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PROCÉDÉS CHIMIE - BIO - AGRO

Ti700 - Agroalimentaire

Agroalimentaire :
risques et sécurité

Réf. Internet : 42427 | 7e édition

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III
Cet ouvrage fait par tie de
Agroalimentaire
(Réf. Internet ti700)
composé de  :

Génie industriel alimentaire Réf. Internet : 42469

Biochimie alimentaire, analyses et alimentation humaine Réf. Internet : 42470

Agroalimentaire : risques et sécurité Réf. Internet : 42427

Agroalimentaire : qualité, traçabilité et environnement Réf. Internet : 42690

Matériaux pour contact alimentaire Réf. Internet : 42471

Opérations unitaires et process de fabrication de produits Réf. Internet : 42430


alimentaires

Procédés biochimiques et chimiques en agroalimentaire Réf. Internet : 42431

Additifs et adjuvants alimentaires Réf. Internet : 42426

Filière de production : produits d'origine végétale Réf. Internet : 42433

Filière de production : produits d'origine animale Réf. Internet : 42432

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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Agroalimentaire
(Réf. Internet ti700)

dont les exper ts scientifiques sont  :

Jean-Luc BOUTONNIER
Enseignant en génie des procédés alimentaires et sciences de l'alimentation,
Lycée des métiers de l'alimentation de Villefranche-de-Rouergue

Sébastien ROUSTEL
Ingénieur du Génie rural, des eaux et des forêts, Ministère de l'agriculture

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V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :

Michaël BELLER Philippe FONTCUBERTA Loïc LOFFREDO


Pour l’article : F5100 Pour l’article : F1200 Pour les articles : PHA3063 –
PHA3064
Mathieu BOUARFA Jean-Marc FREMY
Pour l’article : PHA3061 Pour l’article : F1137 Anne-Gaëlle MELLOUET
Pour les articles : F1117 – F1118
Marielle BOUIX Patrick GERVAIS
Pour l’article : F1120 Pour l’article : F1136 Pierre-Yves MONTFAJON
Pour l’article : F1140
Olivier BOUTOU Yvon GERVAISE
Pour les articles : F1109 – F1111 Pour l’article : F1150 Antoine RAS
Pour l’article : F1150
Karine CANON Emmanuelle GOURDAIN
Pour l’article : F1113 Pour l’article : F1138 Philippe RENAUD
Pour l’article : BN3908
Marc CHAMBOLLE François GROSJEAN
Pour l’article : F1110 Pour l’article : F1138 Étienne RIONDET
Pour l’article : F1115
Bernard CHEVASSUS-au- Dalila HACHANI
LOUIS Pour l’article : F1150 Marie-Hélène ROPERS
Pour l’article : F1114 Pour les articles : NM4500 –
Esther KALONJI INM4500
Mélissa CLÉMENT CHAMI Pour l’article : P152
Pour les articles : PHA3063 – Sébastien ROUSTEL
PHA3064 Jean-Paul LARPENT Pour l’article : F1112
Pour l’article : F1120
Christine DECANIS Gilbert THEISSEN
Pour l’article : F1118 Nicolas LEHEBEL Pour l’article : F1155
Pour l’article : F5100
Xavier FERNANDEZ Christine VERNOZY-ROZAND
Pour les articles : PHA3063 – Valérie LERICHE-SIBILLE Pour l’article : F1130
PHA3064 Pour l’article : F1200
Claire WALLAERT
Frédéric FINE Jean-Yves LEVEAU Pour l’article : P152
Pour l’article : F1136 Pour l’article : F1120
François ZUBER
Pour l’article : F1210

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VI
Agroalimentaire : risques et sécurité
(Réf. Internet 42427)

SOMMAIRE

1– Réglementation, normes et gestion des risques Réf. Internet page

Sécurité sanitaire des aliments : principaux documents normatifs F1109 11

Sécurité sanitaire des aliments F1110 19

ISO 22000 : 2018 F1111 23

Le principe de précaution. Approches conceptuelles F1112 27

Plan de maîtrise sanitaire et HACCP F1113 29

L'analyse du risque alimentaire : vers de nouvelles pratiques F1114 33

Responsabilité juridique des acteurs de la filière alimentaire F1115 37

Prévention contre les fraudes dans l’agroalimentaire F1117 41

Culture durable de la sécurité sanitaire des aliments F1118 45

Sécurité microbiologique des procédés alimentaires F1120 49

Décontamination des produits déshydratés à usage alimentaire F1136 53

Mycotoxines dans les céréales. Évaluation des risques F1137 57

Mycotoxines dans les céréales. Gestion des riques F1138 61

Organismes génétiquement modifiés et sécurité alimentaire F1150 65

OGM dans l'alimentation : cadre légal en France et dans l'Union européenne F1155 69

Confinement rapproché dans les IAA au moyen d'isolateurs F1200 75

Transferts des radionucléides dans les denrées alimentaires. Éléments de BN3908 81


radioprotection opérationnelle
Nanomatériaux dans les aliments NM4500 85

Compléments alimentaires à visée cosmétique : efficacité et risques pour le P152 89


consommateur
Réglementation des compléments alimentaires PHA3061 91

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VII
Compléments alimentaires à base de plantes. Évolutions réglementaires PHA3063 99

Compléments alimentaires à base de plantes. Approche analytique PHA3064 105

2– Contrôles pour la maîtrise du risque Réf. Internet page

Méthodes de détection rapide en microbiologie alimentaire F1130 113

Contrôle bactériologique in situ dans les unités de cuisine collective F1140 115

Détection des corps étrangers dans les produits alimentaires F1210 117

Sertissage : outils et autocontrôles pour la maîtrise du risque microbiologique F5100 123

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Agroalimentaire : risques et sécurité
(Réf. Internet 42427)

1
1– Réglementation, normes et gestion des risques Réf. Internet page

Sécurité sanitaire des aliments : principaux documents normatifs F1109 11

Sécurité sanitaire des aliments F1110 19

ISO 22000 : 2018 F1111 23

Le principe de précaution. Approches conceptuelles F1112 27

Plan de maîtrise sanitaire et HACCP F1113 29

L'analyse du risque alimentaire : vers de nouvelles pratiques F1114 33

Responsabilité juridique des acteurs de la filière alimentaire F1115 37

Prévention contre les fraudes dans l’agroalimentaire F1117 41

Culture durable de la sécurité sanitaire des aliments F1118 45

Sécurité microbiologique des procédés alimentaires F1120 49

Décontamination des produits déshydratés à usage alimentaire F1136 53

Mycotoxines dans les céréales. Évaluation des risques F1137 57

Mycotoxines dans les céréales. Gestion des riques F1138 61

Organismes génétiquement modifiés et sécurité alimentaire F1150 65

OGM dans l'alimentation : cadre légal en France et dans l'Union européenne F1155 69

Confinement rapproché dans les IAA au moyen d'isolateurs F1200 75

Transferts des radionucléides dans les denrées alimentaires. Éléments de BN3908 81


radioprotection opérationnelle
Nanomatériaux dans les aliments NM4500 85

Compléments alimentaires à visée cosmétique : efficacité et risques pour le P152 89


consommateur
Réglementation des compléments alimentaires PHA3061 91

Compléments alimentaires à base de plantes. Évolutions réglementaires PHA3063 99

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9
Compléments alimentaires à base de plantes. Approche analytique PHA3064 105

2– Contrôles pour la maîtrise du risque

10
Référence Internet
F1109

Sécurité sanitaire des aliments :


principaux documents normatifs
1
par Olivier BOUTOU
Expert AFNOR
AFNOR Développement – Bordeaux (France)

1. Tableaux................................................................................................... F 1 109v3 - 2
2. Conclusion............................................................................................... — 33
3. Abréviations............................................................................................ — 33
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. F 1 109v3

epuis le début des années 2000, l’évolution des règles du commerce inter-
D national et les exigences croissantes des consommateurs ont fait de la
sécurité des aliments une préoccupation majeure des acteurs de la filière ali-
mentaire. Les quelques crises alimentaires, qui ont frappé le secteur de
l’agroalimentaire au cours de ces dernières années, ont forcément contribué
au renforcement des exigences de transparence et de confiance des
consommateurs.
Tous les exploitants de la chaîne alimentaire doivent répondre à des obliga-
tions réglementaires s’agissant de la conformité des denrées qu’ils mettent sur
le marché.
La réglementation en matière de sécurité des aliments applicable aux orga-
nismes est vaste et étendue. Les textes de base en la matière sont les
règlements européens constituant le « paquet hygiène ». Ils sont applicables à
l’ensemble des professionnels de la chaîne alimentaire, de la production pri-
maire jusqu’au consommateur.
Les plans de maîtrise sanitaire et les dispositifs d’autocontrôles, mis en place
par les professionnels ont renforcé au fil des ans la sécurité et la qualité sani-
taire des produits.
Pour tout organisme intervenant dans le secteur agricole et agroalimentaire,
ces textes réglementaires de base peuvent être complétés par des documents
normatifs volontaires.
Une liste des abréviations utilisées est présentée en fin d’article.
Parution : février 2017

Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés F 1 109v3 – 1

11
Référence Internet
F1109

SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS : PRINCIPAUX DOCUMENTS NORMATIFS _________________________________________________________________

1. Tableaux
Les tableaux 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 9 présentent les différents Leur validité a été vérifiée en avril 2016. Il se peut, qu’après cette
documents normatifs de gestion des risques sanitaires des date, certains d’entre eux soient annulés et/ou remplacés par
aliments (listes non exhaustives de normes – françaises, euro- d’autres documents, ils seront signalés dans la prochaine version
péennes ou internationales – classées par domaines). de cet article.

1 Tableau 1 – Hygiène
Titre du document normatif Date Référence officielle
Hygiène des denrées alimentaires et des aliments pour animaux – Méthodologie pour
Mars 2006 NF V01-001
l’élaboration des guides de bonnes pratiques d’hygiène et d’application des principes HACCP
Hygiène des aliments – Glossaire français-anglais Déc. 2015 NF V01-002
Hygiène des aliments – Place de l’HACCP et application de ses principes pour la maîtrise de la
Sept. 2008 NF V01-006
sécurité des aliments et des aliments pour animaux
Traçabilité et sécurité des aliments – Management et hygiène – Recommandations pour la
Sept. 2016 FD V01-014
détermination de la durée de vie microbiologique des aliments
Traçabilité et sécurité des aliments – Management et hygiène – Évaluation du niveau d’hygiène en
Avr. 2016 PR NF V01-015
restauration commerciale
Systèmes de management de la sécurité des denrées alimentaires – Exigences pour les
organismes procédant à l’audit et à la certification de systèmes de management de la sécurité des Avr. 2014 XP ISO/TS 22003
denrées alimentaires
Systèmes de management de la sécurité des denrées alimentaires – Exigences pour tout
Oct. 2005 NF EN ISO 22000
organisme appartenant à la chaîne alimentaire (en cours de révision )
Systèmes de management de la sécurité des denrées alimentaires – Recommandations pour
Déc. 2014 NF ISO 22004
l’application de l’ISO 22000
Viandes et produits à base de viande – Élevage et transport des porcs charcutiers destinés à
Août 2001 NF V46-013
l’abattage
Sécurité des machines – Lubrifiants en contact occasionnel avec des produits – Exigences relatives
Juil. 2006 NF EN ISO 21469
à l’hygiène
Commerce interentreprises du secteur agricole et agro-alimentaire – Engagements communs et
spécifiques au commerce interentreprises des secteurs pommes de terre, fruits et légumes, vins, Déc. 2005 BP V01-100
céréales, oléoprotéagineux et agrofournitures
Programmes prérequis pour la sécurité des denrées alimentaires – Partie 1 : fabrication des
Juin 2010 XP ISO/TS 22002-1
denrées alimentaires
Programmes prérequis pour la sécurité des denrées alimentaires – Partie 2 : restauration Févr. 2013 XP ISO/TS 22002-2
Programmes prérequis pour la sécurité des denrées alimentaires – Partie 3 : agriculture Avr. 2012 XP ISO/TS 22002-3
Programmes prérequis pour la sécurité des denrées alimentaires – Partie 4 : fabrication des
Avr. 2014 XP ISO/TS 22002-4
emballages destinés aux denrées alimentaires
Emballages – Management de l’hygiène dans la fabrication des emballages destinés aux denrées
Avr. 2008 NF EN 15593
alimentaires – Exigences
Programmes prérequis pour la sécurité des denrées alimentaires – Partie 6 : fabrication d’aliments
Juin 2016 XP ISO/TS 22002-6
pour animaux
Ouvrages (éditions AFNOR)
Certification ISO 22000 – Les 8 clés de la réussite – Sept. 2010 – Réf. : 3465270 – ISBN : 978-2-12-465270-9
De l’HACCP à l’ISO 22000 – Management de la sécurité des aliments – Juil. 2014 – Réf. : 3465470 – ISBN : 978-2-12-465470-3
ISO 22000, HACCP et sécurité des aliments – Recommandations, outils, FAQ et retours de terrain – Août 2009 – Réf. : 3465198 – ISBN :
978-2-12-465198-6
Recueils (éditions AFNOR)
Vade-mecum de l’auditeur agroalimentaire – Juin 2010 – Réf. : 3190701 – ISBN : 978-2-12-190701-7
Hygiène des aliments – Oct. 2013 – Réf. : 3186041 – ISBN : 978-2-12-186041-1
Lait et produits laitiers – Juin 2014 – Réf. : 3190471CD – ISBN : 978-2-12-190471-9
Agroalimentaire – Les outils de maîtrise de l’hygiène et de la sécurité alimentaire – Mars 2010 – Réf. : 3053521CD – ISBN : 978-2-12-053521-1

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12
Référence Internet
F1109

_________________________________________________________________ SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS : PRINCIPAUX DOCUMENTS NORMATIFS

Tableau 2 – Propretés des locaux. Traitements des surfaces


Titre du document normatif Date Référence officielle

Activités de service de nettoyage industriel – Lexique de la propreté Déc. 1995 NF X50-790

Activités de service de nettoyage industriel – Aide à l’élaboration d’un cahier des charges tech-
Sept. 2006 NF X50-791
niques pour une prestation de propreté

Activités de service de nettoyage industriel – Méthodes de mesurage de l’empoussièrement des


surfaces dures
Août 1999 NF X50-792 1
Services de nettoyage – Exigences et recommandations fondamentales pour les systèmes de
Oct. 2001 NF EN 13549
mesurage de la qualité

Activités de service de nettoyage industriel – Partie 1 : système de contrôle de résultat sur site.
Oct. 2001 NF X50-794-1
Concepts d’élaboration et de mise en œuvre

Activités de service de nettoyage industriel – Partie 2 : système de contrôle de résultat sur site.
Oct. 2001 FD X50-794-2
Exemples d’application

Antiseptiques et désinfectants chimiques – Conservation des micro-organismes d’essai utilisés


pour la détermination de l’activité bactéricide (Legionella incluses), mycobactéricide, sporicide, Juin 2013 NF EN 12353
fongicide et virucide (bactériophages inclus)

Antiseptiques et désinfectants chimiques – Essai quantitatif de suspension pour l’évaluation de


l’activité bactéricide de base des antiseptiques et des désinfectants chimiques – Méthode d’essai Avr. 2006 NF EN 1040
et prescriptions (phase 1)

Antiseptiques et désinfectants chimiques – Essai quantitatif de suspension pour l’évaluation de


l’activité bactéricide des antiseptiques et des désinfectants chimiques utilisés dans le domaine de
Mars 2010 NF EN 1276
l’agroalimentaire, dans l’industrie, dans les domaines domestiques et en collectivité – Méthode
d’essai et prescriptions (phase 2, étape 1)

Désinfectants chimiques – Essai quantitatif de suspension pour l’évaluation de l’activité virucide


contre les bactériophages des désinfectants chimiques utilisés dans le domaine de Juil. 2003 NF EN 13610
l’agroalimentaire et dans l’industrie – Méthode d’essai et exigences (phase 2, étape 1)

Antiseptiques et désinfectants chimiques – Essai quantitatif de surface non poreuse pour l’évalua-
tion de l’activité bactéricide et/ou fongicide des désinfectants chimiques utilisés dans le domaine
Juin 2015 NF EN 13697
de l’agroalimentaire, dans l’industrie, dans les domaines domestiques et en collectivité – Méthode
d’essai sans action mécanique et prescriptions (phase 2, étape 2)

Antiseptiques et désinfectants chimiques. Essai quantitatif de suspension pour l’évaluation de


l’activité fongicide ou levuricide de base des antiseptiques et des désinfectants chimiques – Avr. 2006 NF EN 1275
Méthode d’essai et prescriptions (phase 1)

Antiseptiques et désinfectants chimiques – Essai quantitatif de suspension pour l’évaluation de


l’activité bactéricide des antiseptiques et des désinfectants chimiques utilisés dans le domaine de
Mars 2010 NF EN 1276
l’agroalimentaire, dans l’industrie, dans les domaines domestiques et en collectivité – Méthode
d’essai et prescriptions (phase 2, étape 1)

Antiseptiques et désinfectants chimiques – Essai quantitatif de suspension pour l’évaluation de


l’activité fongicide ou levuricide des antiseptiques et des désinfectants chimiques utilisés dans le
Juil. 2013 NF EN 1650 + A1
domaine de l’agroalimentaire, dans l’industrie, dans les domaines domestiques et en collectivité –
Méthode d’essai et prescriptions (phase 2, étape 1)

Antiseptiques et désinfectants chimiques – Essai quantitatif de suspension pour l’évaluation de


l’activité fongicide ou levuricide des antiseptiques et des désinfectants chimiques utilisés dans le
Juil. 2013 NF EN 1650/IN1
domaine de l’agroalimentaire, dans l’industrie, dans les domaines domestiques et en collectivité –
Méthode d’essai et prescriptions (phase 2, étape 1)

Désinfectants chimiques. Essai quantitatif de suspension pour l’évaluation de l’activité sporicide


des désinfectants chimiques utilisés dans le domaine de l’agro-alimentaire, dans l’industrie, dans Avr. 2002 NF EN 13704
les domaines domestiques et en collectivité. Méthode d’essai et prescriptions (phase 2, étape 1)

Antiseptiques et désinfectants chimiques – Application des normes européennes sur les


Oct. 2015 NF EN 14885
antiseptiques et désinfectants chimiques

Recueils (éditions AFNOR)

Services de nettoyage industriel – Juin 2008 – Réf. : 3216431 – ISBN : 978-2-12-216431-0

Antiseptiques et désinfectants – Secteur agroalimentaire – Juil. 2007 – Réf. : 3177253 – ISBN : 978-2-12-177253-0

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13
Référence Internet
F1109

SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS : PRINCIPAUX DOCUMENTS NORMATIFS _________________________________________________________________

Tableau 3 – Salles propres et environnements maîtrisés


Titre du document normatif Date Référence officielle
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Maîtrise de la biocontamination. Partie
Mars 2004 NF EN ISO 14698-1
1 : principes généraux et méthodes
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Maîtrise de la biocontamination. Partie

1
Mars 2004 NF EN ISO 14698-2
2 : évaluation et interprétation des données de biocontamination
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 1 : classification de la propreté
Févr. 2016 NF EN ISO 14644-1
particulaire de l’air
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 2 : surveillance du maintien des
Févr. 2016 NF EN ISO 14644-2
performances de la salle propre pour la propreté particulaire de l’air
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 3 : méthode d’essai Mars 2006 NF EN ISO 14644-3
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 4 : conception, construction et
Juil. 2001 NF EN ISO 14644-4
mise en fonctionnement
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 5 : exploitation Déc. 2004 NF EN ISO 14644-5
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 6 : vocabulaire Sept. 2007 NF EN ISO 14644-6
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 7 : dispositifs séparatifs (postes à
Déc. 2004 NF EN ISO 14644-7
air propre, boîtes à gants, isolateurs et mini-environnements)
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 8 : classification de la propreté
Avr. 2013 NF EN ISO 14644-8
chimique de l’air
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 9 : classification de la propreté des
Sept. 2012 NF EN ISO 14644-9
surfaces par la concentration de particules
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 10 : classification de la propreté
Avr. 2013 NF EN ISO 14644-10
chimique des surfaces
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 12 : classification de la propreté de
Mai 2013 PR NF EN ISO 14644-12
l’air en fonction de la concentration des nanoparticules
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 13 : nettoyage des surfaces afin
Avr. 2016 PR NF EN ISO 14644-13
d’obtenir des niveaux de propreté par rapport aux classifications particulaire et chimique
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés – Partie 14 : évaluation de l’aptitude à
l’emploi des équipements par la détermination de la concentration de particules en suspension Janv. 2015 PR NF EN ISO 14644-14
dans l’air
Salles propres et environnements maîtrisés apparentés — Partie 15 : évaluation de l’aptitude à
l’emploi des équipements et des matériaux par la détermination de la concentration chimique Juin 2006 PR NF EN ISO 14644-15
aéroportée (en enquête publique )
Ouvrages (éditions AFNOR)
Salles propres et zones à environnement contrôlé – Conception, réalisation et exploitation – Mars 2006 – Réf. : 3475516 – ISBN :
2-12-475516-1

Tableau 4 – Hygiène et sécurité des équipements


Titre du document normatif Date Référence officielle
Enregistreurs de température pour le transport, l’entreposage et la distribution de denrées
alimentaires réfrigérées, congelées, surgelées et des crèmes glacées – Essais, performance, Sept. 1999 NF EN 12830
aptitude à l’emploi
Industries de l’embouteillage – Fûts à bière cylindriques en alliage d’aluminium – Caractéristiques Sept. 1993 NF H35-089
Machines pour les produits alimentaires – Notions fondamentales – Partie 1 : prescriptions
Juil. 2012 PR NF EN 1672-1
relatives à la sécurité
Machines pour les produits alimentaires. Notions fondamentales – Partie 2 : prescriptions relatives
Mai 2009 NF EN 1672-2+A1
à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Notions fondamentales – Partie 2 : prescriptions
Mai 2009 NF EN 1672-2/IN1
relatives à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )

F 1 109v3 – 4 Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés

14
Référence Internet
F1109

_________________________________________________________________ SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS : PRINCIPAUX DOCUMENTS NORMATIFS

Tableau 4 – Hygiène et sécurité des équipements (suite)


Titre du document normatif Date Référence officielle
Machines pour les produits alimentaires – Doseuses alimentaires – Prescriptions relatives à la
Déc. 2014 NF EN 15180
sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Batteurs-mélangeurs – Prescriptions relatives à la

1
Janv. 2015 NF EN 454
sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Élévateurs/basculeurs de cuve – Prescriptions relatives
Mars 2010 NF EN 13288+A1
à la sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Élévateurs/basculeurs de cuve – Prescriptions relatives
Mars 2010 NF EN 13288/IN1
à la sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Batteurs et fouets portatifs – Prescriptions relatives à la
Juin 2010 NF EN 12853+A1
sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Batteurs et fouets portatifs – Prescriptions relatives à la
Juin 2010 NF EN 12853/IN1
sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Pompes pour liquides – Prescriptions de sécurité – Matériel agroalimentaire – Règles de
Juin 2012 NF EN 13951
conception pour assurer l’hygiène à l’utilisation
Matériels agroalimentaires – Stérilisateurs discontinus – Aptitude à la fonction Janv. 1990 NF U61-100
Machines pour les produits alimentaires – Coupe-légumes – Prescriptions relatives à la sécurité et
Juin 2010 NF EN 1678+A1
à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Coupe-légumes – Prescriptions relatives à la sécurité et
Juin 2010 NF EN 1678/IN1
à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Éplucheuses à légumes – Prescriptions relatives à la
Juin 2010 NF EN 13208+A1
sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Éplucheuses à légumes – Prescriptions relatives à la
Juin 2010 NF EN 13208/IN1
sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Essoreuses à salade – Prescriptions relatives à la sécu-
Juin 2010 NF EN 13621+A1
rité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Essoreuses à salade – Prescriptions relatives à la
Juin 2010 NF EN 13621/IN1
sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Broyeurs verticaux à moteur montés sur chariot – Pres-
Avr. 2010 NF EN 12854+A1
criptions relatives à la sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Broyeurs verticaux à moteur montés sur chariot – Pres-
criptions relatives à la sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout Avr. 2010 NF EN 12854/IN1
seul )
Machines pour les produits alimentaires – Marmites avec agitateur et/ou mixer motorisé – Pres-
Mai 2010 NF EN 13886+A1
criptions relatives à la sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Marmites avec agitateur et/ou mixer motorisé – Pres-
criptions relatives à la sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout Mai 2010 NF EN 13886/IN1
seul )
Machines pour les produits alimentaires – Lave-vaisselle avec convoyeur – Prescriptions relatives
Févr. 2010 NF EN 14957+A1
à la sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Lave-vaisselle avec convoyeur – Prescriptions relatives
Févr. 2010 NF EN 14957/IN1
à la sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Machines à couper les baguettes – Prescriptions rela-
Mai 2010 NF EN 14655+A1
tives à la sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Machines à couper les baguettes – Prescriptions rela-
Mai 2010 NF EN 14655/IN1
tives à la sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Laminoirs à pâte – Prescriptions relatives à la sécurité et
Nov. 2015 NF EN 1674
à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Façonneuses – Prescriptions relatives à la sécurité et à
Janv. 2015 NF EN 12041
l’hygiène

Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés F 1 109v3 – 5

15
Référence Internet
F1109

SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS : PRINCIPAUX DOCUMENTS NORMATIFS _________________________________________________________________

Tableau 4 – Hygiène et sécurité des équipements (suite)


Titre du document normatif Date Référence officielle
Machines pour les produits alimentaires – Pétrins – Prescriptions relatives à la sécurité et à
Janv. 2015 NF EN 453
l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Diviseuses automatiques – Prescriptions relatives à la

1
Mai 2014 NF EN 12042
sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Fours à chariot rotatif – Prescriptions relatives à la sécu-
Janv. 2010 NF EN 1673+A1
rité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Fours à chariot rotatif – Prescriptions relatives à la sécu-
Janv. 2010 NF EN 1673/IN1
rité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Pétrins horizontaux – Prescriptions relatives à la sécurité
Mars 2010 NF EN 13389+A1
et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Pétrins horizontaux – Prescriptions relatives à la sécurité
Mars 2010 NF EN 13389/IN1
et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Élévateurs-enfourneurs – Prescriptions relatives à la
Mars 2010 NF EN 13591+A1
sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Élévateurs-enfourneurs – Prescriptions relatives à la
Mars 2010 NF EN 13591/IN1
sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Chambres de repos – Prescriptions relatives à la sécu-
Janv. 2015 NF EN 12043
rité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Fonceuses à tartes – Prescriptions relatives à la sécurité
Mars 2010 NF EN 13390+A1
et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Fonceuses à tartes – Prescriptions relatives à la sécurité
Mars 2010 NF EN 13390/IN1
et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Installations de production de pâtes – Séchoirs et refroidisseurs – Prescriptions relatives à la sécu-
Mars 2013 NF EN 13289+A1
rité et à l’hygiène
Installations de production de pâtes – Séchoirs et refroidisseurs – Prescriptions relatives à la sécu-
Mars 2013 NF EN 13289/IN1
rité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour pâtes alimentaires – Presses pour pâtes alimentaires – Prescriptions relatives à la
Mars 2013 NF EN 13378+A1
sécurité et à l’hygiène
Machines pour pâtes alimentaires – Presses pour pâtes alimentaires – Prescriptions relatives à la
Mars 2013 NF EN 13378/IN1
sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour pâtes alimentaires – Étendeuses, dégarnisseuses-découpeuses, convoyeurs de
Mars 2013 NF EN 13379+A1
retour des cannes et accumulateurs de cannes – Prescriptions relatives à la sécurité et à l’hygiène
Machines pour pâtes alimentaires – Étendeuses, dégarnisseuses-découpeuses, convoyeurs de
retour des cannes et accumulateurs de cannes – Prescriptions relatives à la sécurité et à l’hygiène Mars 2013 NF EN 13379/IN1
(Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Machines à couper le pain – Prescriptions relatives à la
Avr. 2010 NF EN 13954+A1
sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Machines à couper le pain – Prescriptions relatives à la
Avr. 2010 NF EN 13954/IN1
sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Machine pour la mouture et la transformation de farines
Juin 2009 NF EN 14958+A1
et de semoules – Prescriptions relatives à la sécurité et à l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Machine pour la mouture et la transformation de farines
et de semoules – Prescriptions relatives à la sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document Juin 2009 NF EN 14958/IN1
non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Malaxeurs – Prescriptions relatives à la sécurité et à
Juil. 2010 NF EN 13570+A1
l’hygiène
Machines pour les produits alimentaires – Malaxeurs – Prescriptions relatives à la sécurité et à
Juil. 2010 NF EN 13570/IN1
l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )
Machines pour les produits alimentaires – Trancheurs – Prescriptions relatives à la sécurité et à
Oct. 2009 NF EN 1974+A1
l’hygiène

F 1 109v3 – 6 Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés

16
Référence Internet
F1109

_________________________________________________________________ SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS : PRINCIPAUX DOCUMENTS NORMATIFS

Tableau 4 – Hygiène et sécurité des équipements (suite)


Titre du document normatif Date Référence officielle

Machines pour les produits alimentaires – Trancheurs – Prescriptions relatives à la sécurité et à


Oct. 2009 NF EN 1974/IN1
l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )

Machines pour les produits alimentaires – Machines à découenner, éplucher et peler – Prescrip-

1
Juil. 2010 NF EN 12355+A1
tions relatives à la sécurité et à l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Machines à découenner, éplucher et peler – Prescrip-
Juil. 2010 NF EN 12355/IN1
tions relatives à la sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )

Machines pour les produits alimentaires – Hachoirs – Prescriptions relatives à la sécurité et à


Nov. 2015 NF EN 12331
l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Cutters à cuve tournante – Prescriptions relatives à la
Juil. 2010 NF EN 12855+A1
sécurité et à l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Cutters à cuve tournante – Prescriptions relatives à la
Juil. 2010 NF EN 12855/IN1
sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )

Machines pour les produits alimentaires – Scies à ruban – Prescriptions relatives à la sécurité et à
Déc. 2014 NF EN 12268
l’hygiène

Machines pour la transformation des produits alimentaires – Machines et appareils portatifs et/ou
guidés à la main munis d’outils coupants mus mécaniquement – Prescriptions relatives à la sécu- Juil. 2010 NF EN 12984+A1
rité et à l’hygiène

Machines pour la transformation des produits alimentaires – Machines et appareils portatifs et/ou
guidés à la main munis d’outils coupants mus mécaniquement – Prescriptions relatives à la sécu- Juil. 2010 NF EN 12984/IN1
rité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )

Machines pour les produits alimentaires – Préparateurs culinaires et blenders – Prescriptions rela-
Juin 2010 NF EN 12852+A1
tives à la sécurité et à l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Préparateurs culinaires et blenders – Prescriptions rela-
Juin 2010 NF EN 12852/IN1
tives à la sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )

Machines pour les produits alimentaires – Portionneuses – Prescriptions relatives à la sécurité et à


Nov. 2015 NF EN 13870
l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Scies circulaires – Prescriptions relatives à la sécurité et
Juin 2010 NF EN 12267+A1
à l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Scies circulaires – Prescriptions relatives à la sécurité et
Juin 2010 NF EN 12267/IN1
à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )

Machines pour les produits alimentaires – Machines à pousser et machines auxiliaires – Prescrip-
Déc. 2014 NF EN 12463
tions relatives à la sécurité et à l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Machines automatiques à fendre les carcasses d’ani-
Janv. 2009 NF EN 15166
maux de boucherie – Prescriptions relatives à la sécurité et à l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Formeuses – Prescriptions relatives à la sécurité et à


Déc. 2014 NF EN 15165
l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Machines à attacher – Prescriptions relatives à la sécu-
Juil. 2010 NF EN 13885+A1
rité et à l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Machines à attacher – Prescriptions relatives à la sécu-
Juil. 2010 NF EN 13885/IN1
rité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )

Machines pour les produits alimentaires – Machines à injecter de la saumure – Prescriptions rela-
Juil. 2010 NF EN 13534+A1
tives à la sécurité et à l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Machines à injecter de la saumure – Prescriptions rela-
Juil. 2010 NF EN 13534/IN1
tives à la sécurité et à l’hygiène (Liste de corrections. Document non utilisable tout seul )

Machines pour les produits alimentaires – Machines à couper en cubes – Prescriptions relatives à
Déc. 2014 NF EN 13871
la sécurité et à l’hygiène

Machines pour les produits alimentaires – Machines à étêter et à fileter le poisson – Prescriptions
Févr. 2015 NF EN 15467
relatives à la sécurité et à l’hygiène

Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés F 1 109v3 – 7

17
1

18
Référence Internet
F1110

Sécurité sanitaire des aliments

par Marc CHAMBOLLE


1
Institut national de la recherche agronomique (INRA)
Direction scientifique Nutrition humaine et Sécurité alimentaire

1. Enjeux de la sécurité sanitaire des aliments.................................... F 1 110 – 2


1.1 Enjeu de santé publique.............................................................................. — 2
1.2 Enjeu économique et commercial.............................................................. — 2
2. Analyse des risques liés à l’alimentation.......................................... — 2
3. Évaluation des risques............................................................................ — 3
3.1 Instances d’évaluation................................................................................. — 3
3.2 Processus d’évaluation des risques ........................................................... — 3
4. Gestion des risques ................................................................................. — 7
4.1 Définition et contexte .................................................................................. — 7
4.2 Action des autorités politiques................................................................... — 7
4.3 Action des autorités administratives ......................................................... — 8
4.4 Action des entreprises................................................................................. — 11
4.5 Action des consommateurs ........................................................................ — 12
5. Communication sur les risques ........................................................... — 12
5.1 Définition ...................................................................................................... — 12
5.2 Perception du public.................................................................................... — 12
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. F 1 110

écurité sanitaire est, pour les aliments, un terme dont l ’ emploi a été
S consacré en France par la loi du 1 er juillet 1998 qui a institué une Agence
française de sécurité sanitaire des aliments. Plus récemment, le règlement
(CE) no 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002
établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la
législation alimentaire a précisé les prescriptions relatives à la sécurité des den-
rées alimentaires dans les termes suivants (article 14) :
« 1. Aucune denrée alimentaire n’est mise sur le marché si elle est dangereuse.
2. Une denrée alimentaire est dite dangereuse si elle est considérée comme :
a) préjudiciable à la santé ;
b) impropre à la consommation humaine.
3. Pour déterminer si une denrée est dangereuse, il est tenu compte :
a) des conditions d’utilisation normales de la denrée alimentaire par le con-
sommateur à chaque étape de la production, du traitement et de la distribution ;
b) de l’information fournie au consommateur (...) concernant la prévention
d’effets préjudiciables à la santé propres à une denrée alimentaire particulière ou
à une catégorie particulière de denrées alimentaires.
4. Pour déterminer si une denrée alimentaire est préjudiciable à la santé, il est
tenu compte :
a) de l’effet probable immédiat et/ou à court terme et/ou à long terme de cette
Parution : septembre 2003

denrée alimentaire sur la santé non seulement d’une personne qui la con-
somme, mais aussi sur sa descendance ;
b) des effets toxiques cumulatifs probables ;

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© Techniques de l’Ingénieur, traité Agroalimentaire F 1 110 − 1

19
Référence Internet
F1110

SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS ______________________________________________________________________________________________________

c) des sensibilités sanitaires particulières d’une catégorie de consommateurs


lorsque la denrée alimentaire lui est destinée.
5. Pour déterminer si une denrée alimentaire est impropre à la consommation
humaine, il est tenu compte de la question de savoir si cette denrée alimentaire
est inacceptable pour la consommation humaine compte tenu de l’utilisation
prévue, pour des raisons de contamination, d’origine externe ou autre, ou par
putréfaction, détérioration ou décomposition. »
1 Le champ de la sécurité sanitaire des aliments est désormais bien balisé. Nous
proposons que l’on considère, dans le cadre de cet article, comme relevant de la
sécurité sanitaire l’ensemble des connaissances, procédures et actions grâce
auxquelles on évalue et on maîtrise les risques pour la santé de l’homme,
induits par les propriétés des aliments et résultant de leur préparation et de leur
transformation, tout au long de la chaîne alimentaire depuis la production de
matières premières jusqu’à la consommation des aliments.

1. Enjeux de la sécurité Quoi qu’il en soit, ni l’opinion publique, ni les responsables politi-
ques et administratifs de la santé publique ne peuvent admettre que
sanitaire des aliments la qualité sanitaire des aliments ne soit pas aussi irréprochable que
possible.

« Sécurité sanitaire des aliments » est parfois remplacé par


« sécurité alimentaire », terme qui peut être source de confu-
1.2 Enjeu économique et commercial
sion, car il désigne plutôt la sécurité de l’approvisionnement
des populations en aliments (en anglais « food security »).
Les entreprises responsables de la mise sur le marché d’aliments
« Sécurité sanitaire des aliments » correspond en fait à l’anglais
qui se sont révélés dangereux risquent leur réputation et même leur
« food safety », parfois traduit par « salubrité ».
existence, et les crises qui se développent dans des épisodes
comme ceux de la « vache folle » (encéphalopathie spongiforme
bovine, ESB) ou lors de toxi-infections d’origine microbienne peu-
vent atteindre toutes les entreprises d’une branche devenue sus-
1.1 Enjeu de santé publique pecte dans son ensemble. Les coûts pour la collectivité des mesures
correctives peuvent atteindre des sommes considérables : selon les
autorités françaises, le coût annuel des mesures de lutte contre
l’ESB s’élève à 850 millions d’euros. Il faut aussi prendre en compte
La sécurité sanitaire des aliments est un enjeu majeur (Conseil les coûts liés à la mortalité et à la morbidité humaines : aux États-
économique et social, 2001). C’est d’abord un enjeu de santé publi- Unis, les coûts d’hospitalisation et les pertes de productivité engen-
que. Il est difficile de dénombrer les décès, maladies et troubles pas- drés par les toxi-infections d’origine microbienne sont estimés à
sagers plus ou moins graves directement imputables aux aliments respectivement 3 et 8 milliards de dollars par an.
et, plus encore, à l’alimentation prise dans son ensemble : la sur-
veillance et le diagnostic sont malaisés car les effets peuvent être Par ailleurs, les critères de sécurité sanitaire des aliments pren-
disséminés dans l’espace, différés dans le temps, et non spécifi- nent une importance croissante dans le commerce international, où
ques. Les causes de ces décès, maladies et troubles sont pour la plu- ils sont, certes, un outil pour la protection des consommateurs mais
part multifactorielles. aussi, le cas échéant, utilisés comme une « barrière non tarifaire »
aux échanges et une arme de concurrence commerciale. C’est pour-
Dans le cas du cancer, on estime que le risque lié au régime ali- quoi l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a adopté un
mentaire est à l’origine de 35 % des 150 000 décès annuels par can- accord sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires
cer constatés en France (rapport de la Commission d’orientation sur (Accord SPS) qui définit les règles fondamentales concernant l’inno-
le cancer, 2003). Quant aux maladies infectieuses, en 1999 les toxi- cuité des produits alimentaires, ainsi que les normes sanitaires pour
infections alimentaires collectives (TIAC) auraient causé 5 décès, les animaux et les végétaux. Il permet aux pays d’établir leurs pro-
sans compter ceux qui étaient imputables à Listeria monocytoge- pres normes mais il dispose aussi que les réglementations doivent
nes, au nombre de 47 [1] [2]. Ces nombres sont à coup sûr inférieurs avoir un fondement scientifique et qu’elles ne doivent être appli-
aux nombres réels de décès, du fait de la sous-déclaration des toxi- quées que dans la mesure nécessaire pour protéger la santé et la vie
infections et de l’imprécision des diagnostics. Aux États-Unis, le des personnes et des animaux ou pour préserver les végétaux.
nombre de décès dus à des toxi-infections alimentaires a été estimé
à 5 000 par an, et celui des malades autour de 76 millions, avec
325 000 hospitalisations [3].

Par ailleurs, des aliments parfaitement sains peuvent entrer dans


2. Analyse des risques liés
des régimes déséquilibrés responsables à terme de maladies car- à l’alimentation
diovasculaires (165 000 morts par an en France), de diabète, d’obé-
sité, d’ostéosporose, etc. En ce qui concerne les maladies
cardiovasculaires, « le niveau de preuve de l’effet bénéfique d’une La sécurité sanitaire des aliments est justiciable d’une démarche
alimentation équilibrée sur le risque cardiovasculaire est très d’analyse des risques, analogue à celle qui est de mise dans toute
élevé. » [4]. production industrielle. C’est au début des années 1990 que cette

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F 1 110 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Agroalimentaire

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Référence Internet
F1110

_____________________________________________________________________________________________________ SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS

démarche a commencé à faire l’objet d’une attention au niveau leurs domaines de compétences propres, les avis de l’Autorité ; ils
international, notamment à l’Organisation pour l’alimentation et ont la possibilité d’organiser, le cas échéant, des débats publics. Ces
l’agriculture (FAO) et à l’Organisation mondiale de la santé (OMS), groupes sont au nombre de huit :
puis au Codex Alimentarius, programme mixte de ces deux organi- — additifs alimentaires, arômes, auxiliaires technologiques et
sations. matériaux en contact avec les aliments ;
Le concept de l’analyse des risques appliquée à l’alimentation est — additifs et produits ou substances utilisés en alimentation
maintenant devenu classique, au point que le règlement commu- animale ;
— santé des plantes, produits phytosanitaires et leurs résidus ;

1
nautaire du 28 janvier 2002 stipule que « la législation alimentaire se
fonde sur l’analyse des risques. » Ce texte donne aussi les défini- — organismes génétiquement modifiés ;
tions suivantes. — produits diététiques, nutrition et allergies ;
— risques biologiques ;
— contaminants de la chaîne alimentaire ;
■ « Analyse des risques » : un processus comportant trois — santé animale et bien-être des animaux.
volets interconnectés : l’évaluation des risques, la gestion des
risques et la communication sur les risques ; ■ Au niveau mondial, la FAO et l’OMS ont institué depuis long-
temps des comités mixtes pour les additifs alimentaires et les
■ « Danger » : un agent biologique, chimique ou physique pré- contaminants (Joint FAO/WHO Expert Committee on Food Additi-
sent dans les denrées alimentaires ou les aliments pour ani- ves, JECFA, 1956), pour les résidus de pesticides (Joint FAO/WHO
maux, ou un état de ces denrées alimentaires ou aliments pour Meeting on Pesticides Residues, JMPR, 1963) et, plus récemment,
animaux, pouvant avoir un effet néfaste sur la santé ; pour l’évaluation des risques microbiologiques (Joint FAO/WHO
Meetings on Microbiological Risk Assessment, JEMRA, 1999). Ces
■ « Risque » : une fonction de la probabilité et de la gravité d’un organisations internationales interviennent également dans le cadre
effet néfaste sur la santé, du fait de la présence d’un danger ». du Codex Alimentarius qui travaille à établir des normes pouvant
être adoptées par les États, par exemple sur l’hygiène alimentaire
En vue de garantir l’indépendance des experts chargés de l’éva- (aspects microbiologiques). L’Organisation internationale des épi-
luation des risques, il doit exister une séparation marquée entre ges- zooties (OIE) apporte son expertise pour évaluer et contrôler les
tion des risques et évaluation des risques, même si certaines maladies animales, ce qui est en lien étroit avec la sécurité sanitaire
interactions sont indispensables dans une approche pragmatique. des aliments d’origine animale. L’OCDE (Organisation de coopéra-
tion et de développement économique) produit pour sa part des
lignes directrices pour l’évaluation des substances chimiques, appli-
cables à l’évaluation toxicologique des composants de l’alimenta-
tion. Elle a également des activités d’étude dans le domaine de la
3. Évaluation des risques sécurité des aliments, par exemple pour ceux qui sont issus de bio-
technologies.

3.1 Instances d’évaluation


3.2 Processus d’évaluation des risques
L’évaluation des risques (terme qu’il faut, maintenant qu’il est
Selon le règlement communautaire du 28 janvier 2002, on
défini par la réglementation européenne, préférer à celui d’apprécia-
appelle :
tion des risques) se fait à partir des connaissances acquises dans
diverses disciplines : toxicologie, chimie analytique, microbiologie,
épidémiologie, etc. Elle implique donc la réalisation d’expertises, « évaluation des risques, un processus reposant sur des bases
qui doivent nécessairement être collectives, pluridisciplinaires, sou- scientifiques et comprenant quatre étapes : l’identification des
mises à révision périodique et conduites par des instances qui assu- dangers, leur caractérisation, l’évaluation de l’exposition et la
rent l’indépendance des experts. caractérisation des risques ».
■ En France, le dispositif d’expertise a été rénové par la loi du
1er juillet 1998, qui a institué l’Agence française de sécurité sanitaire L’évaluation des risques doit intégrer ces quatre étapes, citées
des aliments (Afssa). Celle-ci s’est substituée à des instances exis- dans le manuel de procédure de la commission du Codex Alimenta-
tantes, en particulier à la section spécialisée en alimentation et nutri- rius.
tion du Conseil supérieur d’hygiène publique (Cshpf), et aux
commissions qui donnaient des avis sur les aliments diététiques,
l’alimentation animale et les médicaments vétérinaires. Mise en
3.2.1 Identification des dangers
place en avril 1999, l’Afssa s’est dotée de dix comités d’experts spé-
L’identification des agents biologiques, chimiques et physiques,
cialisés (tableau 1). Leurs membres ont été nommés après examen
présents dans un aliment ou un groupe d’aliments et pouvant pro-
des candidatures recueillies à la suite d’un appel public. Les avis des
voquer des effets adverses pour la santé, repose sur des connais-
comités scientifiques servent de base pour la préparation des avis
sances scientifiques documentées. Ces connaissances proviennent
de l’Afssa, signés par son directeur, qui sont rendus publics.
essentiellement de trois domaines d’études :
■ Dans l’Union européenne, les comités scientifiques rénovés en — des études toxicologiques, menées principalement chez l’ani-
1997, dont le Comité scientifique de l’alimentation humaine (CSAH), mal, mais aussi in vitro, reliant des effets cliniques ou anatomopa-
ont laissé place en 2003 à l’Autorité européenne de sécurité des ali- thologiques à l’exposition à des agents (biologiques, chimiques,
ments (Aesa), instituée par le règlement du 28 janvier 2002. Celle-ci physiques) présents dans les aliments ;
« fournit des avis scientifiques et une assistance scientifique et tech- — les études épidémiologiques, qui établissent des corrélations
nique à la politique et à la législation de la Communauté dans tous entre des événements pathologiques et la consommation d’ali-
les domaines ayant un impact direct ou indirect sur la sécurité des ments ou de composants d’aliments de composition connue ;
denrées alimentaires et des aliments pour les animaux. (...). L’Auto- — des études de relation entre la structure chimique et l’activité
rité recueille et analyse les données afin de permettre la caractérisa- toxique, qui permettent de suspecter ou au contraire de considérer
tion et le contrôle des risques (dans ces domaines). » Ce sont des comme sans risque notable des substances pour lesquelles on n’a
groupes scientifiques permanents qui sont chargés de fournir, dans pas (encore) observé d’effets néfastes.

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SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS ______________________________________________________________________________________________________

(0)

Tableau 1 – Liste et domaines de compétences des Comités d’experts spécialisés (CES) de l’Afssa
(arrêté du 23 août 2000) ; nombre d’avis par domaine en 2001
Titre des comités Nombre d’avis
Domaine d’expertise
d’experts spécialisés rendus en 2001
Évaluation des risques nutritionnels, des propriétés et de l’intérêt nutritionnels et fonctionnels des

1 CES Nutrition humaine


substances et denrées entrant dans l’alimentation humaine, ainsi que des modes de consomma-
tion alimentaire.
Élaboration des références nutritionnelles.
58

CES Microbiologie Évaluation des risques microbiologiques et parasitologiques liés aux denrées alimentaires
et à leurs procédés d’obtention. 19

Évaluation des risques sanitaires des produits contenant des organismes génétiquement modifiés
CES Biotechnologie ou produits à partir de tels organismes, destinés à l’alimentation humaine et animale.
Évaluation des risques sanitaires et de l’intérêt des préparations enzymatiques destinées 22
à la consommation humaine.
CES Encéphalopathies
spongiformes Évaluation des risques pour l’animal liés aux encéphalopathies spongiformes subaiguës transmis-
subaiguës sibles et des risques sanitaires des produits alimentaires destinés à la consommation humaine au 37
transmissibles regard des encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles.

CES Résidus et conta- Évaluation des risques sanitaires liés à la présence de contaminants et de résidus chimiques et
minants chimiques et physiques dans les aliments et aux modifications induites par les traitements physiques et thermi- 13
physiques ques des aliments.

CES Alimentation Évaluation des risques nutritionnels et sanitaires et de l’intérêt des produits entrant dans l’alimen-
animale tation animale et des procédés de traitement des aliments pour animaux ainsi que des risques 50
associés pour les denrées d’origine animale destinées à la consommation humaine.
CES Matériaux Évaluation des risques sanitaires liés au contact entre les aliments et les matériaux utilisés lors de
au contact des denrées 15
alimentaires leur production ou de leur conditionnement.

CES Additifs, arômes


et auxiliaires Évaluation des risques sanitaires liés aux additifs, arômes et auxiliaires technologiques utilisés
17
technologiques dans l’alimentation humaine ainsi que de leur intérêt.

Évaluation des risques sanitaires pour l’animal et pour l’homme des maladies animales.
CES Santé animale 28
Questions relatives à la santé animale, à la lutte contre les maladies et au bien-être des animaux.
Évaluation des risques sanitaires des eaux destinées à la consommation humaine, des eaux miné-
CES Eaux 55
rales naturelles ainsi que des eaux intervenant dans la chaîne alimentaire.

Les agents biologiques, chimiques et physiques qui constituent ■ La seule évaluation qualitative, qui se limiterait à la constatation
des dangers sont extrêmement variés. Beaucoup sont « naturels », et à la description des effets adverses, ne serait pas suffisante, car
qu’il s’agisse de constituants des aliments eux-mêmes, de toxines elle donnerait peu d’indications utiles pour la gestion des risques
sécrétées par des organismes vivants, ou de composés qui se for- inhérents à une fonction dont on ne peut se passer, l’alimentation.
ment spontanément au cours de préparation des aliments. Il n’y a C’est pourquoi la caractérisation des dangers comporte la
donc pas lieu de focaliser toute son attention et toutes ses craintes détermination du seuil de toxicité et l’évaluation de la relation dose-
sur le « chimique », l’« artificiel » ou la contamination accidentelle réponse, c’est-à-dire la détermination de la relation entre le niveau
par l’environnement. Le tableau 2 présente quelques exemples, d’exposition (dose) à un danger et la fréquence et la gravité des
choisis parmi les plus significatifs mais qui sont loin d’être exhaus- effets adverses pour la santé.
tifs, de dangers liés à l’alimentation. On notera, en particulier, la Pour les agents chimiques, la détermination du seuil de toxicité
variété des « agents chimiques », qui concernent l’environnement est souvent délicate : on considère qu’elle n’est pas possible pour la
de la production et de la transformation, les matières premières ali- génotoxicité et la cancérogénicité. Pour les autres effets patholo-
mentaires et industrielles tout aussi bien que les produits finis. giques, elle est généralement déterminée à partir de l’extrapolation
de courbes de relation dose-réponse obtenues expérimentalement
avec des animaux d’expérience. Cette extrapolation repose sur
3.2.2 Caractérisation des dangers l’emploi de modèles mathématiques, qui peuvent donner des résul-
tats relativement différents pour les doses faibles, et qui reposent
La caractérisation des dangers est l’évaluation qualitative et jusqu’à présent sur l’hypothèse de l’existence d’un effet de seuil, ou
quantitative de la nature des effets adverses pour la santé associés sur celle d’une relation dose-réponse linéaire. Ces hypothèses ne
aux dangers définis au paragraphe 3.2.1. Elle nécessite le recours à sont pas toujours vérifiées : il peut y avoir à très faibles doses des
des essais conduits sur des animaux et in vitro, en suivant des effets analogues à ceux des fortes doses, et opposés à ceux des
méthodes bien décrites (OCDE, FOSIE 2002, divers « guidelines » doses intermédiaires (phénomènes d’hormésis, courbes de réponse
des comités scientifiques de l’Union européenne). Il n’y a pas dans en U ou en J).
le cas des substances chimiques de protocole universel, mais on (0)

considère qu’un minimum d’études doit être réalisé : toxicité aiguë ■ Le concept le plus utilisé est celui de « dose journalière admis-
(dose unique), toxicité chronique (doses répétées), études de repro- sible pour l’homme » (DJA). Initialement établi pour les additifs ali-
duction et de développement, de neurotoxicité, de génotoxicité, de mentaires, il peut être étendu à toute substance chimique définie. La
cancérogénicité, d’immunotoxicité, d’allergénicité, études méta- DJA d’une substance est la quantité qui peut être ingérée quotidien-
boliques et pharmacocinétiques, méthodes d’analyses et définition nement pendant toute la durée de la vie sans entraîner de risque
des spécifications de pureté... appréciable pour la santé des consommateurs, sur la base des faits

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F1111

ISO 22000:2018

Par Olivier BOUTOU


Expert AFNOR, Saint-Denis, France 1
1. Esprit de la norme ISO 22000 version 2018 ................................. F 1 111v2 - 2
1.1 Basée sur les cinq piliers de la qualité ................................................... — 2
1.2 Bénéfices recherchés ............................................................................... — 2
2. Principaux changements sur la forme de la norme
ISO 22000:2018 .................................................................................... — 2
2.1 Nouvelle structure dite HLS (High Level Structure – structure cadre).... — 2
2.2 Approche processus et cycle PDCA........................................................ — 2
2.3 Relation avec les autres normes de systèmes de management.......... — 3
2.4 Modifications au niveau de la terminologie .......................................... — 4
2.5 Nouveautés au niveau des définitions ................................................... — 4
2.6 Et la documentation dans tout cela ? ..................................................... — 5
3. Principaux changements sur le fond de la norme
ISO 22000:2018 .................................................................................... — 6
3.1 Contexte de l’organisme – Chapitre 4 de la norme............................... — 7
3.2 Planification – Chapitre 6 de la norme ................................................... — 11
3.3 Support – Chapitre 7 de la norme........................................................... — 11
3.4 Réalisation des activités opérationnelles – Chapitre 8 de la norme .... — 12
3.5 Évaluation des performances – Chapitre 9 de la norme....................... — 14
4. Prochaines échéances......................................................................... — 14
5. Conclusion.............................................................................................. — 14
6. Glossaire ................................................................................................. — 15
7. Sigles, notations et symboles........................................................... — 16
Pour en savoir plus ....................................................................................... Doc. F 1 111v2

a norme ISO 22000 a été publiée le 19 juin 2018.


L Cette nouvelle version, toujours basée sur les principes de l’HACCP
(Hazard Analysis Critical Control Point), spécifie les exigences d’un système de
management de la sécurité des denrées alimentaires. Publiée initialement en
2005, sa révision était devenue nécessaire. Le but était de simplifier la norme
et de la rendre plus concise. Certains concepts méritaient d’être clarifiés, de
même que certains termes et définitions qu’il était nécessaire d’actualiser. Un
des objectifs était également d’aligner l’ISO 22000 avec les autres normes ISO
de système de management (9001, 14001 et 45001 pour ne citer que les plus
connues) en intégrant les nouvelles approches de management (analyse du
contexte, parties intéressées, risques et opportunités).
Au sein de l’ISO/TC 34/SC 17, plus de 35 pays ont participé activement à cette
révision.
L’objet de cet article est de permettre aux utilisateurs de la norme ISO 22000
de comprendre les évolutions et de planifier les actions de mise en conformité
par rapport aux nouvelles exigences. L’ISO 22000 reste la seule et unique
norme internationale en matière de management de la sécurité des denrées
alimentaires. Son utilisation (voire sa certification) est toujours un avantage
indéniable pour un organisme évoluant dans un secteur agroalimentaire trop
souvent impacté par des crises sanitaires.
Parution : février 2019

Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés F 1 111v2 – 1

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Référence Internet
F1111

ISO 22000:2018 _____________________________________________________________________________________________________________________

nécessaires. Plutôt qu’une incitation ou une sensibilisation à l’esprit


1. Esprit de la norme de responsabilité, la norme définit concrètement les exigences en la
ISO 22000 version 2018 matière. Reste que la formalisation de ces responsabilités ne peut
faire l’économie d’une véritable animation autour du sujet.

Cette nouvelle version de la norme adopte la même structure


commune dite « cadre » ou universelle (high level structure) que 1.2 Bénéfices recherchés
les versions 2015 des normes de management ISO 9001, ISO 45001

1 et ISO 14001. Celle-ci s’organise autour de dix chapitres et devrait


simplifier la gestion documentaire pour rendre la norme accessible
aux petites structures. Le chapitre 8, le plus important en volume,
L’adoption d’un Système de Management de la Sécurité
des Denrées Alimentaires (SMSDA) relève d’une décision stra-
tégique de l’organisme qui peut l’aider à améliorer ses perfor-
est consacré à la maîtrise opérationnelle de la sécurité des denrées mances globales. En mettant en œuvre un SMSDA fondé sur la
alimentaires. Les managers y retrouveront tout ce qui concerne les norme ISO 22000, les bénéfices potentiels pour un organisme sont
Bonnes Pratiques d’Hygiène (BPH ou PRP) (§ 2.5), la traçabilité, le les suivants :
retrait/rappel et bien évidemment l’HACCP. La structure de cette – aptitude à fournir en permanence des denrées alimen-
nouvelle norme respecte le cycle PDCA, outil bien connu d’amélio- taires sûres et des produits et services pertinents conformes
ration continue (planifier, mettre en œuvre, vérifier, améliorer). Elle aux exigences du (des) client(s) et aux exigences légales et
intègre deux cycles distincts : l’un s’appliquant au système de réglementaires applicables ;
management et le second à l’application de la méthode HACCP – prise en compte des risques associés aux objectifs de
(§ 2.2). l’organisme ;
– aptitude à démontrer la conformité aux exigences spéci-
fiées du système de management de la sécurité des denrées ali-
1.1 Basée sur les cinq piliers de la qualité mentaires.

La norme investit les cinq piliers de la qualité, connus et appli-


qués dans les normes de système de management (ISO 9001:2015,
par exemple).
2. Principaux changements
■ La prévention
La prévention dans une démarche de sécurité sanitaire des ali-
sur la forme de la norme
ments est bien connue. Elle est assurée par la mise en œuvre d’un ISO 22000:2018
ensemble de bonnes pratiques (les PRP) qui s’entendent comme
des actions préventives.
Au-delà des PRP, l’approche par les risques et par les opportuni- 2.1 Nouvelle structure dite HLS (High
tés engage maintenant l’organisme à se placer en permanence Level Structure – structure cadre)
dans la mise en place de dispositifs préventifs (« Qu’est-ce qui
peut m’empêcher de... » ou « Qu’est-ce qui peut contribuer à... »). En 2012, l’ISO a décidé d’améliorer la cohérence et l’alignement
Il s’agit d’anticiper d’éventuels dysfonctionnements et de saisir les des normes ISO de systèmes de management en fournissant une
potentialités de développement au travers d’opportunités. C’est de structure unifiée et convenue, un texte de base identique et des
loin l’apport le plus marquant de cette version par rapport à celle termes et définitions de base communs. L’objectif était d’aligner
de 2005. toutes les normes ISO de systèmes de management et d’améliorer
leurs compatibilités. Il a été décidé qu’une norme de système de
■ La conformité
management particulière comporte, outre des exigences com-
Les exigences de vérification et de contrôle, sont assorties de la munes, des exigences supplémentaires, spécifiques à la discipline
nécessité de préciser les responsabilités, les preuves à conserver (environnement, énergie, santé et sécurité au travail, sécurité des
et les modalités de traitement des non-conformités : tous ces élé- denrées alimentaires).
ments engagent l’organisme à assurer et à rétablir la conformité
Certaines normes sont déjà alignées sur la HLS, comme
de façon coordonnée.
l’ISO 27001 (management de la sécurité des informations),
■ L’évaluation l’ISO 14001 (management environnemental) et l’ISO 9001 (mana-
gement de la qualité).
Les exigences d’évaluation de la performance demandant à
l’organisme de déployer un dispositif complet (allant des PRP, aux Cette approche commune pour les nouvelles normes de sys-
plans HACCP et PRPO, en passant par les audits internes et pour tèmes de management, ainsi que pour les révisions futures de
finir en évaluant le système en revue de direction) permettent une normes existantes, doit permettre d’accroître la valeur de ces
évaluation aux différents niveaux, du plus opérationnel au plus normes pour les utilisateurs. Cela est particulièrement utile pour
global. les organismes qui choisissent de mettre en œuvre un système de
management unique (parfois appelé « intégré ») permettant de
■ L’amélioration satisfaire simultanément aux exigences de deux normes de sys-
La norme utilise l’approche processus qui intègre le cycle PDCA tèmes de management ou plus.
(Plan-Do-Check-Act). Le cycle PDCA permet à un organisme de La structure cadre comprend les articles principaux (1 à 10) et
s’assurer que ses processus sont dotés de ressources adéquates et leur titre, selon une séquence établie (figure 1).
gérés de manière appropriée, et que les opportunités d’améliora-
tion sont déterminées et mises en œuvre.
■ La responsabilité
2.2 Approche processus et cycle PDCA
L’engagement dans une démarche portée par l’ensemble des La norme ISO 22000:2018 promeut l’adoption d’une approche
acteurs de l’organisme débute avec l’engagement de la direction. La processus lors du développement, la mise en œuvre et l’améliora-
direction, au plus haut niveau, s’engage d’abord dans le lancement tion de son SMSDA. C’est une approche processus moins prescrip-
et le suivi de la démarche de sécurité des aliments et, dans un deu- tive que dans la norme ISO 9001:2015, mais elle existe. Comprendre
xième temps, définit et attribue les responsabilités respectives et piloter les processus en interaction comme un système doit

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Référence Internet
F1111

______________________________________________________________________________________________________________________ ISO 22000:2018

D’autres préconisations relatives à la sécurité des denrées ali-


mentaires, spécifications et/ou exigences spécifiques à des sec-
1. Domaine d’application
teurs alimentaires, peuvent être utilisées conjointement à ce cadre.
2. Références normatives 4. Contexte
3. Termes et définitions de l’organisme La série ISO/TS 22002-X spécifie des exigences et des préconisa-
5. Leadership tions pour l’établissement, la mise en œuvre et la tenue à jour de
6. Planification programmes prérequis (PrP) facilitant la maîtrise des dangers liés
7. Support à la sécurité des denrées alimentaires :
10. Amélioration

1
A P – ISO/TS 22002-1, Programmes prérequis pour la sécurité des
denrées alimentaires – Partie 1 : Fabrication des denrées
alimentaires ;
C D
– ISO/TS 22002-2, Programmes prérequis pour la sécurité des
9. Évaluation 8. Réalisation denrées alimentaires – Partie 2 : Restauration ;
des performances des activités – ISO/TS 22002-3, Programmes prérequis pour la sécurité des
opérationnelles denrées alimentaires – Partie 3 : Agriculture ;
– ISO/TS 22002-4, Programmes prérequis pour la sécurité des
denrées alimentaires – Partie 4 : Fabrication des emballages desti-
Figure 1 – Structure cadre universelle de la norme (dite HLS) nés aux denrées alimentaires ;
– ISO/TS 22002-5, Programmes prérequis pour la sécurité des
denrées alimentaires – Parie 5 : Transport et stockage (à l’état de
projet) ;
– ISO/TS 22002-6, Programmes prérequis pour la sécurité des
denrées alimentaires – Partie 6 : Production des aliments pour ani-
P (Plan) D (Do) maux.
PRÉVOIR FAIRE En outre, la famille comprend les publications suivantes :
– ISO/TS 22003:2013, Systèmes de management de la sécurité
des denrées alimentaires – Exigences pour les organismes procé-
A (Act) C (Check) dant à l’audit et à la certification de systèmes de management de
RÉAGIR VÉRIFIER
la sécurité des denrées alimentaires (en cours de révision au
niveau international) ;
– ISO 22005:2007, Traçabilité de la chaîne alimentaire – Principes
généraux et exigences fondamentales s’appliquant à la conception
du système et à sa mise en œuvre.
Figure 2 – Roue de Deming (cycle PDCA) Tous ces textes liés à l’ISO 22000 sont maintenant présentés
sous la forme d’une « ligne de produits », conçue pour guider les
organismes tout au long de leur projet qualité, constituée :
contribuer à l’efficacité et l’efficience de l’organisme pour atteindre
les résultats escomptés. – du manuel Comment utiliser l’ISO 22000 (How to use
ISO 22000) : il aide les petites et moyennes entreprises (PME) à
L’approche processus doit s’appuyer sur une identification systé- bien cerner la norme pour la mettre en œuvre. Il explique les prin-
matique et un management des processus. Cette approche com- cipales étapes de la démarche et les subdivise en tâches faciles à
prend également un travail sur les interactions entre processus, de comprendre, assorties de conseils pratiques. Il contient aussi des
manière à obtenir les résultats escomptés conformément à la poli- informations destinées spécifiquement aux organisations qui
tique de sécurité des denrées alimentaires et à l’orientation straté- veulent obtenir la certification de conformité à la norme. Publié ini-
gique de l’organisme. tialement en 2013, ce document est en cours de révision pour
La norme mentionne que le management des processus et du s’adapter aux nouvelles exigences de l’ISO 22000:2018 ;
système dans son ensemble peut être réalisé en appliquant le – de l’ISO 22000:2018, Systèmes de management de la sécu-
cycle PDCA. rité des denrées alimentaires – Exigences pour tout organisme
Le PDCA est le principe de l’amélioration continue selon appartenant à la chaîne alimentaire ;
une roue partagée en quatre secteurs (figure 2) : – de l’ISO 19011:2018, cette norme fournit des lignes direc-
trices sur l’audit de systèmes de management, comprenant les
– P (Plan) : prévoir, planifier, spécifier, définir ; principes de l’audit, le management d’un programme d’audit et la
– D (Do) : faire, mettre en œuvre (en maîtrisant) ; réalisation d’audits de systèmes de management. Elle donne éga-
– C (Check) : vérifier, évaluer ; lement des lignes directrices sur l’évaluation de la compétence des
– A (Act) : réagir, agir, améliorer. personnes impliquées dans le processus d’audit. Ces activités
Dans la norme et comme le montre la figure 3, l’approche concernent le(s) responsable(s) du management du programme
processus utilise le cycle PDCA à deux niveaux. L’un couvre d’audit, les auditeurs et les équipes d’audit. Elle est applicable à
le cadre global du SMSDA (cf. chapitres 4 à 7, 9 et 10 de la tous les organismes qui doivent planifier et réaliser des audits
norme ISO 22000:2018). L’autre concerne la réalisation des activi- internes ou externes de systèmes de management ou manager un
tés opérationnelles (cf. chapitre 8). Cela signifie que la communica- programme d’audit.
tion entre les deux niveaux est essentielle. Ces trois textes peuvent être articulés selon la logique du cycle
PDCA qui, dans ce contexte, se traduit de façon suivante :
– P (plan) et D (do) : je comprends et je construis (manuel How
2.3 Relation avec les autres normes to use ISO 22000) le système de management selon une approche
de systèmes de management logique ;
– C (check) : je démontre (ISO 22000) l’aptitude du système de
La norme définit les exigences spécifiques d’un SMSDA pour les management à répondre aux exigences ;
organismes intervenant à tous les niveaux de la chaîne alimen- – A (Act) : j’améliore (ISO 19011) l’efficacité du système de
taire. management par la pratique de l’audit.

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F1111

ISO 22000:2018 _____________________________________________________________________________________________________________________

Organisation et maîtrise du système

PLANIFIER (SMSDA) RÉALISER (SMSDA) VÉRIFIER (SMSDA) AGIR (SMSDA)

4. Contexte 8. Réalisation 9. Évaluation des 10. Amélioration


de l’organisme des activités performances

1
5. Leadership opérationnelles
6. Planification
7. Support (y compris
maîtrise des
processus, produits
ou services fournis
par des prestataires
externes)

Planification et maîtrise opérationnelles

PRP

Traçabilité Validation Plan de Planification


Analyse des
des mesures maîtrise des de la
dangers
Préparation et réponse aux de maîtrise dangers vérification
situations d’urgence
PLANIFIER (sécurité des denrées alimentaires)

Mise en œuvre du plan


Mise à jour des Activités de vérification de maîtrise des dangers
informations initiales et Maîtrise de la surveillance
des documents spécifiant et de la mesure
Analyse des résultats des
les PRP et le plan de
activités de vérification Maîtrise des non-conformités
maîtrise des dangers
produits et processus

AGIR (sécurité des denrées VÉRIFIER (sécurité RÉALISER (sécurité


alimentaires) des denrées alimentaires) des denrées alimentaires)

Figure 3 – Illustration des deux cycles PDCA

2.4 Modifications au niveau opérationnel proches de la production en intégrant la chaîne logis-


tique étendue (supply chain management) ;
de la terminologie – le « produit » devient les « produit et service ». Le terme
« produit » était générique dans la version 2005. Les activités de
Les modifications au niveau des termes employés sont les
prestations de services, pourtant couvertes par la norme pouvaient
suivantes :
se sentir moins concernées ou, tout du moins, trouver que
– la « responsabilité de la direction » devient le « leadership ». l’ancienne terminologie avait une prégnance industrielle trop
Les exigences de la version 2005 sont renforcées. La politique et marquée ;
les objectifs doivent être compatibles avec le contexte de l’orga- – les « fournisseurs » deviennent les « prestataires externes ».
nisme (enjeux internes et externes) et avec les exigences des par- Cela renforce le côté « prestation » de tout fournisseur, même
ties intéressées pertinentes. Les exigences liées au système de lorsque celle-ci consiste à livrer des matières premières, des ingré-
management doivent être intégrées aux processus métiers. Par ail- dients ou des emballages, ou à les stocker.
leurs, la direction doit orienter et soutenir les personnes pour
qu’elles contribuent à l’efficacité du système ;
– le « management des ressources » devient le « support ». 2.5 Nouveautés au niveau des définitions
Alors qu’il s’agissait dans la version 2005 de manager, voire de
gérer les ressources mises à disposition de manière un peu sta- Le choix des normalisateurs a été d’intégrer toutes les défini-
tique, la notion de support indique une note plus dynamique de tions dans la nouvelle version de la norme. Cela peut paraître volu-
soutien, incluant les acteurs en support à plus d’engagement dans mineux et, en effet, nous pouvons compter 45 termes et définitions
la contribution à la sécurité du produit et des services ; au total sur presque 10 pages !
– les « documents et enregistrements » tels que les procédures, L’ordre est basé sur la version anglaise, il n’y a donc pas de
modes opératoires, instructions deviennent les « informations logique apparente.
documentées » ;
– la « planification et réalisation de produits sûrs » devient la Parmi les nouveautés, nous pouvons citer :
« réalisation des activités opérationnelles ». Cette nouvelle ter- – le niveau acceptable : le niveau d’un danger lié à la sécurité
minologie permet de prendre en compte des activités à caractère des denrées alimentaires ne devant pas être dépassé dans le

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Le principe de précaution
Approches conceptuelles
par Sébastien ROUSTEL
1
Ingénieur du génie rural, des eaux et des forêts

1. Définitions préalables............................................................................. F 1 112 – 2


2. Évolution du concept.............................................................................. — 2
2.1 En droit international................................................................................... — 2
2.2 En droit communautaire ............................................................................. — 3
2.3 En droits nationaux ..................................................................................... — 3
3. Proposition d’une définition ................................................................. — 3
4. Principe de précaution et société ....................................................... — 3
5. Valeur juridique ........................................................................................ — 4
5.1 Une réponse à une double préoccupation ................................................ — 4
5.2 Un guide décisionnel................................................................................... — 4
5.3 Des limites d’ordre juridique ...................................................................... — 5
5.4 L’opinion publique, un facteur non négligeable........................................ — 5
6. Principe politique..................................................................................... — 5
6.1 Le principe au regard de la loi Barnier....................................................... — 5
6.2 Les politiques au regard du principe de précaution ................................. — 5
7. Principe de précaution et expertise scientifique ............................ — 6
8. Point de vue de la Commission européenne .................................... — 7
9. Conclusion ................................................................................................. — 7
Références bibliographiques ......................................................................... — 8

e principe de précaution peut être considéré comme l’un des déve-


L loppements les plus remarquables du droit au cours de ces dernières
années. Né dans le contexte de la protection de l’environnement, il a essaimé
vers d’autres secteurs du droit. C’est aujourd’hui le principe du droit de l’envi-
ronnement le plus médiatisé. Son sens et sa portée n’en sont pas pour autant
parfaitement perçus. Ce principe apparaît même souvent malmené et tiraillé
entre ses défenseurs et ses opposants.
Le principe de précaution peut être considéré comme l’enfant naturel de
l’union incertaine du droit et de la science. Aujourd’hui, le scientifique interpelle
le politique et le politique s’appuie sur la science, lorsqu’une décision est à pren-
dre. Or, cette union manifeste la conjonction de deux faiblesses. D’une part, la
complexité des découvertes scientifiques et des interventions humaines induites
conduit paradoxalement à de lourdes incertitudes sur les effets de ces interven-
tions. D’un autre côté, la politique est affaiblie par l’effondrement des systèmes
de valeurs qui en constituent le fondement et par la mondialisation de l’écono-
mie. Ainsi, le pouvoir politique tend à se protéger en s’abritant derrière l’avis
d’experts, qui eux-mêmes sont en proie à l’incertitude et dont l’impartialité est
parfois mise en cause. Ainsi, l’opinion publique, plus ou moins éclairée par les
Parution : décembre 2003

médias, ressent intuitivement que la science et la technologie sont porteuses de


dangers potentiels et réclament aux dirigeants politiques de faire preuve de pru-
dence. L’acceptabilité sociale d’une expérimentation ou d’une technologie sem-

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Référence Internet
F1112

LE PRINCIPE DE PRÉCAUTION, APPROCHES CONCEPTUELLES ___________________________________________________________________________________

ble alors devenir le critère essentiel de la décision. Le principe de précaution


représente assez clairement la traduction juridique de cette situation. Il illustre
ainsi l’une des évolutions majeures du système juridique.
D’abord consacré en droit international et intégré dans plusieurs conventions,
il est inscrit depuis les années 1990 dans presque tous les traités d’environne-
ment, mais il a vocation à être appliqué dans tous les domaines touchant à la

1
sécurité des personnes.
Son « succès » ne clarifie pas pour autant la signification qui lui est donnée, ni
la portée qui lui est reconnue ou promise. Pour apporter quelques éclairages et
tenter de comprendre les actuels développements du principe de précaution, ce
document tente d’aborder ce principe sous différents angles : conceptuel, cultu-
rel, politique, économique, juridique, social et, bien sûr, scientifique.

1. Définitions préalables — risques inconnaissables (risques du développement) : principe


d’exonération ;
— risques suspectés : principe de précaution ;
Compte tenu que le principe de précaution n’est ni compris ni — risques avérés : principe de prévention ;
interprété de façon univoque, un retour sur le sens premier de quel- — risques réalisés : principe de réparation.
ques mots peut être utile.
Le danger est ce qui « menace ou compromet la sûreté, l’exis-
tence d’une personne ou d’une chose ». Le risque est un « danger
plus ou moins probable auquel on est exposé » (Robert, Larousse). 2. Évolution du concept
Un risque peut être potentiel ou avéré. Cette distinction s’inscrit
dans la démarche qui cherche à anticiper les risques. La personne
qui estime que le pire finit par arriver, comprend le risque potentiel 2.1 En droit international
comme risque avéré immature, en attente de réalisation. Cette affir-
mation est erronée ; c’est avant tout une approche en termes de pro-
Au début des années 1970, un changement d’approche en termes
babilités. Certes, les risques ont une histoire et beaucoup de risques
d’environnement se fait jour, notamment par le biais de fortes pres-
avérés ont commencé par être potentiels, mais beaucoup de risques
sions exercées par les pays occidentaux, au premier rang desquels
potentiels n’ont jamais été avérés. Enfin, il n’existe pas de risque
l’Allemagne [5]. L’idée d’un principe de précaution se développera
avéré nul mais un risque potentiel peut être nul.
par la suite en France et en Angleterre.
La prudence est « l’attitude qui consiste à peser à l’avance tous
Si le lieu de naissance juridique du principe de précaution s’avère
ses actes, à apercevoir les dangers qu’ils comportent et à agir de
difficile à déterminer, il est néanmoins possible d’en trouver les pre-
manière à éviter tout danger, toute erreur, tout risque inutile ».
miers énoncés dans des textes de droit international de l'environne-
La précaution est le fait de « prendre des dispositions par pré-
ment pour la protection de sites en présence de risques graves et
voyance pour éviter un risque ou pour limiter ses conséquences »
irréversibles, avec pour finalité de s’appliquer « avant même qu’un
(Robert, Larousse). En l’absence de certitude, la précaution consiste
lien de cause à effet soit formellement établi au plan scientifique ».
à privilégier la rigueur procédurale.
C’est une intervention susceptible de s’imposer dès qu’il y a doute
La précaution doit être distinguée de la prévention. La prévention concernant un risque important, justifiant d’une action encadrée,
est un comportement dans un univers de risques dont on connaît appelant cependant des mesures avec un coût économiquement
l’existence, auxquels on s’expose avec une probabilité plus ou acceptable.
moins grande. Il est possible de les identifier, de les qualifier, de les
Sa naissance résulte des alarmes (à partir des années 1980), rela-
hiérarchiser dans le but de s’en prémunir ou de se prémunir de leurs
tives à des phénomènes globaux sur la détérioration de la couche
conséquences. La précaution est un univers d’incertitude controver-
d’ozone et le réchauffement de la planète (gaz à effet de serre), ainsi
sée. On n’a ni la certitude du risque, ni la probabilité.
que la mise en évidence scientifique d’interdépendances (notam-
Le terme de principe ne doit pas être source de malentendu. ment celle du climat terrestre à l’égard de certaines conduites pour-
L’expression « principe de précaution » pourrait évoquer un principe tant localisées), qui ont conduit à concevoir les problèmes
général, théorique et déresponsabilisant là où on entend évoquer d’environnement à partir d’un cadre général, celui de la protection
des attitudes pratiques, responsables et adaptées à chaque cas par- de la biosphère terrestre (apparition de concept de développement
ticulier. L’expérience humaine, en matière de risques, a livré un cer- durable). C’est ainsi que le principe de précaution apparaît sur la
tain nombre de leçons qui permettent d’aboutir à un ensemble de scène internationale et acquiert un droit de citer dans de nombreux
règles ou de critères de la décision, auxquels se référer en situation traités multilatéraux et déclarations internationales.
de risque potentiel. Le principe de précaution est donc avant tout un
Le principe de précaution a ensuite été consacré par de nombreux
impératif.
textes internationaux, de valeurs juridiques inégales.
Les attitudes de précaution, malgré leurs différences, sont fon-
Toutefois, il n’existe pas de définition unique du principe de pré-
dées sur un même principe d’action qui invite à la vigilance en situa-
caution. Si certains éléments, qui restent eux-mêmes en quête d’uni-
tion d’incertitude. L’usage juridique, qui peut être fait du principe,
formité, s’avèrent aujourd’hui permanents, à savoir la présence d’un
porte donc à le regarder comme une règle ou un standard guidant
risque de dommages graves et/ou irréversibles, l’absence de certi-
l’action.
tude scientifique absolue quant à la réalité de ces dommages et,
Ces définitions permettent de construire une échelle des risques enfin, l’obligation de prendre des mesures de prévention, de petites
que l’on peut exprimer de la manière suivante [1] : ou de grandes nuances apparaissent au fil des définitions.

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F 1 112 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Agroalimentaire

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F1113

Plan de maîtrise sanitaire et HACCP

par Karine CANON


1
Directeur de l’Institut supérieur de l’alimentation – Département formation conseil
de la Société scientifique d’hygiène alimentaire (SSHA/ISA)

1. G+ s+ du PMS à travers la réglementation communautaire


et nationale ................................................................................................ F 1 113 - 2
1.1 Enjeux et obligations de la réglementation européenne.......................... — 2
1.2 Évolution de la réglementation française .................................................. — 2
2. Présentation générale d’un plan de maîtrise sanitaire.................. — 3
2.1 Définition et objectif..................................................................................... — 3
2.2 Éléments constitutifs du PMS : une structure pyramidale constituée
d’éléments en interaction ............................................................................ — 3
3. Présentation détaillée d’un PMS ......................................................... — 3
3.1 Bonnes pratiques d’hygiène ....................................................................... — 3
3.1.1 Quelques rappels sur les bonnes pratiques d’hygiène.................... — 3
3.1.2 Documents relatifs aux bonnes pratiques d’hygiène....................... — 4
3.1.3 Conclusion sur les bonnes pratiques d’hygiène............................... — 4
3.2 Plan HACCP .................................................................................................. — 4
3.2.1 Rappels concernant l’HACCP : les sept principes du Codex
Alimentarius et les douze étapes de mise en œuvre du système... — 4
3.2.2 Plan HACCP dans le plan de maîtrise sanitaire (PMS) ..................... — 9
3.2.3 Documents relatifs aux procédures fondées
sur les principes HACCP dans le PMS ............................................... — 9
3.3 Procédures de traçabilité et de gestion des produits non conformes
(retrait, rappel...)........................................................................................... — 10
3.3.1 Rappels sur les obligations en matière de traçabilité
pour les entreprises ............................................................................ — 10
3.3.2 Système de traçabilité et gestion des non-conformités
dans le PMS ......................................................................................... — 11
4. Conclusion.................................................................................................. — 12
Références bibliographiques.......................................................................... — 12

a réglementation européenne en matière de sécurité sanitaire des denrées


L alimentaires a considérablement évolué ces dernières années et renforcé la
responsabilité de tous les professionnels de la filière alimentaire. Plusieurs
textes réglementaires européens dont la « food law » et les textes du paquet
hygiène ont renforcé l’obligation de résultats déjà présente dans la nouvelle
approche européenne et ont amené les professionnels à repenser et à refor-
muler leurs systèmes de gestion des denrées alimentaires. Les objectifs fixés
aux professionnels par la réglementation sont de garantir l’innocuité des pro-
duits et de protéger la santé des consommateurs. C’est à eux de déterminer les
moyens à mettre en place pour atteindre ses objectifs. Parmi ces moyens, le
plan de maîtrise sanitaire (PMS) apparaît comme incontournable même s’il
n’est pas explicitement cité dans la réglementation européenne.
L’objectif de ce dossier est d’éclairer l’ensemble des acteurs de la filière
agroalimentaire sur le plan de maîtrise sanitaire (PMS) et plus particulièrement
la démarche HACCP : deux outils qui leur permettront d’atteindre les objectifs
Parution : mars 2008

fixés par la réglementation.

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est strictement interdite. – © Editions T.I. F 1 113 – 1

29
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F1113

PLAN DE MAÎTRISE SANITAIRE ET HACCP _______________________________________________________________________________________________

hygiène ». Le premier, le règlement (CE) no 852/2004, définit


Le lecteur pourra également consulter les dossiers [F 9 010] et les règles d’hygiène générales valables pour toutes les
[F 9 015] des Techniques de l’Ingénieur pour plus d’informa- denrées alimentaires, animales et végétales, et s’applique à
tions sur la démarche HACCP appliquée à l’industrie des l’ensemble de la filière y compris la production primaire et ses
viandes ou à la fabrication des glaces [4] [5]. activités connexes. Le second, le règlement (CE) no 853/2004,
précise le règlement (CE) no 852/2004 en ce qui concerne les
denrées alimentaires d’origine animale et apporte notamment
des précisions sur les modalités d’agrément des établisse-

1 1. Genèse du PMS à travers


ments. Ces deux règlements imposent, entre autres, aux pro-
fessionnels l’application des bonnes pratiques d’hygiène et
celle des principes HACCP selon le Codex Alimentarius.
la réglementation Nous reviendrons sur ces quatre éléments obligatoires (traçabi-
communautaire lité, gestion des non-conformités, bonnes pratiques d’hygiène et
principes HACCP) issus de l’analyse des textes réglementaires
et nationale européens puisque nous verrons que ce sont également les quatre
éléments constitutifs du plan de maîtrise sanitaire (PMS) imposé
par la réglementation française.
1.1 Enjeux et obligations
de la réglementation européenne 1.2 Évolution de la réglementation
Toutes les entreprises de l’agroalimentaire sont soumises à un française
contexte réglementaire européen nouveau et en pleine évolution
qui répond aux principes de la nouvelle approche réglementaire. L’arrêté ministériel du 8 juin 2006, relatif à l’agrément des éta-
Les objectifs essentiels de cette réglementation sont de : blissements mettant sur le marché des produits d’origine animale
– faciliter le retrait du marché des produits susceptibles de pré- ou des denrées contenant des produits d’origine animale (publié
senter un risque pour le consommateur (obligation de retrait au JO no 182 du 8 août 2006), vient compléter l’ensemble des
rapide et ciblé) ; textes réglementaires communautaires parus sous le titre « paquet
– et assurer la sécurité des consommateurs. hygiène ». Cet arrêté précise, outre le périmètre et les conditions
d’obtention de l’agrément, le contenu du dossier à établir pour son
La nouvelle approche réglementaire pose comme principes : obtention.
• La responsabilité clairement établie des exploitants vis-à-vis Selon l’arrêté ministériel du 8 juin 2006 et la note de service
de la sécurité sanitaire des denrées qu’ils mettent sur le DGAL/SDSSA/N2007-8013 du 11 janvier 2007 qui présente les
marché : à toutes les étapes de la chaîne alimentaire, « de la modalités d’application de l’arrêté, le dossier d’agrément doit
ferme à la table » ou de la « fourche à la fourchette », la comporter les éléments suivants :
responsabilité première en matière de sécurité des aliments
incombe au producteur des denrées. Depuis la production – les éléments descriptifs de l’établissement ;
primaire (élevage ou champ) jusqu’à la remise au – les éléments constitutifs de son PMS.
consommateur final, chaque exploitant doit s’assurer que la
sécurité des aliments n’est pas compromise. À toutes les Le plan de maîtrise sanitaire est donc défini réglementairement
étapes de cette chaîne, la responsabilité juridique de veiller à dans le cadre de l’agrément, mais son champ d’application est
la sécurité des denrées alimentaires incombe à l’exploitant. Il beaucoup plus large. Il est défini comme « le plan qui décrit les
doit se placer comme acteur face au risque alimentaire. mesures prises par l’établissement pour assurer l’hygiène et la
sécurité sanitaire de ses productions vis-à-vis des dangers biolo-
• La fixation par la réglementation d’objectifs à atteindre en giques, physiques et chimiques ». Il comprend les éléments
laissant le choix des moyens à l’initiative des professionnels : suivants :
le principe « d’imposer » est abandonné pour favoriser la
réflexion des professionnels sur leurs propres méthodes de – les prérequis ou bonnes pratiques d’hygiène ;
travail. Pour atteindre ses objectifs réglementaires, l’exploi- – un plan HACCP fondé sur les sept principes retenus par le
tant doit non seulement respecter les règles d’hygiène géné- règlement (CE) no 852/2004 [2] ;
rales établies réglementairement, mais également élaborer – la mise en place d’un système de traçabilité ;
des procédures propres à son entreprise qui seront fondées
– la gestion des non-conformités.
sur les principes de la méthode HACCP énoncée dans le
Codex Alimentarius (voir chapitre 3.2.1). Pour ce faire, Le plan de maîtrise sanitaire est donc l’un des éléments
l’exploitant peut s’appuyer sur des guides de bonnes pra- incontournables de tout établissement soumis à l’obligation
tiques d’hygiène et d’application des principes HACCP validés d’agrément sanitaire.
par les autorités compétentes (nationale ou communautaire
selon le cas). Cependant, et même s’il n’est pas une obligation réglementaire
au sens strict pour les autres établissements, l’ensemble de ces
La nouvelle réglementation européenne a posé le cadre des éléments constitutifs (traçabilité, gestion des non-conformités,
responsabilités et des obligations des professionnels qui peuvent bonnes pratiques d’hygiène et principes HACCP) restent bel et bien
se résumer ainsi : des obligations réglementaires qu’il faudra piocher dans les diffé-
• Règlement (CE) no 178/2002 [1] : règlement cadre depuis le rents règlements. Ces éléments ne sont d’ailleurs pas non plus
1er janvier 2005 qui instaure l’obligation de la mise en œuvre nouveaux. La nouveauté vient plus dans l’organisation des don-
d’un système de traçabilité à tous les stades de la production nées et dans leur formulation que dans les éléments eux-mêmes.
et de la transformation. Il définit également les modalités de L’ensemble de ces obligations est applicable aux établissements
gestion des non-conformités (procédure de retraits/rappels et du secteur alimentaire, agréés ou non, hors production primaire.
de notifications aux autorités nationales). Bonnes pratiques d’hygiène, plan HACCP, traçabilité et gestion des
• Règlements (CE) no 852/2004 [2] et no 853/2004 [3] : ces deux non-conformités seront donc regroupés pour tous dans ce qu’on
règlements, destinés aux professionnels, font partie de ce aura maintenant coutume d’appeler le « plan de maîtrise
qu’on appelle communément maintenant le « paquet sanitaire ».

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F1113

_______________________________________________________________________________________________ PLAN DE MAÎTRISE SANITAIRE ET HACCP

Les moyens de maîtrise pour les professionnels sont donc clas-


2. Présentation générale d’un sés en trois catégories :
plan de maîtrise sanitaire • Les bonnes pratiques d’hygiène ou BPH : elles concernent
l’ensemble des opérations destinées à garantir l’hygiène,
c’est-à-dire la sécurité et la salubrité des aliments. Elles
2.1 Définition et objectif comportent des opérations dont les conséquences sur le pro-
duit fini ne sont pas mesurables. Il s’agit, par exemple, de

1
l’organisation du suivi médical du personnel, du plan de lutte
Le plan de maîtrise sanitaire (PMS) décrit les mesures prises contre les nuisibles, du plan de nettoyage et de désinfection,
par l’établissement pour assurer l’hygiène et la sécurité sani- des règles d’hygiène à suivre par le personnel, etc.
taire de ses productions vis-à-vis des dangers biologiques, phy-
siques et chimiques. • Le plan HACCP : son application est strictement limitée à la
sécurité des aliments. Il repose sur le fait que les mesures de
maîtrise ont des effets mesurables sur le produit fini.
Il comprend les éléments nécessaires à la mise en place et les
preuves de l’application : • Les procédures de traçabilité et de gestion des non-conformi-
tés : elles permettent la mise en œuvre effective des plans de
– des bonnes pratiques d’hygiène ou prérequis ;
retraits ou de rappels.
– du plan HACCP fondé sur les sept principes retenus par le
règlement (CE) no 852/2004 ;
– de la gestion des produits non conformes (procédure de
retrait/rappel) ;
– de la mise en place d’un système de traçabilité. 3. Présentation détaillée
Le PMS est l’outil pour atteindre les objectifs de sécurité sani-
taire des aliments et notamment ceux des règlements (CE)
d’un PMS
no 178/2002, no 852/2004 et no 853/2004 (voir § 1.1).
3.1 Bonnes pratiques d’hygiène
2.2 Éléments constitutifs du PMS :
3.1.1 Quelques rappels sur les bonnes pratiques
une structure pyramidale constituée d’hygiène
d’éléments en interaction
Elles concernent l’ensemble des opérations destinées à garantir
Le plan de maîtrise sanitaire peut être schématisé sous la forme l’hygiène dans un établissement, c’est-à-dire la sécurité et la salu-
d’une pyramide (figure 1) ; celle-ci montre clairement la place pré- brité des aliments. Pour éclairer cette première approche, il appa-
pondérante des bonnes pratiques d’hygiène dans le système de raît tout d’abord nécessaire de préciser la définition de certains
maîtrise. Les bonnes pratiques d’hygiène constituent les prérequis termes.
sans lesquels le système, et notamment le plan HACCP, n’aurait
aucune efficacité dans la maîtrise de la sécurité sanitaire.
Les différents éléments constitutifs du plan de maîtrise sanitaire D’après la norme AFNOR NF V01-002 d’août 2003 – Hygiène
ne sont donc pas totalement indépendants les uns des autres. des aliments Glossaire français-anglais, nous retiendrons les
L’interaction des bonnes pratiques d’hygiène et de l’HACCP est définitions suivantes :
d’ailleurs essentielle dans l’identification et la gestion des moyens – Sécurité (innocuité) des aliments : « assurance que les ali-
de maîtrise. L’analyse des dangers (1er principe de l’HACCP, voir ments ne causeront pas de dommage au consommateur quand
§ 3.2) et l’identification des mesures de maîtrise permettent de dis- ils sont préparés et/ou consommés conformément à l’usage
tinguer les mesures qui feront partie des bonnes pratiques auquel ils sont destinés ».
d’hygiène de celles qui rentreront dans le plan HACCP. C’est la – Salubrité des aliments : « assurance que les aliments quand
cohérence générale du système qui en fait son efficacité. ils sont consommés conformément à l’usage auquel ils sont
destinés, sont acceptables pour la consommation humaine ».
– Hygiène des aliments : « ensemble des conditions et des
mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la salubrité des
aliments à toutes les étapes de la chaîne alimentaire ».

Afin d’établir la liste complète de ces opérations, il est néces-


saire d’analyser l’organisation et le fonctionnement de l’établisse-
ment étape par étape. Il peut être intéressant pour établir la liste
Traçabilité
et gestion des
exhaustive de ces opérations d’utiliser la méthode des 5M, connu
non-conformités aussi sous le nom de diagramme d’Ishikawa et qui consiste à
passer en revue selon cinq familles (main d’œuvre, milieu, maté-
riel, matière et méthode) l’ensemble des causes qui expliquent un
phénomène. Transposée à notre problématique d’hygiène, la
Plan HACCP méthode des 5M permettra de connaître l’ensemble des prérequis
à gérer pour garantir l’hygiène recherchée.
• Le milieu ou les locaux : leur propreté, leur conformité et leur
Bonnes pratiques d'hygiène
utilisation (marche en avant dans le temps ou dans l’espace).
• Le matériel ou les équipements : leur maintenance et leur pro-
Plan de maîtrise sanitaire preté par exemple.
• La main d’œuvre ou le personnel : la qualification, le plan de
Figure 1 – Plan de maîtrise sanitaire formation, la tenue vestimentaire, le suivi médical.

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est strictement interdite. – © Editions T.I. F 1 113 – 3

31
1

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Référence Internet
F1114

L’analyse du risque alimentaire :


vers de nouvelles pratiques
1
par Bernard CHEVASSUS-AU-LOUIS
Directeur de recherches à l’INRA
Président du Muséum national d’Histoire naturelle

1. Contexte : crise de l’expertise ............................................................. F 1 114 – 2


2. Modèle standard et ses options........................................................... — 2
3. Crise du modèle standard et émergence du principe de précaution — 3
3.1 Regard critique de la société ...................................................................... — 3
3.2 Interrogations internes à la science ........................................................... — 3
4. Modalités d’une décision « fondée sur le principe
de précaution »......................................................................................... — 4
4.1 Proportionnalité ........................................................................................... — 4
4.2 Cohérence .................................................................................................... — 4
4.3 Réversibilité ................................................................................................. — 4
4.4 Caractère comparatif ................................................................................... — 5
5. Principe de précaution et évaluation du risque .............................. — 5
5.1 Identification des aléas : élargir la vision .................................................. — 5
5.2 Quantification des incertitudes : concept de plausibilité ......................... — 6
5.3 Deux concepts complémentaires : réductibilité et observabilité............. — 7
5.4 Analyse des bénéfices : pour une expertise économique et sociale....... — 7
5.5 Organisation de la vigilance : une dimension de l’évaluation................. — 7
5.6 Conclusion : un principe pour l’évaluation comme pour la gestion ....... — 7
6. Principe de précaution et participation de la société civile........ — 7
6.1 Quelle lecture pour la « crise de l’expertise » ? ........................................ — 8
6.2 Quelles modalités d’interaction entre experts et société civile ? ............ — 8
7. Conclusion ................................................................................................. — 10
Références bibliographiques ......................................................................... — 11

es structures d’expertise des pays développés ont longtemps réalisé leur


L travail d’analyse du risque sanitaire des aliments selon un modèlè
« standard », élaboré pour l’analyse d’autres risques technologiques et dont
nous rappellerons tout d’abord les caractéristiques et les principales options.
Depuis le début des années quatre-vingt, l’observation d’un certain nombre de
dysfonctionnements dans la chaîne de l’alimentation a suscité dans l’opinion
publique de plusieurs pays un scepticisme croissant sur la valeur de ce modèle. Le
principe de précaution a donc été proposé comme un nouveau fil conducteur pour
améliorer l’analyse du risque alimentaire. Nous en présenterons tout d’abord les
conséquences sur la gestion du risque, en nous basant sur la définition
« proportionnée » du principe de précaution qui émerge actuellement en Europe.
Nous remonterons ensuite au niveau de l’évaluation des risques, pour montrer
comment les nouvelles demandes des gestionnaires pour une bonne application
du principe de précaution ont des conséquences importantes sur la démarche
Parution : mars 2005

d’évaluation elle-même.

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33
Référence Internet
F1114

L’ANALYSE DU RISQUE ALIMENTAIRE : VERS DE NOUVELLES PRATIQUES ? ________________________________________________________________________

Enfin, nous interrogerons la vision « standard » de la communication du ris-


que, conçue comme la dernière phase du processus d’analyse de risque. Nous
montrerons en quoi une contribution active de représentants de la société civile
dès les phases d’évaluation et de gestion peut permettre à la fois d’améliorer la
qualité et l’acceptabilité de l’analyse de risque.
L’application du principe de précaution a donc des conséquences non pas sur
une seule mais sur les trois phases de l’analyse du risque. L’ensemble de ces
1 modifications permet de proposer un modèle alternatif, dit « constructiviste »,
qui, dans le cas du risque alimentaire, peut contribuer à une meilleure accepta-
bilité par la société des rares, mais inévitables, dysfonctionnements de la pro-
duction de nos aliments.

1. Contexte : 2. Modèle standard


crise de l’expertise et ses options
Nous poserons d’emblée une définition pour cadrer l’objectif glo- Le modèle « standard » de l’analyse de risque, dont on peut trouver
bal de l’analyse de risque : Dans un pays démocratique, l’objectif notamment l’énoncé dans les procédures de travail du « Codex
d’un système d’analyse de risque est de permettre aux citoyens de alimentarius » (organisation mixte de la FAO (Food and Agriculture
vivre dans une société où, d’une part, les risques qui les préoccu- Organization) et de l’organisation mondiale de la santé OMS propo-
pent sont perçus, reconnus et effectivement réduits par les sant des normes internationales en termes de sécurité sanitaire des
décideurs à un niveau socialement accepté et, d’autre part, les ris- aliments) [1], décompose la démarche en trois volets distincts, l’éva-
ques qu’ils ne perçoivent pas font l’objet d’une vigilance efficace luation des risques, la gestion des risques et la communication sur les
permettant de les détecter et d’alerter les citoyens suffisamment tôt. risques. Outre cette décomposition, il repose sur plusieurs options
théoriques ou opérationnelles, implicites ou explicites, qu’il est utile
Dans cette optique, depuis les années cinquante, la plupart des
de rappeler rapidement pour en percevoir le caractère contingent.
pays développés ont mis en place des structures d’expertise pour
analyser les différents aspects de la sécurité sanitaire des aliments, La première option est celle de l’évaluation au cas par cas. Ainsi,
liés à des modifications de leur composition, de leurs procédés de dans le cas des OGM (organismes génétiquement modifiés) ou des
fabrication ou aux modes de production des matières premières additifs alimentaires, chaque dossier est examiné indépendam-
agricoles. Ces structures d’expertise ont longtemps réalisé leur travail ment, l’hypothèse sous-jacente étant le caractère additif des effets
d’analyse de risque selon un modèle « standard » , élaboré cumulés, c’est-à-dire que l’utilisation conjointe de plusieurs OGM
pour l’analyse d’autres risques technologiques et dont nous ou additifs aura un effet voisin de la somme de leurs effets indivi-
rappellerons tout d’abord les caractéristiques et les principales duels. Plus précisément, les effets d’interaction éventuels sont
options. considérés comme faibles et pris en compte par les marges de sécu-
rité de l’évaluation de chaque risque. Bien adapté à des risques
Depuis le début des années quatre-vingt, l’observation d’un cer-
directs, simples (ayant un petit nombre de causes possibles bien
tain nombre de dysfonctionnements dans la chaîne de l’alimenta-
identifiées) et indépendants, cette option permet le travail « en
tion, pouvant avoir des conséquences graves pour la santé
continu » des experts, une nouvelle innovation n’obligeant pas à
humaine, a suscité dans l’opinion publique de plusieurs pays une
reconsidérer l’ensemble du système.
interrogation et un scepticisme croissant sur la valeur de ce modèle.
Le principe de précaution, initialement défini et mis en œuvre dans La seconde option est de ne considérer que des dangers avérés,
le domaine des risques environnementaux, a donc été proposé c’est-à-dire dont les liens de causalité avec des effets négatifs sont
comme un nouveau fil conducteur pour l’analyse du risque alimen- scientifiquement démontrés et admis par l’ensemble de la commu-
taire. Nous en présenterons tout d’abord les conséquences sur la nauté scientifique. De ce fait, l’évaluation des risques n’est réalisée
gestion du risque, en nous basant sur la définition que par des experts scientifiques et ne porte que sur des liens que la
« proportionnée » du principe de précaution qui émerge actuelle- science a examinés et établis. La liste de ces dangers étant consen-
ment en Europe. suelle, le débat se focalisera donc surtout sur les probabilités
d’occurrence et d’exposition. La « valeur » associée à un risque sera
Nous remonterons ensuite au niveau de l’évaluation des risques,
donc généralement une quantité (nombre de décès, pertes financiè-
pour montrer comment les nouvelles demandes des gestionnaires
res) définie à partir de ces probabilités.
pour une bonne application du principe de précaution ont des con-
séquences importantes sur la démarche d’évaluation elle-même. La troisième option est de séparer clairement les phases d’évalua-
tion et de gestion du risque. L’une des conséquences est de con-
Enfin, nous interrogerons la vision « standard » de la communica-
duire souvent à une évaluation des risques faisant l’hypothèse que
tion du risque, conçue comme la dernière phase du processus
les mesures de gestion et de contrôle qui en découleront seront par-
d’analyse de risque. Nous montrerons en quoi une contribution
faitement appliquées. Nous utiliserons le terme de « risques
active de représentants de la société civile dès les phases d’évalua-
asymptotiques » pour désigner ces risques minimums.
tion et de gestion peut permettre à la fois d’améliorer la qualité de
l’analyse de risque et d’assurer une meilleure acceptabilité par la Une quatrième option est de ne confier aux experts que l’éva-
société des rares, mais inévitables, dysfonctionnements de la pro- luation des risques, sans leur demander d’évaluer également les
duction de nos aliments. avantages éventuels liés à l’innovation et de réaliser une

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
F 1 114 − 2 © Techniques de l’Ingénieur

34
Référence Internet
F1114

________________________________________________________________________ L’ANALYSE DU RISQUE ALIMENTAIRE : VERS DE NOUVELLES PRATIQUES ?

comparaison des coûts et des bénéfices. L’introduction de ces élé- que l’on appelle les « erreurs humaines » sont plus souvent incrimi-
ments complémentaires est donc implicitement renvoyée à la res- nées que des défaillances du matériel. Dès lors que cette dimension
ponsabilité du décideur politique, sans que soient précisés les devient prépondérante, ne faut-il pas l’intégrer explicitement dans
outils à mettre en œuvre pour réaliser cette comparaison avanta- l’analyse de risque, en considérant globalement les systèmes tech-
ges/désavantages. niques comme des « hybrides homme-machine », tels que défini
Enfin, en terme de communication du risque, ce modèle consi- par B. Latour [4] ?
dère que les experts évaluent le risque « réel » et que la perception — le fait de négliger les effets d’interaction et de système en se limi-

1
du risque par la société (le risque « perçu ») est plus grossière et iné- tant à l’évaluation au cas par cas est une autre cause possible de sous-
vitablement entachée de subjectivité. L’objectif de la communication évaluation des risques. Ainsi, l’apparition de bactéries multirésistantes
sur le risque est donc de réduire cette distorsion en amenant le aux antibiotiques est un véritable problème de santé publique, alors
citoyen à percevoir le risque réel. que tous les antibiotiques ont été correctement et individuellement
On peut donc qualifier ce modèle standard de : évalués avant leur mise sur le marché. C’est l’utilisation conjointe et
non organisée de ces antibiotiques qui a conduit à la sélection involon-
— positiviste, car il est entièrement et strictement fondé sur les taire de ces bactéries « improbables ». La question des risques liés à la
acquis indiscutables de la science ; culture simultanée ou successive d’OGM variés sur un territoire donné
— quantitatif, car il propose une évaluation du risque en terme se pose en termes similaires et ne peut être traitée uniquement par
de grandeurs chiffrées ; l’examen individuel des caractéristiques de chaque OGM.
— réductionniste, car, d’une part, il limite son champ au risque
technique en l’absence de dysfonctionnements humains (les ris-
ques asymptotiques) et, d’autre part, il considère les risques comme
strictement additifs et néglige les effets d’interactions ; 3.2 Interrogations internes à la science
— technocratique, car il est basé essentiellement sur des experts
techniques et ne fait intervenir les citoyens que comme des
« récepteurs » d’informations.
Parallèlement à cette critique externe et empirique de l’expertise
se développait une critique endogène à la science, portant sur sa
capacité à évaluer véritablement le comportement de phénomènes
complexes, dès lors qu’ils se réalisaient dans des conditions très dif-
3. Crise du modèle standard férentes du laboratoire. Parmi les limites identifiées par la science
et émergence du principe elle-même figurent en particulier les points suivants.
– La prise en compte des temps longs. La théorie des systèmes
de précaution dynamiques non-linéaires, popularisée par la notion de chaos déter-
ministe, montre que l’évolution à long terme de tels systèmes
devient totalement imprévisible au-delà d’un certain horizon tempo-
rel, dès lors qu’une modification infime des conditions initiales
3.1 Regard critique de la société change complètement la situation finale. C’est la fameuse image de
l’effet d’une aile de papillon sur le déclenchement de cyclones et il
est hélas difficile de dire a priori si un système, même relativement
Au cours des années quatre-vingt, plusieurs crises sanitaires sont simple, obéit à de telles dynamiques.
apparues dans les domaines médicaux (sang contaminé), alimen-
taires (encéphalopathie spongiforme bovine ESB, listeriose, L’un des exemples les plus simples de système imprévisible à long
dioxine...) et environnementaux (amiante, Sevezo...). Crises politi- terme est le devenir de plus de deux corps en interaction gravitation-
ques et sociales, ces crises sont également apparues comme des nelle, comme par exemple le système solaire.
crises de l’expertise, dans la mesure où les phénomènes en cause
semblent avoir été sous-estimés, voire parfois franchement ignorés, – La prise en compte des espaces hétérogènes, dans lesquels
au moins à l’origine, par les experts. Si l’on analyse ces défaillances certains processus ne peuvent être prédits par la mesure de para-
de l’expertise, plusieurs causes peuvent être identifiées : mètres statistiques simples du milieu (densité moyenne) et
nécessite donc des études empiriques en situation réelle. C’est par
— dans certains domaines, le rythme de la recherche peut avoir
exemple le cas de la propagation des incendies de forêt ou de la
des difficultés à suivre le rythme des innovations. Le rapport Kou-
percolation des polluants dans les sols. Dans le domaine alimen-
rilsky-Viney [2] estime par exemple que 7 % des molécules chimi-
taire, ce sera la prolifération de bactéries dans un milieu de texture
ques sont aujourd’hui correctement évaluées pour leurs effets sur la
complexe (et la fixation des dates limites de conservation qui en
santé ou l’environnement. De nombreuses relations sont encore à
résultent), ou la dispersion du pollen des plantes transgéniques
l’état d’hypothèses de travail et le temps nécessaire à leur validation
dans un écosystème réel. Là aussi, des phénomènes non-linéaires,
est souvent important (cas des effets de l’amiante, de la transmis-
en particulier des effets de seuil, apparaissent, les processus pou-
sion à l’homme de l’ESB). L’émergence de plus en plus fréquente de
vant changer considérablement pour de faibles fluctuations des
controverses scientifiques montrant les désaccords entre experts
paramètres du milieu.
(effets des résidus d’hormones ou de pesticides, impacts des
OGM...) souligne l’importance de cette partie immergée de l’iceberg – Les problèmes d’extrapolation, par exemple pour estimer l’effet
de la connaissance scientifique et brise l’image d’une science con- de faibles doses d’une substance chimique ou biologique chez
sensuelle et certaine, même si certains nient parfois l’existence de l’homme, dès lors que l’on ne dispose que de modèles animaux et
telles fêlures [3] ; de quelques points accidentels à forte dose chez l’homme. Selon
— le caractère asymptotique de l’évaluation du risque par les que l’on optera pour un modèle linéaire ou non, passant ou non par
experts élimine de fait des risques liés aux conditions concrètes des l’origine, les conséquences pourront être très différentes sur l’éva-
activités humaines. Le risque de recyclage des huiles usagées était luation du risque sans qu’il soit vraiment possible de valider l’un ou
intrinsèquement faible si ce recyclage avait été parfaitement l’autre modèle sur la base des données disponibles.
contrôlé ; la viande bovine ne présente peut-être aucun danger de Si l’on admet l’existence d’une dose minimale sans effet, on peut estimer cette dose par
transmission de l’ESB si elle est parfaitement débarrassée des tissus la valeur de l’intersection de la droite de régression dose/effet avec l’axe horizontal. Si l’on
à risque... Il apparaît en outre que, dans beaucoup de risques tech- considère, comme pour les substances classées cancérigènes, que toute dose a un effet, on
nologiques, la dimension purement technique est un facteur de ris- calcule une régression dose/effet par une droite passant par l’origine. Dans le premier cas,
des variations de résidus au-dessous de la dose minimale sans effet sont supposées
que négligeable par rapport à ceux liés à l’interaction entre l’homme n’avoir aucune incidence. Dans le deuxième cas, ces variations sont au contraire suscepti-
et la technique : dans le transport ou dans l’industrie nucléaire, ce bles de se traduire par des variations de morbidité.

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Responsabilité juridique
des acteurs de la filière alimentaire
1
par Étienne RIONDET
Docteur en Droit, Avocat à la cour de Paris, Cabinet RIONDET associés

Cet article est la réédition actualisée de l’article éponyme du même auteur paru en 2002

1. Contexte : un millefeuille législatif foisonnant ............................ F 1 115v2 - 2


2. Responsabilité civile............................................................................. — 3
2.1 Responsabilité du fait de produits défectueux ....................................... — 3
2.2 Responsabilité objective........................................................................... — 3
2.3 Conditions de responsabilité si produits défectueux............................. — 3
2.4 Acteurs de la responsabilité ..................................................................... — 4
2.5 Exonérations de la responsabilité ........................................................... — 5
2.6 Sanctions – Réparation ............................................................................. — 5
3. Responsabilité pénale .......................................................................... — 6
3.1 Responsabilité pénale de droit commun ................................................ — 6
3.2 Infractions spécifiques .............................................................................. — 7
4. Surveillance des acteurs par l’Administration.............................. — 9
4.1 Champ d’intervention de l’Administration ............................................. — 9
4.2 Pouvoirs de l’Administration ................................................................... — 10
5. Conclusion............................................................................................... — 10
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. F 1 15v2

e champ de la production et de la commercialisation des produits alimen-


L taires ne peut pas échapper au droit. La loi du 1er août 1905 pose les bases
de la répression des fraudes dans la vente des marchandises et des falsifica-
tions des denrées alimentaires et des produits agricoles.
Sous les doubles influences de l’évolution des sociétés et des mentalités et
sous la force dynamique du droit communautaire, le droit français s’est enrichi
des principes modernes de précaution et de sécurité.
L’objet de cet article est de dresser un panorama de cet ensemble de règles
qui concourt à la responsabilité des acteurs de la filière alimentaire.
Parution : septembre 2013

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RESPONSABILITÉ JURIDIQUE DES ACTEURS DE LA FILIÈRE ALIMENTAIRE ______________________________________________________________________

1. Contexte : un millefeuille ■ Rôle de l’ANSES


Sa mission va plus loin que la simple santé humaine pour
législatif foisonnant appréhender de manière globale les expositions auxquelles
l’homme peut être soumis à tous âges et moments de sa vie : tra-
L’évocation de la responsabilité d’un producteur ou d’un distri- vail, domicile, déplacement, loisirs, etc.
buteur de produits alimentaires renvoie à l’intoxication liée à Indépendamment de cet aspect administratif, coexiste et se
l’ingestion d’un aliment vicié ou périmé.

1
développe de façon croissante une approche du phénomène par le
L’intoxication alimentaire, sauf comportement fautif du droit, et ce, dans toutes ses composantes.
consommateur (non-respect des dates de limite de péremption,
Si l’intoxication alimentaire renvoie à la faute et à la responsabi-
par exemple), repose sur le développement discret de micro-orga-
lité du producteur et du consommateur, c’est par l’appréhension
nismes pathogènes et/ou la présence dans l’aliment de
des règles classiques de la responsabilité civile.
contaminants chimiques ou biologiques.
Ils ne sont pas décelables par le consommateur. Bien souvent,
ils n’altèrent ni l’apparence, ni le goût, ni l’odeur de l’aliment ; Celle-ci est fondée sur des principes relativement simples,
celui-ci est consommé de façon tout à fait normale et naturelle. ceux du Code civil énoncés à l’article 1382, qui définit la res-
Surviennent alors les symptômes classiques : douleurs abdomi- ponsabilité en termes généraux : « Tout fait quelconque de
nales, coliques, diarrhées, vomissements, etc. Dans certains cas l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la
(salmonellose majeure, listériose...) l’hospitalisation est de mise. faute duquel il est arrivé, à le réparer ».
Rarement l’intoxication conduit au décès. Ces dispositions sont complétées par les dispositions de
l’article 1383 qui rend chacun « responsable du dommage
causé par sa négligence ou son imprudence ».
On considère cependant que 9 000 personnes décéderaient Quant à l’article 1384, il rend responsable toute personne qui
chaque année aux États-Unis à la suite d’intoxications alimen- cause un dommage, du fait des choses « que l’on a sous sa garde ».
taires.
En France, on en décompterait environ un millier par an.
Ces dispositions ont traditionnellement permis, et permettent
toujours du reste, la mise en cause de la responsabilité juridique
Fort heureusement, de nombreuses intoxications alimentaires des acteurs de la filière alimentaire.
sont sans gravité. On estime que seul un cas sur cent infections
serait rapporté aux autorités sanitaires. Las, le législateur est allé encore plus loin. Et ce, par l’introduc-
tion d’un concept juridique moderne, à savoir la notion
■ Création de l’ANSES d’« obligation de sécurité et de résultat ».
Cependant, en ces temps de consumérisme croissant, les autori-
tés ont estimé nécessaire de créer une agence dédiée : l’Agence ■ Notion d’obligation de sécurité et de résultat
nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environne- Cette innovation conceptuelle a donné lieu à la rédaction d’un
ment et du travail (ANSES). Voir site internet dans le Pour en corpus législatif incorporé au Code civil sous les articles 1386-1 à
savoir plus. 1386-18. Ces dispositions instituent une sorte de responsabilité de
Cet organisme public à caractère administratif est placé sous la plein droit du producteur au nom du principe de sécurité.
tutelle conjointe des ministères chargés de la santé, de l’agricul-
À côté de ces règles de droit civil (figure 1), qui ont pour but la
ture, de l’environnement, du travail et de la consommation.
réparation du préjudice par une indemnisation sous forme de dom-
Créé en juillet 2010, il est le fruit de la fusion de l’AFSSA mages et intérêts, subsiste tout le champ de la responsabilité pénale
(Agence française de sécurité sanitaire des aliments) et de l’AFS- qui a pour origine historique la grande loi du 1er août 1905 sur « la
SET (Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et répression des fraudes dans la vente des marchandises et des falsi-
du travail). fications des denrées alimentaires et des produits agricoles ».

LA RESPONSABILITÉ CIVILE

RESPONSABILITÉ DU FAIT DES RESPONSABILITÉ DU FAIT DES VICES


PRODUITS DÉFECTUEUX CACHÉS

SANCTIONS : DOMMAGES ET
INTÉRÊTS

Figure 1 – Responsabilités associées à la responsabilité civile

F 1 115v2 – 2 Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés

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______________________________________________________________________ RESPONSABILITÉ JURIDIQUE DES ACTEURS DE LA FILIÈRE ALIMENTAIRE

■ Service de la répression des fraudes Ainsi, la victime n’aura pas à prouver une faute du fabricant, et
Comme conséquence pratique à cette loi qui fonde, d’une cer- ce, à la différence du régime classique des articles 1382 et suivants
taine façon, le droit de la consommation a été créé le service de la du Code civil, ce qui démontre une nouvelle fois sa supériorité.
répression des fraudes (1907). Dès lors que la victime fait état d’un dommage et que ce dom-
Aujourd’hui, c’est la Direction générale de la concurrence, de la mage est relié à un défaut du produit, quel qu’il soit, la responsa-
consommation et de la répression des fraudes, et son corps d’ins- bilité de l’acteur est encourue.
pecteurs, qui en assume la continuité. Ces inspecteurs des fraudes Cette loi représente le point d’orgue de l’évolution de la jurispru-

1
sont les principaux acteurs de la détection des infractions, et de dence française.
leur poursuite devant les juridictions répressives.
De son côté, l’Administration ne demeure pas en reste puisqu’
elle joue un rôle important de contrôle et de surveillance. Dans un arrêt du 3 mars 1998, la Cour de cassation avait
indiqué : « le fabricant est tenu de délivrer un produit exempt
En définitive, on est en présence d’un empilement de textes juri- de tout défaut de nature à causer un danger pour les person-
diques et administratifs divers qui dirigent la matière. nes ou les biens, c’est-à-dire un produit qui offre la sécurité à
■ Contexte de l’article laquelle on peut légitimement s’attendre » (Cour de cassation,
1re chambre civile, 3 mars 1998, no 96-12.078).
L’objet de cet article est de présenter un schéma clair et classique
d’un point de vue pratique.
L’angle retenu est celui de l’acteur : La législation consacre le principe prétorien de sécurité de
– sa responsabilité civile est en jeu : il s’expose à des dommages résultat [2].
et intérêts ; Ce principe est concrétisé et inscrit dans le marbre de la loi par
– sa responsabilité pénale est en jeu : il s’expose à des peines l’article 1386-1 du Code civil.
d’amende ou/et de prison ;
– sa responsabilité réglementaire est en jeu : il s’expose à des
mises en garde et/ou à des sanctions administratives.
2.3 Conditions de responsabilité si
produits défectueux
2. Responsabilité civile
2.3.1 Produit
2.1 Responsabilité du fait des produits La définition du produit est particulièrement intéressante et per-
défectueux tinente dans le cadre de la filière agricole, puisque le produit est
C’est sous la pression de la Communauté européenne que le défini comme « tout bien meuble, même s’il est incorporé dans un
législateur français a modifié le Code Napoléon en ajoutant pas immeuble, y compris les produits du sol, de l’élevage, de la chasse
moins de 18 articles, les articles 1386-1 à 1386-18. et de la pêche. »
Leur positionnement dans le Code civil n’est pas innocent. Ils La directive européenne avait laissé le choix à chaque pays
viennent immédiatement après les articles 1382 et suivants qui d’inclure ou non dans le champ d’application de la loi les matières
traitent de la responsabilité de façon traditionnelle. premières agricoles.
Le système introduit aux articles 1386-1 et suivants, par la loi du La France a décidé de les inclure. À l’époque, on se souvient que
19 mai 1998 vient compléter le système traditionnel français fondé le public était fortement traumatisé par la crise de l’encéphalite
sur l’article 1382 du Code civil. bovine spongiforme.
De fait, cependant les dispositions classiques ont perdu de leur Les associations de consommateurs souhaitaient fortement
intérêt. l’inclusion des matières premières agricoles dans le champ de la
En effet, si par souci (peut-être) de ne pas vexer, ne serait-ce que loi.
de façon posthume, les auteurs du Code Napoléon, la loi du 19
mai 1998 a permis aux victimes de continuer à se prévaloir du
régime de la responsabilité contractuelle, et extracontractuelle, du 2.3.2 Produit défectueux
droit commun.
C’est le fondement objectif de la responsabilité. Un produit est
Mais cette précaution est bien inutile : on imagine difficilement considéré défectueux dès lors « qu’il n’offre pas la sécurité à
un consommateur se priver d’invoquer les dispositions des articles laquelle on peut légitimement s’attendre » (article 1386-4).
1386-1 et suivants, introduites dans le droit français par la loi du 19
mai 1998, en application de la directive communautaire du 25 Cette définition est beaucoup plus large que celle du droit
juillet 1985 sur la responsabilité du fait des produits défectueux. commun (article 1641 et suivants du Code civil). Elle prend en
Ces textes étaient dès le départ voués à un grand succès [1]. considération le simple défaut du produit, et non pas sa capacité à
Ce succès est confirmé par la jurisprudence si tant est que les rendre ou non le service que l’on attend.
conditions de la responsabilité, du fait de produits défectueux, En ce sens, là aussi, le renforcement du caractère objectif de la
sont larges et ouvertes. loi est patent.

2.2 Responsabilité objective Mais, la notion de produit est également entendue de façon
extensible.
La loi pose le principe de la responsabilité objective du produc-
teur. L’article 1386-4, alinéa 2, précise que « dans l’appréciation de
la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre, il doit
être tenu compte de toutes les circonstances, et notamment
Le texte ne saurait être plus clair : article 1386-1 du Code de la présentation du produit, de l’usage qui peut en être rai-
civil : « le producteur est responsable du dommage causé par sonnablement attendu, et du moment de sa mise en
un défaut de son produit... » circulation. »

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Prévention contre les fraudes


dans l’agroalimentaire
1
par Anne-Gaëlle MELLOUËT
Directrice mission d’intérêt général
CTCPA, Site Agroparc, Avignon, France

1. Contexte............................................................................................... F 1 117 - 2
1.1 De l’histoire ancienne ........................................................................... — 2
1.2 Années 2000 : la prise de conscience.................................................. — 2
2. Aspects réglementaires et juridiques.......................................... — 4
2.1 Contexte juridique français .................................................................. — 4
2.2 Position de l’Union européenne .......................................................... — 4
3. Position des acteurs de la chaîne agroalimentaire
(distributeurs) ..................................................................................... — 4
3.1 Le GFSI................................................................................................... — 4
3.2 Référentiels............................................................................................ — 5
4. Définitions et types de fraudes..................................................... — 5
4.1 Définitions.............................................................................................. — 5
4.2 Différents types de fraudes .................................................................. — 5
5. Mise en place d’un plan de lutte contre les fraudes –
Une méthodologie par étape.......................................................... — 7
5.1 Création d’une équipe « lutte contre les fraudes » ............................ — 7
5.2 Cartographie de la chaîne d’approvisionnement
(matière/marché/fournisseurs)............................................................. — 7
5.3 Veille sur les risques de fraudes et les possibilités de détection...... — 7
5.4 Évaluation et identification des points de vulnérabilité
de la chaîne............................................................................................ — 9
5.5 Mise en œuvre et surveillance des mesures de maîtrise du plan
de réduction de la fraude ..................................................................... — 10
5.6 Mise à jour et revue du système de lutte contre les fraudes ............ — 10
6. Conclusion........................................................................................... — 11
7. Glossaire .............................................................................................. — 11
8. Sigles .................................................................................................... — 12
Pour en savoir plus .................................................................................... Doc. F 1 117

i les cas de fraudes alimentaires sont aussi anciens que le commerce des
S denrées lui-même, la médiatisation de certaines crises ces dernières
années a fortement éprouvé la confiance des consommateurs.
Conscient de la vulnérabilité de la chaîne alimentaire vis-à-vis des fraudes, le
Parlement européen a souligné dès 2014 les points faibles de l’Europe à ce
sujet. Depuis, les différents acteurs du secteur se sont mobilisés pour mettre
en œuvre des dispositifs permettant de lutter contre les fraudes et de garantir
ainsi la conformité aux exigences des réglementations du paquet hygiène.
Différentes catégories de fraudes existent dont la substitution, la dissimula-
tion, la dilution, et l’étiquetage frauduleux. Si elles ne présentent pas toutes un
Parution : décembre 2020

risque sanitaire, elles sont toutes intentionnelles et liées à une volonté de gain
économique.

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PRÉVENTION CONTRE LES FRAUDES DANS L’AGROALIMENTAIRE ____________________________________________________________________________

La position du Global Food Safety Initiative (GFSI) sur le sujet, ainsi que les
exigences des différents référentiels de SMSDA (Système de management de
la sécurité des denrées alimentaires) privés (IFS et BRC), demandent aux
industriels de réaliser une analyse de leur vulnérabilité vis-à-vis des fraudes,
ainsi que la mise en place de mesures de maîtrise pour réduire cette
vulnérabilité.
Cet article présente le contexte et les démarches mises en place par les
1 entreprises agroalimentaires pour concevoir et pour mettre en œuvre leur plan
de lutte contre les fraudes.
Le lecteur trouvera en fin d’article un glossaire et un tableau des sigles
utilisés.

1. Contexte En 2013, la crise dite de la viande de cheval (substitution de


viande de bœuf par de la viande de cheval) a été, pour l’Union
européenne, la crise initiatrice d’un renforcement des actions pour
la lutte contre la fraude [5]. Malgré sa relative absence de risque
1.1 De l’histoire ancienne sanitaire, l’impact émotionnel suscité par cette crise a profondé-
ment marqué l’opinion publique. Sa gestion a permis de mettre en
La fraude sur les denrées alimentaire a toujours été intimement évidence toutes les failles en matière de traçabilité, mais aussi les
liée au commerce des denrées, on en retrouve de nombreux pratiques de production, de commercialisation et la complexité de
exemples au cours de l’histoire [1] [2] [3] [4]. la chaîne d’approvisionnement des viandes et plats préparés à
base de viande.
Si on suppose que dès l’Antiquité, des cas de fraudes, sur l’ori-
gine ou des adultérations, ont existé sur des produits à haute Si les fraudes ont toujours existé, comme vu précédemment,
valeur ajoutée comme le vin ou les épices, les premiers témoi- leur augmentation est favorisée par un contexte porteur reposant
gnages sur le territoire français apparaissent dès le règne de Saint- sur plusieurs facteurs (figure 1) :
Louis avec une ordonnance du prévôt de Paris pour combattre – une mondialisation de l’offre : les opérateurs ont accès à
« les patrouilleurs et mixtionneurs de beurre ». des approvisionnements beaucoup plus variés, avec des origines
Au Moyen-Âge, les fraudes portent, par exemple, sur la fraîcheur plus lointaines, des documents dans des langues étrangères, des
du poisson (mélange d’arrivage ou d’espèces plus ou moins sen- réglementations et des pratiques différentes, une dimension
sibles à la putréfaction), sur la qualité sanitaire des viandes (com- numérique (e-commerce des aliments), qui crée en outre des
merces mal éclairés ne permettant pas de juger visuellement de la opportunités de pratiques trompeuses et malhonnêtes permettant
qualité des produits), sur les coupes de farines avec diverses subs- une action à l’étranger ;
tances. – une complexification de la chaîne alimentaire : la crise de
la viande du cheval a mis en évidence le nombre important d’inter-
Au fil des années, les progrès de la chimie multiplient les occa-
médiaires au sein d’une filière (producteur, revendeur, grossistes,
sions de fraudes, comme sur le vin où les cas de fraudes sont
courtiers...), qui rendent la traçabilité plus complexe et participent
variés (origine, mouillage, conservation...). Si elles sont parfois
à la réduction des marges pour chacun des intermédiaires ;
sans risque sanitaire, certaines adultérations peuvent présenter
des conséquences parfois dramatiques sur la sécurité sanitaire,
comme ce fut le cas des confiseries pour lesquelles l’usage d’addi-
tifs colorants (pigments à base de plomb ou d’arsenic) ont entraîné
de nombreux décès au XVIIIe siècle.
Le milieu du XIXe siècle voit se multiplier des crises agricoles,
dont celle majeure et symbolique du Phylloxéra, qui décimera une Pression
partie du vignoble français et ouvrira la porte à d’importantes économique
quantités d’ersatz, parfois non dépourvus de toxicité. Cette crise
Complexification
amènera le gouvernement à voter la loi de 1905, premier grand Diminution
de la chaîne des contrôles
texte sur la fraude alimentaire. alimentaire
Le XXe siècle a connu également son lot de scandales (huile fre-
latée espagnole en 1981, importation de viandes traitées aux hor-
mones...).

Mondialisation Augmentation Faiblesse


1.2 Années 2000 : la prise de conscience de l’offre des fraudes des sanctions

Amplifiées par la médiatisation, différentes crises ont secoué le


monde des industries agroalimentaires depuis les années 2000
(affaire de la vache folle, poulets nourris avec une alimentation
contaminée par de la dioxine, laits additionnés de mélamine, colo-
rants Sudan (marque déposée du groupe BASF) interdits dans des Figure 1 – Les facteurs favorisant l’augmentation des activités
épices, huile de tournesol ukrainienne contaminée...). frauduleuses

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____________________________________________________________________________ PRÉVENTION CONTRE LES FRAUDES DANS L’AGROALIMENTAIRE

Tableau 1 – Exemples de fraudes : l’affaire de la viande de cheval et la francisation des kiwis


Affaire de la viande Ce scandale a débuté en janvier 2013 par une alerte émise par l’Autorité de sécurité des aliments d’Irlande sur la
de cheval présence de viande de cheval dans des plats préparés (lasagnes) annoncés comme « pur bœuf ». L’industriel français
concerné (Findus) a réalisé des auto-contrôles et confirmé ces résultats non conformes auprès de la DGCCRF et des
consommateurs.
En février 2013, la DGCCRF a perquisitionné la société Spanghero soupçonnée des substitutions. L’enquête a mis en

1
évidence une traçabilité complexe impliquant de nombreux intermédiaires dont des négociants et des traders dans
divers pays.
Un plan de contrôle lancé par la DGCCRF sur les produits à base de bœuf a révélé la présence de viande de cheval
dans plus de 4,5 millions de produits, représentant plus d’un millier de tonnes de produits expédiés dans plusieurs
pays européens.
En janvier 2019, le procès s’est ouvert et quatre personnes ont comparu. Les coupables ont été condamnés :
– pour le trader hollandais, à l’origine de la tromperie, à 2 ans d’emprisonnement ferme avec mandat d’arrêt et
interdiction définitive d’exercer toute activité professionnelle au sein de la filière viande ;
– pour le responsable de l’entreprise Spanghero, à 2 ans d’emprisonnement dont 18 mois avec sursis, à l’interdiction
d’exercer toute activité professionnelle au sein de la filière viande pendant 2 ans, ainsi qu’à la confiscation à hauteur
de 100 000 € des sommes saisies dans son patrimoine ;
– pour leurs deux assistants, hollandais et français, à 1 an d’emprisonnement avec sursis.
Francisation des Le service national des enquêtes de la DGCCRF a mené entre fin 2016 et début 2018 une enquête pour contrôler la
kiwis loyauté des informations relatives à l’origine des kiwis commercialisés en France. La majorité des acteurs de la filière
française de négoce du kiwi (37 établissements) ont été contrôlés. La DGCCRF s’est appuyée sur les données
communiquées par les douanes, ainsi que sur des alertes mettant en avant la présence de pesticides pourtant
interdits en France.
Au total, ces investigations ont conduit à identifier une fraude portant sur environ 15 000 t de kiwis francisés sur une
période de 3 ans, soit environ 12 % des kiwis « origine France » commercialisés sur le territoire national et un
bénéfice illicite total de l’ordre de 6 M€. Sept sociétés ont été suspectées de pratiques frauduleuses (6 sociétés
françaises et 1 société italienne), et ont fait l’objet de procédures judiciaires.

– la pression économique : de la part du marché, des distribu-


teurs..., la réduction des marges des différents acteurs peut les
conduire à entrer dans un système frauduleux, ou à prendre plus
de risques pour améliorer la rentabilité économique. Les tentatives
de certains opérateurs commerciaux d’obtenir des avantages Consommateurs
déloyaux par rapport à leurs concurrents en les trompant
concourent à l’alimentation de ce système. La pression écono-
mique engendre également des mesures d’austérité affectant les
Distributeurs États  membres
autorités de contrôle.
L’ensemble de ce contexte tend à augmenter les fraudes,
d’autant plus que, si le gain économique peut être important, les
possibilités de détection et les sanctions restent faibles. Frauder
peut être considéré par certains groupes criminels organisés Lutte  contre les fraudes
comme une activité peu risquée et lucrative [6].
Union
Le tableau 1 donne deux exemples de fraudes, quelques chiffres Fabricants
européenne
ainsi que les suites judiciaires retenues.
Les cas de fraudes, et les crises qui en résultent, affectent la
confiance dans le système alimentaire de l’UE, avec un impact
immédiat sur le fonctionnement du marché intérieur. La dimension
Fournisseurs
transfrontalière est souvent forte, car les opérateurs frauduleux Scientifiques
/ Revendeurs
recherchent davantage de profits à la plus grande échelle possible.
Face à ce phénomène, les autorités de contrôle perdent de leur
crédibilité, les entreprises perdent de l’argent et les consomma-
teurs perdent confiance dans les aliments. Cela crée un paradoxe
majeur : la nourriture de l’UE est plus sûre que jamais, mais la Figure 2 – Les acteurs de la lutte contre les fraudes
confiance des consommateurs est faible.
Tout comme la lutte contre le dopage dans le milieu sportif, la – des distributeurs qui sélectionnent leurs fabricants, tiennent
lutte contre les fraudes alimentaires est une course incessante, compte des disponibilités des produits et limitent, le cas échéant,
chaque fraude découverte laissant la place à une nouvelle. la pression sur les fabricants ;
– des fabricants qui garantissent la sélection de leurs fournis-
Face à ce constat, la lutte contre la fraude nécessite une
seurs et procèdent à des vérifications de l’authenticité de leurs
approche holistique mobilisant un grand nombre d’acteurs,
produits ;
capable de faire preuve de réactivité (figure 2). Par exemple :
– des fournisseurs et des revendeurs qui s’assurent de leur
– des consommateurs qui restent vigilants, responsables dans approvisionnement, et mettent en place des outils de gestion
leurs achats et acceptent de payer le juste prix ; robustes de la traçabilité ;

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Culture durable de la sécurité


sanitaire des aliments
1
par Christine DECANIS
Chef de projet en système de management de la sécurité des aliments
CTCPA, Site Agroparc, Avignon, France
et Anne-Gaëlle MELLOUËT
Directrice Mission d’Intérêt Général
CTCPA, Site Agroparc, Avignon, France

1. Maîtrise de la sécurité des aliments : du contrôle à la culture F 1 118 - 2


1.1 Premiers pas vers la sécurité sanitaire des aliments ............................ — 2
1.2 Développement de référentiels pour assurer la sécurité sanitaire
des aliments ............................................................................................. — 2
1.3 Fin des années 2010 à nos jours : le management laisse la place
à la culture ................................................................................................ — 3
2. La Food Safety Culture : un partage de valeurs .......................... — 4
2.1 Définitions................................................................................................. — 4
2.2 Attentes des référentiels SMSDA et de la règlementation euro-
péenne ...................................................................................................... — 4
2.3 Composantes de la Food Safety Culture................................................ — 5
3. Instaurer une culture de la sécurité sanitaire des aliments
dans son entreprise ............................................................................. — 7
3.1 État des lieux initial : les questions à se poser ...................................... — 7
3.2 Planification et déploiement ................................................................... — 8
3.3 Vérification, amélioration continue et maturité du dispositif............... — 10
4. Conclusion.............................................................................................. — 12
5. Glossaire ................................................................................................. — 12
6. Sigles ....................................................................................................... — 12
Pour en savoir plus ....................................................................................... Doc. F 1 118

epuis les années 1950, les industries agroalimentaires ont mis en place
D différents outils pour assurer la mise sur le marché de produits présen-
tant une qualité sanitaire optimale : contrôle des matières premières à
réception, contrôles des en-cours de fabrication et des produits finis, audits
des fournisseurs, HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point), bonnes pra-
tiques d’hygiène, systèmes de traçabilité de plus en plus performants, etc.
Pour que ces outils soient efficaces et que la sécurité sanitaire des aliments
soit durable, il faut que cette dernière fasse partie intégrante de la politique de
l’entreprise. Le groupe de travail du GFSI (Global Food Safety Initiative) va au-
delà en y ajoutant une dimension qui touche à l’humain et parle de culture de
la sécurité sanitaire des aliments, communément appelée la « Food Safety
Culture » (FSC). Ce concept initialement développé dans les pays anglo-saxons
est encore trop peu présent dans les entreprises françaises.
La position du GFSI sur le sujet, ainsi que les exigences des différents réfé-
rentiels de Systèmes de Management de la Sécurité des Denrées Alimentaires
Parution : septembre 2021

(SMSDA) privés (IFS Food et BRC Food), demandent aujourd’hui aux indus-
triels d’évaluer leur niveau de maturité, afin d’identifier et de mettre en place

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CULTURE DURABLE DE LA SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS _____________________________________________________________________________

des actions pour développer et améliorer leur culture de la sécurité sanitaire


des aliments.
Cet article présente l’historique de la Food Safety Culture, les piliers sur les-
quels elle se construit et propose aux entreprises une méthodologie de mise
en œuvre et de promotion de cette nouvelle approche managériale.
Le lecteur trouvera en fin d’article un glossaire et un tableau des sigles

1
utilisés.

1. Maîtrise de la sécurité recommandé la généralisation du système HACCP pour assurer la


sécurité sanitaire des aliments.
sanitaire des aliments : La Commission du Codex Alimentarius a adopté les lignes direc-
trices pour l’application du système d’Analyse des risques et des
du contrôle à la culture points critiques pour leur maîtrise (HACCP) (ALINORM 93/13A,
Appendice II) lors de sa session du 28 juin au 7 juillet 1993.
En France, il faudra attendre les années 1990 avec la directive
1.1 Premiers pas vers la sécurité européenne du 14 juin 1993 et l’arrêté du 9 mai 1995 réglementant
l’hygiène des denrées alimentaires remis directement au consom-
sanitaire des aliments mateur pour que l’HACCP devienne incontournable.
Aujourd’hui encore, la démarche HACCP reste le cœur de tous
La qualité et la sécurité sanitaire des aliments sont des préoccu-
les plans de maîtrise et de programmes de certification de la sécu-
pations qui figurent au cœur de la filière alimentaire depuis plus de
rité des aliments.
70 ans.
Les premières démarches qualité apparaissent dans les années
1950 avec les théories sur la gestion de la qualité reconnues pour 1.2 Développement de référentiels
avoir contribué de façon majeure à l’amélioration de la qualité des pour assurer la sécurité sanitaire
produits japonais. Le Dr Deming et d’autres chercheurs ont déve-
loppé des systèmes de gestion de la qualité totale (Total Quality des aliments
Management, TQM) qui mettent en application une approche per-
Les années 2000 à 2020 vont connaître l’émergence puis
mettant d’améliorer la qualité pendant la production tout en abais-
l’évolution de nombreux dispositifs de certification de la sécurité
sant les coûts.
des aliments :
Ces démarches s’appuyaient principalement sur des contrôles – en 1996, la 1re édition du référentiel BRC (British Retail Consor-
qualité : matières premières à réception, en-cours de fabrication, tium) Food est publiée sous l’impulsion des distributeurs anglo-
des produits finis. Tout au long de la fin du siècle dernier, ces saxons ;
approches fondées sur le contrôle ont laissé place à des – en 2004, la version 4 de l’IFS (International Featured Standard)
démarches qualité plus abouties portées par les normes ISO 9000. regroupe les distributeurs allemands et français sur des exigences
Les producteurs et les entreprises alimentaires ont alors mis en communes en matière de sécurité sanitaire des aliments envers
place des procédures et des instructions efficaces en sus des leurs fournisseurs ;
contrôles pour répondre aux exigences et aux critères stricts de – en 2005, la première version de la norme internationale volon-
qualité des produits fabriqués. taire ISO 22000 sur le management de la sécurité des denrées ali-
mentaires voit le jour.
En parallèle, dès la fin des années 1960, aux États-Unis, l’intro-
duction du concept du HACCP (Hazard Analysis Critical Control Avec la sortie du Paquet Hygiène (ensemble de textes réglemen-
Point) dans l’industrie alimentaire par la NASA (National Aeronau- taires européens fixant des exigences relatives à l’hygiène des
tics and Space Administration), les laboratoires de l’armée améri- denrées alimentaires et des denrées animales), la règlementation
caine (United States Army Laboratories) à Natick et la société européenne met l’accent sur l’application des bonnes pratiques
PILLSBURY (multinationale agroalimentaire) révolutionne la maî- d’hygiène et des principes HACCP, afin de répondre à l’obligation
trise de la sécurité des aliments. La démarche est initialement de mettre sur le marché un produit sûr et sain.
basée sur l’AMDEC (Analyse des Modes de Défaillance, de leurs Au fil des années, ces référentiels privés et normes (IFS Food,
Effets et de leur Criticité). Les principes de la méthode HACCP sont BRC Food, BRC/IoP puis BRCGS Packaging, ISO 22000, FSSC
mis en place dans le cadre de la conquête spatiale afin d’offrir aux 22000…) ont été mis à jour pour intégrer les nouvelles
astronautes la garantie d’une alimentation à zéro risque (100 % réflexions sur la sécurité des aliments (exemple : intégration
saine), et ainsi ne pas prendre le risque de compromettre les mis- de la gestion des alertes et des crises, de la lutte contre les
sions spatiales. Présentée par la Pillsbury corporation à la Confé- fraudes, de la lutte contre la malveillance), et ils ont renforcé l’idée
rence Nationale Américaine pour la Protection de l’Alimentation en que la sécurité sanitaire des aliments doit faire partie intégrante de
1971, la démarche est adoptée par plusieurs autres industries la politique de l’entreprise.
agro-alimentaires et se déploie dans les années 1980. L’engagement de la direction est plus que jamais mis en avant,
En 1985, l’Académie Nationale des Sciences des États-Unis a mais, malgré les outils développés et les dispositifs appliqués dans
établi que l’approche HACCP constituait la base de l’assurance de les entreprises, il subsiste des défaillances avec un impact délé-
la sécurité sanitaire des aliments dans l’industrie alimentaire. Plu- tère sur la sécurité du consommateur et sur les entreprises
sieurs associations professionnelles, telles que la Commission alimentaires :
internationale des spécifications microbiologiques pour les ali- – 97 % des cas de contamination liés à des entreprises alimen-
ments (ICMSF) et l’Association des hygiénistes du lait, des ali- taires non manufacturières impliquent une erreur ou une mauvaise
ments et de l’environnement (IAMFES actuelle IAFP), ont pratique de manipulation des denrées alimentaires [1] ;

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– d’après les chiffres de l’OMS (2015), les maladies d’origine ali- sécurité des aliments, puisqu’elle peut être vérifiée de manière
mentaire causent 420 000 décès dans le monde chaque année et impromptue. Elle doit se vivre au quotidien et trouver sa place
les enfants représentent 1/3 des décès ; dans la culture même de l’entreprise et de ses collaborateurs.
– les entreprises identifiées comme source d’intoxications ali-
mentaires peuvent subir des dommages importants : impact sur En 2018, le Global Food Safety Initiative (GFSI, Initiative mon-
l’image de marque, pertes financières et, dans un tiers des cas, la diale de sécurité alimentaire) publie un guide sur la FSC [6], consi-
faillite [2]. dérant que « la sécurité sanitaire des aliments doit s’inscrire dans
la culture même de l’entreprise », et l’intègre en 2020 dans les exi-
En 2009, Franck Yiannas publie un ouvrage sur un nouveau

1
gences de son Guidance Document GFSI v2020.1 [7].
concept : la Food Safety Culture – Creating a Behavior-Based Food
Safety Management System [3]. Il présente une nouvelle approche Cette nouvelle exigence est ensuite reprise par les différents
du management de la sécurité des aliments, non pas en approfon- référentiels associés et reconnus par le GFSI.
dissant les aspects scientifiques et techniques (microbiologie, toxi-
Ainsi, la version 8 du BRC Food [8] a pour nouvelle exigence :
cologie, maîtrise des paramètres de process…), mais en
s’intéressant aux sciences comportementales, à la dynamique de « 1.1.2 : La direction du site doit définir et suivre un plan clair
groupe et à la culture des organisations. pour le développement et l’amélioration continue d’une culture de
Le constat est qu’il est possible de pallier ces défaillances en fai- sécurité et de qualité des denrées alimentaires. Ce plan doit
sant de la sécurité des aliments une culture d’entreprise, car inclure :
l’engagement de la direction ne suffit pas. – des activités définies impliquant toutes les sections du site qui
En effet, des études indiquent, que si certains aspects du com- ont une incidence sur la sécurité des produits ;
portement concernent l’individu, plus de 40 % peuvent être liés à – un plan d’action indiquant comment les activités seront réali-
la culture organisationnelle dominante en matière de sécurité des sées et mesurées, ainsi que les délais prévus ;
aliments [2].
– un examen de l’efficacité des activités réalisées ».
On note également qu’il y a 54 % d’erreurs en moins dans les
entreprises qui ont une culture forte de la sécurité des aliments [4]. Ce concept de culture de la sécurité sanitaire des aliments est
également présent dans la certification FSSC 22000 v5.1 [9] et l’IFS
Frank Yiannas devenu Deputy Commissioner for Food Policy and
Food version 7 (§ 2.2) [10].
Response pour la FDA a fortement participé au déploiement de la
culture de la sécurité sanitaire des aliments. Les travaux de mise à jour des principes généraux d’hygiène du
Ce concept est ainsi déjà bien en place dans les pays anglo- Codex Alimentarius ont également intégré la culture de la sécurité
saxons, où les autorités compétentes (Royaume-Uni, Australie, des aliments [11].
Nouvelle Zélande) prennent en compte dans leurs programmes En mars 2021, le règlement UE 2021/382 de la Commission euro-
d’évaluation la maturité de la culture de la sécurité sanitaire des péenne du 3 mars 2021 a modifié les annexes du règlement (CE)
entreprises [5]. n° 852/2004 du Parlement européen et du Conseil relatif à l’hygiène
des denrées alimentaires, en ce qui concerne la culture de la sécu-
rité alimentaire avec l’annexe XI bis.
1.3 Fin des années 2010 à nos jours :
le management laisse la place Des travaux de normalisation sont également en cours au
niveau du BSI avec la publication prévue en 2021 d’un PAS BSI
à la culture 320.
La mise en place des audits inopinés ces dernières années a ini- La figure 1 présente les évolutions de la démarche qualité et
tié et renforcé une nouvelle dimension dans le management de la sécurité des aliments au cours des années 1960 à 2020.

2020

Culture de la sécurité
des aliments
PAQUET HYGIÈNE

2000 2010

Management qualité
et sécurité des aliments

1990

Assurance
qualité Audits
HACCP FSSC inopinés
1960 1980 22000
Lutte contre
ISO 22000 les fraudes
Contrôle
Lutte contre
IFS BRC
ISO 9001 la malveillance
BRC IOP
Gestion des alertes
et des crises

Figure 1 – Évolutions de la démarche qualité et sécurité des aliments

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1

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Sécurité microbiologique
des procédés alimentaires
1
par Jean-Yves LEVEAU
Professeur à l’École nationale supérieure des industries agricoles et alimentaires (ENSIA)
Jean-Paul LARPENT
Professeur à l’université Blaise-Pascal, Clermond-Ferrand
et Marielle BOUIX
Professeur à l’École nationale supérieure des industries agricoles et alimentaires (ENSIA)

1. Contamination des produits naturels et des chaînes


de fabrication............................................................................................ F 1 120 – 3
1.1 Levures ......................................................................................................... — 3
1.2 Moisissures .................................................................................................. — 3
1.3 Bactéries ....................................................................................................... — 3
2. Croissance microbienne......................................................................... — 5
3. Inhibition de la croissance microbienne ........................................... — 6
3.1 Température ................................................................................................. — 6
3.2 pH.................................................................................................................. — 7
3.3 Activité de l’eau et stress osmotique ......................................................... — 8
4. Destruction des micro-organismes et assainissement ................. — 9
4.1 Loi cinétique de destruction ....................................................................... — 10
4.2 Destruction thermique ................................................................................ — 11
4.3 Destruction chimique .................................................................................. — 13
5. Utilisation des opérateurs microbiens : les aliments fermentés — 16
5.1 Bactéries ....................................................................................................... — 16
5.2 Levures ......................................................................................................... — 18
5.3 Moisissures .................................................................................................. — 18
Références bibliographiques ......................................................................... — 18

a sécurité alimentaire, dont la qualité microbiologique des aliments est une


L composante essentielle, représente un enjeu considérable. Sur le plan du
commerce international, elle est très souvent invoquée pour renforcer les barriè-
res aux importations. De plus, elle a un rôle évident à jouer dans la prévention
des maladies d’origine alimentaire et par voie de conséquence, elle participe à la
maîtrise des dépenses de santé.
La maîtrise des risques microbiologiques repose sur le respect des règles
d’hygiène tout au long des filières de production, de transformation et de distri-
bution et sur la validation des pratiques industrielles par l’analyse du produit
fini. Cette stratégie présente des limites du fait du caractère insuffisamment spé-
cifique des règles et des codes, mais surtout à cause des difficultés que com-
porte l’analyse microbiologique du produit fini. Il en résulte une évolution de la
réglementation qui privilégie l’obligation de résultats, c’est-à-dire les objectifs à
Parution : mars 2001

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SÉCURITÉ MICROBIOLOGIQUE DES PROCÉDÉS ALIMENTAIRES _________________________________________________________________________________

atteindre, en laissant une certaine latitude quant au choix des moyens à mettre
en œuvre.
Les souhaits des consommateurs sont en contradiction avec leur besoin de
sécurité quand ils demandent des produits à la fois moins traités, plus proches
du naturel et plus sûrs. La sécurité alimentaire n’étant pas négociable et l’exi-
gence d’innocuité microbiologique toujours plus forte, la parfaite maîtrise de la

1
contamination est indispensable. Elle repose sur une bonne connaissance du
monde microbien et fait appel au génie des procédés pour prendre en compte et
maîtriser les phénomènes microbiens de façon très rigoureuse à chaque étape
de la production, de la transformation et de la distribution.
Par rapport aux autres agents de contamination chimiques ou particulaires, les
micro-organismes ont une propriété importante et remarquable : ils sont capa-
bles de se reproduire. Ainsi, lorsque les conditions sont favorables à cette repro-
duction, ce qui est souvent le cas pour les micro-organismes des produits
naturels et alimentaires, la biocontamination s’autoamplifie. Le risque d’altéra-
tion et d’intoxication éventuelle associé à ce phénomène nécessite sa maîtrise.
La stratégie de maîtrise du risque microbiologique doit intégrer de façon opti-
male les différentes démarches de prévention, de destruction, d’inhibition, d’élimi-
nation et de compétition des micro-organismes dans les matières premières et
dans les produits de transformation, au niveau du matériel et de l’environnement
de la production.
En ce qui concerne la prévention, tout doit être fait afin d’éviter l’apport de
micro-organismes, en particulier pathogènes, à chacune des étapes de la chaîne
agroalimentaire. L’emballage notamment permet de protéger denrées et pro-
duits du risque de contamination.
L’inhibition de la croissance microbienne peut être obtenue en appliquant des
conditions de température, de pH et d’activité de l’eau défavorables. Elle peut
aussi être obtenue en introduisant dans l’aliment des substances chimiques
appelées conservateurs dont l’utilisation est soumise à une réglementation
stricte. Le recours à des micro-organismes antagonistes de ceux que l’on cher-
che à inhiber est une voie intéressante qui conduit aux aliments fermentés. Le
conditionnement sous atmosphère modifiée est utilisé pour ralentir la crois-
sance microbienne.
La destruction des micro-organismes est très utilisée, notamment pour
conserver les denrées alimentaires. La connaissance des modalités de cette des-
truction est importante afin d’en tirer, en pratique, le meilleur parti possible. Il est
impératif, notamment, de prendre en compte l’extraordinaire résistance des
endospores bactériennes. Dans le cas des produits alimentaires, la destruction
est le plus souvent obtenue par voie thermique. Dans l’environnement de la pro-
duction, la maîtrise industrielle de la biocontamination implique l’hygiène des
surfaces des matériels et des locaux. La destruction des micro-organismes est,
dans ce cas, obtenue par voie chimique grâce à l’utilisation de désinfectants.
L’élimination des micro-organismes est à envisager car la taille et le mode de
reproduction des micro-organismes, notamment dans le cas des moisissures,
font qu’ils sont disséminables et donc transmissibles. L’air pouvant être souvent
impliqué dans les phénomènes de contamination, sa qualité microbiologique
peut être un élément déterminant de la maîtrise de celle des aliments. La filtra-
tion est fréquemment utilisée pour améliorer la qualité de l’air des locaux de pro-
duction afin d’éviter les phénomènes de contamination.
La compétition microbienne est mise en jeu. Certaines espèces microbiennes,
notamment des bactéries lactiques et des levures, sont assez largement utilisées
dans les produits laitiers, carnés et végétaux, ainsi que dans les boissons fer-
mentées. Leur maîtrise, grâce principalement aux fermentations lactique et
alcoolique, permet d’obtenir des produits stables. L’inhibition des bactéries
d’altération et pathogènes résulte de l’abaissement du pH et de la teneur en
éthanol mais repose aussi sur des phénomènes d’antagonisme.

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1. Contamination des produits de certains fromages à pâte molle). Ces moisissures ont un pouvoir
de sécrétion d’enzymes important qui leur confère une grande apti-
naturels et des chaînes tude à la dégradation de la matière organique.
Chez les moisissures appartenant aux classes des Ascomycètes et
de fabrication des Deuteromycètes, les filaments mycéliens sont cloisonnés. Les
hyphes fructifères sont appelés conidiophores et les spores, formes
de reproduction asexuée, sont les conidies. La morphologie des

1
Les micro-organismes des produits naturels et des aliments sont conidiophores est différente d’un genre à l’autre et l’observation
pour la plupart des champignons microscopiques (levures et microscopique permet l’identification. Les principaux organismes
moisissures) et des bactéries. Certaines denrées peuvent aussi rencontrés appartiennent aux genres Penicillium, Aspergillus,
renfermer des parasites tels que des protozoaires, des métazoaires Neosartorya, forme parfaite de certains Aspergilli et Byssochlamys.
et des virus pouvant être responsables de maladies d’origine Certaines espèces, comme Aspergillus flavus, méritent une atten-
alimentaire. tion particulière car elles sont toxinogènes. Au contraire, P. camem-
berti et P. roqueforti jouent un rôle bénéfique en fromagerie.

1.1 Levures
1.3 Bactéries

Les levures et les moisissures appartiennent au règne végétal Omniprésentes dans l’environnement et dans l’organisme
et sont réparties dans les quatre classes de champignons humain, les bactéries occupent une place prépondérante dans les
(mycetes). Ce qui différencie principalement les levures des préoccupations de l’hygiéniste.
moisissures est leur structure cellulaire. Dans les deux cas, il Le sol constitue un très important réservoir naturel de bactéries.
s’agit de cellules eucaryotes, mais les levures sont au moins à On peut y distinguer des espèces naturellement présentes et
une étape de leur cycle biologique sous forme unicellulaire, tan- d’autres provenant de contaminations, notamment par les déjec-
dis que les moisissures sont des champignons microscopiques tions des animaux. La teneur en bactéries de l’intestin des animaux,
filamenteux. L’ensemble des filaments (hyphes) constitue le mais aussi des humains, est très élevée. Le sol constitue pour elles
mycélium. le réceptacle terminal normal. Par voie de conséquence, les eaux,
notamment de ruissellement, et les surfaces de toute nature sont
contaminées. De ce fait, le risque de contamination des denrées
Les levures ne constituent pas un groupe de mycètes bien défini. naturelles, végétales ou animales, et des produits alimentaires est
En fait, on les trouve dans deux classes de champignons, Ascomy- permanent tout au long des chaînes de transformation.
cètes et Basidiomycètes selon l’ultrastructrure de la paroi. Dans La propriété commune à toutes les bactéries est leur structure
chacune des deux classes, on trouve des levures parfaites (télé- cellulaire procaryotique caractérisée principalement par l’absence
omorphes) car elles ont à la fois un mode de reproduction asexuée de membrane nucléaire. Le chromosome unique chez ces organis-
(bourgeonnement ou scissiparité) et un mode de reproduction mes est présent de manière diffuse dans le cytoplasme. Sur la base
sexuée (asques et ascospores ou basides et basidiospores) et des de cette propriété, les bactéries constituent un groupe important
levures imparfaites (anamorphes) qui n’ont que le mode de repro- d’organismes, hétérogène si on prend en compte leurs autres
duction asexuée. propriétés, et n’appartenant ni au règne animal, ni au règne végétal.
Les levures sont naturellement présentes sur les fruits ; le sol ne Un très grand nombre d’espèces bactériennes est connu, elles sont
constitue pas pour elles un habitat favorable. Elles ont une bonne réparties en trente-trois sections dans la classification de Bergey [1].
aptitude à métaboliser les sucres de faible masse molaire en aéro- On note une très grande diversité des propriétés des bactéries,
biose (respiration) ou en anaérobiose (fermentation). Les espèces d’une section à une autre et à l’intérieur d’une même section ; des
qui ont la faculté de métaboliser les sucres en anaérobiose, plus différences notables existent entre espèces. La figure 1, déduite de
particulièrement celles du genre Saccharomyces, sont les organis- la classification de Bergey, présente les principaux genres bacté-
mes de choix pour la fermentation alcoolique. De ce fait, des appli- riens rencontrés dans les produits alimentaires qu’il convient de
cations importantes ont été développées, comme la production prendre en compte pour la qualité microbiologique et la maîtrise
d’éthanol industriel, de boissons fermentées (bières, vins, cidres) et industriel de l’hygiène.
d’alcools de bouche ainsi que la fermentation pannaire. La première distinction entre bactéries résulte d’une différence
très importante de structure et de composition des enveloppes
cellulaires, qui conduit à l’observation des bactéries au microscope
après une coloration différentielle : la coloration de Gram qui
1.2 Moisissures permet de distinguer les bactéries à Gram positives (+) des bactéries
à Gram négatives (–).
Les moisissures fréquemment rencontrées dans les industries Le deuxième élément de distinction des bactéries consiste à
alimentaires appartiennent à trois classes de champignons. Les considérer leur morphologie. Il existe deux types principaux de
Zygomycètes ou Phycomycètes sont les plus primitifs. Les filaments cellules : les cellules sphériques appelées coques et les cellules
en forme de tube non cloisonné sont principalement constitués de cylindriques appelées bacilles. Dans tous les cas, la taille des cellu-
chitine et renferment une masse cytoplasmique mobile contenant de les est de l’ordre du micromètre pour le diamètre des coques et la
nombreux noyaux (structure cœnocytique). À l’extrémité de certains largeur des bacilles, leur longueur étant de 2 à 3 µm mais pouvant
filaments, une structure en forme de sac, le sporange, renferme les les dépasser.
spores. Rhizopus et Mucor sont des genres fréquemment impliqués Selon le mode de division cellulaire, on observe au microscope
dans l’altération de certains produits comme les fromages à pâte des associations de cellules typiques du genre ou de l’espèce. Lors-
molle. Lorsque le sporange arrive à maturité, il s’ouvre et les spores que la division cellulaire n’a lieu que dans un seul plan, on observe,
ou sporangiospores, en grand nombre et ultra-légères, sont dissémi- dans le cas des coques, des cellules groupées par deux, diplo-
nées et entraînées par l’air. Leur dépôt sur les produits ou sur les coques, dans lesquels les cellules peuvent ne pas être parfaitement
surfaces permettant leur germination peut être à l’origine de dégâts sphériques. Après plusieurs phases de division, l’association
importants, notamment dans les haloirs (locaux destinés à l’affinage comprend plusieurs cellules disposées en chaîne, aspect caractéris-

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tique des streptocoques. Deux groupes de bactéries des produits


Aérobie naturels et alimentaires sont susceptibles de présenter cet aspect :
Forme spiralée Section 2 Campylobacter les streptocoques fécaux, germes témoins d’une contamination
microaérophile
fécale, et les streptocoques lactiques, utilisés pour l’obtention de
Pseudomonas produits alimentaires fermentés, notamment de produits laitiers.
Xanthomonas Les streptocoques lactiques mésophiles ont une température opti-
male de croissance de 30 °C. Ils appartiennent au genre Lactococ-
Halobacterium cus, avec comme principale espèce Lactococcus lactis. Les

1
Halococcus streptocoques lactiques thermophiles ont une température opti-
male de croissance de 45 °C, avec comme espèce Streptococcus
Aérobies Section 4 Acetobacter thermophilus, bactérie lactique présente dans le yaourt à côté de
Gluconobacter Lactobacillus delbrueckii bulgaricus. Certaines bactéries possèdent
Gram – deux, voire trois plans de reproduction perpendiculaires deux à
Legionella
deux. Cela conduit à des amas de coques par quatre dans un plan
Alcaligenes
appelés tétrades (pédiocoques) ou de huit coques disposées au
Brucella sommet d’un cube. Certaines bactéries, appelées communément
sarcines, rencontrées en particulier dans certaines altérations des
bières, sont dans ce cas. Ces bactéries appartiennent au genre
Escherichia Pediococcus. Les staphylocoques donnent au microscope des amas
Shigella
de coques irréguliers « en grappe » car ils possèdent vraisemblable-
Salmonella
ment de nombreux plans dans lesquels la division peut s’effectuer.
Citrobacter
Klebsiella
Staphylococcus aureus, bactérie pathogène des produits alimen-
Bacilles Enterobacter taires responsable de toxi-infection, est dans ce cas.
Erwinia
Dans le cas des bactéries cylindriques, on peut observer égale-
Aérobies Serratia
ment des détails morphologiques. Les dimensions des cellules sont
anaérobies Section 5 Hafnia
Edwarsiella
plus diversifiées, du gros bacille court (1 à 2 µm sur 2 à 3 µm) au fin
facultatives
Proteus bacille long (0,5 à 1 µm sur 3 à 10 µm), bacille droit ou incurvé. La
Yersinia section 15 de la classification de Bergey [1] regroupe des bacilles
repliés ou ramifiés. Les associations de cellules sont aussi remar-
Vibrio quables. La plus fréquente est la disposition en file de deux cellules,
Aeromonas diplobacille, ou de plus de deux, streptobacille. Certains bacilles
sont accolés les uns aux autres dans leur longueur, association dite
Zymomonas « en palissade » (Corynebactéries).
La figure 1a fait apparaître un caractère distinctif important des
Anaérobies Section 6 Bacteroides bactéries : le type respiratoire. Les bactéries qui ne sont capables de
se reproduire qu’en présence d’oxygène sont dites aérobies strictes.
a Gram négatives Les bactéries capables de croître en l’absence d’oxygène sont ana-
érobies. Un assez grand nombre d’espèces peut se développer aussi
bien en absence qu’en présence d’oxygène. Ces bactéries sont dites
Micrococcus
Staphylococcus
aérobies-anaérobies facultatives. Des bactéries importantes en
technologie alimentaire sont en particulier celles qui appartiennent
Streptococcus au genre Clostridium, qui ne possèdent pas l’équipement enzymati-
Non que pour réduire l’oxygène (bactéries oxydases négatives) et qui,
Section 12 Leuconostoc
sporulées cultivées en aérobiose, sont tuées par effet du peroxyde d’hydro-
Pediococcus
gène dont elles ne peuvent pas se débarrasser, étant de surcroît
Aerococcus catalases négatives. Ces bactéries sont dites anaérobies strictes. Ce
Coques
Peptococcus genre regroupe un grand nombre d’espèces dont certaines sont
Peptostreptococcus pathogènes et peuvent être présentes dans les aliments : Clostri-
Ruminococcus dium perfringens et Clostridium botulinum, pour n’en citer que
Sarcina deux. Les bactéries microaérophiles, quant à elles, exigent des
ambiances gazeuses particulières dans lesquelles la pression
Sporulées Bacillus partielle d’oxygène est inférieure à ce qu’elle est dans l’air sans être
Gram + Section 13 Clostridium nulle. L’étude du comportement vis-à-vis de l’oxygène est aussi utili-
Sporulés Sporosarcina sée pour la distinction des genres et espèces de bactéries Gram
positives.
Lactobacillus Les bacilles Gram + des genres Bacillus et Clostridium (section 13
Non Listeria de la classification de Bergey [1]) ont la propriété remarquable de
Section 14
sporulés Erysipelothrix pouvoir former une endospore, forme de reproduction mais surtout
Bacilles Brochothrix de résistance. C’est un élément sphérique ou ovoïde apparaissant
dans les cellules, en fin de croissance, en phase stationnaire, lors-
Corynebacterium que les conditions de culture deviennent difficiles du fait de l’appau-
Formes Brevibacterium vrissement du milieu. Il s’agit d’une cellule en état de dormance
Section 15
irrégulières Propionibacterium métabolique, très résistante aux agents physico-chimiques et capa-
Bifidobacterium ble de germer, si les conditions redeviennent favorables, pour
b Gram positives donner une cellule normale. L’endospore bactérienne peut résister à
un traitement thermique de huit heures et demie à 100 °C. Cette
particularité a beaucoup de conséquences technologiques, notam-
Figure 1 – Principaux genres de bactéries impliqués ment dans les procédés alimentaires mettant en œuvre un traite-
dans les produits alimentaires (d’après [1]) ment thermique.

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Décontamination des produits


déshydratés à usage alimentaire
1
par Frédéric FINE
Chef de projet Technologie PhD
Centre technique de la conservation des produits agricoles (CTCPA - Avignon)
et Patrick GERVAIS
Professeur des Universités
Université de Bourgogne (ENSBANA)

1. Caractéristiques des produits déshydratés à usage alimentaire F 1 136 – 2


1.1 Caractéristiques physico-chimiques .......................................................... — 2
1.2 Microbiologie des produits déshydratés ................................................... — 3
2. Traitements thermiques de décontamination
des poudres alimentaires....................................................................... — 6
2.1 Causes de la mort cellulaire........................................................................ — 6
2.2 Influence de la cinétique d’application de la chaleur................................ — 6
2.3 Influence de l’activité de l’eau sur la destruction thermique
des micro-organismes................................................................................. — 7
2.4 Effets défavorables des traitements thermiques sur la qualité
des produits déshydratés............................................................................ — 8
3. Technologies des traitements thermiques ........................................ — 8
3.1 Technologies thermiques actuelles ............................................................ — 8
3.2 Traitements thermiques innovants en cours de développement ............ — 11
4. Traitements athermiques ....................................................................... — 12
4.1 Fumigation ................................................................................................... — 12
4.2 Ionisation...................................................................................................... — 13
4.3 Pressions hydrostatiques ............................................................................ — 13
4.4 Rayonnement ultraviolet............................................................................. — 13
5. Conclusions et perspectives................................................................. — 13
Références bibliographiques ......................................................................... — 14
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. F 1 136

es graines, les poudres et les produits pulvérulents sont très largement


L représentés dans les industries agroalimentaires. En effet, 80 % des ingré-
dients mis en œuvre sont sous forme déshydratée ; c’est pourquoi leur stabilité
microbiologique est depuis longtemps étudiée. Du fait des exigences de qualité
toujours croissantes de la part du consommateur, l’innocuité de produits tels
que le lait en poudre, les farines, les épices, les ovoproduits, les champignons
déshydratés, les poudres d’algues et les carraghénanes fait l’objet d’une grande
attention de la part des industriels. De plus, les nouvelles tendances alimentaires
et notamment l’engouement pour les plats ethniques, aux goûts relevés, ont
contribué à l’explosion du marché des épices et des aromates au cours de la
dernière décennie.
De composition variable, la microflore de ces produits est connue pour être
Parution : mars 2007

présente en grande quantité, du fait des conditions de production artisanales

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53
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DÉCONTAMINATION DES PRODUITS DÉSHYDRATÉS À USAGE ALIMENTAIRE ______________________________________________________________________

(récolte, séchage, stockage...). La présence de cette microflore adaptée aux


faibles teneurs en eau rend difficile la décontamination des poudres alimen-
taires. Deux types de micro-organismes sont présents dans les produits
pulvérulents : les formes végétatives et les formes sporulées. De nombreux
auteurs ont rapporté que la résistance thermique des spores et des formes végé-
tatives est plus importante dans des milieux pauvres en eau. En effet, le stress
osmotique subi par les micro-organismes lors de la contamination des produits
1 pulvérulents a pour effet une augmentation de la thermotolérance des levures et
des bactéries.
Bien que réalisable, l’opération de destruction des micro-organismes dans les
produits solides se heurte à des difficultés à plusieurs niveaux. Elles sont
réduites lorsque ces produits solides sont contenus dans une phase aqueuse et
de nouveaux traitements comme le chauffage ohmique ou les micro-ondes per-
mettent une décontamination efficace. Dans le cas des solides divisés traités en
vrac comme les épices et les herbes aromatiques, le problème se pose au niveau
de l’homogénéité du traitement et du pouvoir de pénétration de la chaleur.
L’objectif de ce dossier est de rappeler les principales caractéristiques physico-
chimiques des poudres, de caractériser les microflores rencontrées sur les pro-
duits pulvérulents, de présenter les différents principes de destruction des
micro-organismes secs et de réaliser une synthèse bibliographique de l’ensem-
ble des techniques thermiques et athermiques de décontamination des poudres
alimentaires. Enfin, la dernière partie du document sera consacrée à la présenta-
tion des principes des nouveaux procédés innovants actuellement en cours de
développement, notamment la détente instantanée contrôlée (DIC), la lumière
pulsée ainsi que le système FHT (fluidisation à hautes températures), breveté par
le laboratoire de Génie des procédés alimentaires et biotechnologiques de l’uni-
versité de Bourgogne.

1. Caractéristiques 1.1.1 Transferts thermiques et pulvérulents

des produits déshydratés La chaleur se propage spontanément du corps le plus chaud vers
à usage alimentaire celui le plus froid jusqu’à ce que leurs températures soient égales.
Physiquement, c’est un flux de chaleur qui se propage par transfert
d’énergie thermique de molécule à molécule voisine. Les transferts
Ce premier paragraphe est consacré à la définition des caractéris- thermiques s’effectuent selon trois processus : la conduction, la
tiques physico-chimiques et des microflores contaminantes des pul- convection et le rayonnement.
vérulents alimentaires.
Dans la majorité des procédés thermiques de décontamination
des poudres, les échanges de chaleur combinent des phénomènes
de convection (poudre brassée dans un flux d’air chaud) et de
1.1 Caractéristiques physico-chimiques conduction (diffusion de la chaleur au sein des particules).

L’échange de chaleur peut faire intervenir un changement d’état


Les caractéristiques physico-chimiques des solides divisés condi- de l’eau (condensation ou évaporation) caractérisé par sa chaleur
tionnent bien souvent la réussite de l’étape de décontamination. En latente. Ainsi la fusion, la vaporisation et la sublimation requièrent
effet, les propriétés thermiques, la taille et la forme des particules de un apport d’énergie alors que la solidification et la condensation
poudre, conditionnent la pénétration de la chaleur lors d’un traite- (liquide comme solide) libèrent de l’énergie. La figure 1 propose
ment thermique et la granulométrie doit être prise en compte pour une représentation schématique des niveaux d’énergie nécessaires
le calcul des barèmes de traitement, dans le cas d’une contamina- aux changements de phase de l’eau.
tion dans la masse. Dans le cas d’une contamination périphérique,
la granulométrie de la poudre n’influera pas sur la destruction L’eau joue donc un rôle essentiel dans les transferts de chaleur, car
microbienne. La porosité de la poudre peut également affecter l’effi- son évaporation (ou vaporisation) absorbe une énergie importante. De
cacité d’un traitement par fumigation : le temps de contact entre la plus, la capacité thermique de l’eau (à 20 ˚C, cp = 4 182 J · kg−1 · ˚C−1)
poudre et le gaz sera d’autant plus long que la porosité intraparticu- est beaucoup plus importante que celles de l’air (à 20 ˚C et 1 bar,
laire sera élevée. Enfin, le convoyage pneumatique des pulvérulents cp = 1 012 J · kg−1 · ˚C−1) ou des matières organiques constituantes des
au sein du procédé de traitement peut être perturbé par des phéno- poudres. Par conséquent, pour ces deux raisons et pour une même
mènes de mottage fortement corrélés à la rugosité et aux interac- quantité d’énergie appliquée, une poudre humide s’échauffera plus
tions entre la surface des particules et le milieu. lentement qu’une poudre sèche.

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Température

150 °C 80%
Répartition
100 °C granulométrique
20%
en nombre
1 µm 10 µm

0 °C

– 50 °C
105,5 J
332,2 J 418,6 J 2256,3 J 92,5 J

Énergie
Soit une population de 10
particules sphériques :
99,6%
Répartition
1
– 8 avec un diamètre de 1 µm granulométrique
0,04% en volume ou
– 2 avec un diamètre de 10 µm
p p 1 µm 10 µm en masse
p p p Figure 2 – Représentation normalisée de la granulométrie

Chaleur Chaleur Chaleur Chaleur Chaleur


sensible latente sensible latente sensible
l’intérieur des grains qui définit la texture d’un solide divisé ou
poreux. Les principales caractéristiques mesurables permettant de
Figure 1 – Diagramme schématique température-énergie définir la texture des poudres sont les suivantes :
des changements de phase de l’eau (d’après Raphaël, 2003, — la masse volumique mesurée par pycnométrie ou par pesée ;
http://www.x86-secret.com/articles/divers/stt/stt-3.htm) — la surface spécifique correspondant à la surface développée
par le solide et mesurée par adsorption gazeuse ou par
perméamétrie ;
1.1.2 Caractérisation de la taille et de la forme — les porosités inter et intraparticulaires mesurées par adsorp-
tion et condensation de gaz ou de vapeur, ou par porosimétrie par
des particules [1] pénétration de mercure.

Les poudres alimentaires présentent une hétérogénéité impor-


tante tant au niveau de la forme que de la taille des particules qui les 1.1.4 Caractéristiques de surface des poudres
composent. De plus, la faisabilité de nombreuses opérations unitai- alimentaires [3]
res (séparation, mélange, écoulement, stockage, mise en forme...)
dans les procédés de transformation alimentaire dépend fortement
de la taille et de la forme des particules constituant les produits pul- La rugosité et les interactions de la surface des particules avec le
vérulents. La taille et la forme des particules sont également en rela- milieu environnant jouent un rôle important dans :
tion avec les phénomènes d’échange et de réactivité, qu’ils soient — les phénomènes de frottement et de cohésion impliqués dans
physiques (migration d’eau, séchage, solubilisation), chimiques l’écoulement des poudres ;
(oxydation) ou enzymatiques (digestion des aliments). — l’aptitude au broyage ;
Une particule de poudre est un objet difficile à caractériser d’un — l’adsorption des gaz par les solides ;
point de vue dimensionnel, de par sa forme bien souvent irré- — le phénomène de mouillage ;
gulière. Afin de contourner cette difficulté, la notion de sphère équi- — la dissolution des particules accessibles aux molécules de
valente a été définie et son diamètre correspond à celui qu’aurait la solvant.
sphère entourant la particule considérée. En outre, la taille des par- La mesure de la rugosité des particules peut être réalisée par une
ticules n’est pas déterminée pour une particule unique mais pour un méthode mécanique (capteurs tactiles), par des méthodes micros-
grand nombre de particules qui composent une population. Les copiques (microscopie interférentielle ou confocale à balayage
résultats de l’analyse granulométrique sont généralement présen- laser) ou par analyse d’image.
tés sous forme d’histogrammes, appelés distributions granulomé-
triques ou fréquentielles, dans lesquels les particules sont réparties
en classes en fonction de leur diamètre. La distribution en taille des
particules pourra être exprimée en pourcentage en nombre, en 1.2 Microbiologie des produits
pourcentage en surface ou en pourcentage en volume (figure 2). déshydratés
Les principales techniques de mesure de la taille des pulvérulents
alimentaires sont les suivantes :
— le tamisage humide ou à sec à travers des tamis normalisés ; 1.2.1 Microflores contaminantes
— le compteur à variation de résistance dérivé du Coulter Coun-
ter utilisé dans le milieu médical pour compter et mesurer les globu- Comme tous les produits naturels, la farine, les herbes et les épi-
les rouges ; ces sont susceptibles de subir une contamination microbienne. Il a
— la diffraction de la lumière laser ; été montré qu’une épice qui se développe à proximité ou au contact
— l’analyse d’images. du sol (basilic, poivre noir, thym...), présente une charge micro-
bienne beaucoup plus importante par rapport aux épices éloignées
du sol (girofle, fleur de muscadier...). Les poudres « industrielles »
1.1.3 Caractérisation de la texture physique telles que le lait déshydraté, la poudre d’œuf ou les carraghénanes
des pulvérulents [2] peuvent subir des contaminations microbiennes tout au long du
procédé de fabrication [4] [5].
Les pulvérulents sont des systèmes dispersés qui comprennent Le sol, le climat, les conditions de culture, de récolte, de séchage
non seulement une phase solide mais aussi une phase gazeuse et de stockage affectent la charge microbienne des produits
mobile entre les particules et une phase gazeuse (ou liquide) incluse pulvérulents. Cette charge peut varier d’une centaine à plusieurs
dans les pores. C’est l’arrangement de la matière et des pores à millions de germes par gramme. C’est pourquoi, des normes

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strictes de production et un contrôle de qualité rigoureux réalisé qui varient en fonction du type d’aliment et des micro-organismes
chez le producteur pourraient permettre de s’affranchir d’une étape considérés [17]. L’aw conditionne la stabilité microbiologique des
supplémentaire de décontamination. De plus, l’utilisation de produits alimentaires et influe fortement sur l’efficacité
sécheur moderne, un nettoyage à l’eau propre et un emballage décontaminante des traitements thermiques.
hygiénique permettent de réduire en général la charge microbienne (0)

de 2 log sans altérer la qualité organoleptique du produit. Les pro-


duits pulvérulents résultant d’un procédé de fabrication tels que le Tableau 1 – Principaux composés antimicrobiens présents
lait en poudre et les ovoproduits sont des produits microbiologique-

1
dans les épices [6]
ment stables tant qu’ils demeurent à l’état sec ; par conséquent, les
conditions de stockage de ces produits sont prépondérantes pour Composés antimicrobiens Épices
assurer une bonne conservation [5] [6] [7].
La localisation géographique des zones de production et la faible Allicine Ail
activité de l’eau des poudres alimentaires font que la plupart des Allylisothiocyanate Moutarde
germes présents sont thermotolérants et xérophiles, ce qui rend
encore plus difficile leur élimination. En effet, les micro-organis- Anéthol Anis
mes présents sur les poudres subissent un premier stress osmoti- Capsicidine Paprika
que qui a pour conséquence d’augmenter leur thermotolérance [8]
[9] [10]. Capsaicine Piment de Cayenne, paprika
Les spores du genre Bacillus, dont certaines sont productrices Carnosol Romarin
de toxines, représentent le plus souvent près de 50 % de la charge Carvacrol Origan, sarriette, thym
microbienne. Les plus fréquentes sont B. subtilis, B. licheniformis,
B. megaterium, B. pumilus, B. brevis, B. polymyxa et B. cereus [6]. Aldéhyde cinnamique Écorce de cannelle
Salmonella est présente dans 8 % des échantillons de poivre [11]. Cuminaldéhyde Cannelle, graines de cumin
De nombreuses moisissures, essentiellement des Aspergillus
(Aspergillus flavus fait partie des contaminants principaux du poi- Eugénol Allspice, clou de girofle
vre noir) et des Penicillium, ainsi que Clostridium perfringens (10 à Géraniol Gingembre, thym
100/gramme) constituent le reste des contaminants principaux des
poudres [12]. Des souches de Staphylococcus aureus et d’Escheri- Composés dérivés du p-menthane Menthe
chia coli sont fréquemment rencontrées dans le lait déshydraté, Thymol Origan, thym
dans les aliments à base de lait en poudre ainsi que dans la farine
de blé [13]. Acide ursolique Romarin

1.2.2 Propriétés antimicrobiennes des épices (0)

et des herbes aromatiques


Tableau 2 – Recommandations du SYNAFAP concernant
Certaines herbes et épices contiennent des composés présentant la qualité microbiologique des épices [15]
une activité antimicrobienne qui pourraient être utilisés comme
additifs alimentaires afin de prévenir ou de retarder la croissance Charge microbienne Nombre de germes/gramme
des micro-organismes (tableau 1). Les constituants des huiles
essentielles sont actifs contre une large gamme de bactéries, levu- Mésophiles totaux 5 · 105
res et champignons. La similitude structurale des huiles essentielles
Levures 500
avec les phénols suggèrent que leur action sur la croissance des
micro-organismes se fait par le même mécanisme : les phénols altè- Moisissures 500
rent la perméabilité membranaire des bactéries et interfèrent avec Coliformes totaux 103
les systèmes de transport ionique, le transport des électrons et la
production d’énergie. À l’inverse, certains composés contenus dans Coliformes fécaux 10
les poudres et, notamment, le manganèse stimulent le métabolisme Staphylocoques 100
microbien, en particulier celui des bactéries lactiques [6].
Anaérobies sulfitoréducteurs 30
L’utilisation de ces ingrédients dans les produits cuits (plats prépa-
rés, charcuteries cuites...) ne pose aucun problème puisque la quasi- Salmonelles Absence dans 25 grammes
totalité de leur charge microbienne est détruite par la chaleur de
cuisson. Par contre, pour les produits prêts à consommer sans trai-
tement thermique (fromages frais aux épices, salaisons crues...), les
poudres entrant dans la fabrication doivent être débarrassées de Comme le montre le tableau 3, les micro-organismes et, en parti-
leur charge microbienne afin d’éviter l’altération prématurée d’un culier, les moisissures ne peuvent plus se développer au-dessous
produit ou menacer la santé du consommateur. Le tableau 2 d’une aw de 0,6 ; par conséquent, pour qu’un produit alimentaire
reprend les recommandations du Syndicat national des fabricants puisse se conserver, son aw doit être abaissée sous ce seuil.
de plats cuisinés (SYNAFAP) au niveau de la qualité microbiologi- Murrell et Scott [18] puis Corry [19] ont rapporté que la résis-
que des épices [5] [6] [14] [15] [16]. tance thermique des spores et des formes végétatives est plus
importante dans des milieux pauvres en eau. Le même phéno-
mène de résistance microbienne, suite à un stress osmotique, a
1.2.3 Résistance aux stress des micro-organismes été rapporté par Knorr et ses collaborateurs [20], puis par Oxen et
secs Knorr [21], lors de traitement par hautes pressions. La réduction
décimale d’une population de Rhodotorula rubra est supérieure à
L’influence de l’activité de l’eau aw (cf. § 2.3) sur les micro-organis- 7 après un traitement à 400 MPa (15 min à 25 ˚C) à une aw proche
mes est complexe, car elle se combine à des facteurs intrinsèques de 1, alors qu’elle n’est plus que de 2,5 dans un milieu à aw = 0,94
(potentiel nutritif, pH, composés antimicrobiens) et extrinsèques (50 % saccharose) et quasi nulle dans un milieu à aw = 0,91 (55 %
(température, oxygène, traitements chimiques et les irradiations) saccharose ou 13 % NaCl).

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Mycotoxines dans les céréales


Évaluation des risques
1
par Jean-Marc FREMY
Direction de l’Évaluation des risques nutritionnels et sanitaires, Unité d’évaluation
des risques physico-chimiques
Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA)

1. Démarche de l’évaluation des risques. Cas des mycotoxines F 1 137 - 2


et des céréales ..........................................................................................
2. Mycotoxines d’intérêt pour les filières céréalières ........................ — 3
2.1 Aflatoxines.................................................................................................... — 3
2.2 Ochratoxine A............................................................................................... — 4
2.3 Trichothécènes ............................................................................................. — 6
2.4 Zéaralènone.................................................................................................. — 8
2.5 Fumonisines ................................................................................................. — 9
2.6 Toxines de Claviceps, reliées à la maladie dite « de l’ergot ».................. — 11
2.7 Perspectives d’évolution des risques ........................................................ — 12
3. Conclusions................................................................................................ — 12
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. F 1 137

’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) a pour


L mission l’évaluation des risques et, ainsi, de se prononcer dans ses avis
sur le niveau de risques pour le consommateur et d’effectuer des
recommandations aux gestionnaires des risques (ministères de tutelles).
Concernant la problématique des mycotoxines, le Conseil supérieur
d’hygiène publique de France (CSHPF) avait rédigé un rapport, en 1998, qui
faisait le point des connaissances sur certaines d’entre elles. Si, pour certaines
de ces mycotoxines, les propriétés toxicologiques commençaient à être bien
connues à cette époque, pour d’autres, leur impact toxicologique était encore
mal identifié. De plus, certaines d’entre elles, les trichothécènes, n’avaient pas
été traitées dans ce rapport.
Pour ces raisons notamment, l’AFSSA, créée depuis lors, s’est saisie de l’éva-
luation des risques liés à la présence de mycotoxines dans la chaîne
alimentaire humaine et animale. Un groupe de travail (dont les noms figurent
en fin de dossier pour un remerciement nominatif) a été chargé de cette tâche,
focalisée sur les mycotoxines ayant un impact sur la santé humaine et/ou ani-
male. En se fondant sur les données bibliographiques récentes et les dernières
évaluations réalisées par différentes instances internationales, un rapport [1] a
présenté, pour chaque mycotoxine, les facteurs favorisant :
– leur développement ;
– leurs propriétés toxicologiques ;
– les méthodes d’analyse ;
– leurs effets sur la santé humaine et animale ;
– le transfert dans les produits animaux ;
– les données de contamination des denrées humaines et animales
disponibles ;
– l’exposition de l’homme au travers des denrées végétales, animales et des
Parution : mars 2010

produits finis.

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F1137

MYCOTOXINES DANS LES CÉRÉALES ___________________________________________________________________________________________________

Le présent article s’appuie sur les données tirées du rapport de l’AFSSA cité
et, donc, focalisées sur l’évaluation des risques liés à la présence des myco-
toxines dans les céréales destinées à l’alimentation humaine. Un autre article,
traitant cette fois de la gestion des risques et, précisément, de la réglementa-
tion, des plans de contrôle, et des mesures préventives couvrant notamment
les pratiques agricoles, a été publié par MM. Grosjean et Gourdain [F 1 138].
Enfin, cet article ne traite pas des méthodes de détection et de dosage (consulter
1 le [P 3 330] dans le Pour en savoir plus).

1. Démarche de l’évaluation • En se plaçant donc des points de vue agroalimentaire et sani-


taire, on distingue, parmi les groupes de mycotoxines considérées
des risques. comme importantes, celles d’intérêt pour les aliments de la filière
céréales/oléagineux destinés à la consommation humaine :
Cas des mycotoxines – les aflatoxines ;
– les ochratoxines et l’ochratoxine A, en particulier ;
et des céréales – les trichothécènes et, tout spécialement, le déoxynivalénol ;
– les fumonisines ;
L’évaluation des risques se réalise par étapes, faites de points-clés, – la zéaralènone.
notamment sur l’identification et la caractérisation de danger, sur les • Par ailleurs, d’autres groupes de mycotoxines suscitent de
données d’exposition de population – croisant les données de leur porter un certain intérêt tels les alcaloïdes de l’ergot.
contamination des aliments spécifiques des régimes alimentaires
C’est selon cette liste que seront déroulées, dans ce document,
des groupes de population pour, enfin, estimer les risques.
les données se référant à l’évaluation des risques dans les produits
céréaliers. Même si les données sur les aflatoxines – restant les
mycotoxines « majeures » en termes sanitaire – sont exposées en
Les mycotoxines sont des produits du métabolisme secon-
premier, un traitement des données concernant les autres toxines,
daire des moisissures. Des moisissures toxinogènes peuvent se
notamment celles produites par le genre Fusarium (trichothécènes,
développer sous tous les climats, sur tous les supports solides
fumonisines et zéaralènone), sera effectué lui en détail, étant
ou liquides, dès l’instant qu’il y a des éléments nutritifs, de
donné leur importance dans la filière céréale des pays de la zone
l’humidité (activité en eau Aw supérieure à 0,6), d’où la grande
tempérée, donc pour la France.
variété des substrats alimentaires contaminés.
Le tableau 1 liste les mycotoxines d’intérêt pour la filière céréale
et les espèces des moisissures productrices associées.
■ Ces denrées contaminées par les mycotoxines peuvent être clas-
sées en deux grands groupes : ■ Deux groupes de moisissures toxinogènes (producteurs de
mycotoxines) peuvent être distingués.
– les aliments et produits d’origine végétale ;
– par transfert spécifique à certaines mycotoxines, ceux d’ori- • Le premier est constitué de moisissures envahissant leur
gine animale, lorsque des métabolites élaborés par les animaux, substrat et produisant la mycotoxine sur les céréales au niveau du
ayant consommé des aliments contaminés, sont retrouvés dans champ : il sera question de « toxines de champs ».
certaines de leurs productions, telles le lait ou les abats. • L’autre groupe rassemble ceux qui produisent les toxines
après récolte ; on les qualifiera de « toxines de stockage ». Ainsi,
■ Identification et caractérisation du danger sont fondées sur des
des moisissures du sol ou des débris de plantes peuvent dissémi-
données toxicologiques. La toxicité de ces contaminants naturels
ner leurs spores sur la plante, ou les grains, puis proliférer pen-
peut être aiguë ou chronique vis-à-vis des organismes
dant le stockage si les conditions le permettent.
consommant des denrées alimentaires contaminées. Certaines
mycotoxines ont une toxicité aiguë très marquée (exposition
unique à une forte dose), mais il demeure exceptionnel, en Europe,
Remarque
d’être exposées à des doses toxiques en une seule ingestion d’ali-
ments contaminés, provoquant ainsi une « mycotoxicose » aiguë. Une même moisissure peut produire différentes myco-
toxines. À l’inverse, une même mycotoxine pourra être pro-
Les effets chroniques (exposition répétée à de faibles voire très duite par plusieurs espèces et genres de moisissures.
faibles doses) sont les plus redoutés pour certaines de ces toxines
en raison de leur pouvoir cancérigène et des habitudes Ainsi, plusieurs toxines d’une même famille structurale, ou
alimentaires. Leur capacité à se lier aux protéines plasmatiques et présentant des structures différentes, peuvent se retrouver
leur lipophilie en font des toxiques capables de persister dans dans le même produit alimentaire et, a fortiori, dans une
l’organisme en cas d’expositions répétées et rapprochées. ration composée de divers ingrédients alimentaires. On parle
alors de multicontamination.
Ainsi, parmi plus de 300 de ces métabolites secondaires identi-
fiés, seule une trentaine possède des propriétés préoccupantes
pour la santé du consommateur (cf. [P 3 330] Pour en savoir plus). Cette situation naturelle pose des interrogations sur les interac-
tions toxiques qui peuvent s’opérer et pourrait ainsi se traduire par
■ Parmi les produits et aliments d’origine végétale, les céréales, un effet antagoniste, ou encore additif ou synergique. Cet aspect
les oléagineux et leurs produits dérivés présentent un vecteur de toxicologique ne sera pas développé, car trop peu documenté.
risque, compte tenu de l’éventuelle occurrence de contamination
et de leur consommation importante en Europe, quel que soit le ■ Un accent particulier sera donné aux connaissances sur les
régime alimentaire. facteurs favorisant la synthèse des mycotoxines et leur devenir,

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F1137

___________________________________________________________________________________________________ MYCOTOXINES DANS LES CÉRÉALES

Tableau 1 – Mycotoxines et moisissures 2. Mycotoxines d’intérêt


productrices associées pour les filières céréalières
Principales moisissures
pour les filières céréalières
Mycotoxines
productrices
Aspergillus flavus, 2.1 Aflatoxines
Aflatoxines B1, B2, G1, G2
A. parasiticus, A. nomius

Ochratoxine A
Penicillium verrucosum,
Aspergillus ochraceus
L’investigation menée lors de la « maladie X du dindon », qui a
sévi en 1960 en Angleterre, a permis de mettre en évidence la pré-
sence d’une toxine dans la nourriture de ces volailles, comportant
1
Fusarium verticillioides, des tourteaux d’arachide. Des études conduites sur la matière pre-
Fumonisines B1, B2, B3
F. proliferatum mière contaminée par une moisissure, du genre Aspergillus, abou-
Fusarium langsethiae, tirent à la caractérisation des aflatoxines [2]. Ces travaux furent à
F. sporotrichioides, F. poae, l’origine de la découverte des toxines de moisissures ou myco-
Trichothécènes des groupes toxines.
F. graminearum, F. culmorum,
A et B
F. crookwellense, F. tricinc-
tum, F. acuminatum ■ Facteurs de développement fongique et de production
d’aflatoxines
Fusarium graminearum,
Zéaralènone Les aflatoxines B1, B2, G1 et G2 sont susceptibles d’être pro-
F. culmorum, F. crookwellense
duites par certaines souches d’espèces appartenant au genre
Alcaloïdes d’ergot Claviceps purpurea, Aspergillus, telles que :
(dit « ergot du seigle ») C. paspali, C. africana
– A. flavus pouvant produire les aflatoxines B1 et B2 ;
– A. parasiticus et A. nomius (rencontré rarement) pouvant pro-
respectivement lors de la production et de certains procédés de duire, en plus, les aflatoxines G1 et G2 ;
transformation des céréales. – A. flavus est le principal agent de contamination du maïs et
des graines de coton ;
Il est à noter que les mycotoxines sont généralement thermo- – A. parasiticus est présent, surtout, dans les graines
stables et ne sont pas détruites par les procédés habituels de cuis- d’arachide [3].
son et de stérilisation.
Les conditions les plus favorables pour un développement
On peut aussi classer les mycotoxines selon leurs principaux d’A. flavus et une production d’aflatoxines sont une activité en eau
effets toxiques : (Aw) de 0,84-0,86 et une température comprise entre 25 et
– pouvoir hépatotoxique (aflatoxines) ; 40 oC [4]. Ces proliférations fongiques et les productions d’afla-
– œstrogéniques (zéaralènone) ; toxine ont lieu au champ et au cours du stockage.
– immuno/hématotoxiques (trichothécènes) ; Au champ, les insectes attaquent la surface des grains facilitant
– fumonisines ; l’accès de la moisissure aux structures internes qui contiennent les
– dermonécrosantes (trichothécènes) ; nutriments et augmente le risque de contamination de la partie
comestible. Un tel scénario ne concerne pas seulement les zones
– néphrotoxiques (ochratoxine A).
tropicales et les cultures d’arachide, mais aussi les zones tempé-
Certaines mycotoxines sont reconnues ou suspectées d’être rées et certaines cultures comme le maïs, lors de saisons particu-
cancérogènes (tableau 2). lièrement chaudes et sèches.

Tableau 2 – Effets des mycotoxines d’intérêt pour les céréales et mécanismes


d’action cellulaires et moléculaires identifiés
Toxines Effets Mécanismes d’actions
• Hépatotoxicité • Formation d’adduit à l’ADN
• Génotoxicité • Peroxydation lipidique
Aflatoxine B1 + M1
• Cancérogénicité • Bioactivation par des cytochromes P450
• Immunomodulation • Conjugaison aux glutathion-transférases
• Néphrotoxicité • Impact sur la synthèse des protéines
Ochratoxine A • Génotoxicité • Inhibition de la production d’ATP
• Immunomodulation • Détoxification par les peptidases
• Induction de l’apoptose sur progéniteur
• Hématotoxicité
hématopoïétique et cellules immunitaires
Trichothécènes (groupes A et B) • Immunomodulation
• Impact sur la synthèse des protéines
• Toxicité cutanée
• Altération des immunoglobulines
• Fertilité et reproduction • Liaison aux récepteurs œstrogéniques
Zéaralènone • Bioactivation par des déshydrogénases
• Conjugaison aux glucuronyltransférases
• Lésion du système nerveux central • Inhibition de la synthèse de céramide
• Hépatotoxicité • Altération du rapport sphinganine/sphin-
Fumonisine B1
• Génotoxicité gosine
• Immunomodulation • Altération du cycle cellulaire

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Mycotoxines dans les céréales


Gestion des risques
1
par François GROSJEAN
Ingénieur agronome ENSA Grignon
Chef de projets « qualité sanitaire des grains et fourrages » à ARVALIS, Institut du végétal,
Boigneville
et Emmanuelle GOURDAIN
Ingénieur agronome INAP-G
Chef de projets « qualité sanitaire des grains » à ARVALIS, Institut du végétal, Boigneville

1. Réglementation ......................................................................................... F 1 138 - 2


2. Plans de surveillance............................................................................... — 4
2.1 Aflatoxines.................................................................................................... — 5
2.2 Ochratoxine A............................................................................................... — 5
2.3 Trichothécènes ............................................................................................. — 5
2.4 Zéaralènone.................................................................................................. — 5
2.5 Fumonisines ................................................................................................. — 5
2.6 Relations entre mycotoxines....................................................................... — 7
3. Actions techniques .................................................................................. — 7
3.1 Gestion du risque mycotoxines au champ ................................................ — 7
3.1.1 Gestion du risque mycotoxines sur blés........................................... — 7
3.1.2 Gestion du risque mycotoxines sur maïs ......................................... — 8
3.1.3 Gestion du risque mycotoxines sur orges ........................................ — 8
3.2 Gestion du risque mycotoxines en péri-récolte ........................................ — 9
3.3 Gestion du risque mycotoxines au stockage ............................................. — 9
3.3.1 Espèces fongiques et mycotoxines ................................................... — 9
3.3.2 Gestion du risque au niveau du silo .................................................. — 9
3.3.3 Traitement des lots contaminés ........................................................ — 9
4. Conclusion.................................................................................................. — 10
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. F 1 138

L a gestion des risques liés aux mycotoxines dans les céréales découle de
l’évaluation des risques réalisée. Elle doit se faire au cas par cas, c’est-à-dire
pour chaque couple mycotoxine/substrat, du fait de la multiplicité des facteurs
agro-climatiques et des techniques culturales entrant en jeu. Elle s’est beaucoup
développée depuis 20 ans, mais elle n’est documentée correctement que sur
quelques mycotoxines (aflatoxines, ochratoxine A, désoxynivalénol, zéaralè-
none et fumonisines), ainsi que sur l’ergot (dit « de seigle », mais qui peut se
trouver aussi sur d‘autres grains).
Du fait de la grande diversité des situations pouvant être rencontrées, les élé-
ments de gestion présentés ci-après ne concernent que la France et les
mycotoxines les plus fréquemment rencontrées.
La gestion du risque « mycotoxines » s’exerce au travers de la législation, au
travers de plans de surveillance publics et privés, et au travers d’actions techni-
ques préventives et curatives. Ces dernières concernant les différents stades de
travail des grains, depuis la production au champ, la récolte, la conservation,
jusqu’à la mise à disposition des industries d’utilisation qui les introduisent dans
Parution : mars 2010

des produits alimentaires destinés aux humains et aux animaux.

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MYCOTOXINES DANS LES CÉRÉALES ___________________________________________________________________________________________________

humaine, et dans les matières premières et aliments pour


1. Réglementation animaux.
Cette hétérogénéité concerne toutes les mycotoxines, pour des
La législation, principalement européenne, s’est considérable- raisons différentes :
ment étoffée ces dernières années, puisque l’Union européenne
s’est fixée l’objectif d’atteindre un haut niveau de sécurité sanitaire – hétérogénéité de la contamination au champ ;
dans les aliments pour humains et animaux, tout en assurant la libre – regroupement dans un même silo de denrées et de matières
circulation des produits dans l’Union européenne. Cela a pour corol- premières provenant de différents champs ou de différentes

1 laire une homogénéité dans les textes en vigueur dans les différents
états membres, mais n’exclut pas la possibilité de textes nationaux
pour des mycotoxines particulières (mais, dans ce cas, le pays doit
régions ;
– répartition hétérogène de l’humidité dans un silo due à une
différence de température entre face ensoleillée et face non
en demander l’autorisation à la Commission). ensoleillée ;
Ces textes sont de différents types : – ventilation incomplète d’un silo qui crée une zone plus humide
– règlements ; à une certaine hauteur ;
– directives ; – ventilation mal conduite provoquant une réhumidification sur
– recommandations ; les parois du silo ou sur le dessus du tas de grains....
– textes nationaux qui transposent les directives européennes.
La préoccupation de la législation pour les méthodes d’analyse
Nota : un règlement est applicable à tout justiciable de l’Union, alors qu’une directive, est également compréhensible étant donnée la difficulté des ana-
pour être applicable dans un pays, doit être transposée dans le droit national. Ainsi, lyses qui concernent des molécules présentes à de très faibles
lorsqu’il existe un règlement européen, il n’y a pas de texte national correspondant.
doses (en général de 0,01 à 100 µg/kg).
■ Les mycotoxines sont concernées par des textes législatifs
généraux relatifs à la sécurité sanitaire des aliments constitués par ■ La législation de l’alimentation animale ne concerne qu’une
les règlements 178/2002, 852/2004, 853/2004, 854/2004, 882/2004 et seule mycotoxine : l’aflatoxine B1. Les textes qui la régissent sont
183/2005 (dits « du paquet hygiène »). Les mycotoxines sont aussi les directives européennes concernant les substances et produits
concernées par des textes législatifs particuliers, distincts pour indésirables (directive 2002/32 du Parlement et du Conseil de
l’alimentation humaine et pour l’alimentation animale. Ces textes l’Union européenne, modifiée par la directive 2003/100) transcrites
concernent la gestion des lots (notamment le mélange, le traite- par les arrêtés français du 12 janvier 2001 et du 5 juillet 2004.
ment physique, le traitement chimique, l’étiquetage...), des teneurs La législation prévoit que les matières premières susceptibles de
limites dans les denrées alimentaires pour l’alimentation humaine contenir cette mycotoxine doivent faire l’objet de contrôles. Par
et les aliments pour animaux, ainsi que la qualité des prélève- ailleurs, elle fixe des teneurs maximales en AFB1 dans les matières
ments d’échantillons et la qualité des dosages (pour les contrôles premières et dans les aliments composés (tableau 2), et précise que
officiels). les matières premières qui contiennent des teneurs supérieures aux
■ Le texte de base traitant des mycotoxines en alimentation limites réglementaires ne peuvent pas être incorporées dans les ali-
humaine est le règlement 1881/2006 de la Commission, modifié ments composés, au prétexte que la fabrication d’un aliment
par le règlement 1126/2007. Ce règlement stipule qu’il est interdit : consiste en un mélange de lots dont certains seraient sains.
– d’utiliser des produits si leurs teneurs sont supérieures à cer- Cette double limitation (dans les matières premières et les ali-
taines limites ; ments composés) correspond donc à une interdiction de dilution
– de mélanger des lots non conformes avec des lots conformes de lots contaminés (au-dessus de la limite maximale). Cette dispo-
(dans un but de dilution) ; sition a été transposée en Droit français par l’arrêté du 5 août 2003,
– de décontaminer des produits par traitement chimique. modifiant l’arrêté du 12 janvier 2001 concernant les substances
indésirables dans l’alimentation des animaux.
Ce texte fixe des limites pour un certain nombre de mycotoxines
dans différentes denrées alimentaires. Pour les céréales et produits La législation alimentation animale, concerne aussi les prélève-
céréaliers consommées directement, ou devant être transformés ments et analyses réalisés dans le cadre des contrôles officiels,
avant consommation, il s’agit de l’aflatoxine B1 (AFB1), de la mais uniquement pour l’aflatoxine B1 (seule mycotoxine régle-
somme des aflatoxines B1 + B2 + G1 + G2, du désoxynivalénol mentée). Cette législation consiste en le règlement 152/2009 qui
(DON), de la zéaralènone (ZEN), des fumonisines B1 et B2 (somme abroge la directive 1976/371 (méthode de prélèvement) et la direc-
FB1 + FB2), de l’ochratoxine (OTA) (tableau 1). Ce règlement prévoit tive 1976/372 (méthode d’analyse), et, par là même, leur transposi-
d’être complété dans quelques années pour introduire des valeurs tion en Droit français par l’arrêté du 19 septembre 1983 modifié.
limites pour d’autres fusariotoxines, telles que les toxines T-2 et
HT-2. ■ D’autres mycotoxines, comme le désoxynivalénol, la zéaralè-
Les valeurs limites dans les grains s’appliquent aux céréales none, les fumonisines et l’ochratoxine A, ont fait l’objet de projets
brutes mises sur le marché en vue de leur première transfor- législatifs de la part de la Commission pour compléter la directive
mation, c’est-à-dire à partir du moment où elles sortent des orga- 2002/32. Pour le moment, la Commission a reporté ces projets à
nismes stockeurs ou des stockages fermiers. Cela permet aux une date ultérieure, et dans cette attente, a formulé une
stockeurs de nettoyer, éventuellement, les grains par triage/tami- recommandation le 17 août 2006 (recommandation 2006/576).
sage puisque cette opération, qui sépare des grains propres, d’une Ce texte recommande aux États de faire des contrôles, et de
part, et des impuretés (poussières, glumes, glumelles, morceaux veiller à ce que les fabricants d’aliments utilisent des teneurs
de paille, morceaux d’épis et graines étrangères), d’autre part, limites en mycotoxines (cf. tableau 2) pour les matières premières
conduit à des grains moins contaminés (voir plus loin). (principalement des céréales et co-produits céréaliers) et divers ali-
ments destinés aux différentes espèces animales. Cette
■ Le règlement 1881/2006 modifié est complété par le règlement recommandation pose problème car elle s’adresse aux États (et
401/2006, pour ce qui concerne le mode d’échantillonnage et les
non aux professionnels de l’alimentation), sans préciser comment
méthodes d’analyse réalisés dans le cadre des contrôles officiels.
les États doivent la faire respecter.
La préoccupation de la législation pour l’opération d’échantillon-
nage est compréhensible, car l’échantillonnage introduit une De plus, elle ne précise rien en matière de prélèvement d’échan-
erreur bien supérieure à celle de l’analyse proprement dite. Cela tillon, ni en matière d’analyse. Enfin, les teneurs limites proposées
est dû à la répartition habituellement très hétérogène des myco- pour les céréales ne concernent que les lots destinés aux animaux
toxines dans les lots de denrées alimentaires pour l’alimentation les moins sensibles aux mycotoxines ce qui est peu précis.

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F1138

___________________________________________________________________________________________________ MYCOTOXINES DANS LES CÉRÉALES

Tableau 1 – Teneurs limites en mycotoxines dans les produits céréaliers


pour l’alimentation humaine
Types Limites
Céréales
de mycotoxines (µg/kg)
Céréales............................................................................................................................. de 2 à 5 (3)
Aflatoxine B1 (1)

1
Préparations à base de céréales pour enfants en bas âge.......................................... 0,1
Aflatoxines
Céréales............................................................................................................................. de 4 à 10 (3)
B1 + B2 + G1 + G2 (1)
Céréales brutes................................................................................................................. 5
Ochratoxine A (1) Produits céréaliers ou céréales pour consommation directe ...................................... 3
Préparations à base de céréales pour enfants en bas âge.......................................... 0,5
Céréales autres que blé dur, avoine et maïs................................................................. 1 250
Blé dur, avoine, maïs ....................................................................................................... 1 750
Farines, grits, semoule de maïs dont la taille est < 500 µm ........................................ 1 250
Autres farines, grits, semoules ....................................................................................... 750
Désoxynivalénol (1)
Pain, pâtisserie, biscuits, snacks, petits déjeuners ....................................................... 500
Céréales en consommation directe, farine, son .......................................................... 75
Pâtes sèches ..................................................................................................................... 750
Céréales pour alimentation infantile .............................................................................. 200
Céréales sauf maïs ........................................................................................................... 100
Maïs ................................................................................................................................... 350
Céréales en consommation directe, farine, son .......................................................... 75
Farines, grits, semoule de maïs dont la taille est < 500 µm ........................................ 300
Zéaralènone (1) Autres farines de maïs, grits, semoules ........................................................................ 200
Pain, pâtisserie, biscuits, snacks, petits déjeuners ....................................................... 50
Snacks, petits déjeuners à base de maïs....................................................................... 50
Céréales autres que maïs pour alimentation infantile ................................................. 20
Maïs pour alimentation infantile .................................................................................... 20
Maïs ................................................................................................................................... 4 000
Farines, grits, semoule de maïs dont la taille est < 500 µm ........................................ 2 000
Fumonisines
Farines, grits, semoule de maïs dont la taille est > 500 µm........................................ 1 400
B1 + B2 (1)
Biscuits, snacks, petits déjeuners ................................................................................... 800/1 000
Aliments à base de maïs pour alimentation infantile .................................................. 200
Ergot (2) Blé tendre, blé dur pour l’intervention .......................................................................... 500
(1) Règlement européen no 1881/2006 modifié.
o
(2) Règlement européen n 687/2008.
(3) Selon le produit et son stade de transformation.

■ Cas de l’ergot mondial à un cours moins cher que le cours du marché intérieur)
À côté des textes législatifs parlant des mycotoxines au sens et ne s’applique qu’aux lots de blé tendre et de blé dur (0,5 g
strict, il faut associer les textes qui traitent de l’ergot des céréales d’ergot/kg de céréale).
(Claviceps purpurea, appelé généralement ergot de seigle). En
effet, les mycotoxines de Claviceps (alcaloïdes) sont réglementées • En alimentation animale, la directive 2002/32 et l’arrêté du
indirectement par des limites sur la proportion pondérale d’ergot 12 janvier 2001 limitent la présence d’ergot à 1 g d’ergot par kg
dans un lot de céréales. d’aliment pour animaux « contenant des céréales non moulues ».

• En alimentation humaine, l’ergot est réglementé par le règle- Il est possible que, dans l’avenir, tous les textes relatifs à l’ergot
ment 687/2008 relatif à l’intervention (exportation de céréales déci- évoluent pour se baser, non plus sur la proportion pondérale
dée par les Autorités européennes avec une participation d’ergot dans un lot de céréales, mais sur la teneur en certains alca-
financière permettant au lot d’être commercialisable sur le marché loïdes de ce lot.

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Organismes génétiquement
modifiés et sécurité alimentaire
1
par Antoine RAS
Diplômé de Maîtrise de biologie cellulaire et physiologie
Responsable OGM et mycotoxines chez SGS (Société générale de surveillance)
Laboratoire Crépin, Rouen
en collaboration avec :
Yvon GERVAISE
Membre de la Société des experts chimistes de France
Expert près la Cour d’appel de Rouen
Expert français auprès de l’Organisation de coopération et de développement économique
(OCDE)
Ingénieur INSCIR (Institut national supérieur de chimie industrielle de Rouen)
Directeur SGS Laboratoire Crépin, Rouen
et Dalila HACHANI
Diplomée de DUESS techniques de mesures et analyses appliquées aux bio-industries
Responsable OGM et cadre de l’UT alimentaire de SGS Laboratoire Crépin, Rouen

1. Qu’est-ce qu’un OGM ?........................................................................... F 1 150 – 2


1.1 Définition ...................................................................................................... — 2
1.2 Mise au point d’une plante transgénique.................................................. — 2
1.3 Applications ................................................................................................. — 3
2. Évaluation de la sécurité alimentaire................................................. — 5
2.1 Notion d’équivalence .................................................................................. — 5
2.2 Principe de précaution ................................................................................ — 5
2.3 Risques évoqués pour la santé publique................................................... — 5
2.4 Dissémination dans l’environnement ........................................................ — 5
3. Comment assurer la traçabilité des OGM ?...................................... — 5
3.1 Cadre législatif ............................................................................................. — 6
3.1.1 Évaluations et autorisations .............................................................. — 6
3.1.2 Étiquetage des denrées contenant des OGM................................... — 6
3.1.3 Projet de normes concernant les méthodes de détection............... — 6
3.2 Détecter les OGM grâce à la PCR ............................................................... — 6
3.2.1 Technique PCR .................................................................................... — 7
3.2.2 Échantillonnage et prise d’essai........................................................ — 8
3.2.3 Extraction et purification de l’ADN.................................................... — 8
3.2.4 Choix des séquences d’ADN cibles................................................... — 8
3.2.5 Quantification des produits PCR ....................................................... — 9
3.2.6 Méthodologie de l’analyse................................................................. — 10
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. F 1 150

a survenue des organismes génétiquement modifiés (OGM)sur le marché de


L l’agroalimentaire pose deux problèmes majeurs : la traçabilité des matières
premières et des produits dérivés, et l’information du consommateur. La sépara-
tion des filières traditionnelle et transgénique s’avère difficile à mettre en place,
principalement du point de vue économique. C’est pourquoi des méthodes de
Parution : mars 2001

détection ont été développées afin de répondre aux exigences du législateur.

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© Techniques de l’Ingénieur, traité Agroalimentaire F 1 150 − 1

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F1150

ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE _________________________________________________________________________

Profitant de techniques récentes de biologie moléculaire, les laboratoires ont


appliqué la PCR (Polymerase Chain Reaction) à l’analyse des produits issus
d’OGM. Basées sur l’identification et la quantification de l’ADN des denrées ali-
mentaires, les services proposés aujourd’hui sont en mesure de répondre aux
attentes des intervenants de ces filières depuis les semenciers jusqu’aux
consommateurs.

1 Principales abréviations
Abréviation Développé
ADN acide désoxyribonucléique
ARN acide ribonucléique
ARNm acide ribonucléique messager
PCR polymerase chain reaction
dATP désoxyadénosine triphosphate
dCTP désoxycytidine triphosphate
dGTP désoxyguanosine triphosphate
dTTP désoxythymidine trisphosphate
dNTP désoxynucléotide triphosphate
CTAB hexadécyl-triméthyl-ammonium-bromide
UDG uracyle-D-glycosylase
dUTP désoxyuridine triphosphate

1. Qu’est-ce qu’un OGM ? possibilités théoriques de modifier génétiquement un organisme


dans le cadre de la recherche fondamentale et des applications
industrielles.

1.1 Définition
1.2 Mise au point d’une plante
Exemple : Un organisme génétiquement modifié (OGM) est un transgénique
organisme vivant dont le matériel génétique a été modifié autrement
que par multiplication ou recombinaison naturelles, c’est-à-dire par
modification de l’expression de l’un de ses gènes ou par addition d’un L’ensemble des techniques permettant ces interventions sur le
gène étranger. génome constitue le génie génétique, secteur majeur des biotechno-
logies ; il repose sur la connaissance des lois de l’hérédité que l’on
doit à Mendel (fin du 19e siècle), des techniques de culture in vitro
L’ADN (acide désoxyribonucléique) est le support de l’information principalement développées dans les années 1950 à 1970 et des
génétique transmise de génération en génération. Le gène constitue techniques de biologie moléculaire plus récentes.
l’unité de base de cette information.
On peut distinguer trois parties dans la schématique du plan
La chronologie de l’expression d’un gène est la suivante d’obtention d’une plante transgénique :
(figure 1) :
— la séquence d’ADN porteuse du gène est convertie, transcrite ■ En amont, intervient tout d’abord l’identification, dans une autre
en un autre type d’acide nucléique : l’ARN (acide ribonucléique) espèce, du gène d’intérêt (gène codant pour le caractère recherché).
messager ; Les avancées, dans le séquençage des génomes et dans l’étude
— ensuite, intervient un autre transfert de l’information : la tra- fonctionnelle des gènes, multiplient les possibilités.
duction protéique ; l’ARNm (ARN messager) sert de patron à la syn- On inclut ce gène dans une construction complète virale ou plas-
thèse d’une protéine particulière : à un gène spécifique correspond midique, comprenant des séquences régulatrices indispensables à
une protéine donnée. l’expression du gène d’intérêt : ce sont des séquences promotrice
L’introduction d’un gène étranger dans le génome d’un orga- (la plus couramment utilisée est le promoteur 35S du virus de la
nisme confère à cet organisme la capacité de synthétiser lui-même mosaïque du chou-fleur) et terminatrice (le terminateur NOS issu du
la protéine qu’il ne produit pas naturellement. gène de la nopaline synthase d’Agrobacterium tumefaciens).
Le transfert d’un gène (transgénèse) est rendu possible par le fait Le gène est alors intégré dans un vecteur d’expression.
que tous les organismes vivants (virus, bactéries, végétaux, Des gènes rapporteurs, comme le gène GUS (gène codant pour
animaux) possèdent le même système de codage et d’expression de une β-glucuronidase), permettront quant à eux un repérage visuel
l’information génétique. Cette universalité offre une infinité de plus ou moins quantifiable des cellules transformées.

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__________________________________________________________________________ ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

■ En aval, après le transfert, on régénère les plantes entières puis


ADN Noyau on sélectionne les plantes transgéniques grâce aux gènes mar-
Région Région Signal de fin queurs.
Gène promotrice transcrite de transcription
Ces régénérants transgéniques sont caractérisés bien sûr par la
présence du transgène, mais surtout par son expression.
On peut alors envisager la culture en serre. La CGG (Commission
ATG STOP du génie génétique) pose les règles de confinement et établit les

1
classes de risques pour les études. La physiologie de la nouvelle
plante est évaluée.
Transcription La CGB (Commission du génie biomoléculaire) autorise ou non
ARN intron les cultures en champs et la Commission européenne les commer-
a : transcrit primaire exon cialisations.
AUG STOP
5' 3'

1.3 Applications
b : épissage AUG STOP
des introns 5' 3' Le génie génétique est un outil très intéressant pour la recherche
fondamentale dans le cadre, entre autres, de la biologie et de la
physiologie du développement. Il permet d’identifier de nouveaux
c : « capping » 5' AUG STOP 3' gènes et de mieux comprendre leurs fonctions en provoquant une
de l'extrémité 5'
surexpression, une expression localisée, spécifique d‘un tissu ou
c' : ajout d'une d’un organe, une expression conditionnelle ou une suppression
Passage de l'ARN « queue » poly-A
messager « mature »
d’expression.
à l'extrémité 3'
dans le cytoplasme Outre la recherche fondamentale, on peut distinguer plusieurs
secteurs d’applications des plantes transgéniques (tableau 1) [2]
comme :
Cytoplasme
Traduction — la résistance aux agents pathogènes et aux ravageurs (virus,
(Déplacement des ribosomes) champignons, bactéries, insectes, nématodes) illustrée par des
variétés de maïs résistantes à la pyrale ; ici le principe est de faire
5' AUG STOP 3' produire par la plante une nouvelle protéine inhibitrice de protéase
ARN messager ou d’α-amylase empêchant la digestion chez l’insecte, autrement dit
Ribosome l’insecte meurt de faim. Les recherches actuelles visent à dévelop-
NH2
Chaîne polypeptidique per des stratégies à long terme pour éviter l’apparition de mutants
NH2 en diversifiant les mécanismes entomopathogènes afin de mainte-
nir des populations sensibles ;
ATG, AUG : séquences repères du début du gène (bases A, T, G, C, U...)
— la tolérance aux herbicides illustrée par les variétés de soja
tolérant au glyphosate (Round-Up Ready™, Monsanto Company).
Figure 1 – Structure générale d’un gène et cheminement
Les stratégies pouvant être mises en place sont la surexpression de
transcription-traduction
la cible de l’herbicide, la mutation de cette cible ou la détoxification ;
— la résistance aux facteurs environnementaux comme la séche-
resse, le froid, la salinité ou différentes formes de pollution. Dans la
De plus, des gènes marqueurs comme des gènes de résistance à nature, ces mécanismes sont multigéniques. Ce niveau de com-
un antibiotique où à un herbicide permettront d’isoler les plantes plexité est un écueil aujourd’hui pour la mise en application ;
effectivement transformées par pression de sélection. — la création de plantes mâles stériles pour la sélection. La tech-
Le vecteur ainsi obtenu est transféré dans des bactéries ou des nique Terminator (à ne pas confondre avec les séquences termina-
levures où il sera multiplié en grand nombre : c’est le clonage du trices régulatrices comme le terminateur NOS) permet de
gène. déclencher l’expression d’un gène à un stade précis du développe-
ment de la plante. La mise au point de semences donnant naissance
■ La seconde partie correspond au transfert du vecteur d’expres- à des plantes capable de produire des fruits sans graines est une
sion dans une cellule de la plante hôte par différents moyens selon application pouvant intéresser les producteurs. Encore plus moti-
la nature de la plante. vante, la possibilité de créer des semences à l’origine de produc-
On distingue les modes de transfert direct et indirect : tions végétales stériles interpelle les sélectionneurs du monde
entier. De telles semences garantiront une protection de leurs
— le transfert direct (par voie physique) peut se faire par l’élec- obtenteurs, car les agriculteurs ne pourront pas semer à partir des
troporation (ainsi ont été obtenus les premiers maïs transgéniques) récoltes. D’autre part, elles pourraient aussi limiter le recours aux
ou par la biolistique qui utilise un canon à microparticules recouver- herbicides dans le cas de cultures donnant lieu à des repousses
tes d’ADN recombinants avec lequel on tire sur les tissus à indésirables, notamment avec des variétés OGM ;
transformer [1] ; — la modification des propriétés physiologiques d’une plante
— le transfert indirect (par voie biologique) est effectué le plus requiert la connaissance des voies de synthèse ou de dégradation.
couramment via Agrobacterium tumefaciens. Cette bactérie para- La tomate à maturité retardée ou les fleurs dont on modifie la cou-
site a naturellement la capacité de transférer une partie de son ADN leur en sont des exemples ;
plasmidique dans le génome de la cellule qu’elle a prise pour hôte. — la modification des propriétés nutritionnelles : cela peut être la
En agissant sur l’ADN plasmidique, la bactérie permet le transfert modification de la composition en acides gras de l’huile de colza ou
souhaité. de la composition en acides aminés des protéines du maïs ou bien
Ces deux modes se complètent face aux difficultés techniques encore des betteraves plus riches en saccharose ;
rencontrées lors de la mise au point des protocoles, en fonction des — la production de molécules d’intérêt pharmaceutique
tissus et des espèces végétales manipulés. (tableau 2). (0)

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1

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OGM dans l’alimentation :


cadre légal en France
et dans l’Union européenne 1
par Gilbert THEISSEN
Ingénieur agronome
Expert près la cour administrative d’appel de @rseille et l c
our d’ppel de Montpellier

1. Organismes génétiquement modifiés................................................. F 1 155v2 - 2


1.1 Définitions..................................................................................................... — 2
1.2 Techniques d’obtention ............................................................................... — 3
1.3 Travaux et risques........................................................................................ — 3
2. Instances concernées .............................................................................. — 6
2.1 Au niveau de l’Union européenne .............................................................. — 6
2.2 En France ...................................................................................................... — 6
3. Législation française ............................................................................... — 7
3.1 Obligations ................................................................................................... — 7
3.2 Confidentialité .............................................................................................. — 10
3.3 Garanties et sanctions ................................................................................. — 10
3.4 Contrôle administratif .................................................................................. — 10
4. Productions végétales ............................................................................ — 10
4.1 Plantes, semences et plants ........................................................................ — 11
4.2 Produits phytopharmaceutiques ................................................................ — 11
4.3 Matières fertilisantes et supports de culture ............................................. — 11
5. Productions animales.............................................................................. — 11
6
. Biocides ....................................................................................................... — 13
7. Alimentation humaine ............................................................................ — 13
7.1 Situation actuelle ......................................................................................... — 13
7.2 Nouveaux aliments, nouveaux ingrédients alimentaires ......................... — 14
7.2 Étiquetage ..................................................................................................... — 15
8. Conclusion.................................................................................................. — 16
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. F 1 155v2

es progrès des biotechnologies ont permis aux scientifiques de mettre au


L point, dans les années 1970 à 1980, des techniques de manipulations géné-
tiques dont les possibilités sont considérables ; ainsi, celles-ci permettent des
transferts de gène entre des organismes très différents qu’ils appartiennent au
règne animal ou au règne végétal. Ces transferts de gène, également connus
sous le terme de transgénèse, ouvrent de nouveaux horizons pour l’améliora-
tion des productions de végétaux, d’animaux et de micro-organismes destinés
à l’alimentation humaine ou animale ainsi que pour l’industrie agroalimentaire.
La mise sur le marché de ces produits dits transgéniques n’est pas sans
soulever des interrogations, notamment en matière de risques vis-à-vis de
l’environnement et de la santé du consommateur qu’il s’agisse de l’homme
comme de l’animal.
Parution : décembre 2008

Le législateur a donc été conduit à prendre des dispositions législatives sécu-


risantes. Ainsi, la France a créé par arrêté du 4 novembre 1986la Commission
d’étude de l’utilisation de produits issus du génie biomoléculaire. Cette ins-
tance a été remplacée en 1989 par la Commission de génie génétique et par la

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OGM DANS L’ALIMENTATION : CADRE LÉGAL EN FRANCE ET DANS L’UNION EUROPÉENNE _______________________________________________________

Commission d’étude de la dissémination des produits issus du génie biomolé-


culaire (1989 et 1993). La loi fondamentale française relative au contrôle de
l’utilisation et de la dissémination des OGM a été promulguée le 13 juillet 1992
(loi no 92 54) ; de nombreux textes d’application couvrant les différents pro-
-6
duits génétiquement modifiés ont été publiés dans la foulée.
Afin de mettre le droit français en conformité avec les exigences communau-
taires, le législateur a adopté la loi no 2008-595 du 25 juin 2008 relative aux
1 organismes génétiquement modifiés. Ce texte crée le Haut Conseil des bio-
technologies et actualise les codes de l’environnement et de la santé publique
ainsi que le code rural.
Au niveau de l’Union européenne, une recommandation du Conseil du
30 juin 1982 concerne l’enregistrement des travaux relatifs à l’acide désoxyri-
bonucléique (ADN). Les directives fondamentales ont été adoptées le 23 avril
1990 ; elles concernent l’utilisation confinée des micro-organismes génétique-
ment modifiés (direc tive 90/219/CEE) et la dissémination volontaire
d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement (directive 90/220/
CEE remplacée par la directive 2001/18/CE).
L’objet de ce dossier est de présenter les dispositions législatives qui régis-
sent, en France et dans l’Union européenne, les OGM en agriculture et dans
l’alimentation. L’ensemble de ces textes classés par domaines concernés avec
leurs références est récapitulé en [Doc. F 1 155>].

1. Organismes Évaluation des risques pour l' environnement : évaluation

génétiquement modifiés des risques, directs ou indirects, immédiats ou différés, que la


dissémination volontaire ou la mise sur le marché d’OGM peut
comporter pour la santé humaine et l’environnement, effectuée
conformément à l’annexe II de la directive 2001/18/CE. Le cas
1.1 Définitions des OGM autres que les plantes supérieures et celui des plantes
supérieures génétiquement modifiées (PSGM) y sont dévelop-
En France, la Commission de terminologie pour le vocabulaire pés. La décision 2002/623/CE du 24juillet 2002 arrête les notes
des sciences et des techniques de l’agriculture et de l’agroalimen- explicatives relative à la dissémination volontaire d’OGM dans
taire a publié, par l’arrêté du 14 septembre 1990, les termes l’environnement.
recommandés dans le domaine du génie génétique, leur définition
et leur synonyme, un index anglais français et un index des termes Pour l’ensemble des OGM, les dispositions communautaires et
et impropriétés à éviter. leur transcription dans le droit national des États membres
distinguent :
Un avis publié au journal officiel français du 6 juillet 2008 a
complété le vocabulaire établi dans l’arrêté du 14 septembre 1990. – l’utilisation confinée à des fins de recherche, de développe-
ment ou d’enseignement dans une installation publique ou privée,
Le Code de l’environnement, partie législative, titre III, organis- et sans qu’il y ait, sauf à titre gratuit et aux fins d’essai, mise sur le
mes génétiquement modifiés, donne les définitions suivantes : marché des produits obtenus. Cette utilisation est subordonnée à
l’agrément de l’installation délivré par l’autorité administrative et à
la déclaration de mise en œuvre ;
– la dissémination volontaire, c’est-à-dire toute introduction
Organisme : toute entité biologique non cellulaire, cellulaire intentionnelle dans l’environnement d’un OGM ou d’une
ou multicellulaire, capable de se reproduire ou de transférer combinaison d’OGM pour laquelle aucune mesure de confinement
du matériel génétique. Cette définition englobe les micro- spécifique n’est prise pour limiter leur contact avec l’ensemble de
organismes, y compris les virus, les viroïdes et les cultures de la population et l’environnement et pour assurer à ces derniers un
cellules végétales et animales. niveau élevé de sécurité. Cette dissémination est soumise à une
Organisme génétiquement modifié (OGM) : organisme dont autorisation préalable après examen des risques que présente
le matériel génétique a été modifié autrement que par multi- cette opération pour la santé publique ou pour l’environnement ;
plication ou recombinaison naturelles. – la mise sur le marché, c’est-à-dire la mise à disposition de
Utilisation : toute opération ou ensemble d’opérations au tiers, à titre gratuit ou onéreux, de produits composés en tout ou
cours desquelles des organismes sont génétiquement modi- partie d’OGM. La mise sur le marché doit faire l’objet d’une autori-
fiés ou au cours desquelles des organismes génétiquement sation préalable délivrée par l’autorité administrative après
modifiés sont cultivés, mis en œuvre, stockés, transportés, examen des risques que présente cette opération pour la santé
détruits, éliminés ou mis en œuvre de toute autre manière. publique ou pour l’environnement.
Notification : présentation des informations requises par les Pour chacun des cas il y a obligation de versement des frais
textes à l’autorité compétente d’un État membre. d’instruction des demandes.
Notifiant : personne qui soumet la notification. Dans le droit français, des décrets en Conseil d’État précisent les
procédures spécifiques applicables aux différents produits concer-
Produit : préparation consistant en un OGM ou une
nés par les modifications génétiques ; nous les développons ulté-
combinaison d’OGM, ou en contenant, mise sur le marché.
rieurement.

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________________________________________________________ OGM DANS L’ALIMENTATION : CADRE LÉGAL EN FRANCE ET DANS L’UNION EUROPÉENNE

Les OGM et produits issus d’OGM peuvent être les suivants : – les effets sur la dynamique des populations d’espèces dans
– plantes, semences et plants ; l’environnement récepteur et la diversité génétique de chacune de
– matières fertilisantes et produits phytopharmaceutiques ; ces populations ;
– animaux de laboratoires, animaux d’élevage (de rente) ; – une altération de la sensibilité aux agents pathogènes facilitant
– médicaments à usage humain et vétérinaire ; la dissémination de maladies infectieuses et/ou créant de
– denrées alimentaires pour la consommation humaine et pro- nouveaux réservoirs ou vecteurs ;
duits destinés à l’alimentation des animaux et aux matériaux et – une diminution de l’efficacité des traitements médicaux, vétéri-
objets au contact de ces denrées ; naires et phytosanitaires prophylactiques ou thérapeutiques, par
– ingrédients, additifs et supports d’arômes utilisés ou destinés à
être utilisés dans ou sur les denrées alimentaires ;
– biocides et constituants entrant dans la composition des pro-
exemple par le transfert de gènes conférant une résistance aux
antibiotiques utilisés en médecine humaine ou vétérinaire ;
– les effets sur la biogéochimie (cycles biogéochimiques), en
1
duits de nettoyage des matériaux et objets destinés à entrer en particulier le recyclage du carbone et de l’azote par le biais de
contact avec des denrées, produits ou boissons destinés à l’ali- modifications de la décomposition des matières organiques du sol.
mentation de l’homme ou des animaux. Les effets négatifs peuvent se produire directement ou indirecte-
ment, par des mécanismes pouvant comprendre :
1.2 Techniques d’obtention – la propagation des OGM dans l’environnement ;
– le transfert du matériel génétique inséré à d’autres organismes
■ Sont concernés par les dispositions législatives OGM, les orga- ou au même organisme, qu’il soit génétiquement modifié ou non ;
nismes obtenus notamment par les techniques définies ci-après – l’instabilité phénotypique et génétique ;
(directive 2001/18/CE) : – les interactions avec d’autres organismes, les modifications de
la gestion, y compris, le cas échéant, des pratiques agricoles.
1. les techniques de recombinaison de l’acide désoxyribonu-
cléique impliquant la formation de nouvelles combinaisons de
matériel génétique par l’insertion de molécules d’acide nucléique, 1.3.2 Incidences potentielles sur l’environnement
produit de n’importe quelle façon hors d’un organisme, à l’inté- de la dissémination ou de la mise
rieur de tout virus, plasmide bactérien ou autre système vecteur et sur le marché du ou des OGM
leur incorporation dans un organisme hôte à l’intérieur duquel Sur la base d’une évaluation des risques pour l’environnement
elles n’apparaissent pas de façon naturelle, mais où elles peuvent effectuée conformément aux principes et aux méthodes décrites
se multiplier de façon continue ; dans l’annexe III de la directive 2001/18/CE, les informations sur
2. les techniques impliquant l’incorporation directe dans un les points énumérés dans les paragraphes 1.3.2.1 ou 1.3.2.2
organisme de matériel héréditaire préparé à l’extérieur de l’orga- doivent figurer, le cas échéant, dans les notifications afin d’aider à
nisme, y compris la microinjection, la macroinjection et le tirer les conclusions concernant les incidences potentielles sur
microencapsulation ; l’environnement que peuvent avoir la dissémination ou la mise sur
3. les techniques de fusion cellulaire (y compris la fusion de pro- le marché d’OGM.
toplastes) ou d’hybridation dans lesquelles des cellules vivantes
présentant de nouvelles combinaisons de matériel génétique héré- La directive 2002/811/CE du 3 octobre 2002 précise également le
ditaire sont constituées par la fusion de deux cellules ou davan- contenu du plan de surveillance par rapport à la santé humaine et
tage au moyen de méthodes qui ne sont pas mises en œuvre de l’environnement qui doit accompagner le dossier d’un OGM pré-
façon naturelle. senté par un notifiant.

■ Sont exclues des dispositions législatives relatives aux OGM les 1.3.2.1 Dans le cas des OGM autres que les plantes
organismes obtenus à partir des techniques mentionnées qui ne supérieures
sont pas considérées comme entraînant une modification géné- 1. Probabilité que l’OGM devienne persistant et se propage dans
tique et répondant aux conditions ci-après : des habitats naturels dans les conditions de la ou des dissémina-
1. elles n’impliquent pas l’emploi de molécules d’acide nucléique tions proposées.
recombinant ou d’OGM obtenus par des techniques/ méthodes 2. Avantages ou désavantages sélectifs conférés à l’OGM et leur
autres que celles qui sont exclues par le point 2., sont : probabilité d’apparition dans les conditions de la ou des dissémi-
nations proposées.
a) la fécondation in vitro,
3. Possibilité de transfert de gènes à d’autres espèces dans les
b) les processus naturels tels que la conjugaison, la trans- conditions de la dissémination proposée de l’OGM et avantages ou
duction, la transformation, inconvénients sélectifs conférés à ces espèces.
c) l’induction polyploïde ; 4. Incidences potentielles immédiates et/ou différées que les
2. qu’elles n’impliquent pas l’utilisation d’OGM en tant qu’orga- interactions directes ou indirectes entre l’OGM et des organismes
nismes récepteurs ou parentaux : cibles peuvent avoir sur l’environnement (le cas échéant).
5. Incidences potentielles immédiates et/ou différées que les
a) la mutagenèse,
interactions directes ou indirectes entre l’OGM et des organismes
b) la fusion cellulaire (y compris la fusion de protoplastes) de non ciblés peuvent avoir sur l’environnement, notamment les inci-
cellules végétales d’organismes qui peuvent échanger du matériel dences sur les niveaux de population des concurrents, proies,
génétique par des méthodes de sélection traditionnelles. hôtes, symbiotes, prédateurs, parasites et agents pathogènes.
6. Effets immédiats et/ou différés éventuels sur la santé humaine
résultant des interactions directes ou indirectes potentielles entre
1.3 Travaux et risques l’OGM et des personnes travaillant ou entrant en contact avec le
ou les OGM disséminés, ou se trouvant à proximité.
1.3.1 Effets négatifs potentiels sur la santé 7. Effets immédiats et/ou différés éventuels sur la santé des ani-
humaine, animale et végétale des OGM maux et conséquences pour la chaîne alimentaire résultant de la
consommation de l’OGM ou de tout produit dérivé s’il est destiné
Ils varient d’un cas à l’autre et peuvent comprendre : à être utilisé en tant qu’aliment pour animaux.
– les maladies pouvant affecter l’homme, y compris les effets 8. Effets immédiats et/ou différés éventuels sur les processus bio-
allergisants ou toxiques ; géochimiques résultant des interactions directes ou indirectes
– les maladies pouvant affecter les animaux ou les végétaux, y potentielles entre l’OGM et des organismes cibles ou des organis-
compris les effets toxiques et, le cas échéant, allergisants ; mes non-cibles se trouvant à proximité du ou des OGM disséminés.

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9. Incidences immédiates et/ou différées, directes ou indirectes, En cas d’hésitation quant à la classe la mieux adaptée à l’utilisa-
que les techniques spécifiques utilisées pour la gestion de l’OGM tion confinée prévue, les mesures de protection les plus strictes
peuvent avoir sur l’environnement lorsqu’elles sont différentes de doivent être appliquées, à moins que des preuves suffisantes
celles utilisées pour les organismes non génétiquement modifiés. soient apportées pour justifier l’application des mesures moins
strictes.
1.3.2.2 Dans le cas des plantes supérieures génétiquement Les éléments à prendre en considération pour l’évaluation du
modifiées (PSGM) risque concernent :

1
1. Probabilité que les PSGM deviennent plus persistantes que les – les maladies pouvant affecter l’homme, y compris les effets
plantes parentales ou réceptrices dans les habitats agricoles ou se allergisants ou toxiques ;
propagent plus rapidement dans les habitats naturels. – les maladies pouvant affecter les animaux ou les végétaux pré-
2. Avantages ou inconvénients sélectifs conférés aux PSGM. sents dans l’environnement susceptibles d’être exposés ;
3. Possibilité de transfert de gènes aux mêmes espèces ou à – les effets délétères dus à l’impossibilité de soigner une mala-
d’autres espèces végétales sexuellement compatibles dans les die ou de disposer d’une prophylaxie efficace ;
conditions de plantation du PSGM et avantages ou inconvénients – les effets délétères dus à l’établissement ou à la dissémination
sélectifs conférés à ces espèces végétales. dans l’environnement ;
4. Incidences immédiates et/ou différées que les interactions – les effets délétères dus au transfert naturel dans d’autres orga-
directes ou indirectes entre les PSGM et les organismes cibles, tels nismes de matériel génétique inséré.
que prédateurs, parasitoïdes et agents pathogènes peuvent avoir
sur l’environnement (le cas échéant). L’évaluation doit être fondée sur les éléments suivants :
5. Incidences immédiates et/ou différées que les interactions 1. l’identification de tout effet potentiellement nocif, notamment de
directes ou indirectes entre les PSGM et des organismes ceux qui sont liés au :
non-cibles (compte tenu également des interactions d’organismes a) micro-organisme récepteur,
avec les organismes cibles), notamment les incidences sur les b) matériel génétique inséré (provenant de l’organisme don-
niveaux de population des concurrents, herbivores, symbiotes (le neur),
cas échéant), parasites et agents pathogènes. c) vecteur,
6. Effets immédiats et/ou différés éventuels sur la santé humaine d) micro-organisme donneur (pour autant que le micro-orga-
résultant des interactions directes ou indirectes potentielles entre nisme donneur soit utilisé au cours de l’opération),
les PSGM et les personnes travaillant ou entrant en contact avec la e) micro-organisme génétiquement modifié qui en résulte ;
ou les PSGM disséminées ou se trouvant à proximité.
2. les caractéristiques de l’opération ;
7. Effets immédiats et/ou différés éventuels sur la santé des ani-
3. la gravité des effets potentiellement nocifs ;
maux et conséquences pour la chaîne alimentaire résultant de la
consommation de l’OGM ou de tout produit dérivé s’il est destiné 4. la possibilité de voir les effets potentiellement nocifs se réaliser.
à être utilisé en tant qu’aliment pour animaux.
8. Incidences immédiates et/ou différées sur les processus bio- 1.3.4 Classification des OGM
géochimiques résultant des interactions directes et indirectes
potentielles de l’OGM et des organismes cibles et non-cibles à Les organismes, en particulier les micro-organismes, généti-
proximité du ou des OGM disséminés. quement modifiés sont classés en groupes distincts en fonction
9. Incidences immédiates et/ou différées, directes ou indirectes, des classes de risques qu’ils présentent pour la santé publique ou
que les techniques spécifiques de culture, de gestion et de récolte l’environnement, et notamment de leur pathogénicité.
utilisées pour la PSGM peuvent avoir sur l’environnement En fonction des classes de risques (cf. § 1.3.3), les OGM sont
lorsqu’elles sont différentes de celles utilisées pour des plantes répartis en deux groupes.
supérieures non génétiquement modifiées.
■ Le groupe I est constitué par des systèmes expérimentaux
mettant en œuvre des organismes non pathogènes de classe 1 de
1.3.3 Utilisation confinée des OGM ne bénéficiant risque pour lesquels la nature du vecteur ou de la séquence donnée
pas d’une autorisation de mise sur le marché ne justifie pas une modification de classe de risque.
et classes de risque des opérations
Sont classés dans ce groupe les organismes, en particulier les
Ces classes ne concernent pas le stockage, la culture, le trans- micro-organismes, génétiquement modifiés répondant à tous les
port, la destruction, l’élimination ou l’utilisation des micro-orga- critères suivants :
nismes qui ont bénéficié d’une autorisation de mise sur le marché. 1. l’organisme, en particulier le micro-organisme, récepteur ou
• Classe 1 : opérations pour lesquelles le risque est nul ou parental, n’est pas susceptible de causer une pathologie chez
négligeable, c’est-à-dire opérations pour lesquelles le l’homme, les animaux ou les végétaux ;
niveau 1 de confinement est indiqué pour protéger la santé 2. le vecteur et l’insert sont de telle nature qu’ils ne puissent pas
humaine et l’environnement. doter l’organisme, et notamment le micro-organisme, généti-
quement modifié, d’un phénotype susceptible de causer une
• Classe 2 : opérations présentant un risque faible, c’est-à-dire pathologie chez l’homme, les animaux ou les végétaux ou causer
opérations pour lesquelles le niveau 2 de confinement est des effets négatifs sur l’environnement ;
indiqué pour protéger la santé humaine et l’environnement.
3. l’organisme, en particulier le micro-organisme, génétiquement
• Classe 3 : opérations présentant un risque modéré, c’est-à- modifié n’est pas susceptible de causer une pathologie chez
dire opérations pour lesquelles le niveau 3 de confinement l’homme, les animaux ou les végétaux ou causer des effets néga-
est indiqué pour protéger la santé humaine et l’environne- tifs sur l’environnement.
ment.
■ Le groupe II est constitué par des systèmes expérimentaux
• Classe 4 : opérations présentant un risque élevé, c’est-à-dire mettant en œuvre des organismes génétiquement modifiés autres
opérations pour lesquelles le niveau 4 de confinement est que ceux mentionnés au groupe I ci-dessus et comprend notam-
indiqué pour protéger la santé humaine et l’environnement. ment les micro-organismes des classes de risque 2, 3 et 4. Ces
Les exigences détaillées de ces niveaux de confinement sont classes de risque correspondant respectivement aux groupes 2, 3
développées dans l’annexe IV de la directive 98/81/CE modifiant la et 4 tels que définis à l’article R. 231-61-1 du Code du travail
directive 90/219/CEE. (décret no 93-774 modifié du 27 mars 1993).

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1.3.5 Classement des agents biologiques Les mesures et définitions des niveaux de confinement minimal
à mettre en œuvre pour les agents biologiques, y compris les OGM :
Au sens de l’article R. 231-61-1 du Code du travail, sont – dans les laboratoires de recherche, de développement et
considérés comme « agents biologiques » les micro-orga- d’enseignement ;
nismes, y compris les micro-organismes génétiquement modi- – dans les laboratoires industriels ;
fiés, les cultures cellulaires et les endoparasites humains qui – dans les établissements industriels ou agricoles, à des fins de
sont susceptibles de provoquer une infection, une allergie ou production,

1
une intoxication. comportent quatre niveaux (cf. § 1.3.3).
En France, le manuel 2000 « principes de classement et guides
Les agents biologiques sont classés en quatre groupes en fonc- officiels de la commission de génie génétique », des circulaires du
tion de l’importance du risque d’infection qu’ils présentent : ministère chargé de l’environnement (18 avril 1996, 24 juin 2002 et
– groupe 1 ; agent qui n’est pas susceptible de provoquer une 15 mai 2003) donnent des précisions complémentaires.
maladie chez l’homme ; La procédure obligatoire d’agrément de ces laboratoires est
– groupe 2 ; agent pouvant provoquer une maladie chez développée dans le Code de l’environnement, partie réglementaire
l’homme et constituer un danger pour les travailleurs ; sa propaga- Titre III, articles R. 532-1 à R. 532-17 (décret no 2007-1467 du
tion dans la collectivité est improbable ; il existe généralement une 12 octobre 2007).
prophylaxie ou un traitement efficace ;
– groupe 3 ; agent pouvant provoquer une maladie grave chez
l’homme et constituer un danger sérieux pour les travailleurs ; il peut 1.3.7 Procédure de notification
présenter un risque élevé de propagation dans la collectivité mais 1. Avant la mise sur le marché d’un OGM ou d’une combinaison
il existe généralement une prophylaxie ou un traitement efficace ; d’OGM en tant que produits ou éléments de produits, une notification
– groupe 4 ; agent provoquant des maladies graves chez l’homme est adressée à l’autorité compétente de l’État membre où cet OGM
et constituant un danger sérieux pour les travailleurs ; il peut pré- sera mis sur le marché pour la première fois. L’autorité compétente
senter un risque élevé de propagation dans la collectivité ; il n’existe accuse réception de la notification en prenant acte de la date de
généralement pas de prophylaxie ni de traitement efficace. celle-ci et transmet immédiatement la synthèse du dossier aux auto-
Sont considérés comme agents biologiques pathogènes, au rités compétentes des autres États membres et à la Commission.
sens de l’article R. 231-61 (décret no 94-352 du 4 mai 1994), les L’autorité compétente examine sans tarder si la notification est
agents biologiques des groupes 2, 3 et 4. conforme et, si cela est nécessaire, demande au notifiant des infor-
mations complémentaires.
Cette répartition, celle des OGM en groupe I ou II et les Si la notification est conforme et au plus tard au moment où elle
classes de risque des opérations réalisées sur des OGM sont à envoie son rapport d’évaluation, l’autorité compétente en transmet
la base des règles de confinement qui doivent être respectées une copie à la Commission, qui la transmet au plus tard dans les
pour la sécurité des travailleurs et de l’environnement dans trente jours qui suivent sa réception aux autorités compétentes
les établissements concernés (décret no 94-352 du 4 mai 1994, des autres États membres.
arrêté du 2 juin 1998 et arrêté du 16 juillet 2007).
2. La notification contient :
a) les informations requises par la directive 2001/18/CE. Ces infor-
1.3.6Installations classées mations tiennent compte de la diversité des sites d’utilisation des
Sont concernées par la législation sur les installations classées OGM en tant que produits ou éléments de produits et incluent les
pour la protection de l’environnement les établissements dans les- données et les résultats obtenus lors de disséminations effectuées
quels sont mis en œuvre, dans un processus de production indus- au titre de la recherche et du développement sur les conséquences
trielle ou commerciale, des OGM. Ils sont soumis : de la dissémination pour la santé humaine et l’environnement ;
– à déclaration sous la rubrique no 2680-1 si les OGM sont clas- b) l’évaluation des risques pour l’environnement ;
sés dans le groupe I. Les prescriptions générales applicables sont c) les conditions pour la mise sur le marché du produit, y
fixées par arrêté du 2 juin 1998 ; compris les conditions spécifiques d’utilisation et de
– à autorisation sous la rubrique no 2680-2 si les OGM sont clas- manipulation ;
sés dans le groupe II. Les règles techniques auxquelles ils doivent
d) la durée proposée pour l’autorisation, qui ne devrait pas
satisfaire sont fixées par arrêté du 2 juin 1998.
dépasser dix ans ;
Les textes de références sont :
e) un plan de surveillance conforme, y compris une proposition
– le Livre V, préventions des pollutions, des risques et des nui- relative à la durée de ce plan ; cette durée peut être différente de la
sances du Code de l’environnement, titre Ier Installations classées durée proposée pour l’autorisation ;
pour la protection de l’environnement ;
– le décret no 94-352 du 4 mai 1994 relatif à la protection des f) un projet d’étiquetage qui satisfait aux exigences spécifiées, à
travailleurs contre les risques résultant de leur exposition à des l’annexe IV de la directive 2001/18/CE. L’étiquetage indique claire-
agents biologiques ; ment la présence d’un OGM. La mention « Ce produit contient des
– les arrêtés du 2 juin 1998 relatifs aux prescriptions générales organismes génétiquement modifiés » doit figurer sur une éti-
applicables aux établissements soumis à déclaration (no 2680-1) quette ou sur un document d’accompagnement ;
ou à autorisation (no 2680-2). g) un projet d’emballage qui intègre les exigences spécifiées à
Les activités portant sur la mise en œuvre dans un processus de l’annexe IV de la directive ;
production industrielle ou commerciale d’OGM : h) une synthèse du dossier.
– du groupe I, soumises à déclaration (no 2680-1) sont éxonérées Si, sur la base des résultats d’une dissémination notifiée ou
de la taxe générale sur les activités polluantes ; d’autres considérations scientifiques de fond motivées, un noti-
– du groupe II, soumises à autorisation (no 2680-2), sont assujet- fiant estime que la mise sur le marché et l’utilisation d’un OGM en
ties à la taxe générale sur les activités polluantes. Le montant, tant que produit ou élément de produit ne présentent pas de ris-
quelle que soit la capacité de l’activité, s’élève à huit fois le taux de ques pour la santé humaine ni pour l’environnement, il peut pro-
base prévu par la loi no 76-663 du 19 juillet 1976 (décret no 83-929 poser à l’autorité compétente de ne pas fournir tout ou partie de
du 21 octobre 1983 modifié). certaines informations exigées.

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73
Référence Internet
F1155

OGM DANS L’ALIMENTATION : CADRE LÉGAL EN FRANCE ET DANS L’UNION EUROPÉENNE _______________________________________________________

3. Le notifiant inclut dans cette notification des informations sur méthodes prévues dans la demande sont précises et suffisamment
les données ou les résultats des disséminations du même OGM ou efficaces pour détecter les OGM dans les échantillons de denrées
de la même combinaison d’OGM qu’il a déjà notifiées ou qu’il noti- alimentaires et d’aliments pour animaux.
fie actuellement et/ou auxquelles il a procédé ou procède à l’inté- Le CCRC anime le réseau des laboratoires nationaux de contrôle
rieur ou à l’extérieur de la Communauté. [European Ne/ork of GMO Laboratories]. La liste des laboratoires
4. Le notifiant peut également se référer à des données ou à des français membres du réseau est encadrée dans ce dossier.
résultats fournis lors de notifications adressées antérieurement par Il comprend également l’Institute for Health and Consumer

1
d’autres notifiants ou présenter toute autre information qu’il juge Protection (IHCP). La mission de l’IHCP est d’améliorer les
pertinente, à condition que les informations, données et résultats connaissances scientifiques et techniques au sein des services de
ne soient pas confidentiels ou que ces notifiants aient donné leur la Commission de l’UE et des autorités compétentes des États
accord par écrit. membres quant aux dangers que pourraient présenter les produits
5. Une notification distincte est nécessaire pour qu’un OGM ou et procédés de divers types auxquels les citoyens européens pour-
une combinaison d’OGM puisse être utilisé à d’autres fins que cel- raient être exposés.
les qui sont spécifiées dans la notification.
Si de nouvelles informations concernant les risques que l’OGM
présente pour la santé humaine ou l’environnement sont devenues 2.2 En France
disponibles avant que l’autorisation écrite soit accordée, le noti-
fiant doit prendre immédiatement les mesures nécessaires pour
protéger la santé humaine et l’environnement et en informe l’auto- 2.2.1 Haut Conseil des biotechnologies
rité compétente. Le notifiant révise, en outre, les informations et Le Haut Conseil des biotechnologies a pour missions d’éclairer
les conditions spécifiées dans la notification. le gouvernement sur toutes questions intéressant les organismes
génétiquement modifiés ou toute autre biotechnologie et de for-
muler des avis en matière d’évaluation des risques pour l’environ-
nement et la santé publique, que peuvent présenter l’utilisation
2. Instances concernées confinée ou la dissémination volontaire des organismes généti-
quement modifiés, ainsi qu’en matière de surveillance biologique
du territoire, sans préjudice des compétences exercées par les
2.1 Au niveau de l’Union européenne agences de sécurité sanitaire des aliments et de celle des produits
de santé. Ses avis et recommandations sont rendus publics.

2.1.1 Autorité européenne de sécurité


des aliments (AESA) 2.2.2 Comité de préfiguration d’une haute
autorité sur les OGM
L’AESA, créée par le règlement no178/2002 du 28 janvier 2002
pour étudier les questions relatives à la santé des consommateurs Le décret no 2007-1710 a institué ce comité chargé d’une mission
et à la sécurité alimentaire, est assistée de différents comités temporaire de réflexion sur les missions, la composition et le fonc-
scientifiques et de groupes scientifiques spécialisés qui émettent tionnement de la haute autorité sur les OGM. Il peut être saisi
des avis. conjointement par les ministres chargés de l’environnement, de
l’agriculture, de la recherche et de la santé sur toute question rela-
Sont concernés par les aspects OGM les comités scientifiques tive à l’utilisation confinée ou à la dissémination volontaire d’orga-
suivants : nismes génétiquement modifiés.
1. alimentation humaine ;
2. alimentation animale ; Outre son président, le Comité de préfiguration de la haute auto-
3. santé et bien-être des animaux ; rité sur les organismes génétiquement modifiés est composé de
4. mesures vétérinaires en rapport avec la santé publique ; trente-quatre membres, répartis en une section scientifique et une
5. médicaments et dispositifs médicaux (pour les médicaments section économique, éthique et sociale.
vétérinaires) ; L’arrêté du 7 décembre 2007 porte nomination du président et
6. plantes ; des membres du comité.
7. toxicité, écotoxicité et environnement. La loi no 2008-595 prévoit également la création d’un comité de
et le groupe scientifique sur les OGM. surveillance biologique du territoire, composé de personnalités
Chaque comité scientifique se compose d’experts scientifiques désignées, compétentes dans l’écotoxicologie, les sciences agro-
nommés par la Commission après appel à manifestation d’intérêt. nomiques ou la protection de l’environnement et des végétaux.
Les comités scientifiques peuvent comporter des sous-comités et
constituer des groupes de travail spécifiques. Des experts exté- 2.2.3 Commission du génie biomoléculaire CGB
rieurs peuvent être invités à participer aux travaux.
Cette instance consultative est obligatoirement saisie par l’admi-
nistration avant toute autorisation de dissémination volontaire
2.1.2 Centre commun de recherche d’OGM. Elle représente une étape essentielle dans le processus
de la Commission (CCRC) français et européen d’autorisation des OGM.
pour la détection des OGM
Le Centre commun de recherche (CCR) de la Commission est 2.2.4 Agence française de sécurité sanitaire
chargé de gérer la détection, l’identification et la quantification des des aliments (AFSSA)
OGM présents dans les échantillons de denrées alimentaires et
d’aliments pour animaux dans toute l’Europe. Il constitue le labo- Créée par décret no 99-242 du 26 mars 1999 et placée sous
ratoire communautaire de référence chargé de coordonner la vali- tutelle des ministres chargés de la santé, de l’agriculture et de la
dation des méthodes de détection. Les autorisations concernant consommation, elle a notamment pour mission d’apporter un
des denrées alimentaires ou des aliments pour animaux contenant appui scientifique et technique en matière d’OGM. Elle émet, dans
des OGM ne peuvent être accordées que si le laboratoire de réfé- un certain nombre de domaines, un avis destiné aux différents
rence communautaire atteste, à l’issue d’une série de tests, que les ministres concernés.

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F 1 155v2 – 6 est strictement interdite. – © Editions T.I.

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F1200

Confinement rapproché
dans les IAA au moyen d’isolateurs
par Valérie LERICHE-SIBILLE
Ingénieur en agroalimentaire, docteur en sciences de l’alimentation
Ingénieur technico-commercial, société La Calhène
1
et Philippe FONTCUBERTA
Directeur des ventes, société La Calhène

1. Techniques de l’ultrapropreté .............................................................. F 1 200 - 2


1.1 Salles blanches ............................................................................................ — 2
1.1.1 Définition ............................................................................................. — 2
1.1.2 Conception générale .......................................................................... — 2
1.1.3 Performances ...................................................................................... — 3
1.1.4 Applications en IAA ............................................................................ — 4
1.2 Protection rapprochée................................................................................. — 4
1.2.1 Modules à flux laminaires.................................................................. — 4
1.2.2 Technologies développées par l’association UNIR.......................... — 4
1.2.3 Isolateurs ............................................................................................. — 6
2. L’isolateur, une nouvelle technique pour les IAA ........................... — 6
2.1 Définition ...................................................................................................... — 6
2.2 Principe fonctionnel..................................................................................... — 7
2.2.1 Barrière de confinement .................................................................... — 7
2.2.2 Traitement de l’air et des surfaces .................................................... — 8
2.2.3 Manipulation ....................................................................................... — 11
2.2.4 Transferts aseptiques ......................................................................... — 12
2.3 Contrôle des performances ........................................................................ — 14
2.3.1 Étanchéité et confinement ................................................................. — 14
2.3.2 Contrôle du système de ventilation/filtration................................... — 15
2.3.3 Validation de la procédure de biodécontamination......................... — 15
2.3.4 Autres contrôles.................................................................................. — 15
3. Applications en IAA ................................................................................ — 15
3.1 Conception d’un isolateur sur une ligne de production........................... — 15
3.2 Exemples d’applications ............................................................................. — 17
3.2.1 Remplissage/bouchage aseptique .................................................... — 17
3.2.2 Tranchage/conditionnement aseptique ............................................ — 18
3.2.3 Transfert et transport de produits pompables
et de composants d’emballage ......................................................... — 18
3.2.4 Dosage/operculage............................................................................. — 19
4. Conclusion ................................................................................................. — 19
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. F 1 200

ujourd’hui, la maîtrise de la contamination microbiologique des denrées


A alimentaires apparaît essentielle non seulement pour garantir leur innocuité
pour le consommateur mais aussi pour proposer des produits conformes aux
critères réglementaires et présentant une qualité organoleptique constante
et satisfaisante. Elle s’inscrit dans la démarche qualité des entreprises
(directive 93/43/CEE relative à l’hygiène des denrées alimentaires) et s’impose
tout au long de la chaîne de fabrication et de distribution du produit.
La contamination microbiologique d’un produit peut être apportée par la
matière première (contamination primaire) et /ou par l’environnement
(contamination secondaire). Ce dernier a été impliqué dans plus de 20 % des
Parution : juin 2002

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© Techniques de l’Ingénieur, traité Agroalimentaire F 1 200 − 1

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F1200

CONFINEMENT RAPPROCHÉ DANS LES IAA AU MOYEN D’ISOLATEURS ___________________________________________________________________________

toxi-infections alimentaires collectives déclarées en 1997 [1], les vecteurs de


contamination principaux étant l’air, le personnel, les surfaces des équipements.
Pour minimiser l’apport de ces contaminations, la directive européenne 93/43
a instauré des règles d’hygiène générales. Les industriels ont aussi recours, dès
qu’ils le peuvent, à des traitements de stabilisation en fin de process (élimination
de l’eau par séchage, stabilisation par le froid, traitement par la chaleur, utilisation
de conservateurs, conservation sous atmosphère modifiée, traitement par

1 rayonnements ionisants...). Ces procédés technologiques présentent cependant


l’inconvénient d’entraîner des modifications des produits au niveau de leur
texture, de leurs caractéristiques organoleptiques et de leurs qualités nutrition-
nelles. Lorsque le processus de transformation ne permet pas l’emploi de tels
traitements ou lorsque les produits traités subissent ensuite des opérations de
transformation particulièrement sensibles aux contaminations microbiologiques
(tranchage, portionnage, dosage...), une autre solution consiste à limiter l’apport
de contaminations secondaires par des équipements de protection dont le prin-
cipal point commun est de délivrer un air de qualité microbiologiquement
contrôlée autour du produit. Ces installations sont l’objet d’un intérêt croissant
car elles permettent non seulement de préserver la qualité hygiénique du produit,
d’augmenter sa durée de conservation mais aussi d’offrir au consommateur des
produits « plus naturels » avec des qualités sensorielles, nutritionnelles et de
service correspondant à ses attentes.
Différents équipements sont utilisés dans l’industrie agroalimentaire pour se
prémunir des contaminations microbiologiques apportées par l’environnement.
L’isolateur représente une technologie alternative.

1. Techniques Historique
de l’ultrapropreté
La technologie des salles propres s’est développée dans les
domaines médicaux en même temps que dans l’industrie de
1.1 Salles blanches l’armement, à l’époque de la Seconde Guerre mondiale. Les
premières applications industrielles, réalisées aux États-Unis et
1.1.1 Définition en Grande-Bretagne, visaient à améliorer la qualité et la fiabilité
de l’instrumentation utilisée pour les armes, les chars et les
Une salle propre est définie comme « un local où le degré de avions [2]. Au début des années 1960, l’évolution technologique
contamination est connu et maîtrisé » [5]. Les contaminants peu- que connaissait l’industrie microélectronique (production de
vent être d’origine particulaire (particule inerte ou vivante) ou composants de plus en plus miniaturisés, de plus en plus
chimique (sous forme gazeuse, liquide ou solide). Ils peuvent pro- complexes et au fonctionnement sensible à la présence de
venir de sources multiples (équipements de production, présence particules microscopiques) l’a conduite à utiliser ce nouvel outil
et activité du personnel, usure des plans de travail ou des surfaces pour réduire le nombre de produits défectueux tout en
des locaux...) et être véhiculés par l’air, les surfaces, le personnel, améliorant la productivité [3]. Les salles blanches ont connu
les fluides, etc. ensuite un essor important dans de nombreux autres secteurs
Plusieurs termes existent pour désigner les salles blanches : (industries spatiale, automobile, pharmaceutique, agroalimen-
salle propre, salle (ou zone) à contamination contrôlée (ZAC), salle taire, biotechnologies...) car elles répondaient aux contraintes
(ou zone) à empoussièrement contrôlé. En industrie agroalimen- technologiques de fabrication (micro- et submicrotechnologies,
taire, le terme de salle microbiologiquement maîtrisée (SMM) est industrie automobile pour les ateliers de peinture), aux
fréquemment employé car la source de contamination majeure à contraintes de sécurité et de conformité réglementaire (indus-
contrôler est non pas les particules inertes ou les contaminants tries pharmaceutique et agroalimentaire) et aux exigences du
chimiquement actifs (contaminants chimiques ou moléculaires) marché qui imposait une baisse des coûts de production et un
mais les particules vivantes que sont les micro-organismes. certain niveau de qualité (diminution des défauts). Elles
procuraient aussi un avantage concurrentiel par la qualité des
produits fabriqués et par l’image de marque qu’elles
1.1.2 Conception générale offraient [4].

La salle blanche a pour principal objectif de protéger le produit


contre la contamination particulaire et plus précisément dans La filtration de l’air réalisée grâce à des filtres de très haute
l’agroalimentaire contre les particules viables. Sa conception efficacité (THE) permet d’apporter un air propre au contact du pro-
s’inscrit dans un système de cohérence globale, visant à mini- duit à protéger. Les filtres utilisés en agroalimentaire sont des fil-
miser toutes les sources de contamination possibles. Les moyens tres HEPA (high efficiency particulate air ) de type H14 (tableau 1)
mis en œuvre pour maîtriser l’environnement dans les salles dont l’efficacité globale minimale est de 99,995 % selon la norme
blanches reposent essentiellement sur un contrôle de la NF EN 1822. Les filtres ULPA (ultra low penetration air ) sont le plus
contamination aéroportée. souvent réservés aux salles propres les plus performantes de

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F 1 200 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Agroalimentaire

76
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F1200

__________________________________________________________________________ CONFINEMENT RAPPROCHÉ DANS LES IAA AU MOYEN D’ISOLATEURS

l’industrie microélectronique. En pratique, une préfiltration par des L’accès à la zone propre s’effectue obligatoirement par l’inter-
filtres à haute ou à moyenne efficacité précède les filtres HEPA ou médiaire de sas de transfert. Ces sas sont conçus pour préserver
ULPA pour éliminer les plus grosses particules (filtres de type la qualité particulaire de la salle blanche : ils présentent un gra-
opacimétrique 85 %), protéger les éléments de la centrale de trai- dient de pression médian entre les deux locaux qu’ils desservent.
tement d’air, et allonger ainsi la durée de vie des filtres à très haute Chaque sas possède une fonction spécifique (sas de transfert de
efficacité. matériel, sas d’entrée et de sortie du personnel...). L’ouverture des
portes y est synchronisée et temporisée. Le principe de la marche
(0)
en avant des produits doit être respecté.

Tableau 1 – Classification des filtres de très haute efficacité


1.1.3 Performances
1
selon la norme NF EN 1822 [6]
Efficacité MPPS Efficacité MPPS Les degrés d’exigence en terme de niveau de performance
Classe
globale locale diffèrent selon les secteurs d’activité et leurs besoins. Plusieurs
(selon NF EN 1822)
(%) (%) normes et législations existent ou sont en cours de rédaction [7]
[8] [9]. Dans le secteur agroalimentaire, des normes internationales
⭓ 85 H10 [Doc F 1 200] et les Bonnes Pratiques de Fabrication pour les médi-
caments à usage humain de l’Union européenne [10] sont particu-
⭓ 95 H11 lièrement utiles. Ces normes :
— précisent les définitions et les termes employés en salles
⭓ 99,5 H12 HEPA blanches ;

⭓ 99,95 ⭓ 99,75 H13 — fournissent des exigences et des conseils sur la conception, la
construction et l’exploitation des installations ;
⭓ 99,995 ⭓ 99,975 H14 — définissent des méthodes de sélection d’appareils de mesures
et des procédures d’essais pour réaliser des contrôles ou inter-
⭓ 99,9995 ⭓ 99,9975 U15 préter des résultats d’essais ;
— classent les salles blanches en fonction de leur degré
⭓ 99,99995 ⭓ 99,99975 U16 ULPA d’empoussièrement (exprimé en nombre de particules d’une
certaine taille par unité de volume). La norme ISO 14644-1 rem-
⭓ 99,999995 ⭓ 99,9999 U17 place des normes européennes et remplacera bientôt la norme
américaine FED-SID 209E. Le tableau B [Doc F 1 200] présente les
La dimension de la particule la plus difficile à arrêter (MPPS : most équivalences entre ces différentes normes. Dans la plupart des
penetrating particule size ) est comprise entre 0,1 et 0,2 µm selon les filtres applications alimentaires, seules les unités viables méritent d’être
et la vitesse de passage de l’air dans le média.
étudiées. Or, il n’existe pas de relation proportionnelle entre la bio-
Efficacité MPPS : particules retenues /particules incidentes.
contamination et la contamination particulaire [7]. Le dénombre-
L’efficacité MPPS globale est déterminée par comptage particulaire sur ment et la mesure de la taille des particules ne renseignent donc
l’ensemble du filtre.
pas sur la propreté microbiologique de l’air. En 2001, seuls le guide
L’efficacité MPPS locale est déterminée par comptage particulaire point
par point. de Bonnes Pratiques de Fabrication des médicaments [10] et la
norme ISO 14698 intègrent cette notion de biocontamination en
définissant des classes particulaires et microbiologiques.
Les salles blanches délimitent un grand volume qui accueille les
Un brassage d’air important entraîne les particules générées opérateurs, les machines et tout le matériel de production. La
dans la salle blanche. Dans une salle conventionnelle, le taux de propreté de l’air de ces salles blanches et la qualité microbiologi-
renouvellement de l’air est situé entre 20 et 60 vol/h [2]. Cette que résultante des produits traités dépendent donc étroitement
valeur est fixée en fonction de la classe de l’enceinte, de l’activité des machines, des individus, de leur nombre et de leur activité à
(dégagement de particules) et des apports calorifiques internes : l’intérieur de la salle. Les machines installées en salles propres
plus les performances à atteindre sont hautes, plus le taux de bras- peuvent émettre plusieurs centaines de millions de particules de
sage est important. 0,5 µm par minute. L’homme est à la fois vecteur et source de
contamination potentielle pour l’aliment. C’est la première source
Le maintien d’une surpression (ou d’une dépression dans le cas
de rejet de particules : il libère en permanence des « particules
de manipulations de produits dangereux pour l’environnement)
vivantes » à partir des cheveux, de la peau (desquamation cuta-
dans la zone propre évite la pénétration (ou la sortie) de particules
née), de la bouche et du nez (émission rhino-pharyngée). Les par-
véhiculées par l’air. Les gradients de pression entre les différents
ticules vivantes émises peuvent être transportées par les
locaux de la salle blanche sont définis en fonction de l’étanchéité
mouvements d’air, se déposer sur les surfaces et les coloniser,
de l’enceinte et de la classe d’empoussièrement que l’on souhaite
entraînant la formation de biofilms qui, une fois installés, sont par-
atteindre. Ils permettent d’instaurer un flux d’air de la zone la plus
ticulièrement difficiles à éliminer, même avec des procédures
propre (ou la zone la moins toxique) vers la zone la moins propre
d’hygiène drastiques [11]. La stratégie de contrôle consiste à éta-
(ou la plus toxique). La surpression (ou la dépression) la plus éle-
blir des procédures de nettoyage-désinfection rigoureuses et à
vée est appliquée dans la zone la plus sensible et la pression la
recouvrir les opérateurs de vêtements (combinaison, surbottes,
plus basse (ou la plus haute) dans la zone la moins sensible (cas-
cagoule...) dont la texture a été spécialement conçue pour limiter
cade de pression). La pression différentielle entre deux locaux est
la diffusion et la dispersion particulaire [12] [13]. Ainsi, les indivi-
en pratique supérieure ou égale à 15 Pa.
dus évoluant dans une salle propre avec des vêtements inadé-
Une finition adéquate des surfaces intérieures est exigée. Les quats vont émettre en moyenne 2 · 10 6 particules de 0,5 µm,
salles blanches sont construites avec des matériaux qui ne génè- 3 · 105 particules de 5 µm et 160 bactéries par minute [2]. Le port
rent pas de particules et qui sont faciles à nettoyer. Les surfaces d’une tenue vestimentaire spécialement étudiée pour limiter la dif-
des murs, des sols et des équipements sont conçues pour être fusion et la dispersion particulaire permet de réduire le taux de
accessibles au nettoyage et ne pas présenter de « nids à pous- particules émises de 50 à 88 % et le taux de micro-organismes de
sières ». 92 % [2].

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F1200

CONFINEMENT RAPPROCHÉ DANS LES IAA AU MOYEN D’ISOLATEURS ___________________________________________________________________________

Les salles blanches traitées en flux turbulents peuvent ainsi à l’intérieur de la zone sensible mais son efficacité est beaucoup
atteindre les performances d’une classe 1 000 en activité mais sont plus délicate à établir sur des zones de ligne de production sans
généralement de classe 10 000 ou plus. cesse perturbées par les flux de produits et les interventions des
opérateurs. De par ces difficultés, les flux laminaires équipant les
lignes de production sont toujours placés dans des salles à atmo-
sphère contrôlée pour minimiser les risques de contamination. Ils
1.1.4 Applications en IAA sont donc sujets aux mêmes contraintes d’utilisation que celles
imposées en salle blanche (respect des règles d’hygiène, port

1 Le choix d’une classe d’empoussièrement doit être adapté à


l’exigence de qualité du produit fabriqué. En industrie agro-
alimentaire, les salles blanches de classes d’empoussièrement
d’une tenue spéciale, accès par l’intermédiaire de sas, etc.).
Dans l’industrie agroalimentaire, les salles composites (combi-
nant flux laminaires et flux turbulents) sont utilisées pour le
10 000 ou 100 000 sont utilisées pour les opérations de portion- conditionnement de produits très sensibles tels que le lait, les
nage et de conditionnement de certains produits sensibles tels que produits lactés ou certaines boissons non carbonatées. Les IAA uti-
la charcuterie ou les plats cuisinés. Bien qu’elles ne traitent que le lisent des machines automatiques ou semi-automatiques munies
vecteur de contamination « air » (les opérateurs en tenue parti- de cabines ventilées par des modules à flux laminaires, donnant
culière, les surfaces des locaux et les surfaces des machines peu- une classe d’empoussièrement de 1 000. Ces machines, ainsi
vent encore polluer les produits), les salles blanches ont permis confinées, sont elles-mêmes installées dans des salles à empous-
d’améliorer significativement l’hygiène des zones de travail et la sièrement contrôlé de classe 10 000 ou 100 000. Dans ces applica-
qualité microbiologique des produits traités [14]. Le système ne tions, une attention toute particulière est apportée au traitement
peut cependant être efficace que si le personnel est sensibilisé à des emballages (bouteilles, bouchons, pots, films d’operculage,
l’hygiène, formé et informé des contraintes liées au travail en salle etc.) qui sont le plus souvent stérilisés in situ par voie chimique
blanche. Il doit obéir aux règles d’hygiène rigoureuses qu’impose avant d’être transférés dans l’enceinte protégée.
ce système et effectuer des contrôles permanents, sous peine
d’avoir une fausse sécurité. De telles installations pourraient être considérées comme suffi-
santes dans de nombreux cas, si les opérateurs n’avaient pas
besoin d’intervenir fréquemment dans la zone confinée, pour des
actions aussi simples que le redressement d’un emballage tombé
1.2 Protection rapprochée sur un convoyeur ou pour débloquer une chute d’alimentation de
bouchons. Comme dans les salles blanches, les résultats sont alors
tributaires du strict respect des procédures par le personnel
d’exploitation (le flux laminaire impose en plus une gestuelle par-
1.2.1 Modules à flux laminaires ticulière), ce qui exige encore une fois d’importants
investissements en matière de sensibilisation et de formation du
La notion de protection rapprochée a été développée pour personnel.
optimiser les coûts d’installation, d’exploitation et de maintenance.
Son principe est de répondre à des objectifs de qualité d’air dans
un volume restreint correspondant aux zones sensibles du procédé 1.2.2 Technologies développées
de fabrication. par l’association UNIR
Le flux unidirectionnel (plus connu sous le nom de flux lami-
naire) fut la première technique à être utilisée en agroalimentaire Nota : l’UNIR (Ultrapropre Nutrition Industrie Recherche) est une association qui
pour conférer aux zones particulièrement sensibles une protection regroupe des industriels de l’agroalimentaire. Le document [16] a directement inspiré ce
paragraphe.
supplémentaire (il permet d’obtenir des enceintes de classe 1 à
100 [5]). Comme dans les salles dites blanches, l’air est filtré au tra- Pour renforcer la protection du produit et surtout mieux la
vers de filtres de très haute efficacité mais circule dans une seule contrôler en instaurant une barrière insensible aux perturbations,
direction (verticale ou horizontale). Alors que le régime turbulent l’association UNIR, avec l’aide des pouvoirs publics, a développé
favorise la remise en suspension des particules, le régime lami- de nouveaux procédés de maîtrise de la contamination aéroportée.
naire permet d’instaurer un gradient de propreté en évacuant les L’idée dominante de ces techniques est de créer une protection
particules dans le sens du flux, vers les sorties d’air. La rapprochée ouverte en appliquant un flux d’air externe protecteur
concentration particulaire est proportionnelle à la vitesse d’air et le (effet séparateur) combiné à un flux d’air interne chargé de créer
taux de brassage par unité de temps n’a aucun effet sur la autour du produit un microenvironnement bien défini en terme de
performance du système [2]. Le débit d’air soufflé par un flux uni- qualité microbiologique et climatique (effet épurateur).
directionnel est 10 à 100 fois supérieur à celui d’une salle dite blan-
che (taux de renouvellement horaire moyen égal à 600 vol/h [3]). ■ Rideaux d’air double ou triple jet
Ces débits entraînent des coûts importants en terme d’investisse-
ment et d’exploitation [2] et expliquent pourquoi les zones proté- Cette technologie dérivant de l’expérience du nucléaire a été
gées par un flux laminaire se limitent souvent au volume développée en collaboration avec le Commissariat à l’énergie ato-
sensible [15]. mique (CEA). Son rôle est d’instaurer une barrière de confinement
dynamique entre deux zones de qualité microbiologique différente.
Quand le flux d’air rencontre un obstacle (machine, produit, bras L’air est soufflé du haut et capté par aspiration en partie basse.
d’un opérateur...), il se crée une zone de turbulence autour de L’effet séparateur de la barrière est assuré par un ou deux jets d’air
l’obstacle qui est susceptible d’induire des contaminations. Les lents, stabilisés par un jet rapide. Un flux épurateur (type flux lami-
zones à fortes turbulences peuvent être évitées en étudiant la géo- naire) balaie en permanence l’intérieur du volume délimité par les
métrie des machines. Une vitesse uniforme de 0,45 ± 0,20 m/s doit rideaux d’air afin d’évacuer les pollutions générées dans la zone
être maintenue sur l’ensemble de la zone à protéger pour que le sensible. Ce dispositif peut être utilisé pour confiner un plan de
flux d’air puisse se rétablir rapidement après contournement de travail (figure 1).
l’obstacle et qu’il puisse entraîner les particules émises lors de la
turbulence. Des lames ou des panneaux transparents en plastique ■ Gaines textiles
souple ou rigide sont également ajoutés autour de la zone sensible
de façon à protéger le flux des perturbations extérieures et à accé- Cette technologie, mise au point en collaboration avec un indus-
lérer sa stabilisation en cas d’intervention. La protection par flux triel spécialisé dans l’aéraulique, consiste à souffler verticalement
laminaire est très facile à maîtriser lorsqu’il y a peu de mouvement au travers de gaines textiles un air ayant un profil de vitesse en

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F1200

__________________________________________________________________________ CONFINEMENT RAPPROCHÉ DANS LES IAA AU MOYEN D’ISOLATEURS

Jet rapide
Stabilisation du jet lent
Demi-gaine étanche
Jet lent
Séparation
des atmosphères

1
Zone protégée Demi-gaine poreuse

Air induit par les Jupe


faces du jet rapide

Zone protégée Profil des vitesses


Classe 10-100
Extérieur

Reprise du rideau d'air


Figure 2 – Protection rapprochée par gaines textiles (d’après doc. UNIR)
a principe

Alimentation Alimentation de la
du jet rapide ventilation interne
Alimentation

Échappement de l'air
du jet lent

Ventilation
interne 0,75 m

Plan de travail

Reprise externe

1,20 m
0,70 m
Tête perforée
b application à un poste de confinement profilée

Figure 1 – Rideau d’air double jet (d’après doc. UNIR)


Entrée d'air stérile

Entrée d'air stérile

forme de cloche (figure 2). Grâce à ce profil, le centre de la zone à


protéger bénéficie de l’effet épurateur tandis que la périphérie sou-
mise au flux d’air important joue le rôle de barrière (effet sépara-
teur). La protection apportée est de même nature que celle fournie
par un flux laminaire vertical mais avec une efficacité sécurisée par
les survitesses maîtrisées en bord de flux. Cette technologie, de fai-
ble coût, trouve des applications dans la protection de convoyeurs
nécessitant des interventions ponctuelles des opérateurs. Figure 3 – Protection rapprochée par soufflage latéral d’air stérile
(d’après doc. UNIR)
■ Soufflage latéral d’air stérile

Réalisée en collaboration avec le même industriel que pré-


cédemment, cette technologie assure la protection de la zone ■ Flux progressif
sensible en la balayant horizontalement avec une lame d’air stérile.
L’air est soufflé latéralement puis est récupéré par une reprise Le flux progressif a été conçu par le CEMAGREF à partir de
supérieure centrale (figure 3). Ce dispositif permet d’atteindre un simulations numériques des écoulements d’air. La validation
niveau d’empoussièrement compris entre 100 et 1 000. Efficace sur expérimentale et la mise au point en situation industrielle ont été
quelques centimètres de hauteur (< 10 cm), le principe est plutôt effectuées dans le cadre du programme Atelier Ultra-Propre lancé
adapté à la protection de surfaces planes où les interventions en 1990 par l’association UNIR. Son principe repose, comme pré-
s’opèrent par le dessus (convoyeurs utilisés pour le conditionne- cédemment, sur un balayage horizontal de la zone à protéger par
ment en barquettes de tranches de jambon par exemple). un flux d’air propre. L’air est soufflé à l’arrière de la zone sensible

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BN3908

Transferts des radionucléides


dans les denrées alimentaires
Éléments de radioécologie 1
opérationnelle

par Philippe RENAUD


Chargé de mission auprès du directeur de l’environnement
Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN), Fontenay-aux-Roses, France

1. Transferts aux denrées végétales....................................................... BN 3 908v2 - 2


1.1 Transfert foliaire.......................................................................................... — 2
1.1.1 Interception et rétention par les feuilles des radionucléides
qui se déposent ........................................................................................... — 2
1.1.2 Transfert des radionucléides des feuilles vers la partie
consommée du végétal .............................................................................. — 3
1.1.3 Facteur de transfert foliaire ............................................................... — 4
1.1.4 Prise en compte de la croissance du végétal................................... — 5
1.2 Transfert racinaire....................................................................................... — 5
1.3 Calcul de l’activité massique d’un radionucléide dans des denrées
végétales à la récolte à la suite d’un dépôt ponctuel (accidentel par
exemple) ...................................................................................................... — 7
1.4 Calcul de l’activité massique d’un radionucléide dans des denrées
végétales à la récolte dans le cas d’un dépôt chronique......................... — 8
2. Transferts aux denrées d’origine animale ........................................ — 9
2.1 Incorporation des radionucléides par un animal ..................................... — 9
2.2 Transfert des radionucléides incorporés par un animal aux produits
animaux ....................................................................................................... — 9
2.3 Cinétiques de transfert et processus d’élimination des radionucléides
présents dans un animal : cas d’une incorporation ponctuelle .............. — 11
2.4 Calcul de l’activité massique ou volumique d’un radionucléide
dans un produit animal à la suite d’une incorporation unique ............... — 11
2.5 Calcul de l’activité massique ou volumique d’un produit animal
dans le cas d’une incorporation chronique .............................................. — 12
3. Transferts aux denrées naturelles ...................................................... — 13
3.1 Transferts aux denrées forestières ............................................................ — 13
3.2 Transferts aux denrées aquatiques ........................................................... — 14
4. Transferts du tritium et du carbone 14 ............................................ — 14
4.1 Transferts du tritium ................................................................................... — 14
4.1.1 Transferts de tritium aux végétaux .................................................. — 14
4.1.2 Transferts de tritium aux produits animaux .................................... — 15
4.1.3 Relation entre les activités volumiques de tritium dans les eaux
de séchage et de combustion et l’activité massique de tritium
dans les denrées fraîches ........................................................................... — 16
4.1.4 Équilibres et « bruit de fond » du tritium dans l’environnement ... — 16
4.2 Transferts du carbone 14............................................................................ — 17
4.2.1 Activité de carbone 14 par unité de masse de carbone.................. — 17
4.2.2 Activité volumique de carbone 14 dans l’air ................................... — 17
4.2.3 Transferts de carbone 14 aux végétaux ........................................... — 17
Parution : novembre 2019

5. Conclusion................................................................................................. — 18
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. BN 3 908v2

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BN3908

TRANSFERTS DES RADIONUCLÉIDES DANS LES DENRÉES ALIMENTAIRES _____________________________________________________________________

L’incorporation de radionucléides par ingestion de denrées produites loca-


lement est de loin la principale voie d’exposition potentielle de la population
qui réside à proximité des installations nucléaires [BN 3 909], du fait de leurs
rejets normaux autorisés. Toutefois, les doses correspondantes restent très
faibles, de quelques microsieverts au maximum. En cas d’accident significatif
affectant une telle installation, si des mesures d’interdiction de consomma-
tion adaptées n’étaient pas prises très rapidement, l’ingestion de denrées

1 contaminées pourrait constituer, dans les premières semaines suivant les


dépôts radioactifs, une voie d’exposition importante des populations (voir à
ce sujet l’article sur l’accident de Fukushima-Daiichi [BN 3 837]). Les trans-
ferts des radionucléides dans l’environnement, notamment dans les chaînes
alimentaires, déterminent l’intensité de cette exposition ; c’est objet d’étude
de la radioécologie.
Après la dispersion des substances radioactives dans l’air ou dans l’eau, plu-
sieurs phénomènes gouvernent la propagation d’une contamination
radioactive dans les chaînes alimentaires. Afin d’expliciter chacun de ces phé-
nomènes, les facteurs qui les influencent et leurs interactions, l’article qui suit
traite tout d’abord le cas de la propagation d’une contamination ponctuelle à la
suite d’un dépôt radioactif sur une plage de temps allant de quelques heures à
quelques jours, correspondant à un dépôt accidentel. Le cas d’apports chro-
niques, résultant par exemple des rejets normaux d’une installation nucléaire,
est présenté ensuite. Les équations et les valeurs des paramètres indiqués
doivent permettre au lecteur de se faire une idée des intensités relatives des
différents transferts et d’effectuer, pour quelques radionucléides et types de
denrées, des calculs similaires à ceux qui sont réalisés par des codes de calcul.
Ces éléments permettent d’estimer les activités massiques (Bq.kg–1 de denrée
fraîche) dans les différents types de denrées à partir des activités présentes
dans l’air, le sol ou l’eau.
Il est important de noter ici que l’application des éléments fournis dans le
présent article ou l’utilisation des codes de calcul ne permet que d’estimer des
ordres de grandeur. Compte tenu de la variabilité naturelle de l’intensité des
transferts et de la variabilité des activités massiques ou volumiques des radio-
nucléides dans l’environnement qui en résulte, les incertitudes associées à ces
estimations sont difficiles à quantifier et les travaux menés sur ce sujet n’ont
pas, jusqu’à présent, permis d’aboutir pour un usage opérationnel satisfaisant.
Les résultats obtenus restent toutefois pertinents pour apprécier les niveaux
des activités massiques ou volumiques dans l’environnement ; l’autre
approche qui permet de les déterminer, à savoir la réalisation de mesures dans
l’environnement, est également confrontée à la variabilité naturelle et à la
représentativité des mesures effectuées, sachant que, de surcroît, il est impos-
sible de quantifier des activités trop faibles par des mesures.

1. Transferts aux denrées 1.1 Transfert foliaire


végétales 1.1.1 Interception et rétention par les feuilles
des radionucléides qui se déposent
La figure 1 présente les principaux processus qui conduisent
à la contamination de denrées végétales pendant et après des Une partie de l’activité surfacique qui parvient au niveau de la sur-
dépôts radioactifs. Deux grandes voies de transfert sont distin- face du sol (exprimée en Bq.m–2), telle qu’elle est définie dans
guées dans cette figure 1 : le transfert foliaire, lors des dépôts, [BN 3 907], est interceptée par la masse foliaire des végétaux. Ce
des radionucléides présents dans l’air aux feuilles de végétaux phénomène est représenté par un facteur d’interception (FI), défini
d’une part, le transfert racinaire des radionucléides déposés comme la fraction de l’activité déposée au niveau du sol qui est
puis incorporés aux sols d’autre part. D’autres phénomènes interceptée par les feuilles des végétaux. Cette fraction est d’autant
sont quelquefois considérés comme le transfert foliaire plus importante que le végétal est développé et couvre le sol ;
résultant de la remise en suspension dans l’air de particules de l’interception augmente donc avec la masse foliaire : de moins de
sol contaminées ou l’éclaboussement des feuilles par des parti- 20 % (FI = 0,2) pour les faibles masses foliaires comme celles de
cules de sol lors de pluies ; ils ne sont pas détaillés dans cet jeunes plants de salade, elle est de l’ordre de 50 à 70 % (FI = 0,5 à
article et leur effet est parfois pris en compte dans le transfert 0,7) pour de l’herbe ou des plants de salades à maturité, et de plus
racinaire. de 90 % (FI > 0,9) pour du maïs complètement développé. Si le

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______________________________________________________________________ TRANSFERTS DES RADIONUCLÉIDES DANS LES DENRÉES ALIMENTAIRES

Bq.m–2

Interception
et retention

Bq.kg–1
1
Remise
en suspension
et éclaboussement

Égouttement
Croissance lessivage Translocation

Absorption racinaire
Incorporation
Homogénéisation

Les processus qui contribuent au transfert foliaire sont indiqués en vert ; ceux qui contribuent au transfert du sol
aux plantes sont indiqués en marron ; les processus d’incorporation et d’homogénéisation dans le sol des radio-
nucléides déposés à sa surface sont traités dans l’article [BN3907].

Figure 1 – Principaux processus conduisant à la contamination des denrées végétales

dépôt au niveau de la surface du sol est estimé à partir de l’activité Une partie des radionucléides interceptés par la masse foliaire
volumique de l’air pour un sol nu ou herbeux [BN 3 907], une cou- des végétaux va assez rapidement s’y fixer par adsorption (créations
verture végétale plus haute, ayant une capacité de captation des de liaisons chimiques entre les atomes de la matière organique de
radionucléides présents dans l’air significativement plus importante la plante et les radionucléides). Cette adsorption intervient en
qu’un sol herbeux, peut conduire à un dépôt foliaire plus important quelques heures ; la fraction labile (non retenue) de l’activité dépo-
que le dépôt au niveau du sol ainsi estimé ; cela se traduit alors par sée du radionucléide est sujette, du fait notamment des précipita-
un facteur d’interception supérieur à 1 ; c’est le cas de l’interception tions atmosphériques, à des pertes précisées plus loin dans
par la canopée d’une forêt qui peut atteindre 500 % du dépôt sur un cet article.
sol nu (FI de l’ordre de 5). Certains modèles utilisés en radioécologie
relient le facteur d’interception à la surface foliaire à l’aide d’un
index dénommé Leaf Area Index (LAI) exprimé en m2 de feuilles par 1.1.2 Transfert des radionucléides des feuilles
m2 de sol [1] [2]. D’autres modèles le relient au rendement de bio- vers la partie consommée du végétal
masse foliaire (en kg.m–2 de feuilles et de tiges).
Pour les denrées agricoles dont on ne consomme pas les
L’interception est moins efficace en cas de pluie en raison de feuilles, il convient de s’intéresser au transfert des radionucléides
l’égouttement ; les feuillages ne peuvent pas retenir toute l’eau de la masse foliaire qui a intercepté les dépôts radioactifs, aux par-
qu’ils reçoivent et donc les radionucléides qu’elle contient. La biblio- ties consommées : grains, fruits, racines ou tubercules. Ce trans-
graphie est mince sur ce sujet. Dans le modèle ASTRAL-SYMBIOSE fert, dénommé « translocation », est représenté par un facteur de
développé par l’IRSN [3] et dans le modèle allemand ECOSYS déve- translocation, Ft, qui est défini comme le rapport entre l’activité
loppé par le Forschungzentrum für Umwelt und Gesundheit [2]), il contenue dans la partie consommée du végétal à la récolte par
est retenu que, pour une faible hauteur de pluie (inférieure à 1 mm), unité de surface de sol (Bq.m–2) et l’activité contenue dans les
le facteur d’interception est proche de celui qui est retenu pour les feuilles après les dépôts par unité de surface de sol (Bq.m–2) ; il est
dépôts secs. En revanche, des facteurs d’interception respective- donc sans dimension et peut s’exprimer sous forme d’un pourcen-
ment deux et trois fois plus faibles sont retenus pour des hauteurs tage. L’intensité de la translocation dépend des radionucléides qui
de pluie de 10 mm et de 15 mm [3]. De manière très générale, on sont généralement classés en deux catégories en fonction de leur
retiendra que, lorsque le dépôt pluvieux est dix fois plus important utilité pour la plante (pour ses besoins nutritifs) qui détermine leur
[BN 3 907], la contamination des feuilles des végétaux qui en résulte mobilité au sein de la plante. Les éléments mobiles comme l’iode,
n’est que deux à trois fois plus importante. le césium, le cobalt… sont classés dans le groupe du césium ; les

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TRANSFERTS DES RADIONUCLÉIDES DANS LES DENRÉES ALIMENTAIRES _____________________________________________________________________

éléments peu mobiles comme le strontium, les actinides (notam- massique du radionucléide à la récolte qui résulte du transfert
ment le plutonium et l’américium), l’argent, le ruthénium… sont foliaire est obtenue en divisant l’activité contenue dans la partie
classés dans le groupe du strontium. L’intensité de la translocation consommée du végétal exprimée par unité de surface de sol
est maximale lorsque les besoins nutritifs de la plante sont les plus (Bq.m–2) par le rendement cultural Rc tel qu’il est habituellement
importants, notamment lors de la fructification ; c’est plus particu- défini en agriculture, exprimé en kg.m–2. Le facteur de transfert
lièrement le cas pour le césium qui est un analogue chimique du foliaire peut alors s’exprimer par la relation (1) :
potassium, élément indispensable au développement de la plante.
Toutefois, même pour un élément très mobile comme le césium et

1 même dans le cas où le dépôt foliaire intervient lors de la fructifi- (1)


cation, le facteur de translocation n’excède pas 10 %. Avant la flo-
raison, les transferts des radionucléides interceptés par la masse avec FTfoliaire i,j facteur de transfert foliaire du radionucléide
foliaire aux organes comestibles sont faibles : moins de 1 %. À titre déposé i vers la plante j (en m2.kg–1),
d’exemple, pour un dépôt de 104 Bq.m–2 de césium 137 survenant FIj facteur d’interception,
mi-avril avant la floraison du blé, la contamination du grain à la
Fti,j facteur de translocation,
moisson en juillet sera inférieure à 1 Bq.kg–1, alors que, pour une
même activité déposée mi-mai, la contamination du grain à la Rcj rendement cultural (en kg.m–2).
moisson sera de l’ordre de plusieurs centaines de Bq.kg–1. Ainsi Le tableau 1 indique, pour quelques catégories de denrées, les
les dates des dépôts consécutifs aux accidents de Tchernobyl et valeurs du facteur de transfert foliaire dans le cas de dépôts ponc-
surtout de Fukushima, très précoces dans les calendriers culturaux tuels secs ou humides, pour deux hauteurs de précipitation et
(début mai 1986 en France à la suite de l’accident survenu en trois délais différents avant la récolte (pour prendre en compte la
Ukraine et mi-mars 2011 au Japon) ont considérablement limité la variabilité de la translocation selon le stade de développement du
contamination des grandes productions agricoles et, de ce fait, les végétal comme indiqué plus haut) ; ces valeurs sont celles uti-
expositions des populations par ingestion de denrées [BN 3 837] lisées dans le modèle ASTRAL-SYMBIOSE [3] de l’IRSN. Le
[8]. Afin de prendre en compte le fait que l’intensité de la translo- tableau 1 montre que, en cas de pluie, la valeur du facteur de
cation varie avec le stade de développement de la plante au transfert foliaire est plus faible que lors d’un dépôt sec et qu’elle
moment des dépôts, plusieurs modèles retiennent différentes diminue avec la hauteur de pluie (cf. § 1.1.1). Dans le cas des
valeurs du facteur de translocation pour différents délais avant la cultures à récolte annuelle (céréales et fruits), les valeurs les plus
récolte dans le cas des cultures à récolte annuelle comme par élevées du facteur de transfert foliaire sont atteintes pour un délai
exemple les céréales ou les fruits [1] [2] [3] [4] [9]. allant de 30 à 60 jours avant la récolte, lorsque la fructification est
en cours et que les besoins en oligo-éléments sont les plus impor-
tants (cf. § 1.1.2) ; dans les jours précédant la récolte, le fruit étant
1.1.3 Facteur de transfert foliaire formé, les besoins nutritifs au cours de la maturation sont moins
importants et le transfert foliaire est plus faible. Le cas des
L’ensemble des phénomènes et des paramètres présentés pré- légumes, pour lesquels les valeurs du facteur de transfert foliaire
cédemment contribuent au transfert foliaire des radionucléides sont considérées comme indépendantes du délai avant récolte,
déposés à la surface du sol dans les denrées agricoles. L’activité est traité dans le paragraphe suivant.

Tableau 1 – Valeurs du facteur de transfert foliaire utilisées dans le modèle ASTRAL-SYMBIOSE de l’IRSN [3]

FT foliaire [m2.kg–1 frais]

Dépôt sec Dépôt humide 5 mm Dépôt humide 15 mm

Délai avant récolte [j] Délai avant récolte [j] Délai avant récolte [j]

Culture Radionucléide 0 30 à 60 90 0 30 à 60 90 0 30 à 60 90

Légumes-feuilles Iode 5 10–1 5 10–2 1,6 10–2

Autres 5 10–1 1,5 10–1 8 10–2

Autres légumes Iode 8 10–2 8 10–3 2,7 10–3

Groupe Cs* 8 10–2 3 10–2 1,3 10–2

Groupe Sr** 4 10–2 1,5 10–2 6,7 10–3

Céréales d’hiver Iode 5 10–2 9 10–2 9 10–3 5 10–3 9 10–3 9 10–4 1,7 10–4 3 10–3 3 10–4

Groupe Cs* 5 10–2 9 10–2 9 10–3 1,7 10–2 3 10–2 3 10–3 8,3 10–3 1,5 10–2 1,5 10–3

Groupe Sr** 4 10–2 1 10–1 1 10–2 1,3 10–2 1,3 10–2 1 10–4 6,7 10–3 1,7 10–3 1,7 10–4

Fruits de verger Groupe Cs* 2 10–1 1 10–1 2 10–2 5 10–2 1,7 10–2 7 10–3 2,7 10–2 1,0 10–2 3 10–3

*Groupe du césium : Br, Cl, Co, Cs, Fe, I, Mn, Mo, Np, Rb, Sb, Tc, Te, Zn.
**Groupe du strontium : Ag, Am, Ba, Cd, Ce, Cm, Cr, Eu, Ir, La, Nb, Nd, Ni, Pm, Pr, Pu, Rh, Ru, Sm, Sn, Sr, U, Y, Zr.

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NM4500

Nanomatériaux dans les aliments

1
par Marie-Hélène ROPERS
Chargée de recherche
BIA, INRAE, Nantes, France

1. Qu’est-ce qu’un nanomatériau ? .................................................. NM 4 500v2 – 2


1.1 Définitions actuelles ........................................................................... — 2
1.2 Une grande variété de formes et de tailles de nanomatériaux ........ — 3
2. Nanomatériaux manufacturés en alimentation ........................ — 5
2.1 Additifs alimentaires contenant des nano-objets ............................. — 5
2.2 Propriétés et fonctions des nanomatériaux connus ......................... — 5
2.2.1 Silice SiO2 ................................................................................ — 5
2.2.2 Dioxyde de titane TiO2 ............................................................. — 6
2.2.3 Oxydes et hydroxydes de fer .................................................. — 7
2.2.4 Silicate de calcium ................................................................... — 8
2.2.5 Phosphate tricalcique .............................................................. — 8
2.2.6 Minéraux .................................................................................. — 8
2.3 Des incertitudes à lever par une meilleure caractérisation
des additifs ......................................................................................... — 8
2.3.1 Nanomatériaux suspectés ....................................................... — 8
2.3.2 Qualité de la caractérisation des nanomatériaux ................... — 9
2.4 Déclaration du caractère nanométrique d’un ingrédient
sur les emballages ............................................................................. — 9
3. Évaluation des risques sanitaires liés aux nanos
dans l’alimentation ......................................................................... — 10
4. Conclusion........................................................................................ — 11
5. Glossaire ........................................................................................... — 11
6. Sigles, notations et symboles ...................................................... — 12
Pour en savoir plus..................................................................................Doc. NM 4 500v2

es nanotechnologies suscitent autant d’intérêt que de rejet selon l’angle par


L lequel on les aborde [1] [2]. Pour certains, elles constituent un énorme vivier
d’applications car les nanomatériaux qui en découlent possèdent des propriétés
spécifiques inédites comparées aux matériaux correspondant à des échelles
microscopiques. Ajouté au fait que les nanomatériaux se présentent sous une
multitude de formes (nanoparticule, nanofilament, nanofeuillet…), cela représente
une infinité d’applications. Certaines couvrent déjà de nombreux objets de la vie
quotidienne comme par exemple en microélectronique pour miniaturiser les
appareils électroniques, en médecine pour cibler des zones de l’organisme en
diagnostic ou en thérapie, dans le bâtiment pour obtenir des peintures ou des
vernis aux vertus protectrices ou en cosmétique ou dans l’habillement avec les
textiles. Pour d’autres publics, en revanche, les nanomatériaux sont des poisons
invisibles, auxquels nous ne prêtons pas suffisamment attention. Pour compren-
dre ce qu’est un nanomatériau, nous reviendrons sur les définitions actuelles et
leurs champs d’application. Nous définirons également plusieurs termes tels que
nano-objet et nanoparticule. L’un des domaines dans lequel les nanomatériaux
sont présents est l’alimentation. Nous verrons ici quels sont les nanomatériaux
utilisés pour fabriquer des denrées alimentaires, les effets recherchés, les mesures
prises par les agences de sécurité des aliments pour contrôler leur innocuité et
protéger le consommateur et la limite des données actuellement disponibles.
Parution : avril 2020

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NANOMATÉRIAUX DANS LES ALIMENTS –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

1. Qu’est-ce qu’un ensemble du fait de liaisons physiques faibles. La surface externe


globale d’un agglomérat correspond à la somme des surfaces de
nanomatériau ? ses constituants alors que dans le cas d’un agrégat, la surface
externe globale peut être inférieure à la somme des surfaces de
ses constituants.
Si toutes les définitions s’accordent sur la dimension de 1 à
1.1 Définitions actuelles 100 nm, elles présentent toutes des spécificités :
1) si le terme nanomatériau semble assez commun, le terme

1 La définition la plus générique est celle de l’Organisation interna-


tionale de normalisation qui définit le nanomatériau comme un
matériau ayant une dimension externe à l’échelle de longueur s’éten-
employé par le ministère de la Transition écologique et solidaire est
« substance nanoparticulaire », sans jamais parler de nanomatériau ;
2) certaines définitions ne s’appliquent qu’à une certaine catégorie
dant approximativement de 1 nm à 100 nm ou ayant une structure de produits comme les aliments avec le règlement INCO (règlement
interne ou une structure de surface à l’échelle nanométrique. n 1169/2011) ou les cosmétiques avec le règlement cosmétique euro-
péen (règlement n 1223/2009) ;
Actuellement, plusieurs définitions de matériaux à l’échelle nano- 3) d’autres prennent en compte le profil granulométrique,
métrique (souvent appelés nanomatériaux et parfois substances à comme c’est le cas de la recommandation européenne (recomman-
l’échelle nanoparticulaire) coexistent, définies par des autorités et dation n 2011/696/UE) ou du registre R-Nano (arrêté du 17 avril
avec des champs d’applications différents en Europe (tableaux 1 2019) qui a été mis en place par le gouvernement français ;
et 2). 4) certaines définitions prennent en compte la notion de structure
La définition du ministère de la Transition écologique et solidaire interne et externe (norme ISO, règlement INCO, règlement cosmé-
peut donc actuellement se résumer sous la forme : une substance à tique) pour prendre en compte à la fois les agrégats, les agglomérats
l’état nanoparticulaire est une substance fabriquée intentionnelle- et les matériaux nanoporeux, alors que d’autres ne prennent en
ment à l’échelle nanométrique contenant des particules non liées ou compte que la dimension externe (recommandation n 2011/696/UE
sous forme d’agrégat ou sous forme d’agglomérat, dont 50 % des et définition pour le registre R-Nano) ;
particules, dans la distribution des tailles en nombre, présentent une 5) d’autres définitions ont la particularité d’introduire des proprié-
ou plusieurs dimensions externes se situant entre 1 nm et 100 nm. tés physico-chimiques et biologiques comme la définition du règle-
Un agrégat est un ensemble de particules fortement liées ou ment cosmétique européen qui se base sur la solubilité ou la bioper-
fusionnées, quasiment impossible à séparer, tandis qu’un agglo- sistance, ou la définition du règlement INCO qui évoquent les
mérat est une association de particules ou d’agrégats qui adhèrent propriétés des agglomérats et agrégats de taille supérieure à 100 nm ;

Tableau 1 – Définitions d’un nanomatériau ou d’une substance nanoparticulaire selon l’instance


et leur portée

Instance Définition Statut (pays d’application)

Nanomatériau
Matériau ayant une dimension externe à l’échelle de longueur
Organisation internationale Norme ISO/TS 80004-1:2015 (norme
s’étendant approximativement de 1 nm à 100 nm ou ayant une
de normalisation internationale)
structure interne ou une structure de surface à l’échelle
nanométrique.

Nanomatériau
Matériau naturel formé accidentellement ou manufacturé
contenant des particules libres, sous forme d’agrégat ou sous Recommandation n 2011/696/UE (Union
Commission européenne
forme d’agglomérat, dont au moins 50 % des particules, dans la européenne)
répartition numérique par taille, présentent une ou plusieurs
dimensions externes se situant entre 1 nm et 100 nm.

Substance à l’état nanoparticulaire


Substance telle que définie à l’article 3 du règlement (CE)
n 1907/2006, fabriquée intentionnellement à l’échelle
nanométrique, contenant des particules, non liées ou sous forme
d’agrégat ou sous forme d’agglomérat, dont une proportion
minimale des particules, dans la distribution des tailles en
nombre, présentent une ou plusieurs dimensions externes se
Décret n 2012-232 relatif à la déclaration
situant entre 1 nm et 100 nm.
Ministère de la Transition annuelle des substances à l’état
« Cette proportion minimale peut être réduite dans des cas
écologique et solidaire nanoparticulaire suivi de l’arrêté du 6 août
spécifiques lorsque cela se justifie pour des raisons tenant à la
(registre R-Nano) 2012 définissant la proportion en nombre
protection de l’environnement, à la santé publique, à la sécurité
(France)
ou à la compétitivité. Elle est précisée par un arrêté conjoint des
ministres chargés de l’Environnement, de l’Agriculture, de la
Santé, du Travail et de l’Industrie.
La proportion minimale, mentionnée à l’article R. 523-12 du Code
de l’environnement, des particules présentant une ou plusieurs
dimensions externes se situant entre 1 nm et 100 nm est fixée à
50 % de la distribution des tailles en nombre.

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––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– NANOMATÉRIAUX DANS LES ALIMENTS

Tableau 2 – Définitions s’appliquant à des domaines particuliers


Instance Définition Statut

Nanomatériau manufacturé
Matériau produit intentionnellement présentant une ou plusieurs
dimensions de l’ordre de 100 nm ou moins, ou composé de

1
parties fonctionnelles distinctes, soit internes, soit à la surface,
dont beaucoup ont une ou plusieurs dimensions de l’ordre de
Règlement n 1169/2011 dit INCO (d’informations
100 nm ou moins, y compris des structures, des agglomérats ou
des consommateurs sur les denrées alimentaires)
Parlement européen des agrégats qui peuvent avoir une taille supérieure à 100 nm
puis règlement n 2015/2283 dit Novel Foods
mais qui conservent des propriétés typiques de la nanoéchelle.
(Union européenne)
Les propriétés typiques de la nanoéchelle comprennent : i) les
propriétés liées à la grande surface spécifique des matériaux
considérés ; et/ou ii) des propriétés physico-chimiques
spécifiques qui sont différentes de celles de la forme non
nanotechnologique du même matériau.

Nanomatériau
Matériau insoluble ou bio-persistant fabriqué intentionnellement Règlement n 1223/2009 sur les cosmétiques
Parlement européen
et se caractérisant par une ou plusieurs dimensions externes, ou (Union européenne)
une structure interne, sur une échelle de 1 à 100 nm.

6) enfin, certaines définitions s’appuient sur des concepts


d’intentionnalité (règlement INCO, registre R-Nano et règlement
cosmétique) alors que d’autres englobent des fabrications acci-
dentelles ou volontaires (recommandation de la Commission A
européenne).
Ces différentes définitions et particularités sont sources de confu-
sion et peuvent aboutir à des situations contradictoires où une
substance peut répondre à la définition du règlement INCO (et
donc être soumises à étiquetage) mais ne pas être déclarée dans
le registre R-Nano !

Aucune homogénéité dans la définition des nanomatériaux


Plusieurs définitions des nanomatériaux coexistent actuelle-
ment avec des champs d’applications qui peuvent être larges 50 nm
ou sectoriels et des valeurs différentes (normes, règlements,
recommandations).
B

Pour comprendre la diversité des matériaux et la difficulté à trou-


ver une définition simple et précise mais englobant tous les nano-
matériaux, la section suivante présente et illustre tous les types de
nanomatériaux que l’on peut rencontrer.

1.2 Une grande variété de formes


et de tailles de nanomatériaux
En considérant la définition la plus générale, celle de la norme 100 nm
ISO, il est possible de distinguer plusieurs catégories de nanomaté-
riaux. Si le matériau a au moins une dimension externe à l’échelle
nanométrique, on parlera de nano-objet alors qu’on parlera de Figure 1 – Images de microscopie électronique de nanoparticules
nanomatériaux nanostructurés si sa structure interne ou de surface d’argent cubiques (A) et pyramidales (B). Adapté avec la permission
est à l’échelle nanométrique. de la référence. Copyright (2006) American Chemical Society
Parmi les nano-objets, on distingue :
 les nanoparticules dont les trois dimensions externes sont infé- avec une longueur pouvant atteindre plusieurs micromètres ;
rieures à 100 nm ; on peut y rencontrer des formes pyramidales, ce sont des objets longilignes, comme par exemple les nano-
cubiques, octaédriques, en étoile, en bâtonnet ou tout simple- tubes de carbone ;
ment sphériques ; c’est la forme adoptée par exemple dans des  les nanofeuillets ou nanocouches, nanoplats, nanofilms, qui
suspensions par l’or, l’argent, les billes de latex (figure 1) ou les sont définis comme des nanomatériaux possédant une
cristaux de dioxyde de titane ; par abus de langage, le terme seule dimension inférieure à 100 nm, les deux autres dimen-
nanoparticule est utilisé pour tout type de nano-objet ; sions pouvant être significativement supérieures ; les nano-
 les nanofibres, nanotubes, nanofilaments ou nano-bâtonnets feuillets d’argile et de graphène correspondent typiquement
dont deux dimensions (la section) sont inférieures à 100 nm à cette définition.

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1

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P152

Compléments alimentaires à visée


cosmétique : efficacité et risques
pour le consommateur 1
par Esther KALONJI
ANSES, Unité d’évaluation des risques liés à la nutrition – Direction de l’évaluation
des risques
et Claire WALLAERT
Institut national de la consommation, Centre d’essais comparatifs

1. Compléments alimentaires à visée cosmétique :


ce que dit la réglementation ................................................................. P 152 2
2. Composition des compléments alimentaires à visée
cosmétique : quelle justification des effets revendiqués............. — 2
3. Composition des compléments alimentaires à visée
cosmétique : quelle sécurité d’emploi ............................................... — 3
4. Étude spécifique sur des compléments alimentaires
à visée cosmétique .................................................................................. — 4
4.1 Méthode de l’étude ...................................................................................... — 4
4.2 Présentation et analyse des données recueillies
(étiquetage, résultats d’analyse) ................................................................. — 4
4.2.1 Description des éléments de composition
et de communication « santé » ................................................................... — 4
4.2.2 Analyse des données recueillies........................................................ — 5
5. Conclusions................................................................................................ — 6
6. Annexe......................................................................................................... — 6
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. P 152

a santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et


«L ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou
d'infirmité » [1].
Dans un contexte occidental où le culte du corps et l’image de soi constituent
aujourd’hui un fait social, on peut aisément imaginer un glissement de la
notion de santé (s’entendant absence de maladies) vers celle de bien-être.
En effet, après l’ère des aliments dits « fonctionnels » et « santé » au début
des années 1980, on assiste depuis une quinzaine d’années au développement
de sous-catégories, notamment des « nutraceutiques » ou « cosmetofoods »
ou « nutricosmétiques » qui revendiquent des actions sur la peau, les cheveux
ou les ongles, voire les dents.
Si les travaux de recherche ont tenté d’établir des bases scientifiques solides
pour la démonstration des effets fonctionnels des aliments et/ou de leurs
constituants chez l’homme [2] [3], les données manquent encore pour asseoir
les revendications cosmétiques, parfois fantaisistes, utilisées pour valoriser
certains aliments.
Par ailleurs, ces aliments, pour lesquels sont revendiqués des effets cosméti-
ques, sont dans la grande majorité des cas des compléments alimentaires, et
intègrent des cocktails de nutriments et de substances variées dont les interac-
Parution : mai 2013

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie


est strictement interdite. – © Editions T.I. P 152 – 1

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P152

COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES À VISÉE COSMÉTIQUE : EFFICACITÉ ET RISQUES POUR LE CONSOMMATEUR _________________________________________

tions sont encore méconnues. Ainsi, au-delà de la nécessité de véracité des


messages véhiculés, il faut s’interroger sur la sécurité d’emploi, sur le long
terme, de ces produits.
Cet article est extrait de la revue « Annales des falsifications, de l’expertise
chimique et toxicologique » (n° 977) éditée par la SECF (Société des experts
chimistes de France).

1
1. Compléments alimentaires 2. Composition
à visée cosmétique : des compléments
ce que dit la réglementation alimentaires à visée
cosmétique : quelle
Il n’existe pas de définition réglementaire des denrées alimen-
taires à visée cosmétique. justification des effets
On peut postuler que ce sont des produits à la frontière entre les revendiqués
denrées alimentaires (règlement 2002/178/CE, directive 2002/46/CE)
et les produits cosmétiques (directive 76/768/CE).
Si le niveau de preuve exigible fait encore l’objet de débat, force est
Nota 1 : règlement no 2002/178/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier
de constater que de nombreux dossiers sont encore éloignés des
2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation ali- standards (lignes directrices) d’une évaluation scientifique adéquate.
mentaire, instituant l’Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des L’Autorité européenne de sécurité sanitaire des aliments qui est
procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires. aujourd’hui chargée de l’évaluation centralisée des allégations
insiste, comme l’Anses l’a régulièrement fait avant l’harmonisation,
Nota 2 : directive no 2002/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 juin 2002
relative au rapprochement des législations des États membres concernant les
sur l’importance de disposer de la totalité des données disponibles.
compléments alimentaires. Toutefois, si les données expérimentales in vitro et chez l’animal sont
On entend par compléments alimentaires les denrées alimentaires dont le but est de
utiles pour expliciter les mécanismes mis en jeu dans les effets reven-
compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de diqués, seules des études cliniques contrôlées permettent d’établir
nutriments ou d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique seuls ou un lien de cause à effet entre la consommation d’un complément ali-
combinés, commercialisés sous forme de doses, à savoir les formes de présentation [....] mentaire de composition donnée et les effets revendiqués.
destinées à être prises en unités mesurées de faible quantité.
Or, peu d’études réalisées chez l’homme dans les conditions de
Nota 3 : directive no 76/768/CEE du Conseil du 27 juillet 1976 concernant le rapproche- composition et de consommation préconisées pour le CA à visée
ment des législations des États membres relatives aux produits cosmétiques.
cosmétique sont disponibles dans la littérature. Pour celles qui sont
On entend par produit cosmétique toute substance ou préparation destinée à être fournies, les évaluations permettent d’évoquer plusieurs écueils :
mise en contact avec les diverses parties superficielles du corps humain (épiderme, sys-
tèmes pileux et capillaire, ongles, lèvres et organes génitaux externes) ou avec les dents – l’extrapolation de données obtenues sur des modèles in vitro à
et les muqueuses buccales, en vue exclusivement ou principalement de les nettoyer, de
les parfumer et de les protéger afin de les maintenir en bon état, d’en modifier l’aspect
des effets nutritionnels par voie orale, sans disposer de données
ou de corriger les odeurs corporelles. sur la biodisponibilité cutanée des nutriments et substances ;
– l’inadéquation entre les effets revendiqués et les réalités
Le décret 2006-352 du 20 mars 2006 fixe, au niveau national, les physiologiques ; par exemple, comment peut-on justifier une allé-
dispositions générales relatives à la composition des compléments gation portant sur la « beauté de la peau » sans disposer de para-
alimentaires (CA) (nutriments, substances, plantes et extraits de mètres biologiques objectifs ? ;
plantes...), à l’étiquetage, aux déclarations de mise sur le marché
– l’absence de prise en compte du caractère multifactoriel d’un
et demandes d’autorisation d’emploi (dont le cas des CA venant
effet ; par exemple, la qualité de la masse capillaire inclut le nombre
d’un autre État membre), etc.
de cheveux, leur diamètre ainsi que leur résistance à la traction,
Par ailleurs, l’arrêté du 9 mai 2006 relatif aux nutriments pou- paramètres qui doivent être testés de manière concomitante ;
vant être employés dans la fabrication des compléments alimen- – l’existence de données statistiquement significatives mais avec
taires précise la liste des vitamines et minéraux pouvant être des incertitudes sur la plausibilité biologique et l’interprétation
utilisés pour la fabrication des CA, leurs formes chimiques ainsi physiologique ;
que leurs doses journalières maximales. – l’utilisation fréquente de questionnaires d’auto-évaluation par
Enfin, et depuis 2006, la communication « santé » sur les den- les sujets, rendant difficile l’objectivation des résultats obtenus ;
rées alimentaires a été harmonisée et les différentes revendica- – certains micronutriments présents dans les CA à visée cosmé-
tions, incluant celles à visée cosmétique, relèvent du règlement tique sont impliqués dans des réactions biochimiques au niveau
européen 1924/2006/CE du 20 décembre 2006 concernant les allé- du derme (vitamine C et synthèse de collagène, EPA et DHA et
gations nutritionnelles et de santé. L’évaluation des allégations, constitution de la double couche phospholipidique membranaire,
qui se faisait jusqu’alors par chaque État membre est maintenant vitamine E, beta-carotène, zinc, sélénium, cuivre et leurs activités
centralisée et confiée à l’Autorité européenne de sécurité des ali- antioxydantes) mais la modulation de ces effets par l’apport ali-
ments (European food safety authority-Efsa). Sur la base des avis mentaire reste à étudier ; de plus, d’autres micronutriments et
rendus par l’Efsa, une liste de 222 allégations de santé autorisées, microconstituants présents dans les CA à visée cosmétique n’ont
portant pour une grande part sur les vitamines et minéraux, vient pas fait la preuve de leur implication dans la biologie des phanères
d’être publiée par la Commission européenne. (vitamine B1/Thiamine, isoflavones).

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PHA3061

Réglementation des compléments


alimentaires
1
par Mathieu BOUARFA
Titulaire d’un Master Of Business Engineering Bioproduits
Responsable développement dans l’industrie de la santé, de la beauté et du bien-être –
Intervenant, Paris, France

1. Directive 2002/46/CE........................................................................... PHA 3 061 - 3


1.1 Mise en place de la « directive cadre des compléments
alimentaires » ........................................................................................... — 3
1.2 Les conséquences directes d’une directive ........................................... — 3
2. Contexte réglementaire du complément alimentaire
en France et en UE ............................................................................... — 3
2.1 Composition ............................................................................................. — 4
2.2 Étiquetage................................................................................................. — 12
2.3 Allégations................................................................................................ — 12
2.4 Publicité .................................................................................................... — 20
2.5 Notification : mise sur le marché et contrôle......................................... — 20
2.6 Contrôles................................................................................................... — 22
2.7 Nutrivigilance ........................................................................................... — 22
2.8 Complément alimentaire biologique...................................................... — 23
3. Évaluation du risque et autres statuts réglementaires ............. — 24
3.1 Évaluation du risque réglementaire ....................................................... — 24
3.2 Médicament de phytothérapie................................................................ — 25
3.3 Dispositif médical..................................................................................... — 26
3.4 Denrée alimentaire enrichie .................................................................... — 27
3.5 Cosmétique............................................................................................... — 27
4. Conclusion.............................................................................................. — 27
5. Glossaire ................................................................................................. — 28
6. Sigles, notations et symboles........................................................... — 28
Pour en savoir plus ....................................................................................... Doc. PHA 3 061

e secteur de la nutrition-santé, portée par des enjeux de santé publique


L importants, comme l’évolution des modes de vie et le vieillissement de la
population, ne cesse de se développer. Ce secteur, regroupant différents
marchés comme les aliments fonctionnels, les produits diététiques, la nutrition
clinique, ou encore les compléments alimentaires, suscite toujours plus
l’intérêt des consommateurs.
Le marché des compléments alimentaires, en constante croissance, est
soutenu par de nombreuses nouveautés et innovations. Outre les innovations
performantes sur les segments porteurs en bien-être et santé, tels que le
stress, le sommeil, ou la digestion, les industriels ont massivement investi
dans la communication afin de stimuler ce marché.
L’engouement pour le bien-être et le mieux vivre n’explique pas, à lui seul,
cette vigueur du marché des compléments alimentaires. En effet, le développe-
ment de l’automédication, la prise de conscience du lien entre alimentation et
santé, et l’allongement de l’espérance de vie, sont autant de facteurs qui parti-
cipent d’une évolution positive de ce marché. D’après Synadiet, le chiffre
Parution : juillet 2019

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PHA3061

RÉGLEMENTATION DES COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES ___________________________________________________________________________________

d’affaires du marché des compléments alimentaires en France est estimé à


1,92 milliard d’euros en 2018, avec un net avantage pour la pharmacie, qui
représente un peu plus de la moitié des ventes.
Les compléments alimentaires sont strictement encadrés, tant au niveau
français qu’au niveau communautaire. Néanmoins, cet environnement régle-
mentaire peut se révéler complexe et contraignant.
Juridiquement, le complément alimentaire appartient à la catégorie des
1 denrées alimentaires ; il est donc considéré comme une denrée alimentaire. Il
doit, non seulement être conforme à la législation spécifique au complément
alimentaire, mais également à la législation alimentaire générale, aussi
appelée réglementation « horizontale » (sécurité alimentaire, traçabilité, nou-
veaux aliments ou « novel food », allégations nutritionnelles et de santé,
information des consommateurs, etc.).
Les compléments alimentaires ont pour la première fois été définis au niveau
européen dans la directive 2002/46/CE, qui fixe des exigences sur ces produits.
Cette directive devant être transposée en droit national, entraîne des spécifi-
cités locales propres à chacun des 28 États membres de l’Union européenne.
Cette directive, à l’existence louable, n’harmonise que partiellement la mise
sur le marché des compléments alimentaires. Ainsi, il faut prendre en compte
la législation de chacun des États membres dont les procédures de mise sur le
marché sont spécifiques à chacun d’eux.
À titre d’illustration, un complément alimentaire mis sur le marché d’un EM
peut être qualifié de médicament dans un autre, voire être interdit dans un troi-
sième EM. Par ailleurs, si l’entreprise souhaite intégrer un maximum d’actifs
dans la composition d’un complément alimentaire qu’elle projette de mettre
sur le marché en France, elle peut tirer profit d’un habile cumul de multiples
spécificités nationales.
Parallèlement, les compléments alimentaires peuvent soulever une problé-
matique de délimitation de la frontière entre aliments et médicaments. Selon
les actifs, certains pays définissent des seuils, là où d’autres se positionnent au
cas par cas, sans plus d’harmonisation. Le cœur de cette problématique réside
dans la distinction à opérer entre effet physiologique et effet pharmacologique,
puisqu’un complément alimentaire doit répondre à des besoins nutritionnels
et/ou physiologiques.
La notion d’homéostasie constitue une piste de réflexion pour guider cette
distinction.
Enfin, les textes relatifs aux allégations de santé ont restreint la communica-
tion autour des bénéfices santé des compléments alimentaires. Pour certains
actifs, aux bénéfices pourtant largement reconnus, les allégations sont forte-
ment restreintes, voire strictement interdites.
Parfois subie, toute cette complexité réglementaire peut pourtant souvent
être domptée et être un véritable vecteur d’innovation.
L’objectif de cet article est de fournir les outils pour une meilleure appréhen-
sion de l’environnement réglementaire des compléments alimentaires. Pour ce
faire, la première partie opère un bref rappel historique de la législation des
compléments alimentaires depuis sa genèse. La seconde partie expose tous
les points importants de la réglementation en vigueur pour ces produits.
La dernière partie, quant à elle, évalue le risque de reclassement d’un produit
dans un autre statut réglementaire. Elle se termine par un glossaire de la ter-
minologie du secteur.
Comme il est d’usage de le rappeler, cet article est une synthèse, et
certaines analyses sont des interprétations ; il ne se substitue donc
pas à la lecture des textes réglementaires en vigueur, qui demeurent
les références officielles.

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____________________________________________________________________________________ RÉGLEMENTATION DES COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES

1. Directive 2002/46/CE Dans certains cas, le droit national s’applique en complément de


la réglementation européenne (procédure de mise sur le marché,
mentions d’étiquetage...). Il y a donc des spécificités à prendre en
Sur le marché européen depuis les années 1980 [1], les complé- compte en fonction de l’EM de mise sur le marché.
ments alimentaires font l’objet d’une législation évolutive.
La directive 2002/46/CE, relative au rapprochement des législa-
Ils sont soumis aux textes régissant les matières premières agri- tions des EM concernant les compléments alimentaires, apporte
coles et les denrées alimentaires. une définition et un cadre commun pour ces produits. Toutefois,

1
Ils ont également, depuis 2002, une législation propre. Un solide en l’absence d’actes d’exécution pris par la Commission euro-
arsenal juridique réglemente les compléments alimentaires, dont péenne (CE) pour la mise en œuvre de cette directive, la Cour de
le texte fondateur est la directive 2002/46/CE du Parlement euro- justice de l’Union européenne (CJUE) a fragilisé cette construction
péen, donnant un statut propre et un cadre strict aux compléments normative à la faveur des approches nationales.
alimentaires.

1.1 Mise en place 2. Contexte réglementaire


de la « directive cadre du complément
des compléments alimentaires »
Avant 2002, les compléments alimentaires étaient donc considé-
alimentaire en France
rés, soit comme des médicaments, soit comme des denrées ali- et en UE
mentaires ou des produits diététiques [2].
Face à ce vide juridique, et afin de garantir la sécurité du Les compléments alimentaires sont strictement encadrés au
consommateur, l’UE a décidé de mettre en place des règles niveau communautaire par trois niveaux cumulés de réglementa-
communes en adoptant la directive 2002/46/CE. tion, comme l’illustre la figure 1.
Depuis 2002, les compléments alimentaires bénéficient d’une
première étape d’harmonisation au sein de l’UE et disposent d’un ■ Quatre caractéristiques propres à la réglementation du
cadre réglementaire propre, leur conférant un véritable statut. complément alimentaire
La directive 2002/46/CE (aussi appelée « directive cadre des Au sein de l’UE, grâce à la « directive cadre des compléments
compléments alimentaires ») : alimentaires », la réglementation concernant les compléments ali-
– attribue une définition réglementaire à ces produits ; mentaires fait l’objet, depuis 2002, d’une approche partiellement
– donne des indications sur leur mise sur le marché et leur harmonisée au niveau communautaire.
étiquetage ;
Sa définition règlementaire fait apparaître quatre caractéris-
– distingue deux catégories d’ingrédients pouvant entrer dans la tiques qui lui sont propres :
composition des compléments alimentaires (les nutriments et les
autres substances à but nutritionnel ou physiologique). – premièrement, il s’agit d’une denrée alimentaire, soit au sens
de l’article 2 du règlement (CE) n° 178/2002, d’une substance ou
produit, transformé, partiellement transformé ou non transformé,
1.2 Conséquences directes destiné à être ingéré ou raisonnablement susceptible d’être ingéré
par l’être humain ;
d’une directive
– deuxièmement, le complément alimentaire doit être
Contrairement aux produits cosmétiques qui sont régis par un consommé dans l’objectif de compléter un régime alimentaire
règlement [3] permettant une harmonisation plus complète (par normal ;
exemple en termes de composition, de notification, etc.) [4], le – troisièmement, le complément alimentaire constitue une
complément alimentaire est régi par une directive qui entraîne des source concentrée de nutriments ou d’autres substances ayant un
spécificités nationales suite aux différentes transpositions par cha- effet nutritionnel ou physiologique, seul ou combinés ;
cun des États membres (EM). – le quatrième critère, quant à lui, se rapporte à la présentation
Le tableau 1 compare les grandes lignes d’une directive par rap- des compléments alimentaires, selon une forme spécifique pour la
port au règlement. commercialisation (sous forme de doses, de faible quantité).

Tableau 1 – Comparaison entre une directive et un règlement


Points à considérer Directive Règlement

Permet d’harmoniser les législations Rend inapplicable les législations nationales


Législation nationale
nationales Simplifie et favorise la libre circulation

Cible Peut cibler un ou plusieurs États membres Cible tous les États membres

Fixe les objectifs aux États membres, mais Fixe un objectif et les moyens pour
Moyens et objectifs
laisse le choix des moyens pour les atteindre l’atteindre

S’applique en intégralité dès la publication


Doit être transposée en droit interne au
Transposition au JOUE dans toute l’Union européenne,
regard des objectifs définis dans la directive
sans transposition nationale

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RÉGLEMENTATION DES COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES ___________________________________________________________________________________

Concernant les vitamines et minéraux, des Doses journalières


maximales (DJM) peuvent être définies par les autorités natio-
nales.
Réglementation Tout ce corpus doit être pris en compte, y compris ses nom-
régissant les breuses mises à jour et les éventuelles périodes de transition.
matières premières
 
agricoles ■ Transpositions européennes de la directive 2002/46/CE
La directive 2002/46/CE est transposée en droit national dans

1 Réglementation
tous les EM qu’elle vise.
La figure 3 reprend quelques exemples de ces transpositions
dans quelques EM ([5] [6] [7] [8]). Règlements concernés :
 concernant les – décret royal 1487/2009 ;
denrées – ordonnance n° 47 ;
alimentaires
– elektrooniline Riigi Teataja.
En France, cette directive a été transposée en droit français par
le décret n° 2006-352 du 20 mars 2006 [5]. Ce texte précise le cadre
réglementaire relatif aux compléments alimentaires, en particulier
Réglementation en termes de :
spécifique aux – composition ;
complément – règles d’étiquetage spécifiques ;
alimentaires
– procédures de notification (mise sur le marché).

La définition est « compléments alimentaires : les denrées


alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire
Figure 1 – Les trois niveaux cumulés de réglementation pour le
complément alimentaire. normal et qui constituent une source concentrée de nutriments
ou d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiolo-
gique seuls ou combinés, commercialisés sous forme de doses,
à savoir les formes de présentation telles que les gélules, les
pastilles, les comprimés, les pilules et autres formes similaires,
En effet, selon la définition officielle donnée par cette direc- ainsi que les sachets de poudre, les ampoules de liquide, les
tive cadre des compléments alimentaires, « les compléments flacons munis d’un compte-gouttes et les autres formes analo-
alimentaires sont des denrées alimentaires dont le but gues de préparations liquides ou en poudre destinées à être
est de compléter le régime alimentaire normal et qui prises en unités mesurées de faible quantité ».
constituent une source concentrée de nutriments ou
d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou phy-
Cette définition reprend donc celle de la directive, en différen-
siologique seuls ou combinés, commercialisés sous
ciant toutefois les plantes et préparations de plantes, des subs-
forme de doses (gélules, pastilles, comprimés, pilules,
tances à but nutritionnel ou physiologique autres que les
poudre, ampoule) destinées à être prises en unités
nutriments, et en précisant la notion de « formes de
mesurées de faible quantité ».
présentation ».
Plusieurs arrêtés d’application viennent compléter ce décret (voir
■ De fortes disparités réglementaires au sein de l’Union le Pour en savoir plus) :
européenne – l’arrêté qui établit la liste des nutriments (vitamines et miné-
raux) autorisés et leurs conditions d’utilisation (dosages, formes,
Les compléments alimentaires étant des denrées alimentaires, DJM... [9]) en partie annulé par le Conseil d’État [10]) ;
ils sont soumis à l’ensemble de la législation portant sur les den- – l’arrêté qui définit les modalités de transmission des déclara-
rées alimentaires (dite réglementation « horizontale »), sauf tions de première mise sur le marché [11] ;
lorsqu’ils sont clairement exclus du champ d’application des textes – l’arrêté qui institue une première liste de plantes et prépara-
(affichage de l’étiquetage nutritionnel par exemple). tions de plantes, et fixe les règles en matière d’utilisation de ces
ingrédients [12] ;
S’agissant des dispositions spécifiques aux compléments ali- – l’arrêté qui fixe les règles en matière d’utilisation des subs-
mentaires, les dispositions nationales sont à prendre en considéra- tances à but nutritionnel et physiologique (autres que les vita-
tion même si elles peuvent être disparates (déclaration, ingrédients mines et minéraux, et les plantes et préparations de plantes) et les
autorisés...). La figure 2 résume les législations alimentaires géné- conditions de leur emploi [13].
rales et celles spécifiques aux compléments alimentaires.

Cette figure 2 montre que de nombreuses législations


s’appliquent aux compléments alimentaires dans l’UE. Certaines 2.1 Composition
règles et obligations sont harmonisées (allégations, étiquetage
La directive cadre des compléments alimentaires indique que
général, contaminants, sources de vitamines et minéraux, etc.). En
ces produits peuvent être composés de nutriments (vitamines et
revanche, d’autres relèvent actuellement de dispositions natio-
minéraux) et d’autres substances à but nutritionnel ou physiolo-
nales spécifiques (indiqué d’un (1), comme par exemple les listes
gique (SBNP).
de plantes autorisées ou interdites, les procédures de notification,
etc.). Pour les SBNP autres que les vitamines et minéraux ajoutés aux
compléments alimentaires, le règlement européen n° 1925/2006
S’agissant des listes de substances et plantes (positives et/ou s’applique. Ce règlement, applicable dans toute l’UE, dresse en
négatives), au cas par cas selon chaque pays de l’Union euro- annexe III la liste des substances faisant l’objet d’interdictions, de
péenne, certaines sont établies par voie réglementaire, d’autres restrictions ou placées sous contrôle communautaire. Cette liste
découlent de la doctrine ou d’avis d’agences scientifiques. est mise à jour après évaluation par la Commission [14].

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Réglementation
alimentaire   
générale

Hygiène
Enrichissement
des denrées 1
alimentaires
alimentaire
(hors  vitamines
   
et minéraux)
Vitamines  et  
minéraux  
autorisés

Substances à Plantes et 
Qualité et  but nutritionnel   préparations  de  Additifs, enzymes
   
contaminants ou physiologique plantes  et arômes
autorisées (1)  
autorisées(1)

COMPLÉMENT  
ALIMENTAIRE

DJM  vitamines 
Traçabilité Notification (1) Novel food
et minéraux (1)

Règles 
d’étiquetage 
spécifiques

Communication :
allégations  Résidus  
   
nutritionnelles de pesticides
et de santé  

Étiquetage

Législations alimentaires générales Législations spécifiques aux compléments alimentaires


(réglementation « horizontale ») (1) Règles non harmonisées au niveau européen

Figure 2 – Textes applicables aux compléments alimentaires dans l’Union européenne

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EUROPE

1
Directive 2002/46/CE
 

Transposition
  nationale

FRANCE ESPAGNE BULGARIE ESTONIE


Décret n° 2006-352 Décret royal 1487/2009 Ordonnance n° 47 Loi  n° RT I 2004, 34, 236
du 20 mars 2006 du 26 septembre 2009 du 28 décembre 2004 du 13 mai 2004

Figure 3 – Exemples de transpositions nationales de la directive cadre des compléments alimentaires dans quelques EM

En France, comme dans certains EM, le décret n° 2006-352


donne des précisions sur la composition des compléments alimen-
Tableau 2 – Exemples de substances vitaminiques
taires et apporte des définitions supplémentaires dont une pour un
et minérales pouvant être utilisées
type d’ingrédient : les plantes. Ainsi, seuls peuvent être utilisés
pour la fabrication de compléments alimentaires
pour la fabrication des compléments alimentaires : Vitamines et minéraux Sources
– les nutriments : vitamines et minéraux (§ 2.1.1) ;
– les plantes et les préparations de plantes : les ingrédients Acide L-ascorbique
composés de végétaux ou isolés à partir de ceux-ci, possédant des L-ascorbate de sodium
propriétés nutritionnelles ou physiologiques, à l’exclusion des
plantes ou des préparations de plantes possédant des propriétés Vitamine C L-ascorbate de calcium
pharmacologiques et destinées à un usage exclusivement théra-
peutique (§ 2.1.3) ; L-ascorbate de potassium
– les autres SBNP : les substances chimiquement définies pos-
L-ascorbyl 6-palmitate
sédant des propriétés nutritionnelles ou physiologiques, à l’excep-
tion des nutriments et des substances possédant des propriétés Chlorhydrate de pyridoxine
exclusivement pharmacologiques (§ 2.1.2) ; Vitamine B6
– les autres ingrédients dont l’utilisation en alimentation Pyridoxine-5′-phosphate
humaine est traditionnelle ou reconnue comme telle au sens du
règlement du 27 janvier 1997 susvisé, ou autorisés conformément Carbonate de calcium
à ce règlement (§ 2.1.4) ; Calcium Gluconate de calcium
– les additifs, les arômes et les auxiliaires technologiques
dont l’emploi est autorisé en alimentation humaine (§ 2.1.2 et § 2.1.6). Lactate de calcium

Oxyde de zinc
Zinc
2.1.1 Nutriments : Vitamines et Minéraux Chlorure de zinc
■ Les formes de nutriments
Les vitamines et minéraux autorisés dans les compléments ali-
■ Les doses de nutriments
mentaires, ainsi que les formes de chacun d’eux, sont définis dans
la directive 2002/46/CE modifiée par le règlement n° 1170/2009 • Les VNR
([15] [16]). Ces nutriments autorisés sont repris dans le tableau 3,
Les valeurs nutritionnelles de référence (VNR) constituent un
auxquels il faut ajouter le bore et le silicium.
ensemble complet de recommandations nutritionnelles et de
Le tableau 2 illustre quelques exemples de formes de nutriments valeurs de référence, telles que :
autorisées. – les apports de référence de la population ;
– les besoins moyens ;
Par exemple, le zinc possède une quinzaine de formes autorisées, – le niveau approprié de consommation ;
dont l’oxyde de zinc et le chlorure de zinc. – le seuil de consommation minimum.

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Tableau 3 – Vitamines et sels minéraux pouvant être déclarés et Valeurs nutritionnelles


de référence (VNR) ou Apports quotidiens de référence (AR) pour les adultes
(hors catégories particulières de population)
Vitamines VNR Sels minéraux VNR
Vitamine A 800 µg Potassium 2 000 mg
Vitamine D
Vitamine E
5 µg
12 mg
Chlorure
Calcium
800 mg
800 mg 1
Vitamine K 75 µg Phosphore 700 mg
Vitamine C 80 mg Magnésium 375 mg
Thiamine (vit. B1) 1,1 mg Fer 14 mg
Riboflavine (vit. B2) 1,4 mg Zinc 10 mg
Niacine (vit. B3) 16 mg Cuivre 1 mg
Vitamine B6 1,4 mg Manganèse 2 mg
Acide folique (vit. B9) 200 µg Fluorure 3,5 mg
Vitamine B12 2,5 µg Sélénium 55 µg
Biotine (vit. B8) 50 µg Chrome 40 µg
Acide pantothénique (vit. B5) 6 mg Molybdène 50 µg
Iode 150 µg

Par exemple, 100 % des VNR en vitamine D correspondent à un


apport de 5 µg en cette vitamine. Remarques
La dénomination « VNR » remplace dans le règlement (UE) La supplémentation en vitamines des nourrissons (de
n° 1169/2011 l’ancienne notion d’« AJR » (Apports journaliers recom- 0 à 1 an) et des enfants en bas âge (de 1 à 3 ans) fait
mandés). Ils sont définis tels que notés dans le tableau 3 [17]). l’objet d’un encadrement médical. Tout apport supplémen-
taire, sans encadrement par un professionnel de santé, pré-
sente des risques pour la santé de cette population.
• Les DJM

Prévue depuis la directive cadre des compléments alimentaires, Il est à noter qu’un projet d’arrêté concernant une modification
l’harmonisation de la Dose journalière maximale de nutriments des DJM des nutriments a été soumis à l’Anses en octobre
(DJM) au niveau européen est toujours en discussion. 2014 [18]. L’Anses ayant rendu un avis défavorable, le projet est
actuellement en attente.
La problématique est relative au partage des apports entre les
denrées alimentaires, les denrées alimentaires enrichies et les Dans l’attente de l’évolution de cet arrêté, des limites indicatives
compléments alimentaires, afin de ne pas conduire à un dépasse- des DJM en France, repris au tableau 4, sont proposées par la
ment des doses dans l’objectif de protéger la santé du consomma- Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la
teur. répression des fraudes (DGCCRF). Les recommandations sanitaires
incluent des teneurs maximales par portion journalière recomman-
Puisqu’aucun consensus n’a été trouvé, les DJM renvoient donc dée, mais aussi des avertissements à destination de populations à
encore aux législations nationales. En outre, cette situation est risque [19].
divergente entre les EM car certains pays ont adopté des DJM et
d’autres non. Les DJM peuvent de plus être très différentes d’un
État membre à un autre. 2.1.2 Substances à but nutritionnel
Concernant la France, l’arrêté du 9 mai 2006 détermine ces DJM
ou physiologique
pour les nutriments [9]. Suite à une décision du Conseil d’État [10],
cet arrêté est en partie annulé sur ce qu’il fixe, à son annexe III, les Ces SBNP sont très nombreuses. Elles recouvrent principale-
doses journalières maximales pouvant être utilisées dans les com- ment les composés chimiques, c’est-à-dire les substances
pléments alimentaires, compte tenu des portions recommandées chimiques pures constituées d’atomes liés entre eux par des liai-
par le fabricant, pour les vitamines K, B1, B2, B5, B8 et B12. sons chimiques.

Par ailleurs, depuis l’établissement de cet arrêté, de nouvelles


données scientifiques ont conduit les autorités sanitaires à revoir Il s’agit par exemple de :
ces valeurs. Pour garantir une sécurité optimale des compléments – la lactase ;
alimentaires contenant des nutriments, une distinction a été opé- – la lutéine ;
rée entre les adultes, les enfants et les adolescents. – la caféine ;
– la créatine ;
En effet, des teneurs maximales distinctes ont été établies pour – certains acides aminés ;
les enfants (de 3 à 10 ans) et les adolescents (plus de 10 ans) afin – la glucosamine ;
de tenir compte de leur physiologie. – la mélatonine.

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PHA3063

Compléments alimentaires à base


de plantes
Évolutions réglementaires 1

par Xavier FERNANDEZ


Docteur en sciences, HDR
Professeur des universités
Directeur du Master 2 professionnel chimie formulation, analyse et qualité (FOQUAL)
Institut de chimie de Nice, Université de Nice-Sophia Antipolis, UMR CNRS 7272,
Nice, France
Mélissa CLÉMENT CHAMI
Doctorante en sciences
Institut de chimie de Nice, Université de Nice-Sophia Antipolis, UMR CNRS 7272,
Nice, France
Ingénieur chimiste, Botanicert, Grasse, France
et Loïc LOFFREDO
Master 2 professionnel chimie formulation, analyse et qualité (FOQUAL),
Université Nice-Sophia Antipolis, France
Directeur technique, Botanicert, Grasse, France

1. Vers une rationalisation de l’usage des plantes ......................... PHA 3 063 - 2


2. Notions de botanique.......................................................................... — 4
3. Secteur du complément alimentaire : une importante
disparité .................................................................................................. — 5

4. Réglementation du complément alimentaire à base


de plantes ............................................................................................... — 7
5. Référentiels à la disposition des industriels ................................ — 11
6. Conclusions et perspectives ............................................................. — 17
7. Sigles ....................................................................................................... — 18
8. Glossaire ................................................................................................. — 18
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. PHA 3 063

’industrie agroalimentaire a connu une évolution sans précédent au cours


L du siècle dernier via la mise sur le marché d’un nombre croissant de pro-
duits raffinés. Dépourvus de nutriments naturellement présents dans les
aliments bruts de départs, ces produits transformés de grande consommation
ont engendré de nombreux cas de déséquilibres alimentaires. Citons par
exemple, le sel, qui une fois raffiné ne contient plus de minéraux tels que le
magnésium ou le calcium, ou les céréales, qui privées de leur enveloppe et de
leur germe perdent leur apport naturel en fibres, vitamine B ou encore vita-
mine E.
C’est dans ce contexte, qu’un nouveau produit a émergé sur le marché : le
complément alimentaire.
Parution : septembre 2016

Selon le décret n° 2006-352 du 20 mars 2006 relatif aux compléments alimen-


taires, on entend par compléments alimentaires « les denrées alimentaires
dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent

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COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES À BASE DE PLANTES _____________________________________________________________________________________

une source concentrée de nutriments ou d’autres substances ayant un effet


nutritionnel ou physiologique seuls ou combinés, commercialisés sous forme
de doses, à savoir les formes de présentation telles que les gélules, les pas-
tilles, les comprimés, les pilules et autres formes similaires, ainsi que les
sachets de poudre, les ampoules de liquide, les flacons munis d’un
compte-gouttes et les autres formes analogues de préparations liquides ou en
poudre destinées à être prises en unités mesurées de faible quantité ».

1 Cette définition élargit clairement l’usage du complément alimentaire,


passant d’une denrée censée supplémenter des carences nutritionnelles à un
produit pouvant avoir des effets physiologiques, rendant floue pour le
consommateur la frontière entre aliment et médicament. C’est pourquoi la
législation se devait d’encadrer au plus près ce nouveau produit, tant au
niveau des indications d’usage destinées aux consommateurs qu’aux précau-
tions particulières à prendre par les fabricants, notamment dans le cas
d’emploi de plantes décrites dans l’arrêté du 24 juin 2014 établissant la liste
des plantes, autres que les champignons, autorisées dans les compléments ali-
mentaires et les conditions de leur emploi.
En plus, d’établir un état des lieux socio-économique du secteur du complément
alimentaire à base de plantes, cet article détaille les différents aspects réglemen-
taires auxquels doit satisfaire cette denrée. Aussi, les référentiels à la disposition
des professionnels du domaine y sont discutés et des notions de botanique essen-
tielles à la mise en place d’un contrôle qualité pertinent sont exposées.
Un glossaire des éléments utilisés et un tableau de sigles sont présentés en
fin d’article.

1. Vers une rationalisation 1.1 Filiation de la réglementation


française
de l’usage des plantes
En France, afin de lutter contre le charlatanisme grandissant, le
diplôme d’apothicaire est officiellement reconnu en 1258 par
De tout temps, les plantes ont été utilisées à des fins alimen-
Louis IX et l’activité des épiciers se prétendant apothicaire a été
taires, cosmétiques et curatives.
définitivement restreinte par une ordonnance de Jean Le Bon
En effet, loin de l’image de l’Homme préhistorique carnivore, les datant de 1352. En effet, les abus étaient tels que, dans un souci de
recherches ont établi que les feuilles, les fruits, les baies, les transparence, les apothicaires devaient préparer leurs remèdes en
racines et les tubercules sont longtemps restés à la base du régime public, sous les yeux de médecins et autres officiels du
alimentaire [1]. L’analogie la plus remarquable a été soulignée par royaume [4].
les découvertes dévoilant que certains d’entre eux utilisaient déjà
Dans le domaine de la délivrance de plantes médicinales, aussi
des plantes à des fins médicinales [2]. En effet, alors que le goût
dites « simples », les apothicaires détenaient le monopole, excep-
amer et l’absence d’apport nutritif de l’Achillée millefeuille
tion faite pour le statut d’herboriste reconnu en 1312, qui permet-
(Achillea millefolium) rendent cette plante peu attractive, ses com-
tait lui aussi cette pratique. Cette situation a mené à de
posés chimiques caractéristiques ont été mis en évidence dans du
nombreuses distensions entre les deux professions, et s’est conclu
tartre dentaire d’un squelette néandertalien, laissant ainsi penser
en 1941 sous le régime de Vichy avec la suppression de la recon-
qu’ils l’utilisaient dores et déjà pour ses propriétés hémo-
naissance par l’État français du diplôme d’herboriste [5].
statiques [3].
Il a fallu attendre le décret n° 79-480 du 15 juin 1979 pour libérer
Infime est donc la frontière entre l’usage actuel des plantes et
du monopole pharmaceutique une première liste de 34 plantes
celui d’autrefois. Mais, au fil des siècles, l’Homme a promptement
telles que la camomille ou la lavande, et le décret n° 2008-841 du
saisi le potentiel du règne végétal à travers sa large gamme de
22 août 2008 pour libérer une seconde liste portant ce nombre à
domaines d’applications pouvant contribuer à l’amélioration de sa
148. Dans le domaine du complément alimentaire, c’est à travers
qualité de vie. C’est pourquoi, un rapport plus rationnalisé s’est
l’arrêté du 24 juin 2014 établissant la liste des plantes, autres que
développé : la transmission du savoir et son bon usage sont deve-
les champignons, autorisées dans les compléments alimentaires et
nus primordiaux.
les conditions de leur emploi que l’État français autorise l’emploi
Du papyrus d’Ebers (16 000 ans av. J.-C.), où les prescriptions de de 546 plantes dans l’élaboration de compléments alimentaires. Ce
150 plantes médicinales ont été décrites, en passant par le traité nombre est à voir à la hausse via l’article 16 du décret n° 2006-352
De materia medica de Dioscoride (60 ans ap. J.-C.) exposant du 20 mars 2006 relatif aux compléments alimentaires. Ce dernier
l’usage de 600 plantes à des fins médicales, jusqu’aux dernières autorise le principe de reconnaissance mutuelle entre les pays :
publications des actuelles pharmacopées, les sociétés ont évolué une plante employée dans un complément alimentaire légalement
jusqu’à aboutir à un accès réglementé aux plantes ayant des commercialisé dans un pays de l’Union européenne peut être
vertus médicinales. employée dans le même dessein en France.

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______________________________________________________________________________________ COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES À BASE DE PLANTES

1.2 Contexte actuel Tableau 1 – Volume horaire des enseignements


obligatoires en botanique et pharmacognosie
Face aux nouvelles dispositions réglementaires ouvrant le com-
merce de plantes même médicinales au-delà des frontières fran- Nombres d’heures
çaises, l’enjeu grandissant est celui de la garantie de la sécurité Pays Formation d’enseignement obligatoire de
des consommateurs de compléments alimentaires à base de botanique ou pharmacognosie
plantes.

1
France Pharmacien 134
1.2.1 Formations Allemagne Pharmacien 140
En France, le diplôme d’herboriste ayant été aboli en 1941 sous
États-Unis Pharmacien –
le régime de Vichy, la seule formation autorisant la dispensation
de plantes médicinales est celle de pharmacien. Canada Herboriste 500
Or, si l’on compare une formation d’herboriste reconnue par un
pays comme le Canada (OHA, Ontario Herbalists Association) ou
l’Angleterre (NIMH, The National Institute of Medical Herbalists), ments alimentaires à base de plantes élaborant leurs produits à
aux formations des pharmaciens en France, en Allemagne ou aux partir de plantes entières. Le plus souvent, des poudres ou des
États-Unis, il existe une nette différence en ce qui concerne le extraits sont employés, rendant, en amont de la fabrication, l’iden-
nombre d’heures d’enseignements obligatoires dans le domaine tification de la plante difficilement réalisable. De plus, ces prépara-
de la botanique et de la pharmacognosie (tableau 1). tions sont souvent le résultat d’extractions par des solvants,
Cependant, sur la base du volontariat, les pharmaciens le sou- amenant parfois à l’exclusion de composés d’intérêts, ou dans les
haitant peuvent approfondir leurs connaissances des simples : cas les plus critiques, à concentrer sensiblement la teneur en subs-
pour les étudiants en pharmacie, au travers des unités d’enseigne- tances réputées dangereuses. Et c’est après leur commercialisation
ments optionnelles ; pour les pharmaciens en exercice, au travers que les instituts de veille sanitaire sont alertés des effets indési-
des diplômes universitaires (DU). rables constatés (tableau 2).
Cet écart a eu deux impacts : premièrement, de par une forma- Détaillons les cas du thé vert et du fang-ji.
tion moins poussée et une marge financière moins importante, les
plantes médicinales sont longtemps restées non valorisées et diffi-
Exemple 1 : le Camellia sinensis, dit théier ou thé vert, commer-
cilement accessibles dans les officines de pharmacie et, deuxième-
cialisé sous la spécialité pharmaceutique Exolise® en 1999 a été retiré
ment, afin de répondre à cet engouement pour les produits
du marché 4 ans plus tard suite à sa mise en cause dans 13 atteintes
naturels un marché parallèle de plantes médicinales a émergé et
hépatiques aigües. Pourtant, l’autorisation de mise sur le marché de
connu un essor exponentiel via internet, entraînant un grand
ce complément amaigrissant délivré sans ordonnance a été accordée
nombre d’acteurs à pratiquer l’exercice illégal de la pharmacie [6].
sur la base d’un large recul sur son emploi traditionnel. Ce recul
s’était fait sur l’utilisation de la plante sous forme de tisane, or la spé-
1.2.2 Incidents sanitaires cialité était commercialisée sous la forme d’un extrait hydro-alcoo-
lique. Cette forme galénique, bien plus concentrée en
Le marché des matières premières naturelles a largement évolué épigallocatéchine gallate, augmenta considérablement l’hépatotoxicité
ces dernières décennies et rares sont les fabricants de complé- des doses absorbées.

Tableau 2 – Exemple d’incidents sanitaires notables et leurs conséquences [7]

Plante Composé impliqué Effets indésirables Mesures réglementaires

Mesures particulières à respecter lors de son utilisation


Camellia sinensis Épigallocatéchine gallate Toxicité hépatique
dans les compléments alimentaires en France

Aristolochia fangchi/ Toxicité rénale


Acide aristolochique Interdite en France
Stephania tetandra Cancer

Seule la voie locale est autorisée en France


Symphytum officinalis Alcaloïdes pyrrolizidiniques Toxicité hépatique
Interdite en Belgique

Mesures particulières à respecter lors de son utilisation


Borago officinalis Alcaloïdes pyrrolizidiniques Toxicité hépatique dans les compléments alimentaires
Interdite en Belgique

Teucrium chamaedrys Diterpène Toxicité hépatique Interdite en France

Piper methysticum Composé non identifié Toxicité hépatique Interdite en France

Interdite en France dans les préparations magistrales et


officinales
Citrus aurantium Synéphrine Cardiotoxique
Mesures particulières à respecter lors de son utilisation
dans les compléments alimentaires en France

Autorisée dans les compléments alimentaires en France


Hedeoma pulegioides Pulégone Toxicité hépatique
sans mesure particulière

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COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES À BASE DE PLANTES _____________________________________________________________________________________

Exemple 2 : le cas du Stephania tetandra, dit fang-ji, a eu des Ce binôme est toujours écrit en italique avec, seule, la première
conséquences bien plus désastreuses. Dans les années 1990, une lettre du genre en majuscule. Il doit être suivi du nom du décou-
confusion lors de l’identification de la plante a conduit à l’emploi acci- vreur ou son initiale qui, lui, n’est pas en italique. Cette nomencla-
dentel d’Aristolochia fangchi dans des préparations utilisées à des fins ture permet d’éviter les confusions telles que celles induites par
amaigrissantes, causant une centaine de cas d’insuffisances rénales certains abus de langage comme l’emploi du nom commun Camo-
terminales. Suite à cela, le gouvernement français de l’époque a mille pour désigner les espèces Chamaemelum nobile et Matrica-
publié le décret n° 98-397 du 20 mai 1998 relatif aux interdictions ria recutita. Cette typologie prend toute son importance lorsqu’une
concernant les plantes dénommées Stephania tetrandra et Aristolo- espèce présente de nombreux synonymes tels que ceux apparte-

1 chia fangchi, où il est clairement explicité qu’ « il est interdit de pro-


duire, d’importer, d’exporter, d’offrir, de vendre, de distribuer à titre
gratuit, de détenir les plantes dénommées Stephania tetrandra, Aris-
nant au genre Citrus (tableau 3).
Ainsi, lorsque des investigations sont menées sur une plante,
tolochia fangchi, les extraits de ces plantes et les produits en utiliser son nom vernaculaire peut présenter des risques de confu-
contenant ». Ce décret a été consolidé et élargi en 2003 à toute la sions et étendre les recherches à ses synonymes peut s’avérer
famille des Aristolochiaceae, aux plantes contenant des actifs simi- enrichissant. C’est dans ce souci de transparence que des supports
laires (aristolactames et acides aristolochiques), ainsi qu’aux plantes numériques tels que Tela Botanica, The Plant List ou Tropicos ont
présentant un risque de confusion. émergé. Ces sites internet permettent d’affilier un nom vernacu-
laire ou un nom admis à son nom scientifique officiel.
Ces deux exemples mettent l’accent sur l’importance de l’identi-
fication de la plante et de son mode de préparation. Ces étapes
sont les garants de l’innocuité du produit final et ces deux inci- 2.2 Différentes classifications
dents témoignent des dangers que peut représenter un manque de
connaissances en botanique et en galénique d’un professionnel De très nombreuses classifications ont été établies au fil du
amené à entrer dans le processus de fabrication ou de commercia- temps par des spécialistes tels que des naturalistes, botanistes, et
lisation d’une denrée à base de plantes. pharmaciens. Ces classifications ont évolué grâce à l’essor de nou-
velles techniques et approches permettant de mettre en évidence
des critères de plus en plus discriminants. La génétique a large-

2. Notions de botanique ment contribué à cette évolution avec la mise en évidence de


séquences spécifiques à certaines familles, genres ou même
espèces créant ainsi la phylogénie. De la même manière, la chimie
a également contribué à ce développement avec l’identification de
2.1 Botanique : taxonomie marqueurs spécifiques (chimiotaxonomie) permettant parfois
et systématique d’affilier des entités à des taxons différents. Au total, il existe trois
critères d’affiliation :
Pour décrire un individu ou un organisme, il est nécessaire de lui – morphologique ou botanique (macroscopie et microscopie) ;
donner un nom. Si l’échantillon d’individus est limité, un nom
– chimique (métabolites plus ou moins spécifiques) ;
concis et unique pourrait suffire, mais le domaine du végétal ne
permet pas cette simplicité : les découvertes de nouvelles espèces – génétique (séquences d’ADN plus ou moins spécifiques).
et les croisements effectués lors de sélections variétales font que
ce vaste domaine est en constante évolution [8].
2.2.1 Classification macroscopique
C’est pourquoi, pour nommer de telles entités, il a été nécessaire
d’établir une classification hiérarchisée, telle un arbre généalo- Bien que de nombreuses classifications macroscopiques aient
gique, basée sur des éléments discriminants. C’est tout l’enjeu de été élaborées, la plus connue est celle établie par Arthur Cronquist
la systématique et de la taxonomie ; la première concerne l’art de en 1968 [7] [10]. Ce dernier a classé les Angiospermes en fonction
classer les individus, tandis que la seconde s’efforce de les de leurs caractéristiques morphologiques et chimiques. Il s’agit
décrire [9]. d’une classification encore utilisée de nos jours, bien que celle en
vigueur soit une classification utilisant des critères génétiques.
Les premières classifications qui ont vu le jour relèvent de la
phytosociologie : elles reposent sur la morphologie, le mode de
reproduction, ainsi que la relation entre les différentes espèces 2.2.2 Classification génétique : APG IV
d’un même habitat naturel. Elles ont par la suite progressé vers (Angiosperm Phylogeny Group )
des classifications plus complètes intégrant la notion d’évolution
grâce à Darwin (1809-1882) et la notion de phylogénie grâce à Il s’agit d’une classification récente (1998) établie en classant les
Linné (1707-1778), père de la taxonomie et de la nomenclature Angiospermes en fonction de la phylogénie entre les espèces, ce
binomiale [10]. Cette dernière permet la caractérisation de qui signifie qu’elle se base essentiellement sur le critère de diffé-
n’importe quel organisme à l’aide du binôme « genre et espèce » renciation génétique [10]. L’APG a connu trois mises à jour avec
et sert de base à toutes les classifications en s’appuyant sur diffé- l’APG II en 2003, l’APG III en 2009 et la dernière version en vigueur
rents niveaux dits « taxons » (figure 1). datant de 2016, l’APG IV.

Règne
Embranchement ou Phylum
Classe
Ordre
Famille
Genre
Espèce

Figure 1 – Représentation de la systématique phylogénétique

PHA 3 063 – 4 Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés

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PHA3063

______________________________________________________________________________________ COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES À BASE DE PLANTES

Tableau 3 – Exemples de deux espèces issues du genre Citrus


Nom vernaculaire Nom latin Synonymes
Pamplemousse Citrus maxima (Burm.) Aurantium decumana (L.) Mill. ; Aurantium maximum Burm. ; Citrus × aurantium var.
asiatique Merr. decumana L. [Illegitimate] ; Citrus aurantium subsp. decumana (L.) Tanaka ;
Citrus × aurantium var. grandis L. ; Citrus × aurantium f. grandis (L.) M.Hiroe ; Citrus
aurantium f. grandis (L.) Hiroë ; Citrus costata Raf. ; Citrus decumana L. [Illegitimate] ;
Citrus grandis (L.) Osbeck ; Citrus grandis f. buntan Hayata ; Citrus grandis var. sabon
(Siebold) Karaya ; Citrus grandis var. sabon (Siebold ex Hayata) Hayata ; Citrus grandis var.
yamabuki (Tanaka) Karaya ; Citrus obovoidea Yu.Tanaka ; Citrus pompelmos Risso ; Citrus
1
sabon Siebold ex Hayata ; Citrus yamabuki Yu.Tanaka
Citron Citrus limon (L.) Osbeck Citrus × aurantium subsp. bergamia (Risso et Poit.) Engl. ; Citrus aurantium subsp.
bergamia (Risso) Wight et Arn. ; Citrus aurantium var. bergamia (Risso) Brandis ;
Citrus × aurantium var. mellarosa (Risso) Engl. ; Citrus × bergamia Risso et Poit. ;
Citrus × bergamia subsp. mellarosa (Risso) D. Rivera et al. ; Citrus × bergamota Raf. ;
Citrus × limodulcis D. Rivera, Obón et F. Méndez ; Citrus × limonelloides Hayata ;
Citrus × limonia Osbeck ; Citrus × limonia var. digitata Risso ; Citrus × limonum Risso ;
Citrus medica var. limon L. ; Citrus medica f. limon (L.) M. Hiroe ; Citrus medica subsp.
limonia (Risso) Hook. f. ; Citrus × medica var. limonum (Risso) Brandis ; Citrus × medica
subsp. limonum (Risso) Engl. ; Citrus medica var. limonum (Risso) Brandis ;
Citrus × mellarosa Risso ; Citrus × meyeri Yu. Tanaka ; Citrus × vulgaris Ferrarius ex Mill. ;
Limon × vulgaris Ferrarius ex Miller

2.3 Perspectives grands groupes. Aujourd’hui, le secteur des fabricants de complé-


ments alimentaires regroupe des entreprises (environ 400) variées
L’essor des classifications existantes découle directement du tant par leur nature que par leur taille. De la grande industrie
développement de nouveaux outils technologiques permettant la (pharmaceutique, cosmétique ou agroalimentaire) à la très petite
mise en évidence de nouveaux critères discriminants destinés à entreprise (1 à 9 salariés), en passant par les petites et moyennes
affiner l’affiliation de chaque espèce. C’est dans cet esprit que (20 à 250 salariés), la typologie des acteurs du secteur est hétéro-
l’APG IV, n’utilisant que des critères génétiques, pourra dans le gène, induisant des méthodes de travail différentes.
futur être enrichi grâce aux progrès de la phytochimie. Ce domaine
■ Les grands groupes diversifiés
permet la mise en évidence de marqueurs chimiques discriminants
via le développement de techniques de séparation, d’isolement et Ces grands groupes (tels que Merck, Nestlé ou L’Oréal ) sont
d’élucidation structurale de substances naturelles. engagés dans la fabrication de compléments alimentaires dans le
but de diversifier leur portefeuille de produits. Ils bénéficient de
moyens financiers importants et d’une réputation leur permettant
de se positionner facilement sur le marché.
3. Secteur du complément ■ Les entreprises spécialisées
alimentaire : Ces structures (telles que Juva Santé, Arkopharma ou Oenobiol )
une importante disparité sont devenues des références dans le domaine du complément ali-
mentaire en étant parmi les premières à populariser cette denrée
au sein des foyers. Certaines ont été rachetées par de grands
groupes et d’autres prospèrent en ayant réussi à devenir leader du
Qu’il soit à base de vitamines, minéraux ou encore de plantes, le
marché dans leur domaine.
marché du complément alimentaire est extrêmement diversifié de
par la variété de ses domaines d’application. Les compléments ali- ■ Les marques de distributeur
mentaires peuvent en effet être utilisés à des fins de supplémenta-
tion des carences, mais aussi être consommés pour anticiper des Représentés par des groupements de pharmaciens (Giphar et sa
besoins ou encore aider au bon fonctionnement du système phy- ligne Giphactive) ou des enseignes de la grande distribution (Casino
siologique. et sa ligne Casino bien pour vous ), ces fabricants ont fait le choix de
commercialiser leur propre gamme de compléments alimentaires.
Ces derniers sont proposés à la vente dans leur chaîne commerciale
à des prix moins élevés que leur concurrent spécialisé, car ils sont
3.1 En France moins investis dans l’innovation et le marketing.
Avec un chiffre d’affaires annuel moyen de 1,18 milliard d’euros ■ Les acteurs de « niches »
au cours de ces 5 dernières années, le marché français du complé-
ment alimentaire maintient sa place parmi les premiers pays euro- Même s’ils ne représentent qu’une part mineure de marché (tels
péens consommateurs de ces produits. Ce succès national est que Actidiet ou Jaminex), ils ont réussi à s’inscrire dans la chaîne
largement associé à la grande variété de circuits de fabrication, de de fabrication du complément alimentaire en proposant des pro-
distribution et de domaines d’application. duits innovants et en répondant à des demandes spécifiques. Ils
peuvent exercer en nom propre ou sous-traiter une partie de la
fabrication d’un complément alimentaire et couvrir un large
3.1.1 Professionnels spectre de domaines tels que l’agriculture biologique, le packa-
ging, ou la formulation. Cette polyvalence leur permet de s’adapter
Les premiers succès signés par des entreprises familiales, telles aux fluctuations du marché, mais un durcissement de la réglemen-
que Oenobiol au milieu des années 1980, ont suscité l’intérêt de tation peut déstabiliser leur équilibre financier.

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Compléments alimentaires à base


de plantes
Approche analytique 1

par Xavier FERNANDEZ


Docteur en sciences, HDR
Professeur des universités, Université Nice-Sophia Antipolis
Directeur du Master 2 Professionnel chimie formulation, analyse et qualité (FOQUAL)
Institut de chimie de Nice, Université de Nice-Sophia Antipolis
UMR CNRS 7272, Nice
Mélissa CLÉMENT CHAMI
Doctorante en sciences, Université Nice-Sophia Antipolis
Institut de chimie de Nice, Université de Nice-Sophia Antipolis
UMR CNRS 7272, Nice
Ingénieur chimiste, Botanicert, Grasse
et Loïc LOFFREDO
Directeur technique, Botanicert, Grasse
Master 2 Professionnel chimie formulation, analyse et qualité (FOQUAL),
Université Nice-Sophia Antipolis, Nice

1. Notions de botanique........................................................................... PHA 3 064 - 2


1.1 Nomenclature et classifications............................................................... — 2
1.2 Phytochimie des plantes .......................................................................... — 2
1.3 Classification des composés .................................................................... — 3
2. Différents outils d’analyses phytochimiques................................ — 3
2.1 Préparation d’échantillon ......................................................................... — 5
2.2 Techniques d’analyse ............................................................................... — 6
2.3 Métabolomique ......................................................................................... — 8
3. Disparités des méthodes d’analyse utilisées
par les industriels pour contrôler les matières premières......... — 9
3.1 Comparaison entre différentes techniques de dosage .......................... — 9
3.2 Quelques exemples .................................................................................. — 12
3.3 Choix de la méthode d’analyse................................................................ — 13
4. Référentiels à la disposition des industriels ................................. — 13
4.1 Principe des pharmacopées ..................................................................... — 13
4.2 Étude de cas : la Valeriana officinalis et les problématiques posées
par une monographie issue de la pharmacopée européenne — 14
5. Conclusions et perspectives .............................................................. — 15
6. Sigles ........................................................................................................ — 16
7. Glossaire .................................................................................................. — 17
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc PHA 3 064

’essor manifeste de la chimie thérapeutique tout au long de ces deux der-


L
Parution : novembre 2016

niers siècles a favorisé la mise au point de médicaments de plus en plus


élaborés souvent d’origine synthétique, et malgré un encadrement réglemen-
taire très strict, de nombreux accidents sanitaires ont été à déplorer. Cela a
conduit un bon nombre de consommateurs à désavouer les produits issus de

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PHA3064

COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES À BASE DE PLANTES _____________________________________________________________________________________

la chimie et à se tourner vers l’utilisation de produits naturels. C’est dans ce


contexte qu’un nouveau produit a émergé : le complément alimentaire.
Selon le décret n° 2006-352 du 20 mars 2006, on entend par compléments ali-
mentaires « les denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime
alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou
d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique seuls ou
combinés, commercialisés sous forme de doses, à savoir les formes de présen-
1 tation telles que les gélules, les pastilles, les comprimés, les pilules et autres
formes similaires, ainsi que les sachets de poudre, les ampoules de liquide, les
flacons munis d’un compte-gouttes et les autres formes analogues de prépara-
tions liquides ou en poudre destinées à être prises en unités mesurées de
faible quantité ».
La réglementation française s’étant étoffée avec la publication de l’arrêté
du 24 juin 2014 établissant la liste des plantes, autres que les champignons,
autorisées dans les compléments alimentaires et les conditions de leur emploi,
les industriels doivent désormais se conformer à un contrôle qualité stricte.
Afin que ces nouvelles exigences ne mettent en défaut les professionnels
entrant dans le circuit de fabrication de compléments alimentaires, cet article
propose des notions essentielles de botanique, ainsi qu’une étude compara-
tive des différents référentiels et outils analytiques nécessaires à la mise
en place d’un contrôle qualité approfondi.
Un tableau de sigles et un glossaire sont présentés en fin d’article.

1. Notions de botanique tères génétiques, est amenée à être enrichie grâce au progrès de la
phytochimie.
Nota : cette partie fait l’objet d’un développement approfondi dans l’article
Des connaissances approfondies en botanique sont les pre- [PHA 3 063].
mières garantes d’un contrôle qualité adéquat. Elles permettent
d’avoir le recul nécessaire pour une bonne interprétation d’un
résultat. 1.2 Phytochimie des plantes

1.1 Nomenclature et classifications 1.2.1 Généralité et histoire


La phytochimie représente l’étude de l’ensemble des compo-
Le monde du végétal étant très vaste, il est important de pouvoir sés chimiques participant à la structure, à la croissance et au bon
dénommer une plante sans équivoque. C’est tout l’enjeu de la fonctionnement du végétal (métabolisme). Cette science s’applique
nomenclature binomiale proposée par Carl von Linné au également aux techniques d’analyse employées, ainsi qu’à l’isole-
XVIIIe siècle. ment des substances d’intérêt dites métabolites.
Cette dernière repose sur la caractérisation des organismes via La phytochimie est un domaine de la chimie considérablement
l’utilisation du binôme « genre espèce », où le genre est écrit avec étudié, notamment depuis le développement de la chromatogra-
une majuscule et l’espèce en italique suivi du nom ou de l’initiale phie au début du XXe siècle. Elle a permis la séparation et l’isole-
du découvreur. Cette appellation permet d’éviter les abus de lan- ment de certains actifs largement utilisés aujourd’hui comme point
gage (la menthe pouvant désigner entre autres la Mentha piperita de départ dans l’élaboration de principes actifs. Parmi ces molé-
ou la Mentha aquatica L.), mais elle n’empêche pas l’existence de cules d’intérêt, il est important de citer l’acide acétylsalicylique
nombreux synonymes pouvant induire en erreur les usagers. hémi-synthétisé à partir de l’acide salicylique dont le précurseur
Cette identification selon le genre et l’espèce découle directe- est retrouvé en grande quantité dans certains saules. Citons égale-
ment de la systématique et de la taxonomie botanique qui, pour la ment le taxotère, composé cytotoxique hémi-synthétisé à partir
première, étudie les relations évolutives entre les espèces en les d’alcaloïdes de l’If commun (Taxus baccata L.), qui a largement
classant, tandis que la seconde les nomme et les décrit. contribué à l’essor des traitements anticancéreux. Pour terminer,
citons l’artémisinine, isolée d’une espèce d’Armoise (Artemisia
Les différentes classifications existantes reposent soit sur des annua L.) qui a servi de base au développement des médicaments
critères macroscopiques, telle la classification des angyospermes antipaludiques [1].
proposée par Arthur Cronquist en 1968, des critères chimiques ou
des critères génétiques comme celle actuellement en vigueur,
l’APG IV (Angyosperm Phylogeny Group ). 1.2.2 De nos jours
Ces classifications évoluent au même rythme que les innova- Depuis des millénaires, l’Homme s’est soigné avec les plantes
tions technologiques et l’APG IV, uniquement basée sur des cri- et, dans certains cas, des peuples éloignés ont utilisé les mêmes

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______________________________________________________________________________________ COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES À BASE DE PLANTES

espèces pour des symptômes identiques. Les activités liées aux


substances végétales sont indéniables, mais avec l’évolution du Tableau 2 – Liste des principales familles
domaine pharmaceutique d’aujourd’hui, les preuves d’activité et de métabolites secondaires
d’innocuité (notion de bénéfice/risque) doivent être apportées pour
considérer une substance comme valorisable. Ainsi, l’activité d’une Famille de
Exemple de composés
thérapie est, aujourd’hui, principalement basée sur l’action d’une métabolites
unique molécule agissant sur une cible unique. Il est alors com-
plexe de prouver et de déterminer l’activité liée à une plante étant Polyphénols Flavonoïdes, anthraquinones, acides
donné le nombre de constituants d’une espèce végétale [2].
Il y a donc deux possibilités :
– soit la plante renferme une molécule ou une famille de molé-
Terpénoïdes
cinnamiques...

Monoterpènes, iridoïdes, diterpènes,


1
triterpènes, saponosides...
cules en quantité prépondérante : il est alors facile de l’isoler afin
de la corréler à une activité physiologique ; Composés Thiosulfinates, glucosinolates, sulfoxides...
– soit la plante ne renferme pas spécifiquement une molécule en soufrés
grande quantité : dans ce cas, il est extrêmement difficile, voire
impossible, d’identifier et d’isoler toutes les molécules afin de pou- Alcaloïdes Isoquinoléines, pyrrolizidines, indoliques,
voir tester leur efficacité. L’industrie pharmaceutique passe donc bases puriques...
souvent à côté de trésors inestimables, ce qui n’est pas le cas de la
phytothérapie concentrée, non pas sur un métabolite mais sur un Phénylpropanes Coumarines, xanthones, lignanes,
ensemble (totum ). phénylpropènes...

1.3 Classification des composés


Les composés du métabolome (§ 2.3) des organismes végétaux Parmi ces métabolites secondaires, nous retrouvons majoritaire-
ont été classés en deux catégories : le métabolisme primaire ment les familles présentées dans le tableau 2.
regroupant les molécules participant au fonctionnement général
du végétal et le métabolisme secondaire regroupant l’ensemble
des molécules spécialisées permettant au végétal de se défendre, 1.3.3 Cartographie du métabolisme
de se reproduire ou d’évoluer. des organismes végétaux

De nombreuses classifications de composés pourraient être


1.3.1 Métabolisme primaire exposées. Par souci de clarté, il a été décidé de ne les présenter
Le métabolisme primaire comprend tous les constituants de la que de façon simplifiée selon leur chemin biosynthétique. Ce
structure de l’organisme, ainsi que tous les constituants indispen- schéma met en évidence les voies de métabolisation les plus com-
sables à son développement (métabolisme général). Parmi ces munes en présentant les principaux précurseurs (figure 1) [3].
métabolites primaires, nous retrouvons majoritairement les
familles présentées dans le tableau 1.

1.3.2 Métabolisme secondaire ou spécialisé


Il s’agit de tous les éléments chimiques que l’organisme déve- 2. Différents outils
loppe pour sa survie, en fonction de l’environnement dans lequel il
se trouve. D’elle-même, la plante va évoluer et, pour cela, modifier
d’analyses phytochimiques
sa composition chimique pour répondre à ses besoins quotidiens.
C’est de cette manière que les parties aériennes des plantes renfer-
ment dans la majorité des cas des polyphénols, composés antioxy- L’analyse de plantes, de mélanges de plantes, d’extraits végé-
dants, contrairement aux racines qui n’en contiennent pas ou peu. taux et de formulations à base de plantes constitue très souvent un
En effet, le stress oxydatif se déroule constamment dans l’air et les exercice délicat, véritable défi pour l’analyste et le phytochimiste.
plantes doivent se protéger afin de s’acclimater. Il existe de nom- L’objectif est très souvent l’identification botanique de la ou des
breux autres exemples comme certaines plantes qui métabolisent plante(s) utilisée(s) et/ou la mise en évidence d’adultération, ou
des agents toxiques afin d’éviter d’être ingérées. C’est ainsi qu’une encore l’identification et la quantification de molécules d’intérêts
plante changeant drastiquement d’environnement voit sa composi- (substances actives) ou de substances réglementées (limitées)
tion évoluer peu à peu. pour leur toxicité (figure 2).

Selon la nature du produit, plusieurs stratégies peuvent se pré-


senter. Si le produit est sous la forme de plante, poudre de plante
Tableau 1 – Liste des principales familles ou plante broyée, il peut être caractérisé directement par analyse
de métabolites primaires macroscopique (aspect, couleur, odeur, goût) ou microscopique. Si
l'analyse macroscopique très dépendante de la nature de l’échan-
Famille de tillon est de plus en plus délaissée, l’analyse microscopique peut
Exemple de composés
métabolites se montrer très précieuse. Elle consiste en l’analyse de débris
végétaux par microscopie optique avec une identification basée
Lipides Acides gras, phospholipides, glycérides
sur l’observation des caractéristiques anatomiques des cellules
Saccharides Monosaccharides, oligosaccharides et épidermiques. Sous réserve de posséder les bonnes bases de don-
polysaccharides nées ou les catalogues, un opérateur expérimenté peut identifier
précisément une plante. Ces bases de données renferment des
Acides aminés Acides aminés libres, peptides, ADN fragments d’épidermes provenant de différentes parties de la
plante (feuilles, fleurs, tiges...), car les caractéristiques de l’épi-
Vitamines Vitamines A, B1, C, D3, K... derme peuvent varier d’un organe à l’autre [4] .

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COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES À BASE DE PLANTES _____________________________________________________________________________________

Groupe des alcaloïdes


Alcaloïdes
Phénylethylamine stéroïdiques
Benzylisoquinoline
Pyrrolizidine Pipéridine Tryptamine Acridine Protoberbérine
Pyrrolidîne Quinolizidine Imidazole -carboline Quinazoline Isoquinoléine Alcaloïdes
Tropane Indolizidine Pyridine Erogoline Quinoléine Bases puriques Morphinane terpéniques

Acide nicotinique Anthranilic Adénine Phénylalanine

1 Ornithine Lysine Histidine Tryptophane Guanine Tyrosine


Réactions aminations
ADN Protéine Polypeptide Peptide Acides aminés

Composés soufrés Voie du mévalonate Voie de l’acétate Voie du shikimate

Isoprène
Polyphénols Phénylpropanes Chromone
Glycoside Glucosinolate Coumarine
Phospholipide Furanocoumarine
cyanogène Monoterpène (C10) Iridoïdes Glycéride/ Acide gras/
Céramides acétyléniques Phtalide
Cystéine Sesquiterpène
sulfoxide (C15) Flavanone Xanthone
Flavonol Flavone Isoflavone Acide Lignane
Dérivés soufrés
Diterpène (C20) Stéroïde Triglycérides cinnamique
(C21-29) Groupe des lipides Homoisoflavonoïde Flavan-3-ol Stilbène
Triterpène (C30)
Tanins
Anthraquinone Oligomère
Groupe des saccharides Anthocyane Procyanidine
Tétraterpène (C40) Saponoside (C30) de procyanidine
Polysaccharides
Groupe des terpénoïdes Groupe des polyphénols
Oligosaccharides
Monosaccharides

Photosynthèse

Chlorophylle

Figure 1 – Métabolites secondaires et primaires classés selon leurs voies métaboliques

Plantes ou Produits
plantes broyées formulés

EXTRACTION

Analyse Analyse Analyse


sensorielle macroscopique microscopique

– couleur Extraits
– odeur Extraits
végétaux
– goût…

IDENTIFICATION BOTANIQUE FRACTIONNEMENT


PRÉPARATION
PRÉPARATION
D’ÉCHANTILLON
D’ÉCHANTILLON
PRÉPARATION
D’ÉCHANTILLON

ANALYSE

MISE EN ÉVIDENCE D’ADULTÉRATION


Techniques Techniques Isolement
chromatographiques spectroscopiques et caractérisation
– GC, GC/MS, 2D-GC – IRTF – HRMS
– HPLC, HPLC/MS – UV – RMN 1- et 2-D
– HPTLC – MS, HRMS – RX

MÉTABOLOMIQUE

Figure 2 – Méthodologies analytiques des compléments alimentaires à base de plante

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en.

x330

a éléments caractéristiques de l’espèce Pimpinella anisum L. [6] b espace de travail avec microscope

Figure 3 – Identification de plantes par microscopie

s’agit d’Extraction Solide-Liquide (SLE) basée sur la


Encadré 1 – Identification des plantes par microscopie solubilité [7].
Le choix du solvant ou mélange de solvants est une phase capi-
L’étude histologique et anatomique des organes végétaux tale qui dépend des objectifs de l’analyse. Si l’on souhaite identi-
peut se réaliser selon différentes méthodes. La méthode la fier, de façon la plus exhaustive possible, l’ensemble des
plus simple a été développée par Metcalfe et Chalke ; elle métabolites présents dans le produit, il est nécessaire de choisir un
consiste à mettre l’échantillon végétal sur une lame de verre solvant ou mélange de solvants peu sélectif comme le méthanol
sur laquelle on ajoute quelques gouttes d’eau de javel [5]. Le ou les mélanges méthanol-eau.
tissu conjonctif est alors gratté à l’aide d’un scalpel (ou d’une
Par contre, si le but est d’extraire un composé (ou une famille de
lame de rasoir) à l’œil nu, puis sous lampe binoculaire et enfin
composés) bien spécifique, le choix d’un solvant permettant
rincé à l’eau. Les fragments d’épiderme ainsi obtenus sont
l’extraction sélective du (ou des) composé(s) ciblé(s) est à privilé-
alors placés dans une goutte d’eau entre lame et lamelle, puis
gier. Cependant, la complexité des matrices à extraire permet rare-
observés au microscope optique muni d’un appareil photo
ment une extraction sélective et les extraits obtenus contiennent
(figure 3).
bien souvent d’autres métabolites co-extraits, et également des
Néanmoins, cette méthode nécessite un opérateur expéri- composés matriciels qui peuvent perturber par la suite l’étape
menté et peut atteindre ses limites lorsqu’on est confronté à d’analyse.
un mélange de plantes. Il est alors souvent nécessaire de réa-
liser une analyse chimique. En plus de ces critères de performances, d’autres paramètres
sont également à prendre en compte comme la température
d’ébullition (car il peut être nécessaire d’éliminer le solvant par dis-
tillation), l’inertie chimique, la toxicité, l’éco-toxicité, la facilité à le
2.1 Préparation d’échantillon purifier avant l’extraction ou encore la compatibilité avec les
méthodes d’analyse utilisées.
■ Les compléments alimentaires à base de plantes peuvent égale-
ment se retrouver sous des formes d’extraits secs ou de produits Dans le cas d’une extraction liquide-liquide, le solvant utilisé ne
formulés (solide, liquide ou pâteuse). Pour ces derniers, il est sou- doit pas être miscible avec la phase à extraire (généralement une
vent nécessaire de réaliser une extraction, le plus souvent à l’aide solution aqueuse, huileuse ou hydroalcoolique), et sa solubilité
d’un solvant adapté. dans la phase à extraire ne doit pas dépasser 10 %.
Pour les liquides, on parle d’Extraction Liquide-Liquide (LLE) Les solvants organiques les plus utilisés sont l’hexane, le dichlo-
basée sur le principe de partition, alors que pour les solides, il rométhane, l’éther diéthylique, l’acétate d’éthyle, l’éthanol et le

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109
1

110
Agroalimentaire : risques et sécurité
(Réf. Internet 42427)

1– Réglementation, normes et gestion des risques 2


2– Contrôles pour la maîtrise du risque Réf. Internet page

Méthodes de détection rapide en microbiologie alimentaire F1130 113

Contrôle bactériologique in situ dans les unités de cuisine collective F1140 115

Détection des corps étrangers dans les produits alimentaires F1210 117

Sertissage : outils et autocontrôles pour la maîtrise du risque microbiologique F5100 123

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111
2

112
Référence Internet
F1130

Méthodes de détection rapide


en microbiologie alimentaire

par Christine VERNOZY-ROZAND


Thèse de doctorat de 3e cycle (Ph. D), Habilitation à diriger des recherches (HDR)
Maître de conférences à l’École nationale vétérinaire de Lyon
2

1. Méthodes traditionnelles....................................................................... F 1 130 - 2


2. Méthodes rapides..................................................................................... — 2
2.1 Tests biochimiques miniaturisés ................................................................ — 2
2.2 Tests physico-chimiques ............................................................................. — 2
2.2.1 Impédance........................................................................................... — 2
2.2.2 Bioluminescence et fluorescence...................................................... — 3
2.3 Méthodes immunologiques........................................................................ — 3
2.4 Méthodes génétiques.................................................................................. — 4
2.4.1 Sondes spécifiques............................................................................. — 5
2.4.2 Application de la PCR ......................................................................... — 5
3. Limites des méthodes rapides de microbiologie
alimentaire ................................................................................................. — 5
4. Conclusion ................................................................................................. — 6
Références bibliographiques ......................................................................... — 6

L es toxi-infections alimentaires affectent plus de dix mille personnes en


France chaque année sur lesquelles nous n’enregistrons heureusement que
quelques décès à l’opposé des États-Unis où les décès annuels dus aux intoxica-
tions alimentaires se comptent par centaines. Les bactéries pathogènes le plus
souvent citées sont les salmonelles (plus de 50 % des cas), Staphylococcus
aureus et Clostridium perfringens. Il faut également noter l’émergence de nou-
veaux pathogènes comme Yersinia enterocolitica, Listeria monocytogenes,
E. coli O157 : H7, Aeromonas spp, Plesiomonas spp. Les changements de mode
de vie (prise de nombreux repas à l’extérieur du domicile familial) expliquent la
recrudescence des accidents alimentaires collectifs. Les industriels agroalimen-
taires ont besoin de méthodes rapides pour apprécier la qualité hygiénique des
denrées produites et pouvoir maîtriser efficacement leurs procédés de fabrica-
tion. Ils veulent disposer de méthodes d’analyse leur permettant de commercia-
liser leurs produits sans attendre 4 à 5 jours comme c’est le cas actuellement
avec les méthodes microbiologiques traditionnelles d’isolement et d’identifica-
tion. Les méthodes de détection rapide sont également importantes pour vérifier
la qualité microbiologique des matières premières entrant dans la composition
d’un produit.
Parution : septembre 1999

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F1130

MÉTHODES DE DÉTECTION RAPIDE EN MICROBIOLOGIE ALIMENTAIRE ___________________________________________________________________________

1. Méthodes traditionnelles 2.1 Tests biochimiques miniaturisés

Les bactéries isolées de l’aliment sont généralement identifiées


Depuis presque un siècle, les méthodes bactériologiques tradi- grâce à leurs caractères biochimiques. Le remplacement des boîtes
tionnelles sont fondées presque exclusivement sur l’utilisation de de Pétri par de petites cupules a permis d’économiser du milieu et
milieux spécifiques pour isoler et dénombrer les cellules bactérien- de simplifier l’ensemble des tests. L’utilisation d’inoculums concen-
nes dans l’aliment. Cependant, certains micro-organismes patho- trés a permis aussi de réduire les temps d’incubation.
gènes exigent des protocoles complexes longs et fastidieux.
Il existe des kits d’identification rapide permettant d'effectuer
Les aliments contiennent un très grand nombre d’ingrédients l’étude simultanée de nombreux caractères et, ceci, de façon très
dont des protéines, des glucides, des lipides et sels minéraux. La rapide.
plupart de ces composants peut affecter la viabilité des bactéries et Les systèmes API (appareils et procédés d’identification) présen-

2
ainsi interférer avec la détection de bactéries pathogènes spécifi- tés sous forme de galeries de 10, 20 et 50 caractères sont proposées
ques. La composition physico-chimique des aliments est également pour différents micro-organismes (entérobactéries, staphyloco-
très variable : liquide, solide, semi-solide et d’autres formes mixtes. ques, streptocoques, lactobacille, levure...) ainsi que les « tubes
Ces différences de viscosité peuvent également gêner la réalisation Roche » (enterotube, oxyfermtube...). Ces systèmes de tests combi-
de prises d’essai homogènes assurant une analyse alimentaire nés permettent un gain de temps considérable pour les phases de
reproductible. préparation et d’ensemencement. Par contre, les temps d’incuba-
tion restent de l’ordre de 24 heures.
Outre l’extrême variété des matrices alimentaires, la microflore
naturelle présente, parfois abondante peut également gêner l’isole- Il existe également des galeries API pour la recherche d’activité
ment et l’identification de bactéries pathogènes spécifiques [3]. enzymatique. La lecture est alors effectuée après 4 heures d’incuba-
Cette interférence est d’autant plus préjudiciable que les bactéries tion. Il s’agit des systèmes rapid 20 E pour les entérobactéries, staph
pathogènes à détecter sont présentes en faible nombre dans l’ali- ident pour les staphylocoques.
ment. D’autre part, de nombreux traitements sont utilisés pour favo- La plupart des tests biochimiques miniaturisés utilisés en analyse
riser la conservation des aliments : la chaleur, le froid (réfrigération alimentaire identifient les entérobactéries. Tous les kits commer-
ou congélation), l’addition de conservateurs, etc. [4]. cialisés exigent une culture bactérienne pure. Comparés aux
méthodes traditionnelles d’identification, les kits biochimiques
Les cellules bactériennes stressées sont extrêmement sensibles d’identification sont fiables de 80 à 99 % [19]. La plupart des kits
aux différents ingrédients utilisés dans les milieux sélectifs. Elles décrits par Hartman et al. (1992) [11] sont produits par de nombreux
peuvent ainsi être facilement non détectées par les méthodes micro- industriels. Néanmoins, seules quelques systèmes ont fait l’objet
biologiques traditionnelles. Pour résoudre ces différents problèmes, d’études collaboratives entre différents laboratoires et ont obtenu la
les microbiologistes ont dû modifier les protocoles et les milieux uti- validation AOAC (Association of Official Analytical Chemists) pour
lisés en les adaptant spécifiquement aux bactéries pathogènes. Le l’identification des bactéries à l’origine d’accidents alimentaires.
procédé le plus efficace est sans doute l’étape d’enrichissement des
échantillons alimentaires qui facilite la détection de ces pathogènes Exemple : le système API 20 E de bioMérieux Vitek (Hazelwood,
spécifiques [17], [18]. MO) ou le système enterotube II de Becton Dickinson (Cockeysville, MD)
ont obtenu la validation AOAC pour l’identification des différents séro-
Généralement, le procédé commence par une phase de préenri- types de salmonelles [6], [14].
chissement pendant laquelle les échantillons alimentaires sont
incubés dans un milieu nutritif non sélectif permettant la revivifica- Il existe désormais sur le marché des instruments utilisés essen-
tion des bactéries stressées [12]. Ensuite, les échantillons préenri- tiellement en clinique qui permettent d’identifier automatiquement
chis sont transférés dans un milieu d’enrichissement sélectif qui les bactéries à partir de leurs caractères biochimiques et de détermi-
permet la croissance de la bactérie cible tout en diminuant celle de ner leur antibiorésistance.
la microflore saprophyte. La dernière étape consiste en un isole-
Exemple : le système autoMicrobic de bioMérieux Vitek permet
ment à partir du bouillon d’enrichissement sur des milieux sélectifs
l’identification automatique de bactéries pathogènes dans l’aliment.
et ou chromogènes permettant une reconnaissance facile des colo-
nies suspectes. Ces dernières sont ensuite l’objet d’identification
avec réalisation d’une série de tests biochimiques et, éventuelle-
ment, caractérisation sérologique [9], [10]. 2.2 Tests physico-chimiques
Bien que ces méthodes de détection bactériologique tradi-
tionnelles aient prouvé leur efficacité, elles nécessitent pour leur
réalisation beaucoup de temps (4 à 5 jours) et parfois une grande Plusieurs systèmes peuvent détecter la présence de bactéries
technicité. Elles ne répondent donc pas aux exigences des indus- dans l’aliment en mesurant les changements générés par la crois-
triels de l’agroalimentaire qui veulent des méthodes rapides de sance ou le métabolisme bactérien. La plupart de ces tests sont
détection [11]. entièrement automatisés mais ils nécessitent une culture bacté-
rienne pure. Jay (1985) [13] a recensé et détaillé l’ensemble des tests
physico-chimiques ainsi que leurs applications en analyse agro-
alimentaire, seules l’impédance et la bioluminescence seront
détaillées ci-après.

2. Méthodes rapides 2.2.1 Impédance

Au cours des réactions métaboliques qui permettent la croissance


Ces méthodes regroupent un ensemble très large de systèmes du micro-organisme, certaines molécules électriquement inertes,
incluant des tests biochimiques miniaturisés d’identification, des les sucres par exemple, sont transformées en molécules ionisées
tests physico-chimiques qui mesurent les métabolites bactériens, telles que des acides ; ce fait se traduit par un accroissement de la
des tests immunologiques ou génétiques parfois complètement conductance, c’est-à-dire une baisse de la résistance (impédance en
automatisés [5]. courant alternatif) du milieu.

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F1140

Contrôle bactériologique in situ


dans les unités de cuisine collective

par Pierre-Yves MONTFAJON


Pharmacien biologiste
Directeur du Laboratoire Européen de Recherches Microbiologiques (LERM)
2

1. Définition et domaines d’application................................................. F 1 140 – 2


2. Compléter le dispositif de maîtrise des risques ............................. — 2
2.1 Les maillons encore fragiles ....................................................................... — 2
2.2 Axe de solution ............................................................................................ — 3
2.2.1 Motivations ......................................................................................... — 3
2.2.2 Constatations ...................................................................................... — 3
2.3 Champs d’application.................................................................................. — 3
3. Renouveler le recours aux tests de contacts................................... — 4
3.1 En quoi la solution est innovante............................................................... — 4
3.2 Description des nouveaux tests par contact ............................................. — 4
3.3 Mise en œuvre des tests par contact ......................................................... — 4
3.4 Inscription de l’acte dans un processus sécuritaire.................................. — 5
4. Innovation pratique sécurisée et sécurisante.................................. — 5
4.1 Innovation sécurisée ................................................................................... — 5
4.2 Innovation sécurisante ................................................................................ — 5
5. Un marché diversifié ............................................................................... — 5

es risques de contamination bactériologique font parties des cycles naturels


L biologiques quel que soit le développement des connaissances et des mesu-
res prises par notre société de production moderne.
Les progrès effectués pour les maîtriser ont été considérables et nombre de
sources et de phases des cycles de productions agroalimentaires ont été sécuri-
sés (hygiène en agriculture, traitements contrôlés en industrie agroalimentaire,
conditions de conservation, de transport et de stockage des denrées, équipe-
ment ménager du consommateur...).
Cependant, en phase finale de consommation, il ne peut être éludé une mani-
pulation pouvant remettre en cause toutes les précautions préalables et laissant
place soit à une contamination nouvelle par contact avec des facteurs difficile-
ment contrôlables, soit par rupture obligée des mesures antiproliférations.
Les tests par contact (accrédité Cofrac) sont utilisés pour les autocontrôles
microbiologiques en vue de l'obtention de l'accréditation et de la certification de
l'assurance qualité.
Parution : juin 2001

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2

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F1210

Détection des corps étrangers


dans les produits alimentaires

par François ZUBER


Directeur scientifique adjoint, Centre technique de la conservation des produits agricoles
2
(CTCPA)

1. Nature, origine et impact des contaminants denses.


Mesures préventives ............................................................................... F 1 210 - 2
2. Prévention des corps étrangers métalliques :
utilisation des aimants ........................................................................... — 3
2.1 Tri magnétique : principe ............................................................................ — 3
2.2 Applications et géométries des aimants ................................................... — 4
2.3 Mise en œuvre des aimants : emplacement,
utilisation et maintenance........................................................................... — 5
3. Techniques de tri par détection et éjection...................................... — 6
3.1 Tri .................................................................................................................. — 6
3.2 Éjection ......................................................................................................... — 6
3.3 Principes de base et caractérisation des performances de tri ................. — 6
3.4 Approche expérimentale de l’évaluation des performances
d’un détecteur .............................................................................................. — 7
4. Détecteurs de métaux ............................................................................ — 7
4.1 Principes de fonctionnement et de construction ...................................... — 7
4.2 Mise en œuvre et performances ................................................................ — 8
5. Imagerie par rayons X ............................................................................ — 9
5.1 Principes physiques..................................................................................... — 9
5.2 Mise en œuvre et fonctionnement ............................................................. — 10
5.3 Géométries de construction ....................................................................... — 11
5.4 Algorithmes de traitement d’images ......................................................... — 12
5.5 Utilisation des données exploitées ............................................................ — 15
5.6 Mise en œuvre des équipements et performances .................................. — 15
6. Tri optique par examen de la surface ................................................. — 15
6.1 Principe de construction et de détection ................................................... — 15
6.2 Traitement d’image en tri optique.............................................................. — 16
7. Tri optique par vision en transmission : mirage.............................. — 17
8. Tri optique par balayage laser .............................................................. — 17
9. Autres techniques .................................................................................... — 17
9.1 Détection par ultrasons ............................................................................... — 18
9.2 Micro-ondes, RMN, champs magnétiques ................................................ — 18
10. Choix d’une technologie ........................................................................ — 18
10.1 Établissement d’un cahier des charges ..................................................... — 18
10.2 Classification des applications et aide au choix........................................ — 18
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. F 1 210

es corps étrangers sont devenus la première source de réclamations des


L
Parution : septembre 2007

consommateurs dans l’industrie agroalimentaire.


Les efforts considérables qui ont été déployés à partir des années 1980 pour
sécuriser l’hygiène et la qualité des produits alimentaires, ont porté leurs

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F1210

DÉTECTION DES CORPS ÉTRANGERS DANS LES PRODUITS ALIMENTAIRES ________________________________________________________________________

fruits : une diminution sensible des incidents et réclamations d’ordre sanitaire,


imputables à des contaminations microbiologiques ou chimiques des produits.
Cependant, les incidents imputables à la présence de corps étrangers, même
si eux aussi sont moins nombreux que par le passé, attirent plus l’attention. Les
crises alimentaires des dernières années ont renforcé l’exigence des
consommateurs et des distributeurs. Une réclamation de consommateur sur
un corps étranger peut ainsi prendre une ampleur importante lorsqu’elle est
relayée à différents niveaux (client, média, justice).
La lutte intégrée contre la présence des corps étrangers s’inscrit dans la
démarche globale HACCP (« hazard analysis critical control point ») des entre-

2
prises agroalimentaires incluant l’identification des points critiques, les
mesures préventives de surveillance et actions correctives, la recherche de par-
tenaires en amont et en aval :
— connaissance des corps étrangers potentiellement présents depuis la
matière première jusqu’au produit fini, identification de leur nature, leur origine
et leur fréquence ;
— sélection et mise en application des mesures de prévention adaptées ;
— choix, en complément, des solutions de détection et de tri minimisant la
probabilité de trouver un corps étranger dans le produit fini ;
— définition de mesures de traçabilité, alertes et rappels produits ;
— préparation à une crise potentielle pour mieux la gérer le cas échéant.
L’essentiel dans cette démarche est le travail sur la prévention, qui fait avant
tout appel au bon sens, à la rigueur des pratiques sur ligne, à la formation et
à la responsabilisation des personnels de production et de maintenance.
Les dispositifs de détection et de tri ne doivent intervenir qu’en complément,
comme l’ultime rempart contre une occurrence accidentelle en amont, ou
lorsqu’un incident machine toujours possible impose une surveillance continue
(bris de contenant en verre sur une ligne de remplissage, par exemple).
Différentes techniques existent, décrites dans cet article, pour réaliser la
détection, le repérage spatial et le tri en vue de l’éjection des corps étrangers
éventuellement présents : la capture des particules ferromagnétiques avec des
aimants, les technologies électromagnétiques (détecteur de métaux), les tech-
nologies utilisant l’imagerie industrielle, soit au moyen de caméras (systèmes
de tri optique à longueurs d’onde diverses – visible, ultraviolet, infrarouge,
multispectrale), soit au moyen d’images « reconstituées informatiquement » à
partir de balayages rapides du produit ou de capteurs spéciaux (imagerie laser
d’examen de surface ou imagerie par rayons X, seule technique permettant la
détection en profondeur du produit, et donc le contrôle d’un produit dans son
emballage).
Chaque technologie est présentée dans son principe et ses applications. Une
assistance au choix de technologie de détection est proposée pour aider les
industriels à s’orienter vers les équipements les mieux adaptés à leurs cas
particuliers, ainsi que quelques exemples de démarches expérimentales pour
l’évaluation et la validation des performances. Enfin, ce document est complété
d’un panorama de l’offre européenne de matériels et de services relatifs à cette
thématique (dans la partie « Pour en savoir plus »).

nature chimique (résidus de produits phytosanitaires, métaux lourds,


1. Nature, origine et impact mycotoxines, etc.) ou biologique (micro-organismes, enzymes, etc.)
des contaminants denses. qui sont dans la plupart des cas dispersés dans la masse du produit
et ne peuvent être détectés que par le prélèvement d’un échantillon
Mesures préventives et des techniques analytiques. On distingue en général les corps
étrangers d’origine endogène (ceux apportés par les matières pre-
mières et leurs emballages) et les corps étrangers d’origine exogène
Au sens large, il convient d’appeler corps étranger ou (ceux incorporés au cours du process).
contaminant dense « toute partic ule de matière présente dans un
Les encadrés 1 et 2 présentent, pour chaque type et origine
produit alimentaire dont la nature ou la texture n’est pas attendue
possible et/ou supposées des corps étrangers, quelques mesures
par le c
onsommateur ou le client ».
préventives, en général de bon sens, à mettre en œuvre dans le
L’expression « contaminant dense » est souvent utilisée pour cadre du plan HACCP (hazard analysis critical control points :
distinguer ces matières étrangères des autres contaminants de analyse des points critiques pour leur maîtrise) de l’usine.

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_______________________________________________________________________ DÉTECTION DES CORPS ÉTRANGERS DANS LES PRODUITS ALIMENTAIRES

La prévention des corps étrangers endogènes n’est efficace que


Encadré 1 – Corps étrangers endogènes : généralisée à tous les maillons de la production agricole et de la
origine et prévention transformation, sur la base de l’évaluation et de la sélection en
cascade des fournisseurs. Chaque intervenant garantit le respect
■ Nature et origine du cahier des charges et contrôle ses produits sortants, mais ne
fera pas de contrôle systématique des matières premières à
● Corps étrangers naturellement endogènes au produit : réception, sur ce critère. Comme pour tout accord contractuel
écarts de triage, de parage, de pelage, noyaux, os et cartilages, client/fournisseur, les spécifications doivent refléter la réalité et
tissus tendineux, coquilles de mollusque, arêtes, tiges de plante, non pas des exigences impossibles à satisfaire.
matières étrangères végétales (MEV). Ce sont les fractions indé-
sirables normalement triées et séparées du « bon produit » lors La sélection des fournisseurs peut être réalisée sur la base de
du process par des opérations manuelles ou automatiques, mais systèmes préventifs référencés : référentiels qualité, guides de
qui « passent à travers le tri ». Les matières étrangères végétales bonnes pratiques, plans HACCP détaillés, certification de distri-

2
font généralement l’objet de définitions et de tolérances dans les buteurs type International Food Standard. Cette sélection est uti-
contrats de fourniture de matières premières d’origine végétale. lement complétée par la réalisation d’audits. Un partenariat bien
compris vaut mieux qu’une relation de méfiance ou conflictuelle.
● Corps étrangers apportés accidentellement avec les
La prévention des corps étrangers exogènes repose sur la dis-
matières premières (présents avec les matières premières mais
cipline de tous et une grande rigueur dans l’application du plan
ne pas faisant partie du produit) :
HACCP et des règles simples et de bon sens. Les clefs du succès
— insectes vivants ou morts, rongeurs, batraciens sont principalement : la conception hygiénique des équipements et
(« récoltés » avec les légumes, les fruits, ou provenant des zones le soin apporté à l’ergonomie des postes de travail, la formation et
de stockage intermédiaire des matières premières) ; sables et la responsabilisation des équipes de maintenance, une vigilance
cailloux dans les produits végétaux ; aiguilles en inox dans les constante des personnels, une gestion stricte de la propreté des
viandes (venant des pistolets à vaccins) ; plombs de chasse dans stocks et de l’état des palettes.
les viandes de gibier ; verre et métaux provenant des parcelles de
culture (bris de bouteilles, douilles et cartouches de chasse, etc.) ; Les cas de figure critiques comme la fabrication de produits en
bocaux de verre doivent faire l’objet d’une surveillance renforcée
— fragments d’emballage des matières premières : ficelles, des postes de dépalettisation ; lavage, ou soufflage (avec
sacs plastiques, liens métalliques, film de palette, éclats de bois aspiration !) des bocaux vides ; procédure soigneuse d’isolement,
de palette et de pallox de stockage vrac, cartons, agrafes de nettoyage, contrôle approfondi, en cas de bris de verre sur
carbons, ruban adhésif et colles de fermeture des carbons. convoyeur ou machine.
■ Mesures préventives possibles : sélection des fournisseurs,
avec cahier des charges
● Prévention en amont agricole : sélection des parcelles,
entretien et propreté des machines de récolte, des pallox de
2. Prévention des corps
stockage, prévention du danger verre sur matériels de récolte ; étrangers métalliques :
bonnes pratiques agricoles et de récolte ; spécifications sur les
conditions de transport : nettoyage des camions, entretien, utilisation des aimants
bâchage et protection des denrées, utilisation exclusive pour le
transport alimentaire ; prévention du danger « métal » : pistolet L’utilisation des aimants pour séparer les particules magnétiques
à vaccins, agrafe d’identification des animaux, hameçon, etc. ; est sans doute le plus ancien moyen mis en œuvre dans les
produits végétaux : entretien soigneux des épierreurs sur ligne. industries agroalimentaires (IAA) pour prévenir le risque de corps
● Spécification des matières premières pour les corps étrangers. Ce n’est pas une technique de tri à proprement parler,
étrangers, par type et taille : détaillées par famille de matériaux, mais elle trouve sa place au chapitre des mesures préventives :
type de corps étrangers, et par taille de particule pour chaque dispositifs simples et peu coûteux.
matériau. É tablir ces exigences assorties de tolérances.
P are xem ple,p o ur de sfi l
e ts dep oisso ne nc ai
ssesisolan
tes: 2.1 Tri magnétique : principe
— f ra gmen ts d ep eau :m a m
xi um5c m 2 par uni
téd eve nte
co
n som m ateur ; Un aimant puissant est disposé sur le passage, au contact ou à
— a rê s <à20 m
te m:m axim um5p ark i
logram me; >à20 m m: proximité immédiate du produit circulant en vrac. Les particules de
ab
se nc eda n
s 1k g; métaux ferreux, magnétiques, éventuellement présentes sont
— a utre
s p articules d angereuse s (verre, c ai
ll
oux o u attirées, séparées physiquement et se collent sur l’aimant d’une
métall
iques):a b se nc e; façon que l’on souhaite irréversible.
— f ra gmen ts d ep o lystyrèn ee xpan sé: m ax. 2 fragments On utilise par ordre de puissance croissante (et par ordre de coût
<3 m m ,da ns 5k g . croissant) :
— aimants ferrites (ferrites de baryum ou strontium frittées) ;
● Spécifications sur les emballages et les palettes : nature
— aimants alnico (alliage aluminium – nickel – cobalt – fer) ;
des matériaux plastiques (matériaux, épaisseur des films),
absence de bois, d’agrafes, de verre, de métal, de liens plas- — aimants samarium – cobalt (aimants céramiques frittés) ;
tiques et ficelles ; emballages prédécoupés permettant une — aimants néodyme (alliages de fer-bore et de terres rares).
ouverture « propre et nette » ; couleur bleue ou autre couleur Les matériaux qui sont aimantables et donc séparables par cette
détectable pour les emballages plastiques jetables. Bon état technique sont :
général des palettes en bois, absence de clous apparents, — les limailles de fer, d’acier, d’inox magnétisé (certaines nuances
d’échardes, de graviers, etc. Il est impératif d’exercer une sur- d’inox spéciaux), et bien sûr toutes les pièces diverses en fer et acier,
veillance renforcée sur l’état des palettes bois sur le site (un des même galvanisé ;
premiers vecteurs de contaminants denses en IAA). Obligation — les fragments de rouille et oxydes ferreux (attraction net-
d’utiliser des intercalaires cartons ou isorels pour isoler les pro- tement moindre).
duits d’un contact direct avec les palettes, obligation de filmage
La plupart des aciers inoxydables utilisés en IAA – « 304 » ou
et d’une coiffe sur chaque palette, etc.
« 316L » par exemple – sont peu aimantables.

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Encadré 2 – Corps étrangers exogènes : origine et prévention

■ Nature et origine ● Conception hygiénique des matériels : elle doit intégrer le ris-
que de présence de corps étrangers. Préférer les grosses vis de
● Matériaux d’emballage neufs mis en œuvre : fragments de car-
ton, fragments métalliques, plastiques divers ; fientes, insectes et fixation pour toutes les parties démontables, utiliser des fixations
déjections de rongeurs (corps étrangers apportés par les emballa- rapides inamovibles, des détrompeurs, etc. ; relier les parties
ges vides stockés en zone « sèche » de l’usine) ; éclats de verre pro- démontables par des chaînettes ; utiliser des écrous-freins ; placer
venant des pots industriels. les écrous coté extérieur et les têtes de vis côté produit ; etc. ;
maintenance préventive des équipements.
● Machines de process et de transfert : lubrifiants et graisses,
produits de nettoyage, encres de marquage, colles d’étiquette ; frag- ● Règles d’hygiène générale et règlement intérieur de l’usine :
ments de machine arrachés par l’usure : poils de brosse, glissières, absence de bijoux (l’alliance est toujours tolérée conformément à la

2 bandes et rives de convoyeur, fragments de joints et garnitures de


pompe ; fils de tamis inox ; pièces d’assemblage (écrous, rondelles,
rivets, etc.) détachées par les vibrations.
jurisprudence) ; tenue du personnel : charlottes, blouses sans
poches extérieures ; présence de lave bottes, lavage des mains, etc.
Interdiction de manger sur les lignes. Gestion des blessures : panse-
● Introduits par le personnel : matériels d’hygiène de l’usine
ments de couleur bleue ou fluo, avec fils métalliques incorporés
(gants, tenues jetables, masques et charlottes, papiers essuie-tout) ; (détectables). Stylos indémontables avec partie métallique ; protec-
cheveux et ongles ; objets personnels : bijoux, montres, stylos ; tions auditives avec partie métallique ; interdiction des agrafes,
mégots ; reliefs de repas, chewing-gums ; pansements ; outils de trombones, punaises, etc. Aucun emballage destiné au produit ne
travail ; fournitures de bureau (trombones, agrafes, papier) ; ajout doit être utilisé sur ligne pour y ranger ou stocker quelque objet que
intentionnel par malveillance. ce soit.

● Structures de l’usine : poussières et insectes tombant des ● Hygiène et prévention en entretien – maintenance : utiliser une
structures ; éclats de verre (éclairage, voyants, vitrages, etc.) ; trousse à outils ; collecter tout ce qui est démonté et tous les débris ;
écailles de peinture, fragments de sol, éclats de paroi (mousse iso- interdiction de percer ou meuler à proximité du produit ; isoler et/ou
lante thermique). bâcher la zone d’intervention, arrêter et vidanger la ligne avant inter-
● Objets « oubliés » par les équipes de maintenance : gaines
vention, ou jeter le produit présent ; nettoyer le chantier soigneuse-
plastiques de fils électrique ; ruban de Téflon utilisé en étanchéité ; ment après toute intervention. Faire une double validation de la
ruban adhésif ; colliers serrecâbles ; rondelles, pièces métalliques, propreté de la zone avant redémarrage.
fil de cuivre, d’inox, copeaux d’usinage (très dangereux !) ; boulet-
● Élimination des déchets générés sur ligne : des poubelles avec
tes de soudure et fragments de baguette à souder à l’arc, fragments
couvercle, dédiées à chaque type de déchet en tri sélectif doivent
de disques à tronçonner ; lubrifiants en excès.
être mises à disposition abondamment sur les lignes et régulière-
● Produits et matières organiques « oubliés » sur les lignes : ment remplacées pour être vidées à l’extérieur.
— matière organique bloquée dans sa progression, coincée
dans une zone peu accessible ou collée sur une goulotte de trans- ● Formalisation des pratiques de déballage et ergonomie des
fert gravitaire, et qui se détache de manière imprévisible (présente postes : le déballage des matières premières est la première source
également un grave risque sanitaire) ; identifiée d’introduction de corps étrangers dans les produits ali-
— fragments de pâte à base de céréales, collés, puis séchés et mentaires en usine. Il faut formaliser les procédures de décondition-
durcis, qui se détachent et tombent dans le produit humide (en nement soigner particulièrement l’ergonomie du poste de travail :
industrie de panification, biscuiterie et pâtisserie industrielle). Ces — mettre à disposition des outils tranchants personnels (type
fragments sont souvent très acérés et durs, et donc dangereux. cutter à lame monobloc rétractable) ;
— prévoir une élimination facile des emballages vides.
■ Mesures préventives possibles : démarche HACCP approfondie
sur site ● Prévention des dangers spécifiques (verre ; animaux ; cailloux,
● Conception générale des lignes : conception hygiénique des etc.) : capotage des néons ou gainage des tubes ; suppression des
équipements ; validation des opérations de nettoyage/désinfection. ampoules nues ; bouteilles en verre interdites ; remplacement du
Éviter les caillebotis pour les passerelles de circulation au-dessus des verre par du plastique (vitres et pH-mètres) ou recouvrement des
lignes, ou les poser sur tôle pleine et démontable, avec rives vitres par film adhésif ; toutes les portes et fenêtres restent fermées
d’au-moins 15 cm ; les tapis et équipements en contrebas, dans les- autant que possible, en permanence ; présence de désinsectiseurs
quels circulent les produits, doivent impérativement être capotés. Les régulièrement entretenus ; plans de désinsectisation et de
matériels vibrants ne doivent jamais être solidarisés à des matériels dératisation ; utilisation de laves-bottes et/ou surchaussures pour
non conçus pour supporter des vibrations. Aucun produit ne doit cir- éviter les graviers ; interdiction d’utiliser les chaussures ou bottes de
culer à moins de 30 cm du sol (élévateurs, tapis de transfert, etc.). travail à l’extérieur du bâtiment.

2.2 Applications et géométries des aimants Les principales applications concernent les poudres et particules
en transfert gravitaire (figure 2), parfois les liquides. La variante à
Les aimants sont mis en œuvre sous forme de plaques ou de cône central magnétique (avec espace annulaire), de géométrie
barreaux aimantés, parfois d’électroaimants pour les fortes puis- très compacte et de grande efficacité, est utilisée pour le tri de
sances (tri des déchets). farines, de semoule, de riz, etc.

2.2.1 Séparateurs à plaques inclinées 2.2.2 Séparateurs à grilles ou à barreaux


Leur efficacité dépend de la pente, de la longueur de l’aimant, du Les aimants permanents sont constitués de barreaux cylin-
débit. driques, gainés d’acier inoxydable. Ils sont disposés en parallèle
Des abaques industriels permettent de sélectionner les géo- et/ou entrecroisés pour former des grilles, installées sur les chutes
métries d’aimants adaptés. Ils s’utilisent souvent en cascades verticales pour les poudres et granulés. Cette géométrie autorise
(plaques disposées en zigzag, figure 1). un dispositif de nettoyage manuel ou automatique (figure 3). Une

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F 1 210 − 4 est strictement interdite. − © EditionsT.I.

120
Référence Internet
F1210

_______________________________________________________________________ DÉTECTION DES CORPS ÉTRANGERS DANS LES PRODUITS ALIMENTAIRES

Figure 3 – Dispositif de nettoyage des barreaux magnétiques


2
d’un épurateur à grille (d’apr
èss
ociét
é Raoul Lenoir
)

Figure 1 – Épurateur magnétique à plaques : disposition en zigzag Couvercle


(d’après sociét
é Raou
l Lenoir
) amovible

Produit contenant
des impuretés ferromagnétiques Entrée Sortie
du produit du produit

Barreaux magnétiques plongeants


disposés en quinconce

Figure 4 – Pot magnétique à barreaux pour liquides (d’apr


èss
ociét
é
Raoul Lenoir
)

Produit épuré
2.3 Mise en œuvre des aimants :
Figure 2 – Épurateur magnétique gravitaire pour produits granulaires
emplacement, utilisation
èss
(d’apr ociét
é Raoul Lenoir
) et maintenance
Le choix de l’emplacement dans la ligne de production dépend
des priorités de l’utilisateur :
adaptation existe pour les liquides et les produits pompables de — pour la protection prioritaire des broyeurs, cutters, raffi-
viscosité limitée, sous forme de pots magnétiques à barres neuses, trancheuses, etc., on disposera les aimants avant les
(figure 4). machines ;
— pour la protection prioritaire du produit contre les fragments
métalliques issus de l’usure de ces machines, on disposera les
2.2.3 Séparateurs à tambours magnétiques aimants plutôt après les machines de coupe ou de broyage, de
tournants, extracteurs tamisage. C’est particulièrement le cas en minoterie ;
— en contrôle et protection du produit, dans les phases finales,
L’aimant réalisé sous forme de tambour (aimant semi-circulaire) on les place juste avant le conditionnement.
permet un tri continu du produit en vrac en chute sur le tambour,
avec séparation en continu des corps étrangers magnétiques. Les Pour la maintenance de l’équipement et les réglages, les para-
séparateurs avec poulies magnétiques installées en bout de tapis mètres les plus importants sont :
attirent les corps étrangers à travers le tapis, pour une séparation — la distance de l’aimant au produit : la puissance d’attraction
continue sur des produits en vrac. Les extracteurs magnétiques diminue avec le carré de la distance ;
sont des aimants, ou plus souvent électroaimants, très puissants — l’encrassement de l’aimant par les particules déjà attirées : les
suspendus au-dessus du produit circulant en vrac sur tapis, surtout couches successives sont de plus en plus instables. Des agrégats
pour le tri des matières premières agricoles à réception à l’usine de particules peuvent même se détacher sous l’effet de chocs
(légumes racines, betteraves sucrières, céréales, etc.). provoqués par les particules de produits. Il est donc indispensable

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est strictement interdite. − © EditionsT.I. F 1 210 − 5

121
2

122
Référence Internet
F5100

Sertissage : outils et autocontrôles


pour la maîtrise du risque
microbiologique

par Nicolas LEHEBEL


2
Assistant chef de projet
CTCPA Amiens, France
par Michaël BELLER
Chef de projet
CTCPA Auch, France

1. Boîtes métalliques pour conserve.................................................... F 5 100 - 2


2. Principe de l’opération de sertissage ............................................. — 2
2.1 Matériel ..................................................................................................... — 4
2.2 Étapes de l’opération de sertissage ........................................................ — 6
2.3 Structure et caractéristiques dimensionnelles du serti final ................ — 7
2.4 Entretien des sertisseuses et problématiques rencontrées .................. — 7
3. Contrôle des sertis ............................................................................... — 8
3.1 Matériels et méthodes pour l’examen dimensionnel des sertis .......... — 8
3.2 Méthodes d’évaluation de la qualité des sertis associée aux critères
mesurés..................................................................................................... — 9
3.3 Tests d’étanchéité..................................................................................... — 11
3.4 Autres méthodes pour le contrôle d’étanchéité .................................... — 11
4. Défauts de sertissage observés, corrélation entre l’étanchéité
et les mesures dimensionnelles des sertis ...................................... — 13
4.1 Principaux défauts de sertis et leurs causes .......................................... — 13
4.2 Corrélation entre conformité dimensionnelle et étanchéité ................. — 13
5. Conclusion .............................................................................................. — 15
6. Glossaire.................................................................................................. — 15
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. F 5 100

e sertissage des emballages métalliques pour conserves est une opération


L mécanique destinée à assembler le couvercle appelé fond sur le corps
d’une boîte de conserve. Le serti a pour fonction de fermer le contenant après
remplissage, et ainsi de conférer à la boîte son étanchéité afin d’éviter toute
recontamination ultérieure, en particulier microbiologique.
La maîtrise du sertissage est considérée par les guides de bonnes pratiques
d’hygiène et d’application de l’HACCP de la filière conserve comme un élément
essentiel pour garantir la sécurité sanitaire du produit fini. Le personnel en
charge de cette opération (réglage des sertisseuses et surveillance de la qualité
des sertis) doit posséder les compétences nécessaires à cette tâche.
Les instabilités microbiologiques de conserves appertisées en boîte métal-
Parution : septembre 2015

lique, et dont l’origine n’est pas consécutive à un défaut de traitement


thermique, sont généralement dues à un défaut d’étanchéité du serti, même si
les contrôles en cours de production se sont avérés conformes.

Copyright © –Techniques de l’Ingénieur –Tous droits réservés F 5 100 – 1

123
Référence Internet
F5100

SERTISSAGE : OUTILS ET AUTOCONTRÔLES POUR LA MAÎTRISE DU RISQUE MICROBIOLOGIQUE ____________________________________________________

Après un rappel des opérations permettant la formation d’un serti sur une
boîte métallique, cet article présente les outils et les moyens de contrôle de la
qualité du serti, ainsi que la méthodologie permettant de réaliser son contrôle.
La corrélation entre l’étanchéité et les mesures dimensionnelles reste toute-
fois complexe à établir car elle dépend de nombreux facteurs variables. Des
boîtes présentant des défauts dimensionnels (valeurs en-deçà des recomman-
dations) peuvent être étanches lors des tests d’étanchéité ; et à l’inverse, des
boîtes ayant des mesures dimensionnelles proches des recommandations
peuvent être, dans certains cas, non étanches au test par bullage (test par
dépression).

2
Le lecteur trouvera en fin d’article un glossaire des termes importants
utilisés.

– le type de boîte : boîte dite « 3 pièces » (un corps + deux fonds


1. Boîtes métalliques sertis) ou « 2 pièces » (boîte emboutie + un fond serti), format et
pour conserve taille ;
– une boîte lisse ou à corps mouluré : le choix sera fonction de la
résistance mécanique recherchée notamment vis-à-vis du traite-
Le conditionnement en boîtes métalliques est encore largement ment thermique et de la pression, puis du conditionnement secon-
présent sur le marché de la conserve. Les fabricants de boîtes ont daire après traitement thermique (mise en carton, mise sur
toujours, dans le souci d’amélioration de la productivité et d’opti- palettes, etc.) ;
misation des coûts, diminué au cours des dix dernières années – les équipements et techniques de remplissage et de
l’épaisseur des tôles métalliques utilisées pour réaliser ces sertissage ;
contenants métalliques.
– les circuits d’entreposage et de commercialisation ;
Cette diminution demande aux utilisateurs en contrepartie d’être – l’attente des consommateurs : praticité d’ouverture, avec
toujours plus précis dans le réglage de leurs sertisseuses. La notamment l’ouverture facile par pré-incision du couvercle (sou-
maîtrise du sertissage est considérée par les guides de bonnes vent appelée boîte OF) ;
pratiques d’hygiène et d’application de l’HACCP de la filière
– l’empilabilité : choix de boîte emboutie ou rétreinte avec un
conserve comme un élément essentiel pour garantir la sécurité
diamètre un peu plus faible en bas qu’en haut ;
sanitaire du produit fini [1] [2] [3].
– l’aspect extérieur par rapport à la décoration ;
§ Nous trouvons sur le marché trois grands types de matériaux – le prix.
utilisés pour réaliser les boîtes pour conserves alimentaires :
Dans tous les cas de figures, le conserveur commande un corps
– le fer blanc, une mince feuille ou bande d’acier doux, d’une de boîte qu’il remplira avec ses produits, et il commande en même
épaisseur inférieure à 0,50 mm, recouverte sur ses deux faces temps le fond (couvercle de la boîte) correspondant. La figure 1
d’étain pur ; présente les différents types de boîtes (2 ou 3 pièces) et le fond à
– le fer chrome (dit Tin Free Steel ou TFS), la même feuille ou sertir.
bande d’acier, mais revêtue d’une très fine couche de chrome
métallique et d’oxydes de chrome ; Une fine couche de joint (généralement en caoutchouc de type
– l’aluminium, en réalité un alliage d’aluminium, souvent choisi butyl) est déposée sous forme liquide dans l’ourlet du fond à sertir
pour sa facilité de mise en forme par emboutissage et sa résis- lors de sa fabrication. Après séchage en étuve ou évaporation à
tance à l’oxydation. l’air libre, selon le type de joint mis en œuvre, celui-ci prend sa
texture définitive ; il servira à parfaire l’étanchéité du serti.
Ces métaux sont pratiquement toujours revêtus de laques ou
vernis aptes au contact des denrées alimentaires. Ces vernis Les figures 2 et 3 présentent les différents éléments d’une boîte
protègent le métal de la corrosion par le produit (à l’intérieur) et métallique et de son fond.
par l’atmosphère (à l’extérieur).
L’absence de revêtement intérieur dans les boîtes en fer blanc
peut, dans certains cas, relever d’une nécessité technologique. Le
contact direct du fer blanc favorise, en particulier pour certains 2. Principe de l’opération
produits acides, la conservation et le maintien de la couleur des
fruits « clairs ou blancs » comme la poire, le litchi et l’ananas. de sertissage
§ Le choix du conditionnement (choix du type de métal pour le
corps de boîte et les fonds, choix des épaisseurs d’étain, choix des Le sertissage consiste à assembler de façon étanche un corps de
types de vernis intérieur et extérieur, etc.) appartient au boîte à un fond. L’opération fait appel à un matériel dédié : une
conserveur et dépend de plusieurs facteurs contraints techni- sertisseuse pour boîtes.
quement, mais aussi de choix commerciaux : Pour garantir l’étanchéité de son serti, le conserveur doit maîtri-
– la nature du produit (produit acide, gras, etc.) qui détermine ser le sertissage et connaître le vocabulaire technique décrivant les
son agressivité chimique vis-à-vis du contenant ; caractéristiques dimensionnelles et les principaux défauts. Il doit
– la date de durabilité minimale à satisfaire (en général entre 2 et aussi effectuer un ensemble de contrôles à fréquence régulière, et
5 ans, et à température ambiante, mais pouvant aller jusqu’à plus dans tous les cas, chaque contrôle doit être enregistré sur le
de 45 °C dans certaines conditions ; registre de sertissage.

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F5100

____________________________________________________ SERTISSAGE : OUTILS ET AUTOCONTRÔLES POUR LA MAÎTRISE DU RISQUE MICROBIOLOGIQUE

2
a boîte « 3 pièces » (avec un fond b boîte « 2 pièces emboutie », vue du dessous
dit « fabricant » déjà serti)

c fond à sertir (ou couvercle) d’une boîte, d fond à sertir (ou couvercle) d’une boîte,
face interne face externe

Figure 1 – Corps d’une boîte

Boîte sertie
Boîte ouverte
(avant sertissage)
Ourlet
Serti
Joint
d’étanchéité
Couvercle
Serti du couvercle
Montage Corps
Agrafe électrosoudée

Rebord Moulures

Figure 2 – Description d’une boîte métallique à sertir pour conserves

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SERTISSAGE : OUTILS ET AUTOCONTRÔLES POUR LA MAÎTRISE DU RISQUE MICROBIOLOGIQUE ____________________________________________________

2.1 Matériel
Hauteur ourlet
2.1.1 Sertisseuses
∅ extérieur ourlé Il existe sur le marché de nombreux fournisseurs capables de
∅ de cuvette proposer aux conserveurs plusieurs gammes de sertisseuses :
Jonc Gradin – sertisseuses manuelles (surtout utilisées par les artisans) ;
Rosace
(ou étage) – sertisseuses semi-automatiques (adaptées aux PME) ;
(ou macaron)
– sertisseuses automatiques (destinées aux cadences
industrielles).
La figure 4 présente certains de ces modèles.
Joint Profondeur de cuvette
Les sertisseuses automatiques fonctionnent le plus souvent en

2 Figure 3 – Coupe du fond à sertir (d’après [4])


flux continu et sont destinées aux productions de plus grande
ampleur. Elles sont généralement fabriquées pour sertir les boîtes
d’un seul diamètre.

a sertisseuse manuelle SCIM b sertisseuse semi-automatique SCIM

c carrousel d’une sertisseuse continue automatique


multi-tête FERRUM

Figure 4 – Modèles de sertisseuse

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