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République Tunisienne

Ministère De l’Enseignement Supérieur Et de la recherche


Scientifique

Université de Tunis el Manar


Faculté de Droit et de Science Politique de Tunis

Mémoire pour l’obtention du Diplôme de Mastère de recherche


en science politique

La transition démocratique en Mauritanie à


travers la révision constitutionnelle de 2012

Sous la direction de : Elaborée par :

Mme.Asma Nouira Mohamed El Moctar Sarr

Membres du jury :
Président :………………………
Encadrant: Mme Asma Nouira
Rapporteur:……………………

2015-2016
La faculté n’entend donner aucune
approbation ni improbation aux opinions
émises dans les mémoires et les thèses. Ces
opinions sont considérées comme propres à
leurs auteurs.
DEDICACES

A Mes chers parents et toute la grande famille, que nulle


dédicace ne puisse exprimer mes sincères sentiments, pour leur
patience illimitée, leur encouragement contenu, leurs aide, en
témoignage de mon profond amour et respect pour leur grands
sacrifices.

A Mes chers frères et sœurs pour leurs grands amour et


leurs soutient, qu’ils trouvent ici l’expression de ma haute
gratitude.

A Mes chers ami(e)s, mes camarades de classe, et a tous et


toutes ceux que j’aime.
REMERCIEMENTS

En préambule et au terme de ce travail de recherche


scientifique, je tiens à remercier sincèrement Mme Asma Nouira,
mon encadrant de mémoire, pour sa rigueur, sa générosité et sa
bienveillance.

Aux membres du Jury de me faire honneur en acceptant


d’évaluer mon travail.

A Mes professeurs de Mastère qui m’ont permis de


bénéficier de leur savoir et de leurs connaissances. Car en Wolof
on dit que « Nul n’a le prix à payer du savoir reçu ».

A toutes ces personnes, acteurs politiques, militants de la


société civile et professeurs émérite qui m’ont ouvert leurs portes
et m’ont fourni les informations dont j’avais besoin lors de mes
entretiens et enquête de terrain.
Principales abréviations

AG / NU : Assemblée Générale / Nations Unies

AJD/MR : Alliance pour la Justice et la Démocratie /


Mouvement pour la Rénovation

Al : Alinéa

APP : Alliance Populaire Progressiste

ATT : Amadou Toumani Touré

BASEP : Bataillon de Sécurité Présidentielle

CAP : Coalition pour une Alternance Pacifique

CMJD : Comité Militaire pour la Justice et la Démocratie

CMRN : Comité Militaire de Redressement National

CMSN : Comité Militaire de Salut National

CNDH : Commission Nationale des Droits de l’Homme

COD : Coalition de l’Opposition Démocratique

E/R: En retraite

FLAM : Forces de Libération Africaine de Mauritanie

FNDD : Front National de Défense de la Démocratie

FNDU : Front Nationale pour la Démocratie et l’Unité

FPC : Forces Progressistes du Changement


GGSR : Groupement Général pour la Sécurité des Routes

GIC : Groupe International de Contact

HAPA : Haute Autorité de la Presse et de l’Audio-


visuelle

HCE : Haut Conseil d’État

IRA : Initiative pour la Ressursigence de l'Antiesclavagisme

OSC : Organisations de la Société Civile

PRAG : Parti Radical pour l’Action Générale

PRDS : Parti Républicain Démocratique et Socialiste

RFD : Rassemblement des Forces Démocratiques

RNRD : Rassemblement National pour la Réforme et le


Développement

TPMN : Touche pas à ma nationalité

UFP : Union des Forces de Progrès

UPR : Union Pour la République


Sommaire
Introduction
Partie I : Les acteurs de la politique mauritanienne : Un
dialogue inaudible
Chapitre I : Profil des acteurs politiques
Section I : Mauritanie : La caserne des militaires
Section II : Des oppositions qui s’opposent
Chapitre II : Le général (E/R), l’opposition hétéroclite et le
régime
Section I : Les accords de Dakar oubliés et les « radicaux » à
la marge
Section II : Une démocratie qui se consolide ou un
autoritarisme libéral
Partie II : De timides amendements pour de sérieux
problèmes
Chapitre I : Amendements et lois face aux tares sociales: les
obstacles à la démocratisation
Section I : Les problèmes sociaux premiers: quelle solution
normative ?
Section II : Le problème de cohabitation
Chapitre II : Amendements et renforcements: les autres
institutions sociales
Section I : La société civile, l'armée et le pouvoir
Section II : Des institutions à renforcer
Conclusion
1

Introduction
Dès 1994, la revue Politique Africaine, dans son numéro 55,
s'interrogeait en ces termes: « La Mauritanie: un tournant
démocratique ? ». Avec le concours de plusieurs chercheurs, la revue
panafricaine francophone étayait les « questions pour l'avenir » 1 dont
le pays devrait faire face avec l'engagement dans sa toute première
expérience « démocratique » de 1991 voulu par Maouiya Ould sidi
Ahmed Taya (Taya). Quinze ans plus tard, dans son numéro 114 de
2009, la même revue ironisait en ces termes « Mauritanie, la
démocratie au coup par coup »2, afin de s'interroger sur ces mêmes
défis face au coup de force du 06 Aout 2008 et les interminables
putschs qui, à la fois, initient et font échouer la démocratisation en
Mauritanie.

Afin de contextualiser 3 le sujet, nous devons revenir sur cette matinée


du 6 Aout 2008 lorsque le président Sidi Ould Cheikh Abdellahi
(Sidi), président élu démocratiquement à l’issue des présidentielles de
Mars 2007 et investi en Avril de la même année, décide de limoger

1
Ainsi intitulé par H. Guillaume et P. Bonte qui s'interrogeaient sur le brusque
retournement d'un régime militaire et autoritaire vers la démocratie, ce malgré les
nombreuses variables sociales, ethniques, économiques et internationales dont le
pays fait face. In BONTE P et GUILLAUME H, Mauritanie: questions pour
l'avenir, Politique africaine, N°55, Octobre 1994, Karthala. pp. 2-10.
2
Cette expression démontre l’ironie dans les processus démocratiques en
Mauritanie qui sont interrompues et initiés à la fois par des coups d’États militaires.
La dernière en date, Aout 2008, était un coup qui venait de déposer un
gouvernement démocratique qui a à peine fait 1 an. In CIAVOLELLA R. et
FRESIAM., « Entre démocratisation et coups d'État. Hégémonie et subalternité en
Mauritanie », Politique Africaine, 2009/2 (N° 114), p. 5-23.
http://www.cairn.info/revue-politique-africaine-2009-2-page-5.htm
3
Tout au long de notre introduction, notre démarche méthodologique est
essentiellement inspirée de la démarche proposée dans l’ouvrage méthodologique
de QUIVY R. et VAN CAMPENHOUDT L. Manuel de recherche en sciences
sociales, DUNOD, Paris, 2è me Edition, 1995.
2

par décret quatre généraux de l’armée 4. Ces derniers, écœurés par cet
acte décident à leur tour de le déposer, à leur tête se trouvait le
commandant du BASEP, habitué au palais présidentiel et aux putschs
et contre-putschs, Mohamed Ould Abdel Aziz (Aziz). Aussitôt
l’information, comme une trainée de po udre, fait le tour du monde, et
crée une situation de confusion au sein des leaders politiques, dont
certains vont le dénoncer très tôt, et s’organiser en un front de « partis
anti-coup » 5, le FNDD; de l’autre côté les putschistes s’organiseront
autour du Haut Conseil d’État (HCE), une autre version des CMRN,
CMSN et CMJD, connu jadis par les mauritaniens, donc l'institution
militaire gouvernante présidée par Aziz. Cette situation de bras de fer
entre putschistes avérés et partis politiques désireux du retour de la
légalité constitutionnelle, restera telle quelle jusqu’à ce que la
communauté internationale condamne le coup militaire et établit un
GIC sur la Mauritanie6 en nommant des envoyés spéciaux pour le
pays afin que la situation confuse soit dénouée. Les différents acteurs
politiques mauritaniens signeront le 03 Juin 2009 les accords cadre de
Dakar « entre les trois grands pôles politiques mauritaniennes » 7, par
la médiation du GIC sur la Mauritanie et à travers le gouvernement du
Sénégal. Cet accord de « sortie de crise » à double objectif, à savoir
transitoire et post-transitoire, nous emmène à une élection

44
Il s’agit des généraux au niveau de l’état-major de l’armée, de la gendarmerie, de
la garde nationale et de l’état-major du BASEP (Bataillon de la Sécurité
Présidentielle), dont Aziz était à ce poste. Voir ANTIL A. et LESOURD C., « Non,
mon Président ! Oui, mon général ! Retour sur l’expérience et la chute du
président Sidi Ould Cheikh Abdellahi », l’Année du Maghreb [En Ligne]. V 2009,
mis en ligne le 01 novembre 2012. URL https://anneemaghreb.revues.org/620
5
Ibid.
6
Il s’agit de l’Union Africaine, l’Union Européenne, les Nations Unies,
l’Organisation International de la Francophonie, La Ligue des États Arabes et
L’organisation de la Conférence Islamique, in OULD BOUBOUTT A. S., « La
révision constitutionnelle du 20 Mars 2012 en Mauritanie », L’Année du Maghreb,
n°10, 2014, pp. 297-314. PDF https://anneemaghreb.revues.org/2176?file=1
7
Ainsi nommés dans le titre de l’Accord cadre de Dakar du 05 Juin 2009, Il s’agit
du camp soudé autour de Aziz après sa démission et future UPR, du FNDD et du
RFD.
3

présidentielle du 18 Juillet 2009 dont Aziz remportera avec 52,2%


des suffrages.

Au lendemain des élections du 18 Juillet, l’opposition réclame


l’application des dispositions post-transitoires, à savoir, le titre VII du
paragraphe 4 des accords de sortie de crise intitulé « De la poursuite
du dialogue nationale ». Cette disposition stipulait que « Cet accord ne
met pas fin à la poursuite du dialogue national sur les autres points qui
peuvent renforcer la réconciliation nationale et la démocratie, et que
dans le prolongement de l’élection présidentielle, le dialogue national
inclusif sera poursuivi et intensifié entre toutes les forces politiques
nationales…»8 . Ce que réfutent les acteurs au pouvoir en estimant que
ce dernier n’a plus d’objet depuis l’élection présidentielle. C’est parti
pour un quiproquo interminable entre les différents acteurs politiques.
Allant du dialogue séparé entre le pouvoir et une partie de
l’opposition9 qui donnera « l’Accord politique » du19 Octobre 201110;
au boycott par l’autre partie de l’opposition11 du dialogue et de toutes
les échéances électorales organisées entre 2013 et 2014.

Le bémol dans cet accord de 2011 entre acteurs politiques, et en


période transitionnel, est son caractère restreint, qui fait que,
probablement, les décisions qui en seront issues, n'engagent que ceux
qui y ont pris part; alors qu’il devait être inclusif, sur la base d’un

8
Contenu du paragraphe 4 de l’Accord Cadre de Dakar entre les trois grands pôles
politiques mauritaniens, p.4 2009. Voir Annexe.
9
Il s’agit de La C.A.P est une coalition de partis politiques formée par l’ancien
Président de l’Assemblée nationale Messaoud Ould Boulkheir, leader de l’APP, il
y avait El Wiam, Sawab et Hamam
10
L'accord politique de 2011 entre la CAP et le parti au pouvoir, l'UPR,
contenaient des amendements à la constitution, d'où la révision constitutionnelle de
2012 et des amendements à certaines lois telles la loi sur les partis politiques,
l'accès des femmes aux mandats électifs, la prohibition des candidatures
indépendantes hors présidentielles, l'élargissement de la représentation au niveau
de l'assemblée nationale...
11
Il s’agit du COD, formation qui succéda au FNDD en intégrant en son sein un
autre parti politique au lendemain des élections de Juillet 2009.
4

consensus entre l’ensemble des acteurs de la classe politique du pays,


du moins si l’on se réfère au titre VII des Accords de Dakar pour la
sortie de crise.

Sur cette lancée, nous allons, suivant un angle sociopolitique et


actantiel, étudier ce contexte marqué par une interaction conflictuelle
entre les différents acteurs politiques du pays , par rapport à une
démocratisation nécessaire qui dépend fortement de leurs
comportements face aux règles préétablies.

Pour cela, il nous faudra « l’utilisation de procédés opératoires


rigoureux, bien définis, transmissibles, susceptibles d’être appliqués à
nouveau dans les mêmes conditions, adaptés au genre de problème et
de phénomène en cause»12 . Tel que le travail de terrain qui s’appuiera
sur des entretiens d’individualités et la documentation, à savoir « toute
"trace" en rapport avec l’activité des hommes vivant en société et qui,
de ce fait, constitue indirectement une source d’informations sur les
phénomènes sociaux » 13, afin de vérifier les variables explicatives qui
constitueront des réponses à notre problématique.

Il est à distinguer entre le processus de démocratisation proprement


donné et la phase post-transition. Cela veut dire, théoriquement le
processus de démocratisation débute du point (A), la chute d’un
régime autoritaire, ensuite c’est le début du jeu entre les différents
acteurs, qui font et défont alliances et compromis. C’est aussi le
moment des jeux sur les différentes règles à adopter et censées régir le
régime à venir, enfin c’est l’occasion de régler ou d’inscrire dans
l’agenda les questions d’ordre nationales qui préoccupent les citoyens,

12
PINTO R et GRAWITZ M., Méthodes des sciences sociales, Dalloz, 4è me
Edition, 1971. p. 288
13
DEL BAYLE J-L. L., Initiation aux méthodes des sciences sociales, Classiques
des Sciences Sociales, 2000, p. 167. Version numérique PDF
http://classiques.uqac.ca/
5

ou en tout cas, les plus importantes. Ce processus prend fin au point


(B), l’établissement d’un nouveau gouvernement sur la base de
nouvelles règles 14. Ensuite il y a ce qui est, théoriquement, appelé la
phase de « seconde transition »15 qui peut être considérée comme le
début ou les prémices de la consolidation démocratique. Cette période
permet de mettre en œuvre et d’entériner les règles qui ont été faites
durant le processus transitionnel, donc c’est la phase d’une
institutionnalisation, ou si vous voulez, de la routinisation
démocratique. Enfin là, ce ne sont plus les acteurs qui font les règles,
mais c’est plutôt les règles qui font les acteurs, et ces derniers sont
tenus de s’y conformer.

Cela s'inscrit dans la théorie de la démocratisation qui est un


phénomène dépendant de plusieurs autres phénomènes ou variables
dites indépendantes qui agissent sur elle et qui déterminent son
résultat avec une certaine « incertitude »16 sur l’issue du processus.
Nous avons principalement deux courants dans le cadre de l’étude des
transitions démocratiques : le premier est celui de l’école des pré-
conditions ou des structures qui explique la possibilité de passage d’un
régime autoritaire vers un régime démocratique par un ensemble de
facteurs socio-économiques, à savoir une industrialisation assez
suffisante, une urbanisation de la société, la richesse ou le reve nu par
tête des habitants (P.I.B/habitant) et le niveau d’éducation. Bref la

14
Définition donnée par O’DONNELL et SCHMITTER in O’DONNELL G. et
SCHMITTER P. Transition from authoritarian rule, tentative conclusions about
uncertain democraties, The John Hopkins University Press, 1986, p. 6. C’est nous
qui traduisons et reformulons.
15
Ces notions de « seconde transition » et de « consolidation » ont été développées
par O’donnell. In O’DONNELL G., « Delegative democracy? »,Pre-published as
Kellogg Institute working paper 192, April 1993, Edition PDF du Kellogg
Institute
16
Le terme incertitude « incertainty » repose sur l’issue du processus à un type de
régime qui peut être encore autoritaire, démocratique, ou quelque chose d’autre,
suivant la stratégie des acteurs et le résultat que celles-ci donneraient. Il est
développé par O’DONNELL G., et SCHMITTER P Op.Cit
6

modernisation donnerait l’ouverture à une classe moyenne large,


ouverte et favorable à un régime démocratique, pour paraphraser en
substance « les critères » de Lipset 17, figure de proue de cette théorie
de la fin des années cinquante grâce à son ouvrage Some social
requisites of Democracy : Economic developement and
politicallegitimacy, 1959. Il estimait que « une société divisée entre
une grande masse pauvre et une petite élite favorisé, résultera soit
d’une oligarchie […] ou d’une tyrannie » 18. L'autre courant de pensée
est celui qui base son approche sur les acteurs et non sur les structures
socio-économiques. Il s'agit du paradigme « Agent based approach »
ou « Agency Factors of Democratization ». La théorie de l’école des
acteurs analyse le processus d’une transition de régime autoritaire vers
un régime démocratique avec le choix des leaders politiques,
principaux acteurs du changement, par l’élaboration de nouvelles
règles démocratiques. Grâce au classique de O’donnell et Schmitter,
Transition from authoritarian rule (1986), appuyé sur une étude
empirique des transitions des régimes politiques en Amérique Latine
et des pays d’Europe du Sud et de l’Est, qui balise le cadre théorique
de la « democratization studies », l’élite politique,« hard-liners » et
« soft-liners »19 par le biais de leurs choix stratégiques, constituent les

17
A part Lipset, d’autres auteurs se rangeront aussi dans cet ordre de pensée tels
que Moore dans son étude sur l’histoire socio-économique de plusieurs pays a
démontré le type de régime qui résulterait de chaque processus, ce qui lui
permettait de dire « sans bourgeoisie, pas de démocratie ». Dans cette idée des pré-
conditions structurelles, telles l'industrialisation, l'éducation, le niveau de P.I.B...,
ils concluent par cet axiome que « la plupart des pays riches sont démocratiques et
presque toutes les démocraties sont des pays riches ».
18
Citation en page 75, Traduit par nous, LIPSET S.M, « Some Social Requisites
ofDemocracy: Economic Development and Political Legitimacy», American
Political Science Review, 53, pp 69-105. doi:10.2307/1951731. In Julian
Wucherpfennig, Modernization and Democracy: Theories and Evidence Revisited,
ETH Zurich, Center for Comparative and International Studies
19
Hard-liners et Soft-liners désignent le comportement des acteurs à être prêt à
maintenir le régime autoritaire ou à soutenir un changement de régime.
O’DONNELL G. and SCHMITTER P. C., p15 Op.cit.
7

facteurs essentiels au changement de régime avec l’établissement des


règles du jeu. En outre, le travail de Linz et Stepan, The Breakdown of
Democratic Regimes (1979) et Problems of Democratic transition and
consolidation : Southern Europe, South America and Post-communist
Europe (1996), ont approfondie l’analyse des transitions, et surtout de
la consolidation des régimes démocratiques, toujours avec le rôle
crucial des acteurs. Cela avec des critères qui reviennent à une
démocratisation complète par le niveau « comportemental »,
« attitudinal » et « constitutionnel » des acteurs et, au cas échéant, à un
régime démocratique consolidé qui repose sur ce qu’ils appellent les
« cinq arènes ou terrains d’une démocratie consolidée »avec des
institutions démocratiques dont les compétences et les limites sont
bien déterminées. Cette école des « Democratization studies » ou de la
« Transitologie » qui concentre son analyse et ses explications du
changement par les acteurs, est celle qui nous permettra de mener une
étude concrète de notre objet de recherche.

Cet éclairage théorique de la démocratisation est important dans la


mesure où ça nous permet de saisir les problèmes du contexte
politique des périodes 2008, 2012 et 2014. Cela se vérifie à partir du
moment de la chute de Sidi en 2008 (point A), les différentes positions
des protagonistes menant jusqu’aux accords de Dakar pour la sortie de
crise. Puis l’élection de Aziz (point B). Ensuite, des décisions de ce
dernier de faire fi des accords de sortie de crise et de ces protagonistes
de ne pas reconnaitre le résultat des urnes. De la décision du pouvoir
de tenir en 2011un dialogue sortant du cadre des accords précités, dont
certains leaders de l’opposition boycotteront en plus des dernières
élections en 2013 et 2014. Là, sont les comportements des leaders en
période post-transitionnelle. Il y a eu, en fait, une relation significative
sur le comportement des acteurs lorsqu’ils sont en position d’élaborer
8

les règles, ce qui résultera de cette élaboration et lorsqu’ils seront


tenus de s’y conformer quel que soit leurs positions ou leurs décisions
ex ante.

Raison pour laquelle, nous inscrivons notre étude de la


démocratisation en Mauritanie entre 2008 et 2014, à travers la révision
constitutionnelle de 2012, dans un « schème actancielle ». Les acteurs
politiques en action et en interaction, leurs choix de coopérer ou de ne
pas coopérer à l’élaboration et au respect des règles. L’impact que cela
a sur la variable à expliquer qu’est la consolidation des institutions
d’un régime politique basé sur des règles démocratiques.

Les concepts centraux constituant notre objet d’étude sont transition


démocratique et révision constitutionnelle, dont le premier a déjà été
discuté ci-dessus20, s’agissant du second se rapportant aux
amendements ayant été fait par les parlementaires mauritaniens réunis
en congrès afin de statuer sur des dispositions relatives à la
constitution à modifier 21 . Par ces concepts dérivent des notions
secondaires, tels acteurs et niveau d'interaction, pactes ou compromis,
et institutions.

Le concept acteur s'inscrit ici dans l'étude de l'élite (s), ce concept au


pluriel ou au singulier, a été le débat entre les chercheurs qui y ont
consacrés leurs travaux, cela depuis Pareto et de Mosca, les pères
fondateurs qui ont ouvert la voie à la « théorie des élites ». Pareto
définissait l’élites, au sens large, comme des « catégories sociales
composées d’individus ayant la note la plus élevée dans leur branche,

20
Définition donnée, voir Supra note 14.
21
La révision constitutionnelle ou amendement constitutionnel s’entend des
modifications apportées à la constitution par le titulaire du pouvoir constituant
dérivé, tel en Mauritanie, le parlement bicaméral réuni en congrès en session
extraordinaire selon les dispositions constitutionnelles du texte fondamental du 20
Juillet 1991. Voir aussi Lexique des termes juridiques, 22è me édition, 2014-2015,
Dalloz.
9

il poursuit en définissant l’élite comme, les individus qui exercent les


fonctions dirigeantes, dont on distingue, l’élite gouvernementale, ou,
classe dirigeante qui détient effectivement le pouvoir, et l’élite non
gouvernementale ou classes dominantes, qui sans exercer le pouvoir
soutient la précédente et sert éventuellement d’intermédiaire entre
l’élite dirigeante et la masse. »22 , quant à Mosca il parle plutôt de
« classe politique » et/ou « classe dirigeante » au lieu d’élite(s)23,
Cependant, ces définitions étant tantôt « pluraliste », et tantôt
« moniste », nous pousse à recourir à une définition plus générique
donnée par Genieys W, en désignant l’élite comme « une minorité
qui dispose à un moment donné dans une société déterminée d’un
prestige découlant de qualités naturelles valorisées socialement (par
exemple, la race, le sang, etc.) ou de qualités acquises (culture,
mérite, aptitude, etc.). Ainsi, le vocable désigne tout aussi bien le
milieu (social, territorial, entre autres) d’où est issue l’élite, que les
acteurs qui la composent, ou encore le terrain au sein duquel elle
manifeste sa prééminence. Dans ce cas de figure, le déterminant est

22
LEFERME-FARGUIERES F. et VAN RENTERGHEM V., « Le concept
d’élites. Approches Historiographiques et Méthodologiques », Hypothèses 2001/1
(4), p. 55-67. Version PDF sur Cairn.info http://www.cairn.info/revue-hypotheses-
2001-1-page-55.htm pp.3-4
23
Ici Mosca raffine sa définition en définissant la « classe politique » avec un
double aspect « théorique » et pratique » à savoir, primo, que « le pouvoir est
détenu et exercé, toujours et partout, par une minorité dominant une majorité » et,
secundo, «qu’au sein d’une même société plusieurs minorités peuvent partager le
pouvoir », cela se fonde sur ce qu’il appelle la « formule politique » qui rend
légitime cette domination, ». D'ailleurs l’auteur Alberto Puppo explique cette
différence de vocabulaire en citant Albertoni, un autre auteur qui laisse savoir que
quand Mosca parle de classe politique, c’est la classe politique Sicilienne, la mafia,
alors que la classe dirigeante désignerait celle de l’État Italien. Alberto Puppo
compare cette explication avec des écrits de Mosca lorsqu’il était Sénateur, qu’il
existait deux niveaux au sein de la minorité dirigeante, à savoir la classe politique
avec quelques douzaines d’hommes et la classe dirigeante, beaucoup plus
nombreux, qui constituait l’appareil politico-administratif. PUPPO A., « Gaetano
Mosca et la théorie de la classe politique. Une pensé antidémocratique au service
de la liberté », Revue Française d’Histoire des Idées Politiques 2005/2 (n°22), p.
17-31 DOI 10.3917/rfhip.022.001. Version PDF in Cairn.info
http://www.cairn.info/revue-francaise-d-histoire-des-idees-politiques-2005-2-page-
17.htm p. 8.
10

toujours suivi d’un qualificatif permettant de restreindre le champ du


groupe d’acteurs identifié comme constituant une élite »24 . Suivant
cette définition, nous allons durant notre travail utiliser le concept
« acteur », dans une perspective décisionnelle et actancielle, pour
désigner l’ensemble des acteurs, leaders, en action et en interaction,
qui décident, influencent ou subissent, directement ou indirectement,
l’institutionnalisation de la politique nationale. Et pour les spécifier,
nous allons y faire suivre le qualificatif « politique », pour désigner les
civils actifs dans les partis politiques, « société civile », pour ceux qui
sont actifs dans les mouvements sociaux et « militaire», pour les
militaires actifs dans le domaine politique.

S’agissant du pacte ou de compromis, nous y entendons « tout accord


explicite et pas forcément publique ou justifié, entre une sélection
d’acteurs politiques, qui cherche à définir ou mieux redéfinir les règles
régissant l’exercice du pouvoir sur la base de garantis vitaux, ces
pactes peuvent être de durée limité ou basé sur un consentement
continu qui ouvrira la voie à des règles durables » 25 . Le fait que
maintenant nous remarquons dans l’interaction de ces acteurs
politiques des manifestations, telle qu’ils n’arrivent pas à s’entendre
ou s’entendent peu sur les procédures concernant les règles de la
conduite politique, ou qu’ils concluent des accords restreints et/ou non
inclusifs. Ceci est un signe d’absence de consensualisme, où règne une
certaine méfiance qui limiterait leurs interactions dans une sorte
d’insécurité ou de méfiance de part et d’autres, et qui, probablement
aboutirai, sur des mesures radicales et/ou punitives que pourraient

24
GENIEYS W., Op.Cit. Version PDF p. 2
25
Définition de pacte entre les acteurs donnée par O’DONELL G. et SCHMITTER
P. C., p.35. Op.cit. C’est nous qui traduisons.
11

prendre l’un des camps en guise d’exclusion de facto de l’autre camp


du jeu du pouvoir 26 .

Et enfin, concernant les « Institutions », nous entendons par ces


dernières comme des «modèles d'interactions régularisés qui sont
connus, pratiqués, et régulièrement acceptés (pas nécessairement
approuvées normativement), par des acteurs sociaux donnés, auxquels,
par vertu de ces caractéristiques, entendent interagir suivant les règles
et normes formelles et informelles de ces modèles. Parfois, mais pas
nécessairement, les institutions sont des organisations formelles: e lles
sont matérialisées par des bâtiments, sceaux, rituels et des personnes
autorisées à parler au nom de ces organisations. » 27.

Avec ces définitions nous sommes à mesure, grâce à l'interaction entre


les acteurs par les pactes qu'ils lient ou pas, de tester
l'institutionnalisation démocratique, si cela ressemble ou pas à une
« Delegative Democracy : DD »28 comme l’appel O’Donnell. C’est-à-
dire que le pays est formellement démocratique, ou plutôt recoupe les
sept attributs Polyarchique de Dahl, par l’établissement récent d’un
régime démocratique 29 . Cependant, il n’est ni démocratiquement

26
Ici nous nous sommes inspirés de la définition conceptuelle sur la désunion à
partir des élites, dit élite de type désuni et plurielle, donnée par HIGLEY J. et
BURTON M. G. In « The Elite variable in democratic transitions and
breakdowns », American Sociological Review, Vol. 54, N. 1 (Feb, 1989), pp. 17-
32. PDF in http://www.jstor.org/stable/2095659. C’est nous qui traduisons.
27
O'DONNELL G., Op. Cit. C’est nous qui traduisons.
28
Terme et abréviation de Delegative Democracies (DD’s) utilisé par
O’DONNELL G. Op.cit.
29
Les sept attributs d’une Polyarchy, d’après DAHL sont l'élection des officiels,
des élections libres et équitables, un suffrage inclusif, le droit de se présenter aux
élections, la liberté d’expression, l’existence d’une information alternative et
l’autonomie associative. In O’DONNELL G., Illusions about consolidation,
Journal of Democracy, Accessed by University of California, San Diego, 7.2
(1996) 34-51. PDF
http://muse.jhu.edu/journals/journal_of_democracy/v007/7.2odonnell.html
12

institutionnalisé, ni consolidé, et n’est non plus pas menaçant de


revenir en une forme d’autoritarisme du passé 30.

Par conséquent, l'hypothèse centrale de notre sujet est la suivante:


Après les élections présidentielles en Juillet 2009, le choix de certains
acteurs politiques, qu’ils soient au pouvoir ou à l’opposition, de ne pas
respecter les règles qui ont été établit sur la base d’un pacte durant le
processus de transition, peut être facteur de division au niveau de
l’élite politique et constituer un obstacle à tout projet de consolidation
démocratique.

Cette hypothèse en nous servant de réponse provisoire, permet de


répondre à la problématique suivante, à savoir: A travers la révision
constitutionnelle du 20 Mars 2012 en Mauritanie et des contextes qui
l’entourent ; Est-ce qu’entre deux phases, celle du processus
transitionnel et celle de la consolidation, séparées en théorie, mais qui
s’inscrivent dans une perspective linéaire, si la polarisation des acteurs
peut influer sur l’effectivité des changements institutionnels?
Autrement dit, on peut se demander si l’absence de pacte consensuel
entre les principaux leaders politiques ex ante aux amendements
constitutionnelle peut-elle influer sur les résultats institutionnels ex
post ?

Afin de répondre à cette question, nous traiterons, successivement, le


problème récurrent de l’interaction entre les acteurs politiques
mauritaniens (Ière Partie) ; Ensuite décrire et analyser l’effectivité des
amendements faits par rapport aux questions nationales du pays (II ème
partie).

30
C’est nous qui traduisons et reformulons la définition de Delegative Democracies
(DD) donnée par O’DONNELL G., in Op.cit.
13

Première Partie : Les acteurs de la


politique mauritanienne : Un dialogue
inaudible

Dans cette première partie, nous allons dans un chapitre premier


dresser d’une manière générale et significative les différents acteurs
de la politique du pays (I), afin d’en démontrer la nature conflictuelle
de l’interaction entre eux ; Pour ensuite décrire et analyser le résultat
de cette interaction, du comportement de certains acteurs par rapport à
l’institutionnalisation démocratique (II).
14

Chapitre I : Profil des acteurs de la scène


politique mauritanienne

Nous allons décrire ici les différentes personnalités, les plus


significatives, tels que les militaires (I) et les opposants (II), qui
donnent vie à la politique du pays. En démontrant les relations qu’ils
entretiennent entre eux et avec le pouvoir, ainsi que de la manière dont
ils influencent ce pouvoir.

Section I : Mauritanie, la caserne des militaires :


entre hard-liners et soft-liners
Les héritiers du pouvoir militaire de 1978 à 2005, les ex bras droit et
tombeurs de Taya, à savoir, principalement, Ely et Aziz sont connus
aujourd’hui comme étant les acteurs politiques issues des rangs de
l’armée les plus en vue. Cela parce que le premier à diriger la chute de
Taya et la transition de 2005-2007, et le second parce qu’il a par la
suite mis fin à cette expérience démocratique et s’est arrangé pour
avoir le pouvoir. Cependant, ces deux hommes (en uniforme) ne sont
que l’infime partie visible d’une large élite militaire habituée au
pouvoir et au gout du luxe qui préfère le statu quo.

Paragraphe I : Ely le blandos


Ely était durant plus de vingt ans le « premier flic » et le chef des
barbouzes du régime de Taya, il a dirigé la direction générale de la
sûreté nationale, comprenez par là qu’il était impliqué dans toutes les
« sales affaires » qu’a connu le pays sous le régime autoritaire de
Taya, que cela soit la chasse, la déportation et les tueries des civils et
militaires négro-africains durant « les années de braise » (1986-1991),
les arrestations des activistes politiques « islamistes »,
« nationalistes », « marxistes »… Rien ne lui échappait des rouages de
15

la répression de Taya. Il est considéré comme un blandos ou de soft-


liner du terme de Schmitter pour désigner ceux qui soutenaient un
régime autoritaire et à un moment donné ont décidé de ne plus le faire
et d’aider le régime à se démocratiser. Car après avoir mis fin au
régime dont il a été le bras droit, il décide de mettre le pays sur le
chemin de la transition dans un contexte confus par un ensemble de
problèmes 31 qui représentaient les raisons de la chute Taya et surtout
l’encombrant dossier « des années de braises », et dont les acteurs de
la société civile et certains acteurs politiques demandaient aux leaders
de la transition de régler durant cette période. Mais Ely n’en voulait
pas et rétorquait que cela ne sera fait que « seulement une fois que
toutes les élections auront eu lieu, […] et que le pays rentre dans la
légalité et que toutes les décisions prises soient opposables à la
Mauritanie et dans la légalité la plus absolue et non dans une période
d’exception »32 . Ce qui divisa surtout les acteurs politiques entre ceux
qui voulaient qu’ils restent et règlent les problèmes et ceux qui
voulaient que la transition suit son cours normal et emmène des
autorités élues. Dans la compréhension du refus d’Ely de toucher à ces
dossiers préoccupants dont il y est fortement trempé, il s’empresse
avec ces amis du CMJD d’encourager les candidatures des
« indépendants » lors des différentes élections qu’ils vont organiser, et
le plus patent est celui de Sidi qui sera encourager à se présenter aux
présidentielles et bénéficiera de tous les efforts des militaires pour
qu’ils soient élus président 33 . Cette tactique du CMJD relève non

31
Pour l’ensemble des questions dont TAYA et le CMJD ont légué aux nouveaux
élus, voir ANTIL A. « La Mauritanie après le putsch de 2005 », Politique
étrangère, 2005/4 (Hiver),
p. 809-819. DOI 10.3917/pe.054.0809 in Cairn.info
32
Interview accordé par Ely lors de son passage à Paris au média en ligne
Kassataya http://www.kassataya.com/mauritanie/6158-ely-ould-mohamed-vall-a-
kassataya-il-faut-arreter-de-jouer-sur-les-malheurs-des-mauritaniens
33
Pour le rôle des militaires lors de la période transitoire et des élections, Voir
BEN SAAD A., « Mauritanie : Une transition démocratique sans alternance »,
16

seulement d’une volonté de mettre à la tête du pays un homme retiré


de la politique depuis les années 8034 et qui ignore presque toutes les
questions dont faisaient face le pays 35 , mais aussi c’était une stratégie
de barrer la route au pouvoir à l’opposition « historique » et
notamment en la personne de Ahmed Daddah leader du RFD et petit
frère de Moktar Ould Daddah le premier président du pays. Donc Ely
et ses colonels s’assureront de donner la présidence à un
incognito « peu charismatique » et resteraient dans l’ombre pour gérer
avec lui. À la fin de la transition le CMJD remettent le pouvoir aux
panoplies de problèmes 36 aux civils élus. Ely le blandos et
« démocrate », se retire de la scène politique, il n’y reviendra que par
l’irruption et la mise à pied par son cousin et son partenaire d’alors,
dans ce qu’il a construit en dix-huit mois, un régime civil. Il était
candidat malheureux aux présidentielles de 2009 face à son cousin-
ennemi Aziz.

Paragraphe II : Aziz le duros

Aziz est considéré comme un duros, toujours suivant les termes de


Schmitter, ou si vous voulez de la ligne dure de l’armée, ceux qui sont
tellement habitué au palais, qu’il était difficile pour Aziz
d’abandonner le bureau qu’il y détenait comme chef d’état-major
particulier à la présidence, il ira plus loin pour chercher le bureau du
président. Aziz est actuellement non seulement le président de la
république, mais aussi le pire ennemi de son cousin germain (de la

L’année du Maghreb [En ligne] , IV 2008, mise en ligne le 1er Octobre 2008 URL :
http://anneemaghreb.revues.org/458
34
Sa dernière nomination à un poste politique gouvernemental remonte en
décembre 1985 et certaines responsabilités de chargé de mission avec le pouvoir de
Taya. Voir MARCHESIN P., Tribus, ethnies et pouvoir en Mauritanie, Karthala,
1ère Edition, 1992, p.180.
35
« Deuxième acte », Jeune Afrique, Mai 2008 sur
http://www.jeuneafrique.com/70268/politique/deuxi-me-acte/
36
Ibid.
17

même tribu) Ely. Aziz était aussi connu pour être le commandant de la
garde prétorienne de Taya, le BASEP, c’est lui qui a déjoué deux
tentatives de coup d’État en 2003 et 2004 et il est acteur du coup de
2005. Avec son cousin ils arrangent l’arrivée d’un civil au pouvoir et
Aziz se voit récompenser par un grade de général, le premier en
Mauritanie, du chef d’état-major du BASEP et chef d’état-major
particulier à la présidence ! Ce qui fait de lui, de facto, l’homme le
plus puissant de l’armée. Dans une crise institutionnelle entre
l’exécutif et le parlement qui après plusieurs menaces de motion de
censure aux gouvernements formés et de la formation d’une
commission d’enquête contre la fondation de la femme du président,
une fronde exaspère la majorité présidentielle et empêche le nouveau
président de gouverner, des manifestations dont l’ombre de Aziz et
d’autres généraux planent fortement. Un pressentiment qui poussa le
président à limoger quatre généraux et dont Aziz n’en est pas
épargné 37. C’est le début de la rébellion des généraux et dirigés par
l’homme fort de l’armée, ses éléments du BASEP vont arrêter le
président le premier ministre et d’autres personnalités qu’ils vont
assigner à résidence, toujours à la mauritanienne, dans le calme et sans
effusion de sang, et l’accuser d’avoir fait « un coup d’État contre son
propre pays »38 . C’est ainsi qu’à la présidence du Haut Conseil d’État
(une autre version des comités militaires connus jadis), Aziz va
échanger son treillis en costume de civil pour se présenter comme
candidat victorieux aux élections de Juillet 2009 suite aux accords de
Dakar avec l’opposition. Lors de ces élections Ely, candidat
indépendant, ne récoltera que 3% des suffrages face au 52% de Aziz,

37
Sidi explique les raisons du limogeage des généraux par le fait qu’ils avaient un
projet de le destituer par la voie de ministres qui sont proche des généraux. Voir
l’article exclusif du Calame sur http://www.turess.com/fr/africanmanagerfr/120103
38
Interview à Aziz par le quotidien Français Libération, in ANTIL A. et
LESOURD C., Op.cit.
18

la partie peut commencer, la guéguerre est partie entre les cousins


germains d’une part, et avec l’opposition d’autre part.

Section II : Des oppositions qui s’opposent

Il y a l’opposition d’une manière générale et les oppositions dans leurs


particularités. Dans ces particularités d’oppositions, nous avons en bi-
pôles deux types d’opposition, nous avons d’un côté et
majoritairement ceux qui s’o pposent au régime, et de l’autre, en
minorité, ceux qui s’opposent au système ou les opposants
antisystèmes. Cependant, abstraction faite à ces pôles, c’est le
quiproquo entre eux tous, ceci est la règle.

Paragraphe I : Opposition anti régime : Les fausses alliances

Au sein du premier pôle on y retrouve les leaders significatifs de


l’opposition, à savoir le RFD de Ahmed Daddah, l’APP de Messaoud
Ould Boulkheir (Messaoud), l’UFP de Ould Maouloud, le RNRD
(Tawassoul) de Mohamed Jemil Ould Mansour , El Wiam de Boidiel
Ould Houmeid et d'autres partis peu significatif. Il y a une absence de
consensus notoire dans la stratégie qu’il faut adopter pour faire face au
régime en place. Dans cet ensemble on n’a pas la même perception à
l’égard du régime, donc pas la même réaction et pas la même
stratégie, car chaque parti ou chaque leader a des intérêts particuliers
et qui lui sont propre. Dans une période de transition gérée par les
militaires, d’aucuns peuvent vouloir que les militaires restent
longtemps pour régler les problèmes fondamentaux que connait le
pays alors que d’autre s’empressent qu’ils organisent les conditions
nécessaires pour les élections et s’en vont. Ou dans un contexte de
face à face—Sidi et Ahmed Daddah au second tour des
présidentielles, l’APP de Messaoud préfère sceller une alliance avec
Sidi au détriment de Ahmed Daddah, pour ensuite obtenir la
19

présidence de l’assemblée nationale et quelques portefeuilles au


prochain gouvernement, cela lui a permis, en tant que leader
historique et membre fondateur d’El Hor, à présider le vote de la loi
qui criminalise l’esclavage. Le gouvernement dont son parti avait pris
part, y figurait aussi d’autres partis de l’opposition décidant de
gouverner avec le parti au pouvoir, une première qu’a connue le pays
durant l’époque de Sidi. On pourrait y voir Tawassoul et UFP, 39 pour
ce dernier c’était un gage de « stabilité », mais pas le RFD et
l’AJD/MR, parce que le premier était le pair-competitor à Sidi en
Mars 2007 et aussi chef de file de l’opposition démocratique, et le
second contestait déjà clairement l’avènement d’un civil aussitôt. Cela
a beaucoup affecté l’unité de l’opposition face au putsch d’Aout 2008,
lorsque la plupart des partis d’opposition qui étaient dans le
gouvernement avec Sidi condamne le coup et demande le
rétablissement de la légalité, Ibrahima Sarr lui parlera de « prendre
acte » du putsch mais ne le condamne pas. En ce moment il noue un
accord « secret » avec Ahmed Daddah pour aller négocier avec Aziz
(putschiste), dans les 35 points que comportait la plateforme de leurs
négociations, y figurait la question de savoir si Aziz sera dans la
course pour les prochaines présidentielles mais aucun n’évoquait le
rétablissement de Sidi comme président légitime. Raison pour laquelle
Ahmed Daddah rejoindra plus tard la position du FNDD qui avait
condamné le coup pour faire front au putschiste, car ce dernier avait
fait savoir à Ahmed Daddah qu’il sera bien sûre de la course !

Pour couronner cette hétérogénéité en pseudo-homogénéité, du tous


contre le putschiste on verra Ahmed Daddah et Jemil Mansour
candidat à part aux présidentielles de Juillet 2009 et seul Messaoud
39
Déjà avant la proclamation des résultats définitifs des présidentielles de 2007,
l’UFP faisait cette demande d’un gouvernement d’union nationale
http://www.avomm.com/L-UFP-reclame-un-gouvernement-d-union-nationale-en-
Mauritanie_a2199.html
20

sera candidat d’une coalition, le FNDD. Au lendemain de la défaite de


tous les candidats de l’opposition au premier tour face à Aziz, de
nouvelles coalitions vont se former au milieu d’une crise politique,
pouvoir militaire versus opposition, sans précédent. Tel un tour de
passe-passe ou par une baguette magique, Messaoud saute du pôle de
l’opposition dont il était candidat vers un pôle qu’il va créer, la CAP
et concomitamment Ahmed Daddah rejoint le FNDD qui devient le
COD, désormais deux coalitions qui s’entraccusent de « dialoguiste »
pour la CAP et « radicale » pour le COD. Cette situation décrit
clairement la frilosité de l’opposition et son attitude face au régime en
place, quand les premiers ont une certaine confiance envers le régime
et peuvent même dialoguer avec lui afin d’obtenir un accord politique,
les autres ont une grande méfiance envers l’homme qui incarne le
régime en place.

Ce qu’il faut savoir dans cette opposition, c’est que la plupart ont été
tous appartenu à un moment donné à un même front antimilitaire,
l’UFD 40 , longtemps porteurs de projets et ont aussi fait une longue
course pour l’obtention du pouvoir, en vain, ils se voient toujours la
route barrée par les militaires. Donc pour les uns il faut être prudent,
pour les autres il faut faire avec les militaires, négocier avec eux pour
obtenir des concessions, et de surcroit des changements pour le long
terme.

40
L’UFD était la principale coalition de partis politiques face à Taya lors des
présidentielles de 1991. Elle fera scission au lendemain de leurs défaites aux
élections marquées par plusieurs irrégularités. Pour la scission de l’UFD en
plusieurs groupuscules partis, Voir MARTY M., « Mauritania : political parties,
neopatrimonialisme and democracy », ECPR workshop on parties, party system
and democratic consolidation, Avril 2011.
http://ecpr.eu/Filestore/PaperProposal/00557fd6-9166-4a93-a02d-
4a4cf050ee40.pdf
21

Paragraphe II : Opposition anti système : les acteurs en solo

Cette opposition est dite antisystème dans la mesure où elle considère


le spectre du pouvoir politique comme un pré-carré dirigé par une élite
homogène mêlant à la fois militaire, hommes politiques opportunistes
et hommes d’affaires qui défendent d’arrache-pied le statu quo, pour
cette opposition il faut que ça change.

Nous avons l’AJD/MR de Ibrahima Moctar Sarr qui n’est pas loin à la
marge, il est antisystème mais préfère passer par le système pour
atteindre ses objectifs. Ce qui ne l’empêche pas de demander aux
militaires de la transition en 2005 de rester plus de temps au pouvoir
et de régler les problèmes dont ils sont impliqués au lieu de laisser
cela au civil qui viendra, ni aussi de sceller un pacte temporaire avec
le RFD de Ahmed Daddah pour aller dialoguer avec Aziz afin de
pouvoir soutenir ou pas ce dernier, alors que le FNDD descendait sur
le terrain pour se tenir face aux putschistes de 2008. Il peut aussi
rejoindre la majorité présidentielle au parlement avec l’UPR de Aziz
pendant que l’opposition « radicale » s’acharnait sur le pouvoir,
l’AJD/MR va finalement quitter après un an de cohabitation, parce
que le régime « tue ses enfants »41 . Tout cela est possible avec
Ibrahima Sarr, car pour lui l’important « n’est pas de gagner la
présidence, car il sait qu’il en est très loin dans une Mauritanie comme
celle-ci, mais c’est juste pour faire passer le message et il le pose à
l’assemblée »42 , Maintenant l’AJD/MR se dit être « berné » à chaque

41
Ibrahima Sarr fait allusion ici aux manifestations de touche pas à ma nationalité
en 2012, il y’eut mort d’homme à Maghama dans une région du Sud de la
Mauritanie et des activistes et étudiants torturé sévèrement pour avoir manifesté
contre l’enrôlement.
42
Source conférence de presse de l’AJD/MR du 08 Septembre 2015
22

fois qu’ils sont dans des coalitions, préfère faire cavalier seul et ne
sont ni dans le COD—FNDU 43 , ni dans la CAP.

Les autres acteurs considérés comme antisystèmes sont Biram Dah


Abeid (Biram) du PRAG et Samba Thiam du FPC 44, qui sont
différents de Ibrahima Sarr dans leurs situations et approches avec le
régime. Ces deux leaders partagent quelques similarités, c’est que tous
les deux dirigent des organisations qui sont dans une situation
d’illégalité, ils veule nt tous les deux « déconstruire le système » qu’ils
qualifient de « système beïdane 45 », le combat communautaire est leur
cheval de bataille et sont considérés par leurs adversaires comme des
« extrémistes radicaux ». Ces deux leaders sont, de facto, des acteurs
et des leaders d’opinion dans le paysage politique du pays, même si
leurs partis et mouvements sont, dans ce qu’appel Marchesin, le
« para-légale », c’est-à-dire que les autorités ont refusé leur existence
de jure, mais tolèrent leur existence de facto, ou ne parviennent pas à
les éliminer de la scène politique du fait de leurs activités et des
projets qu’ils portent et crient Urbi et orbi. En outre ils se voient
éloignés de la position des acteurs de l’opposition anti régime et ont
une perception, à la fois de l’opposition qui dialogue et de celle qui
hésite à dialoguer avec le pouvoir, comme des leaders qui sont
uniquement intéressés par « l’accès au pouvoir », « les conditions
générales pour des élections transparentes », mais les problèmes de
fond concernant le pays ne les intéressent pas, ils veulent juste que
« le système change de visage ». Alors que pour eux, ce qu’il faut
c’est un « changement radical » dans une Mauritanie « inégalitaire »,
il faut que le système change, c’est ça l’essentiel pour eux, résoudre le
problème de l’unité nationale, à savoir « la question de l’esclavage »
43
Voir Infra note 111.
44
Ces deux partis existent de fait, mais leurs demandes de se constituer en parti
politique a été refusé par les autorités administratives publiques
45
Beïdane veut dire la communauté des Maures ou « Arabo-berbères ».
23

et celle de la « cohabitation » entre les différentes communautés du


pays et non faire des dialogues qui portent sur « des questions
superficiels ».

Enfin, la chronique du jeu politique mauritanienne est la suivante—


l’armée détient le pouvoir et l’opposition court derrière ce dernier sans
pour autant l’obtenir. Les dissensions, conflits internes, absence de
priorités communes, conflits de leadership… loin d’être des signes de
pluralisme, sont les conditions qui déterminent l’interaction dans
l’opposition politique, et cela en face d’un homme qui accorde peut
d’intérêts aux compromis.
24

Chapitre II : Le général (E/R), l’opposition


hétéroclite et le régime

Cette opposition généralisée est un facteur explicatif de la position de


force du président (ex général putschiste) et son mouvement de l'UPR
face à l’opposition par rapport aux réformes à engager. Ces dernières
devaient débuter depuis le lendemain de l’élection de Juillet 2009,
selon les accords de Dakar et qui constitueraient la vraie phase de
transition du pays ou théoriquement la seconde transition. Cependant,
ces accords sont oubliés (I) et cela compromet la démocratisation (II).

Section I : Les accords de Dakar oubliés et les


« radicaux » à la marge

Il est évident que l’armée est l’entité la plus organisée de la société,


cela, combiné à la frilosité de l’opposition, fait que cette dernière a
toujours manqué de saisir la chance d’une alternance (I) que les lignes
dures du régime ne manque de faire échouer (II).

Paragraphe I : Les opposants : les coups manqués de


l’alternance
Théoriquement, la désunion de l’élite est facteur d’instabilité du
régime politique 46 , c’est-à-dire le pays connait continuellement des
oscillations entre autoritarisme, putsch, démocratisation précaire,
putsch à nouveau et crises répétées. En somme le pays connait un
modèle cyclique, tel l’explique Huntington, « l’alternance entre
démocratie et autoritarisme constitue le système politique du pays » 47.
Cependant cette désunion à une origine, c’est généralement « le
46
HIGLEY J. et BURTON M. Op.cit.
47
HUNTINGTON S. P., Troisième vague, les démocratisations de la fin du XXème
siècle, Nouveaux Horizons, 1991, p.40.
25

processus de formation des État-nations »48 , des États comme la


Mauritanie dont les frontières actuelles ont été artificiellement tracées
il y a une forte chance que l’élite soit disparate à cause des différents
régimes qui se sont succédés au pouvoir et des politiques qui ont été
menées à l’égard des citoyens, le problème du statenes problem49est
ici très patent. Et cela a tellement contribué à la division des opposants
qu’un observateur avéré nous confiait que « l’opposition a toujours
manquée la chance de réaliser l’alternance, lors du coup d’état
manqué du 08 juin 2003, si l’opposition était consensuel il pourrait
prendre le pouvoir, car deux jours durant le pays était déstabilisé
pourquoi ils ne devraient pas en profiter pour faire descendre les gens
dans la rue et prendre le pouvoir ? »50 . En 2007 ils ont encore refusé
l’alternance il n’y a pas eu de front commun autour de Daddah, le seul
de l’opposition passé au second tour des présidentielles face au
candidat des militaires. Le problème c’est d’abord qu’ils trainent
encore avec eux des différends du passé, car le malheur c’est qu’ils
ont tous appartenu à une même organisation politique, l’UFD, en 1992
et c’était du « Tous contre Taya », l’union s’est mal terminé, depuis
lors chacun ne digère pas l’autre. En outre, le problème dans
l’opposition mauritanienne, c’est que toutes les expériences de
changements ou de réformes majeurs qui se sont produites ont été
l’initiative des militaires, ils attendent plus du régime en place qu’ils
ne proposent d’alternatives. Cependant, l’opposition semble apprendre
la bonne leçon de ces erreurs du passé, car cet état de fait de
l’opposition semble s’éclipser au profit d'une union, précaire, mais
mieux que l'habituelle, à l’exemple des réactions de l’opposition au

48
HIGLEY J. et BURTON M. Op.cit. p.249
49
Le Stateness problem Voir LINZ J.J. Et STEPAN A. Op.Cit.
50
En effet pendant deux jours les institutions politiques du pays étaient vaquées et
l’anarchie totale régnait au sein de l’armée, Voir OULD MEYMOUN M. L., La
Mauritanie entre le pouvoir civil et le pouvoir militaire, l’Harmattan, 2007, p.140
26

lendemain des élections de 2009. Le COD, coalition de partis


politiques formés au lendemai n des élections de Juillet 2009, dont on
pouvait remarquer des partis significatifs tels que l’UFP de Ould
Maouloud, le RFD de Ahmed Daddah et le Tawassoul de Jemil
Mansour, exigeront l’application du titre VII paragraphe 4 des accords
de Dakar, qui en fait stipulait que « cet accord ne met pas fin à la
poursuite du Dialogue national sur les autres points qui peuvent
renforcer la réconciliation nationale et la démocratie » 51. Donc ces
accords avaient un double objectif à la fois de dénouement de la crise
politique post-putsch et de la possibilité d’une démocratisation
consensuelle. Ce que le régime de Aziz, désormais légitime grâce aux
accords, balaya d’un revers de la main en estimant que ces accords
n’avaient plus effet et surtout que l’opposition n’avait pas reconnu les
résultats de ces élections. Il faut comprendre ici que, primo, ces
accords était un simple moyen pour ce camp de se légitimer par l’issue
de ces accords grâce aux élections qui s’organiseront afin de rétablir le
statu quo ante, à savoir le contrôle du pouvoir par des éléments de
l’armée. Secundo faut noter qu’il était dans l’intérêt de l’opposition
d’exiger l’exécution des dispositions des accords de Dakar après sa
défaite, car en réalité elle ne pensait jamais perdre les élections face à
Aziz. Enfin il faut savoir que si ces accords ont été un petit pas pour
Aziz afin donner une légalité à un pouvoir déjà acquis de fait, et qui
était piégé entre une mobilisation interne sans précédent du FNDD qui
demandait le rétablissement de la légalité constitutionnelle et une
pression externe par la condamnation unanime du putsch par la
communauté internationale 52. Ils fussent, par contre, un grand pas
pour l’opposition, ils voyaient ces fameux accords de Dakar comme

51
Accords cadres de Dakar entre les grands pôles politiques mauritaniennes signés
par le RFD, le FNDD et l’UPR, p.4/6, Annexe.
52
Les différentes réactions des organisations internationales et d’autres pays
partenaire de la Mauritanie http://www1.rfi.fr/actufr/articles/104/article_69671.asp
27

une victoire première de la longue lutte opposition versus militaires,


pour la première fois dans l’histoire politique du pays, l’opposition
s’est levé contre un putsch et a tenu tête aux putschistes. Donc cela fut
une avancée notoire pour l’image de l’opposition car se tenir contre la
volonté des putschistes jusqu’à ce que la communauté internationale
s’intéresse à la question et délègue un GIC pour la Mauritanie afin de
dénouer la crise, c’est inédit ! Enfin, comme nous l’a confié, lors d’un
entretien, le représentant du FNDD à Dakar, « les accords de Dakar
était une victoire pour nous, parce qu’enfin on nous reconnaissait à
égalité avec les putschistes ». Hypnotisée, « l’opposition était
tellement sûre d’elle qu’elle ne se préoccupait pas de l’accord,
l’essentiel pour elle c’était le jour du scrutin parce qu’elle était sure de
gagner » et il reconnait que ces accords était un tour de plus que les
militaires les ont joué « nous avons réussi à mettre en échec le coup
d’État mais nous en avons pas profité pour prendre le pouvoir ».
Pendant la campagne du rahil (dégage version mauritanienne) sc andé
dans les rues de Nouakchott par le COD, la CAP elle cherchait des
canaux pour flirter avec le régime de Aziz et Biram incinère ce qu’il
appelle le « code négrier » des « fausses interprétations » d’écrits
Malikite sur la légalité de l’esclavage. Entre le blocage politique créer
par le refus des hommes au pouvoir d’appliquer les dispositions post-
élections des accords et l’entrée en illégitimité des parlementaires par
l’expiration de leurs mandats de cinq ans, l’UPR avec Aziz, convient à
un dialogue dans le tas pour à la fois se délivrer de ce dialogue dont
l’opposition dit « radicale » le poursuit depuis, mais aussi de sortir les
parlementaires de l'impasse juridique où ils se trouvaient. La COD dit
non et La CAP dit oui, ce dialogue « séparé » entre la majorité et une
partie de l’opposition va aboutir à un accord politique du 11 Octobre
201153 qui va se traduire de l’adoption de l’ensemble de ces lois

53
L’accord portait sur la révision de la constitution du 20 Juillet 1991 modifiée par
28

organiques et notamment celle du 20 Mars 201254 relative aux


amendements constitutionnels. Pour l’UPR et la CAP tous les quatre
points qui figuraient dans le paragraphe 4 des accords de Dakar, à
savoir le renforcement des assises démocratiques et la prévention des
changements anticonstitutionnels, la promotion de l’État de droit et la
bonne gouvernance, la question de l’arrangement politique ou toute
autre question concernant la cohésion nationale et la stabilité… sont
réglés, fini la transition, maintenant la voie est ouverte pour les
prochaines élections, pour la COD non. La lecture qu’il faut faire ici,
c’est que comme présenté ci-dessus, Aziz est, dans la pratique, un
hard-liner, il est de cette ligne dure des partisans du statu quo, c’est
du tout sauf l’opposition, et que les accords de Dakar était ici qu’une
procédure par laquelle il faudrait passer pour finir avec cette
opposition qui pousse des ailes, alors faut en attirer les moins
« radicaux » et essayer d’éloigner, le plus possible, les récalcitrants. Il
faut enfin signaler que l’armée est l’entité la plus organisée de la
société, c’est le lieu de la discipline par excellence. Cela face à une
opposition dont la frilosité et l’intra-opposition est la condition
générique. Ce qui devient contreproductif et surtout pour tout projet
de changement profond. Et cet accord politique du 11 Octobre 2011
entre une partie de l’opposition, au détriment de celui de Dakar avec
toute l’opposition, rend plus radical les opposants absents du dialogue
dans leurs positions. Parce que désormais ils invoquent sans
équivoque le manque de confiance depuis Dakar 55. Cette situation est

referendum en 2006, la loi relative aux partis politiques (le financement public des
partis), de l’accès des femmes aux mandats électoraux par une liste de 20%, de
l’interdiction des candidatures indépendantes et du nomadisme politique et de
l’élargissement du nombre de sièges de la chambre basse de 95 députés à 146.
54
Pour les questions qui figuraient dans la loi organique d’amendement à la
constitution de Mars 2012, Voir Annexe Loi constitutionnelle 2012-015.
55
Déjà la COD disait par la voix de son porte-parole ne pas participer aux
législatives à venir tant qu’ils n’ont pas de garanties communes.
http://cridem.org/C_Info.php?article=625624
29

telle jusqu’au boycott des législatives et des présidentielles par la


plupart des acteurs de l’opposition56.

Paragraphe II : Les lignes dures de l’opposition et le poker


face du raïs
Le principe du « test de la rotation 57 » est une mesure essentielle dans
l’étude des démocratisations et de consolidation. Il est clair que les
élections sont des échéances significatives dans la mesure où elles
servent d'indicateurs d'alternance. Les premières élections des
autorités politiques à l’issue du processus transitoire constitue le
signal de la fin du processus transitionnel et le début d’une phase de
consolidation ou de « seconde transition » selon O’donnell. Cette
phase ne peut être testée, de manière effective, que par les prochaines
échéances électorales, car elle nous renseignerait de l’habituation des
acteurs ou non, si réellement les acteurs ont la capacité de croire aux
règles démocratiques qui de vient la seule règle du jeu. Là; se situe la
différence entre la période transitoire où les acteurs feront les règles et
la période post-transitoire où le comportement des acteurs face aux
règles préétablis détermine leurs comportements. Nous avons vu le
comportement de Aziz dans la période post-accord de Dakar et le
refus de se comporter selon les dispositions post-transitionnelles des
accords. Donc, les élections législatives de Novembre 2013 qui ont vu
principalement la majorité de l’opposition, à savoir l’opposition des
accords Dakar 58, les boycotter et aussi les présidentielles du 21 Juin

56
Lors des législatives, l’opposition du COD les boycotte sauf Tawassoul de Jemil
Mansour qui se désolidarise de la coalition en participant et en argumentant que
« c’est un moyen de lutter contre la dictature de Aziz », la CAP participera aussi et
l’AJD.MR.
57
Le teste de rotation dans les démocratisations exposées par HUNTINGTON S.,
Troisième Vague, Les démocratisations de la fin du XX ème siècle, Nouveaux
Horizons, 1991, p.265.
58
Sauf APP de Messaoud membre de la CAP. Supra note 50
30

2014, boycottées par la majorité des acteurs politiques 59 de


l’opposition, auraient été un bon baromètre pour tester l’habituation
démocratique des acteurs et la confiance aux règles du jeu
démocratique, hélas, il n’en est pour rien car avec une participation de
56% Aziz triomphera avec ses 81,89% 60 ! Un score qui rappelle celui
de Al Sisi en Egypte ou de Bouteflika en Algérie, face aux miettes des
autres candidats. Ce qui est à retenir ici c’est qu’il y a de
l’immobilisme chez les acteurs politiques au pouvoir, qui se manifeste
par un jeu de poker face et une radicalisation chez l’opposition.
D’abord, avec Aziz et l’UPR, il est difficile de deviner les cartes qu’ils
ont entre leurs mains, si réellement ils veulent d’une démocratisation
consensuelle ou d’un rétablissement du statu quo ante ? Déjà les
accords d’Octobre 2011 ont été décriés et dénoncés par les mêmes
acteurs de la CAP qui l’avait signé, il se dit trahit et ceux de Dakar
sont aux oubliettes. Ensuite, le refus perpétuel de l’opposition est
d’abord expliqué par l’amère expérience de Dakar qui est comme une
pierre dans la gorge qu’ils ont du mal à avaler, combiné par une
assurance réelle qu’ils n’ont plus rien à gagner avec ce raïs dont ils
n’ont plus confiance, mieux vaut donc un maintien dans sa ligne dure
qu’un pacte avec le diable. Dans tous les cas, l’essence de la
démocratie c’est le compromis, la concertation entre toutes les forces
politiques significatives, surtout pour un pays comme la Mauritanie
qui a de longues périodes d’autoritarisme donnant naissance à des
problèmes sociaux fondamentaux. Les amendements qui ont été faits
ont été une avancée dans le cadre de l’institutionnalisation
sociopolitique et des pratiques démocratiques. Car ils ont permis

59
Les présidentielles seront boycotté par tous les opposants historiques en la
personne de Ahmed Daddah, Messaoud et Ould Maouloud, les seuls figures de
l’opposition qui y prendront part sont Ibrahima Moctar Sarr et Biram Dah Abeid,
indépendant, car son parti n’est pas reconnu légal.
60
Communiqué de la CENI du 22 Juin 2014 sur les résultats
http://www.ami.mr/fr/index.php?page=Depeche&id_depeche=27435
31

l’accès des femmes aux mandats électoraux, l’élargissement de la


représentation, la criminalisation de l’esclavage et des putschs, la
reconnaissance de la diversité culturelle…etc., cependant ce dialogue
et les accords qui y ont résulté n’engageait que quelques acteurs 61, et
c’est loin du dialogue national inclusif serein entre toutes les
sensibilités nationales pour le fondement d’une démocratie stable.
Alors dans cette situation, le régime quand l ne se consolide pas, cela
deviendrait autre chose, fort similaire à une démocratie, mais qui ne
l’est pas.

Section II : Une démocratie qui se consolide ou un


autoritarisme libéral
On a vu l’expérience « démocratique » des années 1991 avec Taya, tel
une démocratie de façade, se fait ressentir aujourd’hui avec le régime
dirigé par Aziz (I), et cela peut altérer la question de la consolidation
démocratique (II).

Paragraphe I : Le risque d’un remake de l’ère Taya


Il est quasi-unanime que l’expérience démocratique durant le régime
de Taya (1991-2005) était une période qualifiée politiquement parlant
d’une « démocratie de façade », cela par ses diverses contradictions
dans la démarche de la démocratisation entreprise. À savoir la
confiscation et la manipulation électorale grave 62 , les arrestations
multiples de leaders de partis politiques, leurs emprisonnements sur
des accusations douteuses, les dissolutions abusives de partis
politiques, le verrouillage de l’alternance mécanique du pouvoir au
niveau de la constitution, le refus de reconnaitre des crimes commis

61
Seul 360 participants avec respectivement 60 participants par parti politique ont
pris part à ces rencontres, la société civile et les autres partis n’y ont pas pris part
62
Pour les irrégularités lors des élections de l’ère Taya, Voir OULD CHEIKH A.
W. « Des voix dans le désert. Sur les élections de « l’ère pluraliste » », Politique
Africaine, N° 55, Octobre 1994
32

du temps de son règne et de surcroit refus de toute solution visant à


gérer ce problème…etc.

Avec l’interruption de l’expérience « démocratique » de 2006-2008,


même si cela a débuté par une expérience tant soit peu procédurale 63,
la rébellion des généraux du 06 Aout 2008 était un coup sec à un pays
assoiffé de longue haleine d’expérience démocratique. Cette phase
suivant l’élection de Sidi qui constitua théoriquement une phase de
consolidation après le processus de transition qui avait pris fin à son
investiture en Avril 2007, est interrompue par un acte anti
constitutionnel. Ce qui s’attribue théoriquement à un comportement
« attitudinal » contraire aux procédés de la routinisation démocratique,
du moins si l’on se réfère aux travaux de Linz et Stepan dans leurs
travaux théoriques et comparatifs sur la démocratisation et la
consolidation.

Mais aussi un autre indice de contrôle de la démocratisation est


qu’après la transition qui est marquée par l’élaboration des « règles du
jeu », à la fin de ce processus, celui qui suit est fortement caractérisé
par l’encadrement des acteurs aux règles préalablement établies.
Autrement dit, le fait que parmi les acteurs politiques il réside un
comportement d’ignorance ou de non regard aux règles du jeu,
constitue un signal fort de l’échec d’une consolidation démocratique.
Aziz l’homme qui avait concocté avec les acteurs de l’opposition le s
règles du jeu transitionnel, autrement dit les accords de Dakar de
sortie de crise, s’en est donné à volonté au non-respect de ces règles
du jeu. Il entérine en refusant de faire sa déclaration « publique » de
son patrimoine, ni celui des membres de son gouvernements et

63
L’irruption des militaires durant l’opération de campagne et l’encouragement des
candidatures indépendantes et rassurantes étaient compromettantes à une vraie
alternance du règne des militaires. Voir le rôle des militaires durant le contexte
transitoire et électoral avec BEN SAAD A., Op.cit., paragraphe 11 à 15.
33

pourtant la loi 2007-054 relative à la transparence financière de la vie


publique l’exige dans ses articles 2 et 364. Il ne se limite pas là, il
s’adonne à une stratégie d’isolement de cette opposition qu’il
« méprise » tant et aimerait voir aller à la retraite, cela est matérialisé
par la volonté ferme, d’ignorer les clauses du paragraphe 4 du titre 7
des accords de Dakar, mais d’en imiter d’autres, tout imaginé. Ce qui
l’emmène a flirté avec une partie de l'opposition et organise avec elle
un dialogue nationale politique qui donnera des amendements
institutionnels, le clou est enfoncé.

Mais en se limitant là, peut-être qu’il ne serait pas suffisant de


démontrer qu’il y a le pressentiment d’un remake du régime de Taya,
une « démocratie de façade » ou si vous voulez un « autoritarisme
libéral », on s’explique. Dans une perspective de comparaison, on se
rend compte qu’il y a en effet une imitation, à quelques différences
près du régime de Taya par celui de Aziz. Durant le régime de Taya il
y avait une violation flagrante des libertés publiques et notamment
celles politiques malgré un arsenal juridique les garantissant 65. La
création de partis politiques et l’activité politique étaient (im) possible,
les élections étaient boycottés par l’opposition et cela profitai au parti
au pouvoir de rafler tous les suffrages, les arrestations de leaders à
cause de leurs opinions étaient fréquentes, il y avait une presse écrite
non régime qui se frayaient un chemin, mais tantôt censurés 66 , et enfin
il y avait un certain culte de la personnalité du chef de l’exécutif
autour de l’État et du parti.

64
Voir la loi du 18 Septembre 2007 relative à la transparence de la vie financière
publique
http://www.pogar.org/publications/ac/2012/legal%20compendium/Mauritania_Law
%20on%20Financial%20Transparency%20in%20Public%20Life_54_2007_FR.pdf
65
L’article 10 de la constitution du 20/07/1991, l’ordonnance 024-91 sur les partis
politiques, modifié en 2001 et 2012, et ordonnance 023-91 sur la liberté de la
presse, faisaient tous partie du corpus juridique du pays depuis 1991.
66
Parmi les deux journaux écrits francophone qui existaient, La Tribune et le
Calame, ce dernier se targue d’être le journal le plus censuré.
34

Les mêmes manifestations, à la différence près, sont perceptibles. Une


violation quasi-quotidienne des libertés publiques : Interdiction de
manifestations à coloration anti-Aziz, répression des récalcitrants, à
l’exemple du groupe de réfugiés qui a marché de Boghé à Nouakchott
pour réclamer ses droits67 . L'interruption Mani militari des
assemblées générales de certains opposants, l'abstraction à la loi sur
les partis politiques 68 venant du ministère de l'intérieur soit en gardant
le silence sur la demande de constitution de parti politique, soit en y
adressant une fin de non-recevoir avec des motifs peu acceptable, cela
malgré la très timide révision69 en 2012 suite à l’accord politique avec
une partie de l’opposition. Les détenus d’opinion non plus
n’échappent pas à cette intransigeance du ministère de l'intérieur,
qu’ils soient artistes-activistes, hommes d’affaires ou leaders
politiques si vous dérangez, le risque de passer des séjours en prison
est plausible. Concernant les médias, si Taya censurait sans gêne ceux
qui ne se limitaient pas à leur place, avec le régime de Aziz c’est
l’autocensure avec des menaces tacites qui vous obligent à revoir ce
que vous dites et ce que vous écrivez 70, car c’est lui le chef71 . Enfin il
y a une sorte de culte de la personnalité et une forte concentration des
pouvoirs entre les seuls mains du président, car selon lui « trop de

67
Sur la répression de cette marche voir http://www.kassataya.com/vous/13450-
mauritanie-la-longue-marche-des-rapatries-du-senegal-de-boghe-a-nouakchott
68
En fait l’article 12 de l’ordonnance précité sur les partis politiques stipule en
substance que le ministère de l’intérieur ne peut garder le dossier que pour un délai
n’excédant pas deux mois. Alors dans ce cas le dossier a été gardé durant huit mois
avant que la réponse négative à la reconnaissance légale du parti ne tombe.
69
Les amendements ré-amendé sur l’article 18 de la loi sur les partis politiques ne
concernaient que le financement des partis introduit en 2001
70
En fait la HAPA fit un communiqué qui mettait en garde les journalistes à revoir
leur contenu http://cridem.org/C_Info.php?article=674375
71
Dans un plateau télé au palais, le président demande à un journaliste désireux de
prendre la parole, de se taire, face à l’entêtement de ce dernier, il rompt sine die le
directe, Voir cette vidéo qui a fait le buzz sur les réseaux sociaux
https://www.facebook.com/mauritanie.insolite/videos/977319955611874/
35

décentralisation n’est pas bien » 72, et l'indépendance du pouvoir


judiciaire vis-à-vis de l'exécutif est tant décriée par l'opposition et des
membres de l'ordre judiciaire 73 , le baisemain 74 au président-monarque
vient confirmer un régime reposant sur le support d'une demande
despotique 75 comme l'affirmait le professeur Abdel Weddoud Ould
Cheikh. Enfin, le parti de la majorité, l’UPR, pratique les mêmes
calcules politico-tribales avant les scrutins 76 que le PRDS de Taya en
faisait avant.

Sur ce, nous ne voulons pas nous adonner à une aventure prédictive
périlleuse, car elle n’est pas l’œuvre de la science politique,
cependant, nous sommes en mesure de faire ressortir plusieurs
manifestations quasi-quotidiennes de la vie sociopolitique, mises à
part, deviennent attentatoires à toutes démocratisations. A long terme,
cela devient beaucoup plus évident de constater que ça sent de la
démocratie à la version Taya que d’une aventure d’habituation
politique. Cette comparaison est justifiée par le fait qu’il est nécessaire

72
Lors d’une rencontre avec la jeunesse en Mars 2014, Aziz expliqua en substance
que l’État est trop décentralisé et qu’il faut plus de concentration du pouvoir.
73
Le rapport accablant sur la justice que le bâtonnier de l'ordre des avocats, Me
Ould Bouhoubeiny, avait établi en listant un ensemble de violation des dispositions
législatives au niveau du pouvoir judiciaire http://fr.alakhbar.info/4006-0-Le-chao-
institutionnel-de-la-Mauritanie.html. Ou les grâces présidentielles inattendues et
floues sur des faits illicites http://fr.alakhbar.info/6158-0-Mauritanie---Drogue-les-
reseaux-et-le-pouvoir-de-Aziz.html
74
Un baiser à la main du président
http://midad.info/2015/06/%D8%B4%D8%A7%D8%A8-
%D9%85%D9%88%D8%B1%D9%8A%D8%AA%D8%A7%D9%86%D9%8A-
%D9%8A%D9%82%D8%A8%D9%84-%D9%8A%D8%AF-
%D8%A7%D9%84%D8%B1%D8%A6%D9%8A%D8%B3-
%D8%B5%D9%88%D8%B1%D8%A9
75
La demande despotique s'explique, d'une part, par la passivité d'une majorité non
négligeable du peuple mauritanien à toujours être prêt à applaudir et soutenir les
régimes autoritaires qui se sont succédés au pouvoir, et d'autre part par le fait que
cette demande despotique est sous-jacent à un système de valeurs islamique qui
encourage cette attitude. Voir OULD CHEIKH A. W., «La demande despotique»,
Academia, 1993. https://www.academia.edu/6157212/La_demande_despotique
76
Rapport confidentiel publié par le site en ligne Alakhbar sur la mission de l’UPR
au Hodh El Gharbi, Voir http://www.fr.alakhbar.info/files/upr-rapport-hodh-
chargui.pdf
36

de faire une nette distinction entre un régime démocratique ou en


consolidation démocratique et ce qu’appel O’Donnel et Schmitter un
« Dictablandas », un « Democraduras » ou simplement de
« l’autoritarisme libéralisée »77 . Ce qui veut dire qu’il ne suffit pas
d’installer une certaine liberté, et croire que le chemin de la
démocratisation est balisé, alors que des stratégies sont derrières les
élections pour écarter ses concurrents, ou faire surgir des règles qui
restreignent les droits de certains citoyens du pays. Et lors de nos
entretiens, la majorité des acteurs politiques et de la société civile
interviewée s’accordent sur le fait que seule la liberté d’expression est
considérée jusque-là comme un acquis, tout le reste s’apparentant à
une consolidation démocratique n’en est pas encore.

Paragraphe II : Des problèmes de la consolidation


Loin de s’inscrire dans une allure de « Machiavel démocratique »78 tel
Huntington avec ses guides à l’usage de la démocratisation, il est
intéressant de faire, à partir d’un matériau paradigmatique qui
constitue notre référence théorique, un distinguo entre ce qui pourrait
ressembler à une « Illusio démocratique »79 par rapport à une vrai
routinisation démocratique.

Un régime de consolidation se résume par cette phrase « lorsque la


démocratie est la seule règle du jeu, the only game in the town »80,
cela signifierait selon Linz et Stepan qu’il y a trois dimensions

77
O’DONNELL G. et SCHMITTER P., Op.cit.
78
HUNTINGTON. S. P., Op.cit. In Préface.
79
Le concept « d’ilusio » emprunté par l’auteur à Bourdieu veut expliquer ici que
la démocratie n’est pas effective ni réelle, mais attire tout le monde et qu’on en
parle et pousse l’essentiel de la population à faire semblant d’être dedans sans pour
autant que cela existe réellement. L’étude s’appuie sur une théorie autre que celle
de la transitologie. Cependant, l’étude constitue une des réalités de la démocratie à
la mauritanienne. In OULD AHMED SALEM Z., « La démocratisation en
Mauritanie, une « ilusio »postcoloniale ? », Politique Africaine, Karthala, 1999/3
N° 75, pp.131-146
80
LINZ J. J. et STEPAN A. Op.cit., p.5
37

« comportementale, attitudinal et constitutionnel » 81. La première


attitude vis-à-vis des acteurs et que le régime élu ne doit plus être
préoccupée d’oscillations ou d’instabilité venant d’autres groupes
opposés. La deuxième est plutôt psychologique vis-à-vis des acteurs et
plus large, de la population, est que face à de grave crises les
« paramètres du jeu démocratiques » sont en mesure de solutionner
ces crises. Et la dernière est plutôt constitutionnellement canonique,
les acteurs, non seulement s’abstiendront de violer les normes établies,
mais ils croiront fermement au pouvoir de ces normes de solutionner
les crises que connaitront le pays. Ce qui est encore difficile dans
cette période post-putsch de 2008 en Mauritanie. La raison est que la
première des attitudes, n’est pas annoncée ni souhaitée, cependant la
prégnance des structures (mouvements et partis politiques)
revendicatrices antisystèmes dans le champ politique mauritanien et
leur quasi-inobservation des règles qui se font entre les autres acteurs,
prédiraient un tel comportement, à savoir la destitution du système si
possible. La seconde aussi n’est pas observée parmi les acteurs, car
ces derniers actuellement dans une crise politique fragmentaire, ont un
leitmotiv qui appel les autorités au pouvoir de le quitter, car
« illégitime » cela sans regard des règles constitutionnelles, à savoir
demander au pouvoir de quitter sans la fin de son mandat. Cela est
enfin renforcé par la peur qui plane dans certains acteurs de
l’opposition que ces autorités ne respectent pas la constitution et
chercheront un supplément de mandat inconstitutionnel. Donc entre
l’inobservation des règles et la peur du non-respect des règles du jeu
par les acteurs au pouvoir, il y a un climat délétère d’une
consolidation menacée qui s’installe. En outre un autre élément est à
suivre avec précaution dans la période transitionnelle et de

81
Ibid. p. 6
38

consolidation, c’est le Stateness problem82 . Cela veut dire que la


question nationale, le polity83, ou ceux qui vont constituer la
communauté politique et qui sont sommer à donner une légitimité à
l’ensemble des gouvernants, est cruciale dans une démocratisation.
Surtout lorsque celle-ci se fait dans un État qui a précédé la formation
de la nation, et c’est le cas de la Mauritanie qui est un État
pluriethnique, auquel la formation des frontières est artificielle,
s’opposant carrément à la formation d’un État-nation. Il s’avère qu’un
État dans lequel coexistent un peuple avec une diversité culturelle ou
un peuple avec des communautés, le succès de la démocratisation est
fortement dépendants du degré de cohésion entre ces différentes
communautés et de la manière dont ces communautés ont réagi ou
réagissent avec le pouvoir en place. 84

82
LINZ J. J. et STEPAN A. Op.cit. Pour d’amples développements sur le stateness
problem Voir Infra.
83
Ibid., p.16
84
Pour le tableau descriptif. D’interrelation entre l’État, la nation et les
conséquences par rapport à la démocratisation, LINZ J. J. et STEPAN A, Op.Cit.,
p.36. C’est nous qui traduisons. Tableau en Annexe.
39

Deuxième partie : De timides


amendements pour de sérieux problèmes

Après avoir étayé l’interaction entre les différents acteurs politiques et


le résultat de cette interrelation par rapport au processus de
démocratisation, nous allons, dans cette seconde partie, traiter dans un
premier chapitre les facteurs bloquant à la démocratisation et dans le
second chapitre des institutions de démocratisations déjà existantes et
qui sont à renforcer.
40

Chapitre I : Amendements et lois face aux tares


sociales: les obstacles à la démocratisation

Après avoir discuté de la capacité des acteurs à trouver un consensus


par rapport aux différents problèmes sociaux que rencontrent le pays,
nous allons traiter ces questions qui se dressent face à toute volonté de
changement vers un régime plus respectueux de l’État de droit, de la
justice, de la responsabilité des autorités devant leurs actes, il s’agit du
stateness problem.

Section I : Les problèmes sociaux premiers: quelle


solution normative ?
Parmi ces questions ou problèmes de fond comme l’appellent certains
politiques, y figure les questions telles que le règlement du passif
humanitaire (I) et la question de « l’esclavage » (II), qui aujourd’hui,
hantent encore le pays et revient de façon récurrente à tout débat
d'envergure nationale

Paragraphe I : Génocide ou passif humanitaire : victimes


versus bourreaux
Dès le lendemain de l’indépendance, « la Mauritanie, un complexe
géopolitique » ou pays « trait-d’union »85 , fait face au problème relatif
au vivre ensemble de plusieurs communautés, culturellement
différente, sur un même territoire. Entre la promotion d’un État
plurielle par la reconnaissance de sa diversité culturelle

85
Les termes « complexe géopolitique » appartiennent à Ali Ben Saad et « trait
d’union » à Philippe Marchesin, l’utilisation de ces adjectifs signifient que la
Mauritanie dans sa position géographie et humaine est un carrefour entre le monde
arabe ou le Maghreb et l’Afrique noire, ce qui fait d’elle une spécificité
géopolitique et culturelle. Voir BEN SAAD A., « Mauritanie, territoire de larges
et de liens », Dossier Mauritanie : le devenir d’un État charnière, Maghreb-
Machrek, n°189, Automne 2006. p.8 et MARCHESIN P. Op.cit.
41

(Halpoulareen, Hassanophones, soninké et wolof) et le forcing d’une


hégémonie communautaire par l’assimilation, les premiers
gouvernants choisissent la deuxième option. Ce choix fut le péché
originel qui a plongé le pays dans ses moments les plus tristes et qui
hante encore la cohésion sociale du pays.

La grève des élèves noirs en Janvier 1966 contre le décret


d’application de la loi du 30 Janvier 1965 relative à l’obligation de
l’enseignement de l’arabe dans le secondaire, se soldera par des
émeutes qui feront 6 morts et 70 blessés. A la solidarité des
fonctionnaires noirs qui publient le manifeste des 19, « premier
manifeste politique négro-africain »86 , qui brossa un tableau d’une
hégémonie de « l’ethnie maure » sur les négro-africains par la
fameuse mythe-règle du quart 87. Vingt ans après, en Avril 86 les
FLAM, union de plusieurs organisations des négro-mauritaniens,
publient « Le manifeste du négro-mauritanien opprimé » qui qualifie
« d’apartheid » « le système beïdane ». Début septembre la
collaboration entre Djibril Ould Abdellahi, appelé communément
Gabriel Cimper et très redouté ministre de l’intérieur, et Ely patron de
la DGSN, permettra l'arrestation de plusieurs auteurs de la publication
et de l’intelligentsia négro-africaine, c’est le départ d’une expédition
judiciaire, une quarantaine de négro-africains seront jugés et
condamnés à de lourdes peines. Le 22 Octobre 87, une tentative de
putsch d’officiers négro-africains déjoués ouvre la chasse aux négro-

86
Pour les circonstances concomitantes qui ont emmené à ce premier révolte des
« noirs » contre la gouvernance des Arabes (beïdanes/maures), Voir BADUEL, P.
R, « Mauritanie 1945-1990 ou l’État face à la nation », RE.M.M.M. 54, 1989/4,
p26-27
87
Ceci se lit dans le manifeste dit des 19 que les maures ont établi un mythe disant
qu’ils font 80% de la population et que les négro-africains ne constituent que le
reste. Donc pour toutes fonctions politiques ou administratives, les négro-africains
représenteront le quart de l’effectif
42

africains dans l’armée 88, elle se soldera par l’arrestation d’une


cinquantaine d’entre eux dans les différents corps de l’armée, trois
seront condamnés à mort et exécutés et les autres à de lourdes peines
d’emprisonnement. Ils seront, et les activistes des FLAM condamnés
un an plutôt, envoyés au fort de Oualata, un mouroir par excellence
qui dévora trois de ces prisonniers dont l’écrivain-poète Tene
Youssouf Gueye en 1988. En avril 1989 à partir d’une banale affaire
de paysans soninkés du Sénégal et d’éleveurs peuls de la Mauritanie,
se donnera le coup d’envoi d’une campagne d’élimination des négro-
mauritaniens. Le régime de Taya en complicité avec les Nassériens et
Baathistes mauritaniens vont « profité de l’occasion pour régler à leur
façon la question nationale » 89 par l’aide de leurs bras armés les
Harratines. Ceci est auréolé entre 1990 et 1991, d’abord par la
poursuite de l’élimination des mauritaniens négro-africains, et la
destruction systématique de leurs villages et leurs pièces d’état-civil
prouvant leur statut de mauritanien, et enfin par la pendaison, dans la
nuit du 27 Novembre 1990, de vingt-huit militaires négro-africains
pour fêter l’indépendance du 28 Novembre. Depuis lors les symboles
de cet État sont souillés par le sang de ses citoyens qu’il a sacrifié.
C’est cette période de tueries de centaines de civils et militaires négro-
africains, ainsi que des expulsions de près de 120.000 parmi eux,
essentiellement Halpoulareen, qui se réfugieront entre le Sénégal, le
Mali et en occident, qu’est la page sombre de l’histoire du pays. Cela
ressemble bien à un génocide que d’aucuns vont euphémiser en

88
S’agissant de l’histoire de ce putsch manqué des négro-africains et des
conditions de détention des prisonniers ainsi que de ceux des FLAM, Voir BOYE
A. H., J’étais à Oualata, le racisme d’État en Mauritanie, l’Harmattan, 1999.
89
MARCHESIN P., Op.cit. p213.
43

« passif humanitaire », cette période de 1986 à 1992 constitue les


années de braise chez les négro-africains de Mauritanie 90 .

Aujourd’hui le règlement de ces pages noires de l’histoire du pays


(passif humanitaire) est une variable dépendante à toute
démocratisation et stabilité du pays. Cette question faisait partie de
l’une des deux axes majeurs du programme de Sidi à son élection91.
Ce qui lui fit confier ce brulant dossier à un comité interministériel
réunissant quatre ministères et présidait par le secrétaire générale à la
présidence 92 , qui a abouti à la signature en Novembre 2007 de
l’accord tripartite entre la Mauritanie, le Sénégal et le HCR pour le
rapatriement volontaire des mauritaniens établis au Sénégal. Le 29
Janvier 2008 le premier contingent débarquait à Rosso, ainsi s’en
suivit jusqu’au retour de seulement de 7000 réfugiés du Sénégal par
rapport au dernier recensement et estimations du HCR qui s’élevait
entre 64.000 à 20.000 réfugiés93 . La campagne de rapatriement se
perpétuera après le putsch de 2008, cependant avec Aziz le dossier va
prendre un autre tournant à l’amateurisme et à la légitimation du
pouvoir arrivé de facto 94. Le problème du passif humanitaire, jadis,
engagé par le régime de Sidi, finira par une stratégie de leurre aux
victimes en leur faisant signer un document secret à une partie des
victimes, surtout les veuves, d’abandonner toute poursuite contre leurs

90
Pour avoir une idée plus détaillé de cette période sanglante du régime de Taya et
des solutions à adopter, voir FONADH, Stratégie de règlement du passif
humanitaire : Vers la mise en œuvre d’une justice transitionnelle en Mauritanie,
PDF sur http://www.archive.for-mauritania.org/fr/files/fonadh.pdf
91
Lors de son émission à la TVM affirme les deux axes de son programme dont
l’un était l’édification d’un État de droit et la consolidation de l’unité nationale par
le retour des réfugiés. Ould MEYMOUN M. L. Op.cit. p.172
92
Voir Ould MOHAMED LEMINE M. S., Mauritanie : l’Esperance déçue, 2006-
2008: une démocratie sans lendemain, l’Harmattan, 2012 pp.161-169
93
FRESIA M., « les enjeux politiques du retour et identitaires du retour des
réfugiés en Mauritanie, Vers une difficile réconciliation nationale ? », Politique
Africaine, 2009/2, N° 114, p.12.
94
Ibid. p.11
44

bourreaux en contrepartie d’aides financières. Un an après, ces


dernières se disent tromper car ils ne connaissaient pas exactement le
contenu des documents qu’elles ont signée, dans tous les cas Aziz
annonce la « fin de l’opération de retour »95 des réfugiés. Un militant
des droits de l’homme nous confia même que les autorités, par la voix,
du haut-commissaire des droits de l’homme, ont dit avoir « fourni tous
les efforts et qu’à présent il faut clôturer le dossier du passif
humanitaire »96 . Alors que les réfugiés au Sénégal ne sont pas tous
rapatriés dans leurs pays d’origine, ceux du Mali et notamment à
Kayes ont été les oubliés du programme de rapatriement. Ce qu’il faut
dans ce dossier complexe du pays, et dont l’ensemble des militants des
droits de l’homme et quelques acteurs politiques qui font de la
question leur cheval de bataille s’entendent, c’est une justice
transitionnelle qui se fera à travers la résolution du problème par cinq
étapes. 1- Le devoir de vérité (les ayants droits doivent savoir ce qui
s’est réellement passé, qui a fait quoi à qui). 2- Le devoir de justice
(traduire en justice les meurtriers coupables, et après voir s’ils seront
pardonnés par les victimes). 3- Le devoir de réparation (indemniser les
victimes et reconstruire intégralement la carrière des fonctionnaires
publics victimes). 4- Le devoir de mémoire (sacraliser cette période
sombre de l’histoire du pays afin que tous les mauritaniens aient à
l’esprit qu’une telle chose ne puisse plus jamais se reproduire). Et
enfin, 5- Le devoir de réconciliation pour enfin que la cohésion sociale
se met en marche. La question du passif humanitaire est une question
nationale, concernant l’ensemble des mauritaniens, ils doi vent tous
être impliqués à sa résolution définitive, cela constituerait même un
soulagement aux maures, le groupe perçu, à tort ou à raison, par les
victimes, d’être les responsables. Donc le fait de pointer du doigt les
95
Contenu du discours du discours de Aziz lors de se visite en Mars 2012 à Rosso
http://www.ami.mr/fr/index.php?page=Depeche&id_depeche=17123
96
Source entretien
45

seuls coupables de ces tueries et expulsions enlèverait chez les


victimes, la perception des maures comme une communauté de
génocidaires et réconcilierait l’ensemble mauritanien. Sur ce, le
premier obstacle à cette démarche est la loi 93-023 de Juin 1993
portant amnistie pleine et entière aux membres des forces armées et de
sécurité auteurs des infractions commises entre le 1 er Janvier 1989 et
le 18 Avril 199297, faisant échapper à tout coupables d’être traduits en
justice. Les accords politiques de 2011 n'ont fait qu'effleurer le sujet,
raison pour laquelle lors de l'amendement de la constitution de 2012,
hormis le préambule de la constitution qui reconnaissait la diversité
culturelle, aucune loi constitutionnelle ou législative ne faisait
référence à ce problème. En ce sens la question du passif humanitaire
reste un obstacle majeur à toute normalisation du régime en plus des
autres, à savoir la question de l’esclavage.

Paragraphe II : L’esclavage et les lois : abolitionniste versus


féodaux
L’esclavage est un phénomène que toutes les communautés
mauritaniennes ont pratiqué à un moment donné de l’histoire. Chez les
Halpoulareen on parle de maccudo, de jaam chez les wolofs, de Kome
chez les soninkés, et de abd chez les maures. Cependant, le
phénomène a évolué chez les communautés négro-africaines en sorte
d’organisation sociale graduelle allant des nobles qui sont au sommet
de la hiérarchie sociale, ensuite des hommes de caste au-dessous et
tout bas de l’échelle de ceux qui sont d’origines esclaves ou serviles98.
Cela se traduit par des discriminations que subissent ces groupes par
rapport aux relations sociales entretenues avec les autres groupes

97
Tel s’énonce en substance l’article 1er de la loi
98
Pour plus de détails sur la situation des Halpoulareen d’origine esclave, Voir
LESERVOISIER O. « Les héritages de l’esclavage dans la société Halpulaar de
Mauritanie », Journal des Africanistes, 78-1/2, 2009.
http://africanistes.revues.org/2685
46

supérieurs, chez les Halpoulareen par exemple, cet aspect baigne dans
un enjeu sociopolitique particulier avec la démocratisation 99 . Si chez
les communautés négro-africaines, le phénomène s’est traduit en une
condition sociale laissée au merci des discriminations et classification,
chez les maures, cependant, il se présente comme une situation de
possession totale par le maitre sur la personne, qu'est le abd, et ses
probables descendants. Donc chez la communauté arabe ou maure de
Mauritanie « l’esclave…n’est pas tout à fait une personne : c’est un
bien du maitre qui l’a acquis comme tout autre bien par achat ou par
héritage et il peut en transmettre la propriété par les mêmes moyens de
droit »100 . À cela s’ajoute les différentes relations liant le maitre et son
servant domestique, en raison d'abord de la différence de la couleur de
peau qui rend le phénomène beaucoup plus vive, actuelle et apparent
que chez les négro-mauritaniens, mais aussi de l’accomplissement des
tâches ménagères domestiques jusqu'à la satisfaction libidinale du
maître, cette personne à tout faire, une fois affranchi il n’est plus abd,
mais il devient hartani (un homme libre). Cette espèce humaine
spécifiquement mauritanienne, le hartani, issue d’une croisée
socioculturelle, faisant de lui un homme noir comme les négro-
africains et de culture maure, est le seul type de mauritanien qui n’a
pas de patrie de rechange, ils n’a que la « Mauritanie comme
patrie » 101. Avec « la peau des uns et la culture des autres »102, il
représente aujourd’hui un enjeu politique pas sans importance, du fait

99
En ce qui s’agit de l’enjeu des groupes d’origines esclaves chez les Halpoulareen
fau voir l’article de LESERVOISER O. Démocratisation et renégociations sociales,
les enjeux de la participation des groupes d’origine servile en Mauritanie, Politique
Africaine 2009/2 n°114, Karthala, 2009 pp.24-43 http://www.cairn.info/revue-
politique-africaine-2009-2-page-24.htm
100
MARCHESIN, P. Op.cit. p.384
101
Toutes les autres composantes du pays ont des « ramifications dans les autres
pays : On trouve des Halpoulareen au Mali et au Sénégal, des maures au Sahara, au
Mali et au Sénégal, des Soninkés au Mali et au Sénégal, et des Wolofs au Sénégal.
Voir OULD BEIBACAR O., Le Calame, N° 991 du 26 Aout 2015, p.5.
102
OULD BEIBACAR O. Ibid.
47

de leur poids démographique et surtout de leur statut de trait d’union


entre les deux ensembles mauritaniens. La question de l’esclavage,
tabou auparavant, fera une « entrée de force dans la scène
politique » 103 par la création de mouvements abolitionnistes allant de
celui d’El Hor en 78 à IRA Mauritanie en passant par S.O.S Esclaves,
qui mèneront des luttes sans merci afin que les autorités prennent des
décisions sur le problème. Sur ce, il y a, paradoxalement, une
succession des lois face à un entêtement de la question. En un siècle et
une décennie, l’esclavage a été déclaré aboli à six reprises 104 , les
derniers en date sont la loi 048-2007qui criminalisait les pratiques
d’esclavages, l’article 13 de la constitution du 20 Juillet 1991
amendée en Mars 2012 considérant le phénomène comme crime
contre l’humanité et enfin en Mars 2015, la loi 49-15 élargissant les
crimes et les peines d’esclavages. Cependant ce que critiquent les
abolitionnistes sont le laxisme des autorités par rapport au phénomène,
s’agissant de la non application des lois par les juges, car selon ces
militants la plupart des qaadis sont des féodaux, ils sont nés et ont
grandi avec ces pratiques esclavagistes et donc il est difficile pour eux
de trancher, on ne peut être juge et partie. Et par conséquent, plusieurs
dossiers sont en cours au tribunal depuis des années sans résultat, ou
ils jugent les affaires d’esclavages comme une affaire de travail non
payé pour faire échapper aux esclavagistes les peines lourdes retenues
par les lois. Aujourd’hui les militants d’IRA Mauritanie dirigés par
Biram Dah Abeid, en prison actuellement pour avoir manifesté contre
l’esclavage foncier, ont adopté une stratégie inédite allant du
harcèlement des autorités publiques, en passant par des campagnes de

103
LO GOURMO A., « la question de l’esclavage en Mauritanie », Cahiers de
sociologie économique et culturelle, Revue Internationale n°31, Juin 1999, pp.9-13
104
Marchesin signale ici qu’il y eut d’abord un décret de 1905 qui l’abolissait, puis
la constitution de 1961 déclarait que tous les citoyens sont égaux en droit et enfin
l’ordonnance d’abolition de 1981, Voir MARCHESIN, P. Op.cit. pp.390-391. En
plus de la loi de 2007, des amendements de 2012 et la loi de 20015
48

libération d’esclaves jusqu’aux marches et sit-in quasi-quotidiennes.


Ce problème entré dans le débat de la cohabitation, est une autre
variable dépendante de la démocratisation dans le pays et revient
d’une manière récurrente dans les débats sociopolitiques relatifs à la
question de cohabitation.

Section II : Le problème de cohabitation


En outre de la question de l’esclavage et de celle du règlement des
problèmes liés à la répression politique et ethnique des années 1986 à
1992, figurent d’autres variables liées à la question nationale, à savoir
le problème du délit de fasciés (I) et enfin la cohésion sociale entre les
différentes communautés mauritaniennes (II).

Paragraphe I : La question de la citoyenneté : le délit de


fasciés
La citoyenneté est le socle de la démocratie, car elle constitue la base
sur laquelle les individus en tant que citoyen vont bénéficier d’un
traitement égalitaire face aux lois et aux droits au sein d’un État. C’est
aussi le socle sur lequel s’appuieront les autorités pour tirer une
quelconque légitimité afin de se positionner comme des gouvernants.
Sur ce, la question de la citoyenneté des mauritaniens s’est toujours
invité au débat du vivre ensemble entre différentes communautés de
races, de cultures et de régions différentes. Cependant, il est noté qu’il
y ait une certaine discrimination à l’égard de certaines communautés
s’agissant de leurs droits fondamentaux en tant que citoyens
mauritaniens. Nous allons essentiellement relater ici deux événements
récents qui ont vraiment mis en cause la citoyenneté mauritanienne
des communautés négro-africaines. Le premier s’agit de la volonté des
autorités de sécuriser l’état civil par l’introduction du système de la
biométrie sur les bases de données. Cette opération d’enrôlement est,
communément et vulgairement, appelée le recensement, il s’agit
49

d’enrôler l’ensemble des mauritaniens sur une nouvelle base de


données biométriques beaucoup plus sécurisés. Cela a été salué par
l’ensemble des acteurs politiques et de la société civile dans son esprit,
mais dans ses procédures elle fut décriée par les mouvements de la
société civile et principalement le mouvement ‘’Touche pas à ma
nationalité (TPMN)’’105 . Selon cette organisation, et d’autres leaders
politiques interrogés, cette opération est une autre stratégie légale
« d’éliminer les négro-africains fondamentalement, pour ne pas les
recenser. En somme, elle permet à l’État arabe de construire son
arabité »106 , donc de vider de sa population l’ensemble africain pour
affiner l’arabité du pays. Pour elles, il est difficile, pour ne pas dire
quasi-impossible, à un négro-africain de se faire enrôler, vue la
difficulté des questions et des pièces justificatives à fournir, allant
jusqu’aux questions banales telles que le récit d’une sourate du coran
pour prouver qu'il est mauritanien ou la fourniture de l’acte de décès
d’un parent mort il y a des années. Cela a été fortement accentué par
la composition en ressources humaines des commissions chargé de
mener l’enquête et d’accepter que l’individu devant eux est
mauritanien. Un militant des droits de l’homme nous confiait que
durant l’opération ils ont dénoncé son caractère discriminatoire auprès
du ministre de l’intérieur de l’époque, M. Mohamed Ould Boilil, lui
demandant « pourquoi sur cinquante-deux bureaux il n’y avait que
deux négro-mauritaniens dans le personnel, le ministre lui dit qu’ils
avaient procédés par un concours, le militant lui répond ironiquement,
donc tous les noirs sont des incapables ? Avant d’ajouter, en lui disant
que des ânes doivent être représentés par des ânes ». Effectivement,
cette opération a occupé le débat sociopolitique du pays, du fait de
l’exécution de l’opération et du caractère discriminatoire qu’elle
105
Voir l’article de Jeune Afrique sur le problème de l’enrôlement, la colère Noire
http://www.jeuneafrique.com/189318/politique/mauritanie-la-col-re-noire/
106
Source Entretien
50

portait, par le fait juste de se baser sur les traits culturels et apparents
d’un citoyen et de douter qu'il est mauritanien, c’est un délit de
fasciés. L’autre délit de fasciés dont souffrent actuellement les
populations noires de Mauritanie est cette décision des autorités par
rapport à la politique d’immigration en instituant des cartes de séjours
valable un an pour les étrangers résidants dans le pays. Il parait que
plusieurs étrangers ouest-africains ne s’en sont pas acquittés soit par
des raisons financières ou négligence. Cette politique migratoire est
encore saluée par la plupart des acteurs, dans le sens, car c’est un gage
pour la sécurité du pays. Cependant, ils la dénoncent dans ses
procédures, car les rafles menés par les forces de l’ordre aux étrangers
récalcitrants, se bornent la plupart du temps à confondre le citoyen
mauritanien noir et l’étranger ouest-africain. Deux individus dont rien
ne différencient en apparence si ce n’est la citoyenneté, car ils peuvent
partager la même langue d’expression, appartenir à une même ethnie,
et dès fois même, être de la même famille, tout en étant de nationalité
différente. Les dispositions de la loi du 12 Juin 1961 modifiée par la
loi 2010-023 portant code de la nationalité mauritanienne sont
inappliquées face à ces problèmes en outre du silence notoire des
acteurs politiques par rapport à son règlement. Les réformes majeures
qu'a connu le pays depuis 2005, date de sa seconde expérience
démocratique, et puis 2008 et après on fait abstraction à ces questions,
mise à part de quelques discussions là-dessus lors de dialogues ou
sorties de presses routinières et les partis politiques d'opposition qui ne
manquent pas de l'évoquer à chaque fois que l'occasion se présente,
surtout ceux considérés comme antisystème . Les lois traduisent dans
les faits, doivent être la base de tout début de cohésion sociale.
51

Paragraphe II : Cohésion sociale ou unité nationale


Les concepts de cohésion sociale, d’unité nationale, de question
nationale sont récurrents au niveau des débats politiques et sociaux, et
relatent tous des variables susvisées. À savoir la question de
l’esclavage ou de la condition servile, le règlement définitif des
exécutions extrajudiciaires et d’exil forcé d’une partie des
mauritanien, le traitement de manière égale de tous les mauritaniens
devant la loi et de l’égalité des chances, bref l’établissement d’un État
de droit effectif pour le bénéfice de tous les mauritaniens. Les mesures
qui ont été prises après l’accord politique de 2011 entre des partis de
l’opposition et de la majorité, et qui concernaient les amendements à
la constitution en 2012, dont y étaient relatés, de la reconnaissance de
la diversité culturelle dans le préambule de la constitution, de
l’élévation du crime d’esclavage comme crime contre l’humanité et de
la criminalisation des coups d’États, allaient dans ce sens. Cependant,
hormis celles-là, toutes les autres dispositions sont plutôt techniques et
ne concerneraient pas réellement le problème de la cohésion
nationale 107 . Cependant les recommandations qui ont été faite à l’issue
des journées de concertations nationales du 25 au 29 Octobre 2009 ont
été d’une portée non négligeable sur la question de la cohésion sociale
et notamment le rapport de l’atelier sur les droits humains et de la
société civile. La reconnaissance de la diversité culturelle en
Mauritanie à un niveau constitutionnelle est une première, et est une
assurance en soi. Car graduellement l’État avait déjà effacé au fur et à
mesure une des composantes de ce pays, à savoir les Bambaras. Si
l’on se réfère à la n° 1961-12, modifiée, portant code de la nationalité
mauritanienne, l’article 19 énonçait « Nul ne peut être naturalisé : Al :
2 s’il ne parle couramment l’une des langues suivantes : toucouleur,

107
Voir les articles 2 à 7 et l’article 13. Les autres articles de la loi sont plus
technico-politique, In Annexe La loi 2012-015 du 20 Mars 2012.
52

Sarakolé, ouolof, bambara, hassanya, arabe, français, »108 , cet article a


été modifié par la loi-2010-023 par l’article 19 nouveau « Nul ne peut
être naturalisé : Al : 2 s’il ne parle couramment l’une des langues
nationales : l’Arabe, le Poular, le Soninké et le Wolof » et le
Bambara ? Disparu !L’interprétation de l’article 19 de la loi de 1961
reconnaissait bien l’existence d’une entité dénommée Bambara et que
le fait qu’une personne puisse s’exprimer en cette langue
communautaire pourrait lui faire bénéficier de la naturalisation, en
plus des autres dispositions. Dans l’article 12 de la loi de 2010 il n’en
est plus, raison pour laquelle nous disions que la reconnaissance de la
diversité culturelle au niveau du préambule est déjà rassurant
qu’aucune autre entité humaine de ce pays ne pourra subir le sort des
bambaras. Cependant il faudrait que cela se traduise en textes de lois
et décrets d’application par rapport à la diversité culturelle pour une
meilleure cohésion sociale. L’exemple que nous donnait une militante
des droits de l’homme lors d’un entretien est patent. Elle disait qu’une
fois elle a été invitée à un dialogue sur la diversité culturelle au palais
des congrès 109 . Quand elle a pris la parole elle leur dit « dans cette
salle où nous débattons de diversité culturelle et de vivre ensemble,
dans cette salle où nous convions tous nos hôtes étrangers lors
d’évènements internationaux, regardez au-dessus de vous, les photos
qui ornent cette salle et qui fait la publicité de la culture
mauritanienne, aucune ne fait allusion aux autres cultures. Il n’y a que
la culture maure exposée ici, c’est vraiment déplorable ». Dans ce cas,

108
Toucouleur a pour Poular, Sarakolé pour Soninké, ouolof pour wolof, Hassanya
pour Arabe. Les terminologies ont officiellement changé dans le temps, cependant
les mêmes communautés humaines dont se réfère ces terminologies linguistiques
restent les mêmes.
109
Le palais des congrès, désormais Centre International des Conférence est le lieu
par excellence où sont tenues la plupart des manifestations nationales et/ou
internationales.
53

les lois doivent se traduire dans les réalités et relations sociales du


pays.
54

Chapitre II : Amendements et renforcements:


les autres institutions sociales

Après avoir rappelé les quelques, mais pas moins importantes,


questions de fond qui fussent jusque-là oubliées au niveau des
réformes. Nous allons présentement traités la relation de l'armée et le
pouvoir politique en Mauritanie, cela face à une société civile qui a
longtemps résisté (I), ensuite décrire les autres institutions issues de
ces amendements qui sont, théoriquement, garant d'une démocratie
forte (II).

Section I : La société civile, l'armée et le pouvoir


Comme cela a été dit précédemment, les amendements qui ont été
faits ont eu un caractère timoré à l’égard des questions de fond que
connait la Mauritanie et qui sont, pour le peu que l’on puisse dire,
essentiels à la démocratisation et la stabilité sociale. Ils ont été aussi
timides par rapport à la relation entre l’armée et le pouvoir politique
(I), une relation dont la société civile mauritanienne n'en est pas
demeurée préoccupée (II).

Paragraphe I : Un alinéa pour trois décennies de putsch


La question de l’armée en relation avec le pouvoir politique occupe
une très grande place dans le débat public mauritanien, cela car le
pouvoir a été (est encore ?) entre les mains des hommes de tenue
depuis trente ans au moins. La multiplication des pronunciamientos
militaires et le règne des militaires au pouvoir, à condamner des
générations de mauritaniens à ne connaitre que des régimes militaires
et d’exceptions. Et pourtant l’article 7 de la constitution de 1961,
l’article 2 de la constitution de Juillet 1991 modifiée en 2006,
énonçaient clairement que le peuple est la source de tout pouvoir, et
55

que cette souveraineté s’exerce par le biais de ces représentants élus.


L’amendement de l’article 2 de la constitution en 2012, en y insérant
l’alinéa interdisant les changements anticonstitutionnels 110 et en les
considérant comme crimes imprescriptibles, est à saluer. Il l’est dans
la mesure où il vient réprimer un phénomène qui a pris en otage et
condamner le peuple pendant des décennies dans la seule volonté des
militaires, ou en tout cas, il est mieux que cet alinéa figure dans la
constitution qu’elle y soit absente. Tout en comprenant la portée de
cette phrase qui complète l’alinéa « Toutefois, ces actes, lorsqu’ils ont
été commis antérieurement à la date d’entrée en vigueur de la
présente loi constitutionnelle ne donneront pas lieu à poursuites. »,
car elle fait échapper à certains acteurs, présent sur la scène politique
et notamment le président actuel de la république, la poursuite en tant
que criminel. Il faut noter que l’alinéa est loin d’être suffisant pour
faire oublier à la Mauritanie les putschs, il ne faut pas perdre de vue
que ce même alinéa, à quelques différences près, figurait dans l’article
121 de la constitution malienne de Février 1992, cela avant le putsch
du capitaine Sanogo contre le régime de ATT en 2012. Donc ce qu’il
faut, c’est en urgence une loi organique et un décret d’application
effectif renforçant l’article 2 et portant la réforme de l’armée
mauritanienne en une armée républicaine. Car la Mauritanie peut être
considérée comme un pays à excès d’hommes de tenues à comparer
avec les autres pays de la sous-région beaucoup plus peuplés, si l’on
se base sur les estimations données par Boubacar Ndiaye, que l’armée
mauritanienne compte vingt-six mille hommes tous corps confondus ,
sans oublier les nouveaux éléments du GGSR 111 , pour une population

110
Voir l’article 2 de la constitution du 20 Juillet 1991, modifiée en 2006 et en
2012.
111
Le GGSR est une compagnie paramilitaire chargée de la sécurité routière.
56

de moins de quatre millions d’habitants 112 ! Ensuite, la réforme s’invite


surtout au niveau de cette garde prétorienne qu’est le BASEP, crée par
Taya pour le protéger de ses ennemis civils et militaires, enfin comme
tout dictateur à sa garde prétorienne. Le BASEP a fait ses preuves à la
volonté de ceux qui le commande, car en 2003 et 2004 ce corps
commandé par Aziz, a fait échouer deux tentatives de putschs, et en
2005 et 2008 ce même corps avec le même commandant a fait passer
successivement deux putschs, une véritable machine de (anti) putsch !
Déjà le statut et la place de ce BASEP s’invitent aux préalables des
discussions entre le pouvoir politique et l’opposition, cependant, cette
question en est une qui fâche dans les relations avec Aziz. Et l’on peut
affirmer sans risque de se tromper qu’il est question de poser le
problème des régiments spéciaux et privilégiés à la solde du chef de
l’État dans des régimes qui sont en transition, la preuve n’est pas loin.
Il faut voir la prise en otage du pouvoir transitionnel par le régiment
de sécurité présidentielle au Burkina dernièrement, pour savoir
l’attitude des acteurs militaires qui ont longtemps été des soutiens au x
autoritaires. Il est clair et remarquable, cela surtout durant le régime
de Sidi, que sans la réforme de l’armée mauritanienne en une armée
républicaine, professionnelle et sous l’autorité effective des
institutions démocratiques, le gouvernement d’un ci vil aura beaucoup
de difficultés avec elle. Car actuellement, sachons que c’est parce que
le président actuel est issue des rangs du BASEP que ce dernier ne
pose aucun problème au chef de l’État, mais c’en était un civil il suffit
d’un malentendu banal pour que le problème de l’armée se pose au
président.

112
Sur les questions de l’armée mauritanienne et des réformes nécessaires, Voir
N’DIAYE B., Chapitre 7, La Mauritanie, PDF sur DCAF
http://www.dcaf.ch/Chapter-Section/Ch.7-Mauritania, Date inconnue.
57

Paragraphe II : Une société civile à encourager


Dans la théorie transitologique, la société civile est l’une des arènes de
la consolidation démocratique, car elle est « relativement autonome à
l’État » 113 et par la défense des intérêts qui sont particuliers aux
organisations qui la composent, véhicule des idées et des valeurs qui
sont favorable au jeu démocratique. Par société civile on entend donc
toutes les organisations citoyennes et individus autonomes par rapport
au pouvoir politique et défendant des valeurs. D’une manière simple
comme nous le définissait le professeur Redissi, ce sont toutes ces
organisations qui sont entre la famille et la société politique. La
société civile « non-gouvernementale, non politicienne et à but non
lucratif »114 tacle les régimes déviants et exige plus de légalité. Dès la
fin des années 1970 on a vu en Mauritanie des mouvements de
citoyens s’élever comme une avant-garde face aux dérives et laxisme
des autorités publiques concernant les droits de l’homme et certaines
questions nationales. Durant la première expérience démocratique de
1991, la société civile mauritanienne, et notamment les associations de
défense des droits de l’homme, de l’ordre des avocats et les médias
indépendants ont joué un grand rôle dans la chute de Taya. Cela allant
de la défense des détenus d’opinion du régime de Taya, de la
dénonciation des pratiques autoritaires, aux plaintes portées devant les
cours régionales de justice contre le régime de Taya pour violations
graves des droits de l’homme. Durant la période transitionnelle 2005-
2007, elle s’était vue approchée par les autorités transitionnelles afin
de participer au processus démocratiques, avec les autres acteurs
politiques et de l’administration publique, elle participa avec succès
aux journées nationales de concertation de 2005. Des
recommandations en faveur d’un renforcement de la société civile

113
LINZ J. J., et STEPAN A., Op.cit., p.7
114
KAMARA C. S., Afrique : Esperance, Harmattan Mauritanie, 2011, p.67.
58

dans un espace public démocratique ont été avancées : D’abord la


définition du concept « société civile » en l’élargissant de manière
horizontale à ce qu’il englobe toutes les organisations citoyennes qui
défendent des intérêts particuliers, la mise en place d’un partenariat
avec les ONG internationales et une exonération douanières pour les
dons et aides reçus, et entre autres, le développement des radios
associatives et communautaires. Ces recommandation-programmes
qui devaient être inclus dans l’agenda des futures autorités élues se
sont vues éclipsés par la crise institutionnelle de 2008. Il n’y a eu
aucune disposition concernant le statut ou le cadre juridique de la
société civile dans la loi organique 2012-015, cependant l’article 10 de
la constitution garantie aux citoyens les libertés publiques et
individuelles et notamment la liberté d’association et d’adhésion à
toute organisation politique ou syndicale de son choix. Les lois
régissant les OSC en Mauritanie sont celle du 64-098 de Juin 1964,
celle du 2000-043 de Juillet 2000 relative au régime juridique
particulier des associations de développement et l’ordonnance 2007-
013 de Février 2007 relative aux sociétés civiles professionnelles . Ces
trois lois soumettent la constitution des associations au régime
préventif, ce qui veut dire que toutes associations doit avoir
l’autorisation préalable des autorités administratives publiques, pour
exister juridiquement, ce qui est au-delà des standards internationaux
sur le régime des libertés publiques. Actuellement un projet de loi
renouvelant celle de 1964 était en débat, cependant les OSC l’ont déjà
assez critiqué du fait de son conservatisme, car le projet de loi ne
prévoit pas un régime déclaratif aux organisations. 115 Aujourd’hui, en
tant que pièce maitresse des régimes démocratiques, les OSC doivent
être impliqué dans tous projets de renforcement des assises
115
Le débat sur le projet de loi relative aux associations, Voir sur RFI
http://www.rfi.fr/afrique/20150812-mauritanie-concertation-projet-loi-controverse-
associations
59

démocratiques, son engagement se fait déjà sentir dans sa participation


au FNDU 116 en tant que pôle constituant ce regroupement et se fait
entendre le maximum possible.

Section II : Des institutions à renforcer


Enfin il y a d’autres institutions de démocratisation qui ont déjà vu le
jour, certaines déjà dès la période de 1991 et d’autres durant la période
transitoire de 2005-2006. Il s’agit des institutions consultatives (I) et
de celles en rapport avec les élections (II).

Paragraphe I : Des institutions consultatives


Les institutions consultatives sont instaurées par la constitution de
Juillet 1991, amendée en 2006 et 2012 dans son titre 9, elles sont au
nombre de trois, à savoir Le haut conseil islamique, La commission
économique et sociale et la commission nationale des droits de
l’homme. Cette dernière, la plus active et la plus intéressante parmi
toutes, car elle fut créée sous les auspices des principes de Paris
relatifs au statut et fonctionnement des institutions nationales pour la
protection et la promotion des droits de l’homme. Suivant ces
principes internationaux adoptés par l’AG des NU en 1993, la CNDH
est instituée en 2007 durant la période transitoire par l’ordonnance
2006-015 de Juillet 2006, puis par la loi n° 2010-031, lors de
l’amendement constitutionnel de Mars 2012 elle atteint une
reconnaissance constitutionnelle qui lui confère le même rang que les
autres institutions consultatives. Son mandat est déterminée par
l’article 4 de la loi de 2010 qui lui confère la compétence d’organe de
conseil, d’observation, d’alerte, de médiation et d’évaluation en
matière de respect des droits de l’homme et en matière humanitaire.

116
Le FNDU est une coalition crée au lendemain des élections législatives de 2014.
Elle regroupe 4 pôles, dont celui des syndicats, de la société civile, des personnes
indépendantes et des partis politiques à l’exemple de l’UFP, le RFD, Tawassoul…
C’est une autre transformation du COD qui était le FNDD.
60

Entre autres, tout citoyen victime de violation des droits de l’homme


peut déposer une plainte auprès d’elle, elle fournit aussi des avis à la
demande des institutions publiques et publie chaque année un rapport
adressé au président, sur la situation des droits de l’homme dans le
pays. Enfin le fait que l’article 2 lui confère l’indépendance et
l’autonomie financière est très important dans le but qu’elle soit plus
indépendante, car auparavant son budget fut logé dans celui du Haut-
commissariat aux droits de l’homme, et cela avait soulevé beaucoup
de confusion. Cependant, il est à noter qu’en tant qu’organisation
mère de la société civile, sur les vingt membres que compte son
bureau, il n’y a que six qui sont issues des OSC, tous les autres sont
soit nommés par décret soit représentant le gouvernement ou le
parlement, ce qui affaiblirait les représentants des OSC face à
l’hégémonie des représentants gouvernementaux. Ensuite la
présidente actuelle, à la voir sur un plateau de télé face à d’autres
militants des droits de l’homme, on penserait plus qu’elle est
procureure de la république ou porte-parole du gouvernement, que
représentante d’une commission nationale des droits de l’homme.
Cela est renchérit par une militante des droits de l’homme qui nous
confiait dans un entretien, que Mme la présidente de la CNDH « était
la première à demander la condamnation à mort de Ould Mkheitir 117 !
Mais aussi, qu’elle ne se gêne nullement à déclarer qu’elle soutient le
régime de Aziz ou fait campagne pour lui, et enfin qu’elle est même
allée jusqu’au système des NU pour les demander de ne pas accorder
le prix des droits de l’homme des NU à Biram Dah Abeid. Déjà on se

117
L’affaire Ould Mkhaitir s’agit d’un jeune de la classe sociale des forgerons qui
avait écrit un article intitulé religion et religiosité pour dénoncer les
discriminations dont sont victimes les membres de sa communauté, cela par des
exemples tirés de l’histoire prophétique. Il fut condamné par la vox populi, puis se
voir arrêter et condamner à mort. Voir l’article en question sur
http://www.chezvlane.com/2014/01/voici-enfin-la-traduction-du-texte-du.html et
l’affaire sur http://www.amnesty.fr/Nos-campagnes/Abolition-de-la-peine-de-
mort/Dossiers/apostasie-relance-la-peine-de-mort-en-Mauritanie-14959
61

rappelle qu’en 2008 quand l’équipe de la CNDH avait condamné le


putsch, cela avait déplu à Aziz qui procédera à un changement
d’équipe les mois qui suivent. De toutes les façons la CNDH pour
rentrer dans le cadre des mandats tracés par les principes de Paris et
jouer pleinement sa mission d’organisation de protection et de
promotion des droits de l’homme, elle doit donner plus de place et de
responsabilité aux OSC au niveau de la commission, s’atteler à donner
des recommandations fortes à l’État mauritanien et lui servir de rappel
par rapport à ses engagements nationaux et internationaux en matière
des droits de l’homme. Et réciproquement l’État doit tenir compte de
ces avis et les appliquer.

Les autres institutions consultatives à savoir le Conseil économique et


Social de l’article 95 et le Haut conseil islamique de l’article 94
devraient être beaucoup plus actives que des institutions symboliques,
de repos et de récompense politique aux personnes qui ont fourni leur
bonne volonté au président. À l’exemple du haut conseil islamique par
sa faculté à donner des avis sur les questions sociales en relation avec
la religion, les oulémas qui le remplissent devraient avoir plus
d’autonomie et de courage à énoncer des fatwas qui vont dans le sens
de la prévention des pratiques qui pourraient mettre en péril l’unité
nationale et une stabilité démocratique. Cependant cette institution
reste muette sur ces questions. De la même sorte avec le conseil
économique et social, ce sont des institutions écrans qui ont été créés
par le régime de Taya lors de l’ouverture « démocratique » pour
meubler formellement une démocratie, ce qui rendait ces institutions
très latentes. Cette volonté qui accompagna ces institutions
consultatives continue à les condamner dans la latence et l’inactivité
totale, rare sont les moments où l’on lit dans les médias qu’elles se
sont prononcées sur tel sujet qui s’invite à l’opinion public. Dans un
62

régime démocratique, elles constituent des check points aux actes des
autorités publiques administratives et non administratives qui peuvent
violer les garanties démocratiques.

Paragraphe II : Des autres institutions : le conseil


constitutionnel et la CENI
Les autres institutions concernent le conseil constitutionnel qui est
institué depuis 1991 par le titre VI et les articles 81 à 88 de la
constitution. Dans la révision constitutionnelle du 20 Mars 2012, les
membres de l’organe de contrôle de constitutionnalité a vu ses
membres s’élargir de six à neuf juges constitutionnels. Désormais le
président nomme quatre des neuf, le président de l’assemblée
nationale trois des neuf et le président du sénat deux des neuf, pour un
mandat non renouvelable de neuf ans. Tout comme les institutions
consultatives citées ci-dessus, le conseil constitutionnel était un autre
organe de façade démocratique à la solde du régime de Taya. Durant
la période post-accords de Dakar, le conseil constitutionnel s’était
invité au débat houleux entre le pouvoir et l’opposition concernant la
prorogation des mandats des parlementaires qui allaient expirer, alors
que des élections ne se profilaient pas à l’horizon, l’organe se
prononça sur l’avis 002-2011, très controversé118, que l’opposition
dénonça car selon elle, cela ne fait pas partie de ses prérogatives 119 . En
fait, les dispositions constitutionnelles attribuant les compétences au
conseil constitutionnel lui confèrent uniquement la compétence de
veiller sur la régularité, les contentieux et proclamation des résultats
électoraux et/ou référendaires, ainsi que de la constitutionnalité des

118
Sur l’affaire de l’avis du Conseil constitutionnel, Voir OULD BOUBOUT A.
Op.cit. Paragraphe 28.
119
Lo Gourmo, avocat et membre dirigeant de l’UFP dénonçait l’avis du conseil
constitutionnel http://odh-mauritanie.com/actualite-8256-lo-gourmo-le-conseil-
constitutionnel-n-est-pas-habilete-a-proroger-le-mandat-des-deputes-et-des-
senateurs.html
63

lois votées par le parlement ou mises en vigueurs par les autorités


administratives. Mais aucun article du titre 6 de la constitution du 20
Juillet 1991 ne lui confère la compétence de statuer sur la possibilité
de prorogation des mandats des parlementaires, autrement dit les juges
du conseil constitutionnel sont juges constitutionnel, juge électoraux
et juge référendaire. Cependant, la loi organique de la révision
constitutionnelle finit par régler le problème des mandats expirants
des parlementaires dans son article 15. La CENI quant à elle, a connu
différents parcours entre 2005 et 2012 selon les différents contextes
électoraux qu’a connus le pays. La première ordonnance la créant était
celle du 2005-012 de Novembre 2005 à titre transitoire, et dans le titre
III de l’ordonnance portant attribution de la CENI, cette dernière
n’avait compétence que de contrôler, et superviser la préparation et
l’organisation des opérations électorales, en outre des compétences
par rapport au fichier électoral. Cependant en 2009, elle eut un statut
d’une CENI partagée, car elle fut instituée grâce aux accords de Dakar
dans le fameux paragraphe 4 au titre IV qui instituait une CENI de
quinze membres dont chaque partis politiques proposa quatre
membres en plus de trois propositions de personnalités « impartiales »
issues de la société civile, cela « sur la base des règles en vigueur et es
expériences passées »120. Cette CENI aura presque la même
compétence que celle de 2007 à seulement des différences avec les
membres ici qui sont le fruit d’un consensus entre les partis politiques
protagonistes. Cependant la CENI de 2012, par le fruit de l’accord
politique de 2011 entre une partie de l’opposition et le pouvoir, est
instituée par la loi organique 2012-027. Cette loi lui donne le caractère
d’une « institution permanente […] disposant de la plénitude des
pouvoirs pour préparer, organiser, superviser l’ensemble de

120
Selon le paragraphe Ier des accords-cadres de Dakar entre les trois grands pôles
politiques mauritaniennes.
64

l’opération électorale, de la phase de validation du fichier électoral


jusqu’à la proclamation provisoire des résultats et leur transmission au
conseil constitutionnel, »121 . Elle est en outre, selon l’article 4, veilleur
à l’égal accès de tous les candidats en lice aux organes officiels de la
presse écrite et audio-visuelle, enfin l’article 5 rassure que l’institution
« dispose d’une indépendance totale et ne reçoit aucune instruction
d’aucune autorité ou institution publique ou privée ». Cela donne à
l’organe chargé des élections de solides bases juridiques en plus de
son statut constitutionnel suite aux amendements de Mars 2012.
Cependant, les lois instituent les organisations, mais ce sont les
hommes qui les façonnent, la dernière élection qu’elle a gérée,
impopulaire qu’elle soit du fait du boycott d’une bonne partie de
l’opposition, n’a pas fait preuve d’irrégularités significatives, cela
n’empêcha pas à l’opposition d’avoir boycotté les élections, car pour
eux il n’y avait aucune garantie relative aux échéances électorales qui
se profilaient en Juin 2014. Prouvant ainsi la méfiance des acteurs de
l’opposition par rapports aux règles du jeu démocratiques qui se sont
faites à leur insu.

121
Article 1er et 2 de la loi 2012-027 sur la CENI, Voir la loi sur
http://www.cndh.mr/images/dossierfichierpdf/Loiorganique2012027CENI.pdf
65

Conclusion générale

La frilosité de l’interaction chez l’élite politique a donné une


fragmentation silencieuse de l’interaction entre les différents acteurs et
par rapport aux questions essentielles du pays qui doivent être
résolues. Cela à des causes qui, d’abord, remontent de la question
même de l’État Mauritanien dont l’existence en tant qu’État-nation fut
très artificielle, la coexistence de plusieurs communautés de modes de
vie différentes combinées à une gouvernance, prenant peu en
considération, cette spécifié mauritanienne, en est une des causes
fondamentales de cette kaléidoscope d’acteurs de la vie politique du
pays. Ensuite, les nombreuses conséquences tragiques et regrettables
qu’a connu le pays à cause de cette ignorance des gouvernants par
rapport au vivre ensemble et à la politique égalitaire des citoyens
mauritaniens, est venues installer une diversité de priorités entre les
projets politiques des acteurs. En outre, la période très longue de
régime militaire autoritaire qu’a subi le pays, et ses populations, a
privée, aujourd’hui, les différents acteurs de l’élite du pays à une
habituation et expérience, de long terme, des pratiques démocratiques.
Et enfin, cette longue expérience de régime des militaires peu
scrupuleux à l’égard des régimes démocratiques a installée chez les
acteurs politiques, qui ont longtemps été leurs adversaires, une sorte
d’obstacle psychologique, mélangé à une phobie des militaires, qui
fait qu’il est difficile pour eux de faire confiance à ces hommes de
tenues qui ont à plusieurs reprises foulés de leurs rangers les règles.
Raison pour laquelle, la consolidation démocratique prendra assez de
temps pour s’effectuer, tant qu’il y a au pouvoir des militaires
civilianisés, immobiliste et faisant fi aux règles et compromis. Cela ne
veut pas dire que les militaires ne sont capables de mener le régime
66

vers une démocratie, mais les militaires soft-liners capables de


soutenir la transition du régime vers une démocratie consolidée sont
minoritaires par rapport aux partisans du statu quo, qui sont aussi, faut
le rappeler, aussi nombreux dans l’armée que chez les civils qui
agissent et les soutiennent dans l’ombre. En ce sens, tout choix des
acteurs destinés à faire des règles, et que par conséquent, ces règles
détermineront le comportement et la confiance que les acteurs, et les
citoyens d’une manière générale, porteront envers elle est voué à
l’échec. Dans la mesure où, il n’y a aucune confiance chez les
différents acteurs de l’opposition dans les différentes règles
fondamentales de gouvernance qui ont été édictées et promulguées
entre 2009 et 2014, car pour eux Aziz et sa mouvance ont toujours la
volonté de les tripatouiller et de rester au pouvoir ad vitam ad
aeternam. La Mauritanie a aujourd’hui, plus que tout pays dans le
monde, besoin d’une stabilité de son régime politique, cela pour des
raisons socio-économiques et géostratégiques profondes, vue ses
étendues et sa position géographique, de même que le taux de sa
population.
67

Annexe
68

Annexe n°1
Carte géographique de la Mauritanie, crédits : Politique
Africaine, 1994, p.9
69

Annexe n°2

Accords-Cadres de Dakar
70
71
72
73
74
75

Annexe n°3

Loi n° 2012-015 du 20 Mars 2012 portant amendement à la


constitution du 20 Juillet 1991
76
77
78
79
80
81

Annexe n°4
Liste des entretiens

Personne Activité Date Lieu


interviewée
Mouhamed Professeur de 25 Aout 2015 Chez lui
Lemine Ould Droit
Dahi constitutionnel à
l’Université de
Nouakchott
Ahmed Salem Professeur de 27 Aout 2015 Chez lui
Ould Bouboutt Droit Public -
Expert
Mohamed Fall Dir Pub du 29 Aout 2015 Au bureau de
Oumeir Journal La La Tribune
Tribune
Samba Thiam Leader du parti 02 Septembre Au siège du
Forces 2015 parti
Progressistes du
Changement
Balla Touré Porte parole de 05 Septembre Chez lui
IRA Mauritanie 2015

Boubacar Leader de 09 Septembre Chez lui


Messaoud l’association 2015
SOS Esclaves
Ladji Traoré Secrétaire 14 Septembre Chez lui
général du parti
Alliance
Populaire
progressiste
Me Fatimata Leader de 16 Septembre A son cabinet
Mbaye l’Association 2015
Mauritanienne
des Droits de
l’Homme
Aminetou Mint Leader de 20 Septembre Au siège de
El Moctar l’Association des 2015 l’association
Femmes Chef de
Famille
Ibrahima Leader du parti 07 Octobre Conférence de
Moctar Sarr AJD/MR presse au siège
du parti
82

Mohamed Leader du parti 20 Octobre Au siège du


Ould Union des 2015 parti
Maouloud Forces de
Progrès
Total : 11 Entretiens
83

Annexe n°5

Prototype Protocole d’entretien des acteurs politiques


Projet de recherche en Sciences politiques – Démocratisation / Année 2014-2015

Objet de recherche : La transition démocratique en Mauritanie à travers la


révision constitutionnelle de 2012

Échantillon : les acteurs, leaders dans les partis politiques

Types d’entretien : Entretien unique, individuel et de type semi-directif

Thèmes à discuter : La cohésion nationale – l’interaction entre les acteurs du


champ politique – les institutions de démocratisations – des Institutions à établir ou
à renforcer

Durée d’interview : environ 45mn – 1h max

Outils d’interview nécessaires : Stylo, carnet de note, dictaphone/ou Smartphone


disposant d’un dictaphone et le questionnaire.

Questionnaire :

Q1- Adhérez-vous au contenu de la révision constitutionnelle de 2012, qui, est une


suite logique de l’accord politique du 19 Octobre 2011, malgré le caractère
restreint et non inclusif de ce pacte ?

Q2- Selon vous, est-ce que le fait de proclamer la diversité culturelle du peuple
mauritanien, et de reconnaitre celle-ci comme un patrimoine national commun, au
niveau du préambule de la constitution, est assez suffisant pour arriver à une
cohésion nationale ?

Q3- Sur cette lignée de la cohésion nationale et de la diversité culturelle, comment


analysait vous la décision des autorités nationales de la dotation du pays d’une
nouvelle base de données biométriques concernant l’identité et les titres sécurisés ?
Autrement dit, en quoi vous inspire la politique d’enrôlement des populations qui a
été fort critiquée et qui a créée, de fait, des mouvements anti-enrôlement « raciste »
?

Q4- Concernant le passif humanitaire, y estimez-vous des avancées depuis le


changement de régime en 2009 et peut il être un obstacle à l’unité nationale ?

Q5- S’agissant de l’esclavage et de ses séquelles ; Voyez-vous dans, jadis, le


nouvel article 13 de la constitution considérant le phénomène comme crime contre
l’humanité, et également dans la récente loi 49-15 votée par l’assemblée le 13 Aout
et qui porte sur l’élargissement des crimes d’esclavages et des peines, une avancée
significative du régime en place en matière de lutte contre l’esclavage ou juste une
répétition sans effet réelle sur le terrain ?

Q6- Lorsque l’on se réfère à l’article 10 de la constitution, elle est,


vraisemblablement, un rempart à tout acte qui pourrait être liberticide pour le
84

citoyen, pensez-vous que le pouvoir en place s’inscrit, dans la logique de cet article
tout en assurant la sécurité et « l’unité de la nation », ou est-ce dans une logique de
violation des libertés, notamment publiques ?

Q7- Comment qualifierez vous, en tant qu’acteur politique, l’interaction entre les
acteurs politiques ?

Q8- Quel bilan faites-vous de certaines institutions telles que la CNDH, le Conseil
constitutionnel et la CENI, cela depuis leur existence de jure ?

Q8- Comment envisagerez-vous la relation de l’Armée avec le pouvoir politique et


les civils ? Autrement dit, la considération de l’alinéa 4 de l’article 2 de la
constitution, des coups d’États et « autres formes de changements
anticonstitutionnels » comme des crimes imprescriptibles peut-elle changer la
nature des relations entre l’armée et le pouvoir politique, et de surcroit les civils ?

Prototype Protocole d’entretien des acteurs de la société civile


Projet de recherche en Sciences politiques – Démocratisation / Année 2014-2015
85

Objet de recherche : La transition démocratique en Mauritanie à travers la


révision constitutionnelle de 2012

Échantillon : les acteurs, leaders dans la société civile

Types d’entretien : Entretien unique, individuel et de type semi-directif

Thèmes à discuter : L’unité nationale – les droits de l’homme – l’esclavage – Les


libertés – les institutions de démocratisation

Durée d’interview : environ 45mn – 1h max

Outils d’interview nécessaires : Stylo, carnet de note, dictaphone/ou Smartphone


disposant d’un dictaphone et le questionnaire.

Questionnaire :

Q1- Selon vous, est-ce que le fait de proclamer la diversité culturelle du peuple
mauritanien, et de reconnaitre celle-ci comme un patrimoine national commun, au
niveau du préambule de la constitution, est assez suffisant pour arriver à une
cohésion nationale ?

Q2- Sur cette lignée de la cohésion nationale et de la diversité culturelle, comment


analysez vous la décision des autorités nationales de la dotation du pays d’une
nouvelle base de données biométriques concernant l’identité et les titres sécurisés ?
Autrement dit, en quoi vous inspire la politique d’enrôlement des populations qui a
été fort critiquée et qui a créée, de fait, des mouvements anti-enrôlement « raciste »
?

Q3- Et est-ce qu’à vos yeux le dossier du passif humanitaire, ouvert depuis le
passage de Sidi au pouvoir, peut être un facteur bloquant à l’unité nationale et quel
bilan en faites-vous jusque-là ?

Q4- Concernant la question de l’esclavage et de ses séquelles ; Voyez-vous dans,


jadis, le nouvel article 13 de la constitution considérant le phénomène comme
crime contre l’humanité, et également dans la récente loi 49-15 votée par
l’assemblée le 13 Aout et qui porte sur l’élargissement des crimes d’esclavages et
des peines, une avancée significative du régime en place en matière de lutte contre
l’esclavage ?

Q5- En ce qui s’agit de la notion de Liberté et de l’article 10 de la constitut ion dont


les clauses sont, vraisemblablement, des remparts à tout acte qui pourrait être
liberticide, pensez-vous que cette liberté est effective ou elle est quasiment violée
par le pouvoir, surtout concernant les libertés publiques ?

Q6- Accordez-vous une confiance aux institutions qui ont été érigées, notamment
par la constitution de 2006, puis révisé en 2012, à savoir La CENI, La CNDH, la
HAPA, et le conseil constitutionnel, à pouvoir supporter et accompagner la
démocratisation jusqu’à son effectivité ?
86

Q7- En tant qu’acteur de la société civile, pensez-vous que les acteurs au sein des
partis politiques ont la volonté et les moyens de rendre effective la démocratisation
du pays ?

Q8- Enfin, quelle type de relation envisagez-vous entre l’armée, les civils et le
pouvoir politique ? Autrement dit, quelle place l’Armée devrait-elle occuper dans
ce pays ?

Prototype Protocole d’entretien des personnes savantes : Professeurs,


journalistes, experts….
Projet de recherche en Sciences politiques – Démocratisation / Année 2014-2015

Objet de recherche : La transition démocratique en Mauritanie à travers la


révision constitutionnelle de 2012
87

Échantillon : Les personnes savantes : professeur, observateur ou expert du


domaine

Types d’entretien : Entretien documentaire

Thèmes à discuter : La cohésion nationale – l’interaction entre les acteurs du


champ politique – les institutions de démocratisations – des Institutions à établir ou
à renforcer

Durée d’interview : environ 45mn – 1h max

Outils d’interview nécessaires : Stylo, carnet de note, dictaphone/ou Smartphone


disposant d’un dictaphone et le questionnaire.

Questionnaire :

Q1- Comment interprétez-vous les amendements constitutionnels en 2012 par


rapport au contexte qui l’a précédé à savoir le coup d’État de Aziz et son arrivée au
pouvoir, de jure, c’est-à-dire après les présidentielles de 2009 ?

Q2- Lorsque l’on aborde un thème qui agite la politique nationale, tel que la
cohésion nationale, primo, par rapport au préambule, comment expliquez-vous
l’insertion dans le préambule d’une reconnaissance de la diversité culturelle de la
société mauritanienne comme un « patrimoine national commun » ?

Q3- Secundo, une autre variable de cette question, à savoir ce qui est appelé « le
passif humanitaire »ou la question des réfugiés Mauritaniens des évènements de
1989, estimez-vous que le problème a été réellement résolu ? Si non, quels sont les
obstacles ? Si oui, dans quel aspect le bilan est-il positif ?
Q4- Par rapport à la question de l’esclavage, elle semble tenir tête aux autorités au
pouvoir, cela depuis 2007. La loi criminalisant la question en 2007, puis son
élévation au niveau constitutionnel et sa considération comme crime contre
l’humanité en 2012, et enfin, l’adoption par l’assemblée nationale le 13 Aout de la
loi 49-15 qui élargit les peines et les actes considérés comme esclavagistes. Est-ce
que cela traduit une volonté réelle des autorités d’éradiquer le phénomène ou est-ce
uniquement une stratégie politique ?

Q5- Lorsque l’on évoque les leaders politiques, est-ce que l’on peut dire qu’il y a
une polarisation chronique de ces acteurs, cela depuis le coup d’État d’Aout 2008 ?
Si oui, quels sont les facteurs explicatifs de cette division et de quel camp viennent-
elles ?

Q6- Lorsque l’on aborde certaines institutions qui ont été établit dans le courant de
la démocratisation, peut-on parler de bilan positif de celles-ci : je veux dire par là la
CNDH, La CENI et le Conseil constitutionnel ?

Q7- Quel rôle pensez-vous que la société civile mauritanienne peut jouer dans le
cadre de la démocratisation, et comment peut-elle jouer ce rôle ?
Q8- Quelle interprétation faites-vous de l’alinéa 4 de l’article 2 de la constitution
qui désormais interdit les putschs et « autres formes de changement
anticonstitutionnels » au niveau du pouvoir ?
88

Q9- Dans un rapport Armée – pouvoir politique – et civil, quelle place pensez-vous
que l’armée pourrait occuper dans une Mauritanie démocratique, cela malgré le
pouvoir prétorien qui a existé durant au moins vingt-cinq années ?
89

Bibliographie

Ouvrages :

- BOYE A. H., J’étais à Oualata, le racisme d’État en


Mauritanie, l’Harmattan, 1999.

- DEL BAYLE J-L. L., Initiation aux méthodes des sciences


sociales, Classiques des Sciences Sociales, 2000.

- HUNTINGTON S., Troisième Vague, Les démocratisations de


la fin du XX ème siècle, Nouveaux Horizons, 1991.

- KAMARA C. S., Afrique : Esperance, Harmattan Mauritanie,


2011.

- LINZ J.J. et STEPAN A. Problems of Democratic transition


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communist Europe, J.H.U Press, 1996.

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Textes et documents officiels :

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2006 et 2012.

- La constitution Malienne de Février 1992.

- La loi 048-2007 portant criminalisation de l’esclavage.

- La loi 1961-12 portant code de la nationalité mauritanienne.

- La loi 2000-043 relative au régime juridique particulier des


associations de développement.

- La loi 2007-054 relative à la transparence financière de la vie


publique.

- La loi 2010-023 modifiant la loi 1961-12 portant code de la


nationalité mauritanienne.

- La loi 2010-031 portant création de la CNDH.

- La loi 64-098 relative aux associations.

- La loi 93-023 portant amnistie aux membres des forces armées


et de sécurités.

- La loi constitutionnelle 2012-015 portant amendement à la


constitution.

- La loi organique 2012-027 portant création de la CENI.

- Ordonnance 023-91 sur la liberté de la presse.

- Ordonnance 024-91, modifiée par la loi 014-94, la loi 030-2001


relative aux partis politiques
96

- Ordonnance 2005-012 portant création de la CENI à titre


transitoire.

- Ordonnance 2006-015 portant créations de la CNDH.

- Ordonnance 2007-013 relatives associations civiles


professionnelles.

Dictionnaires :

- Encyclopédie de Science politique, BADIE B., 2014.


- Lexique des termes juridiques, 22ème édition, Dalloz,
2014-2015
97

Glossaire

Abd : Esclave en arabe


Bambaras : Communié culturelle au Mali, Mauritanie
et au Sénégal
Beïdane : Maure, communauté culturelle sur
l’étendue du Sahara
Blandos : Doux (littéralement)
Duros : Dur (littéralement)
El hor : Le libre
Fatwa : Avis
Halpoulareen : Ceux qui s’expriment en Poular,
communauté culturelle sur l’étendue de
l’Afrique de l’ouest
Harratine : Pluriel de hartani
Hartani : l’affranchi
Hassanophones : Ceux qui s’expriment en hassanya
Hassanya : Langue d’expression des beïdanes
Jaam : esclave en wolof
Kome : esclave en soninké
Maccudo : esclave en Poular
Oulémas : érudits islamique
Oulof /Wolof : Communauté culturelle en Gambie,
Mauritanie et au Sénégal
Pair-competitor : Protagoniste / adversaire
Poker face : Poker menteur
Polity : La communauté politique
Quaadis : Juge islamique
Rahil : Quitte
Raïs : Président
Remake : Répétition
Sarakolé / Soninké : Communauté culturelle presque sur
l’étendue de l’Afrique de l’Ouest
98

Tables des matières

Introduction ........................................................................... 1

Première Partie : Les acteurs de la politique mauritanienne :


Un dialogue inaudible .......................................................... 13

Chapitre I : Profil des acteurs de la scène politique


mauritanienne ..................................................................... 14
Section I : Mauritanie, la caserne des militaires : entre hard-
liners et soft-liners ........................................................... 14
Paragraphe I : Ely le blandos ......................................... 14
Paragraphe II : Aziz le duros ......................................... 16
Section II : Des oppositions qui s’opposent ....................... 18
Paragraphe I : Opposition anti régime : Les fausses
alliances........................................................................ 18
Paragraphe II : Opposition anti système : les acteurs en solo
..................................................................................... 21
Chapitre II : Le général (E/R), l’opposition hétéroclite et le
régime ................................................................................ 24
Section I : Les accords de Dakar oubliés et les « radicaux » à
la marge........................................................................... 24
Paragraphe I : Les opposants : les coups manqués de
l’alternance ................................................................... 24
Paragraphe II : Les lignes dures de l’opposition et le poker
face du raïs ................................................................... 29
Section II : Une démocratie qui se consolide ou un
autoritarisme libéral ......................................................... 31
Paragraphe I : Le risque d’un remake de l’ère Taya ........ 31
Paragraphe II : Des problèmes de la consolidation ............. 36
99

Deuxième partie : De timides amendements pour de sérieux


problèmes ............................................................................. 39

Chapitre I : Amendements et lois face aux tares sociales: les


obstacles à la démocratisation.............................................. 40
Section I : Les problèmes sociaux premiers: quelle solution
normative ? ...................................................................... 40
Paragraphe I : Génocide ou passif humanitaire : victimes
versus bourreaux ........................................................... 40
Paragraphe II : L’esclavage et les lois : abolitionniste
versus féodaux .............................................................. 45
Section II : Le problème de cohabitation ........................... 48
Paragraphe I : La question de la citoyenneté : le délit de
fasciés .......................................................................... 48
Paragraphe II : Cohésion sociale ou unité nationale ........ 51
Chapitre II : Amendements et renforcements: les autres
institutions sociales ............................................................. 54
Section I : La société civile, l'armée et le pouvoir .............. 54
Paragraphe I : Un alinéa pour trois décennies de putsch .. 54
Paragraphe II : Une société civile à encourager............... 57
Section II : Des institutions à renforcer.............................. 59
Paragraphe I : Des institutions consultatives ................... 59
Paragraphe II : Des autres institutions : le conseil
constitutionnel et la CENI ............................................. 62
Conclusion générale ............................................................. 65

Annexe ................................................................................. 67

Annexe n°4 ........................................................................... 81

Glossaire .............................................................................. 97

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