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03. Marque territoriale et clubs sportifs professionnels : menaces et opportunités des ligues ouvertes pour les collectivités | C…

03. Marque territoriale et clubs sportifs professionnels : menaces et opportunités


des ligues ouvertes pour les collectivités
Mickael Terrien, Christophe Durand, Clément Proot
Dans Politiques & management public 2022/2 (N° 2), pages 207 à 229

Article

Introduction

Q uel est le point commun entre les villes de Grenoble et du Mans ? Un stade de football onéreux (respectivement 79 et 104 millions
d’euros) majoritairement à la charge du contribuable, propriété de collectivités publiques (Grenoble Alpes Métropole et la ville du
Mans) et construit pour satisfaire les ambitions d’un club de football professionnel (Moulard et al., 2019) peu de temps avant sa
1

liquidation judiciaire (respectivement trois et deux saisons). Préjudiciables pour l’acteur public, ces investissements peuvent se faire
ressentir bien au-delà des coûts de construction et d’entretien de l’infrastructure. Les grands équipements sportifs constituent des
emblèmes territoriaux (Houllier-Guibert, 2018) et l’absence d’un club résident et l’échec sportif de ce dernier peuvent se refléter sur la
marque de la ville (Hautbois, Durand, 2015).

La notion de marque territoriale (place branding) se définit comme la « le socle de la construction d’une image cohérente et forte du territoire sur le 2
long terme dont l’objectif est de permettre au territoire de rayonner et attirer » (Rochette, Zumbo-Lebrument, 2017 :54). Elle est vue comme un
moyen de combler le déficit d’attractivité de certains territoires (Baygert, 2014 ; Rochette et al., 2016). À ce titre, trois objectifs sont
identifiés par la littérature (Richelieu, 2018) : construire la notoriété de la marque (principal objectif des villes selon Anttiroiko, 2014) ;
améliorer l’image du lieu ; le promouvoir auprès de différentes cibles. L’une des composantes du place branding est donc le destination
branding qui se focalise sur ce dernier aspect et, entre autres, sur le tourisme (Richelieu, 2018).

Les travaux sur la marque territoriale concernent principalement la transférabilité des pratiques marketing au territoire et au 3
rayonnement des marques créées (Texier, Valla, 1992). Des travaux plus récents ont commencé à s’intéresser aux acteurs engagés dans le
développement de ces marques et notamment à leur motivation et mode d’action (Rochette, Zumbo-Lebrument, 2017 ; Rochette et al.,
2016). Cet article s’inscrit dans cette mouvance en mesurant les risques et opportunités que font peser une partie prenante particulière
des collectivités, à savoir le club sportif professionnel.

Divers travaux en marketing sportif régional, branche du marketing territorial, se sont intéressés à la contribution directe et indirecte du 4
sport dans la promotion d’un lieu (Hautbois, Desbordes, 2008). Bien que la littérature s’intéresse majoritairement à l’accueil de méga-
événements sportifs, la présence d’un club sportif professionnel peut aussi contribuer à forger la marque d’une ville (Hautbois, 2017 ;
Takamatsu, 2021).

Ce postulat -bien que questionnable, car dépendant du contexte de chaque ville et de chaque club (Smith, 2001)- ne sera pas discuté. 5
Plusieurs études de cas sont déjà disponibles sur le sujet (Hautbois, 2015, 2017). Cet article se positionne plutôt en écho à l’appel de
Hautbois et Durand (2015) pour une réflexion géomarketing de l’acteur public dans sa relation avec les clubs professionnels locaux en
proposant un outil d’aide à la décision pour les collectivités. Il permet de mesurer la probabilité de voir leurs équipes locales accéder à
certains segments des compétitions et s’y maintenir via l’analyse des déterminants du succès sportif.

Associer la marque territoriale à un club professionnel dans des ligues ouvertes s’avère en effet risqué puisqu’une relégation sportive du 6
club pourrait menacer sa présence au meilleur niveau et altérer la communication de la collectivité (Desbordes, Richelieu, 2019).
Toutefois, les résultats sportifs ne sont pas totalement aléatoires. Le sport professionnel est en effet marqué par un processus de
métropolisation (Durand et al., 2005) impliquant une relation quasi transitive entre le potentiel démographique du territoire d’ancrage
du club, son budget et ses résultats sportifs (Helleu, Durand, 2007). Si ce phénomène peut être néfaste pour l’incertitude des
compétitions (Dejonghe, 2004), il peut aider les clubs et ses parties prenantes à anticiper les résultats sportifs.

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L’analyse repose sur la proportion de facteurs exogènes et contingents par rapport à ceux endogènes pour expliquer la performance des 7
clubs évoluant en première division masculine de basketball (Pro À part la suite), de football (L1), de handball (D1), de rugby (Top 14) et de
volleyball (LAM) sur la période 2014/2015 – 2018/2019. Les performances sportives seront mises en rapport avec le budget et/ou l’ancrage
territorial des clubs (Terrien & Durand, 2017) pour identifier d’éventuelles barrières à la mobilité entre groupes stratégiques (Caves,
Porter, 1977). Ce travail permettra l’émergence de faits stylisés qui correspondent à la généralisation de résultats empiriques
généralement vrais, mais qui peuvent se révéler inexacts dans le détail. Au-delà de la stratégie de marque territoriale, ces résultats
doivent aider les villes de définir leur positionnement par rapport à l’accompagnement de l’équipe professionnelle : subventions directes
et indirectes ; mise aux normes/agrandissement/construction d’une infrastructure.

L’article est structuré comme suit. Le cadre théorique (1) est tout d’abord présenté, avant de détailler la méthodologie (2) mise en œuvre 8
pour faire émerger les faits stylisés. Ces derniers sont présentés dans la troisième partie (3). Ils montrent que l’importance relative de
l’environnement par rapport à l‘expertise des clubs dépend des ligues professionnelles. Les résultats sont ensuite discutés et diverses
implications managériales sont identifiées pour les clubs et ligues sportives professionnelles et pour les collectivités territoriales.

1. Cadre théorique

1.1. Le sport pour développer la marque de la ville


L’amélioration de l’image d’une ville via l’outil sportif est un phénomène ancien (Reiss, 1981). Il s’explique par la charge émotionnelle du 9
sport, sa large audience et de sa capacité à créer de la confiance entre la ville et ses partenaires (Anholt, 2003). Richelieu (2018) identifie
quatre stratégies mobilisables pour développer / améliorer la marque d’un lieu à travers le sport : (1) devenir un lieu d’accueil
d’événements sportifs majeurs ou mineurs ; (2) bénéficier de la présence d’équipes professionnelles ou nationales (p. ex. les All Blacks en
Nouvelle -Zélande) ; (3) proposer différents sports de masse attirant des participants (p. ex. un marathon) ; (4) être une plateforme de
lieux sportifs (p. ex. un hub dédié au sport). Ces stratégies ne sont pas excluables à l’image de Lausanne, Ville Olympique, label développé
sur les stratégies (1) et (4) avec l’accueil de nombreuses fédérations internationales dans le Canton de Vaud (Chappelet, Pinson, 2015).

Toutefois, la littérature se focalise majoritairement sur la stratégie (1) d’accueil des méga-événements sportifs. Ainsi, l’accueil des seuls 10
Jeux Olympiques pourrait en effet suffire à changer la perception d’un pays. Toutefois, l’accueil d’un méga-événement sportif ne permet
pas toujours de changer l’image d’un territoire, l’effet positif constaté après coup ayant tendance à se dissiper à moyen terme (Tasci et al.,
2019).

Ce résultat fait écho au fait qu’un événement isolé n’aura pas le même effet qu’une succession d’événements planifiés formant un 11
portefeuille (Chappelet, Pinson, 2015). De ce point de vue, la présence d’une équipe professionnelle permet d’assurer un feuilleton
régulier sur le territoire. Elle peut servir de « mégaphone positif de la région, habituellement une ville, capable de s’adresser au grand public, aux
touristes potentiels, aux leaders commerciaux » (Hautbois, 2017 : 184).

1.2. Le club sportif professionnel pour développer la marque de la ville


Les résultats sportifs d’une équipe professionnelle ont plusieurs externalités positives pour leur territoire d’accueil. Par commodité, celui- 12
ci sera circonscrit dans l’article à la ville bien que le club puisse aussi servir d’étendard à un département (p. ex. Le Mans Sarthe Basket) ou
à une région (p.ex. AS Clermont Auvergne, Chanut & Rochette, 2012).

Interrogées sur les apports d’un club professionnel, les villes estiment qu’il développe la fierté civique des habitants, permet d’attirer des 13
résidents et stimule l’activité touristique (Hautbois, 2015). Le club est aussi un actif stratégique intangible dont la médiatisation peut se
substituer à des campagnes de promotion du territoire beaucoup plus coûteuses (Hautbois, Durand, 2015). Le club professionnel permet
notamment d’atteindre deux des trois cibles du tourisme sportif (Gibson, 1998) : ceux qui veulent assister à un événement sportif ; ceux
[1]
nostalgiques souhaitant revivre des souvenirs passés en visitant un stade ou un musée . Montpellier utilise ainsi son club de football
pour se faire connaître en Amérique du Sud (Hautbois, 2017).

Les clubs sportifs permettent également une revitalisation régionale notamment lorsque la collectivité aménage ou construit une 14
infrastructure utilisée par le club (Houllier-Guibert, 2018). Ils seront aussi un outil d’animation du territoire (Hautbois, Durand, 2015) et
l’engagement des spectateurs pour une équipe se traduira dans leur attachement au territoire (Tamukatsu).

Ces différents aspects expliquent que les collectivités locales soutiennent quasiment dans le monde entier leurs clubs professionnels 15
(Hautbois, Durand, 2015). Au-delà de la mise à disposition des enceintes sportives (Moulard et al., 2019), d’exonérations fiscales, et des
aides ponctuelles à un club présentant un déficit important (Carin, Terrien, 2021), des subventions annuelles sont versées à la plupart des
clubs professionnels français ou à leurs associations. Elles représentent 55 %, 24 %, 20 %, 2 et 0,7 % du budget des clubs évoluant
respectivement en LAM, D1, Pro A, Top 14 et L1 (Lepetit, 2020).

Ces aides publiques ont pourtant été limitées par le législateur dans les années 1990, entraînant la montée en puissance de 16
subventionnements déguisés via l’achat de billets ou du partenariat (Durand, Bayle, 2002). L’objectif « zéro subvention » pour le sport
professionnel ne pouvant clairement être atteint. Le décret n° 2001-828 du 4 septembre 2001 a finalement plafonné les aides directes en
valeur : 2,30 M€ d’aides directes pour les missions d’intérêt général ; 1,60 M€ d’achat de prestations.

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1.3. La marque de la ville soumise à la glorieuse incertitude du sport
« Les urbanistes ne contrôlent ni l’existence du club (la mairie n’est pas le propriétaire du club et n’est pas capable de décider si le club peut continuer à 17
jouer en première division) ni ses résultats, dès lors utiliser le club dans une stratégie de branding ajoute un degré d’incertitude » (Hautbois, 2015 : 64).
Au-delà des risques d’associer sa marque à une autre partie prenante (Rochette et al., 2016), le sport professionnel présente certaines
spécificités qui complexifient la stratégie de marquage de la ville.

Citons notamment l’ouverture par le bas (risque de relégation) et la fermeture par le haut (nombre de promotions limitées) des 18
compétitions, ainsi qu’une discontinuité des flux réels (les résultats sportifs de la saison t n’étant pas transposables sur t+1). Ces trois
particularités (Minquet, 2004) aident à comprendre les conséquences néfastes de la glorieuse incertitude du sport pour les collectivités
publiques. En fonction de leurs résultats sportifs, un club de première division lors de la saison t pourra participer à une coupe
continentale ou être relégué en division inférieure en t+1. Or, l’exposition des clubs (et de ce fait des collectivités) et la demande locale
dépendent de la compétition dans laquelle ils sont engagés.

Les fans s’associent en effet à une équipe gagnante pour projeter une image attractive, mais s’en dissocient en cas de contre-résultats 19
(Cialdini et al., 1976). Cette versatilité est de conséquence pour les partenaires de l’équipe. Si une promotion génère un effet positif, une
relégation sera plus problématique (Hautbois, 2015) et pourra même entraîner un changement dans la communication de la ville
(Hautbois, 2017). Une solution serait alors de se prémunir de ce risque en misant simultanément sur plusieurs sports (Hautbois, Durand,
2015). Toutefois les moyens limités des collectivités leur imposent le plus souvent de faire des choix.

Autre problème, cette stratégie ne règle pas la gestion des grands équipements sportifs qui deviendraient inutilisés en cas d’échec sportif 20
du club professionnel (Houiller-Guibert, 2018). Certaines municipalités doivent même verser des indemnités compensatrices d’aléa
sportif annuelles de plusieurs centaines de milliers d’euros à l’exploitant du stade lorsque le club local est relégué en deuxième division
(François, Marsac, 2014).

1.4. Une glorieuse incertitude du sport limitée


Fort heureusement, cet aléa sportif est limité et il serait plus juste de parler de glorieux risque du sport plutôt que d’incertitude (Knight, 21
1921) tant les résultats sportifs sont probabilisables. En effet, à long terme, la zone de chalandise détermine le potentiel économique des
clubs et donc leur succès sportif (Helleu, Durand, 2007). La relation quasi transitive entre potentiel local, recettes et performance sportive
doit être expliquée en deux temps. Premièrement, une relation causale entre les dépenses en talent et les classements est attestée dans les
compétitions (Hall et al., 2002). Elle signifie que le succès sportif dépend prioritairement de l’investissement sur le marché du travail.
Deuxièmement, le potentiel local d’un club professionnel contraint son développement économique et ainsi son niveau d’investissement
en talent (Durand et al., 2005). Cette séquence implique pour chaque ville un potentiel local, fonction de son environnement (population,
collectivités territoriales, entreprises…) qui permettra d’accueillir une ou plusieurs équipes professionnelles mais aussi de calibrer la
jauge des enceintes sportives.

Il s’ensuit un processus de métropolisation du sport professionnel. Ce « darwinisme géographique » (Helleu, Durand, 2007 : 5) permet 22
d’identifier dans les championnats des barrières à la mobilité entre groupes stratégiques (Caves, Porter, 1977). Celles-ci limitent l’accès à
certains segments de la compétition aux clubs remplissant certains critères géomarketing. Le concept de barrière à la mobilité est très
utilisé dans le sport professionnel, que ce soit par les chercheurs (Feuillet et al., 2021) ou les ligues. Les instances de régulation du
basketball et du football professionnel français l’utilisent en effet dans leurs rapports annuels pour expliquer les opportunités
(qualification européenne) et menaces (relégation en division inférieure) qui se présentent aux firmes. Le critère utilisé est alors le
budget des clubs (DNCG 2020 : 20 ; DNCCG 2020 : 25) pour calculer le risque de l’aléa sportif et identifier des groupes de clubs
homogènes.

Toutefois, la portée de ce concept est limitée à certaines ligues tant le processus de métropolisation semble moins concerner certains 23
championnats. Le « darwinisme géographique » mis à jour dans le cadre du football européen (Helleu, Durand, 2007) ou du rugby hexagonal
(Chaix, 2015) paraît épargner les sports indoor français (Terrien et al., 2021a). Dès lors, la glorieuse incertitude du sport y serait plus
importante, augmentant de facto le risque des villes d’associer leur marque à celle du club professionnel.

2. Méthodologie

Cette recherche s’intéresse aux cinq principaux championnats français de première division (D1, L1, LAM, Pro A et Top 14). Cet 24
[2]
échantillonnage est habituel en économie du sport (Lepetit, 2020) et permet une approche multisport. Celle-ci s’oppose au fait de ne
s’intéresser qu’aux clubs de football (Hautbois, 2015, 2017), car certaines villes préfèrent mettre en avant d’autres sports (le rugby à
Toulouse) ou encore une pluralité d’équipes appartenant à l’élite nationale (Montpellier ; Hautbois, Durand, 2015). L’hétérogénéité entre
ligues n’est pas problématique sachant que cette étude n’entend pas mesurer l’effet d’une équipe professionnelle sur l’image d’une ville.
Cette recherche souhaite seulement offrir un outil d’aide à la décision pour les collectivités locales en mesurant le risque de l’aléa sportif
sur l’accès à certains segments de la compétition.

Une analyse documentaire est utilisée pour faire émerger des faits stylisés. Cette approche donne des éléments de réponse à l’une des 25
questions cruciales que les instances de régulation des ligues sportives professionnelles doivent apporter aux clubs et à leurs parties
prenantes : existe-t-il des seuils permettant d’atteindre un objectif (maintien ou qualification européenne) en se prémunissant largement

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de l’aléa sportif ? Si oui, comment les atteindre ?

La période analysée s’étend des saisons 2014/2015 à 2018-2019, soit cinq saisons. La collecte de données ne permet malheureusement pas 26
d’envisager un horizon plus long puisque les budgets individuels des clubs pour l’ensemble des ligues ne sont pas rendus publics avant
cette période. La saison 2019-2020 n’est pas analysée du fait de l’arrêt brutal des compétitions en cours de saison.

Les données collectées pour cette recherche proviennent de plusieurs sources. Les budgets relatifs des clubs ainsi que leurs résultats 27
sportifs ont été obtenus à travers les rapports des différentes instances de régulation des ligues, disponibles sur les sites de chacune des
ligues. Le budget relatif correspond au budget du club divisé par la somme des budgets des membres de la ligue. Cette variable permet de
corriger toute tendance inflationniste sur la période.

Si les indicateurs sportifs peuvent être objectivement identifiés, il est plus arbitraire de définir les critères géographiques rendant compte 28
du potentiel local des clubs (Terrien et al., 2021a). Ainsi, différentes échelles géographiques ont été identifiées afin d’approximer la zone
[3]
de chalandise des clubs professionnels : le nombre d’habitants dans l’aire urbaine ; celui dans la commune ; le revenu fiscal agrégé de la
[4]
commune pour tenir compte des différences de richesse au sein de cet échelon territorial. Ces trois variables liées au territoire sont
étudiées en intégrant l’effet de la concurrence sportive locale. Celle-ci peut en effet impliquer un partage du potentiel local entre plusieurs
entités (Durand, 1999). Le degré de concurrence est caractérisé par le nombre de clubs professionnels dans l’échelle géographique retenue
(aire urbaine ou commune).

3. Résultats

3.1. Présentation des ligues étudiées


Le Tableau 1 présente les statistiques descriptives budgétaires des clubs évoluant dans ces championnats sur la période d’analyse : 29

Tableau 1 : Budgets moyens des clubs (en K€) sur la période 2014/2015 - 2018/2019

Ces données indiquent une hiérarchie claire en termes de développement économique : le football loin devant (budget moyen de 81,80 30
M€), suivi par le rugby (25,70 M€). On retrouve à distance respectable le basketball (4,80 M€), le handball (4,70 M€) et enfin le volleyball
(1,40 M€). Ces données amènent également à appréhender différemment le poids relatif des subventions dans le budget des clubs, les
0,7 % du budget des clubs de football venant de cette source de financement pesant bien plus que les 55 % obtenus par ceux de volleyball
(5,70 M€ contre 0,40 M€).

Ces moyennes cachent d’importantes disparités ainsi que des évolutions importantes au sein de ces ligues (Terrien et al., 2021a). Le 31
coefficient de variation en L1 est ainsi bien plus important que celui de D1 et a fortiori de ce qui est constaté dans les trois autres
compétitions. Ces disparités sont déterminantes, car la corrélation dépense en talent – performance sportive est censée être moindre
dans les championnats dont les écarts de budget restent modestes (Arrondel, Duhautois, 2018).

Les championnats divergent également par la variable permettant de mesurer au mieux leur potentiel local. L’Annexe 1 présente pour 32
chaque ligue professionnelle le coefficient de détermination (R²) avec différents critères, qu’ils soient purement démographiques ou
fiscaux et prenant en compte ou non la concurrence locale. Le critère le plus déterminant peut alors être retenu pour chaque ligue.

Différents éléments émergent de cette première analyse. Premièrement, le processus de métropolisation ne semble pas abouti dans tous 33
les championnats étudiés. Le handball et le football offrent ainsi des corrélations plus importantes que dans les autres sports (0,61 dans
ces deux championnats contre 0,22 en Top 14, 0,10 en Pro A et 0,02 en LAM). Autre constat, la prise en compte de la concurrence locale ne
permet d’améliorer le coefficient de détermination qu’en Pro A, Top 14 et LAM. La rivalité d’autres clubs professionnels n’a pas d’effet
dans les autres ligues.

3.2. Barrières aux mobilités économique et géographique

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Les faits stylisés des cinq championnats seront successivement présentés, en partant du championnat pour lequel le processus de 34
métropolisation est le plus abouti (L1) vers celui où il est le moins prégnant (LAM).

3.2.1. La L1 où le darwinisme géographique incarné


Sans surprise, le championnat de football confirme la relation transitive postulée entre potentiel local – dépense en talent – performance 35
sportive. La Figure 1 identifie plusieurs barrières à la mobilité, représentant des seuils permettant l’accès -ou l’éviction- de différents
niveaux de marché. Son cadran supérieur indique deux barrières économiques traduisant des niveaux de dépenses permettant
respectivement d’éviter la relégation ou d’assurer une qualification dans une compétition européenne avec une grande fiabilité. Le
cadran inférieur fait correspondre à ses barrières économiques des seuils géographiques.

Figure 1
Barrières à la mobilité en L1

Un budget relatif supérieur à 2,5 % du budget agrégé de la ligue (5 % dans une répartition totalement égalitaire) permet ainsi d’éviter la 36
relégation en division inférieure, tandis que la qualification en Coupe d’Europe est assurée dans 92 % des cas pour les clubs qui possèdent
plus de 6 % du budget total du championnat.

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Les communes de moins de 150 000 habitants ne parviennent pas à atteindre les 2,5 % de budget relatif nécessaire pour éloigner le risque 37
de relégation en seconde division. Les clubs basés dans les communes de plus de 500 000 habitants voient quant à eux leurs clubs excéder
systématiquement 6 % de budget relatif. La réussite des clubs de L1 dépend donc de leur puissance financière, elle-même déterminée par
leur potentiel local. Seules les principales villes de France doivent chercher à associer leur image à un club de football. Les communes au
poids démographique plus modestes seront condamnées à changer de stratégie si elles basent leur communication sur un « miracle »
permettant l’accès du club local à la L1 (Hautbois, 2017 : 192).

3.2.2. La D1, sur les traces de la L1


Un schéma similaire se répète en handball. Deux barrières économiques associées aux risques de relégation et à la qualification dans les 38
compétitions européennes y sont également identifiées (cadran supérieur de la Figure 2).

Figure 2
Barrières à la mobilité en D1

Un budget relatif supérieur à 5,5 % est synonyme d’un maintien certain dans l’élite. Les équipes qui souhaitent s’assurer une qualification 39
en Coupe d’Europe doivent en revanche présenter un budget correspondant à plus de 6,8 % du budget total du championnat. Seule Aix-
en-Provence avec un budget relatif de 9,25 % en 2018-2019 n’est pas parvenue à l’une des cinq premières places nationales permettant de
participer aux compétitions continentales la saison suivante.

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À l’instar de ce qui a été constaté en football, ces seuils financiers de 5,5 % et de 6,8 % de budget relatif sont associés à des barrières 40
géographiques (cadran inférieur de la Figure 2). Sur les cinq saisons étudiées, aucune des vingt-sept équipes localisées dans une
commune de moins de 80 000 habitants n’a atteint le seuil de 6,8 % de budget relatif. 85 % des clubs basés dans des villes de plus de 250
000 habitants sont par ailleurs parvenus à atteindre le seuil de 5,5 % de budget relatif permettant de se prémunir contre tout risque de
relégation.

Le potentiel local joue un rôle important en handball, mais contrairement au football, la barrière géographique permettant de croire à 41
une destinée continentale est plus accessible que celle permettant de se prémunir contre un risque de relégation. Ce résultat indique que
le processus de métropolisation n’est pas encore achevé dans cette ligue laissant jusqu’ici des possibilités à des villes de taille réduite
spécialisée dans ce sport (Durand, 1999) de bénéficier d’une visibilité à l’échelon nationale, voire continentale.

3.2.3. Le Top 14 : une ligue duale


Contrairement à ce qui était constaté en football et en handball, une seule barrière économique est identifiée en rugby (seuil situé à 7 % 42
de budget relatif, cadran supérieur de la Figure 3). Depuis 2014, les clubs au-delà de ce seuil n’ont jamais été relégués et ont une forte
probabilité (68 %) de se qualifier en play-offs (réservés aux six premières équipes). En deçà de cet investissement, la probabilité chute à
15 % et le risque de relégation en deuxième division est bien plus important (30 %). Compte tenu du développement économique en Top
14, une collectivité seule ne peut à travers l’attribution de subventions rendre compétitive une équipe de rugby. Celle-ci doit en effet aller
chercher des ressources privées qui seront dépendantes de son environnement.

Le cadran inférieur de la Figure 3 indique que le développement économique des clubs du Top 14 est contingent à leur potentiel local. 43
Celui-ci est représenté par la démographie de la commune divisée par le nombre de clubs. Seuls 14 clubs sur 38 (36 %) dont le potentiel
local est inférieur à 100 000 habitants parviennent à atteindre le seuil de 7 % de budget relatif. Au-delà, ce sont 69 % des équipes qui
atteignent le seuil les protégeant contre tout risque de relégation. Ce pourcentage monte même à 100 % lorsqu’il y a plus de 200 000
habitants par club professionnel dans la commune. À l’image de ce qui était constaté en football, seules des villes suffisamment grandes
peuvent prétendre accueillir dans la durée une équipe membre du Top 14. Le seuil géographique est toutefois plus accessible qu’en L1,
surtout en cas de spécialisation sportive (Durand, 1999).

Figure 3
Barrières à la mobilité en Top 14

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3.2.4. La Pro A : des barrières poreuses


Des barrières économiques et géographiques à la mobilité sont également présentes en Pro A (Figure 4). Leur porosité est toutefois bien 44
plus importante que dans les championnats précédemment analysés.

Figure 4
Barrières à la mobilité en Pro A

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Deux seuils économiques sont identifiés. Cependant, l’assurance du maintien en première division implique un niveau d’investissement 45
supérieur à celui permettant de croire aux play-offs (5 % contre 4,5 %). De même, le seuil permettant de croire aux play-offs est une
condition nécessaire (à deux exceptions près), mais non suffisante (seulement 57 % des clubs au-delà du seuil y parviennent). Les deux
exceptions concernent Le Havre en 2014-2015 et Le Portel en 2016-2017 qui sont arrivés sixième et septième de saison régulière avec des
budgets relatifs respectifs de 2,85 % et de 3,49 %. Ces exemples montrent que l’expertise sportive peut permettre de combler partiellement
un moindre niveau d’investissement en talent dans cette ligue.

Cette dépense en talent ne semble que faiblement déterminée par la zone de chalandise du club puisque les seuils semblent atteignables 46
par de nombreuses collectivités (cadran inférieur de la Figure 4). Ainsi, seules les zones de chalandise inférieures à 30 000 habitants ne
parviennent jamais à atteindre le seuil des 4,5 % de budget relatif permettant de croire aux play-offs. En revanche, 84 % des équipes dont le
potentiel local excède 120 000 habitants sont parvenus à atteindre les 5 % de budget relatif protégeant fortement de la relégation. Les
villes disposent donc d’une règle démographique permettant d’anticiper le risque de relégation de leur équipe locale. Il leur est ainsi
possible d’associer leur image à ce club et de s’assurer que l’aréna construite / rénovée sera bien utilisée par un club résident (Houllier-
Guibert, 2018).

3.2.5. La LAM : quand le potentiel local ne compte pas !


Le volley-ball est le seul sport où la zone de chalandise n’explique pas les groupes stratégiques différenciant les clubs au sein d’un même 47
championnat (Figure 5).

Il existe bien une barrière économique (cadran supérieur) : un budget relatif de 7,7 % permet ainsi de se prémunir contre tout aléa sportif 48
menant à la relégation de l’équipe. Toutefois, celui-ci ne se rattache à aucune contingence géographique (cadran inférieur). Ce résultat
renvoie aux faibles coefficients de détermination calculés dans l’annexe 1 dans le cadre de cette ligue. Une commune peut, en cas de
subvention suffisante, avoir une équipe de LAM avec un certain niveau de performance en première division. Ce financement public
majoritaire dans le budget des clubs (Lepetit, 2020) peut même monter à 90 % dans certains cas (Bourg, Gouguet, 2017). La capacité du

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club à exploiter son potentiel local en allant chercher des ressources privées ne sera pas déterminante dans ce championnat peu
développé économiquement. Cette ligue peut donc offrir une forte visibilité à des communes au faible poids démographique. C’est le cas
de Chaumont, ville de 22 000 habitants de Haute-Marne, champion de France en 2016-2017.

Figure 5
Barrières à la mobilité en LAM

À noter qu’aucun investissement ne permet d’assurer le haut de tableau en LAM. Sète a même terminé premier de la saison régulière en 49
2015-2016 avec un budget relatif inférieur au seuil permettant de se prémunir contre tout risque de relégation ! L’expertise sportive
s’avère ainsi cruciale dans cette ligue. Ce résultat pourrait être toutefois biaisé par des montages financiers permettant de rémunérer les
joueurs sous d’autres formes, sans que ces versements n’apparaissent dans les budgets (Terrien et al., 2021b).

4. Discussion

La présence d’un club professionnel sur un territoire peut servir d’outil de revitalisation régionale ou à développer la fierté civique, le 50
tourisme ou l’attractivité démographique du territoire (Hautbois, 2015 : Takamatsu, 2021). Si cette stratégie de marketing territoriale
offre des opportunités dans une ligue ouverte en cas de succès (Hautbois, Durand, 2015), elle peut également s’avérer néfaste en cas de

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contre-performance sportive (Charrier, Durand, 2005).

L’acteur public, parfois « opportuniste » dans sa stratégie de communication basée sur le sport (Hautbois, Desbordes, 2011) pourrait être 51
tenté de s’associer aux succès sportifs constatés à l’instant t, notamment du fait de stratégies électoralistes (Gasparini, 2000). Les
décideurs publics se doivent pourtant d’être « moteurs » dans leur stratégie de communication sportive (Hautbois, Desbordes, 2011) et
donc dans leur relation avec un club professionnel. Cette exigence est amplifiée compte tenu de la durée de vie des équipements sportifs
(Moulard et al., 2019) qui peut dépasser de très loin la durée de vie du statut professionnel du club (Hautbois, Durand, 2015).

Cela implique de la part des élus une prise de recul afin de s’assurer de la viabilité du projet sportif de l’équipe professionnelle. Fort 52
heureusement, la glorieuse incertitude du sport ne vaut que dans une certaine mesure et des barrières économiques et géographiques
sont identifiées dans les championnats de première division français alors qu’ils ne sont pas présents dans les critères d’accès formels
aux compétitions. Ces facteurs démographiques permettent de limiter le risque pris par les collectivités publiques en construisant leur
marque sur les résultats d’un club professionnel.

Les faits stylisés, synthétisés dans l’Annexe 2, montrent une importance relative des facteurs exogènes dans le succès sportif des clubs. Ils 53
indiquent aux villes les différentes possibilités pour bénéficier sur leur territoire d’une équipe appartenant durablement à l’élite
nationale, voire continentale. Au-delà du potentiel démographique de la ville, la réponse dépendra du développement économique de la
ligue et de son degré d’avancement dans le processus de métropolisation. Une commune pourra savoir si son soutien direct au club (via
des subventions) peut suffire pour le stabiliser sur certains segments de la compétition (comme en LAM) ou s’il convient de disposer
localement de forces économiques privées suffisantes et -le cas échéant- s’il est nécessaire de se spécialiser sur un seul sport (Durand,
1999).

Il convient de noter que ces analyses reposent sur des faits stylisés. Par définition, ces résultats empiriques peuvent se révéler inexacts 54
dans le détail, du fait de l’histoire des clubs, de leur gouvernance ou de leurs liens avec les équipes municipales en place. L’évolution des
règlements des ligues, notamment en termes de montée-descentes, peut également altérer la robustesse des résultats. Pour être utile, cet
outil d’aide à la décision des collectivités doit donc être régulièrement actualisé via la démarche identifiée dans cet article. L’enjeu est
important pour l’acteur public, car la maîtrise de l’information est source de pouvoir dans un processus de construction de marque
territoriale (Rochette et al., 2016).

Par ailleurs, cet outil ne dit rien de la pertinence ni de la légitimité de subventionner un club professionnel et de construire la marque 55
d’une ville sur celui-ci (Smith, 2001). L’évaluation d’une telle stratégie de communication serait par ailleurs complexifiée par le caractère
idiosyncratique de la relation entre marques collectivité et club. Les variations peuvent notamment venir du degré d’exposition
médiatique du championnat, et même au sein de celui-ci, de la puissance de la marque d’un club donné (Feng, Yoon, 2020). Ce lien
collectivité – club dépendra également du management public de la relation, la collectivité pouvant être plus ou moins volontariste sur le
sujet (Hautbois, Durand, 2015). La culture de la ville et son histoire peuvent d’ailleurs expliquer la diversité des stratégies de marketing
territoriales retenues par les acteurs publics. Toutes les villes n’ont pas le même besoin de changer leur image à travers le sport (Hautbois,
2017), cette stratégie étant surtout l’apanage des territoires post-industriels (Smith, 2001).

Rappelons en outre que la présence d’un club professionnel n’est que l’une des quatre stratégies des territoires pour développer leur 56
marque à travers le sport (Richelieu, 2018). Ce pilier n’est lui-même que l’une des nombreuses composantes qu’une ville peut activer pour
construire sa notoriété, améliorer l’image du lieu et le promouvoir auprès de ses différentes cibles (Rojas-Mendez, 2013).

D’autres études sont donc nécessaires pour mieux appréhender le développement de la marque d’une ville à travers la présence d’un club 57
de football professionnel. Des études de cas devraient permettre de mieux évaluer le lien marque du territoire et club. Elles permettraient
de tester le postulat selon lequel le club a bien un effet sur la marque territoriale, hypothèse justifiant bien souvent le subventionnement
de ces entreprises. Cette démarche qualitative pourra également apporter un éclairage sur les autres risques et opportunités de la
relation marque territoriale – club professionnel, au-delà de la question de l’accès à certains segments de compétition. Ces recherches
s’inscriraient dans les lignées des travaux s’intéressant aux parties prenantes impliquées dans une démarche de construction de marque
territoriale (Rochette, Zumbo-Lebrument, 2017 ; Rochette et al., 2016). Le besoin de nouvelles études sur le lien marque territoriale - sport
est d’autant plus important que les villes, régions et pays visent de plus en plus à accroître leur notoriété, image de marque, voire
influence, à l’aide du place branding via le sport (voir notamment Cockayne et al., 2021 et Richelieu et al., 2021).

Conclusion

Cet article s’intéresse aux cinq principaux championnats français de première division sur la période 2014/2015 – 2018/2019. La relation 58
zone de chalandise – budget – résultat sportif a été analysée afin de faire émerger plusieurs faits stylisés au sein de ces championnats. Les
résultats indiquent que le processus de métropolisation y est différemment avancé. Dès lors, le degré de déterminisme de
l’environnement sur les résultats sportifs dépend de la ligue étudiée. Il y sera ainsi bien plus faible en LAM que dans les autres
championnats puisqu’un soutien financier d’une municipalité envers un club peut suffire pour disposer d’une vitrine nationale dans cette
compétition. Des seuils géographiques sont identifiés au sein des autres ligues, signifiant que la pérennité du succès sportif du club
professionnel et donc de la stratégie de marketing territorial sportif dépendront de la présence de forces économiques privées sur le
territoire.

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Les résultats obtenus permettent de déterminer la taille de la zone de chalandise suffisante pour accéder à certains segments de la 59
compétition. La définition de ces barrières à la mobilité stratégique permet à l’ensemble des parties prenantes des clubs d’avoir plus de
visibilité sur leurs investissements. Est-il risqué d’associer la marque territoriale à celle du club professionnel ? Quelle est la probabilité
que l’équipement sportif construit via des deniers publics devienne surdimensionné pour le territoire à moyen terme ?

Certes, l’expertise sportive peut amener les équipes à dévier à court terme de leur niveau de performance « naturel ». À long terme, leur 60
groupe stratégique sera en revanche déterminé par leur potentiel local (sauf en volleyball, à ce jour). La durée de vie des infrastructures
sportives doit inciter les décideurs publics à privilégier des indicateurs pertinents sur un horizon temporel supérieur, sous peine de se
retrouver avec des éléphants blancs, à savoir des infrastructures sportives coûteuses inutilisées ou inadaptées à leurs usages réguliers.
Une ville souhaitant développer sa marque sur la présence d’un club professionnel doit également tenir compte de l’espérance de vie des
clubs dans les segments de compétition visés (coupes européennes ou maintien en première division). Il convient enfin de s’assurer que
cette marque peut bien être améliorée par les succès sportifs de son équipe professionnelle, postulat à ce jour faiblement vérifié
empiriquement.

Annexe 1 – Coefficients de détermination entre potentiel local et budget relatif des clubs
(2014/2019)

Pour chaque ligue est indiqué en gras le critère le plus déterminant. 61

Annexe 2 – Synthèse des faits stylisés

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Notes

Seule la cible des touristes souhaitant participer aux événements n'est pas touchée par un club professionnel. Le tourisme sportif de nostalgie peut
paraître marginal à première vue, mais il n'en est rien. Le stade du Nou Camp est ainsi le deuxième monument le plus visité de la ville de Barcelone
(Richelieu, 2018).

Les différences économiques avec les championnats féminins et leur moindre médiatisation (Arrondel & Duhautois, 2020) expliquent que cet
échantillon soit régulièrement retenu en management du sport. Bien que regrettable, car construite par un traitement médiatique genré
(Lemieux, 2002), cette réalité implique un accès aux données limité pour ces compétitions.

https://www.insee.fr/fr/accueil, « Tableaux de l'économie française », consulté le 27/04/2020.

https://www.impots.gouv.fr/portail/base-de-donnees-ircom-2018, consulté le 15/04/2021

Résumé

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Adorée par les spectateurs, la glorieuse incertitude du sport s’avère problématique pour la construction de l’image des collectivités
territoriales et notamment celle des villes. Comment mettre en place une stratégie de marketing territorial basée sur la présence d’un
club évoluant au plus haut niveau si celui-ci peut être rétrogradé rapidement dans une division inférieure ? Comment s’assurer que
l’infrastructure construite aujourd’hui aura toujours un club résident de haut niveau demain ? Cet article s’intéresse aux cinq principaux
championnats français de première division sur la période 2014/2015 – 2018/2019. La relation zone de chalandise – budget – résultat
sportif des clubs y est analysée pour mettre en évidence des barrières à la mobilité protégeant/excluant l’accès à certains segments de
compétition. Ces faits stylisés permettent aux collectivités de mesurer le risque d’aléa sportif sur l’accès du club à certains segments de la
compétition, au-delà des soubresauts court-termistes inhérents à l’activité.
© 2022 IDMP/Lavoisier SAS. Tous droits réservés

Mots clés

collectivité territoriale club sportif professionnel marque territoriale stratégie

Territorial branding and professional sports clubs: threats and opportunities of open leagues for local authorities
Adored by spectators, the glorious uncertainty of sport is proving to be problematic for the building of the city brand. How can the local
authorities implement a territorial marketing strategy based on the presence of a professional club if it can quickly be relegated into the
amateur world? How can they be sure that the infrastructure built today will always have a high-level resident club tomorrow? This article
looks at the five main French first division leagues over the 2014/2015 - 2018/2019 period. The relation between catchment area, budget
and sporting results of the clubs is analyzed to highlight mobility barriers protecting/excluding access to certain competition segments.
These stylized facts allow local authorities to measure the risk of sport hazard on the club’s access to certain segment of the competition,
beyond the short-term shocks inherent to the activity.
© 2022 IDMP/Lavoisier SAS. Tous droits réservés

Keyword

local authorities professional sport club Strategic barriers city brand strategy

Plan
Introduction

1. Cadre théorique

1.1. Le sport pour développer la marque de la ville


1.2. Le club sportif professionnel pour développer la marque de la ville
1.3. La marque de la ville soumise à la glorieuse incertitude du sport
1.4. Une glorieuse incertitude du sport limitée

2. Méthodologie

3. Résultats

3.1. Présentation des ligues étudiées


3.2. Barrières aux mobilités économique et géographique

4. Discussion

Conclusion

Bibliographie

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Auteurs
Mickael Terrien

Institut de Hautes Etudes en Administration Publique, Lausanne, Suisse

mickael.terrien@unil.ch

Christophe Durand

Université de Caen Normandie, CREM UMR 6211

Clément Proot

Université de Lille

Mis en ligne sur Cairn.info le 05/07/2022


https://doi-org.ressources-electroniques.univ-lille.fr/10.3166/pmp.39.2022.0010

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