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Bernard MÉRIEL
Chef du département Sciences de l'environnement
Bernard BONHOMME
Chef de l'Unité technique acoustique opérationnelle
Introduction
L'activité liée aux chantiers est une des plus importantes
sur le plan é c o n o m i q u e . O n distingue les chantiers de
bâtiment (construction de logements, d'usines, de
bureaux, ...) et les chantiers de travaux publics, pour les-
quels les travaux de voirie et réseaux divers ( V R D )
constituent l'essentiel de l'activité en milieu urbain.
Ces chantiers créent, dans leur voisinage, des niveaux
sonores équivalents élevés, souvent supérieurs à
80 d B ( A ) . D è s lors, i l n'est pas étonnant que près de
10 % des plaintes formulées sur les nuisances urbaines
aient pour origine les chantiers. Dans les enquêtes faites
auprès d'échantillons de population, le bruit est le plus
fréquemment cité (plus de 30 %), loin devant les pertur-
bations du trafic, les poussières, les vibrations et la pro-
preté.
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nées en essais statiques selon la m é t h o d e de d'arrêter toute activité en ce domaine. D'ailleurs,
mesures définie dans l'annexe 1 de l'arrêté du l'article 1 de ce texte n ' indique, pour les engins de
18 septembre 1987. Ces essais doivent être chantiers, que des prescriptions d'utilisation.
effectués j u s q u ' à fin 1996. Au-delà de cette date,
L a quantification du bruit émis par les chantiers
i l faudra réaliser des essais dynamiques
se fait donc en niveaux L A e q pour les périodes
conformes à la directive C E E du 2 août 1989 et
de référence de jour (7 h - 20 h) et de nuit
l'arrêté français du 9 mars 1990. Ces essais
(20 h - 7 h).
dynamiques sont sensés représenter des condi-
tions réelles de travail in situ pour chaque Pour un chantier, on se trouve généralement
famille d'engins. Trois types de surface de sol confronté à plusieurs sources sonores fonction-
sont autorisées : plan réfléchissant dur, combi- nant simultanément. Certaines sont mobiles
naison d'un plan réfléchissant et de sable, sur- avec un trajet souvent variable (chargeurs, pel-
face de sable ou terrain sablonneux. L a surface les, camions, ...), d'autres fixes (centrales à
de mesure doit correspondre à une h é m i s p h è r e béton, d'enrobage, groupes électrogènes, moto-
dont le rayon est défini selon la longueur de base compresseurs, ...). Cependant, ces chantiers de
de l'engin testé, c'est-à-dire entre 4 et 16 m différentes natures peuvent se décomposer, dans
selon cette dernière valeur. E n conformité avec la majorité des cas, en des cycles de fonctionne-
l'annexe 1 de l'arrêté du 3 juillet 1979, ment pouvant comprendre une ou plusieurs
six points de mesure du niveau sonore sont phases distinctes, comme le montre l'exemple de
répartis sur la surface hémisphérique.
la figure 1.
Une nouvelle directive européenne du 29 juillet A l'intérieur d'un cycle, i l existe dans ce cas plu-
1995 (arrêté non encore paru) propose un abais- sieurs phases de travail :
sement des valeurs limites admissibles de 3 à
- creusement de la tranchée à l'aide d'une pelle
4 dB(A).
avec remplissage des matériaux dans un camion ;
D'autre part, l'obligation de respecter des règles - départ de la pelle pour aller chercher une buse ;
« d'emploi normal » est présente dans le décret - creusement du fond de la tranchée à l'aide
du 18 avril 1995, relatif à la lutte contre les d'un marteau-piqueur ;
bruits de voisinage. - retour de la pelle avec une buse et mise en
place de cette dernière.
Enfin pour certains engins (moto-compresseurs,
marteaux-piqueurs, ...), les m é t h o d e s d'essais L e cycle reprend ensuite par le creusement de la
sont précisées dans des normes AFNOR spécifi- tranchée à un endroit plus éloigné. L e remplis-
ques. Il en est de m ê m e pour la détermination sage de la tranchée, le nivelage et le compactage
des niveaux de puissance acoustique LWA. se font en continu, à un autre moment, lorsqu'il
y a suffisamment de buses posées. Il faudra alors
quantifier le bruit de cet autre type de cycle de
La quantification du bruit travail.
émis par les chantiers Il est donc nécessaire, pour une bonne quantifica-
tion du bruit en niveau équivalent, que la durée de
Actuellement, i l n'existe pas de valeurs limites mesure ne soit pas inférieure à la durée d'un cycle,
acceptables réglementaires pour le bruit global voire de plusieurs cycles de travail. E n fait, les
é m i s par les chantiers. différentes études réalisées montrent que, dans la
L e décret du 18 avril 1995 relatif aux bruits de plupart des cas, la durée de mesure ne saurait être
voisinage fixe des règles d ' é m e r g e n c e . Celles-ci ne inférieure à 30 minutes - 1 heure pour obtenir un
peuvent être appliquées aux chantiers sans risque L A e q représentatif de la période considérée.
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Pour la période de jour, les niveaux L A e q à 20 m Pour les sources fixes, on choisit les points de
relevés pour les différents types de chantiers mesures dans quatre directions orthogonales à
étaient supérieurs à 70 d B ( A ) pour atteindre une distance d'au moins une fois la plus grande
dans les chantiers les plus bruyants (terrassement dimension de l'engin ou matériel de chantier.
V R U , battage de palplanches) des valeurs de
Pour les sources faiblement mobiles (chargeuses,
90 d B ( A ) , voire plus. O n peut cependant obser-
...), on retient quatre directions au minimum et la
ver que, pour les chantiers de V R D en milieu
distance du point de mesure par rapport au centre
urbain, chantier à l'avancement, l'exposition des
de l'aire du travail doit être d'au moins une fois la
riverains est variable pendant la durée du chan-
plus grande dimension de l'aire de travail.
tier. Par exemple, pour des travaux d'assainisse-
ment dans une rue de typologie en « U », l ' é m e r - Pour les sources mobiles se déplaçant à des
gence par rapport au bruit résiduel [LAeq > vitesses supérieures à 10 km/h sur de grandes
65 dB(A)] n'a été sensible en un point récepteur distances (camions, tombereaux, ...), i l faut
d o n n é que pendant trois j o u r n é e s sur les deux quatre points de mesure équidistants de l'axe de
mois de durée du chantier. transport (d = 1 0 m par exemple) et répartis de
chaque côté de celui-ci.
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TABLEAU I
Valeurs relevées par famille d ' e n g i n s o u de matériels
27 Gravillonneur 3 98 102 99
41 Répandeuse 3 95 100 98
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Fig. 2 • • Correction de distance •
Principe général
de la méthode du
Laboratoire régional Correction de temps
des Ponts et Chaussées de fonctionnement
de Blois, |LwAsourceî •
Correction d'écran
• Correction de réflexions •
• I 1
ce •
• •en * i
LA e q total a u
SïKfifflHîi point d e réception
• | itrpc V" e *
• | Xlp i 9\ •
La correction de distance : C d
La correction d'écran : C e
Ces abaques ont été définis pour un spectre de Fig. 3 - Atténuation due à la présence d'un écran.
bruit moyen obtenu à partir d'une cinquantaine
d'engins à moteur thermique et pour un sol rela-
tivement absorbant.
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La correction de temps de fonctionnement : Source mobile opérant sur une aire de travail
de grandes dimensions
Elle est d o n n é e par :
Généralement, la source effectue des « allers-
F, retours » :
C , = 10 l£
f
100
L A e q = L W A - 33 + 10 lg Q - 10 lg V
avec - 10 1 g d + C - C + C t f e r
Exemple de calculs
Source fixe
L'exemple présente l'application de la
LAeq = LWA - C + C - C + C d t f e r
m é t h o d e pour un chantier de terrassement
constitué :
Cette formule est valable pour un terrain plan et
s»- d'une pelle sur chenilles creusant une tran-
si la distance d « entre la source et le récepteur »
est supérieure à au moins une fois et demie la chée qui est ensuite partiellement remplie de
plus grande dimension de la source et inférieure sable par une chargeuse-pelleteuse ;
à 100 mètres. *> d'une pelle hydraulique sur pneumatiques
chargeant un camion ;
Source mobile opérant >- d'un bouteur décapant de la terre végétale.
sur une aire de travail restreinte
Les positions des engins sur le chantier et du
LAeq = LWA - C + C - C + C d t f e r point récepteur testé sont fournies par le schéma
de la figure 4.
avec :
- d distance entre le point récepteur et le centre Les hypothèses de calcul sont résumées dans le
de l'aire de travail. tableau II.
Il faut que d > 1,5 / avec / : plus grande dimen- Les niveaux de nuisance acoustique L W A
sion de l'aire de travail (généralement inférieure retenus sont les valeurs moyennes pour une
à 30 mètres). Dans ce cas la source est assimilée famille d'engins déterminée et présentée dans
à une source sonore fixe. le tableau I.
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Fig. 4 -
Position dos engins
et du point de réception. —• ' Rocade A
/\
/ \ Bull
73 m
Tracto-pelle
N> / \
f ° / \
3 / \
Tranchée
^^^^^ ^^^^m
Pelle\ /80 m \
Sable \
\ v 47 m
50 r n \
Pelle \
. 57 m \ ;/ 75 m \
Point de réception
TABLEAU II
Hypothèses de calcul
Chargeuse-pelleteuse 105 55 25 20 - 0 0 0
Bouteur 111 70 80 70 32 5 0 0
Pelle hydraulique sur pneumatiques source est alors considérée comme fixe avec un
L e rapport de la distance « centre de l'aire de LWA de 106 d B ( A ) .
m o y e n
9 4
L A e q = 105 - 35 - 8 - 7
La méthode TRRL
L A e q = 55 d B ( A )
E l l e vise essentiellement les travaux de construc-
tion de route. L ' é q u a t i o n de base est formulée
Bouteur
par l'addition simultanée du niveau d'exposition
L e bouteur effectue des « allers-retours » sur une au bruit élémentaire LAX, à une distance de réfé-
aire de travail assimilable à un chemin de circula- rence R en mètres, pour « n » événements de
tion. L a formule des sources mobiles s'applique : l'opération. L e L A e q est défini pour la période
de temps T en secondes et en point récepteur
L A e q = LWA - 33 + 10 lg Q - 10 lg V
situé à une distance d en mètres du centre de
- 10 lg d + 10 lg ~ - C + C l'opération :
e r
C e et C = 0 et L W A
r m o y e n = 111 d B ( A )
avec o angle sous-tendu par l'opération au
LAeq = 111-33+15-7-18-2 récepteur et (j) angle sous-tendu par l'opération
au point de référence.
L A e q = 66 d B ( A )
avec :
L e niveau global L A e q au point récepteur est
d o n n é par : L A X = L A e q (R) + 10 lg T
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L a m é t h o d e prend ensuite en compte les diffé- >- Pendant le chantier :
rents p a r a m è t r e s suivants : nombre et nature des - vérifier le bon état du matériel ainsi que son
engins présents avec leur localisation et leur fonctionnement normal, utiliser des matériels
niveau de puissance acoustique, la présence h o m o l o g u é s ; si nécessaire agir sur les sources
éventuelle d'obstacles, de surfaces verticales e l l e s - m ê m e s (capotage, silencieux...) ;
réfléchissantes, de la nature du sol et de la durée - agir sur la propagation par la mise en place
de fonctionnement par rapport à la période de d ' é c r a n s provisoires mobiles. A titre d'exemple,
référence de jour. la figure 5 montre la mise en place d'un écran
L e degré de précision avancé, par comparaison provisoire pour la protection d'une crèche
« mesures-calculs » sur cas réels, se situe autour vis-à-vis d'un chantier de forage ;
de 3 d B ( A ) ; le calcul surestimant généralement - coordonner les différentes opérations afin de
les valeurs. réduire la durée des phases les plus bruyantes
lorsqu'elles se situent dans les zones les plus
sensibles ;
- ne pas oublier les problèmes liés au transport
Quelques moyens d'actions des matériaux. L a position des centrales de fabri-
Les principaux moyens d'action qui peuvent être cation n'est pas neutre dans ce cas. Sur le site, un
proposés portent : autre mode de transport (par exemple, par tapis)
peut être privilégié.
>> sur l'information préalable de la population
sur la nature et l'utilité des travaux, le planning, À titre d'exemple, pour un chantier de construc-
les nuisances éventuelles attendues et les moyens tion de logements à Villeurbanne, les actions ont
mis en œ u v r e pour y remédier ; porté dans trois directions (Le Moniteur du
17 février 1995) : la réduction du bruit é m i s par
>• sur la définition au préalable des clauses spé-
les matériels, le choix des modes opératoires les
cifiques sur le bruit à respecter au niveau de
moins bruyants, l'analyse du couple « durée du
l'autorisation (chantiers publics) ou du permis de bruit et puissance acoustique générale ». Pour un
construire (chantiers privés). Ces clauses pour- objectif visé de 75 d B ( A ) en limite de propriété,
ront porter sur les horaires de travail, l'utilisation i l a été relevé à l'intérieur de la zone de travail,
de matériel h o m o l o g u é , les conditions de fonc- des valeurs inférieures à 65 d B ( A ) .
tionnement du chantier, la prise en compte de la
propreté (boues...) et de la sécurité vis-à-vis de la
population ;
Conclusion et perspectives
s* sur l'organisation du chantier : coordination
des travaux et planification permettant le respect Les différents travaux réalisés par le réseau des
d'horaires prescrits pour les phases les plus L P C ont permis d ' a m é l i o r e r nos connaissances
bruyantes, implantation des matériels et engins dans le domaine du bruit é m i s par les chantiers.
L ' é t u d e faite en collaboration avec I'INRETS a
fixes les plus bruyants dans les zones les moins
m o n t r é q u ' i l était difficile d'associer directement
sensibles, en profitant des obstacles existants ou
la gêne avec le niveau de ce bruit. Il reste donc
naturels ou les prévoir (stockage des matériaux).
dans ce domaine encore à faire, m ê m e si l'évolu-
tion de la réglementation a permis de diminuer
l'impact sonore des chantiers.
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renseignements précis, ce qui augmentera l ' i n - Par ailleurs, nous cherchons à mieux appré-
certitude sur le résultat obtenu. hender les facteurs influant sur la puissance
acoustique des engins in situ. Par exemple, pour
L'autre difficulté sur la pérennité de l a m é t h o d e
les pelles hydrauliques, les critères retenus sont
réside dans la mise à jour du catalogue des
les suivants :
niveaux de puissance acoustique des engins et
matériels de chantier afin d'être le plus exhaustif — conditions de travail : creusement d'une tran-
et représentatif possible. chée, creusement d'une tranchée + chargement
d'un camion, nivelage (le godet reste en sur-
Pour répondre à cette question, le réseau des L P C face) ;
a décidé de poursuivre ses travaux en recherchant — nature des matériaux traités : terre végétale,
pour les principales familles d'engins, les rela-
tout venant, matériaux durs ;
tions pouvant exister entre les niveaux de puis-
— conditions de site : sol absorbant, sol semi-
sance acoustique d'homologation, obligatoire
réfléchissant, sol réfléchissant.
pour l a plupart d'entre eux, et ceux relevés in situ
dans des conditions déterminées de type de tra- Cette approche est primordiale, car c'est la
vail, de matériaux et de conditions de site. connaissance la plus précise possible de cette
valeur de base LWA qui donne la validité du
La mise à jour régulière du catalogue pourra ainsi
calcul.
s'effectuer au fur et à mesure de l'homologation
de nouveaux engins et matériels. Pour 1996, ce E n conclusion, nos travaux pour les années à
travail est réalisé pour les pelles hydrauliques et venir porteront dans ces deux directions, en les
les groupes moto-compresseurs. Il sera ensuite étendant à l'ensemble des matériels et engins de
poursuivi sur d'autres types d'engins. chantier.
Remerciements
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ABSTRACT
W o r k s i t e n o i s e i s o n e of t h e m o s t frequent c a u s e s f o r c o m p l a i n t i n u r b a n a r e a s
M . M É R I E L - B. B O N H O M M E
O v e r slightly m o r e t h a n t h e l a s t t w e n t y y e a r s , r e g u l a t i o n s h a v e b e e n c o n s i d e r a b l y s t r e n g t h e n e d , in p a r t i -
c u l a r f o r p l a n t a n d w o r k s i t e e q u i p m e n t . In 1 9 8 4 , E u r o p e a n D i r e c t i v e s a l s o s t a r t e d t o p l a y a m a j o r r o l e .
T h i s p a p e r d e s c r i b e s t h e c o n t r i b u t i o n w h i c h t h e n e t w o r k of L a b o r a t o i r e s d e s P o n t s et C h a u s s é e s h a v e
m a d e to t h i s p r o c e s s s i n c e 1 9 8 0 , in p a r t i c u l a r t h e d e v e l o p m e n t o f a f o r e c a s t i n g m o d e l a t t h e B l o i s
Regional Laboratory.
T h e p a p e r a l s o d e s c r i b e s t h e p r i n c i p l e m e a s u r e s w h i c h a r e in p l a c e a n d p r e s e n t s a p r o j e c t i o n f o r w o r k s in
the future.
98 BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 2 0 8 - MARS-AVRIL 1997 - RÉF. 4114 - PP. 87-98