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Sorbonne Université

Licence Mécanique

U.E. LU2ME003 - Méthodes


mathématiques et numériques pour la
mécanique

Enseignants: Diana Baltean-Carlès,


Catherine Weisman, Anca Belme
Séries entières
Les séries entières sont utiles dans la résolution des équations
différentielles, et plus particulièrement des équations différentielles à
coefficients variables. Pour cela on supposera queP∞la fonction
inconnue y (x) s’exprime sous la forme y (x) = n=0 an x n , avec an
des coefficients (constantes) qu’il faudra déterminer.
Exemple sur une équation différentielle simple

y 0 (x) − y (x) = 0

On sait que la solution générale est y (x) = Ce x .


Comment trouve-t-on la solution à l’Ide des séries entières ?
On cherche

X
y (x) = a0 + a1 x + . . . an x n + . . . = an x n
n=0

On remplace y dans l’équation. La dérivée est :


y 0 (x) = a1 + 2a2 x + . . . nan x n−1
(a1 + 2a2 x + . . . nan x n−1 ) − (a0 + a1 x + . . .) = 0
On réordonne selon les puissances de x :

(a1 − a0 ) + (2a2 − a1 )x + (3a3 − a2 )x 2 + . . . = 0

On trouve :

a1 − a0 = 0 2a2 − a1 = 0 3a3 − a2 . . .

d’où :

a1 a0 a2 a0
a1 = a0 , a2 = = , a3 = =
2 2! 3 3!
et donc
a0 2
y (x) = a0 + a0 x + x + . . . = a0 e x
2!
Définition 1 : (Série entière)
Soit x ∈ R variable. On appelle série entière de la variable x une
somme infinie de la forme
X
S(x) = an x n = a0 + a1 x + a2 x 2 + . . . an x n + . . . , an ∈ R
n

où an sont les coefficients de la série. Autrement dit, une série


entière est une série de fonctions dont le terme général un est de la
forme
un (x) = an x n
Observation : De la même manière on peut considérer des séries sur
l’ensemble des complexes C.
Exemples

1
xn =
P
i) an = 1. 1−x , ∀|x| < 1 (série géométrique ).
0

1 xn
= e x , ∀x ∈ R
P
ii) an = n! . n!
0

Définition 2 : (Convergence simple)


n
La somme partielle Sn (x) = ak x k est une polynôme de degré n.
P
0
Si pour tout x, la suite Sn (x) est convergente quand n → ∞, on
note
S(x) = lim Sn (x)
n→∞
Alors la somme de la série est la fonction S(x) et on note :

X
S(x) = lim Sn (x) = an x n
n→∞
n=0

On dit que la série converge simplement (ponctuellement).


Si la suite Sn (x) est convergente alors (an x n ) → 0, n → ∞.
On note Rn (x) = S(x) − Sn (x) = an+1 x n+1 + an+2 x n+2 . . . le reste
d’ordre n. Si Sn (x) est convergente alors Rn (x) → 0.

P 3 : n (Convergence absolue) P
Définition
La série an x converge absolument si |an x n | converge
n n
simplement.
Question : Pour quelles valeurs de x une série entière
converge-t-elle ?
Théorème : (rayon de convergence)
an x n une série entière. On définit :
P
Soit
n

R = sup {r ≥ 0 tel que (|an |r n )n∈N soit une suite bornée}

Alors R est l’unique nombre réel positif avec les propriétés :


an x n est absolument convergente.
P
i) si |x| < R alors la série
n
an x n est divergente.
P
ii) si |x| > R alors la série
n

R est appelé rayon de convergence.


Remarque 1 :
{r ≥ 0 tel que (|an |r n )n∈N soit une suite bornée} =
6 ∅
car elle contient r = 0. Si cet ensemble est majoré il admet une
borne supérieure notée R. S’il n’est pas borné alors R = +∞.

an z n une série entière complexe et R son


P
Définition 2 : Soit
n
rayon de convergence. Alors D(0, R) = {z ∈ C, |z| < R} est le
disque
P denconvergence de la série.
Si an x une série entière réelle et R son rayon de convergence
n
alors ] − R, R[ est son domaine de convergence (le disque est réduit
à l’intervalle ouvert).

Remarque 2 : Le plan complexe est divisé en 3 :


D(0, R) = DR : disque de convergence.
C − D̄(0, R) = {z ∈ C, |z| > R} : la série diverge et son terme
général est non-borné.
C(0, R) = {z ∈ C, |z| = R} : la série peut converger ou pas.
Exemples
x n est absolument convergente pour
P
i) La série géométrique
n
|x| < 1 et divergente pour |x| > 1 et donc le rayon de
convergence R = 1. Pour |x| = 1 la suite (x n )n ne tend pas
vers 0 donc la série diverge.
P xn
ii) Soit la série n . Pour |x| < 1 la série est absolument
n
xn
convergente. Si |x| > 1 , lim = +∞ et donc la série
n→∞ n
diverge. Le rayon R = 1. P1
Si x = 1 alors la série devient n qui est divergente.
n
P (−1)n
Si x = −1 alors la série devient n qui est une série
n
1
alternée, de terme général n → 0 donc la série est convergente.
P xn
iii) Soit la série n2
.
n
|x|n 1 P 1 P xn
Pour |x| ≤ 1, n2
≤ n2
. Or n2
est convergente donc n2
n n
est absolument convergente.
n
Pour |x| > 1 on a lim |x|
n2
= +∞. La série diverge.
n→∞
En conclusion, R = 1. Si |x| = 1 alors la série est absolument
convergente.
Calcul du rayon de convergence
Il y a deux critères de calcul basés sur deux critères de convergence
des séries numériques : d’Alembert et Cauchy que l’on rappelle
ci-dessous : P
Règle de d’Alembert : Soit un une série numérique. Supposons
que la suite uun+1
n
admet une limite, notée L. Alors,
I si L < 1 la série converge
I si L > 1 la série diverge
I si L = 1 on ne peut pas conclure.
P
Règle de Cauchy : Soit un une série numérique, avec un ≥ 0.

Supposons que la suite un admet une limite, notée L. Alors,
n

I si L < 1 la série converge,


I si L > 1 la série diverge,
I si L = 1 on ne peut pas conclure.
Théorème 3 : (Formule d’Hadamard-d’Alembert)
n
P
Soit an x une série entière, avec an 6= 0, ∀n. Soit
n
an+1
L = lim an ∈ [0, +∞] qui existe. Alors le rayon de convergence
n→∞
de la série entière est R = L1 avec R = 0 si L = +∞ et R = +∞ si
L = 0.
Preuve : Soit x ∈ R. Alors,

an+1 x n+1 an+1


lim = lim |x| = L|x|
n→∞ an x n n→∞ an

Le critère de d’Alembert appliqué à la série numérique donne :


1
I si L|x| < 1 ⇔ |x| < L la série converge,
1
I si L|x| > 1 ⇔ |x| > L la série diverge
Le rayon de convergence est donc R = L1 .
Théorème 4 : (Formule d’Hadamard-Cauchy) p
n
P
Soit an x une série entière. Soit L = lim n |an | ∈ [0, +∞].
n n→∞
Alors le rayon de convergence de la série entière est R = L1 avec
R = 0 si L = +∞ et R = +∞ si L = 0.
Preuve : Le raisonnement est le même en s’appuyant sur la règle
de Cauchy.
Exemples
P 2 n (n+1)2 1
1. n x lim 2 =1 ⇒R= 1 =1
n n→∞ n
P xn
2. n! lim n! =0 ⇒ R = 10 = ∞
n n→∞ (n+1)!
 n −n
n! n
lim an+1 n
= lim 1 + n1
P
3. nn x = lim n+1 =
n n→∞ an n→∞ n→∞
e −1 ⇒R=e
Opérations sur les séries entières
1. Produit avec un scalaire. P
an x n , λan x n ont le même
P
∀λ ∈ R, λ 6= 0 les séries
n n
domaine de convergence D et sur ce domaine,
!
X X
λan x n = λ an x n
n n

2. Addition desP séries.


Soit f (x) = an x n de rayon de convergence Ra et
P n
g (x) = bn x n de rayon de convergence Rb .
n
Alors la série somme (an + bn )x n est convergente pour
P
n
|x| < min (Ra , Rb ), donc Rs ≥ min (Ra , Rb ) et
X X X
(an + bn )x n = f (x) + g (x) = an x n + bn x n
n n n

Si Ra 6= Rb , Rs = min (Ra , Rb ) et si Ra = Rb , Rs ≥ Ra = Rb
3 Produit des séries.
cn x n où
P
La série produit (de Cauchy) est la série
n
n
P
cn = ap bn−p .
p=0
Si on note Rp le rayon de convergence de la série produit alors

Rp ≥ min (Ra , Rb ) et pour tout |x| < min (Ra , Rb ) on a


! !
X X X
n n
an x bn x = cn x n
n n n
Propriétés fondamentales des séries

Continuité
an x n une série entière de rayon de convergence R 6= 0. Alors
P
Soit
n
sa somme est une fonction S :] − R, R[→ R continue sur ] − R, R[ .

Intégration
an x n une série réelle de rayon de convergence R. Alors,
P
Soit
n
∀a, b, a < b tel que [a, b] ⊂] − R, R[,

Zb
 b 
∞ ∞
! Z
X X
an x n dx =  an x n dx 
a 1 1 a
Dérivation
an x n et nan x n−1 ont le même rayon de
P P
i) Les séries
n n
convergence et
!0
X X
an x n = nan x n−1
n n

ii) De même, on peut démontrer sur le domaine de convergence


que la fonction S(x) = an x n est indéfiniment dérivable et
P
n

!(p) ∞
X X
n
an x = n(n − 1) . . . (n − p + 1)an x n−p
n n=p
Développement d’une fonction en série entière
Soit f : D → K une fonction d’une variable réelle ou complexe,
définie sur un disque ou un intervalle ouvert contenant 0.
Nous
P∞ allons répondre à la question : existe-elle une série entière
a x n dont f est la somme, autrement dit telle que
0 n
f (x) = ∞ n
P
0 an x ?

Définition 1 : (Fonction développable en série entière)


Soit D un disque ouvert dans C ou un intervalle ouvert dans R
autour de 0 et f : D → K une fonction. On dit que f est
développable
P∞ en série entière autour de 0 s’il existe une série entière
n
0 an xP de rayon de convergence R > 0 telle que P
f (x) = ∞ n
0 an x , ∀x ∈ D avec |x| < R. On dit que

0 an x
n

reprśente f sur D ∩ DR .
Exemples
1
1. f : C \ {1} → C avec f (z) = 1−z est développable en série
entière autour de 0 :
+∞
X
f (z) = zn
n=0

+∞
z n a un rayon de convergence égal à 1,
P
La série entière
n=0
donc l’égalité précédente a lieu pour tout |x| < 1.
1
2. f : R → R, f (x) = 1+x 2
est développable en série entière
autour de 0 :
+∞
X
f (x) = (−1)n x 2n
n=0

Pour la suite , on considérera seulement les fonctions réelles. Le


théorème suivant donne une condition nécessaire pour que f soit
une fonction développable en série entière .
Théorème 1 : Soit I un intervalle ouvert de R contenant 0 et
f : I → R une fonction développable en série entière autour de 0 et
de rayon de convergence R > 0. Alors f est indéfiniment dérivable
(n)
sur ] − R, R[∩I et an = f n!(0) . Le développement est unique.

an x n .
P
Preuve : Soit f (x) =
0
On peut construire les dérivées d’ordre p, ∀p ∈ N de la série

an x n :
P
0
!(p) ∞
X X
n
an x = n(n − 1) . . . (n − p + 1)an x n−p
n n=p

X
f (p) (x) = n(n − 1) . . . (n − p + 1)an x n−p
n=p
On écrit cette relation pour x = 0 et on trouve pour tout p :
f (p) (0)
f (p) (0) = p(p − 1) . . . 1ap ⇒ ap =
p!
Définition 2 : (Série de Taylor d’une fonction)
∞ (n)
f (0)
x n est
P
Soit f une fonction indéfiniment dérivable. La série n!
0
appelée série de Taylor de f en 0 et est la seule série entière qui
puisse réaliser le développement de f .

La condition précédente n’est pas suffisante ! !


Contre-exemple : Soit f définie par :
(
− 12
f (x) = e x , si x 6= 0
0, si x = 0

On vérifie facilement que f est indéfiniment dérivable sur R et , en


particulier, f (n) (0) = 0, ∀n. La série de Taylor de f est donc la série
nulle dont la somme n’est pas égale à f (x) en dehors de x = 0.
Théorème 2 : Soit f indéfiniment dérivable sur un intervalle
] − R, R[. Pour tout n ∈ N on a

n Zx
X f (k) (0) k (x − t)n (n+1)
f (x) = x + f (t)dt
k! n!
k=0 0

Rx (x−t)n (n+1)
On pose Rn = n! f (t)dt. Alors, f est développable en
0
série entière sur ] − R, R[ si et seulement si

lim Rn (x) = 0, ∀x ∈] − R, R[.


n→∞

Corollaire : Soit f indéfiniment dérivable sur un intervalle


] − R, R[. S’il existe une constante M > 0 telle que

∀n, ∀x ∈] − R, R[, |f (n) (x)| ≤ M

alors f est développable en série entière.


Exemple de développement : Application à la résolution des
équations différentielles
Soit α ∈ R et f (x) = (1 + x)α . Alors f est développable en série
entière sur ] − 1, 1[ et

X α(α − 1) . . . (α − n + 1)
∀x ∈] − 1, 1[, f (x) = 1 + xn
n!
n=1

La fonction f est l’unique solution pour x ∈] − 1, 1[, de l’équation


différentielle avec condition initiale :
(1 + x)f 0 (x) = αf (x)


f (0) = 1
Compte-tenu des propriétés des dérivées des séries entières, si

an x n et f est solution de l’équation différentielle, alors
P
f =
n=0
∞ ∞

 (1 + x) P nan x n−1 = α an x n
P
n=1 n=0
a0 = 1

En développant et reindexant la première somme, on trouve :

X ∞
X ∞
X
n−1 n−1
(1 + x) nan x = nan x +x nan x n−1 =
n=1 n=1 n=1


X ∞
X ∞
X
n n
= (n + 1)an+1 x + nan x = ((n + 1)an+1 + nan )x n + a1
n=0 n=1 n=1

Par unicité du développement on obtient



 (n + 1)an+1 + nan = αan , ∀n ≥ 1
a1 = αa0
a0 = 1

ou encore
α−n

an+1 = n+1 an , ∀n ≥1
a0 = 1
d’où
α(α − 1) . . . (α − n + 1)
an = , ∀n ≥ 1
n!
La série ainsi obtenue a un rayon de convergence égal à 1, valeur
obtenue avec la régle de d’Alembert
an+1 α−n
lim | | = lim | |=1
n→∞ an n→∞ n + 1

Remarque : La méthode employée dans cet exemple se généralise à


toute fonction , unique solution d’une équation différentielle avec
conditions initiales.
Développement en série entière des fonctions usuelles
Quelques développements de base :

1
x n , R = 1.
P
1. 1−x =
n=0

xn
2. e x =
P
n! , R = +∞.
n=0

α(α−1)...(α−n+1) n
3. (1 + x)α = 1 +
P
n! x , R = 1, avec α réel.
n=1
∞ sin (n π2 ) n ∞
(−1)n 2n+1
car sin (n π2 ) = 0
P P
4. sin x = n! x = (2n+1)! x ,
n=0 n=0
pour n = 2p et vaut (−1)p pour n = 2p + 1.

(−1)n
x 2n .
P
5. De même, cos x = (2n)!
n=0
Développements obtenus des développements précédents :
a) Par combinaison linéaire :

e x + e −x X x 2n
cosh x = = , R = +∞
2 (2n)!
n=0

e x − e −x X x 2n+1
sinh x = = , R = +∞
2 (2n + 1)!
n=0

Les deux développements sont basés sur les développements de


e x et e −x :

X xn
ex =
n!
n=0

X xn
e −x = (−1)n
n!
n=0
b) Par substitution :


1 1 1 1X a n n b
= = (− ) x , R = | |, a, b 6= 0
ax + b b 1 + ba x b b a
n=0


1 X
= x 2n , R = 1.
1 − x2
n=0

1 X
= (−1)n x 2n , R = 1.
1 + x2
n=0

1 1.3 . . . (2n − 1) 2n
X
√ =1+ x , R = 1.
1−x 2 2n n!
n=1

1 X
√ =1+ (−1)n x 2n , R = 1.
1+x 2
n=1
c) Par dérivation :

1 X
2
= nx n−1 , R = 1.
(1 − x)
n=1

X n(n − 1) . . . (n − p + 1)
1
p+1
= x n−p , R = 1, p ∈ N,
(1 − x) p!
n=1
d) Par intégration :
Zx ∞
X (−1)n+1
1
ln (1 + x) = dt = x n, R=1
1+t n
0 n=1

Zx ∞
1 X1
ln (1 − x) = − dt = − x n, R=1
1−t n
0 n=1

Zx ∞
X (−1)n
1
arctan x = dt = x 2n+1 , R=1
1 + t2 2n + 1
0 n=1

Zx ∞
1 X 1.3 . . . (2n − 1) x 2n+1
arcsin x = √ dt = t+ , R = 1.
1 − t2 2n n! 2n + 1
0 n=1

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