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Méthodologie : la dissertation littéraire

Livres de référence disponibles à la bibliothèque :


- PONS (E.), Les clés de la dissertation et du commentaire littéraire, Ellipses Éditions, Paris, 2014.
- LEMEUNIER (A.), La dissertation en français, Hatier, Paris, 2008.

Qu’est-ce que la dissertation littéraire ?


La dissertation consiste à rédiger une réflexion personnelle, structurée et argumentée, sur
un problème d’ordre littéraire. À partir de l’analyse d’un sujet donné, vous devez proposer
une réflexion ordonnée de ses enjeux, fondée sur des références littéraires précises prises
dans vos connaissances littéraires, dans vos lectures personnelles et dans le corpus de textes.
Le sujet se présente sous la forme d’une question, d’une affirmation, d’une citation
d’auteur. Il faut donc réfléchir aux questionnements sous-tendus par le sujet, pour proposer
un avis nuancé et nourri de références, à travers une démarche rigoureuse et argumentée
envisageant divers angles d’attaque au problème.

1. Première étape : analyse du sujet et problématique (30 minutes)1


Votre dissertation a pour point de départ un sujet dont vous devez tirer une problématique. Même
si le sujet prend déjà la forme d’une question, vous devez formuler les interrogations explicites et
implicites sous-tendues par le sujet. Cette problématique est fondamentale car c’est elle qui vous
permet de construire votre étude du sujet de façon liée et cohérente, à travers un projet précis.
Chacune des parties de votre dissertation doit apporter un élément de réponse à cette problématique.

1.1. Lire et comprendre le sujet

Il existe différents types de sujets :

- Certains sujets présentent un jugement (sous la forme d’une citation) et invitent à


prendre position par rapport à ce jugement.
Exemples :
o « J’écris pour agir » (Voltaire)
o « La sincérité est la condition première de toute production de l’esprit, à mes
yeux du moins. N’être pas sincère, c’est gâter le plaisir de suivre au dehors la
fortune de sa pensée, ce qui est la seule joie véritable d’un écrivain digne de ce
nom » (Sully Prudhomme)
o « Ce que j’ai toujours trouvé de plus beau dans un théâtre, dans mon enfance
et encore maintenant, c’est le lustre » (Baudelaire)
o « Roman signifie exemplarisation. Le roman prouve. Il constitue un discours
parabolique, illustratif, donne à souscrire à un sens. Raconter suppose la volonté
d’enseigner, implique l’intention de dispenser une leçon, comme aussi celle de
la rendre évidente. » (Charles Grivel)
o « J’appelle mineur un art qui ne demande que réceptivité passive et docilité
amorphe à ceux auxquels il s’adresse, mineure une œuvre où presque tout est
donné, où presque rien n’est à construire. » (Michel Tournier)

1
Les différentes étapes sont développées dans le document suivant : COUTANT-DEFER (D.), Comment rédiger
une dissertation ?, Le Petit Littéraire, 2011, pp.6-16.
- Certains sujets proposent deux points de vue et demandent de préciser une position
personnelle.
Exemples :
o « Souscrivez-vous à l’opinion d’Éluard qui veut que le poète s’engage dans son
temps et mène les hommes au combat, ou à celle des poètes qui considèrent
que la poésie doit se consacrer à une tâche esthétique ? »
o « Pensez-vous que l’œuvre littéraire nous détourne de la réalité ou, au
contraire, nous aide à mieux comprendre les choses de la vie ? »

- Certains sujets invitent à examiner une seule notion (sujet-définition).


Exemples :
o « Qu’est-ce qu’un bon livre ? »
o « Qu’est-ce qu’un roman populaire » ?
o « Qu’est-ce qu’un beau vers ? »

- Certains sujets posent une question.


Exemples :
o « Qu’est-ce qui, depuis l’Antiquité, pousse les hommes à écrire des pièces de
théâtre et à y assister ? »
o « Les œuvres théâtrales appartiennent-elles à la littérature ? »
o « Peut-on parler de faute de goût en littérature ? »
o « À quoi reconnait-on qu’un langage est littéraire ? »
o « Pourquoi faut-il lire des œuvres classiques ? »
o « La réalité qui nous entoure est-elle notre seule source de création ? »
o « La Chartreuse de Parme, est-ce un bon titre ? »

Quel que soit le type de sujet, il faut :


- Identifier son thème (ce dont il parle)
- Sa/ses thèse(s)
- Repérer les mots-clés
o Recourir à l’étymologie
o Confronter les différents sens d’un mot
o Distinguer les mots voisins
- Reformuler le sujet en des termes personnels, identifier le ou les points de discussion
soulevés par le sujet en s’interrogeant sur ses difficultés ou paradoxes.

1.2. Établir la problématique


Une fois le type d’argumentation repéré, il est utile de formuler clairement la
problématique en des termes personnels.
La problématique ne doit pas être forcément sous forme de question, vous pouvez
expliquer le problème impliqué par le sujet.

1.3. Rechercher des idées


L’étape suivante consiste à noter tout ce qui vient à l’esprit concernant le thème, la
thèse et les mots clés, ce qui va nourrir la problématique qu’on commence petit à petit à
mettre en place. Il s’agit de définir le territoire du sujet et de lister tout ce qui semble pouvoir
être en liaison avec ce dernier.
2. Deuxième étape : élaborer le plan
Il est nécessaire d’intégrer l’ensemble des éléments relevés dans un plan, c’est-à-dire
dans un raisonnement suivi dont la cohérence doit être la principale qualité, avec le caractère
démonstratif.
Le plan doit permettre de répondre à la problématique : il s’agit que chacune des
parties qu’il construit forme une étape de cette réponse et que l’ensemble forme une pensée
évolutive qui aboutisse à une conclusion claire.

2.1. Choisir un type de plan2


Il faut d’abord choisir le type de plan qui correspond le mieux au sujet.
Voici une classification des sujets en fonction de leurs attentes et des plans qui leur
correspondent :
o Sujets qui invitent à la discussion : plan dialectique
o Sujets qui posent une question ouverte : plan thématique
o Sujets qui invitent à expliquer et illustrer une thèse : plan analytique
Le plan doit être cohérent, clair, progressif, équilibré et exhaustif.

a) Le plan dialectique : thèse/antithèse/synthèse


1. Vous appréciez le bien-fondé de la thèse exprimée par le sujet ;
2. Vous voyez en quoi cette thèse a des limites et n’est pas valable de façon universelle ;
3. Vous dépassez cette antinomie en proposant d’autres solutions et en prenant position
Exemples :
- « La réalité qui nous entoure est-elle notre seule source de création ? »
1. En effet, la réalité est notre source de création principale.
2. Mais la création peut aussi surgir de l’irréel.
3. Et l’on peut même envisager encore d’autres sources de création.
- « Le temps des œuvres n’est pas le temps défini de l’écriture, mais le temps indéfini de
la lecture et de la mémoire. Le sens des livres est devant eux, et non derrière, il est en
nous. » (Gérard Genette)
- « Nous avons tâché de joindre l’agréable à l’utile, n’ayant d’autre mérite et d’autre part
à cet ouvrage que le choix. Les personnes de tout état trouveront de quoi s’instruire en
s’amusant. » (Voltaire, dans la préface du Dictionnaire philosophique)
- « C’est en vain qu’au Parnasse un téméraire auteur
Pense de l’art des vers atteindre la hauteur :
S’il ne sent point du ciel l’influence secrète,
Si son astre en naissant ne l’a formé poète,
Dans son génie étroit il est toujours captif :
Pour lui Phébus est sourd, et Pégase est rétif. » (Boileau, dans l’Art poétique)

b) Le plan thématique : c’est cela / mais c’est aussi cela / et c’est encore cela
Il permet un approfondissement progressif, en allant du plus évident au plus subtil.
Exemples :
- « Pourquoi faut-il lire des œuvres classiques ? »
1. Parce que ce sont des œuvres plaisantes
2. Parce qu’elles sont riches d’enseignement
3. Parce qu’elles sont patrimoniales et permettent de mieux comprendre la littérature
contemporaine
- « Quels sont les intérêts de l’autobiographie ? »
- « Quelles sont les fonctions du comique ? »

2
Cf. PONS (E.), Les clés de la dissertation et du commentaire littéraire, Ellipses Éditions, Paris, 2014, p. 13.
c) Le plan analytique : quoi ?/ pourquoi ?/ quels effets ou quelles conséquences ?
Il permet d’analyser le sujet de façon méthodique. Il invite à expliquer et à illustrer un
jugement plutôt qu’à le discuter.
1. Vous présentez la situation suggérée par le sujet.
2. Vous en analysez les causes
3. Vous envisagez les éventuelles conséquences
Exemples :
- « Les œuvres théâtrales appartiennent-elles à la littérature ? »
- « Qui se confesse ment, et fuit le véritable vrai, lequel est nul, ou informe, et, en
général, indistinct. Mais la confidence toujours songe à la gloire, au scandale, à l’excuse,
à la propagande. » (Paul Valéry)

Cependant, chaque sujet peut suggérer un plan qui lui sera bien particulier. Il n’y a donc pas
de recette miracle, et le meilleur plan sera toujours celui qui sera le mieux adapté au sujet
traité.

2.2. Trouver des arguments et des exemples


La dissertation se repose sur une séquence argumentative qui développe un point de
vue représenté par des arguments étayés par des exemples.
La séquence argumentative est constituée de trois éléments3 :
1. Le point de vue : la subjectivité
2. L’argument : la vérité générale
3. L’exemple : la preuve indiscutable

2.3. Organiser et hiérarchiser ses idées


Une dissertation comporte idéalement trois parties (auxquelles il faut ajouter une
introduction et une conclusion), qui sont elles-mêmes subdivisées en deux ou trois
paragraphes.
- Classer les arguments pour chaque partie (chaque argument fera l’objet d’un
paragraphe) et les répartir de manière cohérente.
- Veiller à l’équilibre des parties– le même nombre d’arguments doit être utilisé (au
minimum deux).
- Accompagner chaque argument d’un exemple.

3
Cf. BISMUTH (H.), JACQUES (M.) et MONNOT (H.), La dissertation littéraire et ses enjeux : parcours
méthodologique, Dijon, Éditions universitaires de Dijon, 2011, pp.59-65.
3. Troisième étape : rédiger le texte

3.1. L’introduction4
Celle-ci doit comprendre les éléments suivants :
- la phrase d’amorce qui peut évoquer brièvement l’auteur de la citation (si le sujet est
axé sur une citation ou sur l’avis d’un auteur).
- le cadre général dans lequel la problématique va se situer : un genre littéraire, un
courant, un thème, etc. On peut utiliser pour ce faire certaines notions d’histoire
littéraire.
- le sujet. Lorsqu’il s’agit d’une citation courte, elle peut être reproduite dans son
intégralité. Si le sujet est long, on n’en conserve que l’armature logique. Si le sujet
consiste en une question, elle peut être reproduite également. Dans tous les cas, il est
nécessaire de conserver les mots-clés du sujet.
- la problématique. Elle peut prendre la forme d’une question et doit toujours être
synthétique, il ne s’agit pas d’exposer des arguments dès l’introduction.
- l’annonce du plan. Elle doit annoncer les grandes étapes du plan que le correcteur doit
pouvoir garder en mémoire tout au long de la lecture.

Exemple :
Plan thématique : « Quelles sont les fonctions du comique ? »5

3.2. Le développement
Selon le nombre de parties annoncé en introduction, le développement comprendra
deux ou trois parties. Chaque partie pourra être subdivisée à son tour en deux ou trois sous-
parties.
Il est important, à chaque début de partie, de résumer en une phrase l’idée directrice
développée.
La sous-partie correspond à un second niveau d’organisation. Elle est consacrée au
développement d’un argument permettant de justifier l’idée directrice développée dans la
partie. Chaque argument doit être illustré par un ou plusieurs exemples.
Les arguments ne doivent pas être simplement juxtaposés les uns aux autres. Ils
doivent faire l’objet de transitions.
On distingue :
- les transitions entre les parties : résumer la partie et annoncer la partie suivante.
- les transitions entre les sous-parties : mettre en évidence leur enchaînement logique
à l’aide de connecteurs.

3.3. La conclusion
Elle consiste en :
- la synthèse de l’argumentation exposée. Elle clôt le débat car une réponse claire à la
problématique est censée avoir été apportée.
- un élargissement du sujet qui le place dans un ensemble plus vaste.

4
CF. COUTANT-DEFER (D.), Comment rédiger une dissertation?, Primento Éditions, Namur, 2011, pp.13-15.
5
Cf. LEMEUNIER (A.), La dissertation en français, Hatier, Paris, 2008, pp.69-74.
Conseils

À faire :
- Articuler les différentes parties
- Donner les références précises des œuvres (titre souligné)
- Présenter correctement les exemples
- « Aérer » le texte en passant une ligne entre chaque partie, en allant à la ligne au début
de chaque paragraphe et en commençant chaque paragraphe par un alinéa.
- Équilibrer les parties et veiller à ce que l’introduction et la conclusion soient à peu près
de la même longueur.
- Veiller à la correction de la langue.
- Utiliser le « nous » de modestie

Organisation du temps :
- Analyse du sujet : 30 minutes
- Élaboration du plan détaillé : 40 minutes
- Rédaction de l’introduction et de la conclusion au brouillon : 40 minutes
- Rédaction du texte entier : 2 heures
- Relecture : 10 minutes
Sujet 1
« C’est en vain qu’au Parnasse un téméraire auteur
Pense de l’art des vers atteindre la hauteur :
S’il ne sent point du ciel l’influence secrète,
Si son astre en naissant ne l’a formé poète,
Dans son génie étroit il est toujours captif :
Pour lui Phébus est sourd, et Pégase est rétif. » (Boileau, dans l’Art poétique)

Sujet 2
D’après une anecdote, François de Malherbe avait coutume de dire à son ami Racan : « Voyez-
vous, mon cher Monsieur, si nos vers vivent après nous, toute la gloire que nous pouvons en
espérer, c’est qu’on dira que nous avons été deux excellents arrangeurs de syllabes ».

Analyse du sujet :
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Plan proposé
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Rédiger l’introduction et la conclusion

D’après une anecdote, François de Malherbe avait coutume de dire à son ami Racan : « Voyez-
vous, mon cher Monsieur, si nos vers vivent après nous, toute la gloire que nous pouvons en
espérer, c’est qu’on dira que nous avons été deux excellents arrangeurs de syllabes ».

Introduction rédigée6 :
Selon la légende, le poète grec Orphée est doué du pouvoir magique de charmer les
êtres qui l’entourent par le jeu de sa lyre. Depuis, le poète jouit d’un statut particulier, et l’on
interroge le sens de sa présence et de ses qualités. Le théoricien classique François de
Malherbe, par exemple, attribue la gloire des poètes au fait qu’ils soient de « bons arrangeurs
de syllabes », comme le raconte une célèbre anecdote. Le poète est-il effectivement un bon
arrangeur de syllabes ? Se définit-il par son usage technique du langage ? Détient-il d’autres
qualités, voire d’autres pouvoirs ? Comment le définir ? Nous verrons que si, effectivement,
le poète se caractérise par sa maîtrise du langage, il peut aussi être le porte-parole des
hommes en exprimant des sentiments, mais aussi être celui qui peut déchiffrer et dire
l’invisible.

Conclusion rédigée7 :
Si l’on cherche à définir le poète, on peut donc conclure avec Malherbe que,
effectivement, la maîtrise du langage est une condition première et incontournable du poète.
Mais cette technicité est loin de suffire. Le poète est en effet aussi celui qui devient interprète
des hommes et du monde, dans une immense entreprise de dévoilement du sens caché. C’est
une figure multiple que le poète, en quête de sens pour lui et pour l’être humain. Il est celui
qui peut dire, comme le romantique allemand Novalis : « La poésie est véritablement le réel
absolu ».

6
PONS (E.), Les clés de la dissertation et du commentaire littéraire, Ellipses Éditions, Paris, 2014, p. 166.
7
Id, p. 170.
Exemple de dissertation rédigée8

8
PONS (E.), Les clés de la dissertation et du commentaire littéraire, Ellipses Éditions, Paris, 2014, pp.63-69.
Sujet

Analyse du sujet :
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Plan proposé
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