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Des communautés juives enracinées en Afrique noire depuis plus de 2000 ans
Ils s’appellent Lemba, Abayuda, Falasha, Balouba, Zakhor, Tutsi Hebrews of Havila, Ibo-Benesi-Israël ou Jews of
Rusape. Ils ont en commun d’être noirs, africains et de se revendiquer comme juifs.

Michel Lachkar
France Télévisions • Rédaction Afrique

Publié le 26/05/2019 09:27

Temps de lecture : 6 min.

Juifs éthiopiens récitant la prière des morts pour les funérailles de Kes Menashe Zemro, chef spirituel de leur communauté, le 8 octobre 1998. En 1991, l'opération Moïse a évacué, en 24 heures,
14 000 Ethiopiens vers Israël. (JIM HOLLANDER / X00133)
On connaissait les falasha, ces milliers de juifs éthiopiens, affirmant leur filiation avec le roi Salomon et la reine de Saba. Moins connus sont
en revanche les Lembas du Zimbabwe, les Igbo du Nigeria ou les Abayudaya d’Ouganda… qui se réclament eux aussi du judaïsme. Juifs par
leur origine, juifs par conversion, ou encore par identification au peuple de la Bible, ces différents cas existent sur le continent africain.

Certains se disent descendants des "tribus perdues d’Israël" comme les falasha éthiopiens, d’autres se sont convertis plus récemment à la
religion de Moïse, d’autres encore, nourris aux textes bibliques, observent des rituels très proches du judaïsme.

Cette présence juive au sud du Sahara reste une énigme qu'historiens et archéologues commencent seulement à explorer.

Juifs par leur origine

Dans son livre Black Jews (Albin Michel 2014), Edith Bruder, chercheuse associée à la School of Oriental and African Studies à l'Université de
Londres, recense une dizaine de groupes ou d’ethnies qui se revendiquent comme juifs. "Les Lemba, présents au Zimbabwe et en Afrique du
Sud, pratiquent des rituels très proches du judaïsme antique." L’analyse ADN de leur patrimoine génétique a révélé qu’ils étaient
d’ascendance non-africaine en lignée paternelle. Ce qui signifie que des hommes de ce groupe seraient probablement des sémites venus
d’ailleurs et qui auraient épousé des femmes africaines. 

D'est...
Le président de la Lemba Cultural Organisation, le professeur Mathiha, affirme que leur origine remonte, en l’an 600 de notre ère, à une
tribu juive venue de Sanaa, capitale du Yemen actuel. Rien d’étonnant à cela: il est bien connu que depuis l’époque préislamique, des
Hébreux et des marchands arabes judaïsés émigrèrent vers les côtes d’Afrique de l’Est pour des raisons commerciales, ou pour fuir les
persécutions.

Déjà, le mythe d’Ophir, relaté dans l’Ancien Testament, situe les mines d’or du roi Salomon sur les côtes orientales africaines, où l'on a
retrouvé les vestiges d’une cité antique, nommée Great Zimbabwe . Dans les temps anciens, il a pu y avoir des liens importants entre
l’Arabie du sud et la côte sud-est de l’Afrique.

... en ouest

On trouve également des juifs en Afrique de l’Ouest. A Tombouctou, un groupe de musulmans s’est autoproclamé juif dans les années
1980. Ils ont fondé un mouvement qui s’appelle Zakhor, ce qui signifie "se souvenir" en hébreu. Ils disent descendre des Juifs du Touat, une
région à la limite du Sahara, dans l’ouest de l’Algérie.

Les Juifs du Touat furent exterminés par le Cheikh el Meghili en 1492. Certains des rescapés purent sans doute s’enfuir vers le Mali actuel.
C’est pourquoi l’affirmation, par les membres de Zakhor, qu’ils sont des descendants des Juifs du Touat n’a rien d’invraisemblable.

Il existe les traces (et les témoignages de voyageurs) d’une présence juive sur les routes caravanières transsahariennes et de l’existence de
petites communautés juives notamment dans la région de Tombouctou jusqu’au 14ème siècle. Sans tirer de conclusions, le scientifique
Théodore Monod a lui aussi été frappé par tout un faisceau d’éléments concordants. Du symbole de l’étoile de David au sceau de
Salomon placé au-dessus d’une porte à Ouadane (Mauritanie), ou d'une pierre de Ghormali (Mauritanie), gravée en hébreu.
Livre d'Edith Bruder Black jews édité en France en 2014 ches Albin Michel. Photo extraite du film "Les juifs Noirs du Nigéria" (Crédit photo: Evelyne et José Ainouz)

Juifs par conversion


Selon Edith Bruder, "les Abayudaya d’Ouganda ont adhéré à la religion juive à la suite de la décision d’un de leurs chefs charismatiques, qui
aurait découvert les origines juives de sa communauté en lisant la Bible. Dans les années 1910, Samei Lwakilenzi Kakunguku s’est orienté vers
le judaïsme après avoir pratiqué le protestantisme. Il entraînera une partie des membres de sa tribu derrière lui, exigeant d’eux une foi absolue
en l’Ancien Testament et dans ses commandements, y compris la circoncision."  Cette adhésion se transformera en une conversion collective,
lorsqu’en 2002 des rabbins israéliens et américains viendront les convertir officiellement au judaïsme.

Au Nigeria, les Igbo revendiquent également une identité juive depuis des décennies. Une trentaine de synagogues existent entre Abuja et
Port Harcourt, et on peut considérer que plusieurs dizaines de milliers d’Igbo pratiquent le judaïsme. Ces derniers, qui s'appellent les
Hebrewits, se considèrent d'ailleurs comme des juifs prétalmudiques, sur la base des traditions hébraïques de leurs ancêtres. Selon les
différentes versions de leur tradition orale, les Igbo affirment que leurs ancêtres sont venus de la Palestine antique par les anciennes routes
caravanières africaines et se désignent comme un fragment de la diaspora juive, voire comme une tribu perdue d’Israël. A ne pas confondre
avec les Sabbatherians, qui sont plus deux millions à pratiquer une forme de judaïsme, tout en respectant également le Nouveau
Testament. 

De même, il existe au Ghana une communauté beaucoup plus ancienne, connue sous le nom de House of Israel qui adhère au judaïsme
avec un engagement spirituel proche de la ferveur. Il y a une centaine d’années, un prophète s’est révélé au sein de ce groupe. A la suite
d’une vision, il a décrété que son peuple était juif, et a établi des paralèlles entre des coutumes des religions traditionnelles africaines et les
rites de l’Ancien Testament.

Prières rabbiniques traditionnelles

Pour Edith Bruder, l’adhésion au judaïsme des Jews of Rusape remonte aux années 1900. "Ces communautés, qui ont fait souche dans le
nord-est du Zimbabwe, récitent les prières rabbiniques traditionnelles, pratiquent la circoncision, les interdictions alimentaires et les rites
quotidiens."  Ils sont affiliés à la congrégation prophétique américaine Beth El en Virginie. "A l’occasion du shabbat, ils lisent la Torah et
chantent une version de leur cru du Shema Israel où se mêlent l’hébreu, l’anglais et le shona."
Toujours selon Edith Bruder, "le judaïsme syncrétique, pratiqué par ses membres, associe la théologie du judaïsme à celle du christianisme,
dans la veine des mouvements black jews afro-américains ."

Au Rwanda comme au Burundi, des Tutsi affirment également descendre des Hébreux. Leur apparence physique et le génocide des Tutsi a
renforcé cette identification aux juifs. Mais cette revendication est loin de convaincre historiens et spécialistes.

L’histoire des Beth Yeshorun au Cameroun est plus originale et plus récente. Elle date des années 2007-2008. Ils présentent la
caractéristique de s’être formés au judaïsme en utilisant internet. Il est vrai que l’histoire étonnante des falasha a réveillé un peu partout en
Afrique le "mythe" des tribus perdues d’Israël.

Falasha, descendants de la reine de Saba

Dans le récit fondateur de la royauté éthiopienne, le Kebra Naast (ou Gloire des rois), qui remonte au XIVe siècle, ce cycle de légende écrit
en ge’ez (la langue ancienne des Ethiopiens), relate la conversion au judaïsme de la reine de Saba qui, de retour dans son pays, donna
naissance à Ménélik 1er, fils de Salomon et fondateur de la lignée royale éthiopienne, dont l’éducation fut assurée par des religieux
dépêchés par son père.

Lorsque Ménélik devint "roi des rois", il fonda la dynastie salomonique qui régna sur le pays durant trois mille ans. Le judaïsme fut instauré
comme religion de la famille royale et de l’aristocratie d’Ethiopie jusqu’à leur conversion au christianisme au début de l’ère chrétienne. Il
n’aurait persisté par la suite que dans la communauté des Falasha.

Une histoire juive, enracinée en Afrique noire depuis plus de 2000 ans, c'est tout à fait crédible. Cette histoire côtoie nombre de légendes,
tant les personnages de la Bible hébraïque ont fortement influencé la spiritualité africaine.

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