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LA incipit de La Parure, Maupassant

Nouvelle parue dans le journal Le Gaulois du 17 fév. 1884. Un récit composé à la manière
d’un roman mais qui s’en distingue par sa brièveté et la simplicité de son sujet.
Genre qui devient à la mode grâce à la presse écrite qui consacrait qq pages de ses quotidiens
aux récits d’auteurs célèbres et appréciés du grd public. Une façon de fidéliser les lecteurs.
Maupassant : romancier et nouvelliste faisant partie du cercle d’amis du naturaliste Zola,
grand admirateur de Flaubert qui est sont parrain littéraire.
Un récit réaliste, sobre, une chute amère et ironique qui marque les esprits…Histoire d’une
femme que le désir d’appartenir à une catégorie sociale supérieure à la sienne perd, d’une
femme victime de son désir de paraître en société. (L’action est contemporaine de l’époque
d’écriture, elle se passe probablement sous le 2d Empire. L’action se passe sur 10 ans, à
compter de la perte de la parure. M. loisel travaille au ministère de l’Instruction publique.
Mathilde Loisel emprunte une parure pour aller à un bal en janvier, quitté vers 4 h du mat. Le
couple cherche une copie du bijou au bout d’une semaine et attend encore trois jours avant de
l’acheter. 10 ans plus tard, M. rencontre Mme forestier par hasard, sur les chps élysées et lui
raconte tt. Après un sommaire qui résume dix années d’existence pénible à rembourser la
dette, le récit s’achève brutalement : la dernière réplique dévoile la vérité : la rivière de
diamants était fausse.
Ici, incipit de la nouvelle, un moment clé car il donne le ton de la nouvelle, amorce l’intrigue
et donne le statut du narrateur par rapport à son personnage. L’instant du bal qui détermine
une vie, et ce désir de paraître qui détermine toute une vie.

Problématique : Dans quelle mesure le récit peut-il être un moyen d’argumenter, de pousser le
lecteur à discerner un problème dans un personnage qu’on met en jeu ?
Dans quelle mesure ce récit est-il marqué par le registre satirique et a-t-il une visée
didactique ?

I) Présentation du personnage : Identité et caractérisation

a) un personnage presque stéréotypé 

- Un incipit qui semble débuter comme un conte : présentatif à l’imparfait : « c’était «  ->
comme une réécriture de Cendrillon ou de la Belle au bois dormant (le ton semble donné :
pastiche à visée critique d’une fille victime de la misère et du destin)
- Peu d’info sur la biographie passée et présente
On ne connaît pas son nom au début : « elle » suffit à la désigner, « une de ces filles »
présente le personnage comme représentant d’une catégorie de personne plus que comme un
personnage particulier. On sent comme une distance prise par le narrateur

b) condition sociale moyenne

- origine sociale : Née d’une famille d’employés


Mariée à « un petit commis du ministère de l’Instruction publique.
Pas un mariage d’amour : « se laissa marier », faute d’être épousée par « 
un homme riche et distingué »
- Condition sociale 3ème l. : « elle n’avait pas de dot », met l’accent sur son origine sociale
Issue d’une famille modeste, d’employés qui lui interdit de rencontrer un homme riche
Rapport de causalité rendu par la juxtaposition : « elle n’avait pas de dot, aucun moyen d’être
épousée par un homme riche »
- elle n’a pour elle que sa beauté : « car les femmes qui n’ont point de caste…leur beauté,
charme leur sert de naissance… », « finesse », « instinct d’élégance »
Vêtue simplement : « ne pouvant être parée »
- Son existence sur le plan matériel est simple
Champ lexical du logis associé à une grande modestie : elle souffre d’une certaine « misère »,
« humble ménage » confié aux soins d’une « petite bretonne », « la pauvreté de son
logement » suggéré par cette nappe qui recouvre la table « depuis 3 jours »
« le pot au feu « : plat rustique devant lequel son mari s’ébahit   
= une femme modeste, jolie, mais mal mariée et de condition modeste.

Tr : Peu d’informations sur les caractéristiques physiques du personnage


mais pléthore de renseignements sur ses souffrances psychologiques, ses complexes

II) La souffrance de Mathilde

a) un personnage qui souffre

champ lexical de la souffrance : « souffrait » x3 dt au début et à la fin du portrait


« torturaient », « pleurait »
Gradation : « regrets », « chagrin », « désespoir », « détresse »
On sent un personnage accablé

b) une souffrance liée à la privation


- suggérée par de xtiples négations :
« n’avait pas de dot », « aucun moyen de », « ne pouvant être parée », « n’avait pas de
toilettes », « pas de bijoux, rien ». On est ici dans un point de vue interne à Mme Loisel mais
on sent aussi la présence ironique du Nr qui souligne la distorsion de son jugement : elle
estime n’avoir rien, alors qu’elle a tt de même une vie confortable (une domestique par
exemple)
Elle ne ressent qu’un grand dépit face à la richesse d’autrui, elle condamne même une
ancienne amitié parce que sa camarade est riche.
- Mme Loisel a conscience de sa condition. Pr une sorte de dédoublement, elle s’observe et
compare son existence à l’apparent confort bourgeois : « ttes les choses dont une autre femme
de sa caste ne se serait pas aperçue…l’indignaient ».
Elle ne se définit que par rapport à la bourgeoisie de son époque et que par rapport à des
préoccupations et valeurs purement matérielles

c) Un personnage qui se sent victime de son destin :


- pas à sa place car mal née « comme par erreur du destin » : pt de vue interne à Mme Loisel
ou pt de vue du Nr et ironie sur le personnage qui met en évidence la fausseté de son jugement
Elle impute sa naissance au sein d’une famille d’employés à « une erreur du destin ».
- mariée à un petit commis comme par fatalité alors que le « se laissa marier » exprime sa
passivité et un fatalisme inconscient
- le malheur de Mme Loisel est lié au sentiment d’être « comme une déclassée ». Il y a un
écart entre ses moyens et ses désirs de bourgeoisie.
« Elle souffrait sans cesse, se sentant née pour toutes les délicatesses et tous les luxes »
Elle est tiraillée entre la réalité de l’existence et ses désirs. Elle ressent une opposition entre la
réalité de sa vie et ses aspirations.
- Egalité d’éducation avec la bourgeoise Mme Forestier et pourtant inégalité de statut qui lui
fait éprouver un sentiment d’injustice et fait d’elle un personnage rongé par l’envie.

III) Une rêverie compensatoire : la féerie contre le prosaïsme du mari


Mathilde cherche à échapper à son univers, à son environnement dont « la misère », « la
laideur », « l’usure ». Opposition entre réalité et rêves

a) une imagination fertile :

Sur 53 lignes de l’incipit, 29 sont consacrés au songe de Mme Loisel


« songeait » est répété 4 fois (parallélisme avec « elle souffrait »
Une accumulation de GN C d’objet de songeait qui montre combien l’imagination de Mme
Loisel est fertile : « grands salons », meubles fins, « dîners fins » : une seule phrase très
longue qui nous met dans les rêveries du personnage (pt de vue interne)

b) la teneur de ses rêves et désirs :


. rêves de déduction : « elle eût aimé » conditionnel passé » indique son rêve et en filigrane tte
sa frustration de ne pas être séduisante, par manque de moyens financiers.
. rêveries sensuelles : le monde imaginaire de Mme Loisel, tel qu’il est évoqué est plein de
sensualité :
- ameublement et décoration orientales (tissus soyeux des « tentures orientales », « soie
ancienne », parois « capitonnées » évoquant une alcôve
- lascivité dans la position des valets : « deux grands valets en culotte courte qui dorment dans
de larges fauteuils, assoupis par la chaleur »
- rêve de lieux d’intimité, de « galanteries » : « antichambres éclairées par de hautes
torchères », « petits salons coquets » , où se trouveraient les « amis les plus intimes »
Plaisirs des sens évoqués (ouïe : « galanteries chuchotées », « antichambres muettes »
évoquant le secret, vue « antichambres éclairées », toiucher « soie ancienne », odorat salons
« parfumées, goût « en mangeant la chair rose d’une truite ou des ailes de gélinotte »
= un univers onirique très érotique

c) Une compensation illusoire :


Le songe vécu comme une compensation face à une vie médiocre mais ne libère jms Mme
Loisel de sa souffrance. C’est un monde illusoire, qui ne peut l’empêcher de pleurer
« pendant des jours entiers, de chagrin, de regret, de désespoir, et de détresse ; un chagrin
tellement exagéré qu’il en devient ridicule pour le lecteur.
L’héroine est enfermée dans son désir d’une autre vie et dans un rêve très illusoire.
Mme Loisel, un être ordinaire, écartelée entre son envie d’être une bourgeoise et la réalité de
sa condition modeste. Elle est esclave de son désir d’être autre, d’appartenir à une autre
catégorie sociale, soumise à un complexe d’infériorité sociale (avec un sentiment d’être au
fond supérieure)
Soumise au désir de paraître, ce qui l’empêche d’être.

CCL : Un personnage dont on sent la détresse. Pourtant le lecteur n’est pas invité à faire
preuve d’empathie, pas plus que le narrateur ne le fait. L’incipit pousse davantage le lecteur à
prendre une distance critique. Le personnage est évoqué à travers un registre volontiers
satirique ; il est présenté comme victime de lui-même, de son envie, de sa jalousie, de son
matérialisme, d’une vision simpliste des choses (liée peut-être à l’éducation reçue au couvent)
et de son absence de vie spirituelle. Elle est victime de son désir de paraître et de son
mensonge, de son désir d’être une autre, d’avoir un autre statut.
Une dichotomie qui oppose les rêves et la réalité de Mme Loisel et qui entraîne sa chute.
Un engrenage tragique : un désir de paraître qui, avec la perte de la parure et son rachat,
amène Mme Loisel à avoir une vie très difficile.
Un personnage de l’échec : non seult elle perd une parure prêtée mais elle poursuit une
existence encore plus pauvre qu’avant, et tt ça pour rien !!
Un destin ironique : tentant d’échapper à son quotidien médiocre et à sa condition lorsque son
rêve devient réalité le soir du bal, le rêve tourne au cauchemar. Mme Loisel retourne dans une
misère encore plus grande.
En bref, c’est l’histoire d’une femme jeune et belle qui n’est pas heureuse parce qu’elle ne se
satisfait pas de sa vie actuelle. Elle est passive et ne fait que rêver d’une existence faite de
richesses et de luxe. Pr elle tt n’est qu’apparence. Mme Loisel est prisonnière des préjugés de
la société dans laquelle elle vit, de ses propres préjugés donc et de l’envie. Plus largement,
c’est la société du 19ème qui est critiquée
Il s’agit d’une nouvelle dont on sent la visée moralisatrice, ce qui la rapproche de l’apologue.

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