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Page 2 Vers une indifférence des pouvoirs publics…?

SOMMAIRE

SIGLES ET ABREVIATIONS…………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………….……3

INTRODUCTION……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………….….4

CRISE SOCIALE DE FEVRIER 2008...UN FLASH BACK………………………………………………………………………………………………………………………………;…….5

EVALUATION DE LA MISE EN ŒUVRE DES RECOMMANDATIONS……………………………………………………………………………………………………………7

Recommandation 1: Reconnaître publiquement et condamner le recours excessif à la force par les forces de sécurité de l’Etat, au
cours des manifestations de fin février 2008…………………………………………………………………………………………………………………………………………………...8

Recommandation 2: Diligenter une enquête judiciaire, indépendante et impartiale, sur les crimes et violations graves aux droits de
l’homme commis fin février 2008, afin que les responsables soient jugés et condamnés conformément à la loi. Le rapport et les
résultats de cette enquête devront être publics………………………………………………………………………………………………………………………………………………9

Recommandation 3: Relâcher immédiatement toutes les personnes qui sont encore en détention et qui ont été arbitrairement
arrêtées, illégalement détenues, ou injustement condamnées pendant et après les évènements de fin février 2008.……….……………..11

Recommandation 4: Veiller à ce que les blessés reçoivent les soins médicaux et le soutien psychologique nécessaire, et veiller à ce
que toutes les victimes reçoivent des réparations adaptées………………………………………………………………………………………………………………………..12

Recommandation 5: Coopérer pleinement aux éventuelles enquêtes internationales à venir………………………………….…………………………..13

Recommandation 6: Assurer une meilleure protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales, pour créer un environ-
nement propice à la tenue en 2011, des élections présidentielles libres, ouvertes, démocratiques et transparentes…………….…………..13

CONCLUSION — RECOMMANDATIONS……………………………………………………………………………………………………………………………………………………….17
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SIGLES ET ABREVIATIONS

ACAT : Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture

BIR : Bataillon d’Intervention Rapide

DUDH : Déclaration Universelle des Droits de l’Homme

ELECAM : Elections Cameroon

EPU : Examen Périodique Universel

ESIR : Equipe Spéciale d’Intervention Rapide

GSO : Groupe Spécial d’Opération

NODYNA : Nouvelle Dynamique Nationaliste Africaine

ONDH : Observatoire National des Droits de l’Homme

PMUC : Pari Mutuel Urbain Camerounais

RDPC : Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais

SDF : Social Democratic Front


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INTRODUCTION
25 - 29 février 2008, 25 - 29 février 2012, quatre années – jour pour jour - que le Came-
roun a été le théâtre des tristes émeutes de la faim et contre la vie chère.

En effet, du 25 au 29 février 2008, le Cameroun a fait l’objet des plus importants mouve-
ments sociaux qu’il ait connu depuis plus de vingt (20) ans. Partant d’un mouvement de
grève nationale lancé par les transporteurs du fait de la hausse du prix du carburant à la
pompe, la grève s’est vite muée en mouvement de revendications sociales, principalement
dans les cinq (05) régions du grand sud du Cameroun. Les populations et notamment les
jeunes ont pris d’assaut les rues avec des revendications dans trois domaines clés :

Dans le domaine Socio-économique: Les revendications portaient sur les prix trop élevés
des produits de première nécessité, notamment le carburant, le riz, le pain, le ciment, l’huile
de palme, etc. ; l’accès problématique aux soins de santé primaires et à l’éducation ; le fai-
ble pouvoir d’achat du fait de revenus trop bas et le chômage criard.

Dans le domaine Politique : La tentative de modification de la constitution pour permettre


au Président Biya de briguer un mandat supplémentaire en 2011.

Dans le domaine des Libertés Civiques : l’interdiction des manifestations publiques dans
la région du Littoral par le Gouverneur ; le musellement des médias couronné par la ferme-
ture de Equinoxe TV et radio à Douala ainsi que de Magic FM à Yaoundé ; la répression
violente des manifestations organisées par l’opposition notamment le Social Democratic
Front (SDF) dans la région du Littoral ayant fait trois morts à Douala.

Ainsi, avec l’appui de l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT) Littoral au
Cameroun et l’ACAT-France en mission d’enquête au Cameroun, l’Observatoire National
des Droits de l’Homme (ONDH) a publié un rapport, sur la situation, intitulé : 25-29 février
2008, Cameroun: une répression sanglante à huis clos. Dans ce rapport, un ensemble
de recommandations avaient été précisément formulées à l’endroit du gouvernement ca-
merounais.

Deux cent huit (208) semaines plus tard, une question fondamentale reste ouverte dans
l’esprit du citoyen camerounais: Peut-on dire que les pouvoirs publics Camerounais
ont pris des mesures pour faire la lumière sur les exactions enregistrées aux cours
des évènements de février 2008, et de prévenir d’éventuels soulèvements?

Telle est la problématique qui justifie la substance de ce rapport de suivi des recommanda-
tions faites au gouvernement Camerounais à la suite des évènements de février 2008.

Outre le rappel des faits et l’analyse fondée sur l’observation, ce rapport est également le
fruit des enquêtes menées auprès des victimes et familles des victimes à l’exemple de
Monsieur KAMENI Joe De Vinci dit Joe la Conscience (artiste musicien – combattant pour
la démocratie) ; des Hommes d’Eglise notamment le Cardinal Christian TUMI ; des parle-
mentaires dont l’honorable Jean-Michel NINTCHEU (député S.D.F) ; des Hommes politi-
ques à l’instar de Monsieur Hervé Emmanuel NKOM (Cadre, membre du Comité central du
RDPC – parti au pouvoir), de Monsieur Albert NDZONGANG ( président du parti politique ″
La Dynamique″ – Candidat à l’élection présidentielle du 09 octobre 2011).

La publication du présent rapport trouve son fondement dans la démarche entreprise par
l’ACAT-Littoral depuis 2008 visant à dénoncer les exactions commises au cours des émeu-
tes de février 2008 et à inviter les pouvoirs publics à procéder aux diverses réparations au-
près des victimes ou leurs ayants droits.
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CRISE SOCIALE DE FEVRIER 2008...UN FLASH BACK


Après la crise sociopolitique de
1990 marquée par le phénomène
des « villes mortes », le Cameroun a
également vécu une période de
turbulence en fin février 2008.

En effet, tout commence avec le


projet de révision de la constitution
en son article 6, alinéa 2 initiée par
le Président de la République du
Cameroun et, par l’arrêté du Gou-
verneur de la Région du Littoral,
rendu public le 15 janvier 2008,
interdisant toute manifestation et
autres occupations non autorisées
sur la voie publique.

En dépit de cette mesure adminis-


trative, la ville de Douala a été mar-
quée par des meetings et marches
de protestation contre la modifica- opté pour la dispersion de la foule à de 35% pour les produits alimen-
tion de la constitution, organisés et l’aide du gaz lacrymogène et des ca- taires » ; « Nous n’avons plus d’a-
tenus par Monsieur MBOUA MAS- mions lance-eau. Cette dernière réac- venir; Paul BIYA doit partir… ».
SOK, leader nationaliste panafricain tion a créé un affrontement entre les Dans la mêlée, l’on pouvait égale-
(Président de la Nouvelle Dynami- forces de sécurité et des individus ve- ment entendre les femmes dire :
que Nationaliste Africaine – NODY- nus assister au meeting. La situation « Nous ne pouvons plus nourrir
NA) et par le parti politique de l’op- s’est transformée en une véritable nos enfants à cause de la vie chè-
position S.D.F de NI John FRU NDI. émeute entrainant de ce fait, trois (03) re ; Nos enfants qui ont fini l’école
C’est au cours de ces différentes morts, de nombreux blessés et des dé- sont encore à notre charge..». Il
manifestations que les manifestants gâts matériels. est observé des attroupements
ont été dispersés par les éléments des jeunes manifestants dans les
des forces de l’ordre et que Mon- Alors que la ville de Douala est en plei- grands carrefours et artères des
sieur MBOUA MASSOK a été inter- ne ébullition, les acteurs syndicaux des villes, installant des barricades
pellé et déporté pour être abandon- transporteurs et les représentants du avec de vieilles roues de voitures
né dans une brousse de la zone de gouvernement sont à Yaoundé pour et incendiant tout sur leur passa-
Yabassi. une négociation relative à la baisse des ge.
En prévision du meeting du parti prix de carburants et à la levée du mot
politique du Social Democratic d’ordre de grève générale des trans- A en juger par l'ampleur du mou-
Front (SDF), programmé le 23 fé- porteurs programmée pour le lundi 25 vement et l'étendue des dégâts, il
vrier 2008 au lieu dit "Carrefour Da- février 2008. est apparu pour les pouvoirs pu-
kar", dans l’Arrondissement de blics que la situation était très gra-
Douala 3ème dont l’objectif visait la En l’absence d’un consensus, le mot ve, bien plus grave que ce que les
sensibilisation du public à la non d’ordre de grève générale des trans- villes mortes ont fait en beaucoup
révision de l’article 6 alinéa 2 de la porteurs est massivement suivi le lundi de temps. Alors, toutes les forces
Constitution, une forte mobilisation 25 février 2008. Toutefois, le mouve- ont été mobilisées avec des
des forces de l’ordre a été déployée ment de grève s’est vite transformé en moyens disproportionnés face
sur le lieu et a assailli le quartier Da- un mouvement de protestation et de aux populations aux mains nues.
kar tout autour de l’espace prévu revendication populaire. Très vite, la Les militaires (forces de 3é catégo-
pour le meeting. circulation des véhicules et des motos rie) sont sortis des casernes ; la
est bloquée, les commerces sont pillés, police et la gendarmerie ainsi que
Arrivés sur le lieu, et après avoir les véhicules des particuliers sont en- des unités spéciales comme le
constaté un important déploiement dommagés, les services publics vandali- GSO, ESIR et le BIR ont investi le
des éléments de force de sécurité, le sés et des personnes en circulation terrain avec des armes à feu tirant
député Jean Michel NINTCHEU et brutalisées. Les manifestants portent à balles réelles ; des chars et des
son équipe ont purement et simple- des pancartes sur lesquels on peut li- hélicoptères prenant du terrain.
ment annulé la tenue dudit mee- re des slogans de types: «Non à la vie
ting. C’est ainsi que, les éléments chère »;« Ne touche pas à ma Consti- Au finish, le gouvernement an-
des forces de l’ordre présents ont tution » ; « Nous voulons une baisse nonce officiellement qu’il y a eu
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quarante (40) morts dont un élé- les arrestations massives, de multi-


ment des forces de sécurité et le des actes de pillages, de destruc-
ples cas de violations ont également
reste relevant des manifestants et tions des biens publics et privés.
été recensés notamment :
de nombreux blessés tant du côté Ainsi, quarante-quatre (44) édifi-
- La violation du droit de la défense
des manifestants que celui des for- ces publics ont été saccagés. Les
lors des procès;
ces de l’ordre. Par ailleurs, les orga- opérateurs économiques ont subi
- Les procès expéditifs;
nisations de la société civile affir- de lourdes pertes qui s’évaluent à
- Les jugements des mineurs en au-
ment qu’il y a eu au moins 139 de dizaines de milliards de francs
dience de flagrant délit sans infor-
morts au cours de ces émeutes et CFA ; Trente-trois (33) stations-
mations judiciaires préalables;
plus de 3 000 personnes arrêtées, service ont été totalement détrui-
- Les jugements et condamnations
torturées et déférées aux parquets, tes ; Plusieurs dépôts de sociétés
des prévenus sans identification
alors que le gouvernement a donné brassicoles ont été pillés ; Des
fiable;
un chiffre officiel de ″ 1137 person- kiosques du Pari Mutuel Urbain
- Les coups, blessures et tortures
nes interpellées dans les cinq pro- Camerounais (PMUC) ont été sac-
durant la détention;
vinces touchées par les troubles″ . cagés.
- Les rafles post-manifestations.
De même, dans les villes touchées
Outres les exécutions arbitraires et par les émeutes, l’on a enregistré
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EVALUATION DE LA MISE EN ŒUVRE DES RECOMMANDATIONS

A la suite des “émeutes de la faim’’ de février 2008, l’Observatoire National des Droits de l’Homme en
collaboration avec l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT) – Littoral et l’ACAT-
France, a produit un rapport d’observation et d’enquête sur lesdites intitulé «25-29 février 2008, Came-
roun: une répression sanglante à huis clos.». En dehors de l’exposé factuel, ce rapport a dénoncé les
multiples dérives et violations des Droits de l’Homme observées lors de ces émeutes.
A cet effet, dans le souci d’accompagner les pouvoirs publics dans leurs missions de promotion et de
protection des Droits de l’Homme au Cameroun, des recommandations citoyennes lui avaient été fai-
tes en février 2009 dans le rapport sus évoqué. Il s’est agit notamment de :

- Reconnaître publiquement et condamner le recours excessif à la force par les forces de sécurité de
l’Etat, au cours des manifestations de février 2008 ;

- Diligenter une enquête judiciaire, indépendante et impartiale, sur les crimes et violations graves des
Droits de l’Homme commis fin février 2008, afin que les responsables soient jugés et condamnés
conformément à la loi ;

- Relâcher immédiatement toutes les personnes qui sont encore en détention et qui ont été arbitraire-
ment arrêtées, illégalement détenues, ou injustement condamnées pendant et après les évènements
de fin février 2008 ;

- Veiller à ce que les blessés reçoivent les soins médicaux et le soutien psychologique nécessaire, et veil-
ler à ce que toutes les victimes reçoivent des réparations adaptées ;

- Coopérer pleinement aux éventuelles enquêtes internationales à venir ;

- Assurer une meilleure protection des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales, pour créer un
environnement propice à la tenue, en 2011, d’élections présidentielles libres, ouvertes, démocratiques
et transparentes.

Quatre années plus tard, l’ACAT s’interroge sur le niveau de prise en compte desdites recommanda-
tions par les pouvoirs publics.

Pour arriver à une esquisse de réponse, l’ACAT-Littoral a fait appel aux avis des acteurs politiques, parle-
mentaires, Religieux, des victimes et famille des victimes en l’occurrence :
- Monsieur KAMENI Joe De Vinci dit Joe la Conscience (Victime, artiste musicien – Nationaliste/
combattant pour la démocratie) ;
- Monsieur Hervé Emmanuel NKOM (Cadre du parti, membre du Comité central du RDPC – parti au
pouvoir) ;
- Honorable Jean-Michel NINTCHEU (député – Vice-président du groupe parlementaire S.D.F) ;
- Monsieur Albert NDZONGANG (Président du parti politique ″La Dynamique″ – Candidat à l’élection
présidentielle du 09 octobre 2011) ;
- Eminence Christian Cardinal TUMI (Evêque émérite de l’Archidiocèse de Douala).
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Recommandation 1: Reconnaître publiquement et condamner le recours excessif à la


force par les forces de sécurité de l’Etat, au cours des manifestations de fin février 2008.

DE L’AVIS DES ACTEURS… nos forces surtout de police et de soit en permanence pour tout le
gendarmerie pour le maintien de monde et que nos forces ne soient
Jean-Michel NINTCHEU : « je dois l’ordre afin de ne pas faire intervenir pas utilisées contre la population. »
dire que l’Etat du Cameroun n’a pas les forces de 3ème degré donc l’ar-
du tout reconnu les exactions de mée de terre. – mais cette recom- Joe la Conscience : « Le gouverne-
février 2008. Je pense que l’Etat mandation ne pose pas pour autant ment de Monsieur Biya n'a jamais
représenté par le chef de l’Etat a moins le problème de professionna- formellement reconnu que les mas-
plutôt indexé les mains invisibles qui lisme et de capacité de l’Etat à main- sacres de grande envergure avaient
auraient manipulés des jeunes pour tenir l’ordre sans violer les droits – été perpétrés sous ses ordres en
– souvenez-vous du fameux terme sans porter atteinte aux personnes février 2008 au Cameroun, ce qui
« Apprentis sorciers » - donc on est physiques – l’ultime organisation est d’ailleurs normal dans la mesure
resté dans le déni de ces exactions. sociale, c’est la protection de l’indivi- où se serait comme demander à
Je continue à penser que le gouver- du – c’est l’homme qui est quand quelqu'un de se faire hara-kiri.
nement du Cameroun a tout fait même le début et la fin de tout. Même si au lendemain de ces mas-
pour banaliser ces évènements ex- Donc il faut que nous puissions vi- sacres le ministre de la justice d'alors
trêmement graves qui ont conduit vre en harmonie pour que toute avait reconnu 40 morts ceux-ci sont
au massacre de centaine de jeunes activité humaine même au nom de malheureusement considérés par le
camerounais. Et c’est cette attitude l’intérêt collectif ne porte pas attein- gouvernement comme étant des
des pouvoirs publics de vouloir à te ni physiquement, ni moralement subversifs, des déstabilisateurs qui
tout pris masquer la gravité de ces à l’individu. Mais ceci dit, on ne peut méritaient la mort, raison pour la-
évènements qui est révoltante. » pas non plus au nom de quelle aucune démarche réparatrice
"libertialisme" ouvrir la voie à l’anar- ou même de simple excuses publi-
Hervé NKOM : « je n’ai lu aucun chie – il faut qu’il y ait des autorités
rapport de l’Etat qui démontre qu’il ques n'ont jamais été engagées par
de maintien de la paix. ces autorités, qui depuis se sont en-
ya eu des exactions – disons simple-
ment qu’il y a eu des problèmes de Donc c’est un équilibre normal en- fermées dans une arrogance
dysfonctionnement dans la gestion tre liberté de manifestation, de pro- condescendante qui consiste à cari-
du maintien de l’ordre. Nous avons testation mais aussi de maintien de caturer tous ceux qui s'opposent à
une armée qui a certes cinquante l’ordre public. ce gouvernement comme étant des
ans, mais qui est jeune dans la pra- vermines qu'il faut absolument éra-
Je ne suis pas d’accord quand on dit diquer par tous les moyens. »
tique de certaines techniques pour que l’armée délibérément a commis
le maintien de l’ordre. Il faut que les des exactions – on ne peut pas faire Albert NZONGANG : « L’Etat a pen-
gens soient humbles dans ce pays – sé jusqu’ici avoir été agressé par
une omelette sans casser les œufs –
l’Armée qui a été créée dans les an- ceux qui ont osé dire que la vie est
il y a eu quelques couacs – mais se
nées soixante n’est pas une armée chère. L’intervention de la police
sont des couacs que normalement
qui est adaptée aux évènements tels chez nous est une pratique qui ne
on ne peut pas accepter – qui doi-
que les violences urbaines, les érup- m’émeut pas. Selon le gouverne-
vent être corrigés.
tions, les mouvements de masse des ment, les éléments des forces de
années 90 voir 2000 ; donc aujourd- S’il ya eu un seul camerounais qui l’ordre n’ont pas commis d’exac-
’hui, nous devons ensemble avoir est mort, c’est un mort de trop – je tions, mais ils ont maintenu la paix.
l’humilité pour dire que au fur et à pense qu’il ya eu des problèmes, ce Le maintien de la paix au Cameroun
mesure que nous allons connaître n’est par ce que certains les regar- veut dire qu’on a cassé quelques
certains évènements, nos forces de dent aujourd’hui avec un sourire – œufs même si on n’a pas fait d’ome-
sécurité doivent être adaptées à ceux qui gèrent le "ministère de la lettes. Je pense que l’Etat est loin de
ceux-ci et au tempérament de la parole", les activistes pensent que reconnaître ses manquements dans
population. Car les forces de sécuri- s’était un défoulement, mais nous tous les secteurs de la vie au Came-
té ne sont pas là pour réprimer les qui étions dedans, nous savions roun. »
droits de l’homme – elles ne sont qu’on a frôlé la catastrophe lors de
non plus là gratuitement. Il faut ces émeutes. La preuve : ailleurs cela Cardinal Christian TUMI : « Nous ne
néanmoins dire que l’Etat à quand s’est transformé en catastrophe. sommes pas au courant d’une re-
même le monopole de la violence Réjouissons-nous qu’il n’ya pas eu connaissance officielle. D’ailleurs ce
pour que l’ordre reste à la loi pour plus de morts – mais je crois qu’on qui c’est passé en 2008 rentre dans
l’intérêt général et que l’on n’entre devrait, ensemble, envisager les pos- le même sillage que celui des villes
pas dans l’anarchie. Donc Il faut sibilités de manière à ce que les pro- mortes, du Commandement opéra-
faire un équilibre savant entre les testations, les manifestations n’en- tionnel et des neuf de Bépenda.
deux. C’est vrai qu’en 2008, et cha- traînent pas mort d’homme. C’est ça Donc je ne suis pas au courant. »
que fois qu’il y a évènement, on la société idéale – Aujourd’hui je
constate qu’il faut qu’on aille encore souhaite simplement que la liberté
dans le chemin de la formation de reste la règle et que la paix sociale
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CE QUE PENSE L’ACAT… l’on note que le gouvernement du


Convention contre la torture et
Cameroun a délibérément fait fi de
Quatre années plus tard, le peuple a ut re s p e i n es ou t r a it e -
ses engagements à l’égard de la
Camerounais garde toujours l’espoir ments cruels, inhumains ou dé-
constitution (en son préambule), et
que les pouvoirs publics se décide- gradants qui dispose
des instruments juridiques interna-
ront finalement à réagir par le biais que : «Aucune circonstance ex-
tionaux régulièrement ratifiés ou
d’une adresse à la nation, relative- ceptionnelle, quelle qu'elle soit,
officiellement approuvés.
ment au comportement déviant de qu'il s'agisse de l'état de guerre ou
ses éléments de force de sécurité et Il s’agit ainsi du non respect du de menace de guerre, d'instabilité
de maintien de la paix en février contenu de l’article 3 de la Déclara- politique intérieure ou de tout
2008. tion Universelle des Droits de l’Hom- autre état d'exception, ne peut
me du 10 Décembre 1948, qui dis- être invoquée pour justifier la tor-
En prenant en considération l’état pose que : «Tout individu a droit à la ture ».
actuel des choses, et les différentes vie, à la liberté et à la sûreté de sa
enquêtes et interviews menées Tous ces articles font défense à
personne ».
dans l’optique de se rassurer du l’Etat de faire un recours excessif à
respect de cette recommandation, Dans le même ordre, l’ACAT note la la force quelque soit la situation.
violation de l’article 2 al.2de la

Recommandation 2 : Diligenter une enquête judiciaire, indépendante et impartiale, sur les crimes
et violations graves aux droits de l’homme commis fin février 2008, afin que les responsables soient
jugés et condamnés conformément à la loi. Le rapport et les résultats de cette enquête devront être
publics.
DE L’AVIS DES ACTEURS… peut-être ordonnée sachant que çant la survie du régime. C’est pour-
c’est ce même régime qui a ordon- quoi cette armée considère les déri-
Jean-Michel NINTCHEU né les massacres. je pense qu’il ne ves comme le dernier rempart qui
faut pas perdre de vu le contexte de doit protéger le régime. C’est pour-
« Je pense que le gouvernement a
ces évènements – ça faisait suite au quoi toutes ces forces de sécurité ou
effectivement promis la mise en pla-
désir de monsieur Biya de modifier de « répression » son pratiquement
ce d’une commission d’enquête
la constitution pour s’éterniser au assurées d’être protégée, sont assu-
chargée de faire la lumière sur ces
pouvoir – de faire sauter les verrous rée d’une impunité automatique –
évènements. Je pense que le gou-
vernement l’a fait sous pression et le de limitation de mandat qui faisait donc je dirai que c’est une espèce
de 2011 le terminus pour lui. Dont de complicité, de relation incestueu-
but recherché était l’effet d’annon-
ce. En réalité, rien n’a été fait. J’ai la c’est dans ce contexte que monsieur se entre l’armée et le pouvoir. L’ar-
Biya est directement responsable de mée étant le dernier rempart de
chance de rencontrer les familles
ces massacres. Il ne faut pas directe- protection pour le pouvoir de Mon-
victimes des évènements de février
2008 et je puis vous dire depuis ment occulter sa responsabilité et ça sieur Biya qui est illégitime et qui
2008, aucunes de ces familles n’a m’étonnerait que des enquêtes sé- s’appuie sur cette armée pour répri-
été approchés. Et ça m’étonnerait rieuses soient menées car celles-ci mer de manière extrêmement féro-
qu’une enquête sérieuse soit menée remonteraient directement jusqu’à ce toute velléité de révolte ou tout
sans que toutes les parties soient lui – c’est ça la réalité. Je pense que, mécontentement. Voilà en réalité
approchées. Donc tout le discours nous l’avons demandé en son les raisons pour lesquelles les res-
temps, il lui était mieux indiqué que ponsables de cette armée qui se
relatif à la commission d’une enquê-
se soit une commission d’enquête rendent coupables de telles exac-
te n’a été que de la poudre aux
yeux pour calmer les organisations internationale qui mène ces enquê- tions ne sont jamais inquiétés. »
internationales, les partenaires tes de façon impartiale comme ça se
fait dans d’autres pays compte-tenu
étrangers soucieux de voir la vérité
éclatée et je pense qu’il est bon de l’extrême gravité de ces exac-
qu’on continu à mettre la pression tions en temps de paix.
sous le régime afin que les évène- Le régime de monsieur Biya est un
ments de 2008 ne tombent pas régime qui ne doit sa survie qu’au
dans les oubliettes – du moins la soutien que lui apporte l’armée –
mémoire de ces jeunes ne soient qui est par ailleurs fortement tribali-
oubliée. Je suis convaincu que le sée. Vous comprendrez que la plus
pouvoir n’a jamais eu l’intention de part des cas de dérapage sont le fait
mener une enquête sérieuse pour des militaires ou des responsables
établir la vérité encore moins l’inten- de l’armée qui sont mues par une
tion de sanctionner les auteurs de espèce d’instinct tribal - qui pense
ces exactions. qu’il faut à tout pris parer à tout
Donc aucune enquête sérieuse ne danger réel ou imaginaire mena-
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Hervé NKOM
« En matière de sécurité, ce n’est
pas le racontar, on ne va pas mettre
sur la place publique qu’on a sanc-
tionné tel élément ou tel élément
est muté pour tel raison – ceci dé-
moralise les troupes – nous avons
tous besoin de la police pour main-
tenir l’ordre. On a besoin d’un mini-
mum d’ordre – mais je répète qu’il
faut professionnaliser nos troupes
pour que rien ne soit fait qui soit
contraire aux droits de l’homme, qui
soit contraire aux droits des person-
nes et qui soit contraire au bien-être
social- vivre ensemble- il faut que
nous construisons une société de les manifestants, des gens honnêtes, ser ceux qui ont perdu leur bien –
confiance et de liberté où on utilise sincères qui luttaient pour leur donc à ce jour, aucune indemnisa-
pas les moyens d’Etat contre les po- condition de vie et vous aviez aussi tion n’a été envisagée. Je crois que
pulations et contre les citoyens – des bandits qui pratiquaient du van- les plus malins sont ceux qui ont
ceci dit, en tant que homme politi- dalisme et vous aviez chez les poli- tout simplement passé leur perte de
que du parti au pouvoir, nous assu- ciers des professionnels qui savaient temps dans leur comptabilité au
mons ce qui s’est passé en disant qu’en face d’eux il n’y avait que des chapitre « perte et profit » .Mais
que plus jamais que ça revienne. compatriotes et des frères et vous pour l’Etat, c’est le cadet de ses sou-
Il faut reconnaître que les évène- aviez aussi quelques éléments qui se cis. A la limite on doit être content
ments de février 2008 étaient liés au sont trompés de métier qui ne de- de ce que l’Etat n’a pas demandé à
mal vivre, au panier de la ménagè- vraient pas avoir la place dans le ces affamés de payer tout ce qu’ils
re, à tout le ras-le-bol et au chôma- corps et qui en ont profité pour la ont cassé. Au Cameroun, quand on
ge – Mais aussi au contexte interna- confusion de la brutalité. veut enterrer un sujet, on créé une
tional qui a contaminé à la fois no- commission dite indépendante. Les
Bref, le plus important c’est de faire
tre jeunesse et une frange de la po- commissions "indépendantes" chez
en sorte que cela n’est plus lieu. Le
nous obéissent à celui qui les met
pulation qui voulait se défouler. peuple est souverain et sacré et le
en place ; comment comprendre
Evidemment, le gouvernement n’est citoyen est sacré. L’homme ne doit
que quelqu’un supposé être indé-
pas autiste – il devrait tirer les pas être un loup pour l’homme. »
pendant et libre, ose dire « sur hau-
conséquences de tout évènement te instruction du chef de l’Etat » et
Albert NZONGANG
même si se sont des conséquences toute honte bue... »
qu’il ne rend pas public – Gouver- « Notre pays est un pays où l’armée
ner, c’est prévoir – et quand vous a pris le pas sur la politique et est
avez vécu ce genre d’évènements, il presque impunie. Les agents des Joe la Conscience
faut adapter les instruments pour forces de l’ordre même pris en fla-
que ça n’est plus lieu et faire l’antici- grant délit d’assassinat, vont au tri- « Le gouvernement n'a jamais enga-
pation – l’anticipation c’est amélio- bunal juste le temps d’être relaxés. gé d'enquêtes parce qu'il sait perti-
rer – lutter contre le chômage, don- D’ailleurs l’armée et le pouvoir vi- nemment qu'il est le principal cou-
ner du pouvoir d’achat – regarder vent en très bonne entente. C’est pable. Les hommes en tenues de
la condition des jeunes diplômés pour cette raison que même en pé- tous les corps d'armées ou presque
sans emplois – je crois que pour riode difficile, où la population n’a restent de simples exécutants.
certains domaines, même si le rap- rien à manger, l’armée reste gâtée, La mise en place d'une commission
port d’enquête n’est pas confiné les généraux roulent dans des véhi- d’enquête ici n'aurait d’ailleurs pour
dans une bibliothèque ou dans un cules neufs, ils ont un salaire miro- but que de déterminer la profon-
document, les réponses sont devant bolant, ils ne vont jamais en retraite deur de l'implication des uns et des
vous – dans notre politique de gran- même quand on les met en retraite, autres, dans la mesure ou pour moi
des réalisations qui a été précédée on utilise des termes pour ama- le véritable coupable est connu- les
par des grandes ambitions – même douer, on dit 2ème groupe, c'est-à- autorités publiques - et là, il n'y a
si la réponse n’est pas l’idéale, mais dire qu’ils sont toujours généraux, aucun doute. »
le chantier des 25 000 emplois est bien sûr qu’un général est toujours Cardinal Christian TUMI
l’une des réponses du terrain – vous un général – mais dans d’autres
voulez que je vous donne les noms pays on dit bien général en retraite. « Peut-être qu’ils ont créé une com-
de gendarmes qui ont été dégradés mission d’enquête. Mais comme
Dans notre pays si l’Etat commet toute commission, c’est rare que les
ce n’est pas mon rôle.
une commission d’enquête, c’est résultats soient rendus publics. »
Nous avions eu une situation où pour trouver ceux qui ont osé défier
tout a été confus – vous aviez chez l’autorité, ce n’est pas pour indemni-
Page 11 Vers une indifférence des pouvoirs publics…?

CE QUE PENSE L’ACAT… lations des Droits de l’Homme. Cette


Violation des articles 7 : « Tous
attitude contribue à montrer com-
Au lendemain de la crise de février sont égaux devant la loi et ont
bien l’Etat feint à respecter ses enga-
2008, aucune commission d’enquê- droit sans distinction à une égale
gements, puisqu’aucune poursuite
te à la connaissance de l’ACAT- protection de la loi..» ; article
et condamnation pour torture et
Littoral n’a été mise sur pied par le 8 : « Toute personne a droit à un
traitements cruels, dégradants et
gouvernement, afin que lumière recours effectif devant les juridic-
inhumains au sens de l’article 132
soit faite. Ainsi donc, l’absence d’en- tions nationales compétentes
(bis) du code pénal n’a été pronon-
quête traduirait la mésestime des contre les actes violant les droits
cée. De plus la violation de l’article 2
pouvoirs publics camerounais vis-à- fondamentaux qui lui sont recon-
de la convention contre la torture
vis de l’ensemble des crimes et viola- nus par la constitution ou par la
qui dispose que : «Tout Etat partie
tions graves aux droits de l’homme loi » ; article 10 : « Toute personne
prend des mesures législatives, ad-
commis fin février 2008. Malgré les a droit, en pleine égalité, à ce que
ministratives, judiciaires et autres
multiples dénonciations et interpel- sa cause soit entendue équitable-
mesures efficaces pour empêcher
lations des organisations de la socié- ment et publiquement par un tri-
que des actes de torture soient com-
té civile, le gouvernement a entrete- bunal indépendant et impartial,
mis dans tout territoire sous sa juri-
nu un mutisme sans égal ; donnant qui décidera, soit de ses droits et
diction.2-Aucune circonstance ex-
de ce fait la possibilité aux différents obligations, soit du bien-fondé de
ceptionnelle, quelle qu'elle soit, qu'il
auteurs des exactions de circuler en toute accusation en matière péna-
s'agisse de l'état de guerre ou de
le dirigée contre elle » ; et même
toute quiétude. menace de guerre, d'instabilité poli-
l’article 11 pour ne citer que ceux
C’est ainsi que le gouvernement tique intérieure ou de tout autre
là, tous contenus dans la Déclara-
état d'exception, ne peut être invo-
Camerounais tombe sous le coup tion Universelle des Droits de
quée pour justifier la torture.3- L'or-
de la violation des textes et des rè- l’Homme du 10 Décembre 1948.
dre d'un supérieur ou d'une autorité
gles de procédures en matière de
condamnation des auteurs des vio- publique ne peut être invoqué pour
justifier la torture ».

Recommandation 3 : Relâcher immédiatement toutes les personnes qui sont encore en


détention et qui ont été arbitrairement arrêtées, illégalement détenues, ou injustement
condamnées pendant et après les évènements de fin février 2008.

DE L’AVIS DES ACTEURS… arrestations sont à tête chercheuse


– déjà, quand on sais que l’opéra-
Hervé NKOM tion épervier a permis de mettre la
main sur tous ceux qui ne pensent
« Les décrets qui ont été signés et pas comme le pouvoir et a laissé
publiés doivent être appliqués – dehors tous les autres détourneurs
l’Etat de droit c’est le respect aussi – je ne m’intéresse pas beaucoup
du droit – c’est une obligation pour quand on arrête quelqu’un et on lui
l’Etat de respecter sa parole – l’Etat colle un motif au Cameroun c’est
du Cameroun doit être sérieux, on régulier - c’est général. »
est pas dans un état voyou – alors
quand des dispositions ont été pri- Cardinal Christian TUMI qui avait été interpellé quelques
ses, il faut que force reste à la loi et « Tout ce que je connais par les mois après les émeutes et condam-
la loi, elle doit passer – elle doit être chrétiens catholiques qui travaillent né à 10 ans de prison. Ce dernier
équitable pour tous – si on a élargi dans les prisons, c’est qu’il y a enco- n’a pas bénéficié de la grâce prési-
des personnes, il n’y a aucune rai- re des gens qui sont encore en dé- dentielle.
son qu’une seule personne reste tention sans jugement ou qui sont
privée de cette loi. » S’il est vrai que les deux décrets (nos
jugés mais ne sont pas encore libé-
2008/0174 et 2008/0175) du 20
Jean-Michel NINTCHEU rés. » mai 2008 visaient la commutation et
« Il y a encore des camerounais qui CE QUE PENSE L’ACAT… la remise des peines des personnes
sont condamnés à de lourdes pei- condamnées pour les émeutes de
Des années plus tard, certaines per-
nes suite aux évènements de février fin février 2008 au Cameroun, l’A-
sonnes arrêtées pour des motifs se
2008. Ils sont encore en prison. CAT certifie qu’en l’état actuel des
rapportant à ces émeutes de février
Beaucoup n’ont pas bénéficié des choses, des centaines de personnes
2008 croupissent encore dans les
deux décrets de mai 2008. » ont été libérées. Néanmoins, les en-
geôles camerounaises, à l’instar de
quêtes menées dans les prisons font
Albert NZONGANG Simon-Pierre ESSOBO ANDJAMA
ressortir qu’il existe encore des per-
incarcéré à la Prison centrale de
« je ne me suis pas penché sur la sonnes arbitrairement arrêtées et
Douala et occupant la cellule 15,
question, par ce que, je sais que ces illégalement détenues.
Vers une indifférence des pouvoirs publics…? Page 12

Le non respect des lois, codes et


procédures est fortement à déplorer
ici. Par ses agissements, le gouver-
nement Camerounais violent les
articles 4 et 6 de la Charte Africaine
des droits de l’homme et des peu-
ples qui disposent respectivement
que : « La personne humaine est
inviolable. Tout être humain a droit
au respect de sa vie et à l’intégrité
physique et morale de sa personne :
Nul ne peut être privé arbitraire-
ment de ce droit » ; et que : «Tout
individu a droit à la liberté et à la
sécurité de sa personne. Nul ne
peut être privé de sa liberté sauf
pour des motifs et dans des condi-
tions préalablement déterminés par
la loi ; en particulier nul ne peut être
arrêté ou détenu arbitrairement ».

Recommandation 4 : Veiller à ce que les blessés reçoivent les soins médicaux et le soutien
psychologique nécessaire, et veiller à ce que toutes les victimes reçoivent des réparations
adaptées.

DE L’AVIS DES ACTEURS… L’Etat a réparé certains dégâts. Sur CE QUE PENSE L’ACAT…
Joe la Conscience le plan collectif, l’Etat est entrain de Après les émeutes de février 2008,
réparer les routes brûlées pendant les victimes et familles des victimes
« J’ai fait des mois en prison par ce ces manifestations – sur le plan indi- n’ont bénéficié d’aucune assistance
qu’on m’a accusé d’être l’un des viduel, je ne peux pas parler aux de la part du gouvernement. Ceci
instigateurs des émeutes de la faim. noms des autres. Pour mon honnê- laisse tout simplement penser que le
J’ai également perdu mon fils de 11 teté intellectuelle, je ne peux parler gouvernement est resté depuis lors
ans, tué par balles pendant que j’é- que de ce que j’ai vécu. » indifférent aux multiples attentes
tais en prison. Personnellement, je
des victimes au sortir de cette crise
n'ai jamais reçu quelque aide que se Jean-Michel NINTCHEU
sociale. A cela, affirme JEREMIE
soit du gouvernement. » « En réalité, rien ne s’est fait. J’ai la NGANTCHUI : « Depuis l’assassinat
Hervé NKOM chance de rencontrer régulièrement de mon fils, je suis dans de graves
les familles de victimes des évène- problèmes ? Il n’y a que l’Honorable
« Je crois que s’il y a un seul came- ments de février 2008 et je puis NINTCHEU qui vient nous consoler.
rounais qui, quatre ans après, res- vous dire, depuis 2008, aucunes de J’ai dépensé beaucoup d’argent à
sent ces évènements, il faut qu’on le ces familles n’a été approchés. l’hôpital pour qu’on extraie les bal-
soigne c’est une thérapie collective les. J’ai enterré mon fils seul. C’est
d’abord pour qu’il y ait une meilleu- Puisque ces exactions n’ont pas été
sur lui que je comptais pour prendre
re gouvernance, que l’Etat soit pré- reconnues, aucune enquêtes sérieu-
la relève dans cette famille. »
visionniste, qu’il soit plus protecteur ses n’a été ordonnée, et les auteurs
et qu’il réponde à la détresse des de ses exactions sont restées impu- Faisant état de des multiples morts
uns et des autres. Mais c’est aussi nis, personne n’a été poursuivie, les et blessés enregistrés au cours des
une thérapie collective pour qu’on victimes de ces exactions n’ont pas émeutes de février 2008, il ressort
sache qu’est ce qu’on peut perdre été indemnisées comme ça devrait des enquêtes aujourd’hui que les
lorsqu’on va dans un mouvement l’être. familles des victimes et les victimes
spontané sans réfléchir. n’ont reçu aucune assistance médi-
Je pense qu’il faut continuer à met-
cale et psychologique encore
Je ne néglige pas la détresse de cer- tre la pression sur les autorités de ce
moins de réparation par rapport au
taines familles ou de certaines per- pays pour que non seulement les
préjudice subit.
sonnes mais je crois que si on ouvre auteurs de ces massacres qui se sont
la porte selon laquelle après les cas- déroulés en temps de paix - car le Ce qui entraine la violation de l’arti-
ses, l’Etat doit payer tout le monde, Cameroun n’était pas en guerre – il cle 16 de la Charte Africaine des
alors là c’est vraiment un boulevard faut que les auteurs soient identifiés droits de l’homme et des peuples
que vous mettez devant les vanda- et sanctionnés conformément à la qui dispose que : « … Les Etats par-
les. L’Etat doit être sélectif et com- loi. » ties à la présente charte s’engagent
prendre la détresse des victimes. à prendre les mesures nécessaires
Page 13 Vers une indifférence des pouvoirs publics…?

en vue de protéger la santé de leurs


populations et de leur assurer l’assis-
tance médicale… » ; et de l’article 14
de la convention contre la tortu-
re : «Tout Etat partie garantit, dans
son système juridique, à la victime
d'un acte de torture, le droit d'obte-
nir réparation et d'être indemnisée
équitablement et de manière adé-
quate […] En cas de mort de la victi-
me résultant d'un acte de torture,
les ayants cause de celle-ci ont droit
à indemnisation».

Recommandation 5 : Coopérer pleinement aux éventuelles enquêtes internationales à


venir.
DE L’AVIS DES ACTEURS…
Joe la Conscience

« Si la communauté internationale qui a été complice de ces atrocités par son mutisme voudrait que lumière soit fai-
te, elle doit amener le gouvernement Camerounais à accepter une commission d'enquête internationale ayant en
son sein des personnalités indépendantes à la probité morale reconnue à l'internationale. »

CE QUE PENSE L’ACAT…


Au lendemain de la crise sociale de février 2008, la communauté internationale notamment certaines représentations
diplomatiques ont dénoncé toutes les pratiques inhumaines observées. Toutefois, il s’est dégagé un sentiment qui a
laissé entrevoir que cette communauté internationale n’a pas fait preuve d’engouement dans une démarche visant à
amener le gouvernement camerounais à faire systématiquement la lumière sur la crise de février 2008. Cette démar-
che impliquant la facilitation d’enquêtes internationales libres, et la coopération des pouvoirs publics sur les violations
des droits de l’homme enregistrées.
Sachant que, les instruments juridiques internationaux font état de la nécessité de l’établissement de la vérité lors d’u-
ne enquête internationale et/ou judiciaire, le gouvernement Camerounais, s’est vite contenté de présenter aux méca-
nismes internationaux des Droits de l’Homme à l’instar du Comité contre la Torture et l’EPU la face émergée de l’ice-
berg relativement aux émeutes de février 2008.
Cette attitude dénote de la supercherie du gouvernement Camerounais après les émeutes de février 2008.

Recommandation 6: Assurer une meilleure protection des droits de l’homme et des


libertés fondamentales, pour créer un environnement propice à la tenue en 2011, des
élections présidentielles libres, ouvertes, démocratiques et transparentes.
DE L’AVIS DES ACTEURS… ration des partis politiques qui sont proposons c’est un processus vérita-
Jean-Michel NINTCHEU pourtant des acteurs du processus blement consensuel où tous les ac-
électoral. Vous comprendrez une teurs politiques participent – nous
« Monsieur Biya a atteint son objec- fois de plus l’attitude du SDF vis-à-vis voulons l’introduction de la biomé-
tif de se faire élire à tout pris et à d’ELECAM que nous avons toujours trie dans l’inscription sur les listes -
tous les prix. Nous avions dénoncé considéré comme étant un simple de pouvoir remettre à chaque élec-
le fichier électoral qui n’était pas organe du parti au pouvoir auquel il teur sa carte dès qu’il s’inscrit. Ceci
fiable. La suite des évènements obéit et pour lequel il travaille vérita- faciliterait la tâche aux électeurs qui
nous a donné raison. Puisque nous blement. Nous avons exigé une re- déjà ne sont pas très motivés pour
avons assisté en octobre 2011 à fonte, tout comme tous les observa- aller s’inscrire et qui considèrent
une caricature d’élection, à une véri- teurs impartiaux et dans un premier que s’inscrire, avoir sa carte et allé
table mascarade – tout le monde l’a temps, ELECAM nous a dit que s’é- voter est un parcours de combat-
relevé y compris les observateurs tait impossible. Il a fallu que Mon- tant. Et sachant également que le
étrangers. Immédiatement après les sieur Biya sachant qu’il n’a plus rien résultat de son vote ne sera pas pris
élections, ELECAM a prétendu de à perdre, par ce qu’il a déjà eu le en compte tout compte-tenu des
manière unilatérale supprimer prati- mandat qu’il voulait, - a ordonné la fraudes multiples et variées. Nous
quement 600 000 doublons du fi- refonte des listes électorales. Mais pensons que s’il y a une véritable
chier et ceci s’est fait sans la collabo- ceci n’est pas suffisant ce que nous volonté politique pour organiser les
Vers une indifférence des pouvoirs publics…? Page 14

élections transparentes au Came- même proposé une loi – tout ci- re d’élections législatives que le vote
roun, les conditions minimales évo- toyen à des droits – on nous a dit soit uninominal, le peuple fait
quées doivent être prises en comp- qu’on se mêlait de ce qui ne nous confiance à un individu et non à un
te. Notamment la refonte des listes concernait pas. Pour en finir, on a groupe d’individus. Un groupe d’in-
[qui est déjà ordonnée], l’introduc- concocté une expression : ELECAM. dividus n’a pas de responsabilité.
tion des données biométriques Que veut dire Elecam? Elections Donc le système de liste est une ma-
pour inscrire les camerounais, la cameroon : en anglais cela ne veut nière de flouer le peuple. Car il suffit
délivrance des cartes d’électeurs au rien dire – pourquoi ne pas faire que monsieur NZONGANG soit po-
moment de l’inscription, les cartes comme tout le monde à savoir par- pulaire et aimé dans son village
portant éventuellement les photos ler d’une commission indépendante pour qu’on mette derrière lui trois
des électeurs ce qui éviterait des des élections - Cameroon elections grands bandits qu’il va amener à
fraudes à la carte d’électeurs et qui ça se comprend - mais elections ca- l’Assemblée Nationale. Alors nous
faciliterait l’identification, le bulletin meroon ça ne veut rien dire. » continuons à demander que la loi
unique, et surtout la recomposition électorale soit améliorée et ressem-
d’ELECAM dans le respect de la loi Albert NZONGANG ble à ce que la loi électorale dans un
et du principe de personnalité neu- « J’étais candidat à l’élection prési- pays démocratique doit être. Nous
tre. Je pense que c’est une insulte à dentielle du 09 octobre 2011 et je continuons à demander que ceux
l’intelligence collective des came- n’ai pas pu voter. Ceux qui se pro- chargés d’animer les élections - à
rounais que de prétendre qu’il n’y a menaient avec des badges estampil- défaut de l’administration par ce
pas de personnalité neutre au Ca- lés « OBSERVATEUR » ne se sont que dans les pays que nous imitons,
meroun. » même pas arrêtés pour m’écouter. c’est l’administration qui organise le
Cardinal Christian TUMI Ils étaient conduits par les membres vote - à la seule différence que dans
du RDPC et finalement, quelques ces pays, l’administration est neutre.
« Concernant l’élection présidentiel- jours après les élections, les résultats On ne devient pas directeur par ce
le du 09 octobre 2011, mon opinion circulaient déjà avant même que la qu’on milite dans le parti du prési-
est qu’ELECAM n’avait pas tout ce commission se réunisse et décide. dent. On est directeur par ce qu’on
qu’il fallait pour bien organiser les Chez nous, la honte ne tue pas. On a le mérite pour diriger une section
élections. J’étais détenteur de deux a prétendu qu’après les évènements administrative des affaires de son
cartes d’électeurs – je pouvais voter de 2008, après le chômage, après le pays. Tandis que chez nous, on de-
deux fois. Il m’a été rapporté que fait que notre économie dégringole, vient quelqu’un à cause du militan-
des gens en avaient dix. Donc il est les gens ont eu toujours confiance tisme supposé dans le parti au pou-
clair qu’ELECAM n’était pas à la au Président sortant au point de lui voir. Donc ce qui était difficile hier
hauteur dans l’organisation de ce donner plus de points qu’il n’en avec l’administration l’est encore
scrutin. avait eu depuis des années : 80% plus avec ce que le chef de l’Etat a
Mais comme vous le savez bien, on dans une démocratie moderne ça lui-même choisi dans son parti et
va revoir les choses (refonte des dit tout. qui sont du jour au lendemain pas-
listes électorales) est-ce qu’ils vont le sés de partisan à neutre : ça c’est
Au vu de ce résultat on se croirait
faire en deux mois ? Je me deman- magique ! – même à l’Eglise ça ne
dans un eldorado où tout le monde se passe pas aussi rapidement. Donc
de. Ils vont recommencer les inscrip- est content. En fait, nous sommes
tions à zéro pour veiller à ce que les nous continuons à dire que cette
dans un pays où le travail est l’ex- commission soit dissoute – A défaut
morts ne participent pas aux élec- ception et le chômage la règle, dans
tions et que les chefs n’inscrivent de trouver des gens neutres, mettre
un pays où on achète des Caterpil- en place une commission paritaire
pas leurs sujets sans que ceux-ci ne lars on les met sous bâche derrière
soient au courant. Par ce qu’il est qui regroupe les représentants du
les maisons des ministres alors que parti au pouvoir connus et des re-
arrivé des situations où les chefs nos agriculteurs ne demandent que
inscrivaient leurs sujets alors que ces présentants des partis de l’opposi-
cela pour enrichir davantage ceux tion comme en Côte d’Ivoire et que
sujets étaient déjà inscrits quelque qui nous gouvernent. Si la produc-
part. Ce qui a créé une confusion. la loi électoral soit une loi électorale
tion du Cameroun venait à se déve-
Donc je crois qu’il faut qu’Elecam ait unique et non avoir une loi pour
lopper, se sont ceux qui tirent profit élire les conseillers, une autre pour
tout ce qu’il faut pour bien organi- du commerce extérieur qui seraient
ser les élections. Autrement on va élire les députés et une autre pour
encore plus riche mais comme ils ne élire le Président. Egalement, que
revenir aux mêmes problèmes. veulent pas s’endetter pour gagner l’influence que les riches exercent
Nous avons fait des propositions en plus d’argent, le peu d’impôt qu’on sur les électeurs cesse par l’installa-
1993 depuis Bertoua où nous verse ça suffit pour les entretenir. tion d’un bulletin unique. Car vous
avions tenu notre conférence épis- Nous avons demandé le temps pour savez que la combine ici voudrait
copale. Nous avions proposé qu’il y mette en place les instruments de la qu’on dise aux électeurs de sortir
ait une structure autonome avec démocratie. Par ce que la démocra- avec les bulletins des autres. Or s’il y
tous les moyens financiers nécessai- tie n’est pas un mot qui s’adapte a un bulletin unique, vous ne sorti-
res pour organiser les élections de- aux besoins locaux. Où on est dé- rez avec rien – ça c’est pour proté-
puis l’inscription jusqu’à la procla- mocrate ou on ne l’est pas. Et la dé- ger les électeurs. Il y a un certain
mation des résultats. Et nous avions mocratie commande déjà en matiè- nombre de petites choses que le
Page 15 Vers une indifférence des pouvoirs publics…?

président qui a presque 80 ans de- du SDF, mais le SDF a été responsa- chéance par ce que c’est la porte
vrait faire pour que son souvenir ble en tant que mouvement républi- ouverte à certaines combines -
reste quand même dans la mémoire cain en allant à cette élection en ne comme présentement, certains s’at-
des camerounais comme quelqu’un permettant pas que le chaos soit tendent à ce qu’on prolonge le
qui ne s’est pas perpétué dans l’er- installé – puisqu’il y a des entrepre- mandat de l’Assemblée – moi je ne
reur. Nous continuons à croire neurs de chaos qui rôdent - Nous suis pas d’accord – il faut qu’on aille
qu’un rayon de nationalisme le tra- étions donc dans une société où il aux élections à temps pour qu’il y ait
verserait, lui qui est chrétien, afin de n’y avait pas totalement la confian- le renouvellement – c’est la vie, le
faire du Cameroun un pays qui vivra ce et on jetait la suspicion sur une renouvellement.
après lui et non qui sera en guerre élection quelque soient les condi-
Alors la refonte est incontournable
après lui. » tions dans lesquelles elle devait se
maintenant par ce que d’abord, il
dérouler. Aujourd’hui donc, qu’on a
Hervé NKOM faut que la population électorale
le recul, on a un peu de temps, je
soit conforme à la population natio-
« Globalement les élections se sont crois qu’il faut construire la confian-
nale - il ne faut pas qu’elle soit une
bien passées, nous remercions Dieu, ce – avec la refonte des listes électo-
population artificielle, fictive. Si le
que ceux qui attendaient que se soit rales, donner des moyens à Elec-
Cameroun compte aujourd’hui 22
le début de l’apocalypse aient eu tions Cameroon, le rendre plus puis-
millions d’habitants, il faut savoir le
tort. Il faut que nous soyons dans sant, convaincant et faire en sorte
nombre des
une société d’harmo-
gens en âge de
nie que chacun soit
voter, qui ont
républicain et accepte
leurs droits et
que la règle de la ma-
que se soit
jorité joue. Nous
conforme. Pour
avons une institution
moi, le plus
qu’on appelle ELE-
grand parti et le
CAM- elle est très jeu-
plus dangereux
ne et elle a fait face à
est le parti de
une épreuve et peut-
l’abstention.
être pas totalement
Lorsqu’un ci-
armée – donc beau-
toyen se met
coup de dysfonction-
dans la spirale
nements qu’on a pu
de la marginali-
constater mais qui
té, il devient un
n’étaient pas de natu-
anarchiste, un
re à altérer les résul-
danger pour la
tats doivent être corri-
République. Il
gés par ELECAM et de
faut donc que
plusieurs manières – il
les acteurs, les
faut que le peuple ait
partis politi-
les moyens de son
ques, la société
ambition. Si on créé
civile, vous et
une institution indépendante pour que les acteurs de la vie politique
moi, on construise la communica-
gérer les élections, il faut qu’on don- qui sont des partis politiques, la so-
tion adéquate pour convaincre le
ne les moyens à cette institution qui ciété civile, l’un et l’autre, soit dans
citoyen et créer en lui le sentiment
sont des moyens technologiques, la confiance en disant que chacun
d’appartenance et d’engagement
humains, etc. Sans vouloir juger aura le respect des résultats et per-
qui l’amène à poser l’acte citoyen.
ELECAM, on a vu qu’elle a besoin sonne n’essayera de tricher – Il est
Mais cela doit être fait dans le res-
d’hommes, de femmes et des logi- vrai que Ananias et safiria ont été
pect et la liberté. Par ce que le choix
ciels pour mettre tout le monde en les premiers à voler les deniers de
que nous avons au Cameroun c’est
confiance. On oublie souvent quel- culte - donc dans toutes les sociétés
que le vote n’est pas obligatoire –
que chose : le vrai secret des élec- vous trouverez toujours…- Mais il
cela a ses avantages et ses inconvé-
tions, c’est la confiance, c’est la faut que globalement nous construi-
nients – Mais vous verrez un pays
construction de la confiance. C’est sions la confiance. Donc je crois que
comme la Belgique où le vote est
dire que chacun y aille quelque soit le travail qu’il y a à faire aujourd’hui
obligatoire, ils ont fait trois ans sans
son avis en se disant j’y vais mon par les uns et les autres, c’est que la
gouvernement. Dans la démocratie
vote sera respecté que je gagne ou refonte est incontournable, - la rai-
moderne, le vote n’est pas obligatoi-
que je perde. Or nous étions là avec son pour laquelle on ne pouvait pas
re, mais il est quelque part dans l’o-
un élément essentiel qui n’a pas été la faire pendant l’élection présiden-
bligation des acteurs politiques –
géré en amont. C'est-à-dire que tielle est qu’il n’y avait pas le temps
l’article 3 de la constitution confie
nous étions dans une société de – et il ne fallait pas du tout renvoyer
aux partis politiques l’expression du
suspicion – même si nous avions la les élections – moi je suis un républi-
suffrage universel de convaincre
chance par ce que – je ne suis pas cain et suis contre tout report d’é-
leurs adhérents et les citoyens à ai-
Vers une indifférence des pouvoirs publics…? Page 16

mer la démocratie. Par ce qu’une soit acteur. Donc nous devons avoir des lois et des procédures en matiè-
démocratie qui manque de partici- une société où l’agneau peut dormir re électorale. Il a été observé, durant
pation, manque de légitimité. C’est à côté du loup sans être mangé. Je le processus, des irrégularités liées à
ça le problème – le problème c’est suis peut-être idéaliste – mais on la double inscription sur les listes
que le parti de l’abstention n’empê- doit marcher ensemble. Or vous électorales, la présence des noms
che pas qu’on ait un gouvernement avez des gens qui ont une concep- des personnes décédées, la mauvai-
– mais il y a quelque part comme tion de la politique qui veut que se qualité de l’encre, l’absence de
une frustration de légitimité – il faut tout examen critique est vu comme certains bulletins de candidats, le
l’enlever – un pouvoir qui trouve une mise en cause personnelle et ça défaut des noms sur les listes des
toute sa légitimité y compris dans créé des morosités. » personnes régulièrement inscrites,
les cercles des opposants est un la contestation de la composition
pouvoir qui dure et c’est un pouvoir CE QUE PENSE L’ACAT… d’ELECAM, etc.
républicain. Un pouvoir qui n’est
plus légitime…il se passe quelque Nonobstant toutes ces irrégularités,
Le dernier scrutin a été le théâtre
chose. Je pense qu’il faut qu’on s’in- le défi reste aujourd’hui de parvenir
de multiples irrégularités, ce qui a
vestisse tous maintenant dans une à une organisation libre, transparen-
entrainé la contestation des résul-
large campagne pour convaincre te et démocratique du double scru-
tats par une bonne frange des hom-
les jeunes, les femmes et tous ces tin législatif et municipal probable
mes politiques.
marginaux qui, pour certains, pour de Juillet 2012 au regard de la nou-
des raisons alimentaires, économi- L’élection présidentielle du 09 octo- velle Charte Africaine pour la Démo-
ques, sociales ont désespéré de la bre 2011 a connu de vives revendi- cratie, les élections et la bonne gou-
République. Il faut qu’on construise cations de la part des partis politi- vernance (CADEG).
dans une société de solidarité qui ques et des acteurs de la société
fasse en sorte que tout le monde civile relativement au non respect
Page 17 Vers une indifférence des pouvoirs publics…?

CONCLUSION — RECOMMANDATIONS

Aussi vrai que le Cameroun soit un "Etat de droit" - aussi vrai qu’il soit un "Etat dé-
mocratique", l’observateur averti note qu’il lui reste toutefois encore du chemin à
parcourir. Cette assertion trouve sa justification dans les multiples violations des
libertés publiques, notamment le non respect des droits de l’homme et des libertés
fondamentales dont on ne saura énumérer.
Convaincu qu’un Etat démocratique a la responsabilité de garantir les droits fon-
damentaux de l’individu tels que proclamés dans la Déclaration universelle des
droits de l’homme et que les libertés fondamentales doivent se trouver assurées
par les mécanismes de l’Etat de droit, dans lequel les autorités politiques sont sou-
mises au respect du même droit, l’ACAT note que le Cameroun demeure toujours
en marge du véritable jeu démocratique et d’Etat de droit.
Les différents mouvements qu’a connu le Cameroun ces deux dernières décennies
dont les villes mortes des années 90, le Commandement Opérationnel avec, entre
autre, l’affaire des neuf (09) disparus de Bependa, les émeutes de février 2008,
sont la manifestation d’une crise économique, sociale et politique qui ne garantit
pas la stabilité du Cameroun pour un meilleur équilibre social.
Toutefois, pour une meilleure assurance de cet équilibre social, le gouvernement
camerounais se doit, entre autre, d’entretenir des plates-formes de collaboration
avec la société civile.
A cet effet, l’ACAT-Littoral invite une fois de plus le gouvernement Camerounais à
prendre en considération les recommandations déjà faites en février 2009. Il s’était
agit de :
1. Reconnaître publiquement et condamner le recours excessif à la force par
les forces de sécurité de l’Etat, au cours des manifestations de fin février
2008;
2. Diligenter une enquête judiciaire, indépendante et impartiale, sur les crimes
et violations graves aux droits de l’homme commis fin février 2008, afin que
les responsables soient jugés et condamnés conformément à la loi. Le rap-
port et les résultats de cette enquête devront être publics;
3. Relâcher toutes les personnes qui sont encore en détention et qui ont été
arbitrairement arrêtées, illégalement détenues, ou injustement condamnées
pendant et après les évènements de fin février 2008;
4. Veiller à ce que toutes les victimes ou leurs ayants droits reçoivent des répa-
rations adaptées;
5. Créer une commission Internationale neutre en vu de faire le bilan réel de
la crise sociale de février2008;
6. Elaborer un code électoral unique et consensuel avec la participation ac-
crue de toutes les forces sociales et dissoudre le conseil électoral actuel
pour le reconstituer en partant des dispositions pertinentes de l’article 8 de
la loi 2006 créant ELECAM afin de garantir un environnement propice à la
tenue du double scrutin probable de 2012 en l’occurrence les élections mu-
nicipales et législatives libres, ouvertes, démocratiques et transparentes.
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Ce rapport a été réalisé avec le soutien financier du Comité Catholique Contre la Faim et
Pour le Développement (CCFD) - Terre Solidaire.

ACAT - Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (Cameroun/Littoral)


B.P 213 Douala / Cameroun
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Fax: (237) 33 40 42 96
E-mail: ltbranch@yahoo.fr

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