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Poly - MDM - 3éme Année
Poly - MDM - 3éme Année
La théorie de l’élasticité étudie la relation entre les déformations subies par un objet et le
système de forces qui lui est appliqué. En pratique, si on se limite aux petites déformations,
l’analyse du comportement réversible (élastique) d’un matériau se ramène à l’étude d’un
certain nombre de types de déformations simples et à la détermination des constantes
élastiques correspondantes. Ces déformations élastiques simples sont l’extension uniaxiale,
le cisaillement simple et la compression uniforme.
Lorsqu’on soumet une éprouvette prismatique à une extension axiale, elle subit un
allongement x qui est proportionnel à sa longueur initiale x0.
Contrainte E
z x= Fr/S0
x0 x Déformation x=x/x0
z0
F F
Fr Fr
y0 x
S0
y
εx Δx
x 0
Cet allongement entraîne l’apparition d’une force de rétraction Fr qui est égale en valeur
absolue et de sens opposé à la force appliquée F :
F + Fr = 0
Si on se limite aux petites déformations, il existe une relation simple (loi de Hooke) qui
relie la contrainte x qui est la force de rétraction par unité de section, et la déformation
relative x:
σxSF Eεx
0
Dans cette expression qui définit la loi de Hooke, S0 représente la section initiale de
l’éprouvette et E le module d’élasticité ou module d’Young. Celui-ci est un paramètre qui
caractérise la résistance du solide à la déformation uniaxiale.
Nous avons rassemblé, au tableau ci-dessous les valeurs du module d’élasticité d’un certain
nombre de matériaux. Les variations observées du diamant aux caoutchoucs s’étendent sur
six ordres de grandeur. La valeur du module d’élasticité est fonction de plusieurs facteurs :
énergie des liaisons, nature des forces de rappel élastiques, structure amorphe ou cristalline
du matériau.
y
z
x x
On relie aisément la variation de volume durant l’extension uniaxiale au coefficient de
Poisson , dans le cas des petites déformations, par la relation suivante (démontrée dans le
cours) :
x 1 2
Les diverses valeurs du coefficient de Poisson sont résumées à la figure 2.
Pb PE
Ag
Cu PMMA, PS, PA 6-6
Al
0.3 Fe, Acier, W
Verre minéral
Al2O3, WC, MgO
SiO2 amorphe
0.1 Diamant
La valeur limite supérieure de est égale à ½ . Elle correspond à une variation nulle du
volume d’extension (=0). Cette valeur limite est atteinte pour les caoutchoucs qui se
déforment en traction de manière élastique sans variation de volume. Pour les métaux, le
coefficient de Poisson est voisin de 0.33, pour les céramiques, est généralement compris
entre 0.17 et 0.27. On peut également noter que plus la liaison interatomique est forte
(diamant), plus l’augmentation du volume lors de la traction est élevée.
Les forces de cisaillement jouent un rôle très important dans le comportement des
matériaux. Ce sont des forces de cisaillement qui interviennent quand on applique les patins
d’un frein sur la jante d’une roue de vélo ou entre les mâchoires d’un frein à disque de
voiture. Un exemple de déformation de cisaillement est représenté à la figure 3.
z S0
z0 F
y
0
y0 y
F
x x0
Une barre prismatique est fixée par une face de surface S0 sur un support rigide, tandis que
sur la face opposée, on applique une force transversale parallèle au plan (Oxy). Cette force
induit une déformation qui est mesurée par l’angle de cisaillement = y/z0. Pour cette
déformation qui s’effectue à volume constant, il existe une relation entre la contrainte par
unité de surface, dite cission = F/ S0 et l’angle de cisaillement :
= G tg G
Dans cette expression, K est le module de compressibilité volumique. Le signe négatif qui
intervient dans cette expression résulte de ce que la variation de volume est négative quand
la pression est positive.
(Extension uniaxiale : E )
(Cisaillement simple : G )
(Pression uniforme : p k )
Ces trois expressions de la loi de Hooke ne sont valables que pour les petites déformations
(élasticité linéaire). Cette limite d’application est située à environ 0.1% de déformation pour
les matériaux à haut module. Au-delà de cette limite des phénomènes de déformation
permanente (plastique) interviennent dans un grand nombre de cas.
Les trois modules E, G et K, ainsi que le coefficient de Poisson sont reliés entre eux par
les équations suivantes:
9KG
E 3K(1 2 ) 2G(1 )
G 3K
En d’autres termes, parmi les quatre constantes élastiques, il n’existe que deux qui soient
indépendantes. Ces relations ne sont valables que pour des solides isotropes. Dans le cas
plus général d’un solide anisotrope, il existe 21 constantes indépendantes.
Dans le tableau 2, nous avons résumé les valeurs relatives des constantes élastiques. Dans le
cas des caoutchouc, K est grand vis-à-vis de E et G, c'est-à-dire que pour les déformations
mécaniques, les élastomères peuvent être considérés comme des corps pratiquement
incompressibles, ce qui signifie que le coefficient de Poisson est pratiquement égal à 0,5 et
que l'équation IV-14 se réduit à :
E 3G et K
Les éprouvettes (figure 5) peuvent être usinées ou brutes. Elles comportent une partie
calibrée et très généralement deux têtes d'amarrage. La section droite de l'éprouvette peut
être circulaire, carrée, rectangulaire, hexagonale ou, dans des cas spéciaux d'une autre
forme. Les éprouvettes sont définies par :
(a) (b)
Une éprouvette est dite proportionnelle lorsque sa longueur initiale entre repères L 0 est
déduite de la section initiale S0 par la formule : L0 = k. S0 avec k = 5.65.
a. Diagramme conventionnel
Certains courbes de traction ne présentent pas de limite apparente d’élasticité nette (aciers
austénitiques, aluminium...). C’est pourquoi qu’on la définit à 0.2% de déformation
plastique.
F (0,2%)
La limite d’élasticité conventionnelle est : Re (0.2%) = e
S0
2. La résistance à la traction (charge de rupture)
F
Rm = m
S0
avec Fm = charge maximale
S0 S
S0L0 = SL = S(L0 + L) S = = 0
L 1e
1
L0
F
D’où = (1 + e) = R (1 + e)
S0
* Déformation rationnelle : L’allongement instantané est égale à L / L. et au même
instant. l’allongement depuis le début de l’essai est. en considérant des allongements
infiniment petits dL :
LdL L L 0 L L
= L0 = ln
L
= ln (
L0
) = ln
L0
= ln (1 + e)
L 0
ij1E ij3E m ij
Avec :
ij : Tenseur de contraintes et ij : Tenseur de déformations
m = (11 + 22 + 33)/3 et (ij = 1 si i=j et ij = 0 si ij)
E : Module d’élasticité (MPa)
: Coefficient de Poisson
La plasticité des matériaux est caractérisée par l'écrouissage, propriété à l'origine du succès
de ce type de matériaux. L'écrouissage représente la consolidation du métal, c'est-à-dire la
nécessité d'augmenter la contrainte si l'on veut poursuivre la déformation plastique. Il est
caractérisé par le taux de consolidation (pente de la courbe ) qui est de l'ordre de 10-2 à
10-3E.
La contrainte séparant le domaine élastique du domaine plastique est désignée par le seuil de
plasticité ou la limite élastique.
B.1. L’écrouissage
poursuivre. Mais l’écrouissage peut aussi être utile : c’est un moyen de durcissement efficace
qui peut être combiné avec d’autres méthodes pour produire des matériaux résistants.
La présence des dislocations a été postulée depuis les années 1930 et depuis, leur existence a
été prouvée par plusieurs techniques expérimentales, notamment par le microscope
électronique à transmission (MET). Les dislocations peuvent adopter deux formes idéalisées
montrées en figure 7 : les dislocations coin et les dislocations vis. Les premières peuvent
être représentées par un plan cristallographique qui se termine à l’intérieur du réseau
cristallin, (fig. 7a) . Les secondes peuvent être comprises comme la ligne de séparation entre
le réseau cristallin non perturbé et une zone de décalage partiel du réseau cristallin par
rapport à la région avoisinante du réseau, (fig. 7b).
aa)) bb))
a) b)
Figure 7 : Schémas des deux types de dislocations
7a) : dislocation coin – 7b) : dislocation vis
Les dislocations sont caractérisées par leur vecteur de Burgers, b . Il est défini comme le
vecteur résultant d’une boucle fermée de vecteurs élémentaires du réseau autour de la
dislocation, transférée dans une région du réseau non perturbée. La détermination du vecteur
de Burgers pour les dislocations coin et vis est également schématisée dans la figure 8.
a) b)
Notons que, pour les dislocations coin, le vecteur de Burgers est perpendiculaire à la ligne
de dislocation tandis que pour les dislocations vis le vecteur de Burgers y est parallèle. En
réalité, une ligne de dislocation est souvent un mélange entre les deux types de dislocation
suivant l’angle entre le vecteur de Burgers et la ligne de dislocation.
La densité de dislocations (figure 9), qui s’exprime en longueur de dislocation par unité de
volume (de façon habituelle en cm/cm3 ou cm-2 ), est de l’ordre de 106 à 108 cm/cm3 dans un
métal recuit (c’est un métal qui a subi un chauffage à une température et pendant un temps
bien défini) et de 1011 à 1012 cm/cm3 dans un métal très déformé.
Ce mouvement de dislocation est analogue à la façon dont on déplace un lourd tapis dans
une grande pièce, simplement en déplaçant des plis le long du tapis, ce qui est bien facile
que de déplacer tout le tapis d’un coup. (figure 11).
La déformation plastique se fait donc par glissement de plans cristallins. Mais ce glissement
ne peut pas se faire d'un seul coup (figure 12) : il faudrait que tous les atomes concernés par
le plan de glissement (soit environs 1014 par mm2, soit 100 000 milliards !) se soulèvent en
même temps. L'énergie, la force qu'il faudrait est bien supérieure à ce qui a est mesuré.
B.3.1. Le glissement
B.3.2. La montée
Pour déplacer une dislocation en dehors de son plan de glissement, il est nécessaire de
déplacer des atomes sur de longues distances : le processus est non conservatif et a lieu grâce
à la diffusion des lacunes ou d'atomes interstitiels dans le matériau vers le cœur de la
dislocation. Comme la quantité des lacunes/interstitiels et leur diffusion est un processus
thermiquement actif, la montée apparaît généralement à haute température.
d’eux. Un examen plus détaillé révèle que ces bandes de glissement sont en fait constitués
de lignes de glissement plus fines et très rapprochées.
Puisque le matériau est cristallin, donc anisotrope il est logique de supposer que ce
glissement se produit selon certains plans et selon certaines directions cristallographiques.
On peut facilement vérifier cette hypothèse en effectuant des essais de traction sur des
monocristaux d’un même métal, mais dont l’orientation cristallographique par rapport à
l’axe de traction est différente. Des études cristallographiques révèlent que les plans de
glissement actifs, dans les métaux et les alliages de structures courantes (CC, CFC, HC),
sont les plans de forte densité atomique. Par ailleurs, dans chacun de ces plans, la direction
de glissement est la direction de plus grande densité atomique. Le tableau ci-dessous présente
et résume ces données pour plusieurs métaux.
Un raisonnement géométrique simple permet de trouver que cette cission est déterminée
par la relation :
P cos cos
S0
où S0 : section droite de l’éprouvette,
: angle formé par la normale au plan de glissement et l’axe de traction,
angle formé par la direction de glissement et l’axe de traction.
Cette équation est connue sous le nom de loi de Schmid, et l’expression (coscos) est
appelée facteur de Schmid.
Selon cette loi, lorsqu’on effectue des essais de traction sur des monocristaux d’un même
matériau, mais dont l’orientation cristallographique par rapport à l’axe de traction est
différente, on obtient des valeurs expérimentales de la contrainte appliquée (P/S 0)
différentes pour chaque monocristal ; en effet, si on suppose qu’un seul système de
glissement est activé à chacun des essais, le facteur de Schmid associé à ce système de
glissement est différent de celui associé au système de glissement précédent.
En fait, la seule valeur constante est celle de la cission critique * , à laquelle correspondent
les premiers glissements cristallographiques. Au delà de cette valeur, le matériau entre dans
le domaine plastique et se déforme de façon permanente.
Le but de ce paragraphe est de trouver à partir d’un essai de traction simple donnant la
limite d’élasticité conventionnelle Re, un critère plus général s’appliquant à un régime de
sollicitation multidirectionnel.
Lorsque le cisaillement maximal sur une facette en un point du matériau atteint une valeur
critique c , le matériau se plastifie en cet endroit.
Soient I, II , III les contraintes principales associées au tenseur des contraintes appliquées
sur le matériau, telles que I > II > III , alors :
σI σIII
Si < c le matériau est dans le domaine élastique.
2
σI σIII
Si = c le matériau est dans le domaine plastique.
2
Re
Par un raisonnement simple à partir d’un essai de traction, on montre que c =
2
Le matériau se plastifie lorsque son énergie de distorsion élastique atteint une valeur
critique K. L’énergie de distorsion = l’énergie de déformation totale – l’énergie de
dilatation. Elle est définie comme suit : d di j di j
Soient I, II , III les contraintes principales associées au tenseur des contraintes appliquées
sur le matériau.
Si (I-II)² + (I-III)² + (II-II)² < 2Re² le matériau reste élastique
Si (I-II)² + (I-III)² + (II-II)² = 2Re² le matériau se plastifie.
Il permet de trouver une relation entre les contraintes et les déformations dans le domaine
plastique, en sollicitations multiaxiales.
Exercice n°1
On donne les valeurs du module de Young et de l’allongement à la rupture pour les
matériaux suivants :
1. Classer ces différents matériaux suivant leurs rigidités et leurs ductilités, qu'est ce qu'elles
traduisent ces propriétés.
Avec 0 = 631.7 MPa et n = 0.13 (Les contraintes et les déformations sont vraies)
Exercice n°2
On s'intéresse au même acier doux (exercice n°1), mais on le sollicite cette fois d'une
manière multiaxiale suivant le tenseur ci-dessous :
100 200 0
200 500 0 MPa
0
0 300
Exercice n°3
Ce principe donne une relation entre les déformations plastiques et les contraintes. La
première hypothèse concernant une déformation plastique élémentaire est qu’elle s’effectue
sans variation de volume, ce qui se traduit par d1p + d2p + d3p = 0, les axes 1, 2 et 3 étant
les axes principaux de contraintes. On a vu que la surface de charge correspondant au
critère de Von Mises est un cylindre d’axe D parallèle à (1, 1, 1).
d 1p
1. Que peut-on dire du vecteur d 2 p par rapport à la surface de charge ?
d 3 p
5. Déduire des relations entre déformations plastiques dans les cas suivants :
a/ Traction équibiaxiale
b/ Cisaillement
Exercice n°4
Les tubes utilisés pour transporter certains gaz toxiques sont des cylindres qui peuvent être
considérés dans une première approximation comme des enceintes à parois minces. Ils sont
fabriqués à partir d’un acier de limite élastique Re = 400 MPa.
Ces cylindres qui sont soumis à une pression interne uniforme P ont un diamètre intérieur
D = 20 cm, et une épaisseur e = 1 cm. On utilise un système de coordonnées cylindriques
(O, r,, z) qui coïncide avec le repère des contraintes principales.
Exercice n° 5
~ 0 0
0 0 0
0
2. Calculer le tenseur des déformations élastiques que subit ce cylindre si on prend = 120
MPa et = 50 MPa (ces valeurs numériques ne sont valables que pour la question 2).
3. Calculer en fonction de et les contraintes principales I, II et III en les classant de la
manière suivante : I > II > .
5. En utilisant le critère de VON MISES, trouver la relation entre et la limite élastique
Re pour que le matériau reste dans le domaine élastique.
6. Tracer dans le plan ) les surfaces de charge correspondant aux critères de TRESCA
et de VON MISES.
Exercice n°6
On étudie la compression d’un pion en élastomère que l’on place dans un cylindre
métallique indéformable de rayon R0 = 9,5 mm. La compression est exercée à l’aide d’un
piston indéformable qui coulisse sans frottement dans le cylindre. Lorsque le piston vient
au contact du pion cylindrique, la hauteur de ce dernier est égale à h0 = 13 mm. Des essais
préliminaires ont montré que le module d’Young de l’élastomère avait pour valeur
E = 2,83 MPa.
Compte tenu des conditions de symétrie de l’essai, on rappelle les loi de l’élasticité donnant
les contraintes en fonction des déformations en coordonnées cylindriques.
E 3ν
σ rr (ε rr ε m)
1ν 1 2ν
E 3ν
σ θθ (ε θθ ε m)
1ν 1 2ν
E 3ν
σ zz (ε zz ε m)
1ν 1 2ν
On rappelle aussi la relation entre les tenseurs sphériques correspondants
σ rr σ θθ σ zz E
σm 3Kε avec 3K
(1 2 )
m
3
L’essai de compression confinée est réalisé à déplacement imposé : pour une variation h de
la hauteur du pion, on enregistre une variation F de la force de compression avec :F/ h =
4.104 N/mm.
1. Donner, pour cet essai, les valeurs particulières des déformations rr et . Ecrire zz et
m en fonction de h et de h0.
2. En déduire les expressions de rr , , zz et m en fonction de h , de h0 , de E et de .
3. A partir de l’expression donnant zz déterminer l’équation qui explicite K en fonction
de F/ h, de S0 , de h0 , et de .
4. Si on accepte l’hypothèse que les élastomères sont très peu compressibles. Proposer une
expression simplifiée de K en fonction de F/ h , de S0 , et de h0 . Application
numérique
5. Donner l’expression de en fonction de E et K . Application numérique. Votre
hypothèse est-elle vérifiée.
Introduction
De nombreux essais ont été imaginés pour évaluer la résistance à la rupture des matériaux et
certains d’entre eux sont depuis longtemps couramment pratiqués dans l’industrie. On
mesure alors l’intérêt des essais de choc sur éprouvettes entaillées mis au point notamment
par Charpy il y a une centaine d’années. Ils permettent, notamment de déterminer le risque
de rupture fragile des aciers, à certaines températures. Néanmoins, ces essais ne fournissent
pas d’indication sur les charges que peuvent supporter les pièces contenant des défauts.
C’est la mécanique de la rupture et les essais qui en dérivent qui permettent de le faire. Ils
ont connu un grand développement depuis une quarantaine d’année, particulièrement dans
les industries nucléaire, aéronautique spatiale et pétrochimique. Même s’ils sont plus
couteux et nécessitent l’intervention de spécialistes, ils se répandent. D’ailleurs, on assiste
à une rapide évolution de la normalisation dans ce domaine.
1. Historique
Durant la seconde moitie du 19ème siècle, l'usage de l'acier et d'autres alliages métalliques se
développa considérablement. Avec cet essor se multiplièrent aussi les accidents dus à
l'utilisation inadéquate de ces matériaux, de même que bien souvent à des faiblesses de
conception et dimensionnement.
Dans les années 30 et 40, plusieurs ponts « Vierendeel » franchissant le canal Albert, en
Belgique, furent victimes de ruptures fragiles, L'un deux s'effondra même complètement,
un matin de mars 1938, par temps très froid.
Bien que ces ruptures soient finalement en nombre très faible, par comparaison avec celles
causées par surcharge (plastification) ou instabilité, elles sont particulièrement dangereuses.
En effet, elles ne peuvent que difficilement être détectées à l'avance, car elles se produisent
avec peu ou pas de déformation préalable. Par ailleurs une fois initiée, la rupture fragile se
propage a une vitesse telle (2000 m/s) que toute action corrective est impossible, Ces
caractères justifient l’immense effort de recherche qui y a été consacré et qui a abouti à la
création d'une nouvelle discipline : la mécanique de la rupture.
Considérons une plaque percée d'un trou elliptique, chargée en traction. Inglis a montré que la
contrainte à l'extrémité du grand axe de l'ellipse est supérieure à la contrainte appliquée dans le
sens du petit axe.
Supposons que cette ellipse représente un défaut au sein de la plaque. La contrainte à son
voisinage peut égaler plusieurs fois la contrainte appliquée σa le facteur de proportionnalité étant
appelé facteur de concentration de contrainte KT :
En conclusion plus un matériau contient de défauts ou plus la géométrie d'une pièce est
tourmentée, plus le risque est élevé. II s'agit la du phénomène appelé «effet d'entaille».
3. Essai de Résilience
La sensibilité d'un matériau à l’effet d'entaille se mesure par un essai de résilience consistant
en un chargement statique ou dynamique d'une éprouvette entaillée. L'essai le plus
traditionnel est l'essai de flexion par choc sur éprouvette bi-appuyée, communément appelé
essai Charpy.
Au cours de cet essai, l’éprouvette est rompue par choc sous l’effet d’une masse pendulaire
(mouton-pendule). L’énergie absorbée par la rupture de l'éprouvette est appelée Résilience.
Elle s’exprime en Joules/cm2 ou simplement en Joules lorsque l'éprouvette a des
dimensions normalisée.
ENSAM/MEKNES 21 Moulay Rachid Kabiri
Comportement Mécanique des Matériaux
Des essais Charpy réalisés à différentes températures montrent que la résilience est
étroitement liée à la température (fig.1). II est en effet évident que si la température baisse,
le matériau devient «cassant», donc sujet à une rupture fragile. A température plus élevée,
on constate au contraire que la rupture s'accompagne d'une plus grande déformation
plastique, caractère révélateur d'une rupture ductile. Les températures où se manifestent ces
comportements dépendent du matériau considéré.
Résilience J/cm²
Température °C
Ces contraintes ont été calculées par Irwin à l'aide de la théorie de l'élasticité. Elles sont
exprimées par les relations ci-après, avec les notations de la figure 2 et les connotations
suivantes : coefficient de Poisson, CP : contraintes planes et DP : Déformations planes
En mode I
en CP, en DP et
En mode II
en CP, en DP et
En mode III
et
Les facteurs Kl, Kll et Klll caractérisent à la fois les géométries de l’éprouvette et celle de la
fissure, et la nature des sollicitations. Ils sont appelés facteurs d'intensité de contrainte et
s'expriment en MPa m1/2.
Considérons un solide de surface initiale S0 dans lequel on crée une fissure A(t) variable
dans le temps. L’équilibre thermodynamique du corps requiert que :
En notant S(t) = S0 + A(t) la surface totale du solide, on peut écrire, en supposant une
situation quasi-statique (dT/dt = 0) :
Où
GI : force d’extension de la fissure
a : longueur de la fissure
E* = E en CP et E* = E/(1- ²) en DP
La fissure ne peut se propager que lorsque GI atteint une valeur critique GIc caractéristique
du matériau, ce qui signifie qu’ il existe aussi une valeur critique KIc du facteur d’intensité
de contrainte telle que la fissure ne se propage de façon instable que lorsque : KI ≥ KIC
KIc appelée ténacité, caractérise la résistance du matériau à la propagation plane des fissures
en mode I. Sa valeur est indépendante de la géométrie du détail et des conditions de
chargement, à condition que le matériau soit isotrope.
Il s’ensuit que le concepteur peut théoriquement agir sur trois facteurs afin de réaliser cette
inégalité :
Sélection d’un matériau ayant une meilleure résistance à la rupture, c’est à dire
possédant un KIc plus élevé à la température de service.
Abaissement du niveau de sollicitations, soit globalement par diminution de la
contrainte nominale, soit localement en évitant les concentrations de contrainte
dans les régions sujettes à fissuration.
Contrôle des défauts de la structure de façon à abaisser la dimension critique des
fissures.
En réalité, la contrainte est bornée par la limite élastique e du matériau. Il existe donc une
zone au voisinage du front de fissure où la contrainte atteint la limite élastique. En
première approximation on peut admettre que cette zone plastique est circulaire de
diamètre rp tel que :
En fait, la limitation impose une redistribution des contraintes (figure 3), de sorte
que la zone plastique est plus étendue que ne l’indique le calcul précédent. Il est
généralement admis de considérer que la zone plastique est circulaire de rayon rp (et non
plus de diamètre rp).
Le calcul précédent est valable en état de contraintes planes seulement. Lorsque l’on est en
état de déformations planes, la triaxialité des contraintes change ce calcule, ainsi le rayon de
La forme circulaire de la zone plastique que nous avons admise au cours de cette première
approche n’est que grossière approximation. En fait, si l’on adopte soit le critère de Tresca,
soit celui de Von Mises, on obtient une forme sensiblement différente qui, de plus, varie
dans l’épaisseur de la pièce puisque la surface règne un état de contraintes planes alors qu’à
cœur l’on se rapproche davantage d’un état de déformations planes. La figure 4 illustre ce
phénomène dans le cas d’un calcule fondé sur le critère de Von Misés. On remarque que la
taille de la zone plastique est sensiblement plus faible à mi-épaisseur qu’en surface.
Dans le cas des modes II et III, la forme et la taille de la zone plastique sont sensiblement
différentes. La figure 5 indique ces zones, dans le cas d’un calcul fondé sur le critère de Von
Misés.
Dans ces deux cas, la prise en compte de la redistribution des contrainte est assez délicate et
requiert l’usage de méthodes de relaxation, ceci a été fait par Stimpson, Eaton, et Mc
Clintock. Malgré ces nombreux modèles, la taille et la forme de la zone plastique restent
mal connues. Par ailleurs, la difficulté de la mesure de la zone plastique rend quasi-
impossible toute vérification expérimentale, que ce soit par microscopie électronique à
transmission ou par rayon X.
Lorsque la taille de la zone plastique n’est pas négligeable en regard des dimensions du
corps ou de la longueur de fissure, la longueur à considérer est alors une longueur dite
effective aeff, telle que aeff = a + rp.
Si cette condition n’est pas vérifiée, on propose une correction du K Ic pour prendre en
considération les effets des dimensions de la pièce, selon l’équation ci-dessous :
Si la valeur corrigée est très supérieure à la valeur de KIc, les effets des dimensions sont trop
importants, on conclura que la mécanique linéaire de la rupture n’est pas applicable.
Les principaux mécanismes que l’on peut mettre en évidence sont les suivants :
Ces images ont été prises au MEB après rupture fragile d’un acier. La fissure se propage sur
100 microns. La rupture montre des micro-mécanismes de clivage différents selon la
microstructure locale du métal : ferritique (Fig. 9) ou bainitique (Fig. 10). Les facettes de
clivage de la ferrite sont caractérisées par leur aspect lisse qui ne montre que les rivières de
clivage. La taille des facettes dans la ferrite correspond bien à la taille de grains observée en
microscopie, qui est de 10 microns de long. Pour le clivage de la bainite (Figure 10), on
observe que les facettes sont plus petites. Sur certaines d’entre elles, on distingue des reliefs
rappelant des joints de faible désorientation entre lattes ou groupes de lattes (photo en bas à
droite de la Figure 10).
Conclusions
La mécanique de rupture ne s’applique pas pour toute taille de défaut et notamment pour
les très petits comme pour les très grands. Ces limites dépendent d’ailleurs des
matériaux. La limite inférieure est très faible pour les métaux, assez grande pour les
composites. Pour ces derniers, la dispersion des résultats ne permet d’ailleurs pas de
trancher entre un critère de rupture type mécanique de rupture ou analyse limite.
Les concepts précédemment énoncés ne sont valables que dans le cas d’un matériau isotrope
ayant un comportement élastique parfaitement plastique. Par ailleurs, la concentration de
contrainte en fond d’entaille crée une plastification locale. Il est nécessaire que la taille de
cette zone plastique reste petite par rapport à la longueur de la fissure et aux dimensions de
la structure de façon à ne pas perturber la distribution élastique des contraintes.
Exercice n°1
Un barreau en acier (Re = 1790 MPa, KIc = 90 MPa.m1/2) de section carrée 120 * 120 mm²
est soumis à une force de traction F = 12 MN. Ce barreau contient une fissure d'angle en
quart de cercle de rayon a = 1 cm (voir la figure ci-dessous).
a
Le facteur d'intensité de contraintes pour ce cas de figure K I 2 (1.12)²
Est ce que le barreau va résister à la charge appliquée ?
Exercice n°2
On donne :
La ténacité KIc = 44 MPa.m1/2 et la contrainte théorique de rupture est u = 1390 MPa.
Le procédé de fabrication et les moyens de contrôle laissent penser que des fissures radiales
de profondeur a = 5 mm peuvent exister sur la face interne du tuyau.
Exercice n°3
Un critère de rupture possible dans cette configuration est donnée par 60°
2 2
KI K II
l'équation suivante : 1 (figure 2) 2a
K Ic 2K Ic
b b
Dans le cas où b >> a, on donne K I sin ² a ; K II sin cos a
Dans notre cas, il faut tenir en compte de la largeur de la plaque, donc il faut multiplier les
deux facteurs d'intensité de contraintes par un facteur de forme correcteur :
a' a' a'
1 0.5 0.37( ) 2 0.044( ) 3
a' b b b
f( )
b a'
1
b
Où a’ est la projection de a sur la normale à la ligne de chargement.
Exercice n°4
Un réservoir cylindrique sous pression (int = 40 cm et ext = 48 cm) est fabriqué en alliage
d'aluminium (Re = 385 MPa et KIc = 44 MPa.m1/2). Ce réservoir doit supporter une
pression interne P = 70 MPa. Les techniques d'inspection ne permettent pas de déceler en
service des fissures débouchantes sur la face interne de moins 0.5 cm de profondeur et 3 cm
de largeur.