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Université Pierre & Marie Curie Licence de mathématiques 3

UE 3M210 Analyse Fonctionnelle Année 2015–16

Partiel du 26 février 2016


2h – Documents interdits

La plus grande importance sera accordée à la rigueur de l’argumentation.

Exercice 1. Soit (X, A, µ) un espace mesuré.


a) RSoient fRet g deux fonctions mesurables positives de X dans R+ telles que f g ≥ 1. Montrer que
2
X f dµ X g dµ ≥ µ(X) .
b) On suppose qu’il existe une fonction intégrable f : X → R+∗ telle que 1/f soit intégrable. Que
peut-on dire de la mesure µ ?

Solution de l’exercice 1.
a) Les hypothèses 1 ≤ f g, et f, g positives et l’inégalité de Cauchy-Schwarz impliquent :
Z Z Z 1/2 Z 1/2
µ(X) = 1 dµ ≤ f 1/2 g 1/2 dµ ≤ f dµ g dµ .
X X X X

b) On pose g := 1/f , alors f, g ∈ L1 (µ). De plus, a) implique 1 ∈ L1 (µ) et donc µ(X) < ∞, i.e. la mesure
µ est finie.

Exercice 2. Soit (E, k·k) un espace vectoriel normé et (xn ) une suite de Cauchy P de E. Montrer
qu’on peut trouver une sous-suite extraite (yk )k≥0 = (xnk )k≥0 telle que la série (yk+1 − yk ) soit
normalement convergente.

Solution de l’exercice 2. On montre d’abord qu’on peut trouver une sous-suite (xnk ) telle que

∀k ≥ 0, kxnk+1 − xnk k ≤ 2−k .

En effet, d’après le caractère de Cauchy, pour tout k ≥, il existe un rang Nk > 0 tel que ∀n, m ≥ Nk ,
kxn − xm k ≤ 2−k . On aurait pu forcer la suite Nk à être strictement croissante, mais si on ne l’a pas
fait, alors on définit par récurrence n0 = N0 et pour k ≥ 1,

nk = max{nk−1 + 1, Nk }.

La suite (nk ) est alors strictement croissante, et vérifie nk ≥ Nk pour tout k ≥ 0, ce qui garanti
kxnk − xnk+1 k ≤ 2−k puisque
P −k nk , nk+1 ≥ Nk .
Comme la série positive 2 P est convergente, on peut conclure par théorème de comparaison pour
les séries positives que la série (xnk+1 − xnk ) est normalement convergente.

Exercice 3. On travaille avec la mesure de Lebesgue, notée m, sur [0, 1] et les normes k·kp sur
Lp ([0, 1], m).
a) Montrer que L∞ ([0, 1], m) ⊂ L1 ([0, 1], m).
L’injection canonique correspondante (i.e. l’identité),
Id
(L∞ ([0, 1], m), k·k∞ ) −→ (L1 ([0, 1], m), k·k1 ),

est-elle continue ? Quelle est sa norme d’opérateur ?


b) La norme k·k1 sur l’espace vectoriel L∞ ([0, 1], m) est-elle équivalente à la norme k·k∞ ?

1
Solution de l’exercice 3.
a) Soit f une fonction fonction mesurable essentiellement bornée sur [0, 1]. Alors
Z Z
|f | dm = |f | dm ≤ m({|f | ≤ kf k∞ })kf k∞ ≤ kf k∞
[0,1] {|f |≤kf k∞ }

ce qui montre l’inclusion, et la continuité de l’injection canonique, qui est de norme inférieure ou
égale à 1. Si on prend f constante égale à 1 (par exemple), on voit que la valeur 1 est atteinte,
donc l’injection est exactement de norme 1.
b) On souhaite donc savoir s’il existe M > 0 tel que

∀L∞ ([0, 1], m), kf k∞ ≤ M kf k1 .

La réponse est non, comme on le voit en prenant la suite (fk )k≥1 de fonctions continues sur
[0, 1] donnée par
fk (x) = xk
pour laquelle
kf k∞
= k → +∞
kf k1
lorsque k → +∞.

Exercice 4. Soit (X, A, µ) un espace mesuré, et H une fonction positive µ-intégrable.R On introduit
la mesure dν = H dµ sur X définie pour tout partie mesurable A ∈ A par ν(A) = A H(x) dµ(x). On
se donne p ∈]1, +∞[. Montrer que la multiplication par H 1/p , à savoir l’application

f → H 1/p f

est une application linéaire continue de Lp (X, ν) dans Lp (X, µ), dont on calculera la norme d’opérateur.

Solution de l’exercice 4. Il faut d’abord vérifier que l’application est bien définie. Si f ∈ Lp (X, ν) on a
Z Z Z
|H 1/p f |p dµ = |f |p H dµ = |f |p dν < +∞

et donc f ∈ Lp (X, µ).


L’application est évidemment linéaire, et l’égalité ci-dessous dit exactement que c’est une isométrie de
Lp (X, ν) dans Lp (X, µ), et elle est donc de norme 1.

Exercice 5. Soient (X, A, µ) un espace de probabilité et f : X → R+ une fonction positive µ-


intégrable.
Notation : Pour une fonction réelle mesurable g et p ∈]0, +∞[ on note
Z 1/p
kgkp := |g|p dµ .

Attention : vous noterez qu’on convient donc de cette notation même pour p ≤ 1.
a) Soit p > 0. Montrer que f p = f p 1{f >0} .
b) En utilisant l’inégalité de Hölder, montrer que si µ({f > 0}) < 1, alors kf kp → 0 quand p → 0.
c) Montrer que pour p ∈]0, 1[ et s > 0 on a sp ≤ s + 1.
d) Etablir que Z
lim f p dµ = µ({f > 0}).
p→0 X

2
e) Montrer que pour tout p ∈]0, 1[ et pour tout y ∈]0, +∞[, alors
|y p − 1|
≤ y + | log y|.
p
Indication : on pourra distinguer les cas y ≤ 1 et y > 1, et utiliser le théorème des accroissements
finis.
f) A partir de maintenant, on suppose que f > 0 sur X et que log f ∈ L1 (µ). Montrer que
fp − 1
Z Z
lim dµ = log f dµ.
p→0 X p X

g) En déduire que Z 
lim kf k Lp = exp log f dµ .
p→0 X

Solution de l’exercice 5.
a) Pour x ∈ X, L’égalité est vrai si f (x) = 0 et si f (x) > 0.
b) Si 1/p > 1, l’inégalité de Hölder donne
Z Z Z p Z p
p p p 1/p 1−p
f dµ = f 1{f >0} dµ ≤ (f ) dµ µ({f > 0}) = f dµ µ({f > 0})1−p ,
X X X X
1 1
d’où kf kLp ≤ kf kL1 µ({f > 0})1/p−1 . Comme µ({f > 0}) < 1 et µ({f > 0}) p −1 = e( p −1) log µ({f >0}) , ,
on en déduit par passage à la limite quand p → 0 que kf kLp → 0.
c) Fixons p ∈]0, 1[. Si 0 < y ≤ 1, alors y p ≤ 1 et si y > 1, y p < y. Donc pour tout y > 0, y p ≤ y + 1. On
peut aussi dire que la fonction concave s → sp sur 0, +∞[ est au dessous de sa tangente en 1.
d) Comme f (x)p → 1{f >0} (x) quand p → 0 et que f (x)p ≤ f (x) + 1 pour tout x ∈ X, avec f + 1 ∈ L1 (µ)
(car µ est une mesure de probabilité), le théorème de convergence dominée assure que
Z Z
lim f p dµ = 1{f >0} dµ = µ({f > 0}).
p→0 X X

e) Supposons d’abord que y ∈]0, 1]. Pour tout p ∈]0, 1[, le théorème des accroissement finis appliqué à la
fonction p ∈]0, 1[7→ y p = ep(log y) assure l’existence d’un p0 ∈]0, p[ tel que
|y p − 1| = |y p − y 0 | = |(log y)y p0 p| ≤ | log y|p.
On applique ensuite le théorème des accroissements finis à la fonction y ∈]1, +∞[7→ y p . Pour tout
p ∈]0, 1[ et tout y > 1, on en déduit l’existence d’un y0 ∈]1, y[ tel que
|y p − 1| = |y p − 1p | = |py0p−1 (y − 1)| ≤ py.
En regroupant les deux cas, on constate que pour tout p ∈]0, 1[ et pour tout y ∈]0, +∞[,
|y p − 1|
≤ y + | log y|.
p
f) Pour tout y > 0
yp − 1 ep log y − 1 d p log y
lim = lim = e |p=0 = log y.
p→0 p p→0 p dp
f (x)p −1
Comme on suppose que f > 0 sur X, on en déduit que p → log f (x) pour tout x ∈ X. Par
|f (x)p −1|
ailleurs, la question c) assure que p ≤ | log f (x)| + f (x) pour tout x ∈ X, où, par hypothèse
| log f | + f ∈ L1 (µ). Une application du théorème de convergence dominée montre que
fp − 1
Z Z
lim dµ = log f dµ.
p→0 X p X

g) On a, lorsque p → 0,
fp − 1 
Z  Z Z
p
log f dµ = log 1 + p dµ ∼ p log f dµ,
X X p X

ce qui donne le résultat, en écrivant kf kp = exp( p1 log X f p dµ).


R

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