ceux situés au nord et que les textes désignent par le terme Hu[14]. Mais cette
frontière est aussi toute relative et évolutive puisque la différence est avant tout perçue
comme culturelle et que certains États jadis considérés comme barbares (à l'exemple de Qin,
Chu et Zhongshan) ont adopté les traditions culturelles chinoises, ce qui leur permet d'être
considérés comme civilisés. Toutefois, les régions plus anciennement sinisées les regardent
encore avec dédain. Ces stéréotypes reposent souvent sur l'idée d'un déterminisme
géographique : par exemple, les peuples du Sud étaient considérés comme impétueux et
difficiles à gouverner en raison de la chaleur de leur climat[15].

La Plaine centrale et les « Trois Jin »

La région de la « Plaine centrale » (zhongyuan) ou des « Royaumes du centre » (zhongguo,


terme désignant aujourd'hui la Chine, « Pays du milieu ») est située dans la plaine du fleuve
Jaune, à l'est du confluent du fleuve et de la rivière Wei. De nos jours, cet espace correspond
approximativement au nord du Henan, au sud du Shanxi et du Hebei et à la partie ouest du
Shandong. Elle est occupée par de petites entités politiques, comme le domaine des Zhou,
qui se divise par la suite en deux, Zhou oriental et Zhou occidental (une des deux régions
garde le titre royal)[16] ; plus à l'est la principauté de Lu, d'où est originaire Confucius ; Song,
qui a pour capitale la riche ville marchande de Dingtao et dont la dynastie descend des
Shang ; Zheng et Wey qui jouent un rôle diplomatique entre les grandes puissances. Du point
de vue culturel, cette région peut être vue comme le conservatoire des traditions anciennes
de la civilisation chinoise[17].

La puissance dominante de la région centrale à la fin de la période des Printemps et


Automnes était Jin, qui s'étend sur une grande partie du plateau de Lœss et sur une partie de
la plaine alluviale du fleuve Jaune. Cette principauté se divise en trois États au début de la
période des Royaumes combattants. Ceux-ci demeurent de grandes puissances, notamment
parce qu'ils restent liés et sont souvent désignés comme les « Trois Jin »[18]. Le principal est
Wei, autour du coude du fleuve Jaune et de la vallée de la Fen (Shanxi et Henan actuels).
Malgré sa richesse, ce royaume est confronté à un problème de taille tout au long de la
période : il est entouré par d'autres grandes puissances ce qui l'implique dans de nombreux
conflits. Le deuxième royaume issu de la partition de Jin, Zhao, se situe au nord de Wei
(Shanxi et Hebei). Il est au contact de peuples nomades et vit en marge de la zone centrale. Il
devient progressivement une grande puissance militaire. Le troisième royaume descendant
de Jin est Han. Il se situe dans les actuelles provinces du Shanxi et du Henan. Petit et moins
puissant que ses voisins, il survit en servant de zone tampon entre ceux-ci.

L'autre grande puissance politique proche de la Plaine centrale est le royaume de Qi, au nord-
est, dans la dernière partie de la plaine alluviale du fleuve Jaune, jusqu'à son embouchure
(l'actuel Shandong)[19]. Il dispose de riches terres agricoles et d'importantes ressources en
sel, constituant sans doute l'une des plus puissantes économies de la période. Sa capitale
Linzi passe pour être la plus grande ville de l'époque.

Les régions septentrionales

À la périphérie, les royaumes puissants ont la possibilité d'agrandir leur territoire malgré la
présence menaçante de peuples « barbares ». Ils peuvent ainsi nous défricher des terres en
vue de se renforcer face aux États centraux dont les perspectives d'expansion sont plus
limitées[20]. Ils sont d'ailleurs souvent considérés comme peu civilisés voire semi-barbares
par les royaumes centraux, notamment en raison de leurs contacts avec des voisins
étrangers au monde chinois. Au nord-est, le royaume de Yan, dont la capitale est proche de
l'actuelle Pékin, est un allié de Qi durant une bonne partie de la période[21]. Le fleuve Jaune se
jette alors dans la mer plus au nord qu'actuellement, dans son territoire, lui assurant des
terres agricoles fertiles. Comme Zhao, qui est situé au nord-ouest, il est au contact direct des
peuples nomades du nord, en plus d'être éloigné des royaumes chinois les plus menaçants.
Entre les deux, Zhongshan joue un certain rôle politique et possède des affinités culturelles
avec les autres entités politiques septentrionales[22].
Qin

À l'ouest s'étend le territoire de l'État de Qin avec, en sa région centrale, la riche vallée de la
Wei au cœur du plateau de Lœss, le berceau de la dynastie Zhou avant son déplacement vers
l'est (au début de la période des Zhou orientaux en 771)[23]. Il est encore perçu comme un
royaume arriéré au début de la période des Royaumes combattants. Il se trouve au contact
de peuples « barbares » particulièrement redoutables qu'il ne réussit à réduire qu'après de
longues guerres qui le détournent souvent des conflits avec les autres Royaumes
combattants. Après la conquête des principautés de Shu et de Ba sur sa frontière
méridionale à la fin du ive siècle av. J.-C., il dispose du plus grand potentiel agricole des
royaumes combattants. Qin est aussi le royaume qui a accompli les réformes les plus
poussées, notamment au milieu du ive siècle sous l'impulsion du ministre Shang Yang qui en
fait un État totalement organisé en vue de la guerre. À dater de cette époque, c'est en grande
partie autour de lui que se joue le jeu politique inter-étatique. Il constitue la matrice du
premier empire chinois qui sera proclamé par son roi Zheng (qui devient alors l'empereur Qin
Shi Huangdi) en 221[24].

Chu et les régions méridionales

Le nord du bassin du Sichuan, ancien pays de Ba, une des plus riches régions agricoles de la Chine ancienne.

Au sud de la Chine des Royaumes combattants on trouve un espace politique dont


l'originalité culturelle est bien connue grâce aux découvertes archéologiques des dernières
décennies. Bien qu'ouvert aux influences venues de la Plaine centrale, il conserve ses
caractères propres, dont certains se retrouvent dans la civilisation chinoise de l'époque
impériale. C'est le septième grand royaume, Chu, d'abord centré sur le cours moyen du
Yangzi. Il s'étend ensuite vers le nord autour des bassins des rivières Huai et Han[25]. Ce sont
des régions au peuplement peu dense, comprenant beaucoup d'espaces laissés incultes.
Bien que puissant, Chu est un royaume mal contrôlé, voire instable comparé aux autres.
Grâce aux fouilles de milliers de tombes sur son territoire et grâce aux textes des lettrés de
cet État rédigés durant la période des Royaumes combattants, notamment les Élégies de Chu
et le Zhuangzi, on mesure mieux aujourd'hui toute sa spécificité culturelle[26].

À l'ouest de Chu, les États de Shu et Ba dans le bassin de la Min (Sichuan actuel), de riches
régions agricoles et minières constituent un ensemble culturel appelé « Ba-Shu », voisines de
peuples barbares comme ceux qui fondent le royaume de Dian (au nord du Yunnan) vers la
fin de la période[27]. De l'autre côté, à l'est, la basse vallée du Yangzi est occupée par des
royaumes qui ont une grande importance politique au début de la période : Wu et son voisin
Yue qui l'élimine avant de l'être à son tour par Chu en 334[28].

Histoire

Royaumes principaux au début de la période des Royaumes combattants, avant l'éclatement du Jin.

La période des Royaumes combattants est considérée par l'historiographie chinoise comme
une phase de la longue période de la dynastie Zhou, qui a pris le pouvoir vers 1046 av. J.-C.
Mais depuis 771 sa prééminence n'est plus que théorique et symbolique, et la Chine est
partagée entre plusieurs principautés rivales qui ne se soucient plus vraiment de son
influence dans leurs affaires politiques et militaires. Durant les trois siècles de la Période des
Printemps et Automnes (771-ve siècle), quelques principautés s'affirment progressivement,
absorbant les plus faibles, et au début du ve siècle moins d'une dizaine d'entre elles jouent un
rôle politique de premier plan.

La période des Royaumes combattants voit ce processus de concentration politique se


renforcer, jusqu'à l'unification finale par le royaume de Qin. Elle est marquée par la rivalité
entre sept grands royaumes consacrés par la tradition, qui ont en fait des rôles politiques
d'importance inégale. On peut distinguer plusieurs phases durant l'histoire politique de cette
période :

d'environ 450 à 350 l'alliance des trois royaumes héritiers de l'ancien Jin joue un rôle
moteur, sous l'impulsion de Wei ;

d'environ 350 à 250 les conflits sont de plus en plus violents et les alliances fluctuantes
pour empêcher qu'un royaume ne domine les autres, Qin sortant renforcé de ces luttes ;

les années de 250 à 221 voient la victoire décisive de Qin, qui unifie la Chine, ce qui ouvre
la période de la dynastie Qin.

La réorganisation et l'affirmation des grandes puissances

Localisation des principaux États de la période des Royaumes combattants au milieu du ive siècle av. J.-C. Le tracé
des frontières est approximatif.

Le ve siècle voit se produire plusieurs événements décisifs qui modifient la scène politique
chinoise et justifient le passage à une nouvelle période, quelle que soit la date retenue pour le
début de la période des Royaumes combattants (481, 476, 453 ou 403)[29].

En 481, quand finit la Chronique des Printemps et Automnes, le clan des Tian, qui dirige de
facto la politique du royaume de Qi après avoir éliminé les autres grandes familles nobles
précédemment, se débarrasse de la majorité de la famille royale après une guerre civile. Le
chef du clan laisse un souverain fantoche diriger en apparence une faible part du royaume,
puis prend définitivement la direction des affaires[30].

L'événement le plus important survient en 453, quand les trois clans alliés de Wei, Zhao et
Han se débarrassent du dernier lignage puissant du royaume de Jin après une longue période
marquée par plusieurs guerres civiles qui ont vu les forces centrifuges s'affirmer[31]. La
partition de Jin en trois entités politiques est alors effective et elle est officialisée en 403 par
le souverain Zhou.
Pendant que ces royaumes du centre sont dans la tourmente, plusieurs royaumes des
périphéries se réorganisent. Au sud, les conflits entre Chu, Wu et Yue cessent après la
conquête du deuxième par le troisième en 473[32]. Par la suite, Yue, Chu, Qin et Qi
connaissent une phase d'expansion territoriale après l'annexion de plusieurs petites
principautés[33].

Une fois leur situation stabilisée, les trois royaumes héritiers de Jin s'allient et se lancent
dans plusieurs conflits qui marquent la première phase de la période des Royaumes
combattants[34]. Qi, Chu et Qin font les frais de ces offensives, ainsi que Zhongshan. Parmi
les descendants de Jin, c'est Wei qui affirme sa supériorité militaire, après les victoires de
son grand général Wu Qi. La disgrâce et l'exil de ce dernier vers 401 profitent à Chu qui
l'engage : le général restaure la puissance de Chu grâce à des réformes et des victoires
militaires. De son côté, Han annexe Zheng en 375. Après 366, c'est au tour de Qin de
réaffirmer sa puissance. Au sortir de conflits difficiles avec des peuples barbares du nord-
ouest, il bat une coalition de Wei et de Han, puis Wei à nouveau.

Le nouveau souverain de Wei, Hui, réagit à la nouvelle situation en réorganisant son royaume
et en engageant une politique de normalisation des relations entre les grands rois à la suite
de différentes rencontres. La diplomatie prend alors une importance plus grande[35]. Durant
la seconde moitié du ive siècle, les monarques des grands royaumes prennent le titre de roi
(wang) et entreprennent des réformes capitales qui font d'eux des royaumes centralisés plus
solides, ce qui explique l'escalade militaire qui se produit durant les décennies suivantes.

L'escalade des conflits


Une grande bataille de la période des Royaumes combattants : Maling (342 ou 341). L'armée de Qi attire les troupes de
Wei dans une embuscade en faisant croire à son affaiblissement et remporte une victoire écrasante, restée un modèle
tactique dans l'histoire militaire chinoise.

La période qui va en gros de 350 à 250 est marquée par de nombreux conflits de plus en plus
violents, des renversements d'alliance et la réorganisation des rapports de force, dans
lesquels la montée en puissance de Qin devient le facteur déterminant dans le jeu des
coalitions. Au cours de ce siècle, les effectifs militaires gonflent considérablement et le rôle
des ministres et diplomates s'accroît. C'est alors que s'affirment les traits caractéristiques de
la période des Royaumes combattants.

La première phase voit Wei perdre sa position dominante. Elle est marquée par deux grandes
batailles. La première est celle de Guiling en 353 et la seconde est celle de Maling en 341,
face aux armées de Qi dirigées par le général Tian Ji et son conseiller Sun Bin[36],[37],[38]. Le
duc Xiao de Qin bénéficie alors des réformes entreprises par le ministre Shang Yang, qui
permettent à son État de pousser très loin la militarisation de la société[39]. Qin, qui jouait
jusqu'alors un faible rôle militaire dans la Plaine centrale, accroît sa puissance[40]. Ses
généraux, notamment Bai Qi, mais aussi Shang Yang en personne, remportent plusieurs
victoires contre Wei. Le roi de ce dernier se voit imposer Bai Qi pour ministre et se retrouve
sous la tutelle de Qin. Désormais, le jeu politique est dominé par Qi et Qin, avec un avantage
de plus en plus net pour le second. C'est alors que se mettent au point deux principes
d'alliances opposés dictés par la position adoptée vis-à-vis du royaume le plus puissant :

Le premier est l'alliance verticale (hezong), dans un sens nord-sud : les royaumes situés au
centre s'allient pour couper la progression de Qin à l'ouest, et dans certains cas pour celle
de Qi à l'est.

Le second est l'alliance horizontale (lianheng), dans un sens ouest-est : un royaume s'allie à
Qin (en général à l'instigation des diplomates de ce dernier) pour profiter de sa puissance
et s'assurer d'avantages sur les autres[41].

En 316, le roi Huiwen de Qin, après s'être débarrassé de Shang Yang dont le pouvoir devenait
gênant, poursuit sa politique et sa montée en puissance. Ses généraux parachèvent
l'annexion des deux principautés situées au sud, les riches territoires de Shu et Ba (actuel
Sichuan), puis remportent des victoires déterminantes contre les nomades Rong du nord, qui
dès lors ne constituent plus une menace. Pendant ce temps, Chu a annexé Yue en 334,
étendant son territoire jusqu'à la mer à l'est[42]. Alors qu'un conflit successoral secoue Qin en
307, Qi renforce sa puissance sous l'impulsion de son ministre Tian Wen et s'allie avec Han
et Wei contre le royaume occidental[43]. Le conflit avec ce dernier éclate finalement et Qi et
ses alliés remportent plusieurs victoires. Par la suite, ils s'imposent également face à Chu et
Yan. Mais en 294 Tian Wen est chassé de Qi et l'alliance se rompt. Qin profite alors de la non-
intervention de l’État de Qi pour vaincre Han et Wei au cours de conflits terriblement
meurtriers qui culminent avec la bataille de Yique en 293. Mais le jeu des alliances n'en finit
pas de se retourner contre le royaume Qin qui pense avoir établi sa domination : il est forcé
de restituer ses conquêtes quand Qi allié à d'autres royaumes menace de l'attaquer ; ensuite,
Qi est à son tour attaqué par Yan, Han, Zhao et Wei qui le défont malgré l'appui de Chu,
mettant un terme à ses prétentions de domination ; peu après, en 278, Qin inflige une terrible
défaite à Chu, prenant sa capitale Ying et constituant ainsi un bloc territorial compact autour
de son centre ancien, le bassin de la Wei, avec le Sichuan nouvellement acquis. Le vaincu est
quant à lui forcé à réorganiser son territoire autour de sa partie orientale.

Zhao, qui a renforcé l'efficacité de son armée sous le règne du roi Wuling avec l'adoption de la
cavalerie, puis conquis Zhongshan vers 295, est alors la seule puissance en mesure de
s'opposer à Qin après ces conflits sanglants au cours duquel il a plusieurs fois changé
d'alliance entre les deux plus puissants royaumes, tout en se dotant d'une armée plus
performante[44]. D'abord défaites à Huayang en 273, les troupes de Zhao parviennent à
repousser les offensives de Qin quelques années plus tard. Le roi Zhaoxiang de Qin fait alors
appel à un nouveau premier ministre, Fan Sui, qui met au point une politique reposant sur
l'affirmation de la royauté contre les nobles du royaume et l'expansion militaire face aux
voisins directs grâce à l'alliance avec les royaumes plus lointains, le tout combiné avec la
conquête de territoires et l'élimination des vaincus. Une nouvelle étape est franchie dans
l'escalade de la violence militaire en même temps qu'est mise au point une stratégie militaire
stable qui permet à Qin d'utiliser pleinement le potentiel acquis auparavant (les réformes de
Fan Sui complétant en quelque sorte celle de Shang Yang)[45]. La première cible est le Han, le
plus faible des voisins directs du Qin, qui est appuyé par le Zhao, son plus grand rival. Le
général du Qin, Bai Qi, remporte une victoire décisive en 260 à la bataille de Changping, à la
suite de laquelle plus de 400 000 soldats du Zhao seraient morts, dont une bonne partie
exécutés après la bataille[37]. Mais des troubles internes à Qin aboutissant à la mort de ses
deux hommes forts et rivaux, Bai Qi et Fan Sui, offrent un répit aux autres grands royaumes
même si désormais la prééminence de Qin est incontestée avec l'élimination du gros des
forces de son dernier grand adversaire.

La victoire de Qin
Article détaillé : Guerres d'unification de Qin.
Extension approximative des royaumes combattants en 260, avant les annexions effectuées par Qin. Le tracé des
frontières est approximatif.

Les trois dernières décennies de la période des Royaumes combattants sont marquées par la
victoire définitive de Qin sur tous ses rivaux qui n'ont pas été en mesure d'arrêter son
irrésistible montée en puissance. La supériorité de ce royaume sur ses rivaux est due à divers
facteurs[46] : situation géographique (protégé par des montagnes au sud et le Fleuve Jaune à
l'est), richesse des terres agricoles réunies et mises en valeur par des travaux d'irrigation
dans le bassin de la rivière Wei et dans le Sichuan, technique et organisation militaires,
stabilité dynastique et, surtout, appareil administratif extrêmement efficace dû aux réformes
entreprises à la suite de celles de Shang Yang[47].

C'est sur ces bases que se construit le premier Empire chinois. La possibilité d'un
changement dynastique devient effective en 256 quand le roi Zhou meurt sans que son titre
soit revendiqué par ses héritiers, avant que son domaine ne soit annexé par Qin en 249. Dans
ce royaume, le roi Zheng monte sur le trône en 246, mais ne règne effectivement qu'en 238
quand il atteint l'âge adulte[48]. Son règne est essentiellement connu par ce que l'historien
Sima Qian rapporte dans son Shiji. Il évoque notamment le rôle de Lü Buwei, marchand
devenu premier ministre en 250, poste qu'il occupe jusqu'à sa disgrâce et sa mort en 237[49].
Son remplaçant, Li Si, dirige le royaume pendant la dernière phase de la victoire de Qin sur les
autres grandes puissances, conduite sur les champs de bataille par plusieurs grands
généraux, dont Meng Ao, Wang Jian puis Meng Tian. En 230, le plus faible des adversaires,
Han, est le premier à être annexé, sans combats. En 228, Zhao est vaincu à son tour après le
siège difficile de sa capitale Handan qui est suivi d'un massacre. Cependant, un membre de
la dynastie de Zhao fuit au nord d'où il tente de restaurer ce royaume. Deux ans plus tard, Yan
est envahi à la suite d'une tentative d'assassinat du roi de Qin fomentée par un de ses
princes ; la capitale est prise, mais le roi réussit à fuir plus au nord alors que son fils est
exécuté. En 225 c'est Wei qui se rend après le siège de sa capitale, inondée par les
assaillants qui ont détourné le cours du fleuve Jaune. En 223, c'est au tour de Chu d'être
attaqué : il repousse une première invasion mais succombe à la seconde, après des combats
auxquels ont participé des centaines de milliers de combattants, sans doute les plus gros
effectifs engagés de toute la période. L'année suivante, l'armée de Qin élimine les derniers
résistants du nord à Zhao puis à Yan. En 221, Qi se rend quand Qin y conduit ses troupes. Le
processus d'unification de la Chine est achevé et le roi Zheng de Qin devient l'empereur Qin
Shi Huangdi, maître du premier Empire de l'histoire chinoise, celui de l'éphémère mais
décisive dynastie Qin (221-206).

La centralisation étatique

La dynamique guerrière de la période des Royaumes combattants conduit les États majeurs
à renforcer leur autorité. Les plus puissantes des anciennes principautés deviennent au fil
des réformes de véritables royaumes centralisés, dirigés par un monarque concentrant de
plus en plus de pouvoir, lui-même appuyé sur une nouvelle classe politique spécialisée dans
la direction des affaires de l'État et vouée à son service. Cette période voit donc se produire
une « révolution étatique » (J. Gernet)[50]. Ce phénomène est surtout connu pour le royaume
de Qin et annonce les expériences impériales de la dynastie Qin et de la dynastie Han. Il reste
cependant difficile de se faire une idée des modalités concrètes de l'exercice du pouvoir, car
les sources disponibles sont avant tout des récits historiques, des vies de personnages
importants, ou bien des traités de ministres qui ne contiennent pas d'informations détaillées
sur l'organisation de l'administration des Royaumes combattants ; de plus, la documentation
est déséquilibrée car elle concerne en priorité les institutions de Qin. Néanmoins, les
découvertes de textes juridiques et administratifs dans des tombes depuis un demi-siècle
permettent de mieux connaître les pratiques administratives.

L'affirmation de l'autorité des souverains

La période des Printemps et Automnes est marquée par des entités politiques peu
centralisées où la noblesse dispose de solides assises territoriales et d'une large autonomie,
concurrençant le pouvoir des princes locaux. Les conflits croissants, mobilisant des troupes
plus importantes, ont concentré plus de pouvoirs entre les mains de certains lignages, qui
après de longues luttes internes ont diminué en nombre. Finalement, plusieurs principautés
voient des lignages nouveaux accéder au pouvoir en renversant la dynastie régnante. Durant
le ive siècle, les sept grands royaumes combattants sont dirigés par un monarque et sa cour,
concentrant entre leurs mains un pouvoir sans précédent. Le roi incarne l'État
symboliquement. C'est ce que Mark Edward Lewis a qualifié de « ruler-centered state », « État
centré sur la personne du souverain ». Ces évolutions préparent l'idéologie impériale des Qin
et des Han[51].

Une figure de plus en plus centrale


Cela s'accompagne sur le plan symbolique d'un changement dans la titulature des chefs de
royaumes. Le roi de Zhou dispose d'une primauté qui n'est plus que de façade depuis le
début de la période des Printemps et Automnes[52]. Au gré de leurs succès militaires, les
véritables maîtres de la Chine, ce sont les chefs des sept grandes puissances, qui délaissent
alors leurs anciens titres (que l'on traduit couramment par « duc ») pour adopter celui de
« roi », wang, auparavant réservé au seul roi Zhou (exception fait roi du Chu qui le portait
depuis la période précédente)[53]. Le duc Hui de Wei est le premier à le faire en 344, puis il
persuade le duc Wei de Qi de l'imiter dix ans plus tard, après que ce dernier l'ait vaincu.
Huiwen de Qin fait de même après de brillantes victoires en 325, puis la même année c'est au
tour du roi de Han. Enfin, deux ans plus tard les rois de Zhao, de Yan et de Zhongshan (qui
n'est pas reconnu par la tradition comme un des sept grands) font de même. En 288, à
l'apogée de l'alliance entre Qi et Qin, les rois de ces deux États prennent d'un commun accord
de titre de Di (respectivement « Di de l'est » et « Di de l'ouest »), auparavant réservé aux
divinités[54]. Mais ils l'abandonnent vite sous la pression des autres rois. Ce terme qui donne
au souverain terrestre une dimension divine est repris par le premier empereur Qin, pour
former le nouveau titre Huangdi, « brillant/splendide Di », « empereur »[55]. Un autre moyen
symbolique de renforcer l'ascendant des monarques est la constitution d'une lignée
ancestrale aussi prestigieuse que celle des Zhou qui repose sur des ancêtres renommés (le
Seigneur Millet, les rois Wu et Wen), de même que l'usage de toute une série de rituels
solennels qui confirment et exaltent leur puissance et leur rang. Le capital symbolique des
rois Zhou s'épuise ainsi peu à peu, prélude à leur mort politique[56].

Les écoles de pensée de la période sont liées à ces mutations. Plusieurs d'entre elles
développent leur conception du monarque idéal, qui doit gouverner un empire unifié, alors
que leur monde est marqué par la division politique. En dépit de leurs divergences, ces
différentes écoles se rejoignent pour affirmer la suprématie du souverain unique[57], en le
considérant notamment comme le pendant terrestre de la divinité suprême qui organise
l'univers depuis le Ciel[58]. Dans cette optique, le monarque doit plus avoir une fonction
symbolique et morale. Paradoxalement, les penseurs qui l'élèvent symboliquement lui
déconseillent de mener effectivement la conduite des affaires du royaume (ou même les
troupes au combat) : il doit surtout faire preuve de discernement dans le choix de ses
conseillers, ce qui est sans doute une manière pour les ministres de chercher à s'assurer une
position de force et n'est pas forcément du goût de tous les souverains[59]. Ces réflexions
nourrissent la pensée politique des grands ministres réformateurs qui participent eux aussi à
l’affirmation de l'autorité royale. Le cas le plus emblématique vient, comme souvent, de Qin,
où le ministre Fan Sui écarte les nobles les plus en vue à la cour et cesse de leur concéder
des domaines, un usage qui leur permettait d’amasser à la longue une fortune et de
constituer des armées personnelles menaçantes pour le pouvoir royal. Il fait en sorte que
tout le pouvoir se concentre entre les mains du souverain[60]. À Chu, le premier ministre Wu Qi
tente lui aussi de rabaisser les familles nobles, mais celles-ci s'opposent à ses réformes et le
font mettre à mort, rendant ces changements éphémères.

Manifestations architecturales du pouvoir royal

Maquette du palais no 1 de Xianyang, royaume de Qin. Musée de Xianyang.

L'affirmation de la puissance royale se manifeste aussi dans les réalisations architecturales,


connues par les textes anciens et les fouilles archéologiques récentes. Les capitales des
Royaumes combattants sont dominées par des complexes palatiaux isolés du reste de
l'espace urbain par des murailles, parfois même à l'écart de l'enceinte principale dans une
sorte de seconde ville et construits sur de grandes terrasses (tai)[61]. D'autres constructions
de plus en plus monumentales illustrent cette volonté de puissance : les grandes portes à
piliers (que) et les tours (guan) qui les flanquent. L'ampleur des constructions évoquées dans
les textes est confirmée par les fouilles des capitales et des environs. Les fouilles de
Xianyang, la capitale de Qin, ont révélé un important complexe palatial dont le
développement se situe entre la dernière phase des Royaumes combattants et la période du
Premier Empire. Le bâtiment le mieux connu de ce groupe monumental est le « palais no 1 »,
dont les fondations mesurent 60 × 45 mètres. Il est constitué de deux ailes avec des
pavillons comprenant probablement trois étages entourés de colonnades, dont un rez-de-
chaussée servant d'espace résidentiel avec des chambres aux murs peints et peut-être un
grand hall donnant sur une terrasse au premier étage, espace de réception. Il pourrait
correspondre au palais Jique construit au temps de Shang Yang et décrit par Sima Qian[62].
Plan du complexe funéraire royal de Zhongshan, gravé sur une plaque en cuivre retrouvée dans une des sépultures.

L'autre type de monument illustrant de façon spectaculaire le renforcement du pouvoir royal


est le complexe funéraire royal dont des exemples ont été repérés sur les territoires de
plusieurs royaumes, bien que peu aient fait l'objet de fouilles[63]. Celui du roi Cuo de
Zhongshan, retrouvé à Pingshan (Hebei), inachevé, en est un bon exemple d'autant plus que
les fouilles ont permis d'y découvrir un plan gravé sur une plaque de bronze[64]. Il est
constitué de cinq tombes, le roi occupant la plus vaste, au centre, entourée de chaque côté
par deux tombes de ses concubines. Les tombes sont surmontées par un tumulus arboré
rectangulaire, qui sert de terrasse pour des pavillons à plusieurs étages, servant de temples
funéraires ; des fosses à offrandes (chars, chevaux, bateaux) accompagnent les défunts ; le
complexe se situe au cœur d'une double enceinte, celle située à l'extérieur mesurant
410 × 176 mètres. De tels ensembles funéraires comprenant des terrasses artificielles
surmontées par de grands temples ancestraux, ou bien bâtis sur des collines naturelles pour
placer plus haut encore le souverain décédé, se retrouvent dans chacun des grands
royaumes, à proximité de leurs capitales. Les nécropoles des rois Qin, situées d'abord à
Nanzhihui à la fin de l'époque des Printemps et des Automnes et au début de la période des
Royaumes combattants, puis à Lintong par la suite, étaient de loin les plus impressionnantes,
et témoignent d'une volonté d'ériger des complexes de plus en plus vastes. Cette tradition
triomphe avec le célèbre mausolée du Premier empereur, érigé également à Lintong.

La recomposition de l'élite politique

Fonctionnaires et ministres

Les souverains s'appuient sur un nouveau groupe de serviteurs très différents des élites
politiques des périodes précédentes, qu'ils supplantent[65]. Les royaumes sont
traditionnellement dominés par des grands lignages nobles disposant de bases territoriales
et occupant les principaux postes civils et militaires, jusqu'à celui de « premier ministre »
dirigeant dans les faits la majorité des affaires du royaume. Tout en conservant une place
élevée, comme l'illustrent les « Quatre Seigneurs des Royaumes combattants » dont Sima
Qian a rédigé les biographies (quasiment tous liés à la famille régnante de leur royaume), ces
aristocrates sont de plus en plus concurrencés par la classe des « gentilshommes » (shi)
dont les membres, issus de branches secondaires des lignages nobles, occupent
traditionnellement des fonctions administratives et militaires de second rang. C'est parmi eux
que se recrutent désormais les principaux serviteurs du souverain[66]. Il s'agit d'un groupe de
spécialistes du savoir ou des armes, donc à même d'assumer les charges qui leur sont
attribuées. Leurs motivations sont diverses : sens du devoir envers le souverain et le bien
public ou bien appât du gain, arrivisme et carriérisme, car le service de l'État est alors le
moyen le plus efficace et le plus rapide pour s'enrichir et s'élever socialement. Désormais
dépendants de la seule volonté du roi (car leur charge procède du pouvoir de celui-ci), ils se
distinguent par leurs capacités et non plus par leur hérédité[67]. Cela aboutit à l'époque
impériale à la constitution d'une élite de fonctionnaires lettrés spécifique de la Chine
(justement désignée par le terme de shi dont le sens a progressivement évolué), qui tire son
prestige du service de l'État où elle fait la preuve de ses talents intellectuels et jouit d'une
autorité morale sur le reste de la société.

La classe politique lettrée est à l'origine d'une production littéraire abondante qui contient
des conseils sur le bon gouvernement, les réformes à appliquer, aussi bien dans le domaine
de la fiscalité que de l'économie, ou encore l'organisation et l'art militaire qui sont une
préoccupation majeure. C'est le cas de tous les grands penseurs de la période qui seront
abordés plus loin, dont les écrits sont d'abord à finalité politique. Des écrits politiques sont
également associés au nom d'un ministre prestigieux sans qu'on sache s'il les a réellement
écrits. Parmi les figures fameuses de ce type d'écrivains-hommes politiques (supposés), on
compte Li Kui, ministre de Wei à la fin du ve siècle, Shen Buhai qui officie à Han un demi-
siècle plus tard[68], Wu Qi à Wei puis Chu au début du ive siècle et surtout Shang Yang,
ministre de Qin au milieu du ive siècle, à qui sont attribuées les principales réformes qui ont
fait de cet État la plus grande puissance de la Chine, bien qu'il soit probable qu'il ne soit pas à
l'origine de toutes celles-ci[69],[39]. Lui-même originaire de la petite principauté de Wey, il sert
Wei avant d'être obligé de le fuir et se réfugie à Qin où il assiste le souverain Xiao pendant
plusieurs années, avant d'être exécuté à la suite des manigances de ses rivaux après la mort
du prince qui le protégeait.

Instabilité et stratégies des conseillers politiques

Cette période se caractérise par une grande instabilité du personnel politique. À la différence
du souverain qu'ils veulent élever et qu'ils érigent en autorité symbolique, la fonction plus
active des conseillers les expose aux aléas politiques, et nombreux sont ceux à connaître une
fin malheureuse, emportant également leur lignée avec eux suivant les pratiques pénales du
temps. On comprend donc le contexte de luttes âpres pour gagner les faveurs des
monarques qui s'est installé à cette période. Les hauts serviteurs de l'État sont souvent des
déracinés à la loyauté fluctuante, qui se déplacent de royaume en royaume à la recherche
d'un souverain acceptant de les employer, ce qui constitue un véritable « marché des
talents » politiques où les cours se concurrencent[70]. Ils préparent des plans d'action souvent
fondés sur la ruse et la violence, qu'ils proposent à celui qui voudra bien les écouter. Cela
confère une relative autonomie à ces hommes politiques, ce qui est une source de méfiance
pour les rois qui les accueillent, leur loyauté ne leur étant pas acquise.

« Si j'avais eu la piété filiale d'un Zeng Cen, je n'aurais


pas abandonné mes vieux parents et n'aurais pu
servir mon pays ; si j'avais eu la loyauté d'un Wei
Sheng, je n'aurais pas su mentir et n'aurais pu servir
mon pays ; si j'avais eu la probité d'un Poyi, je n'aurais
pas cherché à usurper le bien d'autrui et n'aurais pu
servir mon pays (...). La loyauté et la rectitude sont
des qualités qui valent pour soi-même et non pour les
autres. Elles préservent l'intégrité morale mais ne
permettent nullement de s'élever ni de s'accroître. »

Le plaidoyer amoral du sophiste Su Qin, d'après le


Livre de l'école des stratèges (Zonghenjia shu)[71].

Certains d'entre eux (appelés shui, quelque chose comme « sophistes » ou « rhétoriciens »)
se sont spécialisés dans l'art du langage, de la persuasion et donc de la ruse, de la duplicité
et de la tromperie[72]. Leurs procédés ont été relatés dans des traités du début de l'époque
impériale, ceux de l'« école de la diplomatie », comme le Zhanguoce (Stratagèmes des
Royaumes combattants), listant des anecdotes sans doute peu fiables historiquement, mais
traduisant l'état d'esprit de la vie politique et diplomatique de l'époque des Royaumes
combattants[73].

Quelle que soit leur origine, les proches conseillers du roi profitent de leur statut pour
amasser des fortunes considérables. Ils peuvent constituer de véritables cours autour d'eux,
attirant des petits gentilshommes lettrés qui deviennent leurs clients et serviteurs. Le
prestige d'un ministre se mesure à l'ampleur et à la qualité de sa clientèle[74]. C'est bien
souvent sous les auspices des hauts dignitaires que se développent les courants de pensée
de la période des Royaumes combattants, leurs cours étant des lieux de débats intenses. La
richesse de ces personnages se mesure également à la taille des tombes de plus en plus
vastes et richement dotées qu'ils se font construire[75]. La menace que représentent les
puissants dignitaires pour le pouvoir central n'a en fin de compte jamais été totalement
éliminée, et c'est l'opposition des descendants des grandes familles des Royaumes
combattants qui entraîne la chute de l'empire Qin[76].

Les nouveaux cadres du pouvoir

Les réformes mises en place dans plusieurs des principaux États durant la période des Zhou
de l'Est contribuent à la constitution de véritables entités politiques centralisées. Ce
mouvement de réformes commence dès la période des Printemps et Automnes, où il y a déjà
des figures marquantes comme Zi Chan à Zheng et Guan Zhong à Qi. Au cœur de la période
des Royaumes combattants, le mouvement bénéficie du succès des idées légistes[77], qui
sont appliquées le plus strictement à Qin sous l'impulsion de Shang Yang, Fan Sui et Li Si.
Telles qu'elles ont été mises en évidence, notamment par L. Vandermeersch[78], les réformes
se concentrent sur quelques points principaux visant à bouleverser l'ordre ancien remontant
à la période des Zhou de l'Ouest :

de nouvelles divisions administratives sous le contrôle direct de l’État se substituent aux


anciens « fiefs » des clans aristocratiques ;

les agents de l'État sont recrutés en fonction de leurs mérites et non plus de leur
appartenance à un groupe familial influent ;

la société rurale est réorganisée autour de familles regroupées formant des unités
économiques et militaires disposant de leurs propres terres ;

des lois qui s'appliquent le plus souvent à tous visent à instaurer l'ordre en châtiant
durement les délits et en récompensant les agissements conformes aux directives de
l’État.

L'application de ces réformes connaît des fortunes diverses, mais elles contribuent à une
importante recomposition des institutions et de la société.

Structures et personnel administratifs

Dans les détails, l'administration territoriale n'est pas homogène dans les différents
royaumes et les réformes les éloignant des formes traditionnelles d'organisation politique
ont été plus ou moins poussées selon les pays. L'unité de base est généralement le
« district » ou « canton » (xian) qui apparaît à Chu durant la période des Printemps et
Automnes. C'est à l'origine un territoire conquis attribué à des membres de la noblesse de
façon héréditaire, leur permettant de se constituer une base locale de puissance. Avec le
temps, le gouvernement central prend l'habitude de conserver ces circonscriptions et de s'en
servir pour attribuer des fiefs non héréditaires à ses serviteurs des couches basses de la
noblesse, de façon à éviter la constitution de pouvoirs locaux tels qu'il en existait auparavant.
Les réformes de Shang Yang à Qin ont pour effet d'étendre le modèle du district aux
territoires plus anciens. Cette unité devient progressivement la circonscription de base de la
Chine, ce qu'elle est encore aujourd'hui. Les districts sont regroupés dans des unités plus
vastes, les « commanderies » (jun). Ces circonscriptions disposent généralement d'un
gouverneur civil et d'un gouverneur militaire et, au niveau local, des administrateurs servent
de relais entre la population et l’État[79].

Les agents du pouvoir sont de plus en plus recrutés en fonction de leurs mérites, suivant une
volonté mise en avant en particulier par Shen Buhai alors qu'il était ministre à Han dans le
troisième quart du ive siècle av. J.-C. Les archéologues ont découvert dans une tombe de
Shuihudi (Qin) un extrait des codes et des lois prescrivant les tâches prioritaires d'un
fonctionnaire ainsi que les pratiques à observer (tenue des documents officiels, inspections,
enquêtes, interrogatoires) et un texte qui décrit le fonctionnaire idéal (obéissance à la
hiérarchie, loyauté au pouvoir, impartialité, etc.)[60]. On cherche ainsi à façonner l'image du
serviteur idéal de l'État qui délaisse les solidarités lignagères et locales. Les moyens pour
contrôler ces agents de l'État et pour s'assurer de leur compétence et de leur loyauté sont
mis en place : les actes administratifs doivent être authentifiés suivant des principes stricts,
les administrateurs doivent rendre des comptes tous les ans et, d'une manière générale, les
fonctionnaires sont rétribués suivant leurs mérites. Ils peuvent être révoqués en cas
d'incompétence[80]. Se constitue ainsi un appareil bureaucratique au service de l’État, de plus
en plus élaboré et contrôlé par le pouvoir central[81].

Fiscalité et lois

« Unifier les châtiments, c'est faire en sorte qu'ils ne


comportent aucune distinction de rang. Depuis les
ministres jusqu'aux dignitaires et simples sujets,
quiconque désobéit aux décrets royaux, enfreint les
interdits du pays ou jette le désordre dans les
institutions est condamné à mort sans rémission. La
peine n'est pas réduite même si le crime est précédé
d'actes méritoires, la loi est appliquée même si la
faute a été précédée d'un comportement
exemplaire. »

L'absence de distinctions devant la loi au cœur de la


pensée légiste, dans le Livre du prince Shang (Shang
Yang)[82].
Les réformes territoriales sont mises en œuvre parallèlement à l'instauration d'un nouveau
système de taxation reposant sur la paysannerie et les terres qu'elle cultive. La capitation (fu)
de Qin pèse ainsi sur les maisonnées en fonction du nombre d'adultes mâles, ce qui suppose
le recensement des personnes et aussi probablement celui de la superficie de terres dont
elles disposent. Des textes retrouvés dans une tombe de Baoshan à Chu attestent ainsi du
fait que l'exactitude des recensements est un des soucis majeurs de l’État central[83].

Les relations des paysans avec le pouvoir sont ainsi réorganisées, créant de nouveaux
rapports entre eux et le pouvoir, écartant les aristocrates locaux, qui auparavant encadraient
les travaux ruraux, et plus largement les groupes familiaux, grâce à l'autorité de leur
lignage[79]. Les communautés familiales paysannes sont également organisées en groupes
qui ont à assumer une responsabilité collective : la faute d'un seul peut rejaillir sur tout le
groupe, ce qui incite à la surveillance collective et à la délation. Ces principes d'encadrement
s'alignent sur ceux des unités militaires constituées sur la même base locale[84].

Un dernier ensemble de modifications révèle bien à quel point l'autorité étatique se


consolide. Il s'agit des modifications des corpus de lois dont le but est de renforcer la
centralisation du pouvoir étatique, lui permettant d'exercer un contrôle plus fort sur la
société. La mise par écrit des lois, déjà entamée à la période précédente, se poursuit et se
renforce, avec comme conséquence l'élimination des coutumes et la suppression de la
justice rendue par les grands lignages nobles[85]. Ces textes ont pour objectif principal la
sécurité publique. Les efforts législatifs de Li Kui à Wei et de Shang Yang à Qin semblent être
allés dans ce sens. L'exercice de la justice doit être conduit par les fonctionnaires de façon
rigoureuse, et les textes relatifs à des procès retrouvés dans une tombe de Baoshan (Chu)
montrent que les jugements ne sont rendus qu'après des enquêtes poussées, et que certains
cas complexes peuvent faire l'objet de nouveaux procès[86]. Des peines progressives sont
prévues en fonction de la gravité du délit : amendes, travail forcé, châtiments corporels, mise
à mort. En contrepartie de cet ensemble de peines, des honneurs et des dons (en or, terres,
titres, etc.) récompensent les plus méritants, notamment ceux qui se distinguent au combat
ou dénoncent les méfaits d'autres personnes[87].

Une période guerrière

L'expression « Royaumes combattants » ne s'explique pas seulement par les conflits


guerriers qui se succèdent durant la période des ve et iiie siècles chinois. Elle fait aussi
référence à l'évolution rapide et profonde des techniques et des pratiques militaires, qui
entraînent des bouleversements affectant non seulement la structure des États, mais aussi
celle de la société dans son ensemble et les modes de pensée, à tel point qu'on a pu parler
d’« États organisés pour la guerre »[88] et d'une « militarisation de la société »[89]. Les
informations concernant ces guerres sont avant tout transmises par des récits de combats
et des vies de généraux exemplaires ainsi que des traités militaires, et aussi des trouvailles
archéologiques d'équipements militaires[88].

Les évolutions de l'armement et des systèmes défensifs

Plusieurs innovations dans l'armement entraînent une modification des techniques de


combat au cours de la période, qui bouleversent le déroulement des combats[90],[88].
Auparavant, les armes principales étaient les chars de guerre conduits par des nobles et la
lance, la hallebarde, l'arc rétroflexe utilisés par les fantassins appuyant les premiers. Un
changement technique majeur dans l'armement des Royaumes combattants est l'apparition
de l'arbalète[91]. Largement plus puissante que l'arc, elle projette des carreaux qui peuvent
transpercer des armures solides et atteindre des cibles lointaines, ce qui en fait l'arme la plus
destructrice du champ de bataille. Des arbalètes plus grandes sont montées sur roues pour
les sièges. La prépondérance du combat au corps à corps entraîne la diffusion des épées,
généralement en bronze (parfois en fer après le ive siècle), qui s'allongent au fil du temps,
passant de 40 à 70 centimètres en moyenne pour devenir plus maniables[92]. Les fantassins
sont protégés par des armures en cuir sur la majeure partie de la période, mais à la fin se
développent casques et cuirasses en fer, plus résistants[93]. La charrerie est supplantée par la
cavalerie montée qui se développe sans doute sous l'influence des peuples cavaliers de la
steppe : Zhao crée sa cavalerie sur le modèle des nomades du nord au contact desquels il se
trouve. Leur technique de tir à l'arc au galop, leur tunique et leur pantalon sont également
adoptés. Bien souvent, on leur achète les chevaux de combat[94],[90],[93],[95]. C
Épée en bronze.

Quatre épées en bronze, Chengdu, Musée provincial du Sichuan.


Lames de ge (hallebardes) en bronze.

Représentation hypothétique d'une arbalète montée sur roues, servant pour les sièges.

Les dispositifs défensifs connaissent également de nombreuses améliorations au cours de


la période[96],[97],[98]. C'est alors que sont érigées les premières grandes murailles en terre
damée, qui servent surtout à protéger les royaumes les uns des autres (et non à repousser
les attaques de peuples des steppes) et se situent souvent à l'intérieur des territoires, pas
uniquement aux frontières. Elles défendent avant tout les points stratégiques, notamment les
points de passage comme les passes, les rivières, où sont positionnées des garnisons
permanentes résidant dans des forts, ainsi que des tours de garde. Les premiers systèmes
de murailles destinés à repousser des Barbares des steppes du nord sont construits à partir
de la fin du ive siècle, quand ces peuples se font plus agressifs face aux États septentrionaux
(Yan, Zhao et Qin). Ils sont à l'origine de la première « Grande Muraille » frontalière, érigée
sous l'empire Qin[99]. Face à ces systèmes de défense, les techniques de poliorcétique sont
simples : on tente de franchir les fortifications adverses en creusant des tunnels, ou en les
escaladant au moyen de grandes échelles[100].
La domination de l'infanterie et l'explosion des effectifs

Soldats de l'armée en terre cuite du tombeau de Qin Shi Huangdi, équipés de façon similaire aux troupes de la fin des
Royaumes combattants.

L'organisation des armées connaît de grands bouleversements qui découlent des évolutions
de l'armement[96],[101]. Alors qu'à la période des Printemps et Automnes, l'arme principale
étaient les chars de guerre conduits par la noblesse traditionnelle, désormais l'infanterie la
supplante en importance dans le déroulement des batailles, en particulier des grandes
batailles. Le gros des troupes est constitué de paysans, véritable « chair à canon » si l'on en
juge par la mortalité élevée lors des combats. Les méthodes de mobilisation varient. Un
système incitatif de recrutement par versement de primes ou attribution d'exemption
d'impôts semble avoir d'abord été utilisée. Par la suite, Qin instaure au ive siècle le premier
système de recrutement obligatoire, équivalent à une corvée due à l'État, selon une
organisation quasi militaire de la société avec des unités de combat constitués sur une base
familiale et locale (ce qui est censé favoriser la cohésion des troupes)[102].

Ces unités sont commandées par des officiers (issus de la classe des gentilshommes, shi)
chargés d'orienter leurs mouvements suivant les ordres des stratèges plutôt que de
combattre à proprement parler. Les soldats de Qin reçoivent une récompense pour chaque
tête d'ennemi rapportée et ce type d'accomplissement leur permet de monter en grade selon
une échelle de statuts honorifiques qui se traduit en avantages pour toute leur famille. Les
Royaumes combattants ont aussi mis en place des troupes d'élites sélectionnées puis
entraînées, qui constituent les gardes spéciales des généraux et disposent de privilèges
(soldes élevées, exemptions de taxes et de corvées pour leurs domaines)[103]. Le Xunzi décrit
les troupes d'élites de Wei, dont les soldats portent de lourdes armures, disposent d'arbalètes
et de hallebardes.
La place centrale de l'infanterie et les évolutions de son armement vont de pair avec la forte
augmentation des effectifs des armées. Alors qu'elles étaient constituées au maximum de
30 000 soldats à la fin de la période des Printemps et Automnes, les armées mobilisées par
les Royaumes combattants comptent des centaines de milliers d'hommes. Les chiffres de
soldats en armes et surtout ceux des morts à l'issue d'une bataille que donnent les sources
anciennes ne sont pas toujours fiables, mais démontrent au moins que la tendance à la
croissance des effectifs est bien réelle. Ainsi, les infanteries des royaumes les plus puissants
(Qin, Qi et Chu) sont évaluées à environ 1 million d'hommes, en incluant les troupes de
garnison et celles chargées de travaux et de logistique. Les troupes effectivement mobilisées
en campagne atteignent les 100 000 soldats au début de la période, bien plus à la fin : les
textes anciens font état de 400 000 soldats de Zhao morts à la bataille de Changping[104].

Le stratège militaire et la pensée stratégique

À ces différentes évolutions correspond un bouleversement profond des valeurs guerrières.


Auparavant le combat était pour les nobles l'occasion de prouver leur bravoure et leur sens
moral, il s'apparentait à un acte rituel ou à une ordalie dans laquelle les dieux décidaient du
vainqueur[96]. Désormais, les combats impliquent des armées plus nombreuses, reposant sur
la piétaille. La violence monte en puissance, car le but est la destruction de l'adversaire. Dans
ces conditions, ce n'est plus important de respecter des règles éthiques au combat ou de se
référer aux présages divins avant de mener la bataille. La période des Royaumes
combattants valorise la figure du stratège militaire qui recherche la victoire la plus complète
et la plus efficace pour anéantir l'adversaire par tous les moyens. C'est pour cette raison que
parmi les grands personnages consacrés par l'historiographie traditionnelle de cette période
figurent de nombreux généraux (jiang ou jiang jun), tels que Wu Qi, Tian Ji, Bai Qi et Wang
Jian, ou même des conseillers militaires ne dirigeant pas les troupes effectivement comme
Sun Bin[38]. Parfois les généraux se succèdent au sein d'une même famille, comme les Meng
à Qin (Meng Ao, Meng Wu et Meng Tian)[105].

De nombreux traités militaires ont été rédigés au cours de cette période[106]. Le plus célèbre
de nos jours est L'Art de la guerre de Sun Zi[107], l'autre traité militaire majeur de la période qui
nous soit parvenu est celui de Sun Bin, retrouvé dans une tombe en 1972[108]. Ces écrits
mettent en exergue la figure du chef militaire idéal, qui sait préparer ses troupes de façon
optimale, reconnaissant les moments idéaux pour lancer l'offensive décisive. Concrètement,
ces traités abordent divers sujets comme le choix des soldats, les formations de combat, les
différents types d'attaques, l'organisation des défenses, l'espionnage, etc. Le but est
l'efficacité et les plus longs développements concernent la préparation des combats plutôt
que leur déroulement. Les écrits stratégiques ont une dimension spirituelle, car il s'agit avant
tout d'être supérieur en esprit à son adversaire, cette supériorité ne pouvant que se
concrétiser par la victoire. La victoire à coût minimum voire sans combat est considérée
comme l'idéal, suivant le précepte du « non-agir » (wuwei), base de la pensée stratégique
chinoise[109]. Ces écrits relèvent à proprement parler d'un authentique courant de pensée,
l'« école des stratèges » qui use de concepts similaires à ceux des autres écoles de pensée
de l'époque (yin et yang, Cinq phases, dao) et emprunte des idées au légisme ou au
confucianisme.

La réflexion sur la place du fait militaire dans la société ne concerne pas que cette école,
mais aussi d'autres penseurs comme Xunzi, ou les légistes qui recherchent les conditions
favorables à la constitution d'une puissante armée, ou même les moïstes qui par esprit
pacifique réfléchissent sur les techniques de poliorcétique pour défendre les places
assiégées. Des lois militaires et des textes sur la façon d'administrer l'armée et d'organiser
sa discipline existent également[110]. Au fur et à mesure que les conflits deviennent plus
meurtriers et destructeurs, et que les valeurs guerrières d'antan s' évanouissent, et à rebours
de ces évolutions, se développe dans certains de ces discours philosophiques un idéal de
guerre juste, par ses finalités mais aussi par sa mise en œuvre, qui doit faire en sorte d'éviter
les carnages inutiles[111].

La guerre et les mutations politiques et sociales

Les bouleversements que subissent les pratiques militaires accompagnent les évolutions
des sociétés des Royaumes combattants à cette période. La guerre devient essentielle du
fait du changement d'échelle : non seulement les effectifs mobilisés sont considérables —
les fronts lors des grandes batailles peuvent s'étendre sur des dizaines de kilomètres de long
—, mais, de plus, les campagnes peuvent désormais s'étaler sur plus d'une année et non plus
seulement une saison comme auparavant[112]. Les liens entre construction étatique et guerre
sont discutés : il est souvent reconnu que la guerre est un facteur important dans la
dynamique de bureaucratisation des États de cette période, en premier lieu à Qin, même s'il
convient d'admettre que la relation n'est pas à sens unique et que le renforcement des
souverainetés et des États explique les rivalités et la régularité des conflits, ainsi que le fait
que les guerres deviennent « totales »[113].

Les États doivent en effet renforcer leur organisation et disposer de plus grands moyens
financiers pour assurer l'équipement, l'entretien et la logistique de ces troupes. La conduite
de la guerre devient leur priorité essentielle et mobilise une quantité considérable de leurs
ressources et de leurs énergies ainsi que le travail théorique de leurs penseurs[114]. Les
gouvernants prennent pleinement conscience du fait que la puissance économique — avant
tout la richesse agricole — est essentielle s'ils veulent acquérir la supériorité militaire. Les
problématiques économiques n'en deviennent que plus importantes à leurs yeux[115].
Plus largement, les évolutions militaires accompagnent les recompositions sociales[116].
Elles consacrent la déchéance de l'ancienne noblesse et de ses valeurs rituelles et morales
face aux nécessités de l'efficacité au combat et de la victoire à tout prix. Elles bénéficient
dans une certaine mesure aux paysans qui dépendaient auparavant des nobles et deviennent
les premiers producteurs, contribuables et combattants pour le compte de l'État[117]. Mais
d'un autre côté, le coût humain à payer par ces mêmes paysans pour satisfaire les ambitions
des hommes de pouvoir est très lourd, puisqu'ils deviennent de simples pions sacrifiés dans
des combats souvent très meurtriers, les vaincus étant parfois tous passés au fil de
l'épée[118].

Une période d'expansion économique et de


recompositions sociales

Indépendamment des cercles du pouvoir et des élites, la période des Royaumes combattants
voit des changements importants affecter l'ensemble de l'économie et de la société. Une
partie de ces évolutions est sans doute liée au rôle croissant de la guerre et à la
centralisation étatique. Cela a au moins une incidence sur les nombreux progrès techniques
qui soutiennent la croissance économique et sur les améliorations de la productivité de
l'agriculture et de l'artisanat, sources de revenus pour l'État[119]. Cette période est aussi
marquée par une forte croissance démographique qui a des conséquences aussi bien dans
le monde rural que dans le monde urbain.

L'agriculture et le monde rural

Vue d'une partie du système d'irrigation de Dujiangyan dans le bassin du Sichuan, construit au iiie siècle av. J.-C. par
des ingénieurs du Qin et qui a continué à être développé depuis.
La production agricole de la Chine de la période des Zhou orientaux repose avant tout sur les
céréales, dont la répartition géographique se présente en gros comme suit : le bassin du
Fleuve Jaune est une zone de culture du millet, de l'orge et du blé, tandis que plus au sud,
dans le bassin du Yangzi, le riz domine aux côtés du millet[120]. La principale culture
spéculative de l'époque semble être celle du mûrier dans le cadre de l'élevage de vers à
soie[121].

L'agriculture connaît un essor sous l'influence de plusieurs facteurs dans lesquels les
dirigeants des États ont joué un rôle incitatif[115]. La progression des défrichements a permis
l'exploitation de nouvelles terres. D'autres ont été gagnées par le drainage et l'assèchement
de zones humides. Ensuite, plusieurs grands projets d'aménagements hydrauliques
permettent d'étendre les périmètres irrigués. Certains ingénieurs sont passés à la postérité
grâce aux grandes réalisations qu'ils ont mises au point dans le cadre de grands projets
publics : les douze canaux de la région de Ye, près de Handan (Hebei actuel) creusés par
Ximen Bao ; le système d'irrigation de Dujiangyan sur la Min (Sichuan) conçu par Li Bing ; le
canal construit par le fils de ce dernier, Zheng Guo, reliant les rivières Luo et Jing, deux
affluents de la Wei. C'est la région de cette rivière, située dans le royaume de Qin, qui
bénéficie de la plus forte croissance agricole (et donc démographique) avec la région de
Chengdu, dans l'État de Shu puis Qin après sa conquête. En dehors des frontières de Qin, la
région du cours inférieur du Fleuve Jaune possède également une agriculture prospère
(notamment à Wei et à Qi). Mais ces grands aménagements ne sont sans doute pas les
facteurs les plus déterminants de l'essor agricole de la période. Les systèmes d'irrigation
semblent plutôt secondaires, et leur construction et leur fonctionnement peuvent
généralement se réaliser à l'échelle des communautés locales[122].

Il y a d'autres facteurs de croissance de la production agricole : les progrès techniques


améliorant l'outillage en agriculture, les défrichements et les grands travaux d'irrigation,
notamment la diffusion des outils comprenant des pièces en métal, d'abord du bronze puis
de plus en plus du fer (têtes de houes, bêches, faucilles, socs d'araires, haches, etc.),
remplacent l'outillage à base de bois et de pierre en usage depuis le Néolithique, tandis que
l'araire tiré par des bœufs prend plus d'importance[123]. Cette période voit aussi les débuts de
l'agronomie, qui fait l'objet d'ouvrages expliquant le calendrier et les techniques agricoles
(avec des rotations de culture permettant parfois de récolter une céréale de printemps et une
céréale d'automne la même année), le drainage, les types de sols, etc.[124]. L'usage d'engrais
est également vanté par certains ouvrages[125]. La diffusion des innovations techniques est
cependant lente et semble se limiter à certaines régions, surtout aux élites et donc aux
grandes exploitations.
Cet essor agricole s'accompagne d'un bouleversement de la société rurale qui est lui aussi
très influencé par les volontés des gouvernements. Les régions les plus prospères
deviennent de grands espaces de cultures continus, dont peuplement se densifie. Il en
résulte la création de nouveaux villages et de nouvelles circonscriptions, donc de nouveaux
espaces contribuant à l'impôt, peuplés par des paysans ne dépendant pas des anciens
lignages nobles, qui dominent traditionnellement les vieilles zones de culture[126]. Avec le
déclin de l'ancienne noblesse, les paysans dépendent désormais directement de l'État qui
renforce son contrôle sur leurs communautés, ce qui se traduit à Qin par un encadrement de
type militaire. L'administration cherche à recenser la population rurale, à l'organiser en
groupes hiérarchisés, à la surveiller et à la fixer sur une portion de terre, tout en permettant
l'achat et la vente de terres à la différence de ce qui se faisait précédemment[127]. Les
gouvernants encouragent ainsi la petite propriété paysanne. Suivant une vision utilitariste,
Shang Yang veut constituer une nouvelle paysannerie indépendante, contribuant à la richesse
de l'État, accomplissant des corvées et combattant dans l'armée[128]. En effet, les penseurs
de cette période estiment que la production agricole est la seule activité réellement créatrice
de richesse[129]. C'est donc sur les paysans qu'est censée reposer la puissance économique
et militaire des royaumes chinois. Pour autant, tous les paysans ne bénéficient pas d'un
accès stable à la propriété, loin de là : les inégalités rurales sont très fortes, des grandes
propriétés en dominant d'autres plus petites, tandis que beaucoup de paysans endettés
perdent leurs terres et sont parfois réduits en esclavage. Un grand nombre d'ouvriers
agricoles vit donc dans la précarité, certains devant migrer pour travailler en ville[130].

L'artisanat

Ciseaux en bronze provenant de Majia (Xindu, Chengdu), Musée provincial du Sichuan.


Deux épées en bronze et une épée en fer, exemples des productions de l'artisanat métallurgique de la période des
Royaumes combattants.

Les activités artisanales sortent progressivement des cadres traditionnels de l'économie


dirigée par les palais des rois et des grandes maisons nobles[131]. Se développe alors un
artisanat privé très diversifié qui profite de l'essor des grandes villes et des échanges. Les
ateliers dépendant des pouvoirs royaux sont néanmoins les mieux connus. D'après les textes
littéraires et juridiques, ils sont encadrés par des fonctionnaires choisis parmi les
spécialistes du métier concerné, qui ont apparemment une fonction de formateurs. Les
unités de base de la production sont des équipes regroupant des artisans. Ceux d'entre eux
qui sont les plus spécialisés ou réputés font l'objet des convoitises des rois qui cherchent à
les attirer dans leurs ateliers. Une partie des artisans des palais sont des esclaves, souvent
des prisonniers de guerre. Les découvertes archéologiques donnent des informations sur les
productions courantes et les productions de luxe. Les objets de qualité portent souvent le
nom, le statut et la ville d'origine de l'artisan les ayant réalisés ou ayant dirigé leur confection.
Les espaces artisanaux découverts lors des fouilles de certaines villes sont couramment
situés près des espaces palatiaux, comme si leur localisation reflétait leur soumission à
l'autorité politique ; c'est ainsi le cas des ateliers de Qufu, capitale de Lu, où sont réalisés des
objets en bronze, fer, céramique et os[132].

Le secteur artisanal le mieux connu est la production métallurgique. Il évolue beaucoup à


partir de la dernière phase de la période des Printemps et Automnes. C'est alors
qu'apparaissent les premiers exemples de production de masse, bien connus grâce aux
fouilles effectuées dans les ruines de la fonderie de Houma dans l'État de Jin[133]. Les
fondeurs du iiie siècle av. J.-C. emploient des équipes de plus de 200 hommes[134]. Les
artisans chinois sont alors parvenus à une excellente maîtrise de la technique de fonderie du
métal avec moulage standardisé. La production et l'utilisation d'un nombre croissant d'outils
en métal accélère le développement des activités économiques, que ce soit l'agriculture,
l'artisanat, la construction, l'extraction minière ou même le commerce par les échanges dont
ils font l'objet. Ceci explique sans doute aussi dans une large mesure l'avance matérielle et
technique dont dispose la civilisation chinoise à partir de cette période par rapport aux autres
civilisations[135]. L'activité métallurgique est à l'origine de la richesse de plusieurs familles de
grands entrepreneurs.

Durant la période des Royaumes combattants, la grande mutation technique est le


développement de la sidérurgie, en particulier avec la découverte de la fusion du fer. Il s'agit
d'une révolution technologique, car, auparavant, seul le fer forgé était connu, obtenu par un
martelage laborieux d'une loupe obtenue au bas fourneau. La fusion du fer, alors obtenue par
fusion dans des fours dédiés (il s'agit de fours proches du cubilot), de loupes de bas
fourneaux, donne naissance à un matériau nouveau, la fonte. On constate en effet
l'apparition d'objets en fonte sur les sites archéologiques dès le ve siècle av. J.-C.[136]
(essentiellement des outils agricoles et des armes, mais aussi de la vaisselle, le bronze
restant cependant courant[137],[138]). L'adoption de la fonte par les Chinois et la découverte de
ses avantages vingt siècles avant les Européens induisent toute une dynamique de progrès
divers : la fonte blanche, cassante, est convertie en fonte malléable à partir du iiie siècle[139]
et les fours sont améliorés jusqu'à devenir, pendant la dynastie Han, au ier siècle av. J.-C., des
hauts fourneaux capables de fondre directement le minerai[134].

Les échanges et la monnaie

Alors que durant les périodes précédentes le commerce concerne avant tout des produits de
luxe destinés aux élites, les échanges portent maintenant de plus en plus sur des produits de
consommation courante : les étoffes, les peaux, le cuir, le bois, le sel, ou même les
céréales[140]. Ceci est dû au développement de l'agriculture et de l'artisanat, ainsi qu'à la
croissance démographique. D'où l'émergence d'une classe marchande de plus en plus riche
qui contribue à enrichir l'État par les taxes qui frappent les marchandises, taxes parfois
prélevées dans des marchés officiels contrôlés par le pouvoir politique. Les membres les
plus puissants de la classe marchande, dirigeant des expéditions commerciales très
importantes, sont aussi plus influents que par le passé, puisque certains d'entre eux
obtiennent des charges importantes dans les cours royales. L'exemple le plus illustre est
celui de Lü Buwei, premier ministre de Qin et régent du royaume pendant la minorité de Ying
Zheng[49]. Comme lui, les marchands ont une influence croissante sur la pensée politique et
scientifique de leur temps, même s'ils ne sont pas toujours bien considérés, notamment par
les confucéens qui affichent souvent un mépris prononcé à l'égard de ceux qui vivent du
commerce. L'essor des échanges et l'usage de plus en plus répandu de la monnaie amènent
de nombreux penseurs de l'époque à développer des théories économiques. Ils élaborent des
concepts rappelant ceux de profit voire de marché prenant en compte les mécanismes de
celui-ci (en particulier dans le Guanzi). Ces réflexions se nourrissent des débats sur
l'intervention de l’État dans les activités économiques, notamment par le biais de la
taxation[141].
Dao, objets en forme de couteau servant de moyen de paiement, provenant du Yan.

La croissance des échanges bénéficie des progrès techniques de la période, par exemple
avec le développement des moyens de transport plus performants au iiie siècle grâce au
perfectionnement de l'attelage et des roues à rayons[142].

Différents moyens de paiement sont employés depuis la période précédente, et de nouveaux


sont développés sous les Royaumes combattants. Les autorités émettrices ne sont pas
forcément des États, qui n'exercent pas de monopole sur la frappe de la monnaie. Souvent
les monnaies semblent émises par des villes, c'est-à-dire probablement par leurs marchands.
Quatre types d'objets en métal (bronze ou fer) servent de monnaie, répartis dans des aires
géographiques pouvant se chevaucher. Le plus ancien est le bu, en forme de bêches, utilisé
dans les trois royaumes issus de Jin et ceux de la Plaine centrale où ils s'étaient développés
précédemment, ainsi que dans des régions voisines. À Qi, Yan et Zhao (donc au nord-est)
circulent les dao, en forme de couteau. Au sud, à Chu et dans les régions voisines, on utilise
des yibi, en forme de cauris, et parfois des plaques en or de forme carrée ou ronde. Les
premières pièces de monnaie circulaires percées en leur centre circulent à Zhou, Zhao et
surtout à Qin (banliang). Cette forme s'impose à l'époque impériale (les « sapèques »).
Plusieurs de ces monnaies disposent d'un trou permettant d'en attacher plusieurs par un fil
pour former des « ligatures », forme sous laquelle les sapèques circulent couramment par la
suite. Enfin, les textes réglementaires de Qin du milieu du iiie siècle indiquent que des
rouleaux de tissu (bu) servent de monnaie, autre pratique courante aux périodes suivantes de
l'histoire chinoise[143]. La place de ces monnaies dans l'économie des Royaumes
combattants reste à déterminer : elles semblent servir surtout dans la sphère du pouvoir, que
ce soit pour la rétribution de dignitaires et fonctionnaires ou le versement des impôts par les
sujets, ainsi que dans les pratiques funéraires puisqu'il s'en trouve parmi les offrandes dans
des tombes. Même si la monnaie sert de plus en plus dans les échanges courants (surtout à
partir du ive siècle), l'économie n'est donc pas pour autant monétisée[144].

Les échanges des royaumes chinois avec les peuples voisins se développent au cours des
ive – iiie siècles[145]. Cela profite avant tout aux États périphériques : Yan qui est en contact
avec la Mandchourie et la Corée ; Zhao et Qin avec les peuples des steppes du nord-ouest et
par là vers l'Asie centrale et même l'Inde ; Chu vers les régions méridionales de la Chine
actuelle. Ces contacts commerciaux vont de pair avec des conflits militaires qui portent en
germe les futures expéditions lointaines des empires Qin et Han[146].

Le développement des villes

Plans schématiques de Handan (Hebei) et Linzi (Shandong), capitales des royaumes de Zhao et de Qi, exemples de
« villes doubles » de l'époque finale des Royaumes combattants.

La période des Royaumes combattants voit les villes se développer : l'importance du


phénomène est bien connue grâce aux textes et surtout aux fouilles archéologiques récentes
de nombreux sites urbains. Cela concerne en premier lieu des capitales des différents
royaumes, qui connaissent un essor grâce à leur statut politique et la volonté des chefs
d'État. Les États changent souvent de capitale au cours des ive et iiie siècles, construisent
des villes nouvelles et les planifient en fonction de leurs réformes politiques[147]. Ainsi, au
cours de la période de grandes réformes de l'État de Qin sous le ministère de Shang Yang, sa
capitale se déplace de Lingtong à Xianyang. En cela il imite Han, Wei et Zhao, qui avaient fait
de même durant les décennies précédentes. Après la conquête du Sichuan, Qin y fait
construire une capitale provinciale à Chengdu, sur le modèle de la capitale royale. Les autres
facteurs décisifs du développement des grandes villes sont la croissance démographique et
le développement économique qui, de grands centres politiques qu'elles étaient déjà, en font
de plus de grands centres commerciaux et artisanaux, surpassant de beaucoup les
modestes centres urbains qu'ils étaient à la période précédente[148],[149].

Tentative de reconstitution en maquette de la ville de Linzi, capitale du royaume de Qi. Premier plan : espaces
marchands et artisanaux. Au fond : le complexe palatial avec les pavillons sur terrasse.

Parmi les plus vastes cités figurent Handan à Zhao, Ying à Chu avant sa prise par Qin et
surtout Linzi, capitale de Qi, qui passe pour être la plus vaste. Elle aurait compté selon Sima
Qian plus de 70 000 foyers, soit peut-être 350 000 habitants. Les fouilles ont révélé que ses
murailles mesuraient de 28 à 38 mètres de large, prolongées par un large fossé. Elles
s'étendaient sur environ 16 kilomètres de long, enserrant un espace de plus de
1 600 hectares[150].

Les capitales sont traditionnellement dominées par un quartier palatial isolé par des
murailles internes et construit en hauteur sur une plateforme, montrant la prééminence du
pouvoir politique dans le paysage urbain, impression renforcée par l'érection de hautes
portes-tours (que). À partir de ce principe s'est développé un modèle de « ville double », dans
lequel était adjointe à l'ancienne enceinte urbaine une nouvelle abritant généralement le
centre du pouvoir organisé autour du palais, qui se différencie donc du reste de l'espace
urbain. Par exemple, à Linzi le secteur palatial s'étend sur environ 300 hectares regroupant le
palais royal et ses dépendances (dont des ateliers monétaires), tandis que le reste de la ville
recouvre environ 1 300 hectares[151]. Cette organisation est le reflet de la société urbaine qui
s'est alors mise en place, reposant sur une séparation plus nette entre ceux qui exercent des
fonctions politiques et ceux qui exercent des activités artisanales et commerciales, de statut
moins honorable. La partie dominée de la ville est aussi celle où se retrouvaient des gens
plus démunis ainsi que des troupes de brigands, représentant une menace potentielle pour la
partie dominante lors des périodes de tensions[152].
L'intérieur des villes est organisé autour de larges avenues menant aux portes de la ville, d'où
part une nébuleuse de ruelles étroites. Son organisation est mal connue car les fouilles se
sont avant tout concentrées sur les lieux de pouvoir. Quelques zones résidentielles,
commerciales et artisanales, ont néanmoins été mises au jour[151].

Lettres et pensée : une période fondatrice

Une période propice aux débats intellectuels

Confucius entouré de ses disciples en train d'étudier, selon une vision idéalisée de la période de la dynastie Ming
(1368-1644).

La période des Royaumes combattants voit l'épanouissement de nombreux courants de


pensée, dans le contexte de foisonnement intellectuel qui la caractérise. Plusieurs courants
se développent qui occupent une place déterminante dans l'histoire de la pensée chinoise.
D'autres courants restent sans postérité malgré un certain succès à leur naissance. Ces
courants ont en fait été caractérisés à l'époque Han, et les écrits documentant leur pensée
ont reçu une forme stable à cette même période. Mais ils reflètent bien la mise en place d'un
contexte intellectuel riche, souvent en rupture (plus ou moins assumée) avec l'héritage
antique et très marqué par les tendances politiques.

Maîtres et écrits philosophiques

La période des Royaumes combattants est marquée par des personnages ayant obtenu un
grand renom pour leurs réflexions, qui peuvent être qualifiés de « penseurs » ou de
« philosophes »[153]. Les textes chinois leur attribuent le statut de « maître » (zi, zhuzi), dont
les réflexions apparaissent dans des ouvrages synthétisant leur pensée et qui portent en
général leur nom (par exemple le Mozi de « Maître Mo », ou le Xunzi de « Maître Xun »). Sur la
forme, ces textes se présentent en général comme des restitutions de l'enseignement des
maîtres, souvent sous forme de conversations entre celui-ci et d'autres personnes, les
mettant en scène dans le rôle de protagoniste (cas de Confucius, Mencius, Mozi, Zhuangzi),
hommes de discours et non d'écrits puisqu'il est rare qu'un maître soit présenté comme
l'auteur de l'ouvrage censé contenir son enseignement[154]. Les Entretiens de Confucius sont
ainsi une compilation de préceptes et d'anecdotes courtes mettant en scène ce maître,
arrangés en une vingtaine de chapitres sans principe directeur[155]. Une évolution se produit
néanmoins dans les derniers temps de l'époque pré-impériale, avec l'apparition d'exposés
plus construits, le Xunzi et le Han Feizi, dont les chapitres se présentent sous la forme de
traités théoriques abordant des sujets précis, et dont l'essentiel du contenu philosophique
voire de sa mise par écrit peuvent être attribués à un auteur-penseur unique[156].

En fait plus que la pensée des maîtres, c'est celle de ces ouvrages qui est étudiée, vu qu'ils
sont pour la plupart des œuvres composites constituées à partir d'enseignements transmis
oralement, puis couchés par écrit par diverses personnes, et remaniés puis compilés jusqu'à
leur version stabilisée, sans auteur unique même s'ils peuvent effectivement être dominés
par la pensée d'un maître ou d'une école. Les versions connues sont pour la plupart le produit
d'un travail d'édition des lettrés de l'époque Han, en particulier l'équipe de Liu Xiang qui
dirigeait la bibliothèque impériale dans les dernières décennies su ier siècle av. J.-C. (mais le
Zhuangzi est édité plus tard, au début du ive siècle de notre ère). Ces érudits ont procédé à
des sélections, des classements et des compilations, afin d'éliminer parmi le large corpus de
documents sur lamelles de bambou et de bois qui circulait à leur époque ceux qui
revendiquaient refléter l'enseignement de ces maîtres mais dont l'origine et l'attribution leur
paraissaient douteuses[157]. Les travaux de la critique textuelle moderne, permettant de
resituer plus précisément dans le temps l'origine de ces textes et le cas échéant leurs
différentes phases de rédaction et de compilation, indiquent néanmoins que plusieurs d'entre
eux sont constitués en partie et même parfois en totalité de textes trop tardifs pour être
attribuables à l'époque du maître éponyme ou de ses disciples, s'écartant parfois de leur
pensée d'origine[158]. Un des cas extrêmes, le Guanzi, qui tire son nom d'un célèbre ministre
du vie siècle, est composé de chapitres hétéroclites datables du ve au ier siècle, et son
contenu ne doit probablement rien aux enseignements de ce maître[159] ; c'est « un bon
exemple du caractère protéiforme des ouvrages de la Chine ancienne : les chapitres y sont
anonymes et composés sur plusieurs générations ; ceux qui se sont perdus ont été
remplacés, d'autres complétés ; des commentaires ont parfois été interpolés au texte
original » (R. Graziani)[160]. Les biographies des penseurs des Royaumes combattants
rapportées sous les Han (avant tout dans les Mémoires historiques) sont utiles pour mieux
les connaître, quoi qu'elles comprennent dans plusieurs cas des invraisemblances, quand il
ne s'agit pas d'éléments légendaires comme pour Laozi, au point qu'il est autorisé de douter
que ce personnage ait existé[161].
De fait il reste difficile d'apprécier quel était le contenu et la façon dont étaient reçus ces
textes sous leurs premières formes circulant à l'époque des Royaumes combattants, même
si on parvient en général à replacer les idées d'un ouvrage ou du moins d'une partie de celui-
ci dans le contexte philosophique de l'époque pré-impériale et donc à dater assurément leur
origine de cette époque. Les découvertes archéologiques effectuées dans des tombes
anciennes peuvent apporter des éclairages sur les versions qui circulaient effectivement à la
période pré-impériale et l'évolution de la pensée à cette période : plusieurs textes datés de la
fin du ive siècle furent ainsi retrouvés dans un tombeau à Guodian dans le Hubei en 1993,
dont une version du Daodejing de Laozi attestant d'un état précédant celui de sa version
classique, cette dernière étant en revanche attestée parmi les textes trouvés dans une tombe
de Mawangdui, datée du début du iie siècle[162].

Des réflexions marquées par des finalités politiques

La relation des penseurs au pouvoir politique est essentielle dans le développement de leurs
réflexions[163]. Ils proviennent du milieu des gentilshommes lettrés, la catégorie des shi, qui
occupent des fonctions diverses au service du pouvoir : exercice de responsabilités dans
l'administration, célébration de rituels, expertise militaire, conseils politiques, tenue d'archives
et rédaction de textes officiels, etc. Leurs discours sont donc aussi un moyen d'obtenir des
fonctions élevées afin d'accomplir les réformes qu'ils conseillent. Ils bénéficient d'une
relative autonomie dans leurs mouvements : ils peuvent se déplacer de cour en cour, changer
d'allégeance ; l'exception est Zhuangzi qui n'a aucun intérêt pour les affaires politiques et
aurait refusé un poste important proposé par le roi du Chu[164]. De fait les rois et les
puissants politiques cherchent à attirer les lettrés les plus renommés pour bénéficier de leurs
conseils et asseoir leur prestige en se les attachant. Les « Quatre Seigneurs des Royaumes
combattants » entretiennent ainsi une cour de lettrés. Le roi Xuan du Qi, à la fin du ive siècle,
héberge quant à lui les plus grands esprits de son temps dans un pavillon de Linzi. Ce lieu,
propice au développement de débats, devait passer à la postérité sous le nom d'« Académie
Jixia »[165], et jouer un rôle majeur dans le développement de la pensée à cette époque. Plus
tard, le grand ministre Lü Buwei du Qin réunit à la cour les plus grands lettrés de son temps
pour leur faire rédiger les Printemps et Automnes de Lü Buwei ; il a pour ambition de
rassembler tous les savoirs dans cet ouvrage encyclopédique, achevé en 239[166].

Les idées de l'époque des Royaumes combattants sont donc formulées dans un contexte de
libération et d'intensification des débats politiques, dans lesquels les esprits les plus brillants
s'affrontent souvent directement, cherchant à montrer leur prééminence par la qualité de leur
discours et leur argumentation[167]. Le travail des penseurs est donc à finalité politique
d'abord, au service de l'État alors en pleine réorganisation et auquel ils proposent différentes
pistes de réformes politiques et sociales, préparant en quelque sorte l'unification politique en
proposant un idéal de souverain unique gouvernant un pays unifié et centralisé[168]. Ils
souhaitent contribuer au bien-être du peuple par leurs projets, notamment en contribuant à la
pacification de la société, à sa mise en ordre et à son amélioration morale[169]. Du reste toute
la littérature de la période à vocation historique et mythologique (voir plus bas) traduit ce
même arrière-plan politique[170].

La vie et la pensée des maîtres de ce temps reflètent aussi le contexte des rivalités
croissantes entre des royaumes de mieux en mieux organisés, des conflits de plus en plus
violents, du rejet de la tradition ancienne[171]. L'évolution des idées semble suivre celle de la
situation politique et l'histoire de la pensée des Royaumes combattants peut être divisée en
deux périodes. Selon A. Cheng, la première période est caractérisée par une pensée plus
spéculative (Zhuangzi, Mencius, logiciens) alors que la seconde, influencée par le
« durcissement des enjeux politiques » de la seconde moitié du ive siècle et du iiie siècle, est
moins idéaliste, plus tournée vers l'action, plus polémique aussi (Laozi, Xunzi et les
légistes)[172]. On retrouverait plus largement dans la Chine de cette période des tendances
similaires à celles qui se retrouvent dans d'autres régions du monde vers la même période
(Grèce, Inde, Israël), renvoyant au concept d'« Âge axial » développé par K. Jaspers : division
politique entre plusieurs États rivaux, générant une situation très conflictuelle, et mettant fin à
un ordre ancien (ici celui hérité des Zhou de l'Ouest) qui est questionné par les penseurs qui
cherchent à trouver une nouvelle « voie »[173].

Courants, traditions et concepts communs

Il n'y a pas vraiment de courant de pensée structuré disposant d'une identité forte à l'époque
des Royaumes combattants, hormis à la rigueur ceux des héritiers de Confucius et de Mozi
qui ont une tradition durable de maîtres formant des disciples devenant à leur tour maîtres.
L'époque pré-impériale ignore ce genre de classification : ces courants de pensée devaient
être distingués, classés et nommés par les lettrés de la période de la dynastie Han, à
commencer par Sima Tan (m. v. 110 av. J.-C.) qui distingua six principales « écoles » (jia) :
celles du yin et du yang, des lettrés (confucianistes), des moïstes (disciples de Mozi), des
nominalistes, des légistes et des taoïstes. Par la suite le grand travail de classification et
d'édition conduit par Liu Xiang affina ces regroupements. Cela donna lieu à des choix
masquant dans une certaine mesure la diversité des pensées de l'époque, par exemple celle
de Xun Zi, classé parmi les lettrés alors qu'il est également proche des idées légistes[174].

Les écrits de pensée font souvent référence à des traditions identiques, mêlant un héritage
de littérature ancienne, notamment les ouvrages de la cour royale des Zhou occidentaux
(Livre des documents, Livre des Odes, Livre des Mutations), citant des anecdotes historiques
issues des textes historiographiques et rapportant des faits édifiants et les
accomplissements de personnages antiques pris pour modèles ou contre-modèles[175], ainsi
que divers récits issus du fonds mythologique chinois[176]. Est mobilisé un ensemble de
concepts sinon identiques du moins proches, bien qu'un même terme puisse avoir un sens
différent selon l'auteur, ce qui les rend difficilement traduisibles[177] : li (« rite »), de (« vertu »),
dao (habituellement traduit par « voie »), qi (une sorte de « souffle »), ren (« humain » ou
« sens de l'humain »), yi (« juste » ou « sens du juste »), les idées de mutations et de rythmes
cycliques (avec notamment les concepts de yin et yang), etc., se retrouvent ainsi chez divers
auteurs.

Bien que les idées circulent entre les royaumes en même temps que les hommes qui les
formulent, certaines pensées semblent avoir été liées à un contexte géographique déterminé,
car les différences culturelles de la Chine des Royaumes combattants affleurent dans les
textes et certaines tendances semblent avoir une assise régionale bien précise (parce que le
maître en est originaire ou que c'est là que les études se développent). Les confucianistes
proviennent du Lu natal de Confucius et nombre de ses disciples, où la pensée ritualiste
conserve un ancrage fort ; ils ont une grande influence dans la Plaine centrale (à Wei et Qi).
Le légisme est plus représentatif des trois Jin et surtout de Qin. Les théories naturalistes,
voire occultes, notamment l'« école du yin et du yang », sont bien développées à Qi
(notamment autour de l'académie Jixia) et Yan. La pensée de Zhuangzi et du futur taoïsme
est manifestement marquée par les traditions de Chu où la réflexion sur la nature prend aussi
beaucoup de place[178].

Les principaux penseurs et leurs idées

C'est donc dans cette effervescence que naissent de nombreux courants de pensée, justifiant
l'expression des « Cent écoles » des Royaumes combattants qui fut formulée par la suite. Il
s'agit maintenant de voir quels sont les plus marquants, sans revenir sur ceux déjà évoqués
(l'« école des stratèges » et l'« école de la diplomatie »). Les limites entre toutes ces
mouvances ne sont pas nettes et leur catégorisation, entamée par les lettrés de la dynastie
Han, bien qu'utile, masque dans une certaine mesure leur diversité.

Confucius et ses héritiers

Le premier courant à mettre en avant est l'école de Confucius, amenée à jouer un rôle capital
dans l'histoire chinoise, où elle est souvent présentée comme l'« école des lettrés » (rujia).
Elle trouve son origine dans les enseignements de Confucius (version latinisée de Kong zi,
« maître Kong »), qui a vécu à la fin des Printemps et Automnes (551-479 selon la
tradition)[179]. Il n'a jamais écrit d'ouvrage qui aurait synthétisé sa pensée, même s'il passe
pour avoir remanié plusieurs des ouvrages « classiques ». Ce sont ses successeurs qui se
sont chargés de mettre en forme son enseignement, notamment dans le Lunyu (Entretiens de
Confucius), collection de préceptes et d'anecdotes qui a pris sa forme définitive au plus tard à
l'époque Han[180]. La pensée de Confucius se veut un retour à l'ordre ancien, à la tradition qu'il
voit se dégrader avec la déliquescence des cadres politiques traditionnels. L'homme est au
centre de sa philosophie et, pour lui, la société n'atteindra son harmonie que par l'étude, le
rétablissement et le respect des rites, la rectification des noms. Cela permettra de créer des
gens moralement irréprochables, compétents, qui mériteront d'occuper les charges
importantes dans les royaumes à la place des élites héréditaires.

« Or, parmi les meneurs d'hommes d'aujourd'hui, il


n'en est pas un qui ne prenne plaisir à massacrer. S'il
s'en trouvait un seul qui n'y prît pas plaisir, alors le
peuple de l'empire tout entier se retournerait et tous
les regards convergeraient sur lui. En vérité, s'il en
était ainsi, le peuple viendrait vers lui, pareil à l'eau
qui coule naturellement vers le bas. Et quand l'eau
tombe à flots, qui pourrait s'y opposer ? »

Gouverner par la bonté et s'attirer la faveur du peuple,


d'après Mencius[181].

L'enseignement de Confucius a connu le succès après sa mort, il a été repris par ses
disciples, notamment Zengzi qui a rédigé la Grande Étude (Daxue), ou encore Zi Si (petit-fils
de Confucius) a qui est attribué l'Invariable Milieu (Zhong Yong). Plusieurs textes retrouvés
dans une tombe de Guodian (Hubei) semblent relever de ses enseignements[182], qui ont
influencé ceux de son disciple Mencius (Mengzi, 380-289), l'un des penseurs majeurs du
confucianisme, en portant la réflexion sur la qualité des hommes, le sens de la droiture et la
sagesse. Mencius croit profondément en la bonté naturelle de l'homme, dont il faut éviter la
corruption en l'éduquant correctement afin que la société se développe harmonieusement. Si
un gouvernant se montre indigne moralement, le peuple a le droit de le destituer, car il a
perdu le Mandat du Ciel[183]. Le deuxième penseur majeur du confucianisme des Royaumes
combattants est Xunzi (310-230), qui peut être considéré comme le pendant pessimiste de
Mencius[184]. Rédacteur du premier ouvrage à ne pas être présenté sous la forme d'une
discussion ou d'aphorismes mais exprimant directement ses idées, Xunzi pense que la
nature humaine est mauvaise et propose de l'améliorer par l'éducation et les rites suivant la
tradition confucéenne, mais aussi par la loi, idée d'inspiration légiste. Les écrits de Xunzi ont
été particulièrement influents dans l'affirmation du confucianisme des premiers empires
chinois, tandis que ceux de Mencius ont été repris par la tradition néo-confucéenne qui l'a
emporté sous la dynastie Song. Intégrés dans les textes canoniques, ils contribuent par là à
la prééminence de ce courant de pensée dans le monde chinois.

Mozi et les moïstes

Mozi (460-400), vivant peu après Confucius et opposé à la pensée de ce dernier, est à
l'origine du courant moïste, qui est particulièrement influent durant la période pré-impériale
mais disparaît ensuite[185]. D'origine modeste, apparemment issu d'un milieu d'artisans, il
dénonce les inégalités sociales, pense que l'être humain est par nature égoïste, doit être en
conséquence discipliné et moralisé à travers des pratiques ascétiques dans une organisation
sociale autoritaire valorisant l'altruisme (et non par les rites). Mozi pense que le Ciel surveille
les humains en permanence, envoie des démons les châtier s'ils agissent mal. À sa suite, ses
disciples forment un mouvement organisé en groupes vivant dans la frugalité et
l'égalitarisme, professant le pacifisme, passés experts dans l'art de la poliorcétique pour
défendre les cités injustement attaquées. Certains moïstes s'illustrent également dans le
domaine de la logique.

L'école des noms

L'« école des formes et des noms » (ses penseurs sont considérés tantôt comme des
« sophistes », tantôt comme des « logiciens ») s'affirme dans les écrits moïstes et aussi dans
ceux de Hui Shi (380-305) et Gongsun Long (333-250). Elle propose une méditation sur le
langage, les noms et l'art du discours en général qui, une fois suffisamment maîtrisé,
permettrait de bien diriger la politique[186]. Le langage est important parce qu'il permet
d'édicter des normes, de convaincre et pas seulement de désigner les choses de façon vraie
ou fausse. Le Gongsun Longzi reste célèbre pour la vigueur de ses raisonnements ainsi que
les paradoxes qu'il formule (« cheval blanc n'est pas cheval »). Ce courant, important durant
les Royaumes combattants, n'a cependant pas de postérité.

Le légisme

« Les hommes ne sont gouvernables que parce qu'ils


ont des passions. Aussi un prince doit-il porter
attention aux convoitises de ses peuples. C'est sur
elles que repose toute l'efficacité du système des
peines et des récompenses : étant dans la nature des
hommes de convoiter les récompenses et de
redouter les châtiments, le prince peut espérer, grâce
à eux, canaliser les forces de ses sujets. »

Gouverner par les peines et les récompenses, d'après


Han Feizi[187].

L'« école des lois », ou légisme, représente le courant de pensée le plus orienté pratiquement
et théoriquement vers la réflexion politique[188]. Il est le seul à compter parmi ses
représentants les plus fameux des ministres importants, tels que Li Kui, Shen Buhai ou Shang
Yang[189]. L'œuvre considérée comme fondatrice du légisme par les penseurs qui s'en
réclament, le Guanzi, est attribuée à Guan Zhong, célèbre ministre du Qi durant la période des
Printemps et Automnes, bien qu'elle soit vraisemblablement le résultat d'une compilation
beaucoup plus tardive de sources diverses datant de la période des Royaumes
combattants[159]. Quant à l'œuvre maîtresse de ce courant, elle a été rédigée par Han Feizi,
issu de la noblesse du Han et disciple de Xunzi ayant adopté certaines conceptions proches
du taoïsme[190]. Les légistes partent d’une analyse de la société telle qu'elle est et proposent
la manière la plus efficace de la gouverner par un renforcement des institutions politiques qui
doivent s'imposer à toute la société. L'instrument essentiel en est la « loi » (fa), qui doit
s'appliquer à tous sans distinction, pour permettre à l’ordre de régner et au royaume de
gagner en puissance. Le système s'appuie sur des méthodes autoritaires, notamment la
crainte inspirée par les peines infligées aux personnes ne respectant pas la loi et sur les
récompenses escomptées par ceux qui agissent de leur mieux pour le compte de l'État. Le
légisme est souvent lié à l'ascension du royaume du Qin et à la fondation de l'empire, cet État
ayant eu pour premiers ministres deux représentants majeurs de ce courant, Shang Yang et
Li Si (un autre disciple de Xunzi).

Les précurseurs du taoïsme

« Laisse tomber la promotion des plus capables

Le peuple cessera de batailler

Ne valorise pas les choses rares

Le peuple cessera de dérober

N'exhibe pas ce qui porte à la convoitise

Le peuple aura l'esprit en paix

Ainsi se présente le gouvernement du Saint :

Faire le vide dans les esprits

Faire le plein dans les ventres

Affaiblir les volontés

Fortifier les os

Garder à tout jamais le peuple du savoir et du désir

F i t l li ' t i f i
Faire en sorte que les malins n'osent rien faire

Agir par le non-agir

Et tout sera dans l'ordre. »

Gouvernemer par le « non-agir » d'après le Laozi[191].

Deux penseurs majeurs de la période des Royaumes combattants ont été ultérieurement
rattachés au courant ensuite qualifié de « taoïsme », ou « école du dao », cela à partir de la
dynastie Han, quoi qu'ils ne forment pas à proprement parler une école de pensée à l'époque
pré-impériale. Ces penseurs n'ont pas le monopole du concept de dao (« voie »), même s'ils
lui accordent une place et un sens particulier qui les rapproche. Il s'agit de Laozi et de
Zhuangzi. Bien que la tradition veuille que le premier ait vécu avant le second, il se pourrait
que le Zhuangzi ait été rédigé avant le Laozi, au ive siècle[192]. Cet ouvrage, reconnu pour ses
grandes qualités littéraires, se divise en chapitres « internes » attribués à « Maître Zhuang » et
en chapitres « externes » et « mixtes » sans doute remaniés ou rédigés par d'autres. Penseur
couramment considéré comme anticonformiste, prônant un affranchissement des normes et
des limites en général, il privilégie la spontanéité et le rapport des humains avec la nature, se
détachant de la société pour faire corps avec le dao, la « voie » naturelle des choses. Le Laozi
ou Daodejing (« Livre de la voie et de la vertu »)[193] est une succession de poèmes qui font du
dao un principe cosmique supérieur à l'origine de l'Univers et auquel retournent toutes
choses. Y est préconisé le « non-agir » (wuwei), l'action sans intention, vue comme la
meilleure manière de gouverner la société en évitant de contrarier le dao. Avec le Laozi et le
Zhuangzi comme textes fondateurs intégrés dans un même courant de pensée, le taoïsme
devient progressivement une religion durant les premiers siècles de l'époque impériale, après
avoir intégré d'autres éléments religieux et cosmologiques (notamment ceux de l'école du yin
et du yang, et diverses pratiques magiques). Un autre grand texte de la tradition taoïste
postérieure, le Liezi, est attribué à un personnage qui aurait vécu vers la fin du
ve siècle av. J.-C. Néanmoins dans sa version classique cette œuvre composite est
manifestement surtout constituée de textes d'époques plus tardives, plusieurs étant repris
d'autres œuvres, aussi il est en général écarté des études sur la pensée des Royaumes
combattants[194].

Courants cosmologistes

La pensée de Laozi et surtout celle de Zhuangzi sont significatives du succès des tendances
naturalistes et cosmologistes qui s'imposent à la fin de la période des Royaumes
combattants[195]. Leurs principes dominent manifestement d'autres œuvres contemporaines
importantes comme le Guanzi, ouvrage abordant une grande variété de sujets, rédigé dans
les cercles de l'académie Jixia où l'on sent en particulier l'influence de Zou Yan, représentant
de l'« école du yin et du yang », mais aussi une approche renvoyant au courant Huanglao de
l'époque Han[196]. Les Printemps et Automnes de Lü Buwei[166], d'où ressortent probablement
les idées de Yang Zhu, sont également une source majeure sur ces courants cosmologistes.
Ces courants de pensée reposent sur plusieurs concepts censés expliquer l'organisation du
cosmos que l'on retrouve couramment à cette époque dans la pensée et la religion : le qi,
énergie vitale traversant tout l'univers et les êtres vivants, le yin et le yang (principe de deux
forces contraires liées et interdépendantes), les Cinq Phases. Toutes les parties de l'univers
sont conçues comme se modifiant sans cesse, se recomposant en de nouvelles positions
qu'il faut chercher à connaître voire à influencer (voir plus bas). Sur cette base, les penseurs
naturalistes et cosmologistes élaborent des réflexions ésotériques et des systèmes en vue
tant d'expliquer l'univers que d'en tirer des interprétations politiques concluantes. Ils
s'appuient aussi sur la divination traditionnelle qui est réinterprétée, avant tout celle du Livre
des mutations (Yijing)[197]. Certaines de ces réflexions se retrouvent plus tard dans le taoïsme
religieux.

Une période de création littéraire

Bien que soit souvent mis en avant le rôle crucial de la période des Royaumes combattants
dans le domaine de la pensée, cette époque voit plus largement une diversification des
usages de l'écriture que l'on retrouve dans toute la production littérature. Bien que des
incertitudes pèsent sur la datation de la plupart des textes attribués à l'époque pré-impériale
qui ont en général une histoire complexe et ont pour beaucoup fait l'objet d'un travail d'édition
sous la dynastie Han, les textes retrouvés dans les tombes de cette période ou le début de la
suivante, rédigés sur des supports en bronze, bois ou bambou, témoignent d'une évidente
diversité : inventaires d'offrandes pour les funérailles, rituels de divination, traités de
stratégie, de médecine, de mathématique, textes juridiques, chroniques, etc.[198]. Si les lettrés
rédigent et utilisent des ouvrages inspirés directement de ceux des périodes anciennes,
avant tout dans le domaine de l'histoire et des rituels, ils produisent aussi des textes neufs
(commentaires, récits, ouvrages lexicographiques), qui attestent d'une grande créativité.
Cette diversification des textes ne rend pas facile leur classification : souvent le même
ouvrage peut rentrer dans des catégories diverses, notamment quand il s'agit d'ouvrages
composites contenant des textes de natures très différentes, ou bien de commentaires qui
peuvent être rattachés à des courants de pensée. Les visées politiques sont en effet sous-
jacentes à une bonne partie de la production littéraire.

Textes historiques
La catégorie des textes historiographiques est apparemment l'une des plus populaires dans
les cercles lettrés des Royaumes combattants[199]. Parmi ce genre, se trouvent les écrits des
scribes des cours royales, qui rédigent des annales, sur le modèle des Annales des Printemps
et Automnes qui est en fait un texte annalistique du pays de Lu. Il semble que chaque cour
importante ait eu ses propres annales, mais la grande majorité de celles-ci a disparu. Les
annales du royaume de Wei ont été retrouvées dans une tombe en 279 apr. J.-C. écrites sur
du bambou, d'où leur surnom d'« Annales de Bambou » (Zhushu Jinian)[3]. Celles de Qin ont
été reprises pour fournir la base des Mémoires historiques (Shiji) de Sima Qian sous les
Han[2]. Il s'agit de textes rapportant en termes brefs des événements année par année dans
l'ordre chronologique.

Le Commentaire de Zuo (Zuo Zhuan), est un ouvrage à l'histoire débattue, désormais plutôt
considéré comme datant de l'époque pré-impériale, qui fut sous la dynastie Han considéré
comme un commentaire des Annales des Printemps et Automnes car il recouvre en gros la
même période, mais a un contenu plus vivant s'appuyant sur des récits et discours
remarquablement écrits, ayant servi de modèle pour les Mémoires historiques de Sima
Qian[200],[201]. Ce texte n'a pas simplement pour but de rapporter des faits anciens, mais a
avant tout une visée moralisatrice, les cas décrits ayant un rôle exemplaire[202]. Les Adages
des Royaumes (Guo Yu) sont l'autre grand ouvrage historique daté des Royaumes
combattants, constitué de discours et également à finalité morale, reflétant sans doute un
idéal confucéen[203],[204]. Autre traité politique (et aussi militaire) reposant sur des exemples
historiques daté de cette période : les Restes des documents des Zhou (Yi Zhou shu)[205].
Dans un style voisin, des compilations de textes relatifs à des stratagèmes politiques
provenant de l'histoire des Royaumes combattants et relevant de l'école de la diplomatie
circulaient sous la forme d'anecdotes ou récits édifiants, de correspondance, de dialogues ou
d'exposés d'arguments plus théoriques ; certains ont été retrouvés dans des tombes de
Mawangdui ou ont servi de base à la rédaction des Stratagèmes des Royaumes combattants
(Zhanguoce) sous les Han occidentaux[206]. Les textes des penseurs faisaient du reste
couramment usage d'anecdotes historiques pour illustrer leurs propos[175].

Textes rituels et techniques

Parmi d'autres textes visant à décrire le passé pour servir d'exemple aux générations
actuelles et futures, il convient de mentionner les Rites de Zhou (Zhouli ou Zhouguan),
description idéalisée de l'administration des Zhou occidentaux et des tâches exécutées par
ceux qui en sont membres (en particulier les rituels). Il daterait de la période des Royaumes
combattants même si par la suite la tradition chinoise qui l'a élevé au rang de classique en a
fait un document issu de la cour des premiers rois Zhou[207].
Les textes rituels faisaient également partie du corpus de textes de cette période, comme le
célèbre Livre des Mutations (ou Mutations des Zhou, Zhou Yi), ouvrage divinatoire dont les
origines remontent à la fin de la période des Zhou de l'Ouest et qui fait alors l'objet d'une
réinterprétation suivant les nouvelles conceptions religieuses[208]. Certains textes rituels
perdus ont été repris sous les Han dans les Rites et Cérémonies (Yili), un autre « classique »
qui a été attribué aux Zhou[209]. D'autres textes techniques, pour d'autres formes de divination
(astrologie, hémérologie) ou la médecine/exorcisme, devaient exister mais ne sont connus
avec certitude que pour les débuts de l'époque impériale (voir plus bas). Le Classique interne
de l'empereur Jaune (Huangdi Nei Jing), ouvrage fondamental de la médecine chinoise
traditionnelle, est vraisemblablement daté de la période des Han antérieurs et non pas de
celle des Royaumes combattants comme on l'a longtemps pensé[210].

Poésie

La poésie est illustrée par un chef-d'œuvre, qui demeure un classique de la littérature


chinoise, les Élégies de Chu (Chuci), ayant exercé une influence profonde sur la poésie de
l'époque Han (notamment dans le développement du genre du fu)[211]. Il s'agit d'un recueil de
poèmes rédigés par des auteurs venant du Chu, au premier rang desquels Qu Yuan (343-277)
et son disciple Song Yu. Ils ont été compilés aux iie et ier siècles av. J.-C. par Wang Yi et Liu
Xiang. Il s'agit pour la première fois d'une poésie exprimant les sentiments personnels de
l'auteur, comme dans le plus célèbre d’entre eux, la Tristesse due à l'éloignement (Lisao), récit
mélancolique probablement inspiré par l'exil que subit Qu Yuan, critiquant l'attitude injuste et
médisante des courtisans opposée à la pureté de l'esprit de l'auteur. Les Neuf Chants (Jiu ge)
dépeignent quant à eux les pratiques religieuses originales du Chu, teintées de chamanisme.
Le Xunzi (également compilé par Liu Xiang) comprend par ailleurs un chapitre avec des
poèmes.

Récits folkloriques et mythologiques

Certains textes recueillent une littérature orale dont la majeure partie est irrémédiablement
perdue. Ils ne sont pas nombreux mais témoignent du développement de plusieurs genres
littéraires majeurs des périodes postérieures. Ainsi, le long Livre des monts et des mers
(Shanhaijing), dont les premières parties au moins remontent à l'époque pré-impériale, est
une sorte de description de la géographie de la Chine antique sous un angle mythologique,
rapportant des récits merveilleux et des rituels liés aux lieux décrits à côté d'informations
plus terre-à-terre (distances, aspects, faune, flore)[212]. La Chronique du Fils du Ciel Mu (Mu
Tianzi Zhuan) racontant les exploits du roi Mu des Zhou, retrouvé en 281 de notre ère dans
une tombe et rédigé (au moins pour sa majeure partie) vers le milieu du ive siècle, peut être
considérée comme le premier roman chinois connu[213].
Ces textes illustrent l'existence d'un folklore chinois : une géographie mythique qui apparaît
alors (notamment dans les contrées occidentales comme les monts Kunlun) et l'histoire de
héros civilisateurs servant de modèles politiques (comme l'Empereur jaune et Yu le Grand),
qui sont souvent présents dans toutes les œuvres littéraires, notamment les textes
philosophiques et religieux, sans pour autant que la littérature mythologique ne jouisse d'une
popularité égale à celle de nature historiographique[176],[170].

Lexicographie

Enfin, il convient de mentionner le fait que la lexicographie chinoise s'élabore


progressivement à la fin de l'époque pré-impériale, mouvement qui aboutit dans le courant du
iiie siècle à la rédaction de l'Erya (Index des sens corrects). Il s'agit du premier traité de
lexicographie chinois classant des synonymes à partir de recensions des textes classiques
qui constituent le cursus des étudiants à cette époque. Il devait être inclus à l'époque
impériale parmi les textes canoniques[214].

Religion et philosophie de la nature

Le fait religieux dans la Chine ancienne tourne autour des relations entre les humains et le
monde des esprits (shen). Ces croyances s'expriment à travers divers rites de contact, les
plus importants étant traditionnellement le sacrifice accompagné de chants, de musiques, de
danses et la divination[215]. La période des Royaumes combattants voit s'affirmer diverses
évolutions profondes de la religiosité chinoise, qui s'articulent autour d'une nouvelle
perception de l'univers, de ses mécanismes, des rituels et autres usages suivis par les
humains en accord avec le cosmos. S'élabore alors ce qu'on peut caractériser comme un
système de « philosophie de la nature » dont les principes, d'une part, influencent des
pratiques qui seraient caractérisées comme « religieuses » d'un point de vue contemporain,
et d'autre part, commandent l'évolution de disciplines qui seraient vues comme
« scientifiques », telle la médecine[216]. En réalité, c'est tout un système disposant de sa
rationalité propre et qui, embrassant des domaines aussi variés que la divination,
l'hémérologie, l'astrologie, l'exorcisme, la médecine, etc., joue un rôle crucial dans le
développement des sciences chinoises, entendues ici dans un sens large[217].

Certains textes nous informant sur la religion des Royaumes combattants ont été par la suite
modifiés suivant des conceptions qui ont pu différer de celles de leurs premiers rédacteurs.
C'est particulièrement vrai pour les ouvrages canoniques des rituels des Zhou : remaniés par
les lettrés confucéens, ils ont été marqués par leur esprit profondément ritualiste qui est
pourtant loin d'être partagé par toutes les écoles de pensée pré-impériales. Mais le domaine
de la religion et de la philosophie naturelle est peut-être celui qui a le plus bénéficié des
récentes découvertes de textes et œuvres d'art dans les tombes antiques. Des textes
astrologiques, hémérologiques et médicaux, mettant en lumière des pratiques jusqu'alors
mal connues, ont permis d'approfondir nos connaissances relatives à ces sciences. C'est
notamment le cas de ceux exhumés à Shihuidi dans le Hubei et à Mawangdui dans le Hunan,
datés des débuts de la période impériale et donc proches de celle des Royaumes
combattants. Si les écrits techniques se sont considérablement développés sous les
Royaumes combattants, c'est à l'instigation non seulement des spécialistes de ces
différentes disciplines — scribes, spécialistes des rituels, devins, astrologues, « physiciens »
(médecins), chamans/sorciers — mais aussi des élites nobles et administratives comme en
témoigne la découverte de ces textes dans leurs tombes[218].

Le monde des esprits et la cosmologie

Esprits de la nature et des ancêtres

Les « divinités » des anciens Chinois, plutôt désignées comme étant des « esprits » (shen)
sont un ensemble hétéroclite peuplant toutes les parties de l'Univers[219]. Ils se trouvent un
peu partout sur la Terre : les cours d'eau, les montagnes, les points cardinaux, le sol, le grain,
les animaux, etc. ont un aspect sacré qui entraîne leur vénération sous les traits d'un esprit.
Les humains aussi pouvaient devenir des esprits à leur mort : c'est le cas des rois ou des
ministres sages ayant vécu dans un passé légendaire, comme Shennong le divin laboureur,
Huangdi l'Empereur jaune, ou encore Yu le Grand qui a permis la maîtrise des crues des
fleuves, considérés comme des modèles de sages et de dirigeants d'États en fonction des
préoccupations des lettrés de l'époque[176]. L'autre grande catégorie d'esprits humains
vénérés dans la Chine antique, ce sont les ancêtres familiaux qui, après leur mort, continuent
d'être associés aux destinées de leur famille, les conceptions religieuses chinoises ne
dressant pas de barrière infranchissable entre les vivants et les morts. La vénération des
fondateurs du lignage et des quatre ascendants du chef de famille actuel, qui dirige ce culte
en présence du reste de la famille, est au centre de ces conceptions religieuses. Enfin, le ciel
est également habité par une foule d'esprits, notamment les astres et on y trouve la
principale divinité de la Chine de la période des Zhou, le « Ciel » (Tian), ou « Seigneur du
Ciel », Tiandi.
Lamelles de bambous retrouvées à Guodian (Hubei) portant le texte cosmogonique « Le Grand Un (Tai Yi) donne
naissance à l'eau », v. 300 av. J.-C., musée provincial du Hubei.

Depuis l'époque des Shang et des Zhou, le culte des ancêtres est de loin le plus attesté par
les sources et semble primer chez les souverains et les élites. Il s'agit d'un moyen d'affirmer
la cohésion et le prestige des lignages — qui sont socialement centraux — autour de leurs
fondateurs. Mais les recompositions politiques et sociales à l'œuvre tout au long de la
période des Zhou de l'Est mettent cette centralité en question. Tout d'abord, la primauté des
ancêtres de la maison Zhou sur ceux des autres lignages est rejetée de la même manière que
leur autorité politique : les nouveaux lignages royaux mettent en place un culte des ancêtres
autonome magnifiant leurs propres ancêtres, quitte à élaborer une généalogie faisant
remonter le lignage à un ancêtre légendaire prestigieux choisi parmi les « sages » anciens ou
même les esprits de la nature. Les rois de Chu se disent ainsi descendants de Yi Yin, ministre
du fondateur de la dynastie Shang et même du « Grand Un » (Tai Yi), divinité céleste
suprême[220], qui apparaît par ailleurs dans un texte aux accents taoïsants retrouvé dans la
tombe de Guodian, qui en fait une divinité participant à la création du monde[221].

L'essor des États territoriaux et de leurs politiques de conquêtes incite aussi les royaumes à
mettre l'accent sur les cultes locaux aux divinités de la nature, en particulier ceux célébrés
aux autels dédiés au Sol. En pratiquant ces cultes, ils se relient symboliquement aux
territoires qu'ils ont soumis et même à leurs populations dont ces rituels impliquent la
participation[56]. Plus largement, la disparition de l'ancienne aristocratie au profit de nouveaux
lignages dédiés au service de l'État, qui ont plus intérêt à mettre en avant leurs mérites que
leurs ancêtres peu prestigieux, a dû jouer un rôle dans la perte de primauté du culte des
ancêtres. Celui-ci reste un élément important du culte, car les esprits des aïeux conservent
une place dans la religion, mais dans un cadre privé[220].

Une cosmologie corrélative

« Le ciel et la terre, et toutes choses, [ressemblent] au


corps d'un seul homme. C'est ce qu'on appelle la
grande communauté. Tous les nez, les oreilles, les
yeux, les bouches, et aussi bien les cinq céréales, le
chaud et le froid, forment ce qu'on appelle la multiple
diversité. La Nature emplit toutes choses et le Sage
les observe chacune selon son espèce. Il découvre
l'explication des formes que leur ont données le ciel
et la terre, comment naissent le tonnerre et la foudre,
les qualités intrinsèques du yin et du yang, et ce qui
rend paisible et harmonieuse la vie des hommes et
des bêtes. »

L'organisation harmonieuse du cosmos, selon un


passage des Printemps et Automnes de Lü Buwei
reflétant les idées naturalistes de l'école du yin et du
yang[222].

Ce n'est donc pas tant la composition du monde des esprits que son organisation qui connaît
de grands changements. La période des Royaumes combattants voit en effet l'élaboration
progressive d'une cosmologie spécifique, souvent qualifiée de « corrélative », qui apparaît
notamment dans les textes astrologiques et les calendriers de cette période ainsi que chez
les penseurs, en particulier ceux élaborant des théories naturalistes souvent très prisées
(comme l'école du yin et du yang) qui tentent de lui donner une cohérence (elle est formulée
clairement pour la première fois dans les Printemps et Automnes de Lü Buwei)[223],[195]. Les
phénomènes naturels et surnaturels sont désormais vus comme tous liés les uns aux autres
dans une cosmologie corrélative où tout est synchronisé, où ce qui s'observe dans le ciel et le
monde invisible des esprits renvoie à des événements dans le monde visible des humains.
C'est dans le cadre d'un univers perçu comme en perpétuel mouvement que se développent
et se redéfinissent sur le long terme plusieurs conceptions. La plus importante est sans
doute celle de qi, le « souffle » qui parcourt l'univers reliant les différents êtres entre eux, tout
en étant de plus en plus considéré comme déterminant pour la santé des individus. Il s'agit
donc d'une énergie animant les différentes parties des êtres vivants et qui les relie au reste
du cosmos[224].

Le Ciel devient une divinité totalisante autour de laquelle s'organisent des milliers d'esprits et,
vers la fin de la période pré-impériale, cette figure donne naissance au « Grand Un » (Tai Yi),
divinité astrale symbolisant le pôle céleste au centre du cosmos[225]. Les esprits ancestraux
ne sont dès lors plus vus que comme de simples intercesseurs, alors qu'ils avaient une
position centrale dans la destinée des humains aux périodes précédentes[226].

Il en résulte une redéfinition de l'univers qui fait évoluer la manière de percevoir l'espace et le
temps, les pratiques rituelles, la divination, mais aussi l'hygiène. Elle renvoie évidemment à
l'évolution politique de la période : de la même manière que le monde des esprits s'organise
autour d'une figure centrale unificatrice, le monde des humains doit s'organiser autour d'un
seul maître unificateur qui s'accorde avec l'ordre cosmique et le fait respecter[58]. À la fin des
Royaumes combattants et au début de l'époque impériale, cette vision aboutit à une synthèse
entre les idées confucianistes, légistes et taoïstes pour constituer un système de pensée
« absolutiste et unifié » (J. Lévi) centré sur l'État et l'empereur, « Fils du Ciel »[227].

Les rituels

Bouteille hu servant lors des rituels pour les offrandes de boissons fermentées, bronze avec décor incrusté curviligne
et animalier en cuivre rouge. Musée Cernuschi.

Le contact entre les humains et les esprits se noue d'abord grâce à divers rituels (li) décrits
dans différents ouvrages supposés issus de la cour des Zhou et d'autres royaumes de la
Plaine centrale (même si en fait seule une partie d'entre eux le sont réellement). Ceux qui
concernent les Rites de Zhou datent de la période des Royaumes combattants et sont
particulièrement instructifs sur les pratiques de cette époque. Ainsi, ils établissent une
typologie des rituels : les plus importants, qui servent de modèles aux autres, sont les « rites
fastes » (jili), à savoir les sacrifices ; viennent ensuite les « rites sinistres » (xiongli), rituels
funéraires du culte des ancêtres, puis les « rites de réception » (binli), à savoir les protocoles
des audiences et réceptions de visiteurs, les « rites militaires » (junli) pour tout ce qui
concerne ce qui se fait les armes à la main, soit la guerre, la chasse ou encore les concours
de tir à l'arc très importants dans l'idéal rituel. Il y a enfin les « rites joyeux » (jiali) pour les
événements heureux de la vie de famille (naissance, majorité, mariage, etc.)[228].
Ces rituels se pratiquent en de nombreuses occasions et dans différents lieux : en plein air
sur des autels dédiés aux esprits de la nature (le dieu du Sol en particulier), dans des temples
ou des résidences pour les ancêtres. Ils prennent différentes formes : sacrifices souvent
accompagnés de musiques et de chants, exorcismes. L'essentiel pour les personnes est de
déterminer l'esprit avec lequel on doit entrer en contact et quel rituel choisir, ainsi que le
moment opportun pour l'exécuter : il doit être correctement conduit en vue de l'harmonie
entre les hommes et le cosmos[229]. L'idéal ritualiste est notamment très présent dans les
réflexions des lettrés confucéens pour lesquels la transformation des rites d'actes
formalistes en attitudes spontanées permet de rendre les êtres humains meilleurs et de les
moraliser[230].

Si les personnes conduisant les rituels décrits ci-dessus ne peuvent pas vraiment être
considérées comme des « prêtres », parce que leur responsabilité religieuse découle souvent
d'une position sociale ou administrative spécifique, il existe malgré tout de véritables
spécialistes des rituels religieux : les « chamans » (wu). Ils sont surtout connus pour le Chu
où ils semblent avoir eu une grande importance. Certains passages des Chants de Chu,
notamment les Neuf Chants, évoquent ces spécialistes des rituels, hommes ou femmes,
entrant en contact avec les esprits par des transes s'exprimant par des chants et des
danses : leur tâche était d'accomplir des exorcismes, de guérir des malades, de faire tomber
la pluie ou encore d'entrer en contact avec les défunts. Les rituels magiques et chamaniques
de la Chine ancienne apparaissent également dans des textes issus des élites ayant des
affinités avec ces rituels plutôt populaires. Ces pratiques sont très durement critiquées par
les courants de pensée qui dominent la période des Royaumes combattants. Ils les jugent
inefficaces et ridicules. On peut cependant supposer qu'elles reflètent une religion populaire
qui ne partage pas les préoccupations des élites lettrées[231].

Les sciences des calendriers et des astres

La compréhension de l'univers, la bonne observation des rites et même de tous les actes de
la vie passent par différentes pratiques, en premier lieu celles qui permettent de constituer
une sorte de grille de lecture du cosmos, à savoir l'art de la réalisation et de l'interprétation
des calendriers, ou hémérologie, et l'art de l'interprétation des mouvements des astres ou
astrologie.

Ces deux disciplines ont en commun le fait que leurs spécialistes observent l'évolution de
l'espace et du temps pour y déceler l'organisation de l'univers et leurs évolutions à partir de
calculs complexes. L'observation des astres (et des phénomènes météorologiques au sens
large) est considérée comme importante pour déceler ce que peuvent être les évolutions de
l'univers, d'autant plus que les astres sont assimilés à des esprits : tout ce qui se passe dans
le ciel est relié à ce qui se passe sur terre. Plusieurs représentations de la structure du ciel
ont été trouvées dans des tombes, notamment des planches cosmiques (shi) servant pour
les calculs astrologiques et hémérologiques. Dans le courant du ive siècle, apparaît la
conception selon laquelle la voûte céleste est divisée en 28 « loges » ou « étapes » (xiu)
stellaires identifiées par les étoiles qu'on y trouve et qui ont un esprit tutélaire (comme les
constellations) ; la Lune passe dans chacune d'elles une nuit durant son cycle. Les
spécialistes d'astrologie et d'hémérologie observent alors les mouvements des astres pour
les interpréter en fonction de leur position dans le ciel à un moment précis ; les phénomènes
sortant de l'ordinaire (comètes, conjonctions des trajectoires de planètes habituellement
éloignées, etc.) sont les plus importants à étudier, car ils sont susceptibles d'annoncer des
événements majeurs[232].

Après ces observations et interprétations, sont élaborés des almanachs (rishu, « livres
journaliers ») présentant les jours fastes et les jours néfastes suivant les activités souhaitées,
notamment celles liées au culte. Il convient en effet de bien ordonner son temps, pour ne pas
bouleverser la bonne marche de l'univers. Certains exemplaires de ces almanachs ont été
retrouvés dans des tombes, le plus ancien étant celui écrit sur soie mis au jour dans une
tombe de Zidanku près de Changsha (une nouvelle fois à Chu). La présence d'un tel ouvrage
dans la dernière demeure d'un personnage de rang social élevé indique que les élites sont
très à l'écoute des astrologues et hémérologues[232].

La divination

D'autres pratiques divinatoires permettent d'établir un contact avec le monde des esprits et
servent à connaître l'opportunité d'un rituel ou d'une action et décision quelconques[233].

La forme traditionnelle de divination héritée des premières dynasties est la divination par les
écailles de tortue, chéloniomancie. Il s'agissait d'exposer une carapace de tortue à une
flamme provoquant les craquelures de ses écailles. Les formes de celles-ci étaient ensuite
interprétées en vue de répondre à une question posée au préalable aux esprits. Cette forme
traditionnelle de divination demeure importante, mais n'accompagne pas les évolutions de la
pensée cosmologique à la différence de l'autre forme majeure de divination, celle qui utilise
des bâtonnets d'achillée millefeuille, l'achilléomancie, documentée par le Livre des Mutations
(Yijing), dans sa forme ancienne les Mutations des Zhou (Zhouyi), manuel divinatoire qui a
aussi des aspects cosmologique et moral, développés notamment dans ses commentaires
qui commencent à être élaborés durant l'époque des Royaumes combattants et se fixent
sous les Han antérieurs. Le principe des mutations est progressivement associé à ceux du
yin et du yang et des Cinq Phases qui se stabilisent à l'époque impériale. La procédure
divinatoire, qui est explicitée par un passage du Yijing remontant au plus tard à l'époque des
Han, consiste dans ce cas à jeter des tiges d'achillée, dont la disposition est ensuite
observée afin de constituer après plusieurs jets des hexagrammes constitués de lignes
pleines (yang) ou brisées (yin) qu'il faut ensuite interpréter à l'aide du manuel divinatoire. À la
différence de la divination par les écailles de tortue qui donne une réponse sur la structure du
réel, celle par l'achillée donne une réponse sur les évolutions de cette structure, en observant
les mutations des hexagrammes au fil de jets successifs[197],[234].

Les pratiques divinatoires font cependant de plus en plus l'objet de critiques dans divers
textes de la période des Zhou de l'Est, qui se montrent sceptiques quant à l'utilité de solliciter
l'avis des esprits dans la conduite des affaires humaines. C'est aussi bien le cas de Sun Zi qui
rejette l'idée du recours aux esprits pour les décisions militaires, préférant s'en remettre au
renseignement humain, que Han Fei Zi pour les affaires gouvernementales, critiques que fait
aussi le Commentaire de Zuo dans lequel les devins sont tournés en dérision à plusieurs
reprises[235].

Médecine et culture de soi

Un des manuscrits médicaux retrouvés à Mawangdui, début de la période des Han antérieurs (première moitié du
iie siècle), témoignant des pratiques médicales du iiie siècle et donc de la fin des Royaumes combattants.

Dans le domaine de la médecine, il existe à l'époque pré-impériale plusieurs spécialistes : le


« chaman » pratiquant des exorcismes, le devin versé dans l'iatromancie (divination
médicale), une sorte de droguiste élaborant des remèdes, et surtout le yi, « physicien »
(parfois aussi wu yi, « chaman physicien », bien qu'il soit bien distinct du chaman). Ce dernier
tend à devenir le spécialiste par excellence de la science médicale qui se constitue sous les
Royaumes combattants[236].

Les remèdes de cette période mêlent exorcismes et magie, potions et autres pharmacopées.
Ces pratiques magico-médicales traditionnelles reposent sur l'idée que la maladie est causée
par des agents pathogènes, qui peuvent être des esprits malveillants. Elles sont combattues
par de nouveaux courants, qui se construisent autour d'une vision physiologique de la
maladie reposant sur le concept de qi. Suivant la cosmologie dominante, ce « souffle » lie
tous les éléments de l'Univers et traverse les corps vivants (conçus comme des
microcosmes reproduisant en miniature les éléments constituant l'Univers) pour les animer.
Sa mauvaise circulation serait la cause des maladies et l'art de guérir consiste donc à agir
sur lui. Ces idées se retrouvent notamment dans des manuscrits retrouvés à Mawangdui,
laissant entrevoir l'état d'avancement de la médecine vers la fin des Royaumes combattants
et les débuts de l'époque impériale, mais elles ont des antécédents dans des ouvrages
comme le Guanzi. Ces ouvrages préconisent une hygiène reposant sur des exercices
gymnastiques, une diététique, l'utilisation de drogues, la méditation et une sexualité agissant
sur la circulation du qi afin d'obtenir bonne santé et longévité. À l'époque impériale, cette
conception physiologique de la maladie débouche sur l'élaboration de l'acuponcture, non
attestée sous les Royaumes combattants. Se dessine donc une tendance à des pratiques
plus individualistes de culture de soi, supposées bénéficier tant physiquement que
moralement aux personnes qui les observent et visant plus à les prévenir de la maladie qu'à
les guérir[237].

Les croyances et pratiques funéraires


Gentilhomme chevauchant un dragon qui porte aussi une grue de bon augure. Un poisson les accompagne. Il s'agit
sans doute d'une représentation du voyage de l'âme du défunt vers l'au-delà. Encre sur soie, Zidanku (Changsha,
Hunan). Musée provincial du Hunan.

Des croyances mal connues

Les documents dont nous disposons à propos des croyances sur la mort et l'au-delà à la
période des Royaumes combattants ne nous informent pas suffisamment sur les
conceptions de l'époque. On peut avoir le sentiment qu'elles sont similaires à celles de
l'époque impériale qui, elles, sont bien connues. En réalité, il est très difficile de se faire une
idée exacte de ce en quoi elles consistaient aux ve – iiie siècles, car on ne dispose pas
d'informations claires[238]. Il faut admettre qu'il n'y avait pas de croyances unifiées. On
pensait que les corps des êtres vivants étaient animés durant leur vie par des forces
naturelles liées à tout le cosmos, une sorte d'« âme » désignée selon les textes par différents
termes aux sens apparemment fluctuants suivant les auteurs : hun, po, ou des termes au
sens encore plus vague comme shen qui désigne couramment un « esprit » et qi qui désigne
l'énergie vitale. À la mort, ces énergies vitales quittaient le corps et l'âme du défunt devait
accomplir un long voyage vers un au-delà situé souvent dans des contrées lointaines aux
confins du monde connu, pour rejoindre le monde des esprits.

Cette idée d'un voyage du souffle du défunt se retrouverait dans les peintures sur soie des
tombes de Zidanku et de Chenjia dashan représentant des personnages suivant des animaux
réels ou imaginaires (dragons, grues) qui auraient eu pour fonction de guider l'âme vers sa
demeure céleste[239]. Les rituels funéraires sur le lieu d'inhumation devaient permettre à
l'âme d'accomplir ce voyage, tandis que le culte dans le temple ancestral ne se célébrait
qu'au moment où le défunt avait pu intégrer le monde des esprits. Ne pas prendre soin des
âmes des morts faisait courir le risque d'être hanté par leurs spectres. Si le défunt est mort
prématurément avant d'avoir accompli sa destinée terrestre ou de façon violente, cela
entraîne aussi le risque de voir son spectre venir troubler les vivants. Il apparaît également
dans certains textes que le monde des morts s'organise rationnellement avec un ensemble
d'esprits-bureaucrates participant à une administration à l'image de celle d'ici-bas[240].

Les tombes et leur organisation

Les sépultures étaient généralement regroupées dans des cimetières, parfois dédiés à un
clan, notamment pour les familles royales et princières érigeant des tombes plus
somptueuses situées à l'écart des nécropoles communes[241]. De nombreux cimetières de
communautés locales ont été dégagés par les fouilles. Ils ont parfois été utilisés sur
plusieurs siècles. Les tombes y sont de même type et orientation. Des cimetières ont été
retrouvés sur les territoires de plusieurs des Royaumes combattants, mais Chu est
surreprésenté dans la documentation archéologique avec plusieurs milliers de tombes
connues. De ce fait, l'étude des sépultures de cette période repose largement sur les données
provenant de ce royaume. Malgré leur grande dispersion géographique, la plupart des
tombes de la période des Royaumes combattants ont un modèle similaire : celui de la tombe
à fosse, en forme de coffre. Leur forme et leur taille peuvent être très variables. Les tombes
des riches sont plus profondes, accessibles par des rampes et constituées de plusieurs
compartiments séparant le ou les cercueil(s) d'espaces où sont entreposées des offrandes.
Leur structure est réalisée en madriers séparant les différentes parties de la tombe et elles
sont entourées de couches d'argile et de charbon pour assurer leur étanchéité. Un tumulus
les surmontait couramment. Les tombes des plus pauvres, à l'inverse, sont petites, à
compartiment unique, avec peu voire pas d'offrandes et parfois aucun cercueil. Quelques
variantes apparaissent : des tombes dont la structure est constituée de briques creuses à la
place des grosses planches de bois, surtout dans le Henan occidental, et des tombes à
chambre souterraine, surtout à Qin[242].

Les différents compartiments de la tombe du marquis Yi de Zeng.

Les tombes les plus riches formaient un ensemble parfois complexe et richement doté. Les
cas les plus spectaculaires sont les complexes funéraires royaux comme celui des rois du
Zhongshan qui ont été décrits plus haut. La tombe princière la mieux connue est celle du
« marquis » Yi de Zeng, principauté dépendant de Chu, dégagée à Leigudun (district de
Zengdu, Hubei) et datée du début des Royaumes combattants (vers 430), donc encore très
proche des traditions des Printemps et Automnes. Elle a fourni depuis sa découverte en 1977
des informations inestimables sur cette période. Elle est divisée en compartiments qui sont
en fait de véritables salles formant une résidence post-mortem : espace rituel ou salle
d'audience avec son mobilier caractéristique (notamment un carillon), chambre funéraire
comportant le tombeau du marquis accompagné de huit femmes et d'un chien et une sorte
de gynécée où reposaient treize jeunes femmes (danseuses ou musiciennes ?) et un dernier
compartiment avec un arsenal d'environ 4 500 armes et des inventaires funéraires. Par la
suite, les riches tombes du pays de Chu reprennent ce modèle de résidence post-mortem,
comprenant parfois jusqu'à neuf compartiments. Les tombes riches des royaumes du Nord
sont moins bien connues et d'une manière générale la plupart des tombes princières ont été
pillées dans l'Antiquité[243],[244].

Mobilier et matériel funéraires

Les défunts du milieu des élites étaient placés dans des cercueils, en laque peinte pour les
plus puissants. Les objets placés dans les tombes pour les accompagner vers l'au-delà
pouvaient être très divers. Ils étaient classés dans différentes catégories, distinguant les
objets utilisés dans le monde des vivants et qui sont de plus en plus entreposés dans les
tombes pour accompagner les défunts après la mort (vases rituels ou profanes, instruments
de musique, armes et autres objets en bronze, etc.), de ceux qui étaient conçus
spécifiquement pour les tombes, les mingqi, qui connaissent un développement important
sous les Royaumes combattants[245]. Les premiers sont les mêmes objets que ceux
employés par les vivants dans leur vie quotidienne, tandis que les seconds ont des
caractéristiques propres dans leur fonction comme dans leur réalisation. Ainsi, un premier
type de mingqi est la céramique de qualité moyenne imitant l'apparence des bronzes rituels,
reprenant sa symbolique mais n'étant pas utilisée par les vivants[246]. Dans certains cas, ce
sont des vases en bronze de qualité inférieure à ceux servant les vivants qui sont réalisés.
Mais dans plusieurs tombes des élites les mingqi sont très élaborés[247].

Les figurines funéraires sont un autre type de mingqi. Elles se répandent au cours de la
période, peut-être en guise de substitution aux sacrifices humains qui accompagnent
l'enterrement des nobles et des princes mais tendent à se raréfier sous les Royaumes
combattants[248]. Elles sont en bois dans les tombes du Chu et en argile dans celles du Nord.
Dans les régions méridionales, il existe également une tradition de sculptures en bois
d'animaux hybrides. Appelées zhenmushou (« animal protecteur de tombes ») par les
chercheurs actuels en raison de leur rôle initial consistant apparemment à protéger les
défunts, ces sculptures tendent progressivement à remplir surtout une fonction
ornementale[249].
Poterie à but funéraire (mingqi) imitant la forme des vases rituels en bronze de type ding.

Figure gardienne de tombes (zhenmushou), portant des bois de cerf, pays de Chu, Birmingham
Museum of Arts.

Figurines funéraires en bois provenant du pays de Chu. Art Institute of Chicago.


Tout cela renforce l'impression que ce matériel funéraire sert, au moins dans les tombes les
plus riches, à fournir la tombe en objets servant au confort quotidien du défunt dans sa vie
après la mort. Les tombes sont devenues de véritables résidences dans lesquelles les
défunts doivent disposer de tout ce qui leur est nécessaire, de façon qu'ils ne reviennent pas
hanter les vivants[250].

Les réalisations artistiques

L'art de la période des Royaumes combattants est avant tout connu par les objets exhumés
dans les milliers de tombes de cette époque, mises au jour pour une bonne partie sur les
terres de l'ancien royaume méridional de Chu. Gardons à l'esprit qu'il s'agit d'un pays dont la
culture, certes, subit les influences des royaumes chinois « traditionnels » de la vallée du
Fleuve Jaune, mais conserve néanmoins de fortes originalités[26]. Parmi ces découvertes, la
sépulture du marquis Yi de Zeng qui date du début de la période des Royaumes combattants
(433) occupe une place centrale dans les histoires de l'art de l'époque, de par la quantité et
aussi la qualité des objets qui y ont été exhumés. Les réalisations artistiques connues des ve,
ive et iiie siècles av. J.-C. chinois sont donc pour la plupart destinées à accompagner le
défunt dans l'au-delà, même si elles n'ont pas forcément toutes été réalisées dans ce but et
peuvent donc être similaires à des objets conçus pour les vivants. Il s'agit en tout cas de
productions destinées aux élites sociales dont les tombes sont les plus richement pourvues,
accomplies par des artisans travaillant donc pour les élites liées au pouvoir politique.

Par rapport à la période des Printemps et Automnes, l'art des Royaumes combattants
connaît plusieurs évolutions importantes, aussi bien thématiques que techniques et
stylistiques[251]. Ainsi, les vases en bronze qui servaient auparavant essentiellement à des
fonctions rituelles perdent cette finalité et semblent en majorité destinés à des besoins
profanes. C'est une rupture majeure avec le millénaire précédent. Les objets sont aussi de
moins en moins décorés d'inscriptions ; une attention centrale est désormais portée à
l'iconographie, ce qui renouvelle l'art pictural avec le développement des scènes de récits de
combat et de rituels. Liée à cette mutation, la technique de l'incrustation sur métaux connaît
une popularité croissante. Toujours dans le domaine de la métallurgie, la technique de la cire
perdue est aussi employée, mais rarement. L'art de la laque connaît également une grande
vogue et les peintures sur soie les plus anciennes qui soient connues datent de cette
période.

Vases en bronze
Article connexe : Bronzes chinois.
La période des Royaumes combattants voit le déclin des vases rituels en bronze si courants
durant les siècles précédents. Ils semblent alors de plus en plus destinés à des besoins
profanes, même si certains servent toujours pour des rituels. Comme à la période
précédente, les formes les plus répandues restent les vases ding servant à la cuisson de la
viande et les gui pour les grains, ainsi que les vases hu pour les boissons fermentées.
Représentatifs de l'art de la période de transition entre les Printemps et Automnes et les
Royaumes combattants, les vases en bronze de la tombe du marquis Yi de Zeng sont
particulièrement impressionnants et ce à plusieurs titres. D'abord par leur quantité et leur
taille, puisque deux grands conteneurs à vin mesurent plus de 1 mètre de haut. Ensuite, la
décoration de certains d'entre eux est remarquable, d'autant plus qu'elle est originale : la
technique de la cire perdue a permis aux artisans de réaliser des décors de créatures et
autres motifs entrelacés, soudés au vase qu'ils ornent, qui lui est moulé suivant la pratique
traditionnelle. Mais l'évolution caractéristique de la période est la technique d'incrustation,
qui se développe en premier pour les vases en bronze sur lesquels elle devient très courante.
Elle fait appel à une grande variété de matériaux : cuivre, or, argent, pâte de verre, laque, ou
des pierres comme le jade, la malachite, la turquoise. Les incrustations sont réalisées à part
puis fixées dans le moule dans lequel le vase est fondu. Les décors ainsi confectionnés
représentent des récits de scènes religieuses (rituels sur des plates-formes, danses et
chants) ou guerrières (batailles, assauts de villes, chasses), parfois sur plusieurs registres.
D'autres incrustations consistent en des motifs abstraits, linéaires ou curvilignes. Les
artistes réalisant ces décors s'inspirent peut-être des motifs réalisés pour décorer des
tissus[252].
Flasque bian hu pour boissons fermentées, à décor incrusté en argent.

Vase rituel ding pour la cuisson des aliments, à décor incrusté en or et en argent.
Vase rituel ding, à décor curviligne incrusté en laque.

Vase rituel dui pour servir des grains, à décor en forme de dragons dont les incrustations ont
disparu.

Autres œuvres en métaux


Article connexe : Bronzes chinois.

Les techniques du moulage et de la cire perdue permettent la réalisation de divers objets en


métal complexes, dont les pièces peuvent parfois être réalisées à part puis accolées pour
constituer l'objet final, comme cela a déjà été vu pour certains vases en bronze[253]. Des
statuettes en bronze sont ainsi sculptées puis incorporées à des ensembles plus complexes,
comme celles qui servent d'assises aux poutres de bois supportant l'orchestre du marquis Yi
de Zeng. La qualité de leur exécution et la recherche du réalisme dans la représentation des
traits du visage en font des œuvres à part entière. D'autres pièces en bronze servent de
supports, notamment des pieds d'écran ou des supports de lampe[254]. Les peintures
d'animaux réels ou imaginaires côtoient celles d'êtres anthropomorphes. Les représentations
de dragons et autres êtres hybrides imaginaires sont marquées par la recherche de la
complexité dans la forme, l'attitude dynamique et l'ornementation.

Les artistes de la période des Royaumes combattants sont également passés maîtres dans
la réalisation de miroirs en bronze très finement exécutés, dont un millier d'exemplaires
environ ont été retrouvés, ce qui témoigne de leur succès[255]. Il existe divers types de miroirs
suivant la forme des motifs qui y sont gravés ou incrustés et se complexifient au cours du
temps : tracés rectilignes, trapézoïdaux, curvilignes, entrelacés, motifs floraux, animaux,
scènes de chasse, etc. Cela reflète en partie des traditions régionales.

Les objets en forme de crochet ou agrafes ayant une fonction ornementale sont d'autres
exemples de créations en bronze caractéristiques de cette période. Ils ont pu être portés sur
des vêtements ou bien servir à accrocher des effets personnels à l'intérieur des
habitations[256]. Leur forme et surtout leur décoration se complexifient au cours du temps et
certains sont remarquables par la qualité de leurs incrustations.

Enfin, les artisans des Royaumes combattants se sont illustrés dans la confection d'armes
d'apparat en bronze incrustées d'autres matières, avant tout des épées[257], et de cloches en
bronze caractéristiques de la Chine antique, évoquées plus bas.
Figure d'un félin bondissant (lion ou chat), bronze incrusté d'or et d'argent. British Museum.

Tigre et sanglier combattant, formant un cercle. Bronze incrusté d'or et d'argent. British
Museum.

Miroir en bronze décoré de motifs géométriques (en forme de T.L.V.) et floraux, gravés.
Agrafes/crochets ornementaux en bronze incrusté d'or et turquoise. Arthur M. Sackler Museum.

Éléments d'arbalète en bronze, en forme d'animal et décor incrusté d'or et d'argent de motifs
géométriques. British Museum.

Objets en jade

Disque percé bi à décor de petites spirales et orné sur ses côtés par deux dragons.
Le jade reste un matériau servant à réaliser de beaux objets prisés par les élites.
Extrêmement dur et dense, il faut une grande dextérité pour le travailler, mais les artistes ont
atteint à l'époque des Royaumes combattants un niveau de maîtrise élevé. Ils sont à même
de créer les objets les plus variées : ornements à fonction apotropaïque ou rituelle, manches
de dagues ou d'épées, parures diverses. Les disques percés bi en jade sont les plus
appréciés. Ils soulignent le prestige de leur propriétaire et constituent des présents de grande
valeur que s'échangent les élites, notamment les rois. Leur forme arrondie symboliserait le
Ciel. Ils sont ornés de petites spirales (guliwen)[258]. Comme toutes les réalisations
artistiques de l'époque, les objets en jade ont au fil du temps une ornementation de plus en
plus sophistiquée, avec par exemple des dragons au corps qui ondule[259].

Arts de la laque

Les laques deviennent de plus en plus populaires au cours de la période. Ce terme désigne
des objets (meubles dont des coffres, vaisselle, cercueils) recouverts de laque, une résine
appliquée en plusieurs couches afin de protéger les matériaux (bois mince, diverses fibres
végétales, toiles épaisses). Cet art est surtout connu grâce aux tombes de l'ancien royaume
de Chu qui semble avoir été le cadre privilégié de son développement. Toutefois, à la
différence des objets en bronze, ceux en laque sont acquis par des personnes de niveaux
sociaux bien plus diversifiés : ils se retrouvent aussi bien dans les tombes les plus richement
pourvues d'objets que dans celles en contenant moins, même si les pièces des tombes les
plus riches sont plus nombreuses et de meilleure qualité. Les décorations des objets en
laque du début de la période des Royaumes combattants, dont on a des exemples grâce aux
découvertes de la tombe du marquis Yi de Zeng, sont des incrustations peintes représentant
essentiellement des motifs curvilignes entrelacés et quelques scènes rituelles. Les
réalisations du ive siècle se diversifient : la palette des couleurs est plus large et celle des
motifs géométriques aussi qui sont plus complexes. Les scènes où apparaissent des
animaux ou des êtres humains sont d'une facture plus aboutie[260].

Arts de la soie
Détail d'une soierie brodée de Mashan, représentant des dragons entrelacés de motifs curvilignes.

Bien que seuls quelques exemplaires aient survécu aux injures du temps, les rares pièces de
soie décorées retrouvées dans des tombes datant de la période des Royaumes combattants
peuvent être aisément situées dans le développement d'un nouvel art pictural et le lien avec
les incrustations sur bronze et sur laque est évident. On a trouvé dans une tombe de Mashan
dans la province de Jiangling (Hubei) plusieurs exemplaires d'étoffes en soie : couvertures,
draps servant à envelopper le corps du défunt, vêtements. On a pu différencier plusieurs
types d'étoffes selon l'espacement des fils. Les motifs brodés sur plusieurs d'entre eux
représentent des animaux réels ou imaginaires qui jouxtent ou s'entrecroisent avec des
motifs géométriques, linéaires ou curvilignes[261].

Les plus anciennes peintures individuelles chinoises connues ont été réalisées sur de la soie
et datent de la période des Royaumes combattants. L'une d'elles dans la tombe de Mashan et
deux autres près de Changsha (à Chenjia dashan et Zidanku), également dans l'ancien
territoire du Chu. Elles sont monochromes et représentent des humains de profil, en présence
d'animaux dessinés à l'encre avec des traits fermes et des lignes courbes, comme c'est le
cas dans de nombreuses peintures des périodes suivantes prenant pour modèle les
peintures sur soie antiques. Celle de Zidanku représente un homme chevauchant un dragon,
abrité par un parasol, entouré d'oiseaux et d'un poisson, tandis que celle de Chenjia dashan
représente une femme qui suit un dragon et un oiseau. Bien que l'unité de style soit évidente,
la première est reconnue comme ayant une plus grande qualité esthétique que la seconde en
raison de sa disposition harmonieuse, la qualité du trait et le dynamisme du mouvement
qu'arrive à exprimer le peintre. Leur sens est débattu, mais il est probable qu'il ait un rapport
avec le destin des défunts dans l'au-delà[239].

Instruments de musique

La chambre centrale de la tombe du marquis Yi de Zeng à Leigudun comprenait un véritable


orchestre de 124 instruments. Il était probablement destiné à jouer de la musique rituelle. Cet
ensemble extraordinaire est constitué essentiellement d'instruments de percussion qui
dominent alors dans la musique chinoise (cloches, pierres sonores, tambours), mais
comprend aussi des instruments à vent (orgues à bouche, flûtes) et à cordes (luths, cithares
ayant de 5 à 25 cordes)[262].

L'élément le plus imposant de cet orchestre est le carillon, constitué de 64 cloches en bronze
(pesant plus de 2 500 kilogrammes en tout) suspendues sur trois niveaux, les plus grandes
cloches (mesurant jusqu'à 1 mètre de haut et pesant plus de 130 kilogrammes) se trouvant
en bas, les plus petites en haut. Elles ont pour la plupart une bouche à section en forme
d'amande, avec les extrémités pointues, ce qui permet de produire deux tons avec chacune
d'elles selon qu'elles sont frappées au milieu ou sur les côtés. Ce trait caractéristique des
cloches chinoises anciennes se perd apparemment après le ive siècle. Les cloches sont
classées en fonction des sons qu'elles produisaient, les plus petites situées en haut servant
peut-être de diapason[263],[262].
Vue générale du carillon.

Grandes cloches à bouche à section en amande suspendues en bas du carillon.

Petites cloches, de taille décroissante, suspendues en haut du carillon.


Détail d'une cloche à bouche à section en amande.

Cloche à bouche droite suspendue sur le bas du carillon.

La musique a un rôle important dans de nombreux rituels des cours royales et princières,
rituels accompagnés de danses. Des livres « classiques » traitent de cela : le Livre de la
musique (Yuejing) et le Livre des odes (Shijing). Pour de nombreux penseurs, notamment ceux
liés au confucianisme, la musique a même un rôle moral, au même titre que les autres
rituels[264].

Notes et références

1. Lewis 1999, p. 588-593 mémoires historiques, Traduits et


annotés par Édouard Chavannes, Paris,
2. (en) A. F. P. Hulsewé, « Shih chi », dans
1967-1969 (1re éd. 1895-1905) « En ligne
Loewe (dir.) 1993, p. 405-414 ; Kern 2010,
sur le site de l'Université du Québec à
p. 99-105. Traduction en français des
Chicoutimi. » (http://classiques.uqac.ca/
parties historiques : Se-ma Ts'ien, Les
classiques/chine_ancienne/chine_index1 15. Lewis 2007, p. 11-16
A.html)  [archive] Voir désormais
16. Li 1985, p. 16-36
l'édition complète, incluant aussi les
biographies, Sima Qian (trad. Chavannes 17. Li 1985, p. 139-153 ; Lewis 1999, p. 597

et Pimpaneau) 2015. 18. Li 1985, p. 59-77 ; Lewis 1999, p. 595-596

3. (en) D. S. Nivison, « Chu shi chi nien », 19. Li 1985, p. 126-138 ; Lewis 1999, p. 595
dans Loewe (dir.) 1993, p. 39-47.
20. C'est la proposition développée dans A.
Traduction en français par É. Biot dans
Reynaud, Une géohistoire, La Chine des
Journal Asiatique XII, 1841, pp. 537-578
Printemps et des Automnes, Paris, 2000,
« En ligne sur Gallica » (https://gallica.bn
pour la période précédente et qui semble
f.fr/ark:/12148/bpt6k93138h.image)  [ar
encore valable pour celle qui nous
chive] et Journal Asiatique XIII, 1842,
intéresse.
pp. 381-431 « En ligne sur Gallica. » (http
s://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k93139 21. Li 1985, p. 108-125 ; Lewis 1999, p. 594-
v.image)  [archive] 595

4. Nivison 1999, p. 745-746 22. Li 1985, p. 93-107

5. Wu 1999 ; Elisseeff 2008, p. 325-331 23. Li 1985, p. 222-239 ; Li 2013, p. 229-235

6. Voir par exemple les discussions dans 24. Bodde 1986, p. 30-52
Falkenhausen 2006, p. 382-394. 25. Li 1985, p. 154-169 ; Lewis 1999, p. 597.
7. Li 1985, p. 415-416 Voir aussi (en) J. S. Major et C. A. Cook
(dir.), Defining Chu, Image and Reality in
8. Li 1985, p. 434-435
Ancient China, Honolulu, 1999
9. Li 1985, p. 447-449
26. Elisseeff 2008, p. 56-57
10. O. Venture, « La question des « écritures
27. Li 1985, p. 204-221. Voir aussi A. Thote
chinoises » à l'époque des Royaumes
(dir.), Chine, l'énigme de l'homme de
combattants », dans Arts asiatiques 61,
bronze, Archéologie du Sichuan (XIIe-IIIe
2006, pp. 30-44.
avant J-C), Paris, 2003, pp. 216-266
11. Li 1985, p. 7
28. Li 1985, p. 189-203
12. Li 1985, p. 13-14
29. Gernet 2006, p. 82 ; Elisseeff 2008, p. 54
13. Ebrey 1999, p. 55-58
30. Lewis 1999, p. 598
14. (en) N. Di Cosmo, Ancient China and Its
31. Maspero 1985, p. 297-307 ; Lewis 1999,
Enemies: The Rise of Nomadic Power in
p. 599-600
East Asian History, Cambridge, 2002,
p. 127-158 32. Lewis 1999, p. 600-602
33. Lewis 1999, p. 616-617 54. Lewis 1999, p. 637

34. Maspero 1985, p. 325-328 ; Lewis 1999, 55. Lewis 2007, p. 52
p. 617-618
56. (en) C. Cook, « Ancester worship during
35. Lewis 1999, p. 619 the Eastern Zhou », dans Lagerwey et
Kalinowski (dir.) 2009, p. 241-250
36. Lewis 1999, p. 634-635
57. Pines 2009, p. 25-53
37. Sun Tzu (trad. Lévi) 2000, p. 22
58. J. Lévi, « Le Rite, la norme, le Tao :
38. Sima Qian (trad. Pimpaneau) 2002, p. 49-
Philosophie du sacrifice et
53
transcendance du Pouvoir en Chine
39. Sima Qian (trad. Pimpaneau) 2002, p. 64- ancienne », dans Lagerwey (dir.) 2009,
78 p. 191-207
40. Lewis 2007, p. 31-35 59. Pines 2009, p. 106-107
41. Lewis 1999, p. 632-633 ; Li 2013, p. 189 60. Lewis 2007, p. 37
42. Maspero 1985, p. 330-331 61. Wu 1999, p. 660-662 et 665-673
43. Maspero 1985, p. 330-347 ; Lewis 1999, 62. Wu 1999, p. 673-675. J.-P. Desroches,
p. 636-638 « L'irrésistible ascension de l'État de Qin
44. Maspero 1985, p. 347-350 ; Lewis 1999, (ixe – iiie siècle av. J.-C.) », dans J.-P.
p. 638-641 Desroches, G. André et W. Han (dir.),
Chine, le siècle du premier empereur,
45. Lewis 2007, p. 37-38
Arles et Monaco, 2001, pp. 134-138.
46. Bodde 1986, p. 45-52
63. Wu 1999, p. 709-717 ; Falkenhausen
47. Gernet 2006, p. 111-113 ; Gernet 2005, 2006, p. 328-338
p. 82-83
64. D. Elisseeff et J.-P. Desroches (dir.),
48. Bodde 1986, p. 40-45 ; Maspero 1985, Zhongshan, Tombes des rois oubliés,
p. 350-351 Paris, 1984

49. Sima Qian (trad. Pimpaneau) 2002, 65. Cette évolution sociale a été mise en
p. 116-124 évidence dans (en) C. Y. Hsu, Ancient

50. Gernet 2006, p. 111 et 113 China in transition: An analysis of social


mobility, 722-222 BC, Stanford, 1965
51. Lewis 1999, p. 597-602 ; Gernet 2006,
p. 88-89 66. Pines 2009, p. 136-162

52. Gernet 2006, p. 83 ; Cheng 2002, p. 54-56 67. Lewis 1999, p. 604

53. Lewis 1999, p. 602-603 68. Lewis 1999, p. 604-606


69. Lewis 1999, p. 611-616 ; Gernet 2005a, 82. Cité par Cheng 2002, p. 240.
p. 112-113 ; Bodde 1986, p. 34-38
83. Li 2013, p. 193-194
70. Pines 2009, p. 163-184
84. Lewis 2007, p. 232-236
71. Cité par J. Lévi, Les fonctionnaires divins,
85. Gernet 2005, p. 71-72
Politique, despotisme et mystique en
Chine ancienne, Paris, 1989, p. 81 86. Li 2013, p. 192-193

72. J. Lévi, « Ma-Chine à trahir, Sophistes et 87. Lewis 1999, p. 612 ; Lewis 2007, p. 232-

délateurs dans la Chine ancienne », dans 236

Le Genre Humain 16-17, La trahison, 88. Lewis 1999, p. 620


1987-1988, pp. 355-373, repris dans Id.,
89. Sun Tzu (trad. Lévi) 2000, p. 16
Les fonctionnaires divins, Politique,
despotisme et mystique en Chine 90. Gernet 2006, p. 96
ancienne, Paris, 1989 ; dans ce dernier 91. Lewis 1999, p. 622-623
livre, voir aussi « Stratagèmes et
92. A. Thote, « Origine et premiers
prévoyances dans la Chine pré-
développements de l'épée en Chine »,
impériale », pp. 13-60
dans Comptes-rendus des séances de
73. Lewis 1999, p. 590-591 ; Kern 2010, p. 53- l'Académie des Inscriptions et Belles-
56 Lettres 147/2, 2003, pp. 773-802
74. Gernet 2006, p. 108 93. Lewis 1999, p. 624
75. Wu 1999, p. 716-717 94. Gernet 2005, p. 85-86
76. Lewis 2007, p. 60 95. (en) N. Di Cosmo, Ancient China and Its
77. Bodde 1986, p. 36-37 ; Gernet 2006, Enemies: The Rise of Nomadic Power in
p. 114-115 ; Gernet 2005, p. 82-83 ; East Asian History, Cambridge, 2002,
Cheng 2002, p. 239-241 pp. 134-138

78. L. Vandermeersch, La formation du 96. Gernet 2006, p. 95-96


légisme, Recherche sur la constitution 97. Gernet 2005, p. 89-91
d'une philosophie politique
98. Lewis 1999, p. 629-630
caractéristique de la Chine ancienne,
Paris, 1965 99. Elisseeff 2008, p. 190-191 ; (en) N. Di
Cosmo, Ancient China and Its Enemies:
79. Lewis 1999, p. 613-615 ; Gernet 2006,
The Rise of Nomadic Power in East Asian
p. 94
History, Cambridge, 2002, pp. 138-155
80. Lewis 1999, p. 606-610 ; Gernet 2005,
100. Lewis 1999, p. 623
p. 78-80
101. Gernet 2005, p. 84-85
81. Li 2013, p. 195-197
102. Gernet 2005, p. 87. (en) R. D. S. Yates, « Comment: Spurious Causation in a
« Law and the Military in Early China », Historical Process: War and
dans N. di Cosimo (dir.), Military Culture Bureaucratization in Early China », dans
in Imperial China, Cambridge, 2009, American Sociological Review 69/4,
pp. 29-33 2004, p. 603–607

103. Lewis 1999, p. 621 114. Gernet 2005a, p. 95 et 111-112

104. Lewis 1999, p. 625-628 115. Gernet 2006, p. 97

105. Lewis 1999, p. 630-632 116. Sun Tzu (trad. Lévi) 2000, p. 17-19 ;
Gernet 2006, p. 96-97
106. Lewis 1999, p. 632. J. Lévi, Les sept
traités de la guerre, Paris, 2008 117. Gernet 2006, p. 114

107. Sun Tzu (trad. Lévi) 2000 118. Sun Tzu (trad. Lévi) 2000, p. 21-24

108. Sun Bin, Le Traité militaire, Traduction et 119. Gernet 2006, p. 101-102
présentation de Valérie Niquet, Paris,
120. (en) C. Hsu, « The Spring and Autumn
1996
Period », dans Loewe et Shaughnessy
109. Sun Tzu (trad. Lévi) 2000, p. 19-21 et 33- (dir.) 1999, p. 577-578
42
121. Lewis 2007, p. 113-115
110. (en) R. D. S. Yates, « Law and the Military
122. Lewis 1999, p. 647
in Early China », dans N. di Cosimo (dir.),
Military Culture in Imperial China, 123. Li 1985, p. 284-290 et 315

Cambridge, 2009, pp. 29-38 124. Gernet 2006, p. 97 ; Gernet 2005, p. 75 n.

111. J. Lévi, « Morale de la stratégie, stratégie 1

de la morale  : le débat chinois sur la 125. Lewis 2007, p. 103


guerre juste », dans Extrême-Orient,
126. Gernet 2006, p. 98-99 et 114
Extrême-Occident 38, La Guerre en
perspective : histoire et culture militaire 127. Lewis 1999, p. 646
en Chine, 2014, p. 99-127 lire en ligne (htt 128. Vandermeersch 2008, p. 255-258
ps://journals.openedition.org/extremeori
129. Lewis 2007, p. 106-107
ent/374)  [archive]
130. Vandermeersch 2008, p. 258-259 ; Gernet
112. Lewis 1999, p. 628-629
2006, p. 110-111 ; Falkenhausen 2006,
113. Sur ces questions : (en) E. Kiser et Y. Cai, p. 409-411
« War and bureaucratization in Qin China:
131. Li 1985, p. 466-470 ; Gernet 2006, p. 102 ;
Exploring an anomalous case », dans
Falkenhausen 2006, p. 415-418
American Sociological Review 68/4,
2003, p. 511–539 ; (en) D. Zhao, 132. Wu 1999, p. 661
133. (en) L. von Falkenhausen, « The Waning 143. Li 1985, p. 371-398 ; Gernet 2006, p. 107
of the Bronze Age: Material Culture and et fig. 6. Étude développée dans F.
Social Developments, 770-481 B.C. », Thierry, Monnaies chinoises. I. L'Antiquité
dans Loewe et Shaughnessy (dir.) 1999, préimpériale, Paris, 1997, pp. 67-183. Voir
p. 459-468 aussi F. Thierry, « Sur les spécificités
fondamentales de la monnaie chinoise »,
134. (en) Patricia Buckley Ebrey, Anne
dans A. Testart (dir.), Aux origines de la
Walthall et James B. Palais, East Asia : A
monnaie, Paris, 2001, pp. 109-144.
Cultural, Social, and Political History,
Boston, Houghton Mifflin, 2005, 382 p. 144. Lewis 1999, p. 607
(ISBN 0-618-13384-4), p. 30
145. Gernet 2006, p. 107
135. Gernet 2005, p. 75
146. (en) N. Di Cosmo, Ancient China and Its
136. (en) Robert Temple (préf. Joseph Enemies: The Rise of Nomadic Power in
Needham), The Genius of China : 3,000 East Asian History, Cambridge, 2002,
Years of Science, Discovery, and pp. 131-134
Invention, Simon and Schuster (New
147. Wu 1999, p. 653-654
York), 1986, 254 p. (ISBN 0-671-62028-2),
p. 49-50 148. Gernet 2006, p. 106 ; Wu 1999, p. 654-
655
137. Li 1985, p. 315-329
149. (en) C. Shen, « Compromise and
138. Elisseeff 2008, p. 61-62
Conflicts: Production and Commerce in
139. [PDF]« Le génie scientifique de la the Royal Cities of Eastern Zhou, China »,
Chine » (http://unesdoc.unesco.org/imag dans M. L. Smith (dir.), The Social
es/0008/000817/081712fo.pdf)  [archiv Construction of Ancient Cities,
e], Le courrier de l'UNESCO, sur Washington et Londres, 2003, p. 290-310.
unesco.org, UNESCO, octobre 1988
150. Wu 1999, p. 656
(consulté le 15 mai 2010), p. 10
151. Wu 1999, p. 660-662
140. Li 1985, p. 470-473 ; Gernet 2006, p. 102
et 106 ; Gernet 2005, p. 94-95 152. Lewis 2007, p. 76 et 87-88

141. M. Cartier, « Autour des notions de 153. Sur l'utilisation de ces concepts dans le

« profit » et de « marché », la naissance contexte chinois : Cheng 2002, p. 32-34.

de la pensée économique chinoise », 154. Kern 2010, p. 59-60


dans G. Berthoud et G. Busino (dir.),
155. Kern 2010, p. 66-67
L'économie dans la société, Revue
européenne des sciences sociales t. 156. Cheng 2002, p. 212-213 ; Kern 2010, p. 60
XXVI no 82, Genève, 1988, pp. 57-65 et 71

142. Gernet 2006, p. 100-101 157. Kern 2010, p. 60-66


158. Les questions de datation de ces textes Hardy (dir.), The Oxford History of
sont abordées dans Loewe (dir.) 1993. Historical Writing : Volume 1: Beginnings
to AD 600, Oxford, 2011, p. 394-414
159. (en) W. A. Ryckett, « Kuan Tzu », dans
Loewe (dir.) 1993, p. 244-251 176. Sur cette mythologie, voir (en) M. E.
Lewis, « The mythology of early China »,
160. R. Graziani, Écrits de Maître Guan : Les
dans Lagerwey et Kalinowski (dir.) 2009,
Quatre traités de l'Art de l'esprit, Paris,
p. 543-594
2012, p. 74
177. Nivison 1999, p. 748-752 ; Cheng 2002,
161. Cheng 2002, p. 188-189
p. 36-42
162. Kern 2010, p. 62 ; Li 2013, p. 220-224.
178. Li 1985, p. 9 ; Cheng 2002, p. 251-252
(en) S. Allan et C. Williams (dir.), The
Guodian Laozi: Proceedings of the 179. Nivison 1999, p. 752-759 ; Cheng 2002,
International Conference, Dartmouth p. 61-93
College, May 1998, Berkeley, 2000.
180. A. Cheng, Entretiens de Confucius, Paris,
163. Lewis 1999, p. 641-645 2004 (1re éd. 1981) ; P. Ryckmans, Les
Entretiens de Confucius, Paris, 2005 (1re
164. Cheng 2002, p. 115-116
éd. 1987) ; A. Lévy, Confucius, Entretiens
165. Cheng 2002, p. 213-214 avec ses disciples, Paris, 1993
166. (en) M. Carson et M. Loewe, « Lü shih 181. Cité par Cheng 2002, p. 164.
ch'un ch'iu », dans Loewe (dir.) 1993,
182. Li 2013, p. 222
p. 324-330 ; Lewis 2007, p. 211-214 ; I.
Kamenarovic, Printemps et automnes de 183. Nivison 1999, p. 770-778 ; Cheng 2002,
Lü Buwei, Paris, 1998 p. 159-187. A. Lévy, Mencius, Paris, 2008

167. Cheng 2002, p. 160-163 184. Nivison 1999, p. 790-799 ; Cheng 2002,
p. 212-233. I. Kamenarovic, Xunzi (Siun
168. Pines 2009, p. 219-220
Tseu), Paris, 1987
169. Pines 2009, p. 187-197
185. Nivison 1999, p. 759-765 ; Cheng 2002,
170. Kern 2010, p. 43-45 p. 94-109
171. Nivison 1999, p. 747-748 186. Nivison 1999, p. 779-783 ; Cheng 2002,
172. Cheng 2002, p. 113-114, 188 et 212 p. 143-158

173. Li 2013, p. 209-210 187. Cité par Cheng 2002, p. 241.

174. Cheng 2002, p. 293-295 ; Lewis 2007, 188. Nivison 1999, p. 800-808 ; Cheng 2002,
p. 208 ; Kern 2010, p. 60-61 p. 234-249

175. (en) D. Schaberg, « Chinese History and 189. J. Lévy, Le livre du prince Shang, Paris,
Philosophy », dans A. Feldherr et G. 1981
190. J. Lévy, Hen-Fei-tse ou le Tao du Prince, classiques/chine_ancienne/chine_index1
Paris, 1999 A.html)  [archive]

191. Cité par Cheng 2002, p. 198-199. 202. (en) A. Schaberg, A Patterned Past: Form
and Thought in Early Chinese
192. Nivison 1999, p. 783-790 ; Cheng 2002,
Historiography, Cambridge, 2001
p. 113-142. J.-C. Pastor, Zhuangzi
(Tchouang-tseu), Les chapitres intérieurs, 203. (en) C. I-jen, W. G Boltz et M. Loewe,
Paris, 1990 ; J. Lévi, Les Œuvres de « Kuo yü », dans Loewe (dir.) 1993,
Maître Tchouang, Paris, 2010 p. 263-268 ; Kern 2010, p. 51-52

193. Nivison 1999, p. 783-790 ; Cheng 2002, 204. Guoyu, Propos sur les principautés, I-
p. 188-211. F. Houang et P. Leyris, La Voie Zhouyu, traduit par André d'Hormon et R.
et la vertu, Tao-te-king, Paris, 1979 ; J. Mathieu, Paris, 1985
Lévi, Le Lao-tseu, Suivi des Quatre
205. (en) E. L. Shaughnessy, « I Chou shu »,
Canons de l'empereur Jaune, Paris, 2009
dans Loewe (dir.) 1993, p. 229-233
194. (en) T. H. Barrett, « Lieh tzu », dans
206. (en) Tsuen-hsuin Tsien, « Chan kuo ts'e »,
Loewe (dir.) 1993, p. 299-301. Cheng
dans Loewe (dir.) 1993, p. 1-11 ; Kern
2002, p. 114
2010, p. 53-55
195. Nivison 1999, p. 809-812 ; Cheng 2002,
207. (en) W. G. Boltz, « Chou li », dans Loewe
p. 250-289
(dir.) 1993, p. 216-228
196. R. Graziani, Écrits de Maître Guan : Les
208. (en) E. L. Shaughnessy, « I ching (Chou
Quatre traités de l'Art de l'esprit, Paris,
I) », dans Loewe (dir.) 1993, p. 216-228
2012
209. (en) W. G. Boltz, « I li », dans Loewe (dir.)
197. E. Perrot, Yi King, Le Livre des
1993, p. 234-243
transformations, Paris, 1973
210. (en) N. Sivin, « Huang ti nei ching », dans
198. Elisseeff 2008, p. 62 ; Gernet 2005a,
Loewe (dir.) 1993, p. 199-201
p. 137-139
211. Kern 2010, p. 76-86. F. Tokei, Naissance
199. Kern 2010, p. 46
de l'élégie chinoise, Paris, 1967 ; Qu Yuan,
200. Kern 2010, p. 48-51 Élégies de Chu, Traduit du chinois,
présenté et annoté par Rémi Mathieu,
201. La chronique de la principauté de Lou :
Paris, 2004.
Tch'ouen Ts'iou et Tso Tchouan,
traduction de S. Couvreur, 3 vol., Paris, 212. (en) R. Fracasso, « Shan hai ching », dans
1951. « Consultable en ligne sur le site Loewe (dir.) 1993, p. 357-367
de l'Université du Québec à
213. R. Mathieu, Le Mu tianzi zhuan,
Chicoutimi. » (http://classiques.uqac.ca/
traduction annotée-étude critique, Paris,
1978 ; (en) Id., « Mu t'ien tzu chuan », 228. Vandermeersch 2008, p. 403-404
dans Loewe (dir.) 1993, p. 342-346
229. Mise au point sur les rituels de cette
214. (en) W. South Coblin, « Ehr ya », dans période dans (en) M. Poo, « Ritual and
Loewe (dir.) 1993, p. 94-99 ; (en) H. Yong Ritual Texts in Early China », dans
et J. Peng, Chinese Lexicography, A Lagerwey et Kalinowski (dir.) 2009,
History from 1046 BC to 1911 AD, Oxford p. 281–314
et New York, 2008, pp. 29-75
230. Vandermeersch 2008, p. 401-424 ; Cheng
215. On trouvera une mise au point récente 2002, p. 73-76 et 224-226.
sur la religion de la Chine antique dans E.
231. Harper 1999, p. 873-874. R. Mathieu,
L. Shaughnessy, « The religion of ancient
« Les wu : fonctions, rites et pouvoirs, de
China », dans J. R. Hinnells (dir.), A
la fin des Zhou au début des Han (env.
Handbook of Ancient Religions,
Ve-env. ier siècle), Approche d'un
Cambridge, 2007, pp. 490-536.
chamanisme chinois », dans Lagerwey
216. Voir les discussions sur la terminologie (dir.) 2009, p. 277-304 ; (en) F. Lin, « The
dans Harper 1999, p. 815-820 image and status of shamans in ancient
China », dans Lagerwey et Kalinowski
217. Cette rationalité est discutée dans
(dir.) 2009, p. 397-458. (en) G. Boileau,
Vandermeersch 2008, Livre II.
« Wu and Shaman », dans Bulletin of the
218. Harper 1999, p. 820-830 School of Oriental and African Studies,
219. Vandermeersch 2008, p. 355-374 ; Harper 2002, 65/2, 2002, p. 350-378.
1999, p. 868-870 232. Harper 1999, p. 831-852. M. Kalinowski,
220. (en) C. Cook dans Lagerwey et « La divination sous les Zhou orientaux
Kalinowski (dir.) 2009, p. 275-277 (770-256 avant notre ère) », dans
Lagerwey (dir.) 2009, p. 127-130 et 151-
221. Li 2013, p. 222-224
154
222. I. Kamenarovic, Printemps et automnes
233. Vandermeersch 2008, p. 285-315 ; Harper
de Lü Buwei, Paris, 1998, p. 196
1999, p. 852-860 ; M. Kalinowski dans
223. Vandermeersch 2008, p. 374 ; Harper Lagerwey (dir.) 2009, p. 101-164.
1999, p. 831-852
234. Cheng 2002, p. 268-289
224. Harper 1999, p. 860-866
235. M. Kalinowski dans Lagerwey (dir.) 2009,
225. Harper 1999, p. 868-871 p. 156-159 ; J. Lévi dans Lagerwey (dir.)

226. (en) C. Cook dans Lagerwey et 2009, p. 190-191

Kalinowski (dir.) 2009, p. 238-241 236. Harper 1999, p. 874-883

227. J. Lévi dans Lagerwey (dir.) 2009, p. 207- 237. C. Despreux, « Culture de soi et pratiques
237 d'immortalité dans la Chine antique des
Royaumes combattants aux Han », dans 250. A. Thote, « Les pratiques funéraires
Lagerwey (dir.) 2009, p. 241-275 ; (en) R. Shang et Zhou, Interprétation des
Graziani, « The subject and the sovereign: vestiges matériels », dans Lagerwey (dir.)
exploring the self in early Chinese self- 2009, p. 70-72
cultivation », dans Lagerwey et
251. C. Debaine-Francfort, La redécouverte de
Kalinowski (dir.) 2009, p. 459-517 ; (en)
la Chine ancienne, Paris, 1998, pp. 77-87,
M. Csikszentmihàlyi, « Ethics and self-
offre une introduction concise et très
cultivation practice in early China », dans
bien illustrée sur l'art de la période des
Lagerwey et Kalinowski (dir.) 2009,
Zhou orientaux. Voir aussi Elisseeff 2008,
p. 519-542
p. 58-62.
238. On trouvera une discussion sur les
252. Li 1985, p. 269-270 ; Wu 1999, p. 676-685
croyances sur la mort et le voyage des
et 702 ; Elisseeff 2008, p. 60-61 et 174-
défunts à la période des Royaumes
175 ; A. Thote, « Les bronzes de l'époque
combattants dans Cook 2006, p. 19-42
des Zhou de l'Est (770-221 av. J.-C.) »,
239. Li 1985, p. 434-446 ; Wu 1999, p. 742- dans Rites et festins de la Chine antique,
744 ; Elisseeff 2008, p. 188-189 Bronzes du Musée de Shanghai, Paris,
1998, pp. 144 et exemples pp. 161-166
240. Harper 1999, p. 868-869 ; Falkenhausen
2006, p. 316-321 253. Li 1985, p. 272-276 ; Wu 1999, p. 685-692

241. Wu 1999, p. 708-709 et 717-718 254. Elisseeff 2008, p. 184-185

242. Wu 1999, p. 718-721 ; Elisseeff 2008, 255. Li 1985, p. 295-314 ; Wu 1999, p. 692-697
p. 58-59
256. Wu 1999, p. 697-698
243. Wu 1999, p. 721-729 ; Elisseeff 2008,
257. Li 1985, p. 276-277 ; Elisseeff 2008,
p. 178-179 ; Falkenhausen 2006, p. 306-
p. 176-177
316
258. P. Wiedehage dans Chine, la gloire des
244. A. Thote, « Les pratiques funéraires
empereurs, Paris, 2000, pp. 197-199
Shang et Zhou, Interprétation des
vestiges matériels », dans Lagerwey (dir.) 259. Wu 1999, p. 699-700

2009, p. 66-72 260. Li 1985, p. 342-358 ; Wu 1999, p. 679-682

245. Wu 1999, p. 727-728 et 704

246. Wu 1999, p. 729-732 261. Li 1985, p. 359-370 ; Wu 1999, p. 699 ;


Ebrey 1999, p. 54
247. Falkenhausen 2006, p. 302-306
262. Elisseeff 2008, p. 180-181
248. Wu 1999, p. 732-734
263. (en) L. von Falkenhausen, Suspended
249. Elisseeff 2008, p. 172-173
Music, Chime-Bells in the Culture of
Bronze Age China, Berkeley, Los Angeles 264. Ebrey 1999, p. 50
et Oxford, 1993

Bibliographie

Sources textuelles
Se-ma Ts'ien (Sima Qian), Les mémoires historiques de Se-Ma Ts'ien, Traduits et annotés par
Édouard Chavannes et Jacques Pimpaneau, Paris, You Feng, 2015

Sima Qian, Mémoires historiques, Vies de Chinois illustres, Traduit du chinois et présenté par
Jacques Pimpaneau, Arles, Editions Philippe Picquier, coll. « Picquier Poche », 2002

Sun Tzu, L'Art de la guerre, Traduit du chinois et présenté par Jean Lévi, Paris, Hachette
Littératures, coll. « Pluriel », 2000, 192 p.

Damien Chaussende (éd.), La véritable histoire du premier empereur de Chine, Paris, Les
Belles Lettres, coll. « La véritable histoire de… » (no 8), 2010

Généralités sur la Chine ancienne


Flora Blanchon, Arts et histoire de Chine, vol. 1, Paris, Presses Universitaires de Paris-
Sorbonne, 1993

(en) Patricia Buckley Ebrey, The Cambridge Illustrated History of China, Cambridge,
Cambridge University Press, coll. « Cambridge Illustrated Histories », 1999

Jacques Gernet, Le monde chinois, t. 1 : De l'âge du bronze au Moyen Âge, 2100 av. J.-C.-
xe siècle apr. J.-C., Paris, Pocket, 2006, 380 p.

Jacques Gernet, La Chine ancienne, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2005, 10e éd.

(en) Michael Loewe (dir.) et Edward L. Shaughnessy (dir.), The Cambridge History of Ancient
China, From the Origins of Civilization to 221 BC, Cambridge, Cambridge University Press,
1999

Edward L. Shaughnessy (dir.) (trad. Marc Baudoux), La Chine, Paris, Taschen, 2007.

(en) Li Feng, Early China : A Social and Cultural History, New York, Cambridge University
Press, 2013, 367 p. (ISBN 978-0-521-71981-0)

Histoire, institutions et société


(en) Derk Bodde, « The state and empire of Ch'in », dans Denis C. Twitchett et John K.
Fairbank (dir.), The Cambridge History of China, 1. The Ch'in and Han Empires, 221 B.C.-A.D.
220, Cambridge, Cambridge University Press, 1986, p. 20-102
(en) Mark Edward Lewis, « Warring State Political History », dans Michael Loewe et Edward
L. Shaughnessy (dir.), The Cambridge History of Ancient China, From the Origins of
Civilization to 221 BC, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p. 587-650

(en) Mark Edward Lewis, The Early Chinese Empires : Qin and Han, Cambridge et Londres,
Belknap Press of Harvard University Press, coll. « History of imperial China », 2007

Henri Maspero, La Chine antique, Paris, PUF, coll. « Dito », 1985 (1re éd. 1927)

Jean Lévi, La Chine en guerre : vaincre sans ensanglanter la lame (VIIIe-IIIe avant J.-C.), Paris,
Arkhê, 2018

Art et archéologie
Danielle Elisseeff, La Chine du Néolithique à la fin des Cinq Dynasties (960 de notre ère),
Paris, RMN, coll. « Manuels de l'école du Louvre », 2008

(en) Lothar von Falkenhausen, Chinese society in the age of Confucius (1000-250 BC) : The
archaeological evidence, Los Angeles, Cotsen institute of archaeology, University of
California Press, coll. « Ideas, debates and perspectives », 2006

(en) Li Xueqin (trad. K. C. Chang), Eastern Zhou & Qin Civilization, New Haven et Londres,
Yale University Press, coll. « Early Chinese Civilizations Series », 1985

(en) Wu Hung, « The Art and Architecture of the Warring State Period », dans Michael
Loewe et Edward L. Shaughnessy (dir.), The Cambridge History of Ancient China, From the
Origins of Civilization to 221 BC, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p. 651-744

(en) Lu Liancheng, « The Eastern Zhou and the Growth of Regionalism », dans Kwang-chih
Chang et Pingfang Xu (dir.), The Formation of Chinese Civilization: An Archaeological
Perspective, New Haven, Yale University and New World Press, 2005, p. 203-247

Religion et pensée
Anne Cheng, Histoire de la pensée chinoise, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points Essais »,
2002 (1re éd. 1997)

(en) Constance A. Cook, Death in Ancient China : A Tale of One Man's Journey, Leyde et
Boston, Brill, coll. « China Studies », 2006

(en) Angus C. Graham, Disputers of the Tao : Philosophical Argument in Ancient China, La
Salle, Open Court, 1989

(en) Donald Harper, « Warring State Natural Philosophy and Occult Thought », dans
Michael Loewe et Edward L. Shaughnessy (dir.), The Cambridge History of Ancient China,
From the Origins of Civilization to 221 BC, Cambridge, Cambridge University Press, 1999,
p. 813-884
John Lagerwey (dir.), Religion et société en Chine ancienne et médiévale, Paris, Éditions du
Cerf - Institut Ricci, coll. « Patrimoines Chine », 2009

(en) John Lagerwey et Marc Kalinowski (dir.), Early Chinese Religion, Part One : Shang
through Han (1250 BC-220 AD), Leyde et Boston, Brill Academic Pub, 2009

(en) Mark Edward Lewis, Sanctioned Violence in Early China, Albany, State University of New
York Press, coll. « SUNY series in Chinese philosophy and culture », 1990

(en) Mark Edward Lewis, Writing and Authority in Early China, Albany, State University of
New York Press, coll. « SUNY series in Chinese philosophy and culture », 1999

(en) David S. Nivison, « The Classical Philosophical Writings », dans Michael Loewe et
Edward L. Shaughnessy (dir.), The Cambridge History of Ancient China, From the Origins of
Civilization to 221 BC, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p. 745-812

(en) Yuri Pines, Envisioning Eternal Empire : Chinese political thought of the Warring States
era, Honolulu, University of Hawai'i Press, 2009 (Traduction en français : Yuri Pines
(trad. Damien Chaussende), L'invention de la Chine éternelle : Comment les maîtres-penseurs
des Royaumes combattants ont construit l'empire le plus long de l'histoire (ve – iiie siècles av.
J.-C.), Paris, Les Belles Lettres, 2013)

Léon Vandermeersch, Wangdao ou la Voie Royale : Recherches sur l'esprit des institutions de
la Chine archaïque, Paris, Éditions You Feng Librairie & Editeur, 2009 (1re éd. 1977-1980)

Littérature
(en) Michael Loewe (dir.), Early Chinese Texts : A Bibliographical Guide, Berkeley, Society for
the Study of Early China and The Institute of East Asian Studies, University of California,
Berkeley, 1993

(en) Martin Kern, « Early Chinese literature, beginnings through Western Han », dans Kang-i
Sun Chang et Stephen Owen (dir.), The Cambridge History of Chinese Literature, Volume 1:
To 1375, Cambridge, Cambridge University Press, 2010, p. 1-115

Annexes

Articles connexes
Dynastie Zhou

Période des Printemps et Automnes

Dynastie Qin

Sima Qian
Tombe du marquis Yi de Zeng

Liste des chefs d'État dans la seconde moitié du Ier millénaire av. J.-C.

Kingdom, manga de Yasuhisa Hara se déroulant à la fin des Royaumes combattants.

Liens externes
« Les classiques chinois en traduction, site de l'Université du Québec à Chicoutimi. » (htt
p://classiques.uqac.ca/classiques/chine_ancienne/chine_index1A.html)  [archive]

Les Royaumes combattants (http://mediatheque.cite-musique.fr/masc/?INSTANCE=CITE


MUSIQUE&URL=/mediacomposite/cmde/CMDE000000100/09.htm)  [archive] à la Cité de
la musique, Paris.

Portail des civilisations asiatiques Portail du monde chinois


Portail de l’archéologie Portail de l’histoire militaire

Ce document provient de
« https://fr.wikipedia.org/w/index.php?
title=Période_des_Royaumes_combattants&oldid
=194917849 ».


Dernière modification il y a 1 mois par Zunkir

Vous aimerez peut-être aussi