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14/02/2023 11:41 Les événements sportifs patrimoniaux 

: développement d’un concept en émergence

Téoros
Revue de recherche en tourisme

38, 1 | 2019
Tourisme urbain
Tourisme urbain

Les événements sportifs


patrimoniaux : développement
d’un concept en émergence
Heritage sporting events: the development of an emerging concept

Joël Pinson

Abstracts
Français English
Face à l’accroissement de la concurrence sur le marché des destinations, de nombreuses villes ont
vu dans les événements sportifs de possibles leviers du développement territorial. En cherchant à
reproduire le succès financier qu’avait représenté l’organisation des Jeux olympiques de Los
Angeles en 1984 pour la Californie, de nombreux territoires ont ainsi mis en place des stratégies
d’accueil systématique d’événements sportifs. Ces stratégies reposant généralement sur la venue
de ressources exogènes au territoire (à savoir, des événements sportifs ponctuels de portée
internationale), les événements récurrents (perçus dans cette contribution comme des ressources
endogènes), qui sont généralement organisés par et pour le territoire, se retrouvent délaissés par
les autorités publiques et la recherche universitaire. Dans une perspective de gestion territoriale,
la question de l’ancrage des ressources est centrale, mais n’a pour l’heure que peu été traitée en
étant associée aux événements sportifs. C’est pourquoi cette contribution cherche à comprendre
comment certains événements vont réussir à s’ancrer durablement sur un territoire et servir à
terme le développement de ce dernier. À cette fin, nous avons réalisé une analyse quali-
quantitative comparée de 24  événements sportifs en Suisse romande. Celle-ci nous a permis
d’observer les différentes configurations que recouvre cette notion, ainsi que les éléments
permettant à ces événements de trouver une position stratégique et ainsi de se démarquer
d’autres manifestations plus ou moins similaires.

Faced with increasing competition in the destination market, many cities have seen sporting
events as possible levers for territorial development. In an attempt to replicate the financial
success of the 1984 Los Angeles Olympic Games in California, many regions have implemented
strategies to systematically host sporting events. As these strategies generally rely on the arrival
of resources exogenous to the territory (i.e. one-off sporting events of international scope),
recurrent events (perceived in this contribution as endogenous resources), which are generally
organized by and for the territory, end up being neglected by public authorities and university
research. From a territorial management perspective, the question of the anchoring of resources
is central, but has been rarely addressed up until now due to the association with sporting events.
This contribution therefore seeks to understand how certain events will succeed in becoming

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firmly anchored in a given territory and ultimately contribute to its development. To this end, we
conducted a comparative qualitative-quantitative analysis of 24 sporting events in French-
speaking Switzerland, enabling us to observe the different configurations covered by this concept
as well as the elements that help these events to find a strategic position and thus to stand out
from other more or less similar attractions.

Index terms
Mots-clés : événements sportifs, patrimoine, management territorial, stratégie d’accueil,
événements
Keywords: sporting events, heritage, territorial management, hosting strategy, events

Full text
1 Au cours des dernières décennies, l’accroissement de la concurrence entre les
destinations a poussé les territoires à chercher de nouveaux moyens pour se rendre
visibles et attractifs auprès des touristes, des résidents et des entreprises (Hede, 2005 ;
Mason et Duquette, 2008 ; Misener et Mason, 2008 ; Fourie et Santana-Gallego, 2011).
Ainsi, les événements, qu’ils soient culturels, sportifs ou d’affaires, sont perçus comme
de potentiels leviers du développement territorial. Perçus de la sorte, ils ne sont qu’un
moyen au service d’une stratégie plus large qui vise à terme un développement durable
et multidimensionnel du territoire (Arnaud, 2012). Si la finalité de ces stratégies
reposant sur l’accueil d’événements est similaire (à savoir la volonté d’engendrer un
développement multidimensionnel du territoire), la réflexion sur les moyens utilisés
pour y parvenir varie selon que la stratégie repose sur des événements sportifs ou
culturels.
2 Alors que les stratégies se focalisant sur les événements culturels se concentrent
principalement sur des ressources endogènes au territoire (par exemple des
événements récurrents développés par et pour le territoire), celles qui reposent sur des
événements sportifs se sont davantage tournées vers des ressources exogènes au
territoire, à savoir des événements sportifs majeurs de portée internationale pour
lesquels il faut candidater. Ces événements – parmi lesquels on peut identifier les jeux
olympiques (JO), la Coupe du monde de football ou les principaux championnats du
monde et d’Europe  – ont joué un rôle majeur dans ces stratégies. Croyant dans la
capacité de ces événements à engendrer des retombées positives, que ce soit sur les
plans financiers, sociaux ou de l’image pour la destination hôte, de nombreuses villes
ont mis en place des stratégies d’accueil systématique d’événements sportifs.
Néanmoins, ces stratégies qui reposent sur des événements ponctuels de portée
internationale ont dû faire face ces dernières années à de nouveaux défis. En termes de
ressources tout d’abord, les territoires ne disposent pas nécessairement des ressources
financières, humaines, ni d’infrastructures suffisantes pour candidater et organiser des
événements dont la taille ne cesse de croître. À ce titre, le cas de la ville de Lausanne, en
Suisse, est intéressant. Alors que sa stratégie reposait principalement sur le fait d’attirer
des événements ponctuels de portée internationale, la ville a dû, en raison de la
concurrence sur le marché des événements sportifs et de ses ressources limitées (il
s’agit d’une ville d’environ 400  000 habitants), se tourner vers des événements de
moindre envergure (Pinson et Chappelet, 2014). En termes de retombées positives pour
le territoire ensuite, les critiques quant à la capacité de ces événements à engendrer un
développement durable du territoire se font de plus en plus vives (Taks, 2016).
3 La déconnexion entre ces événements exogènes au territoire et les populations
locales a notamment été symbolisée ces dernières années par les mouvements sociaux
en marge de la Coupe des Confédérations de football au Brésil en 2013 et par le rejet
dans les urnes d’une candidature des Grisons pour les JO de 2022, ou de Hambourg
pour les JO de 2024. Devant ces nouveaux défis pour les stratégies d’accueil
d’événements sportifs, des auteurs ont, au cours des dernières années, cherché de

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nouvelles voies pour les territoires engagés dans ces stratégies. Cela c’est notamment
matérialisé par l’émergence des notions «  d’événement sportif patrimonial  » (ESP)
(Chappelet, 2014 ; Pinson, 2016b) et « d’attraction sportive patrimoniale » (Ramshaw,
2011). Si les recherches s’accordent à voir dans ce type d’événements un possible
catalyseur du développement urbain, reposant sur l’identité locale et par là même
développant un lien fort à la population du territoire, ces notions recouvrent encore des
réalités parfois fort différentes. C’est pourquoi la présente recherche s’attelle à
développer la notion d’ESP, notamment pour essayer de comprendre à partir de quel
moment un événement sportif peut être perçu comme étant patrimonial. Si, comme le
suggèrent Jean-Loup Chappelet (2014) ainsi que Inge Derom et Gregory Ramshaw
(2016), les ESP peuvent avoir un effet positif pour leur territoire d’accueil, encore faut-il
s’accorder sur ce que la notion recouvre.
4 À cette fin, nous reviendrons au fil d’une revue de la littérature sur les liens entre
événements sportifs et patrimoine. Cela nous permettra de présenter le processus qui
mène d’une ressource initiale (l’événement sportif) à une ressource territoriale (l’ESP).
Les caractéristiques des ESP identifiées dans la littérature serviront de base à l’analyse
quali-quantitative comparée (AQQC) que nous présenterons dans la partie
méthodologique. Cette méthode d’analyse nous permettra de comparer
systématiquement 24 événements sportifs sélectionnés dans la partie francophone de la
Suisse pour leur potentialité patrimoniale aux yeux de la population locale. Les
résultats mettront en lumière les traits caractéristiques nécessaires à la perception d’un
événement sportif comme objet patrimonial. En conclusion, nous discuterons des
enjeux de ce type d’événement pour les destinations engagées dans des stratégies
d’accueil, de même que leur complémentarité avec les événements majeurs dans les
stratégies des villes hôtes.

Approche compréhensive de
l’événement sportif patrimonial
5 Le fait de percevoir le sport, et par extension les événements sportifs, comme objets
patrimoniaux n’est pas une évidence en soi. Bien que le concept de patrimoine se soit
élargi d’une conception avant tout matérielle et privée pour comprendre aujourd’hui
des objets immatériels tels le théâtre Kabuki au Japon (inscrit à la Liste du patrimoine
culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO en 2008), le sport et les événements
sportifs ne sont que rarement considérés en tant que patrimoine. Pour certains auteurs
(Pfister, 2011 ; Ramshaw, 2011 ; Gammon et al., 2013 ; Hinch et Ramshaw, 2014), cette
non-reconnaissance de la dimension patrimoniale du sport viendrait de la perception
du sport comme reflétant un passé récent et une culture avant tout populaire. À
l’inverse, le patrimoine mettrait en avant un passé plus ancien et une culture jugée plus
« noble ». Néanmoins, cette situation a évolué au cours des dernières années à la fois
auprès des décideurs territoriaux, qui voient le patrimoine sportif comme une
potentielle attraction touristique, et auprès des chercheurs, qui étudient une alternative
aux méga événements sportifs dans les stratégies territoriales.
6 Le nombre croissant des musées dédiés au patrimoine sportif – et leur succès comme
attraction touristique  – peut être vu comme une indication de la reconnaissance
croissante du lien entre sport et patrimoine. À titre d’exemple, le Musée olympique de
Lausanne est l’un des plus visités en Suisse (Pinson, 2016a), alors que Old Trafford (le
stade de Manchester United et le musée qui l’accompagne), avec plus de 250  000
visiteurs par an, peut être comparé à certaines attractions phares en Angleterre, tel le
Château de Douvres (Wood, 2006). Néanmoins, dans le prolongement de ces
remarques et en ce qui concerne cette contribution, il est nécessaire de faire une
distinction entre le patrimoine du sport et le sport comme patrimoine (Ramshaw et
Gammon, 2005). Comme le mettent en avant les auteurs, le patrimoine du sport fait
référence aux accomplissements passés et présents qui viendraient s’inscrire dans la
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« grande histoire » du sport. À ce titre, les stades ainsi que les artéfacts exposés dans les
musées vont servir de lieux de mémoires (Nora, 1984) permettant le rattachement de
certaines émotions à ceux-ci. Le sport comme patrimoine renvoie pour sa part à la
capacité du sport, et par extension aux événements sportifs, à s’inscrire sur le territoire
et dans l’identité locale. La France a, par exemple, fait inscrire l’équitation de tradition
française sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité en
2011 par l’Organisation de Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture
(UNESCO). Bien que des études se soient intéressées au lien entre le sport et la
construction identitaire (Houlihan, 1997  ; Fodimbi, 1999  ; Archambault et Artiaga,
2004), la majeure partie des recherches universitaires qui portent sur la dimension
potentiellement patrimoniale des événements sportifs fait référence à une vision
nostalgique du sport et de sa pratique. Cette tendance peut s’observer par exemple dans
le cas d’événements où d’anciennes étoiles du sport sont invitées à se produire en public
(Fairley et Gammon, 2005), l’influence des stades construits «  à l’ancienne  » sur
l’expérience des spectateurs (Gammon et Fear, 2007) ou des événements rappelant la
façon dont le sport était pratiqué à ses origines (Ramshaw, 2011). Pourtant, dans une
perspective plus large, le patrimoine n’étant pas une ressource limitée (Howard, 2003),
la question n’est pas de savoir si les événements sportifs peuvent être considérés
comme patrimoniaux, mais comment se construisent les ESP. Cette approche
constructiviste du patrimoine implique qu’il est nécessaire de considérer les stratégies
développées par les acteurs entourant les événements sportifs pour distinguer leur
manifestation d’autres événements plus ou moins similaires.
7 Bien que l’UNESCO ait adopté en 2003 la Convention pour la sauvegarde du
patrimoine culturel immatériel, qui reconnaît les événements en son article 2 alinéa 2,
seuls trois événements à caractère sportif ont été inscrits jusqu’à présent, avant tout en
fonction de critères culturels  : le festival de lutte à l’huile de Kirkpinar en Turquie, le
Naadam en Mongolie et la course de bateaux dragons en Chine (Pinson, 2016b). En
effet, quand on s’intéresse aux raisons qui justifient l’inscription de ces trois
événements à la Liste du patrimoine immatériel, on se rend compte que les dimensions
avancées sont avant tout liées à la culture locale (les habits traditionnels portés ou les
différents types de célébrations qui se déroulent autour de l’événement). Cette non-
reconnaissance de la dimension patrimoniale des événements sportifs, tout du moins
hors de leurs caractéristiques culturelles, s’explique notamment par le manque de
recherches sur le sujet. En effet, bien que certains concepts puissent être reliés à celui
d’ESP par leur longévité, leur signification ou les traditions qu’ils véhiculent, tels les
«  Special Events  », «  Hallmark Events  », «  Signature Events  », «  Sport Heritage
Attraction » ou « lieux de mémoire » (Nora, 1984 ; Ritchie, 1984 ; Hall, 1989 ; Sofield,
2003  ; Getz, 2008  ; Pfister, 2011  ; Ramshaw, 2011  ; Hinch et Ramshaw, 2014),
lorsqu’elles abordent la question patrimoniale des événements, ces notions cherchent
généralement à leur rattacher une matérialité patrimoniale ou à les relier à une vision
idéalisée du sport et de son passé. Selon Walter Leimgruber (2010), cela peut
s’expliquer en partie par une tendance à associer la notion de patrimoine à celles de
folklore et de tradition. Dans le cadre des ESP, ce glissement sémantique a pour
conséquence une considération accrue pour les événements issus de sports
traditionnels. Pourtant, comme le démontrent Sébastien Fleuriel et Michel Raspaud
(2011) dans le cadre de la course cycliste Paris-Roubaix, de nombreux événements
contemporains ou issus de sports qui ne sont pas inscrits dans un folklore national ont
également une dimension patrimoniale.
8 Ce n’est que récemment que Chappelet (2014) a proposé une première définition des
événements sportifs compris comme ayant une essence patrimoniale. Pour lui, les ESP
ont quatre caractéristiques prédominantes : la longévité, la récurrence, l’identification à
un lieu particulier et une gouvernance locale de l’événement. Comme nous l’avons
démontré récemment (Pinson, 2017), si ces caractéristiques semblent en effet
indispensables pour percevoir un événement sportif comme patrimonial, elles ne sont
pas forcément suffisantes. Il est ainsi nécessaire pour ces événements de trouver une
position stratégique leur permettant de se distinguer d’autres événements plus ou
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moins similaires (Bessy, 2014). Ce processus de différenciation va chercher à accentuer


la dimension «  unique  » de la manifestation, afin de se profiler sur le marché
concurrentiel de l’événementiel sportif. En partant d’une ressource initiale
(l’événement sportif) qui revêt une potentialité pour le territoire, le processus de
différenciation permet d’en faire une ressource accomplie (qui résulte de l’action des
acteurs) dont le territoire et les acteurs concernés vont pouvoir bénéficier (Gumuchian
et Pecqueur, 2007). En partant des caractéristiques identifiées dans la littérature et de
la perception des ESP en tant que ressources territoriales, nous avons proposé (Pinson,
2018) un cadre compréhensif (voir illustration  1) pour essayer de comprendre le
processus qui mène d’un événement sportif à la perception d’un ESP par la population
locale.

Illustration 1 : Cadre compréhensif des ESP

Source : Pinson (2018)

9 L’illustration  1 met en avant différentes caractéristiques des ESP. Les éléments


constitutifs, en se renforçant mutuellement, vont aider à pérenniser l’événement sur le
territoire, alors que la stratégie de différenciation va chercher à distinguer la
manifestation d’autres événements plus ou moins similaires. Les quatre éléments
constitutifs –  la récurrence, le lieu, la gouvernance locale et la longévité  – sont
interconnectés et vont permettre de renforcer l’ancrage territorial de l’événement. À
titre d’exemple, la longévité de l’événement va faciliter la création et le renforcement
d’un réseau d’acteurs locaux autour de la manifestation, mais en retour ce réseau va
permettre, notamment par les ressources qu’il peut mobiliser, d’assurer l’existence de
l’événement dans la durée et de faire face à d’éventuelles crises. Néanmoins, si les
éléments constitutifs paraissent nécessaires à la perception d’un événement sportif
comme patrimonial, ils ne sont pas suffisants. Ainsi la Coupe de Noël, épreuve de
natation organisée depuis 1934 à Genève par une association locale, n’est pas perçue
comme patrimoniale par la population locale1, bien que les quatre dimensions précitées
soient respectées. Il est également nécessaire de considérer la stratégie de
différenciation mise en place par les organisateurs de l’événement pour le rendre
«  unique  » aux yeux du public. Si les éléments constitutifs s’inscrivent dans le
prolongement des recherches de Chappelet (2014), les trois dimensions de la stratégie
de différenciation font référence à la recherche de Stéphane Boisseaux, Peter Knoepfel,
Melaine Laesslé et Laurent Tippenhauer (2012). Pour ces auteurs, le processus de
différenciation, qui va résulter en la création de la ressource patrimoniale, s’opère à
travers des ajustements entre trois éléments  : le savoir-faire, les infrastructures et la
compétence de réception. Dans la logique des ESP, le savoir-faire fait référence à la
capacité d’organiser l’événement d’année en année, malgré de possibles contraintes.
Pour les propriétaires de la manifestation, il s’agit de mettre en avant un savoir-faire

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unique qui, s’il venait à disparaître, entraînerait également la disparition de l’épreuve,


du moins sous sa forme actuelle. Les infrastructures font référence à tous les éléments
qui donnent une singularité à l’événement (stade, éléments naturels, logo, etc.) et dont
la disparition pourrait mettre un terme à la manifestation, ou tout au moins en changer
l’expérience pour les participants. Dans ce cas, il s’agit pour les organisateurs de
montrer que la symbolique, liée aux éléments tangibles de leur événement, est unique
et va offrir une expérience particulière aux participants (athlètes et spectateurs),
comme Laurence Chalip, Christine Green et Lee Vander Velden (2000) l’ont démontré
pour les jeux olympiques. Finalement, la troisième dimension renvoie au narratif
particulier qui va entourer l’événement (anecdotes, surnoms, rattachement à un fait
historique, etc.) et dont la mise en avant va permettre de lui conférer une valeur
supérieure à d’autres manifestations plus ou moins similaires. Cela renvoie par ailleurs
aux recherches sur les attractions sportives patrimoniales (Ramshaw, 2011  ; Hinch et
Ramshaw, 2014) qui vont chercher à maintenir, voire à créer un lien à une vision
idéalisée de leur passé ou des valeurs qu’elles véhiculent. L’événement étant par nature
dynamique et appelé à évoluer pour exister et répondre aux attentes de son public, de
même que la perception étant appelée à se transformer avec le temps, l’ESP doit
continuellement chercher à renforcer son caractère unique vis-à-vis de ses
« concurrents », à se repositionner si nécessaire. Le renforcement touche à la nécessité
de continuellement communiquer autour de la stratégie de différenciation mise en
place, qui va permettre de renforcer le caractère unique de l’événement vis-à-vis de ses
concurrents et de maintenir sa perception d’authenticité auprès de la population cible.
Si le renforcement est évidemment une part essentielle dans le maintien de la
perception d’un événement comme patrimonial, il apparaît qu’il est parfois nécessaire
de repositionner la stratégie de différenciation, notamment après une situation de crise.
Le rallye-raid Paris-Dakar a par exemple été forcé de revoir toute sa communication
lorsqu’il a dû déménager d’Afrique en Amérique du Sud pour des raisons de sécurité.
Sans affirmer ici que ce rallye-raid est perçu comme patrimonial (il n’a pas été étudié
dans cette recherche), cet exemple montre qu’un repositionnement peut parfois être
nécessaire, mais qu’il va aussi remettre en cause la perception d’authenticité de
l’événement. Il sera alors également nécessaire de renforcer le nouveau message
véhiculé pour que celui-ci vienne influencer la perception de l’événement par le public
cible. Au-delà de sa valeur heuristique, l’illustration  1 nous sert aussi de cadre pour
l’observation des ESP, comme nous allons le voir dans la partie suivante.

Méthodologie
10 Pour observer les différentes configurations des ESP, nous avons choisi pour cette
recherche l’analyse quali-quantitative comparée (AQQC). Celle-ci permet d’observer les
différentes combinaisons de conditions qui mènent à l’occurrence du résultat dans un
groupe de cas (il s’agit ici de la perception d’un événement sportif comme étant
patrimonial). Cette approche combine certains avantages des techniques qualitatives
(études de cas) et quantitatives (approche par les variables). De plus, l’AQQC est très
appropriée pour les échantillons de taille moyenne comme dans cette recherche, avec
24 cas étudiés. Nous appuyant sur l’AQQC, nous cherchons à savoir si une condition est
nécessaire (toujours présente, mais pas comme facteur unique), suffisante (toujours
présente et facteur unique d’explication) ou non pertinente pour expliquer l’occurrence
du résultat. Il s’avère donc nécessaire de créer un échantillon comprenant à la fois des
cas où le résultat est présent et des cas où ce dernier est absent, pour être en mesure
d’observer les différentes configurations de conditions. À ce titre, les contradictions,
c’est-à-dire les configurations qui permettent d’observer la présence ou l’absence du
résultat, sont un des éléments recherchés. Nous avons eu recours à deux programmes
informatiques pour comparer systématiquement les cas entre eux, eu égard aux
conditions et au résultat, c’est-à-dire Tosmana (Cronqvist, 2011) et fs/QCA 2.5 (Ragin

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et Davey, 2014). À cette fin, nous utilisons un « crisp-set QCA », où les sept conditions
(présentées dans l’illustration 1) et le résultat sont codés selon la dichotomie suivante :
« 1 » pour présent et « 0 » pour absent. Une fois des groupements de cas effectués, il est
possible d’observer les interactions entre les conditions. C’est pourquoi le but de
l’AQQC n’est pas de découvrir une relation causale, mais davantage d’observer les
différentes configurations de conditions possibles pour un résultat donné. Cette
dernière remarque s’avère particulièrement importante dans la perspective d’une
recherche exploratoire qui traite d’un concept en émergence. En effet, notre démarche
ne cherche pas à découvrir un lien de causalité qui permettrait d’expliquer la
patrimonialisation d’un événement sportif, mais à observer les différentes
configurations d’ESP de manière systématique.
11 Néanmoins, une des problématiques rencontrée dans l’étude des événements sportifs
sous l’angle patrimonial est de les identifier comme tel. En effet, lorsqu’un label existe,
telles les listes de l’UNESCO ou, dans une autre mesure, les appellations d’origine
contrôlées, des objets ayant une dimension ou une valeur patrimoniale sont déjà
identifiés. Comme nous l’avons vu, ce n’est généralement pas le cas pour les
événements sportifs. Ainsi, dans un premier temps, il est nécessaire d’identifier des
événements pouvant être reconnus en tant que patrimoine. Le cadre compréhensif
présenté dans l’illustration  1 nous a servi de base de travail. Ainsi, en fonction des
caractéristiques identifiées dans la littérature, nous avons constitué un inventaire
d’événements sportifs à potentialité patrimoniale (compris comme recouvrant toutes
les caractéristiques ou seulement une partie de celles-ci) pour six cantons suisses
(Fribourg, Genève, Jura, Neuchâtel, Valais et Vaud), en collaboration avec les offices et
les services des sports et du tourisme des cantons et des communes concernés. Afin
d’observer si les caractéristiques identifiées sont décisives ou non pour percevoir un
événement comme patrimonial, nous leur avons apporté de légères variations. Ainsi,
pour être répertorié, un événement devait se dérouler dans le même lieu (stade, ville,
lieu de départ ou d’arrivée, etc.) de façon régulière (généralement chaque année ou tous
les deux ans) depuis au moins 25 ans, ce qui correspond à une génération2 (Mesure et
Savidan, 2006). Sur la base de ces caractéristiques et des informations apportées par
les représentants des offices et des services concernés, nous avons constitué une liste de
134 événements sportifs3.
12 Dans le but de connaître la perception de ces événements par la population locale
(sélectionnée en fonction du lieu de résidence), nous avons envoyé un questionnaire en
ligne à un échantillon de convenance (N=175) durant les mois de mai et juin 20154. Le
taux de réponses a été de 73  % (54  % d’hommes et 46  % de femmes). La question
centrale du questionnaire ne cherchait pas à savoir si les répondants percevaient ces
événements comme patrimoniaux, mais comme emblématiques de leur région. Cela
s’explique notamment par la remarque de Leimgruber (2010) quant à l’association
entre la notion de patrimoine et celles de folklore et de tradition. Il est en effet apparu
durant la phase de test du questionnaire que la notion de patrimoine était difficile à
saisir pour de nombreux répondants et qu’ils ne se sentaient pas forcément aptes à en
juger. Bien que la notion d’«  emblématique  » ne recouvre pas exactement les mêmes
significations, il est apparu durant les tests qu’elle était suffisamment large pour être
acceptée par le plus grand nombre, tout en menant à une sélection parmi les
événements en fonction de la signification qu’ils véhiculent à propos du territoire (ce
que nous recherchions notamment à travers la notion de patrimoine). Nous avons en
outre interrogé les répondants à propos de leurs activités sportives (fréquence et
discipline) et leur participation à ces événements en tant que spectateur ou participant.
Nous avons ajouté ces questions ainsi que celle concernant le lieu de résidence pour
observer l’influence de la proximité (géographique et de pratique) sur la perception de
l’événement. Comme le met en avant Charlène Arnaud (2012), la proximité joue
effectivement un rôle significatif sur la façon dont un objet et perçu comme faisant
partie de l’identité locale. Le tableau 1 présente les douze événements qui ressortent du
questionnaire comme étant emblématiques de leur région, ainsi que douze événements
non perçus en tant que tels et utilisés pour l’AQQC.
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Tableau 1 : Liste d’événements sportifs utilisés pour l’AQQC

Source : adapté de Pinson (2017 : 141)

13 Nous observons à la lecture du tableau  1 que les événements qui ressortent ne sont
pas homogènes. Nous retrouvons effectivement à la fois des événements issus de sports
traditionnels (combats de vache) et des pratiques plus contemporaines (course à pied).
L’âge des événements varie également, de 119  ans pour le plus ancien (Marché-
concours de Saignelégier) à 34  ans pour le plus jeune (20  km de Lausanne).
Finalement, notons que nous avons ajouté deux événements à la liste même s’ils ne
correspondaient pas aux critères de sélections évoqués plus haut : le Red Bull Crashed
Ice et le Laax Open. Nous avons fait ce choix afin d’introduire pour l’analyse des cas
comprenant des variations de conditions (propriété privée de l’événement, non-
récurrence ou création récente). Nous observons en outre que parmi les ESP, deux
tiers  (8) sont urbains, du moins pour leur point de départ et/ou d’arrivée, ce qui
s’explique notamment par la transformation de la pratique sportive. En effet, quatre de
ces événements (l’Escalade, les 20  km de Lausanne, Morat-Fribourg et Sierre-Zinal)
sont des manifestations de course à pied. L’essor de ces épreuves depuis les années
1980 a favorisé une pratique sportive urbaine, alors que celle-ci avait auparavant
tendance à sortir de la ville. Si l’environnement urbain a fait naître de nouvelles
disciplines, telles que le parkour ou le street golf (Lebreton et  al., 2010), la
reconnaissance patrimoniale des épreuves de course à pied précitées montre à quel
point ces événements ont su s’inscrire au fil du temps dans l’identité locale de ces
centres urbains.

Principaux résultats
14 Dans l’illustration 1, sept conditions sont mises en avant : lieu, récurrence, longévité,
gouvernance locale, savoir-faire, symbolique et narratif. Comme le démontrent Axel
Marx et Adrian Dusa (2011) dans leur recherche, pour une AQQC comprenant 24 cas,
afin d’éviter la probabilité de résultats aléatoires, il faut considérer un maximum de
cinq conditions (sans compter le résultat). À cette fin, nous avons combiné les quatre
conditions liées à la pérennisation de l’événement pour n’en former qu’une. Ainsi, pour
être codé comme pérenne, un événement doit revenir chaque année ou aux deux ans

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dans un même lieu, depuis au moins 25  ans, et appartenir à une entité locale
(association ou collectivité). Nous fondant sur ces dernières remarques ainsi que sur la
théorie des ESP et l’AQQC, il nous est possible de formuler l’hypothèse suivante quant à
la configuration des ESP :
15 PEREN(1) x (NAR[1] + SYMB[1] + SAV-F[1]) => ESP(1)5.
16 En termes d’AQQC6, l’hypothèse ci-dessus signifie que pour être perçu comme un
ESP (ESP[1]) par la population locale, un événement sportif doit être pérennisé dans le
territoire (PEREN[1]) et se différencier d’autres événements plus ou moins similaires
par un narratif particulier (NAR[1]), une symbolique unique (SYMB[1]) ou un savoir-
faire spécifique (SAV-F[1]). Notre analyse va ainsi chercher à confirmer ou à infirmer
cette hypothèse en observant les configurations des événements perçus et non perçus
dans notre échantillon en fonction de ces quatre conditions. L’illustration 2 présente les
résultats issus de l’analyse des cas. Il y a seize configurations théoriques combinant les
quatre conditions binominales. Cinq configurations (zones blanches) ne sont pas
couvertes par des observations empiriques (mais sont tout de même analysées). Quatre
configurations (zones hachurées claires), qui combinent douze cas, mènent à la
perception d’ESP. Finalement, les sept autres configurations (zones hachurées foncées),
qui couvrent également douze cas, ne mènent pas à la perception d’ESP.
L’illustration 2, qui est une visualisation de la table de vérité présentée à l’annexe I, met
en lumière les différentes configurations des ESP.

Illustration 2 : Diagramme de Venn des ESP

Source : L’auteur

17 L’illustration  2 permet d’observer qu’aucune condition suffisante, à savoir une


condition qui suffirait à expliquer l’occurrence du résultat, n’émerge de l’analyse.
Néanmoins, une condition nécessaire, qui indique que la condition doit être présente
pour que le résultat le soit également, est observée dans le cas de l’occurrence du
résultat (la perception de l’événement comme ESP)  : la pérennisation. En effet, 60  %
des événements qui sont perçus comme patrimoniaux sont récurrents dans le même
lieu depuis au moins 25 ans et appartiennent à des entités locales. Sur la base de cette
illustration, il est également possible de reformuler l’hypothèse de départ sous la forme
d’une solution parcimonieuse :
18 PEREN(1) x (NAR[1] x SYMB[1] + SAV-F[1]) => ESP(1).

Analyse et interprétation des résultats


https://journals.openedition.org/teoros/3471 9/16
14/02/2023 11:41 Les événements sportifs patrimoniaux : développement d’un concept en émergence

19 Comme on le voit, la solution parcimonieuse présentée ci-dessus met en avant deux


voies possibles. La première voie – PEREN(1) x (NAR[1] x SYMB[1]) – s’inscrit dans le
prolongement des recherches de Pierre Nora (1984) sur les lieux de mémoire et de
Laurence Chalip, Christine Green et Lee Vander Velden (2000) sur l’attrait des jeux
olympiques auprès du public. Selon cette perspective, l’événement doit être pérennisé
sur le territoire, alors que le narratif va venir renforcer la signification particulière de
l’événement auprès de la population et ainsi créer des liens forts d’identification
(Pfister, 2011). Les symboles vont servir de représentations tangibles qui vont aider les
individus à se connecter à cette signification particulière (dimension immatérielle) en
se rattachant aux émotions et aux passions engendrées par l’événement. La seconde
voie –  PEREN(1) x SAV-F(1)  – s’inscrit dans le prolongement de l’hypothèse initiale.
Pour être perçu comme patrimonial, l’événement doit également être pérennisé sur le
territoire, alors que la démonstration d’un savoir-faire particulier doit suffire à
différencier l’événement. Ainsi, comme le suggère Chappelet (2015), la pérennisation
d’un événement est nécessaire à l’identification d’un ESP, mais comme le met en avant
Olivier Bessy (2014), l’événement doit aussi trouver une position stratégique lui
permettant de se différencier d’autres événements plus ou moins similaires (dans ce cas
grâce au savoir-faire). Une nuance est tout de même à apporter à la lecture des données
du tableau 2.

Tableau 2 : Test de nécessité pour les ESP

Source : L’auteur

20 Le narratif, s’il n’est pas présent dans la seconde «  voie  » mentionnée ci-dessus,
apparaît néanmoins comme une dimension très importante du processus de
patrimonialisation. La mesure du test de nécessité présentée au tableau 2 montre que la
présence du narratif obtient un score de 0,92 (un score de 1 indiquant la présence d’une
condition nécessaire) pour un taux de couverture de 0,79, ce qui sous-entend que cette
condition peut être pratiquement considérée comme nécessaire. En effet, c’est
uniquement le Festival international de ballons de Château-d’Oex qui n’a pas été codé
avec la présence du narratif et qui vient ainsi marquer cette légère distinction entre les
deux voies. Le fait que nous ayons opté dans cette recherche pour un « crisp-set QCA »,
où les données sont codées selon la dichotomie présence-absence de la condition, peut
avoir une influence. En effet, cela nous a permis de gagner en clarté, mais fait perdre
une certaine richesse qu’aurait pu apporter le codage sur des mesures intermédiaires.
21 La pérennisation de l’événement, ainsi que l’existence d’un narratif fort qui va venir
raconter une «  histoire  » autour de la manifestation, en faisant plus qu’une simple
compétition sportive, apparaissent comme deux éléments nécessaires pour qu’un
événement soit perçu comme patrimonial. Pour autant, et toujours dans une
perspective de différenciation de l’événement, il est également nécessaire que ce dernier
ait des symboles qui paraissent uniques à la manifestation ou qu’il puisse faire preuve
d’un savoir-faire particulier. Cela renvoie finalement au dilemme matériel-immatériel
où la valeur patrimoniale de l’événement dépend de la signification qu’il véhicule
(immatériel), mais nécessite une matérialité sur laquelle les individus peuvent se
rattacher.

https://journals.openedition.org/teoros/3471 10/16
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Conclusion
22 Fondé sur une recherche exploratoire, cet article présente la construction théorique
du concept en émergence d’événement sportif patrimonial et observe ses configurations
à travers une série de cas dans la zone francophone de la Suisse. Il s’agit d’une première
étape importante dans une recherche plus large sur les ESP et la façon dont ils peuvent
bénéficier aux stratégies de développement durable des territoires.
23 Le cadre compréhensif des ESP (illustration  1) propose d’observer le processus qui
mène d’un événement sportif (perçu comme une ressource initiale) en un ESP (vu
comme une ressource territoriale) à travers de deux dimensions : la pérennisation et la
stratégie de différenciation. La pérennisation –  observée par l’interaction entre la
récurrence, le lieu, l’âge et la gouvernance locale  – apparaît comme une condition
nécessaire pour percevoir un événement comme patrimonial. En effet, tous les cas de
l’échantillon perçus comme patrimoniaux par la population locale sont pérennisés dans
leur territoire respectif. Néanmoins, si la pérennisation est indispensable, elle n’est pas
suffisante pour pouvoir parler d’ESP. Il est en outre nécessaire que l’événement se
distingue d’autres manifestations plus ou moins similaires. Comme le met en avant
l’AQQC, il apparaît que le narratif joue un rôle prépondérant. Il est ainsi nécessaire de
construire « l’histoire » qui va venir distinguer son événement de manifestations plus
ou moins similaires, en lui donnant une signification particulière (dimension
immatérielle de la perception patrimoniale de l’objet). Les cas ici à l’étude montrent
tout de même qu’une dimension tangible est également importante pour que la
population puisse s’y rattacher. Comme mentionné auparavant, cela renvoie finalement
au dilemme matériel-immatériel où la valeur patrimoniale de l’événement dépend de la
signification qu’il véhicule (immatériel), mais nécessite une matérialité à laquelle les
individus peuvent se rattacher. Évidemment, l’AQQC comporte également une série de
limites qu’il faut prendre en compte. Les configurations observées, et même la solution
parcimonieuse, vont directement dépendre des cas sélectionnés. La prise en compte
d’événements sportifs provenant d’autres contextes (notamment du monde anglo-
saxon où le secteur privé est généralement prédominant dans l’organisation
d’événements) peut, par exemple, avoir un effet sur les configurations observées. De
même, le codage des événements, bien que systématisé et uniquement fait avec une
connaissance approfondie des cas comme le préconisent Carsten  Q. Schneider et
Claudius Wagemann (2010), revêt une dimension subjective qui peut être contestée.
Néanmoins, le but sous-jacent à cette approche n’étant pas d’expliquer, mais avant tout
d’observer, sa valeur heuristique est évidemment centrale dans le développement d’un
concept en émergence.
24 Si le but premier de cette contribution est de développer un concept en émergence, il
apparaît que les ESP peuvent avoir un certain intérêt pour les territoires engagés dans
des stratégies de développement par l’accueil d’événements sportifs. Actuellement, ces
stratégies reposent principalement sur l’accueil de ressources exogènes au territoire (à
savoir la venue de grands événements sportifs internationaux ponctuels), mais cette
logique est dorénavant remise en question. Face au gigantisme de ces événements, de
nombreux territoires ne peuvent plus prétendre à leur accueil faute de ressources
(financières, humaines ou en termes d’infrastructures) suffisantes. De plus, ces
événements sont remis en question par les populations locales et les décideurs
politiques. À ce titre, les ESP offrent une piste de réflexion intéressante. Comme nous
avons pu l’observer dans cette recherche, les ESP ne recouvrent pas qu’une réalité. En
effet, que ce soit le meeting d’Athletissima à Lausanne (compétition internationale
regroupant des sportifs d’élite), la Course de l’escalade à Genève (événement de course
à pied qui recherche avant tout une participation de masse) ou les Finales nationales de
la race d’Hérens (événement traditionnel de combat de vaches en Suisse), les
événements observables à travers le concept d’ESP ont une taille, des publics cibles et
une visibilité différents. En outre, selon la catégorisation tridimensionnelle du tourisme
sportif de Heather Gibson (1998), les ESP peuvent être classifiés dans le tourisme

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événementiel (où le but est la visite d’un événement), le tourisme sportif actif (où le but
est la participation à une activité physique) ou le tourisme sportif nostalgique (où le but
est de visiter un site ou une attraction sportive lié à une histoire particulière). Pour
Gregory Ramshaw et Tim Bottelberghe (2014), le fait que le patrimoine sportif soit
généralement à la frontière entre ces différentes dimensions définies par Gibson offre
des potentialités de développement touristique intéressantes pour les territoires
d’accueils. Ces derniers ne vont pas simplement promouvoir un événement, mais une
tradition locale que l’on peut faire perdurer (notamment grâce aux attractions
touristiques) au-delà de la tenue de l’événement. Finalement, les ESP ne sont pas à voir
comme étant en opposition aux événements majeurs, mais davantage comme
complémentaires. En effet, dans une perspective de portefeuille d’événements (Ziakas,
2010), ces différents types d’événements vont généralement répondre à des objectifs
territoriaux distincts. Les événements majeurs permettent d’augmenter la visibilité du
territoire ainsi qu’une régénération urbaine (notamment en accélérant des projets de
développement urbain ou de réaffectation de quartiers), alors que les événements
récurrents cherchent généralement davantage à influencer la qualité de vie de la
population locale (offre événementielle ou développement de la pratique sportive,
notamment), tout en offrant des opportunités commerciales pour les destinations hôtes
(Mackellar, 2015). Les ESP permettent pareillement de valoriser le savoir-faire du
territoire. Le Vendée Globe est par exemple une vitrine importante pour l’industrie
nautique du département de Vendée en France à qui appartient l’événement.
Néanmoins, les ESP restant un concept en émergence, des recherches futures s’avèrent
nécessaires pour approfondir notre connaissance et comprendre les potentialités qu’ils
peuvent représenter pour les territoires hôtes.

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Annex
Annexe I : Test de vérité des ESP

https://journals.openedition.org/teoros/3471 14/16
14/02/2023 11:41 Les événements sportifs patrimoniaux : développement d’un concept en émergence

Source : L’auteur

Notes
1 Cette information est issue d’une enquête réalisée par l’auteur auprès d’un échantillon de
résidents locaux pendant l’été 2015 quant à leur perception de 134  événements sportifs locaux
(information disponible auprès de l’auteur).
2 Cette notion de « génération » est basée sur celle de l’UNESCO qui considère que pour être jugé
comme patrimonial, un objet doit être transmis d’une génération à la suivante.
3 Toutes les données sont disponibles auprès de l’auteur.
4 Le questionnaire est disponible auprès de l’auteur.
5 Dans cette formule, et la suite du texte, «  PEREN » signifie pérennisation, «  NAR  » narratif,
« SYMB » symbolique et « SAV-F » savoir-faire.
6 Dans le langage de l’AQQC, «  x  » signifie «  et  » alors que «  +  » signifie «  ou  ». Pour plus
d’information, se référer à Schneider et Wagemann (2010).

List of illustrations
Title Illustration 1 : Cadre compréhensif des ESP
Credits Source : Pinson (2018)
URL http://journals.openedition.org/teoros/docannexe/image/3471/img-1.jpg
File image/jpeg, 68k
Title Tableau 1 : Liste d’événements sportifs utilisés pour l’AQQC
Credits Source : adapté de Pinson (2017 : 141)
URL http://journals.openedition.org/teoros/docannexe/image/3471/img-2.jpg
File image/jpeg, 598k
Title Illustration 2 : Diagramme de Venn des ESP
Credits Source : L’auteur
URL http://journals.openedition.org/teoros/docannexe/image/3471/img-3.png
File image/png, 21k

https://journals.openedition.org/teoros/3471 15/16
14/02/2023 11:41 Les événements sportifs patrimoniaux : développement d’un concept en émergence

Title Tableau 2 : Test de nécessité pour les ESP


Credits Source : L’auteur
URL http://journals.openedition.org/teoros/docannexe/image/3471/img-4.jpg
File image/jpeg, 204k

URL http://journals.openedition.org/teoros/docannexe/image/3471/img-5.jpg

File image/jpeg, 409k

References
Electronic reference
Joël Pinson, “Les événements sportifs patrimoniaux : développement d’un concept en
émergence”, Téoros [Online], 38, 1 | 2019, Online since 15 January 2019, connection on 14
February 2023. URL: http://journals.openedition.org/teoros/3471

About the author


Joël Pinson
Docteur de l’Université de Lausanne :joel_pinson@yahoo.fr

Copyright

Creative Commons - Attribution-NonCommercial-NoDerivatives 4.0 International - CC BY-NC-ND


4.0

https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/

https://journals.openedition.org/teoros/3471 16/16

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