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MÉTHODE DU RELEVÉ FLORISTIQUE

L’échantillonnage consiste en général à choisir dans un ensemble un nombre limité


d’éléments, de façon à obtenir des informations objectives et d’une précision mesurable sur
l’ensemble.
L’étude de la flore porte sur la réalisation des relevés phytoécologiques et le traitement
des résultats par l’application d’indices écologiques. Elle s’appuie sur la technique du relevé
phytosociologique de Braun-Blanquet qui consiste à dresser la liste des plantes présentes dans
un échantillon représentatif et homogène du tapis végétal en opérant strate par strate.
À l’intérieur de chaque phytocénose reconnue sur le terrain, il est recherché une surface
de végétation homogène et représentative afin d’y effectuer les relevés phytoécologiques. La
surface du relevé doit être égale à l’aire minimale ou autrement dit une surface suffisamment
grande pour contenir la quasi-totalité des espèces présentes dans la communauté végétale.

1- Définition de l’association végétale


- En 1897, selon Flahault :
Une association est l’ensemble des espèces adaptées aux mêmes conditions
physicochimiques et qui se font nécessairement cortège.
- En 1910, Flahaut et Schröter :
Une association végétale est une communauté végétale de composition floristique
déterminée, présentant une physionomie uniforme, et croissant dans des conditions
stationnelles uniformes.
- En 1915, Braun-Blanquet :
Une association est un groupement végétal plus ou moins stable, en équilibre avec le milieu
ambiant, caractérisée par une composition floristique déterminée, dans laquelle certains
éléments exclusifs, ou à peu près, appelés espèces caractéristiques, indiquent par leur
présence une écologie particulière et autonome.
Dans une association, il y a donc des espèces apatrides, ou compagnes, et des espèces
caractéristiques, indicatrices du milieu.
- Finalement, Allorge, en 1922, proposa cette définition :
Une association est un groupement végétal caractérisé par une composition
floristiquement déterminée et relativement constante dans les limites d’une aire donnée. Toute
association représente un stade plus ou moins stable et de durée plus ou moins longue dans
une série progressive ou régressive d’associations.
Cette dernière définition introduit une notion dynamique. En effet, une association végétale
est limitée dans l’espace, et elle peut se transformer avec le temps, le climat et l’action
humaine.

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2- Choix des sites de prélèvements
La vision à l’échelle paysagère basée sur la physionomie, amène à choisir les éléments
majeurs, significatifs, représentatifs et répétitifs du paysage végétal (formations végétales) à
étudier.

Physionomie de la végétation d’une forêt


Différents feuillages, différents ports, différentes physionomies

Physionomie de la végétation d’une zone humide


Différents feuillages, différents ports, différentes physionomies

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A l’intérieur de l’élément paysager choisi, une vision va guider le choix d’emplacement
des relevés et de leurs limites. Les critères fondamentaux de ce choix sont les trois (3) critères
d’homogénéité :
- Homogénéité floristique, apparition plus ou moins régulière de combinaisons définies
d’espèces, c’est-à-dire répétitivité de la combinaison floristique ;
- Homogénéité physionomique, aspect lié à la dominance d’une ou plusieurs espèces ;
- Homogénéité des conditions écologiques, uniformité des conditions apparentes c’est-
à-dire homogénéité dans la physionomie et la structure de la végétation ainsi que les
conditions édaphiques.

3- Réalisation d’un relevé


Trois conditions sont exigées pour la réalisation d’un relevé :
- Dimensions adéquates, pour contenir un échantillon d’espèces représentatives de la
communauté ;
- Uniformité de l’habitat, le relevé ne débordera pas sur deux habitats différents ;
- Homogénéité de la végétation, en n’incluant qu’un stade successionnel ou qu’une phase
dynamique ; il existe des outils statistiques pour tester l’homogénéité de la végétation.

4- Aire minimale phytosociologique


L’aire minimale phytosociologique répond à la première condition (Dimensions
adéquates). La notion d’aire minimale est conçue comme l’aire sur laquelle la quasi-totalité
des espèces de la communauté végétale est représentée. C’est la plus petite surface sur laquelle
ressort la plupart des espèces. Elle varie selon les groupements végétaux. Une approche
classique repose sur la « méthode des surfaces emboîtées » amène à mesurer l’aire minimale
est représentée sur la figure ci-dessous.

Système de surfaces emboîtées pour déterminer l’aire minimale


Chaque placette numérotée à partir de 1 contient la surface de la placette précédente.
Ainsi, les placettes impaires sont carrées et les placettes paires sont rectangulaires.

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Un exemple illustrera cette méthode. Dans une futaie (forêt adulte) de chêne sessile,
vieille de 150 ans, Lemée et Walter (1972) ont enregistré les espèces rencontrées dans chaque
surface choisie, le nombre total des espèces était 39 espèces. En portant le nombre cumulé
d’espèces « S » en fonction de l’aire « A » en (m2), on obtient le graphique suivant :

Courbe aire-espèces dans la chênaie


Des lignes pointillées verticales correspondent à 90% et 95% des 39 espèces (S = 39).
Elles sont abaissées jusqu’à l’axe des x pour déterminer l’aire minimale qui serait de 150 m2 (un quadrat de
≈ 12 × 12 m) ou de 200 m2 (un quadrat de ≈ 14 × 14 m), respectivement.
Comme la courbe-aire espèces n’est pas asymptotique (sa pente entre l’avant-dernier point et le dernier est
encore de 0,039), il serait plus judicieux de porter l’aire minimale à 400 m2 (un quadrat de 20 × 20 m).
Une telle surface garantirait l’homogénéité floristique des relevés dans la chênaie.

Cette chênaie possède S = 39 espèces sur un quadrat de 256 m2, soit un carré de 16 m
x 16 m. Cependant, la courbe cumulative d’espèces (la courbe aire-espèces) n’est pas encore
asymptotique. L’échantillon est donc insuffisant. Il faudrait prolonger la courbe en étendant
l’inventaire des espèces sur un quadrat rectangulaire de 512 m2, soit 16 × 32 m de côtés.
En pratique, la valeur de l’aire minimale s’apprécie assez facilement. Elle est
sensiblement constante pour les divers relevés d’un groupement déterminé, mais varie
beaucoup d’un groupement à l’autre. Une immense expérience empirique a permis aux
phytosociologues de déterminer l’aire minimale phytosociologique. Voici quelques ordres de
grandeur pouvant servir à réaliser des relevés floristiquement homogènes :
- Forêts avec strate arbustive : 200–500 m2 ;
- Sous-bois seul : 50–200 m2 ;
- Pelouses : 50–100 m2 ;
- Landes : 10–25 m2 ;
- Prairie amendée : 10–25 m2 ;
- Pâturage amendé : 5–10 m2 ;
- Communauté de « mauvaises herbes » des cultures : 25–100 m2 ;
- Communauté muscinale : 1–4 (0,1–0,4) m2 ;
- Communauté lichénique : 0,1–1 m2.

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Il ne faut perdre de vue que la taille du quadrat est une des composantes essentielles de
l’échantillonnage en écologie. Le problème de l’aire minimale devra être soigneusement
examiné avant toute campagne de recueil des données sur le terrain.

5- Composition d’un relevé


Le relevé comporte trois catégories d’informations :
- Géographiques : date, localité, coordonnées (éventuellement par GPS), altitude, pente,
exposition ;

- Environnementales : lithologie, drainage, humidité, humus, sol, pH, facteurs biotiques


(abroutissement par le gibier, défoliation, etc.), microclimat, lumière ;

- Spécifiques, ou floristiques : liste des espèces végétales, éventuellement en fonction de


la stratification des individus, avec des indications quantitatives d’abondance, de
recouvrement, de biomasse ou, simplement qualitatives de présence.

5.1- Indice d’abondance-dominance de Braun-Blanquet (AD)


Braun Blanquet a créé le coefficient d’abondance-dominance, qui associe les concepts
d’Abondance et de Dominance.
- L’Abondance exprime le nombre d’individus qui forment la population de l’espèce
présente dans le relevé (donc leur densité dans cette surface de relevé).

- La Dominance, concerne les interactions biotiques entre les individus des différentes
espèces, c’est-à-dire la dominance de certains par rapport aux autres. Elle représente le
recouvrement de l’ensemble des individus d’une espèce donnée, comme la projection
verticale de leur appareil végétatif aérien sur le sol.

Recouvrement d’un arbre

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Échelle des coefficients d’abondance-dominance de Braun-Blanquet :
- 5 : Nombre quelconque d’individus, Recouvrement > 3/4 de la surface de référence (>75%) ;
- 4 : Nombre quelconque d’individus, Recouvrement entre 1/2 et 3/4 (50–75%) ;
- 3 : Nombre quelconque d’individus, Recouvrement entre 1/4 et 1/2 (25–50%) ;
- 2 : Nombre quelconque d’individus, Recouvrement entre 1/20 et 1/4 (5–25%) ;
- 1 : Nombre quelconque d’individus, Recouvrement < 1/20, ou individus dispersés à couvert
jusqu’à 1/20 (5%) ;
- + : Peu d’individus, avec très faible recouvrement ;
- r : espèce rare.
Le coefficient d’abondance-dominance (AD) est estimé visuellement. Il ne s’agit donc
pas d’une véritable mesure. Son estimation est sujette à une part de subjectivité, qui est
cependant négligeable dans l’analyse phytosociologique globale.
Exemple : Sur la figure ci-dessous sont représentées des valeurs estimées d’abondance-
dominance (4, 2, 1, +, et r) d’une végétation fictive :

Représentation schématique des valeurs d’abondance-dominance pour (05) espèces

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Procédure
⎯ L’espèce couvre-t-elle plus de 50% ?
Si plus de 75%, coefficient 5
Si moins de 75%, coefficient 4
⎯ L’espèce couvre-t-elle moins de 50% ?
Si plus de 25%, coefficient 3
Si moins de 25%, coefficient 2
⎯ L’espèce couvre-t-elle moins de 5% ?
Si individus abondants, coefficient 1
Si individus peu abondants, coefficient +
⎯ L’espèce est-elle rare (individu unique, très faible recouvrement) ?
Coefficient r.

Représentation schématique de plusieurs taux de recouvrement de végétation

5.2- Sociabilité
La sociabilité est un indice majeur puisqu’elle exprime la répartition d’une espèce
végétale sur le territoire étudié. Elle désigne le degré de dispersion spatiale de ses individus,
d’éparse à dense, chaque espèce présente en effet ses propres caractéristiques (isolée, en
touffes petites ou grandes, en peuplement dense). En fait, cet indice donne une bonne idée de
la force de concurrence (pour l’eau, la lumière) propre à chaque espèce, donc traduit son
aptitude à se regrouper en peuplements plus ou moins étendus et denses.

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La sociabilité, suivant une échelle de 1 à 5 d’après Braun-Blanquet est notée de :
5 : Population presque pure, importante ;
4 : Petites colonies nombreuses ou formant un large tapis ;
3 : Population formant des petits groupes ou des coussins ;
2 : Agrégats ou groupes denses ;
1 : Croissance solitaire.

Représentation schématique des coefficients de sociabilité


5.3- Etat phénologique et vitalité
La phénologie indique le stade du cycle évolutif (ou stade phénologique) de chaque
taxon au moment du relevé. Elle est surtout utile pour la connaissance de la structure et des
rythmes biologiques de la végétation, l’étude diachronique des fluctuations et des successions
végétales...Elle désigne les diverses phases du cycle vital d’une espèce, en particulier d’une
plante supérieure. Il concerne les stades allant de : plantule, juvénile, feuillé, défeuillé, stérile,
fleuri et fructifié, mort.
Autres indices
Un indice de vitalité ou de vigueur peut également être adjoint aux espèces relevées.
Cet indice peut s’avérer intéressant pour certains types d’analyses mais il est globalement peu
employé et son attribution n’est pas obligatoire.
La vitalité exprime le degré de vigueur et de prospérité des taxons et notamment leur
aptitude plus ou moins efficace à la reproduction. Elle permet de mettre en évidence des
individus d’espèces qui n’accomplissent pas complètement leur cycle de vie au sein du
groupement végétal et donc ceux qui sont les moins adaptés au milieu.

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5.4- Richesse spécifique
La biodiversité floristique des différents groupements végétaux peut être mesurée par
leur richesse floristique. La richesse spécifique, désigne le nombre d’espèces présent dans un
écosystème donné ou dans une aire préétablie de ce dernier. Il se distingue en richesse totale
et richesse moyenne (RAMADE, 2008).

5.4.1- Richesse totale (S)


C’est le nombre total d’espèces présentes dans un biotope ou une station donnée :
S = sp1 + sp2 + sp3 + sp4 + … + spN
S: Nombre total des espèces ; sp1; sp2; sp3; sp4; spN : Espèces observées.

5.4.2.- Richesse moyenne (Sm)


C’est le nombre moyen d’espèces présentes dans les échantillons d’un peuplement étudié :
Sm = ∑ S / N où ∑ S = sp1 + sp2 + sp3 + sp4 + spN
Sm : Somme du nombre d’espèces recensées pour les N relevés ; N : Nombre total de relevés.
La richesse moyenne apporte des informations sur l’homogénéité (ou l’hétérogénéité) de la
distribution spatiale des espèces constituant le peuplement étudié.

5.5- Recouvrement
Le recouvrement désigne la proportion de la surface totale d’une station couverte par une
espèce végétale. Le degré de couverture, désigne le pourcentage de la surface du sol couverte
par la végétation. L’approche de calcul du recouvrement est en fonction de la forme de la
surface résultant de la projection de la partie aérienne du végétal (DURANTON et al., 1982).

R (%) = π (d/2)² x (N/S) x 100 (forme circulaire de la partie aérienne)


R (%) = a × b (forme rectangulaire de la partie aérienne)

d : diamètre moyen en m N : nombre de pieds de l’espèce


S : surface échantillonnée a : longueur b : largeur

5.5.1.- Taux de recouvrement


D’après GOUNOT (1969), le taux de recouvrement est calculé selon la formule suivante :

TR = (Rci / Rct) x 100


TR : Taux de recouvrement
Rci : recouvrement de l’espèce i
Rct : recouvrement total

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5.6- Densité
Les mesures de la densité sont exprimées en nombre d’individu par unité de surface (are
100 m2 ou par hectare), elle se mesure par comptage direct ou par estimation pour les
populations très denses.
D = ni/s
ni : nombre d’individus d’une espèce i s : la surface (m²)

5.7.- Fréquence spécifique


La fréquence spécifique (FSi) est le nombre d’individus d’une espèce i par rapport au
nombre total des individus recensés dans le même échantillon. Elle est calculée en pourcentage
selon la formule suivante :

FSi = (ni / N) x 100

ni : Nombre de relevés de l’espèce i N : Nombre total de relevés réalisés.

5.8.- Répartition ou Distribution des espèces


A l’échelle d’une biocénose donnée, on appelle répartition des individus la façon dont ils
se répartissent à la surface de leur habitat.
La répartition régulière (ou uniforme) : On a une répartition régulière lorsque les individus
sont situés à égale distance les uns des autres. Cette répartition est rare car la répartition est
souvent perturbée par l’hétérogénéité du milieu et ne se rencontre que lorsqu’il existe une
compétition intense entre les individus.
La répartition au hasard (ou aléatoire) : Elle correspond comme son nom l’indique à une
distribution au hasard des individus. Elle est plutôt rare et se trouve chez les populations qui
n’ont aucune tendance au regroupement et qui vivent dans des milieux homogènes.
La répartition en agrégats (ou contagieuse) : Il y a répartition en agrégats lorsque les
individus sont regroupés. C’est la répartition la plus fréquente. Elle peut être due à des
variations dans les caractéristiques du milieu qui amènent les individus à se grouper dans les
zones les plus favorables.

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