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Dossier Initiation à la recherche

Comment l’improvisation est présente


dans la musique de Paganini ?

Séminaire d'Introduction à la recherche sur l’interprétation musicale BA2


Professeur : Carolina Gauna

AGUDO LÓPEZ, Pablo,


Violon baroque, classe de Florence Malgoire

Année académique 2022-2023


SÉMINAIRE D!INITIATION À LA RECHERCHE SUR L!INTERPRÉTATION MUSICALE
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TP1 : L’Objet de recherche

Objectif: Le but de cet exercice est d’identifier un champ d’interêt en vue de construire un Objet de recherche.
Aussi de cartographier les ressources à exploiter en vue de constituer un “corpus“ documentaire pour
nourrir votre réflexion, affiner les questions, trouver un angle d’attaque pour aborder votre thématique.

l’Objet de recherche

Établir un « réseau d’idées » et un « réseau de sources », puis réaliser un schéma qui mette en
évidence les résultats de votre réflexion avec la consigne suivante:

1. Établir un « réseau d’idées » : Vous “questionnez“ le thème de votre intérêt, vous l’interrogez
afin d’identifier tous les aspects sous lesquels vous pourriez l’étudier, ses liens avec d’autres
thématiques proches ou lointaines, des environnements d’idées qui pourraient nourrir sa
connaissance.

2. Établir un “réseau de sources d’information“ : Vous identifiez des chercheurs qui partagent un
intérêt pour votre thématique. Qui sont-ils? Comment enquêtent-ils ? Repérez les auteurs, les
citations, la bibliographie que les experts en la matière offrent pour appuyer leur discours.

Auto-évaluation
a. Je crois avoir atteint cet objectif

non, pas vraiment partiellement oui, suffisamment oui, largement

b. Qu’aurais-je pu faire autrement pour apprendre la même chose ?

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…………………………………………………………………………………………………………………
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c. En dehors du cours, les ressources dans Moodle pour revenir sur cette compétence ont été
suffisantes, utiles, adéquates ?

Non Oui Je ne les ai pas consultés


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TP 2 : La collecte documentaire

Objectif : Le but de cet exercice est de repérer des ressources bibliographiques variées et adéquates, et de
réfléchir au type de contextes permettant de dessiner les contours de vos idées de recherche

Constituer une revue documentaire

Veuillez constituer un ensemble de sources documentaires (min. 6) vous permettant de trouver des
éléments de réponse à vos questions. Complétez les informations relatives à celles-ci à l’aide de
l’acrostiche
DANCE

( Date - Auteur - Nature du document - Contexte - Enjeux du document )

Présentez vos résultats à l’écrit sous forme de liste de références + informations DANCE

Auto-évaluation
a. Je crois avoir atteint cet objectif

non, pas vraiment partiellement oui, suffisamment oui, largement

b. Qu’aurais-je pu faire autrement pour apprendre la même chose ?

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c. En dehors du cours, les ressources dans Moodle pour revenir sur cette compétence ont été
suffisantes, utiles, adéquates ?

Non Oui Je ne les ai pas consultés

TP 3 : Présentation de deux sources-clé

Objectif : Le but de cet exercice est d’aborder les sources écrites avec des stratégies de lecture critique

Présentation de deux sources-clé

Veuillez donner un rendu de deux documents (article, livre, chapitre de livre), que vous avez
repéré comme source-clé dans vos premières recherches documentaires. Une source-clé est un
document incontournable pour trouver réponse à nos questions sur un sujet.

Complétez le modèle de fiche de recensement de lecture que vous trouverez dans l’espace Moodle,
au besoin, modifiez-le.

Auto-évaluation
a. Je crois avoir atteint cet objectif

non, pas vraiment partiellement oui, suffisamment oui, largement

b. Qu’aurais-je pu faire autrement pour apprendre la même chose ?

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LISTE DE 10 SOURCES

1. Clive Brown: Classical and Romantic Performing Practice (1750-1900) Oxford, 1999

2. Louis Spohr: Violinschule Vienna, ca. 1832 (Haslinger)

3. Bartolomeo Campagnoli: Metodo per violino Milano, 1797

4. Charles-Auguste de Bériot: Méthode de violon (Op. 102) Paris et Mainz, 1858

5. Pierre Baillot: L’art du violon, nouvelle méthode Paris, 1793

6. Niccolò Paganini: 24 capricci Milano, 1805-1809 (publié en 1817)

7. Pierre Rode: 24 caprices en forme d’études pour le violon seul Leipzig, 1819

8. Enregistrement de Joseph Joachim 1903

9. Enregistrement de Pablo de Sarasate Paris, 1904

10. Enregistrement d’Eugène Ysaÿe 1913-1914

LES DEUX SOURCES CLÉ:

• - Le livre de Clive Brown (Classical and Romantic Performing Practice), parce que c’est
une recueille et un analyse profonde des différents sources historiques de l’époque classique
et romantique, qui décrivent tous les différents aspects de l’interprétation, la pratique et
l’improvisation des ces périodes, pas seulement dans le violon mais aussi dans le chant et
l’orchestre.

• - L‘autographe de les 24 caprices de Paganini, où on peut regarder la notation, les


articulations, dynamiques et tempi original. En plus de que, si on compare avec les éditions
modernes, avec lesquelles la plupart des violonistes jouent ces caprices, il y a beaucoup
d’indications ajoutées par les éditeurs, qui sont pas dans le manuscrit.


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TP 4 : Constituer une Table de matières commentée

Objectif : Le but de cet exercice est d’organiser vos matériaux, de hiérarchiser les informations, de définir les
contours de ce qui vous allez étudier. La structure de votre Table de matières devient un plan de travail.

Table de matières commentée

Construire une Table de matières en deux colonnes.

Dans la 1ère colonne, montrez la cohérence de votre projet, son organisation en parties, chapitres,
sous-chapitres, etc. Elle doit permettre au lecteur de comprendre les grandes lignes de votre projet,
les idées maitresses qui seront traitées dans chaque niveau de la table de matières.

Dans la 2ère colonne, une fois la structure décidée, ajoutez les mot-clés, les auteurs, les citations,
pages, exemples, etc. qui vont «remplir» chaque niveau. Ceci doit permettre de comprendre quels
matériaux vont remplir le contenu de la Table de matières

Auto-évaluation
a. Je crois avoir atteint cet objectif

non, pas vraiment partiellement oui, suffisamment oui, largement


Table de matières

Retrospective
Introduction Recherche
Exposé du problème Histoire
La musique romantique en rétrospective Interpretation
La pratique historiquement informée de la Développement d’idées
musique romantique Lecture des documents historiques
Improvisation sur le violon romantique Lettres
Le rôle de Paganini au XIXe siècle Traités
L'origine de ses caprices Partitions
Analyse de ses caprices Franz Liszt
L'influence de la période baroque sur son Robert Schumann
œuvre Charles Guhr
Relations et parallèles entre la manière de Pierre Baillot
travailler la composition et l'improvisation Louis Spohr
de l'époque baroque à l'époque romantique Heinrich Wilhelm Ernst
Définir l'importance que peut avoir Pietro Antonio Locatelli
l'improvisation dans la pratique du violon Articles modernes sur des sujets similaires
moderne. Clive Brown
Propositions Dana Gooley
Conclusion Anna McMichael
Toni Christine Rydman
Écoute des enregistrements historiques ou
modernes historiquement informées
Joseph Joachim
Eugène Ysaÿe
Vasa Prihoda
Fritz Kreisler
Shunske Sato
Laura Andriani
Sergey Malov
Joseph Joachim
Analyse
Reflexion
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b. Qu’aurais-je pu faire autrement pour apprendre la même chose ?

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c. En dehors du cours, les ressources dans Moodle pour revenir sur cette compétence ont été
suffisantes, utiles, adéquates ?

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TP 5 Pré-projet de recherche

Objectif : Le but de cet exercice est de formuler de manière claire et concise la thématique de votre travail, son
ancrage sur la pratique, un plan pour l’aborder avec l’appui des sources adéquates.

Pré-projet de recherche

Rédigez une introduction d’une page max., dans laquelle vous présenterez l’objet de votre
réflexion, situé à la fois dans l’espace et dans le temps, ainsi que les idées directrices que vous
convoquez pour l’appréhender. Vous veillerez à faire émerger une question de recherche ancrée sur la
pratique, et vous proposerez un plan détaillé de comment vous allez l’aborder.

Ce pré-projet sera accompagné des 3 mots-clés qui mettent en évidence le domaine de


connaissances traitées dans le travail.

Auto-évaluation

a. Je crois avoir atteint cet objectif

non, pas vraiment partiellement oui, suffisamment oui, largement


Dans notre temps modernes, notre façon de voire et d’enseigner la musique c’est considérablement
différent a comme les gens du les époques plus anciennes le faisant. Et sans besoin d’aller très loin,
au XIXe siècle il avait beaucoup des aspects musicales que aujourd’hui on a perdu.
Je veux pas du tout dire que les écoles de avant sont mieux que celles d’aujourd’hui, parce que c’est
pas vrai, c’est seulement different, et c’est pas l’objectif de la discussion ou problématique que je
veux proposer dans ce projet.

Depuis le XVIIe jusqu’au XIXe siècle, l’improvisation c’était une partie très important dans la
formation d’un musicien, et ça abarqué tout les instruments : violons, claviers, flûtes, lutes, guitares,
basses, chanteurs… Et à partir du début du XXI siècle, progressivement cette partie de la formation
musicale a perdu de son importance. Surtout dans ce qui concerne les instruments mélodiques ou la
voix, parce que, encore aujourd’hui, les organistes –et dans quelques cas aussi pianistes– travaillent
l’improvisation dans son éducation, et ils la font même dans des concerts.

Malheureusement, nous les violonistes, le seul fait de composer une pièce ça nous produit un gran
défi, et l’idée plus avancé d’improviser ne nous traverse même pas l’esprit. Et c’est dommage, parce
que, nous, qu’on admirent beaucoup la musique de grands violonistes comme Paganini, Rode,
Baillot Ernst, Sarasate, Vieuxtemps, on ignore une partie fondamental qui existé dans son travail, et
ça c’était, justement, l’improvisation. En faite, cela c’est une caractéristique représentative de leur
renommée en tant que violonistes. Rode changé sa façon de jouer une même pièces dans différents
osassions a travers de l’improvisation d’ornements, cadences, ou même les articulations, les
phrasées et les dynamiques. Baillot parle de l’art d’improviser des préludes dans son traité L’art du
Violon’. Spohr et Bériot parlent de l’ornementation dans ses respectives traitées.

En fin, il suffit de lire un peu pour se rendre compte que notre perception moderne de la musique
romantique est à bien des égards très éloignée de ce qu'elle était réellement.
En tant que violoniste qui étudie à la fois le répertoire ancien et moderne, et en tant qu'admirateur
de l'œuvre de Paganini, je pense qu'il est important de repenser la façon dont nous considérons la
musique que nous a léguée ce célèbre musicien romantique. Pour moi ses caprices sont un miroir de
comment il improvisée dans ses temps. Mon objectif avec ce travail c’est celui de trouver comment
la tradition ancien et contemporain de l’improvisation est présent dans sa musique.
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b. Qu’aurais-je pu faire autrement pour apprendre la même chose ?

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c. En dehors du cours, les ressources dans Moodle pour revenir sur cette compétence ont été
suffisantes, utiles, adéquates ?

Non Oui Je ne les ai pas consultés

TP 6 : Travail d’intégration des compétences acquises. Ecriture d’un Chapitre

Objectif : Le but de cet exercice est d’intégrer les compétences acquises dans le parcours des Travaux
pratiques dans l’écriture d’un chapitre, et d’être capable de communiquer les résultats dans les règles de l’art
de la recherche académique.

Ecriture d’un chapitre

Rédigez un chapitre de votre choix (800/900 mots), qui mette en évidence la cohérence de votre
parcours de recherche, et votre maîtrise des outils mises en œuvre dans les précédents travaux
pratiques.

Quant au contenu du chapitre, vous veillez à proposer une analyse de qualité, à l’appui des sources
consultées, pour éclairer un aspect de votre Question de recherche.

Quant à la mise en forme du chapitre, vous présentez les résultats dans les règles de l’art de la
recherche académique et vous référez aux guides HEM (mise en page, référencement de
bibliographie, citations, etc.)

A la suite du chapitre, vous présentez la bibliographie utilisée pour sa rédaction, référencée selon
les normes HEM (NB : la bibliographie ne compte pas dans les 800 mots)
Introduction

Depuis le début du XXe siècle, la pratique de l'improvisation dans les écoles de violon a
progressivement perdu de son importance, jusqu'à ce qu'aujourd'hui, en dehors du monde du violon
baroque, folklorique ou du jazz, son utilisation soit presque inexistante.

Aujourd'hui, l'enseignement du violon est principalement axé sur le développement de la perfection


technique de l'instrument par la pratique stricte et constante de méthodes, concertos, études,
caprices et sonates composés pour la plupart à l'époque romantique, mais travaillés à partir
d'éditions du XXe siècle.
L'improvisation n'est pas une chose sur laquelle on se pose des questions. L'objectif est de former
des violonistes virtuoses qui suivent à la lettre non seulement les notes écrites dans la partition, mais
aussi toutes les indications (articulations, dynamiques, tempi, doigtés) qui s'y trouvent. Il convient
de noter que la plupart de ces indications ont été ajoutées par l'éditeur et non par le compositeur.

Dans le domaine de l'interprétation historiquement informée, il existe un travail exhaustif et


approfondi sur la musique qui se fait par la recherche de sources originales situées dans l'espace-
temps des œuvres à interpréter. Nous entendons par là la recherche approfondie des sources, qu'il
s'agisse de traités, de méthodes, de témoignages, de lettres ou de la pratique des manuscrits ou des
éditions historiques des partitions.
C'est un travail qui s'est fortement développé en Europe au cours des cinquante dernières années.
Cependant, il s'est principalement concentré sur la musique médiévale, renaissance, baroque et
classique, laissant la musique romantique quelque peu à l'écart de ce mouvement. Cela a conduit de
nombreuses personnes à penser que les interprétations romantiques et modernes de la musique sont
pratiquement équivalentes, dans la manière de jouer, de chanter, de théoriser ; et bien sûr, l'idée
d'improviser –qu’il s'agisse de préludes, de fantaisies, de cadences, ou simplement d'ajouter des
ornements à un morceau déjà écrit– ne nous traverse même pas l'esprit. Mais le fait de suivre une
partition à la lettre, sans s'écarter des notes ou du rythme, en suivant un tempo strict, est un concept
qui n'était pas utilisé pendant le romantisme, même si les partitions avaient déjà une notation plus
développée et que le métronome avait déjà été inventé.
En ce qui concerne Niccolò Paganini, son œuvre est une partie fondamentale du répertoire de la
plupart des violonistes d'aujourd'hui, notamment ses caprices, qui sont une forme musicale écrite de
manière très libre et extravagante. Presque tous les violonistes modernes sont capables de jouer les
caprices de Paganini de manière très propre et correcte, mais si nous leur demandons d'ajouter des
ornements ou encore d’improviser eux même un caprice, la plupart d'entre eux ne seront pas
capables de le faire de manière organique et avec succès. Ainsi, pour un violoniste, composer est un
grand défi.
C'est dommage, car Paganini, probablement le violoniste le plus important du monde, doit sa
célébrité en partie à son incroyable capacité d'improvisation. Comme le commente Maiko
Kawabata dans son article intitulé What does Paganini mean to us today?, « la relation de Paganini
avec l'improvisation était similaire à celle des musiciens de jazz lorsqu'ils jouent des standards ou
improvisent des solos sur des accords écrits. Il écrivait ensuite ce qu'il avait joué, mais cette
pratique est plus proche de ce que nous connaissons aujourd'hui comme des transcriptions que de ce
que nous connaissons comme des compositions »1.

Et chez d'autres personnages importants, Pierre Baillot, Louis Spohr, Pierre Rode ou Heinrich
Wilhelm Ernst –qui ont contribué autant que Paganini au développement technique du violon
moderne–, l'improvisation était une caractéristique représentative de leur renommée en tant que
violonistes.
Rode, par exemple, lors de ses tournées et de ses concerts, avec le même morceau, ne le jouait pas
de la même manière que lors de ses premières prestations ; Rode variait considérablement son jeu
au fil du temps.2
Spohr consacre un chapitre à l'ornementation dans son Violinschule.
Les témoignages de l'époque parlent du génie d'Ernst et de la façon dont il improvisait au violon.
Baillot consacre un chapitre de son traité L'art du Violon à l'improvisation de préludes, écrivant 24
exercices de préludes mélodiques (dans toutes les tonalités) et 100 de préludes harmoniques.

1KAWABATA Maiko, « What does Paganini means to us today? », Paganini Rockstar Exhibition Catalogue, 2018,
pag. 1

2BROWN Clive, « Embellishment, Ornamentation, Improvisation », dans Classical & Romantic Performance Practice
1750-1900, Oxford, Oxford University Press, 2004, pag. 439
L'art de préluder ou d'improviser une introduction était considéré comme un signe de bonnes
pratiques du musicien, il permettait au virtuose de laisser libre cours à son inspiration et rappelait
également au public que l'interprète était aussi un artiste créatif.3

Il suffit de lire un peu pour se rendre compte que notre perception moderne de la musique
romantique est à bien des égards très éloignée de ce qu'elle était réellement.
En tant que violoniste qui étudie à la fois le répertoire ancien et moderne, et en tant qu'admirateur
de l'œuvre de Paganini, je pense qu'il est important de repenser la façon dont nous considérons la
musique que nous a léguée ce célèbre musicien romantique. J'ai commencé à travailler sur ce sujet
en examinant principalement ses 24 caprices, et en les étudiant, la question s'est posée de savoir
comment l'improvisation est présente dans la musique de Paganini ?
Pour analyser et interpréter correctement la musique et le style d'improvisation de son époque, nous
pouvons appliquer les mêmes méthodes que celles que nous avons utilisées pour développer une
interprétation historiquement informée de la musique médiévale, renaissance et baroque.

Développement

Pour comprendre le processus de composition et d'improvisation de Paganini, nous devons


examiner quels étaient les principes de développement de ceux-ci à son époque.
Nous savons que l'un d'entre eux, et probablement le plus important, était le partimento.
Le partimento est une technique de composition et d'improvisation qui a été utilisée du XVIIe au
XIXe siècle. Elle consistait en la notation d'une basse non codée, avec laquelle le musicien devait
ensuite être capable d'harmoniser et de composer ou d’improviser une ou plusieurs voix par-dessus.
Contrairement à la basse continue, où le principe fondamental est la réalisation harmonique sur la
basse donnée, en voyant aussi ce que les autres parties doivent s'aider, dans le partimento il n'y a
pratiquement aucune limite de possibilités, puisqu'il n'y a pas d'autres parties écrites, le musicien
doit inventer entièrement tout ce qui peut être au-dessus de cette basse.

3HAMILTON Kenneth, After the Golden Age: Romantic Pianism and Modern Performance, Oxford, Oxford
University Press, 2008, pag. 102
Par exemple, Johann Sebastian Bach a écrit trois sonates différentes avec la même basse, on peut
penser qu'il s'agissait d'un exercice de partimento virtuose.4
Cette pratique a servi de formation même au Conservatoire de Paris.
Carl Czerny, le professeur de Franz Liszt, faisait pratiquer à ses élèves l'improvisation avec des
exercices qui, en substance, étaient construits sur le principe du partimento. Liszt disait: « Il m’as
fait jouer toutes les pièces important de l’époque et il m’encouragé à improviser ».5 Avec le recul,
nous pouvons constater que le partimento était la base de tout compositeur ou improvisateur. Même
si l'on ne disposait pas d'une basse notée, la pensée du développement musical était entièrement en
faveur de la conduction harmonique.

Quant aux caprices, je pense qu'il y a toute une proposition rhétorique pour laquelle il les a écrits.
Tout d'abord, l'origine du terme caprice en musique. Au début, ce terme était utilisé pour des pièces
à caractère contrapuntique, et au fil du temps, surtout au cours du XVIIIe siècle, son sens s'est
transformé pour désigner des cadences ou de courtes pièces virtuoses, braves, à caractère virtuose,
fantastique, extravagant et improvisé. Cependant, l’aspect contrapuntique n'a pas été perdu du tout,
car les nouveaux caprices étaient de caractère polyphonique et présentaient une utilisation constante
et correcte de la direction des voix, démontrant une bonne maîtrise de l'art du contrepoint du
compositeur.
De plus, il n’est pas anodin que Pietro Locatelli, dans L'arte del violino publié 733, a écrit 24
caprices ad libitum comme cadences pour les premier et troisième mouvements de ses 12 concerti.
Nous savons que Paganini fréquentait la bibliothèque du palais du marquis Di Negro, où l'on
trouvait des copies d'œuvres de Corelli, Vivaldi, Tartini et Locatelli.6 Nous savons que la virtuosité,
l'improvisation et le bon maniement du contrepoint étaient une caractéristique fondamentale de la
musique de ces quatre compositeurs baroques, et les musiciens du classicisme et du romantisme en
étaient conscients.
Ce n'est pas pour rien que Paganini a écrit des séquences harmoniques et mélodiques semblables à
celles de ses prédécesseurs.

4BACH Johann Sebastian, Sonata per il violino e cembalo BWV 1021 [partition], Leipzig, Manuscrit, 1732-33
Sonata for violin and harpsichord BWV 1022 (1734) [partition], Tel-Aviv, G & H Edition, 2013
Trio Sonata per traverso, violino e continuo BWV 1038 [partition], Leipzig, Manuscrit, 1735

5 DOMOKOS Zsuzsanna, « Franz Liszt and free improvisation », Liszt Academy, 2019

6 ANDRIANI Laura, Livret du disque PAGANINI 24 CAPRICCI [CD], Passacaille Records, 2022
On peut même dire que sa musique est le résultat d'une étude, d'une combinaison et d'un
développement maximal de l'œuvre laissée par les quatre plus importants violonistes italiens de
l'époque baroque.

Si nous analysons ses caprices, nous pouvons voir comment toutes les caractéristiques mentionnées
ci-dessus y sont imprégnées. Contrepoint, partimento, virtuosité, bravoure, liberté. Le premier
caprice, par exemple, aurait pu être parfaitement écrit à partir d'une basse. Il est entièrement fondé
sur une séquence d'accords, ce qui n'est pas sans rappeler le septième caprice de L'arte del violino
de Locatelli, ainsi que les fantaisies de Wolfgang Amadeus Mozart ou de Carl Philipp Emmanuel
Bach dans la façon dont il exploite une large gamme de tous les registres de son instrument, outre la
façon dont il effectue ses modulations. L’onzième semble être une sonate pour violon et continuo,
avec une longue basse régulière, accompagnée d'une ligne de soprano qui évoque le bel canto. La
seconde semble inspirée par les sonates et partitas pour violon seul de Johann Sebastian Bach.
Le vingtième fait penser à une musette ou une pastorale, à des danses irlandaises ou gitanes. Le
vingt-quatrième, le plus connu, consiste en un thème simple suivi de onze variations, toutes plus
virtuoses les unes que les autres. Ce dernier est l'exemple le plus simple qui montre qu'il est très
probablement né d'une improvisation que Paganini a exécutée puis transcrite. En effet,
l'improvisation de variations sur un thème simple ou connu de tous était l'une des formes
d'improvisation les plus courantes à l'époque. Nous savons que le thème du Carnaval de Venise a
été largement utilisé pour improviser des variations, l’exemple le plus connue sont les variations qui
Ernst a réalisé, comme on peut voire dans un correspondance de Prague publié dans l’Allgemeine
Musikalische Zeitung:

« Dans tous les concerts, Ernst a joué et répété le kaléidoscopique Carnaval de Venise, qui, même
entendu cent fois, ne perd jamais le charme de la nouveauté, et est toujours fourni par le virtuose
inventif avec des variantes nouvellement improvisées. Ernst en a fait une œuvre musicale
fantastique, digne d'un conte de fées. Il est étonnant de constater la richesse infinie des
métamorphoses dont est capable cette petite mélodie simple ».7

7 ANONYME, Correspondance de Prague dans Allgemeine Musikalische Zeitung, Leipzig, 1845, no. 47, col. 453,
Enfin, pour moi, les caprices de Paganini sont le meilleur exemple de la raison pour laquelle l'Italie
avait la réputation d'être « le pays des improvisateurs et de l’improvisation »8. Ils ont été écrits de
telle manière que l'on peut voir qu'ils sont un miroir de la façon dont Paganini improvisait. On dit
qu'il ne les a jamais joués en public, en raison de l'absence d'enregistrements de concerts dans
lesquels les caprices étaient inclus, mais il est très probable que Paganini improvisait des caprices
sur place pour les utiliser comme prélude, interlude ou cadence. Il ne les a pas écrits avec la
perception moderne que nous avons aujourd'hui des compositions destinées à être jouées pendant
des années durant une carrière musicale.

Ces caractéristiques des caprices de Paganini sont ce qui les distingue de ceux de Rode, Fiorillo ou
Kreutzer, qui les intitulent caprices ou études. Alors que ceux de ces derniers ont été écrits dans un
but pédagogique pour l'apprentissage du violon, ceux de Paganini sont utilisés comme une
exploration et une exploitation maximale des possibilités de l'instrument pour représenter ce que le
terme caprice signifiait dans le passé et signifie dans le présent. Ce n'est pas pour rien qu'ils sont
dédiés « alli Artisti ».

Conclusion

L'influence de Paganini sur la carrière artistique de ses contemporains est indiscutable. Liszt était
son admirateur, son œuvre pour piano la plus célèbre est un arrangement de La Campanella que
Paganini a écrit. Il était une idole pour Ernst et sa technique d'improvisation a grandement influencé
son développement en tant que violoniste. Schumann a écrit : « Il (Ernst) se rapproche également de
Paganini dans sa puissance d'improvisation - le plus séduisant des virtuoses - et cette qualité peut
avoir été influencée par sa connaissance précoce et fréquente de Paganini »9. Schumann lui-même
passait des heures à improviser sur les caprices de Paganini, et ce n'est pas pour rien qu'une fois, en
1831, il a imaginé écrire une pièce de théâtre dans laquelle un personnage appelé « Florestan,
l’improvisateur » était étroitement lié à Paganini.10

8LISZT Franz, An Artist’s Journey: Lettres d’un bachelier es musique, 1835-1841, Chicago, University of Chicago
Press, 1989, pag. 91

9 SCHUMANN Robert, Neue Zeitschrit für Musik, Leipzig, 1840, no. 7, pag. 30

10 SCHUMANN Robert, Tagebücher 1827-1838, Leipzig, Deutscher Verlag für Musik, 1971, pag. 342
Paganini a non seulement apporté une contribution immense au développement du violon, mais
aussi à tout ce que représente la période du romantisme.
Cela me ramène à mon commentaire précédent sur la formation actuelle du violon et sur le fait qu'il
est dommage que les aspects les plus significatifs de l'identité de Paganini aient été ignorés dans
notre pratique en tant que violonistes modernes ou formés historiquement.
La connaissance théorique de l'harmonie est très faible chez les violonistes d'aujourd'hui, et si
composer un morceau est déjà un grand défi pour la plupart, improviser un morceau avec aisance et
créativité est quelque chose qui exige beaucoup plus de nos capacités fondamentales.
Je pense que nous devons commencer à travailler sur notre développement en tant que musiciens
complets, plus que de simples joueurs de violon.
Nous devons être capables de comprendre la musique que nous jouons comme le font les pianistes
et les organistes d'aujourd'hui. Leur instrument et leur école sont plus exigeants pour eux que pour
nous, mais il n'y a aucune excuse pour rester à la traîne et se limiter à jouer de bonnes notes avec
une bonne technique.

Pierre Baillot encourageait déjà à son époque un mouvement d'interprétation historiquement


informée. Il donne des concerts dont le programme comprend des œuvres de Corelli, Geminiani,
Tartini et Haendel. Il explique comment être un bon interprète de manière à satisfaire le public : «
l’imagination invente l'ornementation ; le bon goût lui donne la variété, l'individualité et la place qui
lui revient ». Et si on lit l'ensemble de L'art du Violon (où, d'ailleurs, il mentionne Paganini), il ne se
limite pas à une manière correcte de jouer de l'instrument. Pas plus que Spohr ou Bériot - ce dernier
a également consacré une partie de sa Méthode de violon à l'improvisation -. Charles Guhr
commente dans son ouvrage Über Paganinis Kunst die Violine zu spielen11 que le génie de Paganini
est également dû à sa capacité à générer un grand nombre de contrastes dans son jeu, pouvant
passer de phrases rapides pleines d'une extrême virtuosité à l'imitation du son de la voix humaine de
la plus belle manière qui fait pleurer le public.

La pratique de l'improvisation peut également contribuer grandement au développement de la


technique. Tout comme nous pratiquons les diminutions d'Ortiz, de Rognoni, de Corelli, de Tartini,
ou les cadences de Vivaldi et de Pisendel, nous pouvons pratiquer les caprices de Paganini de

11 GUHR Charles, Über Paganinis Kunst die Violine zu spielen, Mainz, Schott, 1830
manière à nous les approprier et à pouvoir ensuite composer ou improviser notre propre caprice
dans son style ou dans une combinaison de styles de compositeurs que nous admirons.

La créativité doit commencer à être un aspect important de notre formation en tant que musiciens et
violonistes, et être capable de transcender le fait de devoir s'appuyer sur un répertoire organisé par
une école ou un professeur. Je termine ce travail par une phrase de Baillot qui correspond à ce que
je pense que ça veut dire être un artiste :

« Si un artiste veut faire usage de sa fécondité, il doit préparer soigneusement le sol, ce qui fera
germer ses graines et empêchera tout ce qui pourrait les détourner ».12

12 BAILLOT Pierre, L’art du Violon, Paris, Depot Central de Musique, 1834


Bibliographie

ANDRIANI Laura, Livret du disque, PAGANINI 24 CAPRICCI [CD], Passacaille Records, 2022.
ANONYME, Correspondance de Prague dans Allgemeine Musikalische Zeitung, Leipzig, 1845.
BACH Johann Sebastian, Sonata per il violino e cembalo BWV 1021 [partition], Leipzig,
Manuscrit, 1732-33, Sonata for violin and harpsichord BWV 1022 (1734) [partition], Tel-Aviv,
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