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A) Définition :
Une dissertation est une réflexion argumentée sur une oeuvre littéraire. Elle obéit donc au même schéma
qu’un essai argumentatif ou un commentaire : on défend une thèse (ou une problématique) sur l’oeuvre à
l’aide d’arguments et d’exemples littéraires. La plupart du temps, vous n’avez heureusement pas à trouver
vous-même ces arguments et ces exemples, ils auront été étudiés en cours durant l’année de première.
Une prise de notes attentive est donc indispensable durant les cours.
Une dissertation contient une introduction, un développement en deux ou trois axes, et une conclusion.
Dans chacun des axes on trouve une série de paragraphes argumentatifs. Donc structurellement, si vous
connaissez la méthode d’écriture du commentaire, vous connaissez déjà celle de la dissertation.
La dissertation porte principalement sur une oeuvre au programme, mais on attend quelques remarques
sur les textes complémentaires, généralement à la fin de chaque axe.
Le sujet est généralement posé sous la forme d’une citation sur laquelle on vous demande de réfléchir.
Exemples de sujet (citation librement inventée par moi pour les besoins du cours) :
Sujet 1 : Le critique Hervé Héman écrit en 1986 que “le rire chez Rabelais n’est jamais gratuit”. Qu’en
pensez-vous ? Vous appuierez votre réflexion sur votre lecture de Gargantua, de Rabelais, ainsi que sur
les textes complémentaires étudiés durant la séquence.
1) On analyse le sujet, pour être sûr d’en comprendre les enjeux. On définit les mots, on réfléchit aux
notions, à l’implicite, à l’explicite, etc…, de façon à ne pas faire de hors-sujet. On essaie de comprendre
ce qu’attend la personne qui a créé le sujet.
Ex - Sujet 1 : On remplace tout d’abord le mot “rire” par l’idée de comique, et “Rabelais” par l’oeuvre de
Rabelais” (Dans l’oeuvre de Rabelais, le comique n’est jamais gratuit). Ensuite, on définit l’expression
“être gratuit” : un acte gratuit est un acte qui vaut pour lui-même, sans autre but ni arrière-pensée. Un
comique gratuit signifie donc un comique sans autre but que d’amuser le lecteur. Le sujet nous invite
donc à considérer que chez Rabelais, le comique a toujours un autre rôle que celui de simple amusement.
Il nous faudra donc réfléchir à la place du comique dans les stratégies et les buts de Gargantua.
2) Une fois le sujet compris et délimité, on se met à chercher des arguments, c’est à dire des idées qui ont
un lien avec le sujet, et qui peuvent y répondre directement ou indirectement. On cherche ::
- soit dans les idées déjà données en cours (Gargantua est un roman satirique : on se moque de
l’adversaire pour décrédibiliser ses thèses)
- soit en faisant un effort de réflexion personnelle (quels sont les buts de Gargantua ? En quoi le comique
aide-t-il ces buts ?...)
- soit en partant d’un exemple que l’on connaît et en cherchant quel argument il pourrait illustrer (ex :
“Gargantua, dans une scène farcesque, noie les sorbonnards dans son urine”, est l’exemple d’un
argument large : “Rabelais se dissimule derrière un comique souvent vulgaire pour exprimer des vérités
dangereuses : ici, le contexte scatologique de la scène est un paravent pour dissimuler la remise en cause
brutale des traditions catholiques, incarnées par les partisans de la Sorbonne ”.
3) A chaque argument on associe un exemple qui l’illustre et le prouve. Il peut s’agir :
- Du résumé d’un passage (Chez Rabelais, la remise en question des rites catholiques est souvent
implicite. Ainsi, au lieu d’exprimer frontalement son refus d’une vie rythmée par les prières à heure fixe,
il met en scène Gargantua qui vole les cloches de Notre-Dame, c'est-à-dire l’outil par lequel on annonce
l’heure des prières…)
- Un extrait d'œuvre (Pour remettre en question les modes d’apprentissage médiévaux, Rabelais en
propose une caricature à travers la satire du premier précepteur de Gargantua, Thubal Holoferne. Ce
personnage incarne une pédagogie du Moyen-Âge aussi lente qu’inefficace, puisque que Gargantua met
hyperboliquement “cinq ans et trois mois” à apprendre l’alphabet,...)
4) Une fois qu’on a trouvé un bon nombre d’arguments, qui vont ou non dans le sens de la citation, on
commence à réfléchir à l’organisation d’un plan, en deux ou trois axes. Les mêmes règles que pour le
commentaire s’appliquent :
- équilibrage des idées contenues dans chaque partie pour obtenir des axes de longueur à peu près
équivalente.
- classement des axes par ordre logique, puis par ordre d’intérêt.
- classement des sous-axes à l’intérieur de chaque axe
- classement des paragraphes argumentatifs à l’intérieur de chaque sous axe.
Il peut exister différents types de plan, qui dépendent grandement du sujet proposé :
- un plan antithétique (pour/contre), déconseillé parce que pauvre et schématique.
- un plan dialectique (pour/contre/puis une synthèse qui prend le meilleur de pour et du contre), classique
mais artificiel ,la dernière partie étant une sorte de conclusion à rallonge, redondante avec la conclusion
définitive.
- un plan thématique (thème 1/thème 2/thème 3), où tous les thèmes sont en rapport avec la problématique
et permettent à la réflexion d’évoluer. L’avantage de ce type de plan est d’être très flexible:
Thème 1 : pour la citation
Thème 2 : contre...
Thème 3 : contre...
ou
T1 : contre...
T2 : pour...
T3 : pour...
ou
T1 : contre...
T2 : contre...
T3 : contre...
(ou inversement entièrement pour)
ou
T1 : 50%pour.../50%contre...
T2 : 25%pour.../75%contre...
T3 : contre...
etc, etc…
En réalité, toutes les combinaisons sont possibles, ce qui permet des réflexions extrêmement nuancées et
extrêmement progressives, qui peuvent s’adapter à tous types de problématiques et de sujets.
- un plan adapté, donc inclassable, qui n’obéit à aucune des logiques ci-dessus, mais qui répond
parfaitement à votre sujet.
Attention :
- à ne pas traiter des mêmes arguments dans deux axes différents. Cela peut arriver, surtout si l’on utilise
des exemples différents.
- à ne pas vous contredire d’un axe à l’autre (ex : dire que le comique est uniquement gratuit dans le
premier axe, puis dire que le comique n’est qu’engagé dans l’axe 2)
- à bien vérifier que tous vos arguments ont un rapport, même lointain, avec le sujet.
- bonne humeur et plaisir de vivre (vin, bonne chère, relation familière et cordiale au lecteur…)
- un comique burlesque
- des moments parodiques
- un livre farcesque
- un absurde constant
- ce comique peut sembler gratuit, tant il est constant. On rit beaucoup, c’est divertissant, et certains
passages peuvent être considérés comme purement gratuits.
- mais ce plaisir de lecture est au service d’un livre d’idées : n’est-il pas plus agréable d’apprendre en
riant ? En ce sens, le divertissement comique n’est-il pas déjà une stratégie d’éducation du lecteur ?
- le mot divertissement est par ailleurs à double sens. Il peut aussi signifier une diversion, un
détournement d’attention. Le rire chez Rabelais, comme dans une boîte de Silène, ne serait-il pas le
couvercle grotesque qui cache des vérités plus subtiles ? En effet, ce livre prône des idées très subversives
pour l’époque : remise en cause de l’éducation, du monarque tyrannique et belliqueux, et surtout de la
religion catholique que Rabelais souhaite réformer dans une perspective évangéliste. L’écrivain cherche
à dissimuler la portée révolutionnaire de son œuvre derrière un paravent comique, d’apparence
grossière, permettant d’éviter la censure et les poursuites.
- on constate que le rire est utilisé comme repoussoir, à l’encontre de ce qui incarne les thèses combattues
par Rabelais.
- il s’agit tout d’abord de toute la frange farcesque, scatologique, souvent génératrice de scènes
répugnantes. Ce comique vulgaire est associé au début du livre, et à une époque dont Rabelais ne veut
plus : le Moyen-Age.
- il s’agit ensuite de se moquer des adversaires de la pensée de Rabelais : l’église, les moines, les
mauvais roi. Tous ces éléments sont en permanence ridiculisés, et deviennent des repoussoirs pour le
lecteur.
A l’inverse, les éléments mis en avant par Rabelais (la méthode humaniste, l’utopie de Thélème, sont
présentés avec sérieux, sans comique.
5) Une fois le plan détaillé établi, on rédige un développement au brouillon.
a)Les règles d’écriture sont là encore les mêmes que pour le commentaire :
- on écrit de façon froide, neutre, à la troisième personne.
- on ne porte aucun jugement de valeur, on ne s'enthousiasme pas, on ne critique pas.
- on écrit au présent de vérité générale.
- on utilise un niveau de langue courant, ainsi que la terminologie de l’analyse littéraire.
- on fait des transitions partout, soit par des connecteurs logiques, soit par des phrases de récapitulation ou
d’annonce.
7) On recopie le tout.