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Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

Denis Cristol
Dans Savoirs 2017/1 (N° 43), pages 10 à 55
Éditions L'Harmattan
ISSN 1763-4229
DOI 10.3917/savo.043.0009
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Note de synthèse
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Savoirs 43 – 2017

Les communautés d’apprentissage :


apprendre ensemble
Denis Cristol*

Résumé : La présente note fait le point sur les façons d’apprendre


­ensemble des adultes à l’intérieur de communautés d’apprentissage phy-
siques ou en ligne. Elle met en évidence la transformation des pratiques
d’apprentissage selon les conditions socio-économiques des époques. Elle
s’efforce de répondre à la question : pourquoi apprendre ensemble ? Elle
repère les façons d’apprendre ensemble situées dans quatre contextes qui
inspirent les communautés d’apprentissage contemporaines :
–– au moment de l’industrialisation massive, les porteurs d’utopies
­sociales pensent des modèles de société puis projettent les façons d’ap-
prendre au sein de communautés pour s’intégrer à l’idéal programmé ;
–– lorsque le monde se complexifie, que le modèle de la rationalité indus-
trielle s’épuise, l’apprentissage au sein de communautés est vu comme
levier de performance économique et d’efficience sociale ;
–– avec l’avènement de la société de la connaissance, les communautés
d’apprentissage sont des moyens de produire des formes de sociétés ;
–– enfin, un regard particulier sera apporté sur les formes de commu-
nautés d’apprentissage numériques et leur pouvoir d’ouverture sur le
monde.
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La conclusion ouvre sur les formes émergentes de sociabilité d’appren-
tissage qui s’expriment du point de vue de l’apprenant (sociodidaxie) ou du
tiers (pairagogie).

Learning Communities: Learning Together


The present review takes stock of ways adults learn from each other
within physical or online learning communities. It highlights how learning
practices change according to the socio-economic conditions of the era.
It attempts to answer the question: Why learn together? It identifies ways
of learning together from four contexts that have inspired contemporary
learning communities.

*  Directeur de l’ingénierie et des dispositifs de formation du CNFPT, chercheur associé au


CREF Paris-Nanterre. Équipe Apprenance et formation des adultes.
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Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

–– In the era of massive industrialization, believers in social utopias de-


signed models for society then planned ways of learning within commu-
nities to fit into the intended ideal society.
–– When the world became more complex and the model of industrial
rationality lost momentum, learning in communities was seen as a vector
for economic performance and social effectiveness.
–– With the advent of the knowledge society, learning communities are
the means for producing forms of societies.
–– Lastly, special focus will be put on digital learning communities and
their power to open up to the world.
The conclusion introduces emerging forms of learning sociability that
are expressed from the learner’s point of view (socio-didactics) or third par-
ties (peeragogy).

1. Introduction
1.1. Remarques préalables
Apprendre ensemble est tout autant l’affaire de voisins dans un jardin
partagé que celle d’un groupe d’utopistes possédant les mêmes croyances.
La définition à suivre est le plus petit commun dénominateur des dévelop-
pements de la note de synthèse : « Les communautés d’apprentissage sont
des groupes d’apprenants qui partagent formellement ou informellement,
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en présence ou à distance l’intention d’apprendre ensemble. » D’autres élé-
ments sont aussi identifiés dans la note tels que : l’existence de rituels, de
langage et d’appartenance commune, les temporalités longues et incertaines
d’émergence, les processus imbriqués consacrés à l’objet de la communauté
tout autant qu’à la constitution de sa dynamique humaine, le rôle fédérateur
des lieux de regroupement, les phénomènes de pouvoir et d’animation.
1.2. Le repérage des formes de l’apprendre ensemble
Des travaux de synthèse se sont efforcés de distinguer et décrire la nature
des apprentissages au sein d’un collectif (Orellana, 2002 ; Kaplan, 2009 ;
Heutte, 2011 ; Le Boucher, 2016). Ces travaux s’inscrivent dans une approche
constructiviste ou socioconstructiviste, au sein de laquelle la dimension col-
lective de l’apprentissage est essentielle. Ces travaux révèlent des « sujets
sociaux apprenants » (Dumazedier, 1978). L’expression du sociologue rend
compte du pouvoir des liens entre les hommes dans leur apprentissage, que
celui-ci se déroule dans un cadre formel ou informel.
12
Savoirs 43 – 2017

2. Les enjeux d’apprendre ensemble


2.1. Les enjeux pédagogiques d’apprendre ensemble
Selon Johnson et Johnson (1974), il y aurait trois façons d’apprendre :
–– collaborative ;
–– compétitive ;
–– individuelle.
Mais, le seul fait d’être en proximité d’un autre être humain ne présume
pas la façon d’apprendre, encore moins de faire communauté. Il est ­ainsi
possible d’être ensemble, côte à côte, mais d’apprendre les uns avec les
autres, les uns contre les autres ou chacun pour soi. Meirieu (1984a et b) a
mis en évidence les phénomènes d’apprentissage parallèles ou solitaires dans
des groupes humains scolarisés.
Dès lors, les enjeux d’apprentissage concernent ces trois façons. La ques-
tion de l’apprendre ensemble est remise en avant par les possibilités d’Inter-
net. Face à l’explosion des informations disponibles, il est devenu impos-
sible pour un individu de connaître à lui seul tout ce qui pourrait servir à son
activité. Il est obligé d’éliminer l’information inutile. Ce qui finit par avoir
de la valeur semble moins l’information en tant que telle que la capacité des
membres d’un collectif à produire de nouveaux savoirs, à apprendre les uns
des autres, à apprendre les uns avec les autres. Il s’agit donc d’apprendre à
collaborer. « Autrement dit, le processus collaboratif devient plus important
que le résultat de la collaboration » (Michinov, 2005).
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Le fait d’apprendre ensemble, en particulier de façon collaborative, por-
terait en lui-même un enjeu d’édification démocratique qui traverse toutes
les périodes qui seront ensuite détaillées.
2.2. Les enjeux d’édification démocratiques d’apprendre ensemble
2.2.1. Qu’autorise le fait d’apprendre ensemble ?
Les premières expérimentations de Lewin avec Lippitt et White (1939)
sur les dynamiques de groupes : autoritaires, participatifs et laissez-faire
montraient déjà que l’établissement des liens dans un groupe en forma-
tion induisaient les productions, que ces dernières soient sociales (émer-
gence d’un leadership, d’une cohésion d’un sentiment d’appartenance) ou
matérielles (résolution d’un problème concret, réalisation d’un projet). Les
deux termes de l’alternative d’apprentissage se situeraient entre « l’ego-­
compétitif  » et « l’alter-coopératif  ». Pour Viveret (2012), « former un être
humain à la compétition en lui laissant entendre que la vie est un combat
13
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

où seuls les plus forts survivent et l’éduquer à la coopération en lui faisant


découvrir qu’il peut être, tout à la fois, pleinement singulier et pleinement
relié aux autres, sont deux options très différentes ».
Les méthodes pédagogiques d’orientation collaborative, compétitive ou
individuelle influent sur nos rapports aux autres. Elles jouent sur nos façons
d’échanger, de coopérer et d’apprendre. Le sociologue Sennet (2012) nous
rappelle la force de la parole pour apprendre ensemble, toute l’importance
de créer des espaces d’échange pour passer de l’indifférence à l’argumen­
tation, puis du débat au dialogue, fondement de la démocratie. A contrario,
on peut douter que l’apprentissage par cœur d’un seul livre, sans dialogue,
ne prépare à la démocratie.

2.2.2. Apprendre ensemble est un enjeu politique

Le lien entre formes pédagogiques et formes de gouvernements est


r­echerché par le sociologue Durkheim (2006 [1922]) ou le pédagogue
Dewey (2013 [1916, 1938]). Rousseau (1961 [1762]) dans Émile ou De l’édu-
cation, nous décrit le développement de l’enfant et le rôle des trois maîtres :
soi, les autres et l’environnement. On se souvient des expériences pédago-
giques d’un « gouvernement des enfants » à l’école de Summerhill, visant
à installer précocement une démocratie, en donnant à chaque enfant un
pouvoir de gestion (Neill, 1971). C’est encore l’idée d’une société sans école
proposée par Illich (1971), qui dénonce la fabrique du conformisme et le
renforcement des inégalités, phénomène de reproduction sociale décrit par
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Bourdieu et Passeron (1970) en France ou par Chomsky (2010) aux États-
Unis. L’éducation est un enjeu d’édification du vivre ensemble qui ne cesse
de susciter la réflexion et les utopies.
Les effets de la pédagogie sur les gouvernements peuvent avoir des
conséquences dramatiques. La psychanalyste A. Miller (1985) évoque les
méthodes autoritaires d’éducation. Les dérives de ces méthodes jouent par
la façon des individus de subir et de participer à des gouvernements dicta-
toriaux. A. Miller fait ainsi l’analyse de l’éducation dans la période précédant
le nazisme. Les méthodes pédagogiques utilisées, les violences faites aux
enfants, l’accumulation des frustrations auraient été des déterminants de la
prise de pouvoir du dictateur Hitler. Les méthodes de formation continue,
ensuite propagées par des organismes officiels, consolideraient ce qu’elle
décrit comme un continuum éducatif, en justifiant l’autorité en place.
Ainsi, le seul « argument d’autorité » pour éduquer ou enseigner recèle un
pouvoir de formatage d’un maître vers une collection d’individus. L’arbitraire
14
Savoirs 43 – 2017

d’un contenu ou d’une méthode est questionné. Apprendre ensemble se


révèle être un projet politique.

2.2.3. Apprendre ensemble crée les conditions d’un engagement

Les sociologues à suivre ont établi des liens entre pédagogie et ­société
à des moments clés de l’histoire. Ainsi, les fondateurs de mouvements
d’éducation populaire vont, au cœur de la résistance, lier projet pédago-
gique et projet d’édification de la société (Dumazedier, 1978 ; Chosson,
2002 ; Ducomte et al., 2013). Il faut encore rappeler les réflexions du mou-
vement coopératif en entreprise avec les apports de Charles Gide (1920)
et de Desroche (1976). Tout se passe comme si les façons d’agir, d’habiter,
d’explorer et de mémoriser individuellement et collectivement, en somme
nos façons d’apprendre, influaient sur nos manières de vivre ensemble et
sur les formes de gouver­nement que nous nous donnons. C’est l’idée des
relations étroites entre corps instituant (l’école) et corps institué (la masse
des apprenants) qui se trouvent simultanément en transformation, ce qui
permet à l’apprentissage de se faire. Autrement dit, l’apprentissage est aussi
le fruit des dynamiques et enjeux qui traversent les équipes pédagogiques à
des époques données et le sens qu’elles donnent à leur action.

2.2.4. Apprendre ensemble procède d’une visée émancipatrice

Le traité politique de Lénine écrit en 1902, Que faire ?, reliait les méthodes
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d’action à un projet de transformation révolutionnaire de la société. Ce rap-
pel historique pointe les relations entre méthodes d’action et transformation
des liens sociaux. Dans le monde des adultes, les méthodes pédagogiques
collaboratives sont des moyens d’action au service de l’émancipation des
individus. L’exposition à des méthodes pédagogiques conduit à une trans-
formation des rapports sociaux. C’est parce que la pédagogie est plus qu’une
technique et interroge les finalités de ce qu’elle produit, qu’elle a une portée
politique (Betton, 2013). Freire (1974) évoque le processus de conscienti­
sation. Il décrit la posture de l’enseignant respectant l’autonomie de l’être qui
apprend (2006 [1996]). Avec la pratique du théâtre-forum initiée par Boal
(Théâtre de l’opprimé, 2003), le théâtre cherche à doter les individus de res-
sources pour agir. L’éducation populaire (Cacérès, 1964) avec une variété de
courants éducatifs et sociaux, favorise l’éclosion d’un débat démocratique.
Mezirow (2001) s’intéresse à l’autonomisation des minorités et aux pédago-
gies de l’autoformation. Des pratiques narratives développées en Australie
(Epston et al., 1989) visent à réinsérer des communautés aborigènes et à les
15
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

doter de leurs propres histoires. Dewey (2013 [1916, 1938]) rappelle la place
centrale de l’expérience collective dans une éducation démocratique. Si le
contenu de l’apprentissage est un objet de programmation faisant l’objet de
négociation, la méthode est également à débattre car la pédagogie fait évo-
luer le rapport au monde.

2.2.5. Portée philosophique : la pédagogie fait évoluer le rapport


au monde

Viveret (2010) décrit les modalités pédagogiques qui transforment le


rapport au monde. Les rapports au savoir qui s’établissent par la médiation
de méthodes pédagogiques ont une incidence sur l’édification des dyna-
miques identitaires professionnelles (Kaddouri et al., 2008). Les méthodes
pédagogiques contribuent à installer des formes relationnelles entre les
individus. Elles induisent une démocratie libérale, participative, horizon-
tale, voire tota­litaire. Quand un objet ou une méthode d’apprentissage
s’impose sans discussion, le débat s’éteint (Caillé, 2006). De plus, il y a
porosité entre les organisations de travail et le reste des activités humaines,
chacun est à la fois citoyen, travailleur, conjoint, dirigeant ou collabora-
teur. La formation des animateurs des collectifs de travail rejaillit sur la
façon dont chacun se comporte ailleurs et réciproquement ; chacun modé-
lisant ou rejetant ces formes relationnelles. Le choix de méthodes péda-
gogiques où l’on apprend collectivement, au-delà de véhiculer simplement
un contenu, assure la promotion d’une vision du vivre ensemble. Avanzini
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et al. (2012) affirment que la pédagogie, parfois sans en avoir conscience,
engage une réflexion systématisée sur l’éducation et la formation conti-
nue au niveau des normes philo­sophiques ou politiques et des objectifs
théologiques relatifs à la destinée de l’homme. C’est en vivant l’expérience
éducative collective que chacun se forge sa vision de ce que devrait être
la démocratie. Dans l’entreprise, Bouchez (2014), décrit la nécessité de
répondre à l’usure managériale qui rend inopérantes les modalités com-
mande/contrôle. Ces modalités créent de la défiance et de l’attrition au
sein des collectifs. Apprendre ensemble revêt aujourd’hui un enjeu écono-
mique et sociétal.

2.2.6. Les enjeux sociétaux de l’apprendre ensemble

Orellana (2002) utilise la notion de « communauté d’apprentissage » qui


désigne une variété de perspectives pour apprendre ensemble. Elle explicite
cette notion selon trois registres au niveau :
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Savoirs 43 – 2017

–– d’un groupe structuré : il s’agit d’un processus de co-apprentissage


qui renvoie aux approches socioconstructivistes ;
–– d’une communauté éducative, par exemple une école et toutes ses
parties prenantes (élèves, parents, professeurs, personnels auxiliaires) : il
s’agit d’une réalité sociale faite de liens et d’échanges autour d’une fina-
lité éducative commune telle que la réussite des élèves ;
–– des institutions sociales : Orellana mentionne le projet éducatif glo-
bal et utilise l’expression « société éducative » pour désigner un « proces-
sus éducatif continu et permanent ».
Selon que la notion de communauté d’apprentissage est utilisée pour
d­ écrire un groupe, une école, une société tout entière, Orellana (2005)
évoque des perspectives différentes et des questions associées :
–– technico-pédagogiques pour les groupes : quel moyen adopter pour
réussir ?
–– sociales et communautaires pour l’école : comment créer un esprit
communautaire améliorant le vivre ensemble ?
–– philosophico-éducatives pour la société où la communauté d’appren-
tissage serait liée « à la qualité d’être et à la réalisation de l’être humain
comme être pensant et réflexif, visant la construction de relations
authen­tiques avec les autres »
Apprendre ensemble est donc un projet sociétal comportant des enjeux
politiques et démocratiques.
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2.3. Transformation historique sur les façons et le sens
d’apprendre ensemble des adultes
2.3.1. L’observation des faits socio-éducatifs dans la formation
des adultes

Des façons d’apprendre ensemble se formalisent depuis les années 1940


dans le monde de l’éducation, dans celui des organisations de travail, dans le
champ de la santé, dans celui du développement communautaire, ou encore
dans le champ de la programmation informatique. Elles s’expérimentent
formellement et informellement. Elles s’inscrivent dans une perspective
plus large de social learning, expression générique assemblant trois courants :
l’apprentissage collaboratif, les apprentissages informels et les apprentis-
sages à l’aide de technologies numériques (Cristol, 2014a). Elles se déclinent
à distance à compter des années 1980. Si les hommes apprennent ensemble
les uns des autres, un regain d’intérêt est perceptible aujourd’hui sur la façon
17
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

dont ils s’y prennent, parce que l’usage des technologies questionne des cer-
titudes. Pourquoi se réunit-on alors qu’une masse d’informations est dispo-
nible en ligne ?

2.3.2. Les jalons historiques

Quelques jalons vont ci-dessous chercher à retracer différentes pratiques


documentées. L’adjectif « documenté » est important. Il signifie que la pra-
tique est datée, à partir du moment où un auteur la nomme dans un texte,
alors que les usages d’un pionnier peuvent être antérieurs au repérage effec-
tué par l’observateur. Les tableaux à suivre sont découpés en périodes :
–– du XVIIIe au début du XXe siècle sont relevées les influences sur les
façons d’apprendre ensemble contemporaines ;
–– des années 1940 aux années 1970, les façons d’apprendre ensemble,
en face à face, prédominent. Elles se structurent et accompagnent l’in-
dustrialisation ;
–– les années 1980 et suivantes sont celles d’une accélération de la tertia-
risation et de l’augmentation des qualifications ;
–– les années 1980 et suivantes correspondent également à la décennie à
partir de laquelle l’avènement du numérique est observé.
Des méthodes, enjeux et types de communautés d’apprenants vont main-
tenant être situés au cours de ces périodes.
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3. Les influences du XVIIIe au début du XXe siècle
3.1. Les filiations de l’apprendre ensemble
Les façons d’apprendre ensemble et de faire communauté ont un long pas-
sé. De livre en livre, d’auteur en auteur, on exhume un légataire : péda­gogue,
philosophe, sociologue, homme de lettres, politique, idéaliste qui ­imagine des
façons de vivre l’apprentissage à plusieurs. De nombreux exemples ­attestent
avant le XVIIIe siècle des pratiques de groupes pour ­apprendre. Une anthro­
pologie du geste de l’apprentissage collectif ­serait sans cesse à ­réécrire.
Elle pourrait embrasser les premières peintures ­r upestres où l’on voit des
hommes chasser ensemble (Silk, 2004), les dialogues apprenants des philo-
sophes, les pratiques de rassemblement et de conciliation des Amérindiens
qui sont aujourd’hui repris en dialogue éthique (Pauchant, 2002), la disputa-
tio des universitaires médiévaux au sein des universitates, « communautés de
tous » (Sere, 2011), ou bien le compagnonnage des bâtisseurs de cathédrales,
dont la vie communautaire est riche (Naert, 2008). Une multitude de façons
18
Savoirs 43 – 2017

d’apprendre ensemble pourrait être retracée dans tous les registres de la vie
humaine. Le tableau 1 prend en compte une ­période plus récente des com-
munautés d’apprentissage.
Nom de la méthode Années de docu­ Contexte/domaine
documentée mentation repérée d’utilisation
Communauté épistémique XVIIIe siècle Partage d’un objectif cognitif commun
(Cohendet et al., 2003) tel celui des encyclopédistes Diderot et
d’Alembert
Cercle littéraire et XIXe siècle Développement de la parole orale
scientifique scientifique à l’occasion des « congrès »,
(Waquet, 2003) « séminaires », « conférences »
Cercle d’études XIXe siècle Pratique suédoise d’apprentissage
(Byström, 1996) collectif sur des sujets d’intérêts
communs
Community based adult XIXe siècle Cours réalisés pour des communautés
learning (cours municipaux dans des quartiers
communautaires) (Tony,
2005; Brooks et al., 2008)
Les communautés des XIXe siècle La sociocratie, le mouvement
utopies sociales (Owen, coopératif
1825 ; Fourier, 1808 ;
Saint-Simon, 1803)
Tableau 1. Les variétés des communautés d’apprentissage aux XVIIIe et XIXe siècles

3.2. Objet d’étude et communauté se créent conjointement :


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l’exemple des encyclopédistes
Actuellement, le terme de « communauté épistémique » est utilisé par
Cohendet et al. (2003) pour désigner la façon dont le langage informatique
Linux a pris naissance, mais la préoccupation de partager une structure
commune de pensée pour créer à plusieurs des connaissances est ancienne.
Les premiers concepteurs de dictionnaires et d’encyclopédies étaient des
créateurs d’un langage autorisant une compréhension commune. En France,
la Société des gens de lettres produit entre 1751 et 1772 l’Encyclopédie ou
Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers. C’est plus de 160 contribu-
teurs qui vont participer à la rédaction de 17 volumes de textes et 11 volumes
de planches. Ils ont établi une base d’informations qui servira de référence
de nombreuses années après. Cette manière de s’accorder sur un langage
crée un système de pensée. Pour Cohendet et al. (2003) :
« Les individus qui créent de nouvelles connaissances produisent en même temps un apprentis-
sage organisationnel, qui permet de cristalliser cette connaissance au niveau collectif, en formant
une communauté épistémique. Cette cristallisation s’effectue à travers la circulation de “bonnes
19
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

pratiques”, c’est-à-dire celles qui favorisent la circulation des connaissances. L’innovation


dépend donc essentiellement d’un cadre social auto-incitatif dont la première motivation est la
mise en commun des connaissances. »
Cette remarque donne à voir la génération simultanée d’un objet, d’un
projet et de l’organisation collective qui y préside. La codification d’un lan-
gage, objet de savoir partagé, est une occasion de créer du collectif. L’objet
est intriqué au projet et à la culture qui l’accompagne. Une communauté d’ap-
prentissage construit son objet en même temps qu’elle s’édifie elle-même.

3.3. Les cercles : protocole et rituel de regroupement


De nombreuses pratiques sociales sont repérables au XIXe siècle, favo-
risant l’inclusion de tous par tous. C’est d’une part la naissance des sociétés
savantes et de leur prise de parole orale qui donne lieu à des congrès, confé-
rences, séminaires et aujourd’hui poster et small conference. Cette même idée que
le collectif s’autoconstruit en même temps que ses finalités et son résultat
se retrouve dans le Cercle littéraire et scientifique du Comté de Chautauqua
aux États-Unis. Ce cercle aurait été lancé par l’évêque John Vincent en 1874
dans une approche d’émancipation de femmes et d’hommes qui auraient
été exclus de l’enseignement supérieur. La formule mélangeait déjà cours
par correspondance et groupes de lecture et de discussion à domicile. Selon
Kaplan (2009), qui a retrouvé trace de ce cercle, Oscar Olsson, qui était un
responsable du mouvement antialcoolique, en aurait adapté l’idée et déve-
loppé les cercles d’étude suédois en 1902. Le principe du cercle d’étude est la
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libre réunion d’un groupe de 5 à 12 personnes qui décideraient de s’éduquer
mutuellement sur des thèmes d’intérêts communs. Un facilitateur s’efforce-
rait de transmettre les conditions de succès du cercle, sans pour autant jouer
le rôle d’expert du sujet traité.
Le cercle d’étude dépasse la simple technique pédagogique. Il s’insère
dans des pratiques sociales. Il participe d’une culture éducative à l’échelle de
toute la société suédoise.
Un peu à l’instar de l’image d’Épinal des chevaliers de la Table ronde,
s’installer en cercle est une façon de marquer l’égalité entre tous les membres
d’un collectif, chacun étant à équidistance du centre et à la périphérie. Les
cercles perdurent dans une variété d’espaces associatifs (cercle de scouts,
cercle d’alcooliques anonymes), culturels (cercle de danse, cercle poétique
ou philosophique) ou entrepreneuriaux (cercle d’entrepreneurs, cercle de
coachs). Du cercle de lecture au cercle d’études, l’usage de cette configu-
ration géométrique se diversifie. Il est observable dans une multitude de
finalités.
20
Savoirs 43 – 2017

–– Le cercle de legs (Doyon et al., 2008) consiste à accompagner des colla-


borateurs situés dans le troisième tiers de leur carrière professionnelle.
–– Les cercles d’apprentissage et d’inclusion visent à faire face aux transfor-
mations du système éducatif québécois qui ont débuté dès les années
1960. Ils se caractérisent par la mise en place de pratiques réflexives
­accompagnant la transformation du métier d’enseignant (journal de
bord, échanges entre pairs). Ils tendent vers un leadership organisa­
tionnel collaboratif au niveau d’une école.
–– Les cercles de partage (sharing circle) dans l’éducation de jeunes enfants
sont basés sur une responsabilité réciproque de l’enseignant et de l’élève
(Rogoff et al., 1996).
–– Les cercles de coachs, avec, un protocole particulier d’interaction dédié à
l’accompagnement des managers, des leaders, des équipes ou des orga-
nisations. Les coachs pratiquent l’intervision 1 pour se mettre mutuel-
lement en vigilance. Il n’y a pas dans ce cas de facilitateur, mais des
échanges réguliers entre pairs partageant la même enveloppe culturelle.
Ils cherchent à balayer mutuellement leurs angles morts dans l’analyse
des situations de clients auxquelles ils sont confrontés.
–– Les cercles de dialogue, dans les approches d’intercompréhension cultu-
relle, se centrent sur les émergences émanant du groupe (Bohm, 1992).
Dans ces déclinaisons contemporaines, le cercle est caractérisé par : la
forme spatiale du regroupement, la facilité d’installation en tout lieu (espace
clos ou ouvert, debout ou assis, avec ou sans chaises, avec ou sans objet au
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centre), les possibilités d’échange sans barrières, l’idéal d’égalité entre les
membres.
Ces déclinaisons contemporaines se croisent avec des pratiques sociales
anciennes comme les clubs des nobles anglais ou italiens, ou encore les
« clubs politiques » français qui se réunissaient pendant la Révolution, les
Stammtische germaniques réunissant des tablées conviviales et parfois cham-
pêtres.
Une communauté d’apprentissage ne saurait se réduire à la forme d’un
cercle ou à un espace commun de regroupement. Si le rituel communau-
taire, de même que la fréquentation d’un espace commun et habituel de
regroupement sont des indices, ils ne garantissent pas l’existence d’une
intention d’apprendre ensemble. L’intention d’apprendre ensemble de

1  Dispositif de rencontres entre pairs, professionnels ou praticiens afin qu’ils échangent


leurs expériences, qu’ils réfléchissent collectivement sur leurs conduites professionnelles, au
travers d’une mise en commun de la pratique d’un des membres du groupe.
21
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

façon explicite est une des caractéristiques propres des utopies sociales du
XIXe siècle.
3.4. Les utopies sociales ou l’intention d’apprendre ensemble
pour faire communauté
Les utopies sociales du XIXe siècle, portées par exemple par Owen
(1825), les expériences de familistères de Saint-Simon (1803), le phalans-
tère de Fourier (1808), l’école mutuelle massivement développée en France
entre 1816 et 1850 (Querrien, 2005) ou encore la fraternité autogestionnaire
de Cabet (1842), induisent des façons d’agir et d’apprendre en groupe qui
obéissent à des formes d’interactions codifiées. Aux États-Unis, B. F. Skinner
(1948) dans son ouvrage Walden 2, communauté expérimentale idéalise les inte-
ractions humaines. Il applique une théorie béhavioriste radicale à une visée
utopique de reprogrammation sociale par laquelle « tous les dirigeants sont
soumis aux mêmes contingences et aux mêmes conséquences issues de
leurs décisions que les autres membres de la société ». Dans une pratique
généralisée, l’apprentissage au sein d’une communauté est repérable dès le
XIXe siècle dans les cours municipaux communautaires anglais, des cours
réalisés dans des quartiers avec l’appui de collectivités et de pouvoirs locaux
(Brooks et al., 2008). Le projet Auroville en Inde dans l’État du Tamil Nadu
est toujours un laboratoire vivant d’apprentissage communautaire.
Le mouvement coopératif, étudié par Desroche (1976), explore les ap-
proches collaboratives, susceptibles de transformer la façon de produire et
d’apprendre ensemble. La formation des coopérateurs est un des principes
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du mouvement coopératif. Desroches introduira ainsi des méthodes d’inter-
compréhension, telles que l’autobiographie raisonnée facilitant l’émergence
de liens étroits entre membres d’une communauté (Éducation permanente,
2014). La relation au pouvoir est une constante réflexion de cette période.
Ainsi, la sociocratie 2 est une proposition d’organisation d’une gouvernance
au sein d’un groupe qui stipule la prise de décision par consentement, la
mise en place de cercles autonomes et interdépendants, par exemple, de
pilotage et de production, un double lien au niveau de l’organisation, par
lequel, à chaque responsabilité confiée par le niveau hiérarchique supérieur,
une adjonction d’un membre d’un niveau inférieur ou adjacent est proposée,
enfin le principe d’élections sans candidats. Devenir sociocrate requiert une
initiation et un apprentissage de repères pour interagir avec les autres.

2  Le terme sociocratie a été développé par Auguste Comte, philosophe français du début
du XIXe siècle, la pratique de la sociocratie fait l’objet de promotion par un mouvement
associatif (http://www.sociocratie-france.fr/).
22
Savoirs 43 – 2017

Les exemples d’approches du XIXe siècle ici relatées donnent un aper-


çu de processus marquants d’apprentissage collectif, nourrissant un fond
d’idées et de pratiques persistantes. Ce qui les rassemble, c’est l’hypothèse
qu’en agissant sur les manières d’apprendre ensemble, c’est toute la société
qui se transforme dans ses composantes épistémiques, économiques ou
politiques.
Ces exemples historiques du XVIIe au début du XXe siècle montrent la
place des rituels, des espaces communs, de la formalisation de rôle et de
règles, de la vision partagée et idéale d’un vivre ensemble qui constituent des
ingrédients des communautés d’apprentissage poursuivant une intégration
sociale. D’autres ingrédients issus de la dynamique des groupes viennent
enrichir la vision contemporaine des communautés d’apprentissages ten-
dant vers la performance économique.

4. Les façons d’apprendre ensemble entre les années 1940


et les années 1970 : entre efficience sociale et performance
économique

4.1. Le groupe comme levier de la performance


Ces années sont particulièrement riches dans le monde occidental. Peut-
être que les horreurs de la Deuxième Guerre mondiale ont incité à plus de
concorde entre les hommes ? Cet apaisement des relations au sein du monde
occidental est certainement passé par de nouvelles approches péda­gogiques
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développées en réaction au taylorisme après la crise de 1929. Lewin (1959)
reste l’un des auteurs les plus cités quand « l’école des relations humaines »
est évoquée (Allouche, 2006). Ses travaux et ceux de ses élèves seront une
source d’inspiration pour l’animation des groupes restreints. Cette approche
humaniste s’installe aussi grâce aux travaux de psychologues tels que Rogers
(1970) ; sa thérapie centrée sur le patient, ses concepts de congruence,
d’authen­ticité et de développement de la personne prennent toute leur
ampli­tude dans les groupes de rencontre 3.
Ce courant va profondément influencer la formation professionnelle, en
Amérique du Nord et en Europe. Les historiens de la formation profession-
nelle ont retracé la vie de nombreuses institutions qui vont reprendre à leur
compte les pédagogies basées par exemple sur l’émergence, la régulation ou
la non-directivité au sein des groupes. Pour la France, Laot (1999) a étudié

3  Groupe autocentré ayant pour visée, grâce à une expérience vécue dans la non-directivité,
de développer les communications et les relations interpersonnelles (Rogers, 1970).
23
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

l’Acuces, Lick (1996) le Cesi, les travaux de Dumazedier (1978) ont alimenté
les méthodes pédagogiques des mouvements d’éducation populaire et fait
progresser la connaissance sur la co-formation. Ces exemples laissent entra-
percevoir les approches dominantes de l’après-guerre basées sur la dyna-
mique des groupes. Le souci de construire un nouveau monde et de mieux
organiser les entreprises fait prendre conscience aux décideurs économiques
de l’enjeu du savoir et de son lien à la performance.
Le tableau 2 retrace plusieurs approches d’orientation coopérative ou
collaborative.
Nom de la méthode Années de docu­ Contexte/domaine
documentée mentation repérées d’utilisation
Action learning Années 1940 Réponse aux problèmes industriels des
(Revans, 1983) mines de charbon du pays de Galles
Groupe de formation Années 1940-1950 Généralisation des apprentissages en
(Lewin, 1959) petits groupes dans des approches de
recherche-action
Groupes de rencontre Années 1950-1960 Groupe de rencontre centré sur les
(Rogers, 1970) besoins du patient
Groupe d’échange et/ou Années 1950-1960 Issu des travaux de Balint dans le
d’analyse des pratiques domaine de la santé pour faciliter les
(Balint cité par Lucas apprentissages en équipes de soignants
1982)
Problem based learning Années 1960 Mobilisation du groupe pour résoudre
(apprentissage par des problèmes contextualisés
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problème) (Hunot, 1997)
Cercle d’apprentissage Années 1960 Réponse aux mutations des systèmes
et d’inclusion éducatifs
Cercle de qualité Années 1960 : Japon Responsabilisation collective autour de
(Juran 1967) Années 1970 : problèmes concrets à résoudre
Amérique et Europe
Tableau 2. Racines des années 1940 à 1970 des formes d’apprentissage collectif

Ce qui caractérise cette période semble être l’avènement de la grande


entreprise, en particulier industrielle, et la mutation sociodémographique
associée (Fourastié, 1979). Le basculement de populations et de traditions
rurales, souvent immigrées, vers des centres urbains se poursuit avec la
Seconde Guerre mondiale. L’accélération des innovations, le besoin d’adap-
tation aux nouvelles conditions organisationnelles et techniques, le déve-
loppement de la société de consommation de masse, puis l’avènement des
services, dans la même lancée, vont poser des problèmes de qualification
du personnel, d­ ’organisation du travail, de rationalisation et d’accélération
24
Savoirs 43 – 2017

des apprentissages. En même temps que le modèle de la grande entreprise


industrielle se développe, une critique de ses limites s’intensifie. Il s’agit, en
réaction, d’imaginer de nouvelles formes d’organisation du travail faisant
une place plus large au collectif. C’est alors que se déploie tout un discours
autour du management participatif dans les équipes autonomes ou semi-
autonomes posant l’accent sur les façons de s’organiser et d’apprendre en
groupe (Dubreuil, 1953). Ces discours sont actuellement partiellement repris
autour de la thématique de « l’entreprise libérée » (Getz et al., 2012) qui valo-
rise l’apprentissage et l’ajustement mutuel au sein de collectifs soudés. C’est
aussi tout un discours autour de la qualité et d’une rationalisation du travail
incluant les coûts cachés (Juran, 1967) qui se pérennisent. C’est la montée
des cercles de qualité et des méthodes d’analyse des problèmes (Deming,
2000). C’est enfin l’idée que les organisations apprennent et peuvent déve-
lopper des atouts concurrentiels à cette occasion (Argyris et al., 1978 [2002]).
4.2. Les pratiques où apprendre ensemble est un levier d’efficacité
économique
Tout d’abord, le monde minier sera un terrain d’expérimentation péda-
gogique. L’expression anglo-saxonne « action learning » aurait été utilisée la
première fois par Revans (1983) dans les houilles du pays de Galles dans
les années 1940. L’action learning implique l’ensemble de l’équipe concernée
par le problème. Le processus de formation est centré sur des projets à
réaliser. Les acteurs concernés apprennent en résolvant « en vraie gran-
deur » des problèmes auxquels ils sont confrontés. Les projets constituent
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des pivots autour desquels sont articulés des objectifs opératoires d’action
et de formation. Une alternance est réalisée entre des temps de formation,
d’action et d’étude. L’apprentissage se déroule au sein de la ­communauté
naturelle de travail. Équipiers et responsables sont associés. Ce courant est
toujours vivant et s’intéresse aujourd’hui au développement des leaders
(Marquardt, 2004).
Pratiquement vers la même période, les travaux sur les groupes de Lewin
(1959) ont été identifiés comme un moyen privilégié d’agir sur les com-
portements individuels et collectifs. Pour Lewin, le groupe démocratique
est un modèle réduit d’une société du même nom. Les groupes sont cré-
dités d’un gisement de performances économiques et de changements
­sociaux. L’étude des groupes ne faiblira pas depuis cette époque. La syn-
thèse de Landry (2007) donne à voir les mécanismes qui président à la
vie des groupes, de leur naissance à leur mort. Il est possible de relever la
créativité pédagogique dans la façon d’organiser les activités de groupes,
de poser les responsabilités comme avec le Teams-Games-Tournaments (TGT)
25
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

(Edward et al., 1974) 4, ou d’organiser l’autonomie comme dans le Small-


Group Teaching (Sharan et al., 1976) 5.
Les approches des groupes en formation sont anciennes et nombreuses
(Benne et al., 1948). Palmade (2009) a notamment décrit l’implantation en
France des Training groups. Une des filiations de l’analyse des pratiques en
groupe serait le Groupe Balint. C’est Michael Balint, psychanalyste d’ori-
gine hongroise, émigré en 1939 en Angleterre, qui proposa une nouvelle
méthode de formation aux médecins généralistes dans les années 1950. Le
premier groupe Balint réunissait douze médecins une fois par semaine pen-
dant 2 heures, proposant un « séminaire de discussion » de communauté de
soignants sur les problèmes liés à l’exercice de la pratique médicale. Il s’ins-
pirait de la méthode analytique de la libre association pour donner la parole
aux médecins sur leur travail professionnel. Il s’agissait alors de permettre
aux praticiens d’analyser les implications affectives et émotionnelles dans le
travail avec les patients et de rechercher de quelles ressources personnelles
ou professionnelles ils disposaient pour s’en occuper.
4.3. Le groupe, première maille d’une communauté
d’apprentissage ?
Est-il concevable de former une communauté sans que des groupes n’in-
teragissent en son sein ? Cela dépend peut-être de la finalité des groupes. La
dynamique des groupes est particulièrement étudiée (Anzieu et al., 1968).
Différents types de pratiques d’apprentissage en groupe se sont développés,
en suivant des finalités différentes :
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–– de soutien : groupes d’entraînement à l’analyse de situations éducatives,
groupes de soutien au soutien, groupes de parole, séminaires d’analyse
de situations de communication (Blanchard-Laville et al., 1996) ;
–– d’émancipation : groupes d’approfondissement personnel, ateliers
d’écriture des pratiques (Cros, 2006) ;
–– de professionnalisation : groupes de résolution de problèmes issus de
l’entraînement mental (Chosson, 2002), groupes de co-développement

4  Il se compose d’une série de procédures dont l’objectif est de fournir un intérêt particulier
pour l’utilisation des objectifs du groupe. Le succès de l’équipe ne peut être véritablement
atteint que si la responsabilité individuelle conduit tous les membres à s’acquitter de leurs
fonctions.
5  Dans l’idée de small group teaching, les tâches sont organisées au sein d’un groupe à partir de
la répartition de sous-sujets sur lesquels doivent travailler de petites équipes en autonomie,
jusqu’à une réalisation collective finale.
26
Savoirs 43 – 2017

professionnel (Payette et al., 1997), groupes d’analyse de pratiques


professionnelles, groupes de formation à l’analyse de pratiques pro-
fessionnelles, apprentissage par problème ou Problem-Based-Learning
(Des Marchés, 1996 ; Hunot-Claireffond, 1997), Team-Based Learning par
Michaelsen et al. (Armstrong et al., 2009).
Ces approches se diffusent aujourd’hui, notamment, par la formation
des formateurs par le coaching (Bismuth, 2005), puis plus récemment
dans le champ de la formation des managers avec une variété de déclinai-
sons d­ ’apprentissage en groupes collaboratifs comme l’apprentissage dans
l’action, l’investigation développementale ou l’investigation coopérative
­
(Baron et al., 2015), ou encore le travail et le partage de pratiques en réseau
(Le Boterf, 2004). Bismuth (2006) adresse cependant une mise en garde
contre l’entrée du psychologique et la captation du désir dans l’entreprise,
dont le risque serait une implication totale de l’individu s’oubliant au profit
de la seule visée économique.
La question qui se pose est celle de la différence entre un groupe en
formation et un groupe qui pourrait se transformer en embryon de com-
munauté. Toutes les équipes de travail ou tous les participants à un stage
ne forment pas des communautés. La persistance des relations, les béné-
fices d’apprendre ensemble passent par la stimulation d’un esprit de pro-
motion, des renforcements sous forme d’événements, de services apportés
aux anciens, de la persistance de contacts au sein de réseau profes­sionnel,
d’outils collaboratifs mis à disposition. Les groupes sont une occasion
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de se rencontrer et de partager des intérêts, mais sans l’investissement
­humain d’un animateur, la création d’une dynamique collaborative retombe
(Le Boucher, 2016).
Sans forcément être nommées « communautés d’apprentissage », l’idéal
de vie en société du XIXe siècle et du début du XXe devient un instrument
au service de la performance économique et de l’efficience sociale par la
suite. Toutes les méthodes citées forment les références des années à suivre
de techniques d’animation, de régulation de groupes et de résolution de pro-
blèmes. L’ensemble de ces façons d’apprendre collectivement vont ensuite
être réinterprétées au regard d’une individualisation croissante du rapport au
savoir qui s’accélère avec, d’une part, l’avènement d’une société de services
et de ses travailleurs tertiaires qualifiés et, d’autre part, la transformation du
monde intégrant Internet dans ses modes d’interaction.

27
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

5. Les façons d’apprendre ensemble des années 1980 à nos


jours
5.1. La mutation de l’écosystème d’apprentissage
Les pratiques d’apprentissage pour les deux premiers tableaux inspirent
toujours les pratiques actuelles et font l’objet de réappropriation. Avec le
déclin de l’industrie, ce qui caractérise les années 1980 jusqu’au milieu des
années 2010, c’est la transformation du rapport au savoir liée à l’irruption
du numérique (Soudoplatoff, 2012), à l’avènement d’un effectif croissant de
travailleurs du savoir de plus en plus diplômés et qualifiés et à l’entrée dans
l’économie du savoir (Moulier Boutang, 2007). Cette économie base moins
sa croissance sur le maniement de la matière que sur des échanges finan-
ciers, la transformation de signes et de symboles, la création continue de
valeur ajoutée à partir d’une masse de données qui ne cessent de s’échanger
et de prendre de la valeur. Le tableau 3 recense un ensemble de méthodes
poursuivant des finalités diverses, mais réinventant chacune à sa manière
des espaces de proximité entre apprenants et des façons de faire commu-
nauté d’apprentissage. Il se centre sur des méthodes qui peuvent se passer
de l’apport technologique.
Formes Années de Contexte/domaine
d’apprentissage documentation d’utilisation
repérées
Cercle de coaching Années 1980 Pratique de l’intervision entre coachs
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Cercle de legs Années Vise la préparation d’un héritage
(Doyon, 2008) 1980‑1990 professionnel au sein d’une entreprise
Groupe de co- Années 1990 Groupe de professionnels qui
développement cherchent à développer leurs pratiques
professionnel professionnelles
(Payette et al., 1993)
Cercle de dialogue Années 1990 À l’origine, pratiques amérindiennes de
(Pauchant, 2002) rassemblement, puis de formalisation
de la pratique pour favoriser le dialogue
interculturel
Communauté Années 1990 Recherche de nouvelles sources
d’apprentissage d’efficacité collaborative dans les
(Grégoire, 1998) entreprises par la mobilisation collective
Communauté de pratiques/ Années 1990 Échanges structurés au sein de groupes
Community of practice professionnels à l’intérieur d’entreprises
(Lave et al. 1991)
Communauté de Années 1990 Accélération des échanges entre
recherches (OCDE, 2011) chercheurs par des dispositifs en ligne
28
Savoirs 43 – 2017

Communauté d’élaboration Années 2000 Programme destiné à des étudiants


des connaissances
(Scardamalia et al., 2003).
Communautés Années 2000 Territoire qui prend en charge son
d’apprentissage centrées développement pour faire face
sur le lieu (Faris, 2010) à l’accélération des phénomènes
d’urbanisation
Communauté de la Années 2000 Promotion des politiques européennes et
connaissance (OCDE de l’OCDE en faveur du développement
2011 et Institut européen des disciplines de recherche
d’innovation et de
technologie – EIT)
Communautés de pratiques Années 2010 Organisation d’une gouvernance des
pilotées ou autogérées communautés qui se développent dans
(Bouchez, 2014) les organisations de travail
Tableau 3. Apparition des formes d’apprentissage après l’avènement du numérique

Bien que les façons d’apprendre ensemble s’hybrident, les pratiques se


distinguent selon que l’ordinateur et les écrans sont utilisés prioritairement
ou non. L’irruption de nouvelles modalités de partage à distance semble
un fait générateur de nouvelles sociabilités d’apprentissage individuelles
et collec­tives. C’est pourquoi nous allons commencer par regarder ce que
signifie apprendre ensemble, sans écran puis avec l’utilisation d’écrans et
à distance, et comment la logique de communautés d’apprentissage prend
sens dans ces situations.
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5.2. Les communautés d’apprentissage contemporaines :
une production de résilience ?
5.2.1. La remobilisation des collectifs au travail

Les formes « traditionnelles » d’apprentissage en groupe perdurent, mais


une volonté ou un besoin de transformer les cultures organisationnelles
conduisent à mobiliser le pouvoir des collectifs pour atteindre des savoirs
tacites, contextualisés et informels. Ces apprentissages prennent la forme
de « cercles », de « groupes d’échange des pratiques », de « communautés
d’apprentissage ».
Les façons d’apprendre ensemble sont situées dans les grandes trans-
formations économiques et sociales de chaque époque. Orellana (2005) fait
remonter aux années 1990 l’idée de communauté d’apprentissage :
« C’est dans les années 1990 que l’idée de communauté d’apprentissage s’articule et se for-
malise, retenant l’intérêt de chercheurs et praticiens de divers domaines comme l’éducation, la
29
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

sociologie, la psychosociologie, la philosophie. Elle prend forme au cœur d’un vaste mouvement
de réflexion en quête de valeurs, de principes et de modes de vie alternatifs, faisant partie des
réflexions visant à repenser les processus éducatifs au regard des réalités contemporaines en
constant changement. »
Cependant, à partir de cette définition générale, il est possible de repérer
trois usages de l’expression :
–– un usage générique, dans lequel l’expression communauté d’appren-
tissage organiserait toute forme collective d’apprentissage au sein d’un
continuum allant du réseau de contacts le plus lâche, en passant par les
groupes, jusqu’aux communautés, formes les plus collaboratives ;
–– un usage restreint au monde éducatif, pour désigner les pratiques de
communautés rassemblant les enseignants (Dionne et al., 2010), les en-
seignants et les élèves (Grégoire, 1997), ou plus largement enseignants,
élèves, parents et toutes les parties prenantes de la réussite éducative
(Craipeau et al., 2002,), ou encore faisant de la communauté éducative
une organisation apprenante (Thiessen et al., 1999),
–– une forme spécialisée, inclusive et collaborative de l’apprendre en-
semble.
Orellana (2002), nous donne le principe de cette forme inclusive :
« Le principe de base de la communauté d’apprentissage est de mettre en évidence l’importance
de la mise en commun des efforts, des talents et des compétences de chacun et de valoriser les
processus éducatifs qui intègrent les dimensions sociales, tout en étant appropriés aux besoins
des personnes et des communautés et adaptés aux contextes divers et changeants. »
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Selon cette dernière perspective, c’est la communauté plutôt que l’appre-
nant qui est au cœur du processus d’apprentissage. Orellana (2002) reprend
la distinction proposée par Dewey de l’apprentissage par, l’apprentissage
pour et l’apprentissage dans la communauté.
–– Apprentissage par la communauté : community of learners de Kenneth
(1997), McCaleb (1994) et des open learning communities de Schnüttgen
(1997). L’idée d’un engagement collectif en vue de produire des change-
ments chez les personnes et les communautés est présente. Les propo-
sitions de McCaleb (1994) sont de tendre vers la « société éducative » :
« La stratégie de la communauté d’apprentissage implique un processus
d’apprentissage participatif, collaboratif, qui cherche à optimiser les pos-
sibilités d’apprentissage, de réflexion critique et d’action pour produire
des changements. »
–– Apprentissage pour la communauté : collaborative community. La
communauté est le but de l’apprentissage. Voici comment Potapchuk
30
Savoirs 43 – 2017

et al. (1994) l’expriment : « La communauté s’engage dans un développe-


ment optimal de la communauté, s’implique dans la recherche de solu-
tions aux problèmes du milieu de vie et participe activement à un pro-
cessus d’apprentissage contextuellement, socialement et culturellement
pertinent, qui vise à améliorer la qualité de vie du milieu partagé. Dans
ce cas, la communauté est le but d’apprentissage. »
–– Apprentissage dans la communauté : communauté de pratiques pro-
fessionnelle de Lave et al. (1991), déjà citée.
Que l’apprentissage soit par, pour ou dans la communauté, des condi-
tions d’émergence sont observables.

5.2.2. Les conditions d’émergence d’une communauté


d’apprentissage

Pour qu’il y ait communauté, et pas seulement collection d’individus,


réseau, groupe éphémère ou foule, plusieurs conditions sont requises. La
référence à l’apprentissage au sein d’une communauté suppose des condi-
tions particulières, pour être distinguée de nombreuses façons d’apprendre
ensemble. Selon Bielaczyc et Collins (1999), 8 dimensions doivent être
­présentes  :
1. Un but commun de la communauté.
2. Des activités d’apprentissage partagées, significatives et visibles.
3. Un rôle d’enseignant concepteur et animateur d’un espace d’appren-
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tissage et des apprenants responsables de la conduite de leurs apprentis-
sages individuels et collectifs et de leur propre évaluation.
4. Des changements de rôles des participants selon leurs connaissances
et habiletés, chaque participant étant occasionnellement porteur ou de-
mandeur de ressource.
5. Les ressources : les membres eux-mêmes et la collectivité.
6. Un langage commun co-élaboré au fur et à mesure des interactions
entre les membres.
7. Le consensus autour du savoir par approfondissement des idées.
8. La production par les apprenants de leurs propres objets et idées.
Ainsi, il ne suffit pas de mettre des moyens à la disposition de groupes
pour qu’ils se transforment en communautés ; il est nécessaire de participer
au récit commun où chacun développe un sentiment d’appartenance, fait de
confiance réciproque, et d’inclusion de sa subjectivité (Cristol, 2016).
31
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

Avec Internet, il serait facile de confondre une série d’échanges en ligne


et une communauté d’apprentissage. Une définition simpliste faisant d’une
communauté d’apprentissage en ligne un groupe apprenant sur Internet
serait de faible portée pour décrire la diversité des phénomènes individuels
et collectifs à l’œuvre. Dillenbourg et al. (2003) relèvent plusieurs caracté-
ristiques faisant d’un groupe une communauté d’apprentissage. Ils citent :
l’interdépendance et l’application, l’émergence d’une micro-culture, l’orga-
nisation sociale, la sélection spontanée et la croissance organique, la longé-
vité et l’espace d’interaction et de partage. C’est en agissant elle-même sur
sa propre réalité qu’une communauté humaine se dote de repères qui la font
exister.
Sur une échelle temporelle, une communauté se repère par l’apparition
d’une micro-culture. La communauté se créerait progressivement par un
processus endogène et non par décision extérieure. Ce point la distingue
d’un groupe qui pourrait être organisé par la volonté d’un seul ou d’un
réseau dont les liaisons sont lâches et changeantes. Dillenbourg pose les
repères suivants des étapes d’émergence d’une communauté :

Co-construire Co-construire Co-construire


une référence un jeu de concepts une micro-culture
Échelle : minutes Échelle : heures Échelle : mois, années
Tableau 4. Échelle de co-construction de la communauté d’apprentissage
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(Dillenbourg et al., 2003)

Alors que le groupe peut être initié par un donneur d’ordre, une com-
munauté se co-construit dans la durée. Ses références propres, son langage
et la micro-culture qui s’en dégage sont les signes de sa vitalité et de sa
spécificité.
Si les communautés se bâtissent par elles-mêmes, pour elles-mêmes, les
dirigeants d’organisation perçoivent le potentiel qu’elles recèlent au service
de la performance collective. Dans une perspective gestionnaire, Bouchez
(2014) distingue alors les communautés de pratiques autogérées qui se
­coalisent à partir des questions mises en commun et les communautés de
pratiques pilotées par un sponsor de la direction. Cette distinction témoigne
de la volonté de directions d’orienter les phénomènes collectifs au profit
d’apprentissages qui bénéficient à toute la structure. On en revient ici à une
finalité déjà énoncée pour les « organisations apprenantes ».

32
Savoirs 43 – 2017

5.2.3. La théorisation des communautés de pratiques :


un marqueur du regain collectif

La communauté de pratique serait un groupe d’individus partageant un


intérêt, un ensemble de problèmes, une passion pour un sujet donné. Les
membres approfondissent leurs connaissances dans ce champ d’expertise
en agissant les uns sur les autres sur une base continue (Wenger et al., 2002).
Lave et al. (1991) en donnent la définition suivante :
« Les communautés de pratique sont des groupes d’individus qui partagent un enjeu ou une
passion pour quelque chose qu’ils font et apprennent à mieux faire en interagissant régulière-
ment. Elles se reconnaissent par trois dimensions : engagement mutuel, entreprise conjointe,
répertoire commun. Pour devenir un membre même périphérique, il s’agit de réaliser des
­apprentissages à propos de chacune de ces dimensions. La participation et la réification sont
deux processus fondamentaux de la constitution d’une communauté et de sa dynamique. »
Ce qui caractérise la communauté de pratique, c’est la persistance d’un
réseau social d’individus actifs (Chanier et al., 2006). Pour Paloque-Berges
(2012), les caractères de mise en commun de moyens, d’auto-organisation
autour d’un objet commun sont essentiels pour utiliser cette notion. Par
ailleurs, les processus d’apprentissage collectif se diviseraient en deux avec :
–– d’une part, des processus de participation et,
–– d’autre part, des processus de production d’un objet commun.
Le fait d’une permanence d’activités, de liens forts entre les membres et
de leur capacité de se lier pour résoudre des problèmes communs a concou-
ru au succès de l’expression « communauté d’apprentissage », qui dépasse
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les communautés de pratiques, et va maintenant être abordé.

5.2.4. Les communautés centrées sur le savoir ou le besoin


de construire l’avenir

Les communautés centrées sur le savoir peuvent être séparées en méso-


communautés et micro-communautés, selon le niveau d’observation adopté.
–– Les méso-communautés d’apprentissage organisées autour du savoir
sont, par exemple, abritées par les réseaux des universités. Les univer-
sités ont codifié leur organisation, élaboré des rituels et des processus
d’apprentissage depuis les premières implantations médiévales jusqu’aux
universités actuelles et à la vision moderne de Humboldt (OCDE, 2011).
Le principe en est la confrontation des idées et le partage des savoirs
pour aboutir à un approfondissement constant. Chaque membre peut

33
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

être affilié à une discipline dans laquelle la culture de l’expertise pré-


vaut. Si chacun réfléchit sur ses objets de recherche, élabore ses théories
propres, les productions individuelles font progresser la communauté
et enrichissent le répertoire commun d’idées, de questions et de pistes à
­explorer. Les communautés de chercheurs produisent des connaissances
et comptent parmi les premières communautés structurées autour de
disciplines. L’OCDE (2011) fait même du développement de ces com-
munautés un axe stratégique. L’Institut européen d’innovation et de tech-
nologie (EIT) a l’ambition de devenir un réseau de « communautés de
la connaissance » comprises comme des équipes de chercheurs issus des
universités, des instituts de recherche et des professionnels de l’industrie.
–– Les micro-communautés d’apprentissage se situent à l’échelle d’un
collectif d’apprenants où chacun connaît les autres. Elles utilisent le po-
tentiel des outils de recherche en ligne pour mener des enquêtes en colla-
boration. L’apprentissage par la recherche a inspiré le knowledge building :
une façon de co-élaborer le savoir par engagement collectif autour d’un
objet commun. Il s’agit d’avancer collectivement dans la construction
d’un apprentissage. Pour Scardamalia et al. (2003), le processus est initié
par une question authentique qui émerge d’une discussion de groupe.
Une fois la question acceptée par tous, chacun est invité à collecter des
informations pour enrichir le savoir commun sur cette question. Tous
les membres s’autocorrigent et complètent le stock d’informations rela-
tif à l’objet commun. Le processus suppose l’existence d’un climat de
confiance, pour que les apprenants acceptent le regard de l’autre sur ses
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erreurs. Cette approche favorise un ancrage en profondeur des connais-
sances prenant en considération ce qui est déjà su par chacun. Les
connaissances se consolident dans une logique d’échafaudage. Les idées
se construisent par touches et itérations successives, jusqu’à parvenir
à une pensée collective plus aboutie. Les co-élaborations sont notam-
ment basées sur un processus d’écriture. Les participants écrivent en
parallèle de façon synchrone ou asynchrone. Le va-et-vient entre l’oral
et l’écrit est une condition du travail collaboratif. Les temps en présentiel
permettent la confrontation des idées et les échanges se poursuivent à
distance. En présence ou à distance, le facilitateur des apprentissages
aide au repérage de sources fiables d’information et en reformulant
l’état d’avancement et de progression du savoir collectif des partici-
pants. Dans le contexte de l’université Laval, le processus s’enrichit de
travaux en sous-groupes, de laboratoires vivants, de rencontres, de lec-
tures, de recherches sur des sujets plus personnels de participation à des
34
Savoirs 43 – 2017

communautés professionnelles déjà constituées interagissant en réseau.


Jezegou (2014) repère de nombreux bénéfices pour la démarche d’en-
quête en ligne, en particulier le renforcement de l’agentivité humaine qui
se traduit par la capacité d’élaborer son propre environnement d’appren-
tissage de concert avec d’autres apprenants.
Cette approche ressemble à celle de la community of inquiry (communauté
d’enquête).
« Le modèle de community of inquiry in e-learning s’appuie sur la psychologie culturelle
liée à la collaboration dite « constructive » ainsi que sur le courant philosophique du prag-
matisme porté par Lipman. Le pragmatisme définit une community of inquiry comme
un groupe de personnes, membres volontaires aux expertises diverses et d’égale valeur, enga-
gées conjointement dans une pratique d’enquête visant à résoudre conjointement une situation
­problématique. » (Jezegou, 2014)
Ces modèles d’apprentissage qui se développent de façon formalisée,
comme dans le contexte de l’université Laval, ou de façon informelle, ques-
tionnent incidemment les formes usuelles de relation dans les groupes et la
manière dont l’autorité se trouve légitimée. La légitimité de l’action et le lien
au sein d’une communauté peuvent être portés par un autre élément : le lieu.

5.2.5. Les communautés centrées sur les lieux ou comment


satisfaire un besoin de proximité

Pour Faris (2010), les lieux mobilisent les ressources d’apprentissage dans
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cinq secteurs : le secteur civique ou de la gouvernance ; le secteur économique
(de l’entreprise privée à l’entreprise d’économie sociale) ; le secteur public
(les bibliothèques, les musées, les agences de santé et de services sociaux) ;
le secteur de l’éducation (de la maternelle aux cycles supérieurs) ; le secteur
du bénévolat et de l’action communautaire (groupes confessionnels, clubs
philanthropiques, associations récréatives et ludiques). Les communautés
peuvent apprendre en concentrant leur attention sur un lieu et les relations
de voisinage qu’il autorise. Faris (2007) nous en donne la définition suivante :
« des quartiers, des villages, des villes ou des régions qui recourent explicitement à l’appren-
tissage tout au long de la vie comme principe organisationnel et objectif socioculturel visant à
promouvoir la collaboration entre les secteurs ­civique, économique, public, bénévole et éducatif,
afin d’améliorer les conditions ­sociales, économiques et environnementales sur une base durable
et ouverte ».
Pour Block (2008), il convient de distinguer les « communautés restaura-
trices » des « communautés rétributrices ». Les premières visent à inclure dans
un apprentissage tourné vers le futur du lieu à partager ensemble, alors que
35
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

les secondes sont des communautés qui se contentent de donner des signaux
de reconnaissance individuels. Ces communautés restauratrices promeuvent
le communityship : un apprentissage pour le développement de la communauté.
C’est ainsi que les relations de proximité ont permis le développement
des réseaux d’échanges réciproques de savoirs (RERS) 6. Ces derniers sont
nés dans les années 1980 à Orly d’un questionnement pédagogique à l’école
et d’une pratique sociale et civile de Héber-Suffrin (2004). Un Réseau
d’échanges réciproques de savoirs (RERS) est une association fonction-
nant à l’échelle d’une agglomération, d’une zone rurale, d’un établissement
scolaire, d’une classe ou d’une entreprise et dont les membres donnent et
reçoivent des savoirs et savoir-faire 7. Le principe a également été testé en
entreprise, où là aussi la proximité est essentielle (Van den Abeele, 2011 ;
Fernagu-Oudet, 2012). Les facteurs de pérennisation d’un réseau ont été
étudiés par Le Boucher (2015), en particulier « l’importance de la conver-
gence des valeurs, de la conception, des récits, des aspirations, des types
d’organisation et de méthodes qui fondent l’identité du collectif engagé ».
Un autre sens des communautés d’apprentissage centrées sur les lieux
découle de processus de recherche se donnant un ancrage géographique.
Pour Davidson-Hunt et al. (2007), les communautés centrées sur des lieux
ou place-based learning community permettent de créer un réseau dialogique
entre chercheurs et autochtones pour produire des savoirs et des processus
de décisions sur la gestion commune de ressources.
Même si ces formes peuvent se passer de connexions et d’écrans, elles
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sont aussi peu à peu rattrapées par le pouvoir de se connecter. Il est pos-
sible d’élargir ce recueil des façons d’apprendre ensemble pouvant se passer
d’écran à d’autres façons où l’écran et Internet deviennent essentiels.

6. La réinvention des communautés d’apprentissage


avec Internet
6.1. Le pouvoir de se connecter ou la libération d’un potentiel
pour apprendre
La période comprise entre le début des années 1980 jusqu’aux années
2010 est aussi marquée par la montée du pouvoir de connexion des hommes
et des idées grâce aux ordinateurs.

6  Charte des RERS : http://www.rers-strasbourg.eu/IMG/pdf/4_Charte_des_RERS-2.pdf.


7  Colloque « La force de la réciprocité et de la coopération », Mouvement français des
réseaux d’échanges réciproques de savoirs (Foresco), Évry, 3-5 juin 2016.
36
Savoirs 43 – 2017

Un premier champ de recherche dans les années 1990 a été exploré


sur les pratiques de design d’apprentissage avec les ordinateurs en réseau.
Dillenbourg et al. (2009) rendent compte d’une somme de travaux avec le
Computer-Supported Collaborative Learning (CSCL). Ces travaux sont centrés sur
la conception et l’animation de dispositifs collaboratifs en ligne et pointent
l’importance des dimensions affectives et émotionnelles.
Mais, avec l’accélération d’Internet et par les usages de travailleurs de
plus en plus qualifiés, c’est l’ensemble de l’écosystème de production et
d’apprentissage qui mute et échappe au seul pouvoir d’orchestration des
concepteurs de dispositifs :
–– nature des connaissances reconverties (Douheidi, 2008),
–– façons de lire par bribes et d’entrer en contact avec des données
(Simone, 2012),
–– places et rôles des apprenants et des formateurs (Cristol, 2014b),
–– place de la connaissance dans le système économique (Moulier-
Boutang, 2007),
–– lieu et moment d’utilisation des savoirs (Afpa, 2013).
Il est possible d’observer pour les communautés d’apprentissage ce que
Douheidi (2008) décrit comme un recyclage d’idées et de pratiques anciennes
avec un nouveau couple d’outils et de manières de penser, embarqué avec
le numérique.
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Communauté libriste Années 1980 Création de codes informatiques
ou open-source (Blum, ouverts à tous
2012)
Communauté Années 1980 avec les Mise en place de collaboration
d’apprenants en réseau premières plateformes au sein de groupes d’étudiants
(Laferrière, 2005) connectés sur les plateformes en
ligne
Communauté Années 1930 8 Apprentissage collaboratif basé
d’enquête/ Années 2000 avec des sur des recherches partagées, se
Community of inquiry approches e-formation développant actuellement avec des
(Dewey, 1938) approches de e-formations
Communauté Années 2000 Promotion de l’accès à la formation
d’apprentissage ouverte des publics exclus grâce à
(Unesco, 2002) l’informatique

8  Le principe de la community of inquiry avait déjà été identifié par Dewey qui fait de l’enquête
un moteur d’apprentissage dès la fin des années 1930. Ce principe est amplifié actuellement
avec l’informatique en réseau.
37
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

Communauté Années 2000 Promotion d’un fonctionnement


d’apprentissage d’une équipe pédagogique sous
professionnel forme d’une communauté éducative
(Leclerc et al., 2013)
Communauté virtuelle Années 2000 Groupe qui structure ses
d’apprentissage apprentissages en utilisant les
(Dillenbourg et al., 2003) moyens technologiques
Communauté de Années 2000 Actualisation des identités de
pratiques en ligne communautés enseignantes face au
(Chanier et al., 2006) phénomène numérique
Communauté Années 2000 Apprentissages organisés ou non
apprenante en réseau pour les enfants ou adultes qui se
(Dall’o, 2006) retrouvent en ligne
Communauté numérique Années 2000 Contexte des sites individuels et
ou d’utilisauteurs des blogs qui sont animés par des
(Bourcier et al., 2012) amateurs/professionnels
Communauté d’intérêt Années 2000 Regroupement autour d’intérêts
(Daele et al., 2006)
Réseau des learning labs Années 2015 Communauté informelle
d’innovateurs pédagogiques
Tableau 5. Les communautés d’apprentissage numérique à partir des années 1980

6.2. Les réseaux décentralisés favorisent l’apparition


de communautés informelles
Les premières pratiques d’apprentissage en ligne seraient issues des com-
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munautés de développeurs informatiques souhaitant accéder librement aux
sources de codes. Ces communautés « libristes » créent une culture de déve-
loppement du code libre de droits (Broca, 2013). Elles sont parfois appe-
lées communautés open source. Les modèles d’organisation et d’innovation
des programmeurs vont donner leurs racines aux hackers (Lallement, 2015).
Paloque-Berges et al. (2013) caractérisent ainsi leur intention :
« Le caractère collaboratif d’élaboration des protocoles, le refus des systèmes propriétaires se
font écho au sein des différentes communautés, de même que les implications techniques, poli-
tiques, économiques ou idéologiques sous-­tendues par ces questions. ».
Pour Flichy (1999), les programmeurs rêvent d’une communauté scienti-
fique idéale. Cette utopie aurait ensemencé les pratiques ultérieures d’usages
d’Internet, tant par les protocoles d’interaction conçus que par l’idéologie
associée.
Les communautés numériques s’organiseraient alors autour de projets de
développement de langage, ou autres visées collaboratives visant le partage
38
Savoirs 43 – 2017

de connaissances : collectifs d’artistes, associations de malades (Jouet et al.,


2011), groupes de militants écologistes (Ollitrault, 2001), création d’une
­encyclopédie collaborative Wikipédia ou Wikimédia (Barbe et al., 2015). Des
communautés d’utilisauteurs (Bourcier et al., 2012) produiraient individuel-
lement ou collectivement des contenus de savoirs et les diffuseraient pour
en favoriser le réemploi.
Les réseaux forment un terreau propice aux apprentissages en ligne,
qu’ils soient réseaux internes aux organisations, comme les intranets, ou
réseau ouvert comme Internet.
–– sur les intranets, des administrations et des entreprises, des réseaux
collaboratifs se mettent en place. Les Réseaux sociaux d’entreprise
(RSE) ou réseaux collaboratifs (CEFRIO, 2003) ont pour finalité d’aider
les membres à faire face à leur mission, en échangeant des informations
et en rédigeant ensemble des documents pour des projets.
–– sur Internet, des réseaux s’organisent de façon empirique. Avant même
d’évoquer les formes de communautés plus élaborées, des échanges bila-
téraux préexistent. De la simple mailing-list de personnes intéressées par
le même sujet à des regroupements plus structurés il est possible d’obte-
nir des réponses à des questions professionnelles ; les réseaux sont alors
qualifiés d’apprenants. Lorsque plusieurs professionnels se regroupent
pour résoudre des problèmes complexes, les réseaux peuvent s’organiser
et devenir collaboratifs.
Le passage de réseaux ou communautés informelles à des communautés
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en ligne formelles est une gageure pour les organisateurs. Les enseignants
expérimentent eux aussi les vertus de l’apprentissage à plusieurs.

6.3. Les communautés émergent aussi d’espaces institutionnels


Chanier et al. (2006) remarquent le potentiel formateur d’Internet. Ces
auteurs relèvent son influence de transformation sur les pratiques ensei-
gnantes :
« L’Internet, les réseaux informatiques et les collecticiels associés semblent offrir l’environne-
ment de travail approprié au développement de ces réseaux sociaux, un environnement où l’on
peut tout à la fois échanger des ressources éducatives et discuter les approches éducatives, et où
s’actualise l’identité profes­sionnelle de l’enseignant. »
Internet a constitué une opportunité de création de communautés colla-
boratives d’enseignants au sein comme à l’extérieur des institutions éduca-
tives. C’est une occasion offerte pour échanger des pratiques entre pairs et
consolider des valeurs professionnelles. Quentin (2010) réalisera plusieurs
39
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

observations sur des communautés enseignantes échangeant leurs pratiques


en ligne, mais constatera que, derrière la même idée d’échange, des proto-
coles différents se mettent en place faisant du site de la communauté :
–– un lieu de stockage,
–– un forum de discussion,
–– un lieu militant.
Selon que la communauté émerge de l’initiative de praticiens engagés en
réponse à un besoin ou qu’elle soit créée par une institution, l’adhésion est
différente. Quentin constate une vitalité plus forte des échanges et collabo-
rations dans les communautés spontanément émergentes. Si les enseignants
se sont saisis du potentiel collaboratif d’Internet pour transformer leurs
pratiques, ils l’ont aussi introduit dans leur propre enseignement.
En 2008 a eu lieu une première expérience bien documentée de Downes
et Siemens avec leur cours « Connectivisme et connaissance connective »
(Jeunesse et al. in Cristol et al., 2013). Les deux chercheurs du MIT ont à
cette occasion promu une théorie connectiviste de l’apprentissage. Pour
eux, c’est l’utilisation d’un réseau qui est l’image centrale de l’apprentis-
sage. Siemens a théorisé l’apprentissage comme processus de création de
connexions et de développement des réseaux (Siemens, 2005). C’est avec
160 000 auditeurs affichés pour un cours en ligne sur « L’introduction à
l’intelligence artificielle » que la publicité pour les MOOC  9 a été faite. Le
créateur du cours quittait Stanford et créait sa plateforme Udacity pour
promouvoir son approche de la formation à distance (Cisel et al., 2012).
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Cette expérience de cours massif a été imitée, soit dans des versions de
type xMOOCs, qui se caractérisent par une visée de distribution massive
de savoirs, soit dans des versions de type cMOOCs, qui se distinguent par
la visée de co-construction de savoirs. Cette dernière modalité est la plus
en lien avec la théorie connectiviste énoncée. Il est possible d’observer
aujourd’hui comment certains MOOC, parfois pensés comme moyen de
socialisation numérique, sont en train de changer d’ordre, passant de l’expé-
rimentation pédagogique à l’entrée sur le marché du e-learning (Lhommeau,
2014). Certains MOOC prétendent devenir des communautés virtuelles
d’apprentissage.

9  Massive Open Online Courses.


40
Savoirs 43 – 2017

6.4. Les communautés en ligne et la question de la direction


des apprentissages
6.4.1. Les communautés d’apprenants dans les universités

Les universités se sont saisies de ce potentiel. Une définition dans le


contexte universitaire des « communautés d’apprenants » est proposée par
Henri et al. (2001) :
« Les communautés d’apprenants deviendraient des milieux dans lesquels les étudiants
­apprennent à apprendre et dans lesquels les enseignants sont des modèles de l’apprentissage
intentionnel et du savoir motivé. »
Cette définition est spécifique au cas particulier des universités, car les fa-
çons d’apprendre ensemble en ligne connaissent de nombreuses variations,
selon le caractère formel ou informel du cadre d’interaction, le nombre de
personnes concernées, les finalités poursuivies et les types d’espace utilisés.
Le sentiment d’appartenance et les finalités et usages partagés distinguent
les différents collectifs. Il est possible de distinguer, d’une part, les commu-
nautés qui se constituent par rencontre d’intérêt commun et, d’autre part, les
communautés qui se constituent à l’instigation d’une institution.
–– C’est ainsi que sont distinguées les communautés dites d’intérêts,
regroupement d’individus autour d’un sujet commun à propos duquel
a lieu un échange d’informations menant à la construction de connais-
sances en vue d’un usage individuel (Daele et al., 2006) ;
–– les communautés d’intérêt finalisé, au sein desquelles les membres
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d’une communauté d’élaboration des connaissances se penchent sur une
question ou un problème qu’ils examinent sous différentes perspectives
et différents points de vue (Lafferriere et al., 2007) ; cette communauté
d’élaboration des connaissances également désignée sous l’appellation
« communauté de construction de connaissances » regroupe des indivi-
dus engagés dans la production, la proposition et le partage d’idées et
de connaissances pour faire progresser leur communauté (Scardamalia,
2000). Il s’agit d’y co-élaborer des connaissances.
Lorsqu’elles sont organisées dans un programme éducatif, les commu-
nautés en ligne sont encadrées par des enseignants ou formateurs qui ima-
ginent des activités pédagogiques, des progressions et des évaluations. Elles
s’inscrivent dans une intention académique et sont associées à des moda­
lités d’évaluation. Lorsqu’elles se dotent d’un espace sur le web pour ajou-
ter à leur mode d’interaction, elles deviennent des communautés en réseau
(St‑Onge, 2003).
41
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

Une communauté en réseau est une communauté formée d’apprenants,


jeunes ou adultes, interagissant, à des fins d’avancement de leurs connais-
sances personnelles et collectives, dans le contexte ou non de la salle de
classe au moyen d’Internet (Laferrière, 2005).

Les Communautés virtuelles d’apprentissage (CVA) ou la co-construction


de l’intention
Les synonymes de communauté virtuelle d’apprentissage sont nombreux.
Sont évoquées les communautés en ligne ou communautés électroniques,
voire les cybercommunautés. Cette dernière expression renvoie à un essai
de représentation du web à partir d’une étude du regroupement de pages
hypertextes, ou des partages de signets (Clerte, 2006). Ces dénominations
visent une même idée : un ensemble de personnes reliées par ordinateur qui
échangent par l’intermédiaire d’un réseau informatique, tel Internet, et qui
partagent un intérêt commun, pouvant se transformer en culture commune
d’apprentissage. L’idée de communautés virtuelles d’apprentissage fait suite
à une lignée d’approche en e-formation comprenant l’Enseignement assisté
par ordinateur (EAO), les micromondes, les tuteurs intelligents, les hyper-
textes, le multimédia, le e-learning (Dillenbourg et al., 2003). Mais il ne suffit
pas d’être connecté pour former une communauté.
Pour Gentil et al. (2010), la communauté virtuelle d’apprentissage est un
parti pris pédagogique qui s’appuie sur un travail collaboratif, se faisant sans
division fixe des tâches et avec un leadership tournant :
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–– l’intervenant n’est pas leader,
–– l’organisation d’un leadership et de rôles tournants implique un ob-
jectif commun partagé,
–– le respect d’une nétiquette (règles des échanges sur Internet),
–– des échanges équitables doivent exister entre ce que l’on apporte aux
autres et ce que l’on retire des échanges,
–– le pilotage (régulation interne) est privilégié plutôt que le tutorat
(régu­lation exogène) au sein de la CVA.
Pour Casteignau (2003) : « L’originalité de cette démarche est que ­l’outil
d’apprentissage n’est pas conçu par les formateurs pour les apprenants.
Il est réalisé par une communauté virtuelle qui développe à distance son
projet d’apprentissage, à partir de “menus” offerts par les formateurs. La
communauté est le “plus” qui peut rompre l’isolement de l’étudiant éloi-
gné, qui lui donne un rôle actif dans sa formation et le place dans une
logique d’apprentissage actif et non de réception passive, consumériste d’un
42
Savoirs 43 – 2017

enseignement. […] L’apprentissage à distance en communautés virtuelles


est le premier maillon d’une nouvelle forme d’intelligence collective où
­l’apprenant est acteur de ses propres apprentissages. »

6.4.2. Les communautés d’apprentissage ouvertes

Le pouvoir d’apprendre en ligne est un enjeu éducatif repéré par les ins-
titutions internationales. Le potentiel d’apprentissage en ligne est ­repéré par
l’Unesco et participe d’une ambition éducative majeure. Pour l’Unesco, l’ex-
pression « communautés d’apprentissage ouvertes » désigne des ambitions
et des pratiques relatives à l’éducation et au développement, qui s’appuient
sur les systèmes locaux de savoir, sur le dialogue, l’apprentissage interactif, le
partage d’expériences, l’échange et la création de savoir. Le terme de « déve-
loppement » renvoie, dans le contexte des communautés d’apprentissage
ouvertes, à des évolutions et des transformations positives aussi bien éco-
nomiques que sociales, politiques, culturelles, spirituelles ou de toute autre
nature.
Actuellement, les communautés prennent un tour nouveau, avec le pou-
voir de mise en relation des réseaux socio-numériques publics, des pratiques
plus récentes de meet-up, que l’on peut définir comme des rencontres infor-
melles pour discuter de thèmes d’intérêts communs, se développent  10. Elles
sont stimulées et se croisent avec les nouveaux lieux d’apprentissage pour
les accueillir, espace de co-working, fab-lab, learning-lab, open-lab. Ces espaces
soutenus par les pouvoirs publics rendent possible la naissance de commu-
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nautés informelles.
Ces communautés ouvertes, en ligne, fréquentant de nouveaux espaces,
annoncent une mutation des sociabilités formatives des apprenants comme
des enseignants.

7. Conclusion
7.1. Point d’étape sur le chemin parcouru dans la note
7.1.1. Les niveaux de sens de l’apprendre ensemble
Les façons d’apprendre ensemble révèlent comment les individus en-
tendent s’écouter, collaborer et vivre ensemble. Que les hommes choisissent

10 Exemple de dispositif hybride étudié à l’occasion d’une recherche sur un MOOC


d’apprentissage informatique qui réinvente les relations de proximités informelles :
https://hal.inria.fr/hal-01207356/document. Exemple de plateforme grand public pour se
rencontrer sur des thèmes d’intérêts communs : http://www.meetup.com/fr-FR/
43
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

d’apprendre en cercle, en groupe, en réseau ou en communauté, en pré-


sence ou à distance, dans tous ces cas, ils se tiennent au plus près de leur
nature sociale, car la connaissance s’insère dans des réseaux de signification
humaine, des chaînes d’interdépendance. La note a ainsi balayé des enjeux
sociétaux, philosophiques, politiques et éducatifs au niveau macro, puis elle
s’est concentrée sur deux niveaux d’observation :
–– un niveau méso qui montre toute l’importance dans l’histoire des
organisations, des contextes et des structures des façons d’apprendre
ensemble ;
–– un niveau micro qui a surtout permis l’examen d’une cinquantaine de
façons d’apprendre ensemble et leurs variantes.

7.1.2. La poursuite du questionnement numérique

La question numérique a constamment été rappelée, car les technolo-


gies interpellent l’organisation des interactions, dans un premier temps
de façon centralisée et dans un second temps de façon informelle. Elles
offrent la possibilité de nouveaux développements quant à l’organisation
de processus coopératif ou collaboratif d’apprentissage. Enfin, le fait de
se sentir membre d’une communauté et de décider d’apprendre de façon
collaborative est apparu comme un engagement individuel, plutôt que
comme un menu institutionnel. Dans l’ensemble des exemples relevés,
la culture, le langage commun, les relations collaboratives peuvent être
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encouragées par les institutions, mais semblent ne pouvoir se décréter : la
part de l’informel grandit. Toutefois, de nouvelles sociabilités formatives
semblent émerger.

7.2. Les nouvelles sociabilités formatives en émergence


7.2.1. Quelle lecture d’ensemble des évolutions ?

Les tableaux historiques proposés donnent à voir les sociabilités forma-


tives qui évoluent dans le temps. Les apprentissages sociaux (Cristol, 2014a),
les apprentissages informels (Cristol et al., 2013), les apprentissages ouverts
dans le champ socio-numérique, par exemple avec les initiatives d’appre-
nants de se regrouper en complément des MOOC (Purser et al., 2013),
l’affili­ation opportuniste à des réseaux ou les recherches en ligne libres rele-
vées, se combinent en situation professionnelle, dans la vie ou en formation.
Du relevé de pratiques réalisées, il est possible de poursuivre la description
d’une évolution du rapport au savoir.
44
Savoirs 43 – 2017

Deux mouvements pourraient caractériser les tendances à l’œuvre :


–– La sociodidaxie est un mouvement qui marque l’évolution du rapport
au savoir de l’individu dont les pratiques autoformatives s’appuieraient
davantage sur les relations aux autres, organisées ou opportunistes.
–– La pairagogie est un mouvement qui encourage le soutien des groupes
aux individus apprenants, notamment grâce aux possibilités technolo-
giques.

7.2.2. La sociodidaxie

Sociodidaxie est un néologisme inventé par Hermelin (2001) ; l’expres-


sion renvoie à de nouvelles formes de sociabilités autodidactiques par les-
quelles l’apprentissage est co-construit avec les autres pour un enjeu com-
mun. Le sociodidacte rechercherait activement des interactions sociales
et déploierait une variété de stratégies pour ce faire. Pour Pentecouteau
(Éducation permanente, 2015 n° 205), la question qui se pose est celle de
­l’accompagnement des « sociabilités formatives ». Celles-ci se transforment
avec la démultiplication des possibilités de se lier permise par Internet. Les
sociabilités formatives se feraient de plus en plus numériques (Cardon et al.,
2014) et sont en cours de réinvention, de façon opportuniste ou à l’occasion
de recherches médiées dans les espaces documentaires (Nagels et al., 2016),
c’est-à-dire dans le contexte des espaces d’apprentissage en ligne promus par
les MOOC (Cisel, 2016). L’individu n’attend plus que son départ en stage
soit accepté par son entreprise, il va chercher en ligne des vidéos ou tutoriels
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pour répondre immédiatement à ses problèmes, ou bien il s’inscrit librement
dans un MOOC ou dans un réseau au sein duquel d’autres individus lui
apporteront des réponses à ses questions.

7.2.3. La pairagogie (de l’anglais peeragogy)

Les pratiques qui se dessinent actuellement s’inscrivent dans un « monde


du co » qui se déploie petit à petit (Novel, 2013) : la mise en commun, le
partage (ex. : covoiturage), le collectif, la coopération, le collaboratif, voire
la coopétition, sont l’expression d’une adaptation au monde économique
actuel. Les logiciels rapprochent les couples, l’offre et la demande de biens
et de services rares, les acteurs distants, les idées et les projets. Ils facilitent
le partage des idées (creative-commons) et accélèrent encore les perspectives
collaboratives. Le monde du « co » progresse aussi en matière de forma-
tion professionnelle avec : la co-conception de formation (ou co-design), les
communautés d’apprentissage, le co-développement professionnel et les
45
Note de synthèse – Les communautés d’apprentissage : apprendre ensemble

collecticiels (logiciels collaboratifs). L’un des points communs qui peuvent


être relevés dans ces quatre exemples que nous venons d’évoquer concerne
la mise en commun.
Le concept de « pairagogie » (Rheingold, 2015) se précise. Ce terme peut
être traduit comme un « savoir-faire éducatif appliqué à l’apprentissage par
les pairs ». Il remet au goût du jour la coformation. Cet apprentissage entre
pairs s’impose à un moment où la complexité est telle qu’un seul formateur
est bien en peine de restituer une masse d’informations en croissance expo-
nentielle. Ce faisant, ces pratiques d’apprentissage « peer to peer/pair à pair »
s’inventent, en les vivant (Corneli et al., 2014). Dans l’apprentissage entre
pairs, la légitimité de celui qui enseigne tient plus de la pertinence d’une
connaissance située dans une problématique que de la seule expression
d’une règle générale à partir du rôle statutaire d’enseignant ou de formateur.
La pairagogie dans le même temps valorise les savoir-faire et construit des
légitimités pratiques. Elle donnerait à chacun le sentiment d’appartenance
à un groupe d’individus égaux en dignité et en situation. Elle éloigne du
syndrome « j’enseigne donc tu apprends » propre aux relations tradition-
nelles de pouvoir liées à l’univers formel de la formation. Elle brouille les
frontières entre l’interne et l’externe des institutions éducatives, renforçant
encore la part de l’informel (Corneli et al., 2015).
Nombre d’acteurs sont touchés par ces approches où le pair est moins un
voisin de travail ou d’étude et plus un partenaire actif d’apprentissage et de
construction du vivre ensemble. Les universités s’engagent sur la question de
l’apprentissage entre pairs, les entreprises cherchent à devenir collaboratives
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pour capter les bénéfices de l’intelligence collective, les organismes de for-
mation intègrent ces pratiques en renouvelant leur offre par des approches
de co-conception de leurs services. Ces nouvelles façons d’apprendre ren-
forcent incidemment le rôle des communautés.

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