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3ième année Licence architecture – Module : Théorie de projet 5 – 2020/2021- Enseignant : BOUTELLIS Toufik
L’analyse comme « méthode » consiste globalement à retrouver les principes qui permettent d’expliquer
la genèse de la forme à partir de l’observation de celle-ci. La définition de l’analyse comme «méthode»
envisage la compréhension des processus qui ont mené à l’émergence de l’objet considéré.
En architecture, ce processus s’affiche en quelque sorte à l’inverse de celui qui anime la conception. Il
oblige à une véritable investigation et on cherche surtout à savoir pourquoi l’architecte a fait son édifice
comme cela. « L’analyse a la vertu de nous communiquer les idées fortes du projet »
4. L’analyse comme « finalité » prospective :
L’analyse surpasse le stade de simple lecture du lieu de type descriptive, elle est avant tout d’ordre
prospective, c.-à-d. que l’on va analyser dans l’intention première de projeter. L’analyse permet donc de
vérifier et d’affirmer certaines hypothèses de travail. L’objectif de cette analyse est:
Identifier les caractères fondamentaux d’un territoire donné en termes de paysage, d’urbanisme et
d’architecture.
Mettre en évidence les pièces constitutives de ce territoire (ou son contenu)
Montrer les évolutions du territoire.
Mettre en évidence les points forts à valoriser et les problèmes à corriger (diagnostic).
Définir les enjeux du projet et de conclure sur les premières orientations à envisager
« L’espace interne est l’essence de l’architecture … les valeurs économique, sociales, techniques,
fonctionnelles, intellectuelles, esthétiques constituent la réalité de l’édifice. L’architecture est la conséquence
de tous ces facteurs ». (ZEVI, 1959)
L’analyse est une discipline à côté de l’enseignement du projet. L’analyse vise la lecture de l’œuvre et se
focalise sur le visible et sur la matière. Elle part du concret pour révéler l’émotion. Son document de
prédilection est le bâtiment, l’œuvre construite parcourue. « L’analyse apprend à voir pour exercer sa
sensibilité, prendre le relais et pouvoir faire. » affirme Christian DEVILLERS
5. Représentation et analyse architecturale :
Représenter l’espace passe par les moyens d’expression de l’analyse :
Le plan décode mal le rapport intérieur/extérieur et ne rend pas compte du temps
La façade est une représentation graphique abstraite loin de la perception concrète
La maquette pose le problème d’échelle
La photographie est statique du fait qu’elle n’offre qu’un seul angle de vue
Seul le cinéma permettrait de restituer le cheminement sans pour autant décrypter le sens de l’œuvre
ou la mise en forme spatiale. L’analyse consiste bien à décrypter la problématique de l’œuvre à
travers le croquis, le schéma ou l’évocation symbolique
L’analyse renvoie à des catégories différentes de l’espace :
L’espace réel : espace de l’habiter, du vécu.
L’espace vrai : espace construit, concret.
L’espace architectural : espace du projet, architecture et technique.
Cette distinction permet de considérer les points de vue à partir desquels on opère l’investigation et les
niveaux de décomposition proposés en fonction de l’œuvre. Le classement est indispensable pour contrôler
les opérations de décomposition / recomposition propre à l’analyse comme à la conception.
6. L’analyse de l’analyse :
Compte tenu du caractère particulièrement complexe de l’architecture, traduit à travers la notion:
- de « complexité architecturale » de Philip. BOUDON,
- de « totalité architecturale » de Ch. N. SCHULTZ,
- de « caractère synthétique » de l’architecture de G. GRASSI,
L’analyse, apparemment outil d’investigation précieux pour l’architecte, se décompose à son tour en une
série d’approches analytiques (d’où analyse de l’analyse).
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a) L’Approche structuraliste :
Qui puise ses fondements dans la théorie structuraliste. Elle est traduite en partie par la méthode typo-
morphologique. Une approche qui a mûri au sein de l’Ecole italienne, développée essentiellement par ses
adeptes : Cannigia, Muratori, Aldo Rossi, etc. L’espace urbain y est considéré en tant que structure, définie
dans son domaine et circonscrite à l’intérieur de limites. Ses composantes sont liées entre elles, grâce à un
réseau de voies hiérarchisées.
LA TYPO-MORPHOLOGIE est la combinaison de la morphologie urbaine et de la typologie
architecturale autrement dit, selon cette méthode, la voie et l’édifice engendrent, dans leur relation
dialectique, des parties qui constituent la ville.
LA MORPHOLOGIE : LA TYPOLOGIE
Etude de la forme dans son développement La typologie est la classification raisonnée des
historique, à partir des éléments la composant : types, qui implique simultanément, à travers
l’analyse d’un corpus exhaustif d’édifices, un travail
le site d’implantation “le génie du lieu ”, dit
d’identification des types.
Aldo Rossi)
le plan de la ville (fonctionnant Cette dernière s’opère à partir de critères :
comme “palimpseste” (du grec palimpsêtos, • Dimensionnels
gratté de nouveau,).
le tracé des voies (“associer le destin de la ville • Fonctionnels
aux voies de communication est une règle • Distributifs
méthodologique fondamentale”, A. Rossi
• Constructifs
les parties de la ville (quartier présentant une
homogénéité révélée par la trame viaire et la • Esthétiques
typologie des édifices, en particulier des “aires La relation d’un corpus exhaustif de relevés des
résidentielles”, parties dominantes de l’espace édifices construits sur un fragment urbain donné
urbain) constitue la source principale de l’étude typologique.
N.B. le type se différencie du modèle, en ce sens que le type fonctionne d’abord comme structure, acceptant
des variantes, alors que le modèle ne se décline qu’à travers la répétition.
QUATREMERE de Quincy cité par Aldo Rossi
b) - L’approche systémique : Où l’espace est considéré comme un ensemble cohérent structuré et
dynamique. Il est composé d’éléments spatiaux, entretenant entre eux des rapports d’interdépendance. Selon
un ordre d’échelle, les systèmes sont emboités les uns dans les autres ; et grâce à l’échelle que le système
peut passer du contenu à contenant.
c)- L’approche paysagiste et sensorielle : Une approche qui a mûri à l’Ecole américaine, développée
essentiellement par Kevin Lynch et ses adeptes. Elle considère l’espace à partir de la perception visuelle.
L’analyse visuelle de la ville de Gordon Cullen, L’image de la cité de Kevin Lynch, 1960
1961
Sa méthode est basée sur le sentiment et la Méthode fondée sur l’identification des éléments
perception de l’observateur. marquant d’un paysage urbain (Parcours, nœuds,
Optique : Considère les réactions à partir des limites, quartiers et repères)
expériences visuelles et esthétiques des parcours, Il s’interroge sur les qualités de lisibilité, d’identité
ensembles, espaces, bâtiments et détails et de mémorisation des éléments qui se combinent
Lieu : Il est déterminé à partir de notre pour former l’image globale de la ville.
positionnement par rapport à l’ensemble des Lisibilité : la capacité des éléments d’être
éléments qui composent notre environnement reconnus et organisés dans une représentation
immédiat. cohérente de l’espace.
Contenu : Il est défini à partir de la perception Identité : l’identification d’un espace, sa
des éléments significatifs, perçus pendant nos différenciation d’un autre et son individualité.
expériences dans l’espace, par rapport aux Mémorisation : c’est la qualité d’un objet
couleurs, l’échelle, la texture, le style, le caractère physique de rappeler une forte image à
et l’unité. plusieurs observateurs différents.
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Rappel :
- Les parcours (Paths) : ils sont des espaces plus ordonnancés ou plus banals, une portion de rue ou de
boulevard qui forme un itinéraire important.
- Les nœuds (Nodes) ce sont des points stratégique dans le paysage urbain, soit convergence ou rencontre
de plusieurs parcours, soit points singuliers du tissu.
- Les secteurs (Districts) : ce sont des parties du territoire urbain identifiées globalement.
- Les limites (Edges) : ce sont les bordures caractérisées des secteurs, marquant visuellement leur
achèvement.
- Les repères (Landmarks) : ce sont généralement des éléments construits, bâtiments exceptionnels,
monuments, etc.
d)- L’analyse séquentielle : quant à elle, est une étude qui introduit le
mouvement « dynamique » appliquée à l’architecture et à la ville,
l’analyse séquentielle permet d’étudier les modifications du champ
visuel d’un parcours. » (Panerai et al, 1980)
e)- L’approche anthropologique : Qui considère l’espace essentiellement dans sa dimension sociale et
culturelle. Il est alors approché grâce au système de représentation socioculturelle et au mode de pratique
sociales de l’espace. Edward T. Hall est l’un de ses adeptes.
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f)- L’approche sémantique : Une approche qui se développe actuellement, l’un de ses adeptes est
Christian Norberg Schultz parmi d’autres. Son objet s’articule essentiellement autour des aspects de la
signification et la symbolique spatiale et puise dans la théorie du lieu, ses principaux concepts.
Les auteurs de l’ouvrage « éléments d’analyse urbaine » nous en présentent principalement trois différentes
et pourtant complémentaires et sont représentées à travers des éléments permanents qui permettent de
confectionner la grille suivante à titre indicatif et pas systématiquement restrictive :
Identification Approche Approche Approche
Eléments typo-morphologique pittoresque socio-spatiale
de la grille
Elle associe la typologie La ville est conçue comme étant Elle est fondée sur une
architecturale et la morphologie un paysage, « l’observateur est interaction, un rapport
Définition urbaine « à la façon d’un dans la ville qui se présente à lui dialectique entre pratiques
langage » comme une suite de tableaux » sociales et configurations
spatiales
Saisir la structure strictement Rendre objective, à travers 1. Identifier la structure de la
physique et donc formelle l’identification d’éléments pratique sociale de
d’une ville permanents de lecture, la l’espace
Objectifs perception d’une ville considérée 2. Examiner la dialectique
jusqu’aux années soixante entre pratique sociales et
comme subjective espace
Photos, relevés, cartes, données Photos, relevés, croquis partiels Relevés, photos, écrits
Outils historiques et généraux littéraires et historiques.
Relevés, observation, tri, Interviews, relevés, Observation minutieuse et
Techniques classement, comparaison… interprétation, regroupement... répétée, photos, relevés,
interviews, comparaison.
Remarques importantes :
Potentiel du site, mémoire du lieu
Tout site possède un potentiel à prendre en considération dans les deux phases d’analyse et de conception.
Comprendre et intégrer le « Genius loci », l’esprit du lieu c’est assurer une bonne intégration et garantir une
continuité de l’histoire et la mémoire de ce site. La mémoire d’un lieu est plurielle, elle se définit par
rapport à :
Un espace physique qui doit être appréhendé à diverses échelles ;
Un espace social qui témoigne de la stratification des activités humaines
Un espace culturel qui donne une temporalité et un caractère au site.
Par des actions telles que :
La révélation de la vocation du site ou du territoire
L’utilisation de la diversité pour apprendre du site
Faire surgir les tracés et la situation particulière du site
Abandonner l’esthétique pour valoriser les ressources d’une certaines « naturalité »
Travailler sur l’ordinaire pour faire émerger le projet comme philosophie du lieu
Partir des « matériaux » trouvés sur le site
Les outils d’analyse
La géographie : climat, orientation, relief, accessibilité, activité humaines.
La géologie : couches géologiques, régime des eaux, cours d’eau
La géothermie : exploitation de la chaleur stockée dans le sous-sol
Les caractéristiques du paysage : topographie, position dans le site, percées visuelles, échelles
du site, lignes directrices, fragments, traces, perception sensible, distances, lignes de force,
continuités, délinéation et rapport à l’horizon
Potentiel du site : caractéristiques urbaines
En milieu urbain, l’analyse requiert l’émergence des caractéristiques urbaines et permet de dégager :
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Bibliographie :
1. Aldo Rossi, Quelques écrits sur l'architecture et la ville, 1956-1972, Milano : clup, 1978.
2. BACHELARD, G., Le nouvel esprit scientifique, (ouvrage présenté par F. Oussedik), ENAG, Alger,
1988.
3. Benyoucef, B., Analyse urbaine, éléments de méthodologie, OPU, Alger, 2010, 85 p.
4. Boudon Philippe, Enseigner la conception architecturale, cours d’architecturologie, éd. La villette,
Paris, 1994.
5. Descartes, R., Le discours de la méthode, Bordas, 1967.
6. Hall, ET. La dimension cachée. Paris, Points Essais. 254p. Bibliogr. Éd. 1971, trad de The hidden
dimension.
7. Grassi, G, L’architecture comme métier, et autres écrits, P. Mardaga, Bruxelles, 1983, 280 p.
8. Claire et Michel Duplay, Méthode illustrée de création architecturale, deuxième édition refondue,
éditions du Moniteur 446p.
9. Norberg Schultz, Ch., Système logique de l’architecture, P. Mardaga, Bruxelles, 1979, 300 p
10. Panerai, Ph., DEPAULE, J. Ch., DEMORGON, M., VEYRENCHE, M., Eléments d’analyse urbaine, éd.
A.A.M., Bruxelles, 1980
11. Zévi Bruno, Apprendre à voir l’architecture, Paris : Minuit, 1959
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