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En quelques années seulement, plusieurs pays africains ont vu sortir de terre de nombreux projets

d’infrastructure d’envergure. Toutes ces réalisations sont le fruit de Partenariats Public-Privé (PPP).
Aujourd’hui, les PPP permettent non seulement de financer les grands projets d’infrastructure, mais
couvrent également des secteurs variés comme la gestion des services publics (transport, eau,
électricité, assainissement…), l’agriculture, la santé ou l’enseignement. Fort de ces succès, les pays
africains font de plus en plus appel aux PPP. Pourtant, malgré une panoplie de points positifs, les cas de
brouille se sont multipliés en Afrique entre les États et les partenaires privés dans le cadre de ce modèle.

Aux bas mots, importé du Royaume-Uni, le contrat de PPP permet à un Etat, une collectivité locale,…, de
confier à un seul opérateur privé non seulement la conception, la construction et le financement d’une
infrastructure ou d’un équipement public mais aussi son exploitation sur une longue période, de vingt-
cinq à trente ans. L’utilisateur public paiera un loyer à compter de la réception du bien et tout au long de
cette super-concession, puis en récupérera à terme la propriété. L’opérateur privé est, en général, un
consortium formé d’une entreprise du BTP pour la conception et la construction, d’exploitants pour des
services variés, fonds d’investissement ou banque. Aujourd’hui, sur le continent, le PPP est en plein
essor.

L’Afrique de l’Ouest séduite par les PPP

Dans les rapports publiés en 2017, l’Afrique de l’Ouest est la région qui affiche le nombre le plus
important de projets PPP, pour environ 120 milliards de dollars. Les secteurs des transports, de
l’immobilier et de l’énergie sont les principaux moteurs de la croissance, représentant à eux seuls 220
projets identifiés, soit 78 % des projets du continent. Le nombre de projets a également bondi de 44,8 %
en Afrique du Nord et leur coût total a augmenté de 195%. Ces progrès s’expliquent, d’une part, par un
regain de confiance dans la région dont l’instabilité politique a diminué et, d’autre part, par un cadre
législatif propice aux PPP comme au Maroc et en Tunisie. Dans la Communauté économique et
monétaire d’Afrique centrale (Cemac), qui ne concentre que 8 % des projets, la dynamique est plus
timide en raison du très faible nombre d’États à s’être dotés de législation PPP au niveau national ou
régional.

Le casse-tête des textes


En effet, l’absence de cadre n’est pas sans incidence sur les dynamiques et disparités en termes de
projets d’infrastructures. Les États africains comprennent progressivement à quel point la technique des
PPP peuvent conduire à l’efficience des dépenses publiques et au développement rapide en matière
d’infrastructures. Dans ce sens, la Mauritanie a récemment adopté une nouvelle loi PPP avec pour
objectif affiché de résorber son déficit en infrastructures. Le Congo, l’Algérie, le Tchad vont
probablement lui emboîter le pas. Avant ceux-là, l’Afrique du Sud, le Nigeria, le Cameroun, le Burkina
Faso, la Côte-d’Ivoire, le Maroc et la Tanzanie, ont adopté la mode des PPP en se dotant de cadre
juridique et réglementaire. Pourtant, malgré une panoplie de points positifs, plusieurs problèmes et
facteurs de risques peuvent être associés à ce mode de financement. Les exemples sont légion dans le
continent. Les cas de brouille se sont même récemment multipliés entre les États et les partenaires
privés. Veolia vient de se voir retirer par le Gabon la concession d’eau et d’électricité qu’exploitait la
Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG). À Djibouti, l’État a brutalement renationalisé le terminal
portuaire géré depuis 2006 par l’émirati DP World.

Au Sénégal, les tarifs pratiqués sur la première autoroute à péage du pays, qui relie la capitale au nouvel
Aéroport Blaise-Diagne (AIBD) – 3 600 FCFA -, suscitent la grogne. « Ils sont parmi les plus chers du
monde, et ne correspondent pas aux revenus des Sénégalais », estime Bachir Fofana, porte-parole du
Collectif citoyen des usagers de l’autoroute à péage. Ce collectif réclame également davantage de
sécurité et d’éclairage sur l’axe Dakar-AIBD, après deux accidents mortels provoqués par des animaux
errants, dont celui qui a causé la mort de Papis Baba Mballo, du groupe de rap Gelongal, en mai dernier.
Le Président sénégalais Macky Sall a saisi le Conseil des ministres du 11 juin de cette question, et a
demandé au gouvernement de mettre en place un dispositif cohérent et performant de régulation et de
suivi-évaluation de l’exploitation des autoroutes à péage, dans l’ouverture prochaine des autoroutes I la-
Touba, AIBD-Thies et AIBD-Sindia-Mbour. Un comité de réflexion pour la renégociation des prix a été mis
sur pied au sortir de ce conseil.

De manière générale, les PPP présentent plus de risques que les projets de développement
exclusivement financés par des sources privées. En Afrique, 60 PPP axés sur le développement des
infrastructures ont été annulés ou sont en difficulté. En effet, les PPP restent des montages très
complexes à mettre en œuvre. Ils engagent les parties sur plusieurs décennies. Devant la recrudescence
des scènes de ménage, il paraît opportun de réfléchir aux conditions clés pour un PPP (partenariat
public-privé) heureux en Afrique. D’où l’importance de définir un cadre solide, des procédures de
contrôle efficaces et, surtout, de savoir travailler en bonne intelligence et de cultiver la confiance entre
partenaires.

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