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D O C U M E N T R É S E R V É A U X E X A M I N AT E U R S

SUJET 5
Thème de l’exposé : La lutte contre l’obésité : une question de santé publique ?

DOCUMENT 1

Une société suisse expérimente le premier vaccin


contre l’obésité
Une jeune société suisse de biotechnologie a lement synthétisée au niveau de l’estomac, mais
annoncé, mercredi 11 mai, à Zurich, qu’elle active au niveau cérébral. « L’administration de ghré-
mettait à l’essai un vaccin contre l’obésité. Cytos line stimule non seulement la sécrétion d’hormone de
Biotechnology a commencé à recruter 112 citoyens croissance, mais aussi la prise alimentaire, expliquent
suisses obèses. La moitié d’entre eux recevront le Marie-Thérèse Bluet-Pajot et Jacques Epelbaum
vaccin expérimental et l’autre moitié une substance (Inserm, centre Paul-Broca, Paris). Elle modifie l’état
neutre, sans que ni les volontaires ni les médecins veille-sommeil et augmente l’anxiété. » On croit aussi
ne sachent de quel produit il s’agit. savoir que les concentrations sanguines en
Quatre injections seront faites chez chaque ghréline, chez les personnes obèses, augmentent
volontaire durant un semestre, au terme duquel après une perte de poids obtenue après un régime.
tous les participants seront suivis pendant un Ceci expliquerait l’effet « yo-yo », phénomène de
nouveau semestre, afin d’analyser l’action du reprise de poids rapide après l’arrêt du régime.
vaccin. « Durant le traitement, tous les participants Forts de ces données, les chercheurs suisses ont
recevront des conseils de professionnels destinés construit une molécule qui imposera au système
à les aider à modifier leurs habitudes alimentaires et immunitaire de produire des anticorps spécifique-
à améliorer leur activité physique, expliquent les ment dirigés contre la dangereuse ghréline. « Nos
responsables de cette expérience. L’efficacité du vaccin études précliniques chez la souris ont montré qu’une
sera déterminée par mesure du poids corporel. » Cytos telle vaccination induit de fortes concentrations
Biotechnology souligne avoir « bien évidemment » d’anticorps antighréline, expliquent-ils. Chez la souris
demandé et obtenu les autorisations des comités soumise à un régime à forte teneur en lipides, le poids
d’éthique compétents. a pu être réduit de 15 % après vaccination. »
Cet essai clinique original est le fruit des Les premiers résultats de l’expérience suisse ne
dernières découvertes dans la physiologie des seront pas connus avant le second semestre 2006.
comportements alimentaires. Les biologistes ont
établi, en 1999, l’existence de la « ghréline », petite
molécule composée de 28 acides aminés, naturel- Jean-Yves Nau, Le Monde, 14 mai 2005

DOCUMENT 2

La lutte contre l’obésité se heurte


au lobby agroalimentaire
Un paquet de chips pourra-t-il être considéré un colère des associations de consommateurs. Celles-
jour comme « bon pour la santé » ? Boutade ? Pas ci dénoncent la victoire des intérêts du lobby
vraiment. En vidant de sa substance, jeudi 21 avril, agroalimentaire au détriment de la santé publique.
la proposition de règlement sur les allégations nutri- Alors que les pays européens sont de plus en plus
tionnelles et de santé, les membres de la commis- confrontés à la question de l’obésité, le projet de
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sion environnement, santé publique et sécurité ali- règlement interdisait aux fabricants de produits trop
mentaire du Parlement européen ont suscité la gras, trop sucrés ou trop salés de mettre en avant,

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sur leur emballage, des messages vantant de la santé (Inpes) – une taxe jugée « scandaleuse » par
prétendus bienfaits comme : « Riche en calcium et l’Association nationale des industries alimentaires.
magnésium » ou « Enrichi en vitamines » – de ceux Pour être effective, cette mesure nécessite un
qui fleurissent sur les paquets de biscuits et autres décret et une validation interministérielle. « Le décret
boîtes de céréales. est techniquement prêt, maintenant il s’agit d’une
Las ! Les parlementaires européens ont rejeté le décision politique », résume Serge Hercberg, vice-
principe selon lequel toute allégation devait repo- président du comité stratégique du Programme
ser sur les qualités nutritionnelles réelles du produit. national nutrition santé (PNNS). Le message à
Pour justifier leur position, ils ont repris le même diffuser a été rédigé et validé par l’Afssa et les
argument que les industriels, qui combattaient professionnels de la nutrition. Reprenant les
depuis de longs mois cette disposition : il n’y a pas préconisations du PNNS, il devrait indiquer : « Pour
de « mauvais » ou de « bons » produits, mais seu- protéger sa santé, manger au moins cinq fruits et
lement de bons ou de mauvais régimes alimen- légumes par jour, pratiquer une activité physique
taires. (…) régulière, éviter de manger trop gras, trop sucré, trop
salé. » « Tout devrait être prêt pour le 1er janvier 2006 »,
EFFETS DU MARKETING assure le ministère de la santé.
« Certains industriels surfent sur la vague de En attendant, « les grandes manœuvres ont com-
l’obsession « santé « sans se soucier réellement des effets mencé », déplore un spécialiste de santé publique.
de leur marketing sur la santé publique et notamment Pour preuve, la publicité du confiturier Andros,
celle de nos enfants », souligne Jim Murray, direc- publiée sur une pleine page du Figaro du 20 avril,
teur du BEUC. Les agences sanitaires européennes, avec comme slogan : « Pour votre santé, le PNNS vous
et notamment l’Agence française de sécurité sani- recommande de manger cinq fruits et légumes par
taire des aliments (Afssa), reconnaissent aussi jour. »
que la pression commerciale est un élément sur Au cabinet de M. Douste-Blazy, on ne cache pas
lequel il faut agir pour lutter contre l’obésité. que cette stratégie de récupération par l’industrie
En France – où 16 % des 6-15 ans présentent un alimentaire des messages du PNNS, « pose pro-
excès pondéral (contre 5 % en 1980), dont 3,8 % blème » et constitue un sujet « très vif ». « La confi-
d’obèses –, l’obésité est qualifiée d’« épidémie » par ture c’est plus de sucre que de fruits, il faut des
l’Institut national de la santé et de la recherche règles déontologiques », résume le ministère. Face au
médicale (Inserm). Obtenues de haute lutte face à risque de voir les industriels se servir de la caution
la pression de l’industrie agroalimentaire, deux du programme national lancé par les pouvoirs
mesures, inscrites dans les articles 29 et 30 de la loi publics pour vanter les mérites de leurs produits,
du 9 août 2004 relative à la politique de santé le groupe de travail chargé de rédiger les règles et
publique, devraient bientôt être appliquées. la charte d’utilisation des messages du PNNS a été
Tout d’abord, à compter du 1er septembre, les appelé à « accélérer sa réflexion ». Jusqu’à présent,
distributeurs automatiques de sodas et de barres le PNNS était identifié comme une information
chocolatées seront interdits dans les établisse- émanant des pouvoirs publics, validée par des scien-
ments scolaires. « Il est acquis que cette disposition tifiques et indépendante du secteur économique.
sera maintenue, il ne faut pas que les jeunes soient « Si rien n’est fait, demain, McDonald’s pourra dire
tentés », insiste-t-on au cabinet du ministre de la que le PNNS recommande de manger des salades
santé, Philippe Douste-Blazy. (…) McDonald’s », résument certains nutritionnistes.
Pendant ce temps, dix villes françaises, dont
« GRANDES MANŒUVRES » Beauvais, Béziers, Evreux, membres du programme
La seconde mesure prévoit d’imposer, dès le Epode (Ensemble, prévenons l’obésité des enfants),
1er janvier 2006, un message sanitaire dans les tentent depuis un an de sensibiliser les 5-12 ans à
publicités télévisées ou radiodiffusées pour des l’importance d’une alimentation équilibrée. « Le but
boissons sucrées et des produits manufacturés. S’ils est de stabiliser le taux d’obésité. Cela peut paraître
refusent ce message, les annonceurs devront un objectif limité, mais on part de très haut », explique
verser une taxe, correspondant à 1,5 % des sommes le docteur Jean-Michel Borys, coordinateur d’Epode.
investies dans la diffusion des spots, au profit de À Beauvais, 22 % des enfants sont en surpoids et
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l’Institut national de prévention et d’éducation à 5 % sont obèses.

Sandrine Blanchard, Le Monde, 30 avril 2005

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