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Echelle H

Echelle de désespoir
(Hopelessness scale)
J. Cottraux

Auto-évaluation
Echelle d'intensité

Résumé
L'échelle de désespoir est une mesure du pessimisme. Elle permet aussi d'évaluer le
risque suicidaire. Elle est actuellement une mesure facile à utiliser dans la clinique de tous
les jours et la recherche sur la dépression et le suicide. Fiable, homogène, sensible, elle a
été bien validée dans sa version anglaise et française. Elle est utilisée depuis 15 ans en
clinique et recherche.

Introduction
L'échelle de désespoir est une mesure d'une des dimensions cognitives de la dépression :
le pessimisme. Elle représente aussi une mesure permettant d'évaluer les risques de
tentatives de suicide ou de suicide.

Historique et présentation
L'échelle de désespoir présentée en France sous le nom de Questionnaire H est la
traduction française de la "Hopelessness scale" mise au point par Beck A.T. (1974). Cette
traduction a été publiée in Cottraux, Bouvard et Légeron (1985). Elle repose sur un certain
nombre d'hypothèses concernant la dépression.
a) Selon Beck, l'une des bases de la dépression serait des schémas cognitifs
dysfonctionnels situés dans la mémoire à long terme et qui polarisent l'information dans un
sens négatif systématique.
b) Le sujet dépressif a pour caractéristique l'absence de projection dans le futur et une vue
lugubre de celui-ci. Beck a décrit la triade cognitive qui associe des considérations
négatives sur soi, le monde extérieur et le futur. L'échelle de désespoir est une mesure du
pessimisme chez le dépressif, et elle a pour but l'évaluation de potentialités suicidaires.
Elle évalue aussi les schémas cognitifs dysfonctionnels dont le dénominateur commun est
l'absence de projection positive dans le futur. C'est une échelle de dépression, dont le
score global reflète indirectement l'intention suicidaire.

Mode de construction
Deux sources ont été utilisées (Beck et al., 1974). Neuf items ont dérivé d'un test d'attitude
vis-à-vis du futur présenté sous la forme du différenciateur sémantique. Les autres items
ont dérivé d'un pool d'énoncés pessimistes concernant le futur effectués par des patients
psychiatriques à la demande de psychiatres qui évaluaient ensuite le caractère désespéré
de ces énoncés. L'échelle a ensuite été présentée à des patients déprimés et non
déprimés et reformulée en fonction de commentaires provenant des patients et de
psychiatres. Finalement vingt items ont été retenus.

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Etudes de validation
1) Travaux anglo-saxons
La validité concourante et la validité interne ont été démontrées (Beck et al., 1974). De
nombreuses études ont montré la validité, l'homogénéité, la fiabilité et la sensibilité de
cette échelle. Une analyse factorielle avec rotation Varimax a isolé 3 facteurs : sentiments
négatifs vis-à-vis du futur (41,7 %), perte de motivation (6 %) et attentes négatives vis-à-
vis de l'avenir (5 %).
Plusieurs études ont montré la valeur prédictive de l'échelle en ce qui concerne les
tentatives de suicide. Une valeur moyenne de 13 a été retrouvée chez des sujets ayant
fait par la suite des tentatives de suicide.
Une étude sur 207 patients, dont 14 se suicidèrent, a montré qu'un score de 10 identifiait
correctement 91% des suicides. Un score élevé à cette échelle représente un meilleur
corrélat d'intentions suicidaires que la sévérité clinique de la dépression.
2) Travaux français
Une étude a été effectuée par Charles et coll. (1989) chez 100 déprimés majeurs et 93
contrôles, ne présentant pas de troubles psychopathologiques patents. L'échelle est
valide : elle différencie bien les sujets dépressifs (moyenne : 13,05 ; écart type = 4,83) des
sujets contrôles (moyenne : 5,36, écart-type : 3,65). L'échelle est fidèle : fidélité test-retest
= 0,81. Enfin elle est homogène. L'homogénéité a été calculée avec le coefficient de
Cronbach. Il est chez les dépressifs de 0,87 et, chez les contrôles, de 0,79.
L'analyse de la structure factorielle chez les 193 sujets a montré un premier facteur
reflétant des sentiments négatifs vis-à-vis du futur (38,5 %) : ce facteur est le facteur
général de l'échelle. Trois autres facteurs ont une valeur propre supérieure à 1, mais leur
faible contribution à l'explication de la variance les rend négligeables.

Mode de passation
L'échelle est présentée au patient dans la version française comme l'échelle "H", de façon
à ne pas induire, encore davantage, le désespoir. Il s'agit d'un questionnaire d'auto-
évaluation en vrai et faux. Le sujet attribue un caractère vrai ou faux à chacun des items
en cochant la colonne appropriée.

Cotation
L'échelle de désespoir consiste en 20 items en vrai ou faux : 9 items reflètent le
pessimisme s'ils sont cotés faux ; et 11 items le reflètent s'ils sont cotés vrai.
1 - On attribue la note 1 aux items 2, 4, 7, 9, 11, 12, 14, 16, 17, 18, 20, s'ils sont cotés vrai.
2 - On attribue la note 1 aux items 1, 3, 5, 6, 8, 10, 13, 15, 19, s'ils sont cotés faux.
L'étendue de l'échelle va de 0-20. Plus la note est élevée, plus le pessimisme (vue
négative du futur) est grand et plus le risque suicidaire est élevé.

Applications
Il s'agit d'un instrument simple qui peut aider les médecins généralistes, les spécialistes, et
tous les professionnels de santé mentale à évaluer la projection négative du patient dans
le futur et le risque suicidaire. Il peut aussi valablement être utilisé dans les services
d'urgence psychiatrique, en épidémiologie, et dans les essais thérapeutiques concernant
la dépression, qu'il s'agisse de psychothérapie ou de psychopharmacologie. Enfin, dans la
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mesure où l'échelle évalue les schémas cognitifs concernant le futur, elle peut être utilisée
dans des travaux expérimentaux cherchant à évaluer les hypothèses cognitives
concernant la présence de schémas dans la mémoire à long terme.

Intérêts-limites
Il s'agit d'une échelle facile de passation, bien acceptée par les patients. Le fait que de
nombreux items soient inversés permet d'éviter le biais des attitudes de réponses
systématiques. Comme on l'a vu, son domaine d'application va de la clinique quotidienne
à la recherche.
Mais l'échelle "H" ne mesure qu'indirectement le risque suicidaire ; c'est pourquoi le
groupe de Beck a développé une échelle plus précise d'intention suicidaire, non encore
traduite dans notre pays.

Bibliographie
BECK A.T., WEISSMAN A., LESTER D., TREXIER L. The measurement of pessimism :
the "Hopelessness scale". Journal of Consulting and Clinical Psychology, 1974, 42, 6,
861-865.

BECK A.T., STEER R., KOVACS M., GARRISON B. Hopelessness and eventual suicide :
a 10-year prospective study of patients hospitalized with suicidal ideation. American
Journal of Psychiatry, 1985, 142, 559-563.

CHARLES S., CHAMBON O., BOUVARD M., MOLLARD E., DUCHER J.-L., COTTRAUX
J. The hopelessness scale, French version : validation and predictive validity. Présenté au
"World Congress of Cognitive Therapy", Oxford, 28 juin - 2 juillet 1989.
COTTRAUX J., BOUVARD M., LEGERON P. Méthodes et échelles d'évaluation des
comportements. Editions d'applications psychotechniques, Issy-les-Moulineaux, 286 p.,
1985.

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ECHELLE H
ECHELLE DE DESESPOIR
(HOPELESSNESS SCALE)
A.T. BECK
Traduction française : J. COTTRAUX et al.

Outil d’évaluation
NOM :
PRENOM :
SEXE : AGE : DATE :

INSTRUCTIONS
Veuillez attribuer à chacune des affirmations ci-dessous la caractéristique vrai ou faux en cochant la case
correspondante.
Vrai Faux

1 J'attends le futur avec espoir et enthousiasme. ❑ ❑


2 Je ferais mieux d'abandonner car je ne puis rendre les choses meilleures pour moi. ❑ ❑
3 Quand cela va mal, il m'est utile de savoir que cela ne durera pas toujours. ❑ ❑
4 Je ne peux imaginer ce que ma vie sera dans 10 ans. ❑ ❑
5 J'ai assez de temps pour réaliser ce que je désire le plus faire. ❑ ❑
6 Dans le futur, je m'attends à réussir dans ce qui compte le plus pour moi. ❑ ❑
7 Mon avenir me semble sombre. ❑ ❑
8 Je m'attends à avoir plus de bonnes choses dans la vie que la moyenne des gens. ❑ ❑
9 Je n'ai pas de répit et il n'y a pas de raisons de croire que j'en aurai dans le futur. ❑ ❑
10 Mon expérience passée m'a préparé(e) parfaitement pour l'avenir. ❑ ❑
11 Le déplaisir est devant moi, bien plus que le plaisir. ❑ ❑
12 Je n'espère pas avoir ce que je désire le plus. ❑ ❑
13 Quand je considère l'avenir, je m'attends à être plus heureux que maintenant. ❑ ❑
14 Les choses ne sont pas comme je le veux. ❑ ❑
15 J'ai foi en l'avenir. ❑ ❑
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Éval. Clin. Stand. J.D. Guelfi et al., P.F. 92
16 Je n'ai jamais ce que je veux, par conséquent il est ridicule de désirer quoi que ce soit. ❑ ❑
17 Il est tout à fait improbable que j'obtienne de réelles satisfactions dans le futur. ❑ ❑
18 L'avenir me semble vague et incertain. ❑ ❑
19 Je m'attends à plus de bons moments que de mauvais moments. ❑ ❑
20 Il ne sert à rien de chercher à avoir quelque chose que je désire, parce que probablement
je ne l'obtiendrai pas. ❑ ❑

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Éval. Clin. Stand. J.D. Guelfi et al., P.F. 92

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