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Mémento viandes et charcuteries - Janvier 2014 – Version 1

Congélation et
qualité de viande
Enjeux  Généralités sur la congélation
La congélation est le mode de conservation de la viande le
plus le répandu. Elle constitue un levier économique impor- La congélation se définit comme le changement d’état de
tant pour les acteurs de la filière car elle permet la régulation l’eau liquide en glace par cristallisation sous l’action du
des flux de matière par report de marchandise, ainsi que le froid, et se caractérise par 3 paramètres :
commerce de viande sur de longues distances. Contrairement • la température cryoscopique Tc (ou température de congé-
à d’autres modes de conservation (salage, séchage, fumaison, lation), qui est d’environ -1,5 °C pour la viande.
cuisson), la congélation a pour objectif de préserver au maxi- • le taux de nucléation, nombre de nuclei formés par unité de
mum les caractéristiques initiales des viandes. La maîtrise de la temps. Ces nuclei sont les précurseurs des cristaux de glace.
congélation est donc un enjeu majeur pour éviter la possible Ce taux est d’autant plus élevé que le refroidissement est
dégradation de la qualité et de la valeur marchande des rapide.
viandes : • la vitesse de croissance de cristaux, contrôlée en grande par-
• Coût économique direct lié à la perte de poids (exsudat) tie par le flux de chaleur évacué de la zone de cristallisation.
• Aspect dégradé du produit (« brûlures »,…)
• Croissance microbienne La température à laquelle commencent à se former les pre-
quelque forme que ce soit, sont strictement interdites sans autorisation

• Oxydation et rancissement miers germes cristallins (nuclei), ou point de congélation, est


• Perte de composants nutritionnels inférieure à Tc. Lors de la congélation, Ce phénomène, où la
température atteint environ -4 °C sans formation de glace :
c’est la surfusion ou sous-refroidissement (« super cooling »).
Le processus de congélation et ses conséquences sur la viande Il s’explique par le fait que jusqu’à – 4°C, les agents de nucléa-
sont à décomposer en 3 phases distinctes : tion (petits corps en suspension,…) qui sont nécessaires à
1 - Congélation l’initiation des cristaux de glace ne sont toujours pas mis en
2 - Stockage à l’état congelé place.
3 - Décongélation
Une fois la nucléation commencée, le système cède plus
L’objectif est de récapituler les conséquences de ces 3 phases de chaleur latente que ce qui est strictement nécessaire à
sur les différents critères de la qualité de la viande (rétention la croissance des cristaux et la température remonte rapide-
en eau, couleur, texture, valeur nutritionnelle,…), ainsi que ment jusqu’à Tc (figure ci-dessous).
l’influence des caractéristiques des viandes initiales avant
congélation et des conditions dans lesquelles ces phases sont Après formation des cristaux, la proportion d’eau sous forme
conduites. de glace augmente avec la chute de température.
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centre thermique Température surfusion (point de congélation)


Température intiale (Ti)

A 1 B
Température congélation (Tc)
2 -1 à -3°C

-7 °C
Extérieur (Tf )
3
eau Température finale (Tf )
glace + eau 1 2 3

glace + eau non congelable Refroidissement Cristallisation Refroidissement


front de congélation Temps ou distance du centre thermique

A : État de l’eau dans un produit de forme géométrique simple en cours de congélation. Les 3 zones représentées correspondent
aux 3 étapes de la congélation.
B : Gradient de température au sein de l’échantillon ou évolution au cours du temps de la température en un point de l’échantillon.

11 : phase de pré-congélation (refroidissement du produit jusqu’à la température de congélation ; l’eau est encore à l’état liquide).
22 : phase de congélation ou changement d’état de l’eau en place (T ≤ Tc) avec nucléation, puis croissance des cristaux (cristallisation).
33 : refroidissement du produit congelé ; la majeure partie de l’eau congelable est sous forme de glace.

Les différentes phases de la congélation d’un échantillon


Congélation et
2 qualité de viande

Le produit est considéré comme congelé lorsque 80  % de Influence de la congélation


l’eau contenue dans le tissu musculaire se trouve à l’état de
glace. Ce taux est atteint pour la viande dès -7°C, puis il conti- sur les pertes en eau
nue d’augmenter lentement jusqu’à la température d’entre-
posage (tableau ci-dessous). La perte d’eau par exsudation lors de la décongélation de la
viande est la conséquence la plus visible et la plus importante
La température cryoscopique du produit considérée (Tc) d’un point de vue économique.
d’une part, et la température du produit considéré comme L’exsudation n’est cependant pas la seule perte en eau subie
congelé (ie 80  % de l’eau à l’état solide) d’autre part, défi- par la viande lors du processus complet de congélation/stoc-
nissent le temps caractéristique de congélation (en min ou kage/décongélation, où se cumulent :
h), ou durée de congélation, qui permet de caractériser la • Perte par évaporation lors de la congélation
cinétique du processus dans un système. • Perte par sublimation lors du stockage sous forme congelé
• Pete par exsudation lors de la décongélation
Dans le cas de la viande, il s’agit donc du temps nécessaire
pour que la température passe de -1 °C à -7 °C. Il varie au sein Evaporation lors de la congélation
d’un même morceau selon que l’on se trouve en périphérie
ou au centre. Les pertes en eau par évaporation (ou sublimation) lors de
Ainsi, pour un morceau de viande de porc de 16 x 11,5 x 5 cm, la congélation représentent entre 0,5  % et 1  % de la masse
il est de 7 min à la surface et de 21 min au centre. du produit, mais peuvent être bien plus importante si cette

quelque forme que ce soit, sont strictement interdites sans autorisation


phase se déroule dans conditions défavorables.
La vitesse et la durée de congélation dépendent de la Le produit perd de l’eau par évaporation tant qu’il n’a pas at-
quantité totale de chaleur à extraire, de la température ini- teint sa température de congélation. Ces pertes dépendent
tiale (Ti) et finale (Tf ), des caractéristiques du produit (com- fortement de la nature du produit et des conditions dans
position, masse, dimensions et structure), de la présence lesquelles il est placé lors de sa congélation. Ainsi, la surface
ou non d’un emballage et enfin du procédé de refroidis- de contact produit/air, la vitesse de l’air, sa température et
sement. son humidité relative sont autant de critères qui influent les
pertes en eau lors de cette phase.
On distingue ainsi 3 phases successives dans le processus de Il est possible de réduire ces pertes en procédant à une congé-
congélation : lation modulée, c’est à dire avec des régimes thermiques
1- Phase de refroidissement initial : la température diminue adaptés à chaque phase du processus de congélation :
jusqu’au point de cristallisation, dépendant de la nature Durant la phase de refroidissement initial de la viande,
du produit. L’eau est encore à l’état liquide. vitesse et température de l’air doivent être modérées afin
2- Phase de congélation : changement d’état de l’eau en gla- d’éviter une évaporation excessive, alors que lors de la phase
ce, avec nucléation puis croissance des cristaux. de cristallisation de l’eau, la vitesse de l’air doit être plus éle-
3- Phase de refroidissement final jusqu’à la température d’en- vée pour évacuer le plus rapidement possible la chaleur déga-
treposage. gée par le changement d’état eau/glace.
Enfin pendant la phase de refroidissement jusqu’à la tempéra-

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On peut ainsi distinguer ces 3 stades simultanément dans ture de conservation, la température de l’air doit être très basse.
une pièce de viande en cours de congélation, correspondant D’autres solutions sont envisageables afin de réduire l’éva-
à 3 zones distinctes du produit (cf figure page précédente). poration durant cette phase, comme l’utilisation d’un fluide
Le cœur de la pièce est au stade de pré-congélation (1), puis cryogénique afin de provoquer un croûtage de surface ra-
vient le front de congélation, siège du changement d’état de pide et contenir ainsi l’eau superficielle.
l’eau en glace (2), et enfin la zone périphérique (3), où la cris- Enfin, la protection de la viande par un emballage permet
tallisation est pratiquement terminée et la température, infé- de réduire également ces pertes en eau par évaporation/
rieure à Tc, diminue progressivement. sublimation

Pourcentage d’eau congelée et activité de l’eau dans la viande à différentes températures

% eau congelée
Température (°C) Activité de l’eau
volaille bœuf poisson
-5 74 74 77 0,953
-10 83 82 84 0,907
-15 85 87 0,864
-20 88 87 89 0,823
-25 0,784
-30 89 88 91 0,746
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Sublimation lors du stockage Pour d’autres morceaux comme le jambon, l’épaule ou la poi-
trine, les écarts entre les pertes en eau subies par la viande
Pendant le stockage, la perte d’eau en surface est dépendante congelée/décongelée et celles de la viande restée à l’état frais
de la ventilation, de la température, de la surface exposée sont moins marqués (PRE globalement plus importante).
et de la durée du stockage. D’une manière générale, plus le pH est élevé, plus le PRE de
Elle est plus faible à très basse température car la pression par- la viande est fort et moins l’exsudat après décongélation
tielle de la vapeur d’eau à la surface du produit croit exponen- sera important.
tiellement avec la température. Elle passe ainsi de 0,7 % de la Certaines pratiques influencent par ailleurs cette quantité
masse du produit par mois à -10°C à 0,15 % par mois à -30 °C. d’exsudat après décongélation :
Les pertes en eau lors du stockage augmentent de façon im- • le désossage à chaud des muscles avant congélation aug-
portante en cas de variations de température, qui provoque mente les pertes à la décongélation
la formation de givre dans l’emballage (succession cycles de • la découpe et le hachage favorisent l’exsudation (rapport
fonte/cristallisation). surface/volume)
L’emballage des produits permet de réduire fortement les • l’apport de vitamine E dans la ration des animaux permet
pertes durant le stockage. Parmi les matériaux utilisés, le plas- de réduire l’exsudation, en raison de son effet protecteur sur
tique (polyéthylène par exemple) est le plus efficace et sur- l’intégrité des membranes cellulaires.
tout le plus simple d’utilisation.
Influence de la vitesse de congélation
Exsudation lors de la décongélation
quelque forme que ce soit, sont strictement interdites sans autorisation

On explique généralement l’effet de la vitesse de congélation


L’exsudat lors de la décongélation peut varier de 1 à 5 % de la sur la quantité d’exsudat par des différences de répartition
masse initiale du produit. entre la glace intra et extracellulaire, et des différences de
Au-delà de la perte économique directe liée à cette perte taille de cristaux.
de poids, l’exsudation dégrade la qualité nutritionnelle de la Lors d’une congélation rapide (1 à 10 cm/h), de petits cris-
viande car il entraîne en partie certains nutriments comme les taux de glace sont formés à la fois dans l’espace intra et extra-
vitamines, les protéines solubles et les acides aminés. cellulaire (cf figure page suivante). Cette distribution uniforme
Par ailleurs, l’exsudat offre des conditions favorables à la mul- de cristaux de glace à congélation rapide est essentiellement
tiplication des micro-organismes (jus de viande riche en synonyme de cristallisation intracellulaire car les espaces
nutriments), notamment lorsqu’une température de surface extracellulaires représentent une faible fraction du volume du
élevée est atteinte lors du processus de décongélation. tissu. La dénaturation des protéines, ainsi que les dommages
La quantité d’exsudat à la décongélation est la conséquence causés par la localisation et la taille des cristaux sont peu im-
de plusieurs facteurs : portants. Après décongélation, les gouttelettes de glace fon-
• les caractéristiques initiales du produit due sont réabsorbées rapidement et les pertes par exsudat de
• les vitesses de congélation et décongélation décongélation sont très faibles. Ces vitesses de congélation
• les température et durée d’entreposage sont difficiles à atteindre dans la pratique industrielle, comme
• le type de conditionnement par exemple à cœur de pièces anatomiques ou de blocs de
viande lors d’une congélation en tunnel. Elles peuvent être
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Influence des caractéristiques du produit atteintes par la congélation cryogénique de produits de pe-
tites dimensions tels que des côtes de porc ou des steaks
Le pouvoir de rétention en eau (PRE) de la viande est le princi- hachés individuels.
pal facteur influant sur la quantité d’exsudat lors de la décon-
gélation de la viande. Ce PRE est principalement gouverné par Lors d’une congélation lente (<1 cm/h), les premiers cris-
l’évolution du pH post mortem ainsi que de la structure des taux de glace se forment dans le liquide extracellulaire, moins
fibres, ces caractéristiques étant elles-mêmes dépendantes concentré que le liquide intracellulaire. La concentration
de nombreux facteurs tels que la génétique, l’âge, le type de saline du milieu extracellulaire augmente et l’eau passe de
muscle, les conditions d’abattage, etc. l’intérieur de la cellule vers l’extérieur par osmose, ce qui aug-
En ce qui concerne le type de muscle, on constate que c’est la mente la taille des cristaux extracellulaire. La concentration
longe (muscle longissimus) qui est la plus sensible au phéno- de la fraction non congelée du milieu intracellulaire entraîne
mène d’exsudation après décongélation. Ces pertes sont plus des modifications de pH, de force ionique, d’activité de l’eau
ou moins importantes en fonction du pouvoir de rétention en et de potentiel redox qui provoque une dénaturation de pro-
eau de la viande (cf tableau ci-dessous). téines myofibrillaires se traduisant par une chute de leur PRE.
Perte de poids par exsudat de longes fraîche ou congelée/décongelée, en fonction de leur catégorie

Perte par rapport au poids initial (en %) Viande PSE Viande Normale Viande DFD
Longe réfrigérée 4 2 1,5
Longe congelée/décongelée 14 10 3,5
Congélation et
4 qualité de viande

n
Congélation rapide atio
o n gél
Parallèlement à ce phénomène,
Dé rapidla dénaturation des protéines
c e La durée d’entreposage influence surtout les viandes
membranaires contribue à la libération d’eau par la cellule. congelées rapidement.
En fin de congélation, les cristaux, de grandes tailles et loca- Pour les viandes congelées à vitesse lente, la quantité d’ex-
lisés principalement dans l’espace extracellulaire, provoque sudat est de toute façon maximum quelle que soit la durée
Déc
des déformations des cellulesongallant jusqu’à la rupture méca- ou les conditions d’entreposage (volume et vitesse de fluide
nique des membranes (figure éla
lenci-dessous).
ti maximum par rapport au potentiel intrinsèque de la viande).
te on
Lors de la décongélation, l’eau issue de la fusion de ces gros
cristaux extracellulaires ne pourra être absorbée par les cel- Influence de la vitesse de décongélation
lules endommagées, ce qui conduira à une augmentation de
l’exsudat. Une vitesse de décongélation trop lente favorise la recris-
tallisation et la dénaturation des protéines.
Influence de la température et de la durée A l’inverse, une décongélation trop rapide empêche la réab-
d’entreposage sorption par les cellules d’une partie de l’eau issue de la fusion
des cristaux. En effet, la quantité d’eau rendue disponible
Congélation lente lation
Lorsque la viande est stockée ngé à température constante, la excède alors la capacité de réabsorption des fibres, ce qui
D éco pide
quantité d’exsudat après décongélation
ra augmente avec la entraîne une augmentation de l’exsudat.
durée d’entreposage, et ceci pour 2 raisons : Globalement, un mode de décongélation rapide est préfé-
• l’augmentation de la taille des cristaux de glace avec le rable lorsque la congélation
Fibre a été faite rapidement, tandis
temps, ce qui nuit à l’intégrité
Déc
physique des cellules. qu’une décongélation lente s’associera mieux à une congé-

quelque forme que ce soit, sont strictement interdites sans autorisation


ong qui réduit le pouvoir de ré- Cristaux de glace
• la dénaturation des protéines éla lation lente.
tention en eau. len tion Exsudat
te
La perte en exsudat peut passer ainsi de 1,2 % du poids frais Ainsi l’association congélation lente/décongélation rapide
pour des longes stockées à -20°C pendant 4 mois, à 4,7 % au s’avère particulièrement néfaste d’un point de vue rendement
bout de 16 mois. matière :
Lorsque la température d’entreposage fluctue, ces phéno-
mènes sont encore amplifiés car les variations de tempé- Durant la congélation lente :
rature provoquent des phases successives de fonte puis de • perte par évaporation maximum
recristallisation de la glace qui augmentent encore la taille • sortie de l’eau vers le milieu extracellulaire maximum
des cristaux, donc les dommages subis au niveau structural et • formation de gros cristaux extracellulaires endommageant
l’exsudation après décongélation. les membranes

Congélation rapide Congélation lente

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Décongélation Décongélation Décongélation Décongélation
lente rapide lente rapide

Fibre Cristaux de glace Exsudat

Localisation et taille des cristaux en fonction de la vitesse de congélation


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Durant la décongélation rapide : Cette modification du profil sensoriel de la viande pourrait


• faible réabsorption de l’eau vers l’espace intracellulaire être due au fait que des précurseurs de la flaveur (sucres ré-
siduels, acides aminés, peptides,…) sont soit dégradés, soit
Concernant le mode de décongélation, la décongélation aux entraînés par l’exsudat lors de la décongélation.
micro-ondes, par chauffage ohmique ou par hautes pres- Lorsque la durée de congélation se prolonge, des notes désa-
sions permettraient à la fois de réduire la durée de la décon- gréables apparaissent, notamment l’odeur de rance qui est la
gélation et la quantité d’exsudat, avec des résultats contradic- plus typique des viandes ayant subi des durées de congéla-
toires pour la décongélation aux micro-ondes. tion longues. Cette détérioration de la flaveur étant principa-
lement due à l’oxydation des lipides, les durées maximales
de congélation acceptables d’un point de vue sensoriel dé-
Influence de la congélation pendent donc de la stabilité oxydative des viandes.
sur la texture de la viande En effet, les réactions chimiques et enzymatiques respon-
sables de ces phénomènes d’oxydation persistent aux tempé-
ratures de congélation.
La texture de la viande, qui recouvre essentiellement les notions D’autres part, les dommages causées par les cristaux de glace
de tendreté et de jutosité, peut être évaluée de façon instru- aux membranes cellulaires entraînent la libération de subs-
mentale (mesures rhéologiques) ou par analyse sensorielle. tances pro-oxydantes, tel que le fer héminique par exemple.
La tendreté et la jutosité sont liées en particulier aux proprié- A titre indicatif, on recommande ainsi généralement des du-
tés des protéines des tissus musculaire et conjonctif et de leur rées de congélation de l’ordre de 6 mois maximum pour des
quelque forme que ce soit, sont strictement interdites sans autorisation

évolution au cours des différents traitements qu’ils subissent côtelettes de porc.


(maturation post mortem, congélation, salaison, cuisson,…). Ces durées de congélation par type de produit dépendent de
La congélation a généralement peu d’effet sur la tendreté de la nombreux critères tels que l’origine anatomique (teneur en li-
viande. Ces effets dépendent des caractéristiques du produit pides, teneur en acides gras polyinsaturés,…), l’alimentation des
avant congélation et dans une moindre mesure des condi- animaux, la présence ou non d’emballage (sous-vide,…), etc.
tions de congélation. Ils sont de plus partiellement nivelés par
le traitement de cuisson de la viande qui précède l’évaluation On constate ainsi que la durée maximum de congélation
de la tendreté, qu’elle soit instrumentale ou sensorielle. des viandes est plutôt limitée par des critères sensoriels ou
On considère cependant que la congélation provoque plutôt fonctionnels que par des critères microbiologiques.
une augmentation de la tendreté de la viande. Cette ten-
dance reste mal expliquée et pourrait être liée d’une part aux
dommages causés lors de la formation et de la croissance des Influence de la congélation
cristaux de glace dans les espaces intra et extracellulaires et
d’autre part à la dénaturation de certaines protéines myofi- sur la couleur
brillaires et sarcoplasmiques en raison de l’augmentation de
la force ionique (cryoconcentration des solutés). La couleur de la viande à l’état congelé dépend essentielle-
Concernant la jutosité, les effets sont encore plus difficiles à ment de la taille des cristaux de glace à la surface du produit,
cerner, sauf si les conditions d’une exsudation de décongéla- et donc de la vitesse de congélation.
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tion excessive sont réunies, ce qui entraîne une diminution de Si la vitesse de congélation est rapide, la taille des cristaux de
la jutosité des viandes. surface sera petite et la lumière sera mieux réfléchie, donnant
à la viande congelée une couleur plus pâle qui peut être ou
non recherchée en fonction du type de viande (viande rouge
Influence de la congélation ou viande blanche). Ceci pourra avoir de l’importance si le
sur la flaveur produit est acheté à l’état congelé par le consommateur.

En revanche après décongélation, il n’y a plus de différence


Les processus de congélation et de décongélation ont peu visible entre une viande congelée rapidement et une viande
d’impact sur la flaveur de la viande, à condition qu’ils soient congelée lentement, à condition que le stockage en congé-
menés dans des conditions satisfaisantes. lation se soit déroulé à une température suffisamment basse
En revanche, la durée de stockage en congelé a des consé- et constante.
quences non négligeables sur la flaveur des viandes.
Pour des durées de conservation courte, la flaveur de la viande L’’évolution de la couleur pendant la conservation ne sera
ayant été congelée est décrite comme plus fade, moins pas la même entre une viande congelée et une viande réfri-
intense que la celle de la viande uniquement réfrigérée. gérée.
Congélation et
6 qualité de viande

Pour rappel, la couleur de la viande est la conséquence de Influence de la congélation


l’état d’oxydation de la myoglobine oxygénée ou oxymyo-
globine, de couleur rouge vif, qui se transforme en cours de sur les qualités nutritionnelles
conservation en myoglobine oxydée ou metmyoglobine, de
couleur brune. Pour la plupart des nutriments apportés par la viande, l’impact
Si le phénomène d’autoxydation du pigment est considéra- de la congélation est relativement modéré.
blement ralenti à basse température, la photo oxydation n’est La décongélation est bien à l’origine d’une perte d’acides aminés
que peu impacté par la congélation, d’où l’importance d’une essentiels et de fer héminique par entraînement physique dans
conservation à l’abri de la lumière. l’exsudat mais elle reste limitée au regard de l’apport considé-
rable de ces composés par la viande dans l’alimentation.
La stabilité de la couleur de la viande congelée puis déconge- Les pertes d’acides gras essentiels restent également relative-
lée est plus faible que celle de la viande fraîche, car la congé- ment limitées, même si l’oxydation des lipides à l’état congelé
lation a pour effet de modifier la conformation de la myoglo- peut conduire à des composés d’oxydation ayant des effets
bine et de la rendre plus sensible à l’oxydation. De plus, les défavorables sur le plan nutritionnel (oxydes de cholestérol
composés issus de l’oxydation (tels que les radicaux libres) qui par exemple).
apparaissent dans la viande congelée sont responsables, une Les pertes touchant les vitamines du groupe B, abondantes dans
fois la viande décongelée, de l’oxydation de la myoglobine. la viande, sont par ailleurs plus importantes dans de la viande
congelée puis cuite que dans de la viande cuite directement.
La viande congelée puis décongelée sera donc plus sensible

quelque forme que ce soit, sont strictement interdites sans autorisation


qu’une viande réfrigérée au brunissement lors de sa conser-
vation ultérieure. Influence de la congélation
Ce constat est comme toujours à moduler en fonction de
nombreux paramètres tels que le type de muscle (sensibilité sur les rendements de cuisson
oxydative) ou encore l’existence ou non de conditions pro
oxydantes (lumière, film barrière à l’oxygène,…). L’influence de la congélation sur les pertes à la cuisson (indus-
trielle ou ménagère) est difficile à évaluer, tant les caractéris-
D’autres effets de la congélation sur la couleur de la viande tiques initiales des produits ainsi que les modalités de trai-
peuvent être constatés : tement appliquées (congélation, décongélation, et surtout
• « brûlures » au froid, causées par une déshydratation super- cuisson) peuvent varier.
ficielle lorsque la congélation a lieu par convection forcée sur A traitement thermique modérée (< 60 °C), les pertes sont
des viandes mal protégées. Cette déshydratation provoque plus importantes pour la viande congelée que pour la viande
la dénaturation des protéines et l’oxydation des lipides et de fraîche (cf figure ci-dessous).
la myoglobine. Lorsque le chauffage est poussé au-delà de 60°C, il n’y a
• brunissement autour des os, dû au passage d’hémoglobine plus d’écart entre viande fraîche et viande congelée, car les
de la moelle osseuse dans le muscle, puis à son oxydation. modifications de structure liées à la congélation deviennent
• jaunissement des tissus adipeux, lié à la lipolyse. négligeables face à celles provoquées par la cuisson.

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Pouvoir de rétention d’eau

0,80 Viande fraîche


Viande congelée avant chauffage
0,60

0,40
viande crue

0,20

0,00
40 60 80 100
Température de chauffage (°C)

Le pouvoir de rétention d’eau est égal au rapport de la quantité d’eau non extraite de l’échantillon par la méthode au piston
(teneur en eau après pressage) sur la quantité d’eau totale (teneur en eau initiale) (d’après Laroche, 1981).

Influence de la température de chauffage et de la congélation sur le pouvoir de rétention d’eau de viande hachée.
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En fonction des vitesses de congélation, des modes de décon- Conclusion


gélation et du traitement thermique appliqué, les pertes se
répartissent différemment entre chacune de ces 3 phases. Le procédé de congélation reste le moyen de conservation
Cependant, les pertes totales cumulées varient relativement des viandes le mieux adapté à un marché de la viande qui ne
peu. cesse de se mondialiser, comptant aujourd’hui pour 13 mil-
liards de dollars d’exportation annuelle à l’échelle mondiale.
Il est intéressant de noter que lorsque la qualité technolo-
Influence de la congélation sur gique de la viande initiale est satisfaisante, et à condition que
la fonctionnalité des protéines les phases de congélation, de stockage et de décongélation
soient correctement menées, la plupart des caractéristiques de
la viande sont finalement modérément affectées par la congé-
La viande congelée post rigor possède généralement de lation, contrairement à l’image parfois négative que véhicule
moins bonnes propriétés technologiques que la viande ce procédé de conservation auprès des consommateurs.
fraîche, notamment au niveau du pouvoir de rétention en Ainsi, une viande à bon pH et à fort pouvoir de rétention en
eau et du pouvoir gélifiant. eau, présentant une couleur et un état de fraîcheur satisfaisant
La stabilité d’émulsions fabriquées avec de la viande conge- (critères qualitatifs gouvernés par la maîtrise des paramètres
lée chute progressivement quand la durée de la congélation ante et post mortem), va très bien se comporter d’un point
augmente. de vue technologique, sensoriel ou microbiologique après
Ces phénomènes sont majoritairement la conséquence de décongélation, à condition toutefois de la durée de stockage
quelque forme que ce soit, sont strictement interdites sans autorisation

l’altération des protéines résultant de l’augmentation de la à l’état congelé ne dépasse pas certaines limites.
force ionique dans les cellules lors de la congélation et lors La connaissance des mécanismes impliqués et la maîtrise des
des éventuelles variations de température durant le stockage paramètres de congélation, de stockage et de décongélation,
(principalement entre -15°C et -3°C). combinées à la maîtrise des critères qualitatifs initiaux de la
viande, sont donc des enjeux majeurs pour les acteurs de la
D’autres phénomènes sont à l’origine de la dénaturation filière viande et l’objet de recherches et avancées techniques.
des protéines tels que l’actions des radicaux libres issus de la Ces pistes de recherche mobilisent de nombreux domaines
peroxydation des lipides ou encore le relargage d’enzymes de compétences, parmi lesquels les procédés de congélation
protéolytiques consécutivement aux dommages plus ou (par hautes pressions par exemple), les techniques et maté-
moins importants occasionnés par les cristaux aux structures riaux d’emballage (sous-vide ou en atmosphère modifiée),
cellulaires. ou encore l’alimentation animale (supplémentation des ani-
maux en vitamine E).
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Contact : Pierre Le Strat


pierre.lestrat@ifip.asso.fr
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