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THÈME 2 - LA MULTIPLICATION DES ACTEURS INTERNATIONAUX

DANS UN MONDE BIPOLAIRE (1945-1970)

Cours terminales - Antoine Boucharenc


CHAPITRE 1 - LA FIN DE LA 2GM ET LE NOUVEL ORDRE MONDIAL (1945-1948)

INTRODUCTION

L'année 1945 est de manière unanime l'année du bilan : il faut construire un nouvel ordre
mondial, et travailler à la paix et la reconstruction d’après-guerre.

Attention au biais téléologique : 1945 est une année d'espoir dans un nouvel ordre mondial
pacifié. L'histoire n'a pas de direction. A la fin de la 2GM, personne n'envisage un affrontement entre deux
blocs. En effet, la Grande Alliance entre l'URSS, les Etats-Unis et le Royaume-Uni laisse penser que le
ciment de l'ordre mondial est assuré.

Téléologique : analyser l’histoire en lui conférant une finalité, une direction, un sens. Ici, l’erreur serait
d’analyser la Guerre Froide comme une situation naturelle, nécessaire et logique en 1945.

I- LE MONDE EN 1945 : L’ESPOIR D’UN NOUVEL ORDRE MONDIAL

A- Le bilan d’une guerre traumatisante

La 2GM est une saignée humaine sans précédent :


- 60M de morts, dont 20M en URSS qui a perdu 10% de sa population.
- 55% des morts sont des civils.
- Les exterminations dans les camps allemands et japonais sont un traumatisme moral inédit en
Europe et en Asie (6M de juifs et tsiganes en Europe, 17M de chinois en Asie).
- Les démographies sont à l'arrêt, la natalité au plus bas.
- Des villes entières sont à reconstruire (Dresde, Berlin, Coventry, Le Havre, Varsovie) : 45 villes
détruites à plus de 50% en Allemagne.

Des millions de personnes sont déplacées :


- 40M de déplacés en Europe.
- 50M de déplacés en Asie.
- Déportations allemandes et japonaises (camps de travail, concentration, d’extermination).
- Déportations soviétiques (goulags, camps de travail).
- Fuites face à l'ennemi (France, Chine, Europe de l'Est).
- Enlèvements de femmes (hausse de la natalité) et enfants (germanisation) par les nazis.
- Travailleurs forcés du STO, service de travail obligatoire (8M en Allemagne).
- Prisonniers de guerre (1M de français en 1940, 1,6M de soviétiques).
- 1M de soldats allemands faits prisonniers sont soumis au travail forcé en France jusqu'en 1949.
- Apatrides à cause des modifications des frontières (Pologne, Allemagne).

B- Régler le sort des vaincus

Pour l'Allemagne :
Le projet est d’abord de rayer l'Allemagne de la carte (plan Morgenthau de Churchill et Roosevelt)
afin de réduire sa capacité de pouvoir et donc de nuisance géopolitique en Europe. Ce projet est proposé
alors que la 2GM n’est pas encore terminée, et s’inscrit donc dans une position dure envers l’Allemagne
nazie, vouée à disparaître.

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Finalement, à la conférence de Téhéran de 1943 et surtout la conférence de Potsdam de 1945,
les alliés prennent la décision dite des 4D (démilitariser, dénazifier, décartelliser, démocratiser).
Les Etats de la Grande Alliance prennent conscience des limites d’une stratégie trop dure envers
l’Allemagne vaincue : supprimer l’Allemagne pourrait mener vers une nouvelle crise nationaliste. Cette
politique a plusieurs implications concrètes :
- Une politique d’épuration des nazis (5000 condamnations, 500 exécutions, majoritairement dans
la zone occupée des Etats-Unis).
- L'Allemagne perd la souveraineté sur toute sa partie orientale (anciennement la Prusse).
- L'Allemagne perd la souveraineté provisoirement sur son territoire (4 zones d'occupation).

- La production industrielle de l'Allemagne est plafonnée (50% du PIB de 1938).


- L'Allemagne ne peut plus constituer d'armée, ni produire de matériel militaire.

Enfin, il faut juger les coupables. Cette volonté prend effet lors des procès de Nuremberg de
novembre 1945 à octobre 1946. L’originalité de ces procès, très médiatisés et suivis à l’époque, réside
notamment dans 2 facteurs :
- L'adoption d’un arsenal de droit international nouveau :
⇒ Les crimes contre la paix : menace géopolitique pour la paix.
⇒ Les crimes contre l'humanité : camps de concentration et d’extermination (Shoah).
⇒ Les crimes de guerre : contre les populations civiles et atrocités militaires.
- Un procès qui vise le régime nazi comme entité juridique propre, et pas seulement les 23 hauts
dignitaires nazis jugés en leur nom (12 sont pendus, 3 acquittés).

A noter l’existence de fortes dissensions entre les pays de la Grande Alliance vainqueurs. En effet,
la France (contre la souveraineté allemande) et l’URSS (contre le capitalisme allemand) ont une position
plus dure que le Royaume-Uni (Churchill a perdu les élections et est remplacé par un gouvernement
travailliste de Attlee, moins dur avec l’Allemagne) et les Etats-Unis (hésitant entre isolationnisme et
interventionnisme en Europe en 1945). Finalement, aucun traité de paix n'est signé pour l'Allemagne.

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Pour le Japon :
Le Japon ne représente pas une priorité pour les Etats vainqueurs européens, occupés à
sanctionner l’Allemagne et à reconstruire leur territoire. A ce titre, les Etats-Unis s’emparent du dossier
japonais et centralisent les décisions.
- Mise sous tutelle des Etats-Unis, par le général MacArthur, pendant 7 ans.
- Perte de toutes les conquêtes et colonies (Corée, Mandchourie, Asie du Sud-Est).

Contrairement à l’Allemagne où le Reich disparaît, la décision du maintien de l'empereur est prise,


à condition que l’Empire japonais accepte l’ingérence des Etats-Unis et ne dispose plus de puissance
militaire. En somme, l’Empire du Japon peut continuer d’exister mais sous influence étasunienne.

Comme en Allemagne, il convient de juger les coupables des atrocités de guerre. Cette volonté
s’exprime au cours des procès de Tokyo de mai 1946 à novembre 1948. Ces jugements concernent 250
hauts dignitaires japonais (7 exécutions et 16 détentions à vie, fiasco juridique).
Bien que leur ampleur soit bien supérieure aux procès de Nuremberg, leur impact médiatique et
géopolitique est plus limité : les personnes sont jugées en leur nom propre, et l’Empire japonais n’est pas
remis en cause comme organisation. Ceci est également lié au faible intérêt que portent les européens au
règlement de la guerre en Asie du fait de leur eurocentrisme.

Eurocentrisme : consiste à attribuer une place centrale aux cultures et valeurs européennes aux dépens
des autres cultures et sociétés.

Là encore, on constate qu’aucun traité de paix pour le Japon et la Corée n’est signé, du fait des
fortes dissensions au sein de la Grande Alliance.

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C- Construire la paix

La 2GM et son lot d’atrocités poussent les Etats à envisager des dispositifs pérennes de
construction de la paix, y compris alors que les combats ne sont pas encore terminés. Plusieurs initiatives
permettent de proposer une paix fragile :
- 1943, création de l'UNRRA (administration des Nations Unis pour le secours et la reconstruction).
Cette organisation sert aux rapatriements des personnes déplacées pendant la guerre. Avant de
penser la résolution du conflit, on pense à la reconstruction sociale de la paix.
- Accords de Bretton Woods (1944) pour une coopération économique internationale (création du
SMI et de la BIRD, qui deviendront le FMI et la Banque Mondiale).

En effet, les pays de la Grande Alliance se sont rencontrés de nombreuses fois pour préparer la
paix pendant la 2GM, et construire une organisation plus cohérente et efficace que la SDN (société des
nations) : l’ONU, organisation des nations unies.
- 1941, Charte des Nations Unies (paix entre les pays de la Grande Alliance).
- 1944, conférence de Dumbarton Oaks (travail sur une organisation internationale pour la paix).
- 1945, conférence de Yalta (préparation de la paix, accord sur la création de l'ONU).
- 1945, conférence de San Francisco (création de l'ONU, 50 États signataires).

Ces discussions permettent également de régler les différends territoriaux en Europe et de mettre
un terme définitif et officiel à la 2GM pour les belligérants :
- 1947, traité de Paris (pertes de territoire pour l'Italie, la Roumanie, la Bulgarie, la Finlande). Mais
plusieurs litiges restent en suspens (Allemagne, Trieste en Italie, etc.).

On comprend donc ici toute l’importance de situer ces années post-2GM dans leur contexte.
L’objectif des nationaux est clairement de construire la paix pour éviter de nouveaux déséquilibres
mondiaux majeurs. Il n’y a pas de signaux géopolitiques permettant d’anticiper l’émergence de la Guerre
Froide car ni les Etats-Unis, ni l’URSS n’ont l’intention d’entrer en conflit en 1945.

Remarquons pour finir que toutes ces institutions sont sous la domination plus ou moins directes
des Etats-Unis et ravivent les tensions géopolitiques entre plusieurs modèles de sociétés divergents :
- Entre le communisme et le libéralisme.
- Entre les métropoles coloniales et les colonies.

D- Des tensions non-résolues par la 2GM

Il faut bien comprendre que la 2GM ne se termine pas réellement en 1945, en tout cas la fin
des conflits entre les principaux acteurs ne met pas un terme à la conflictualité internationale.
Certes, l'Allemagne nazie est vaincue par les attaques conjointes de l'URSS à l'Est et des
Etats-Unis à l'Ouest. Le 8 mai, une paix fragile par épuisement se constitue en Europe : Hitler s'est suicidé
le 30 avril, Mussolini est assassiné le 28 avril.
En Asie, les Etats-Unis mettent fin à la guerre de la pire des façons en utilisant une nouvelle arme
de destruction massive : la bombe A. Hiroshima (6 août) et Nagasaki (9 août) sont bombardées, faisant
environ 250 000 morts sur le coup. Le 2 septembre, le Japon capitule et renonce à la guerre.

Pourtant, le monde reste le théâtre de conflits majeurs hérités de la 2GM. Tous ces territoires où
se poursuivent les conflits offrent autant de possibilités de déstabilisation géopolitique.

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- Guerre civile en Grèce (1946-1949) :
Cette guerre civile est le résultat d’un affrontement entre les communistes résistants (EAM) et une
alliance entre les royalistes, les britanniques puis les Etats-Unis. Dans ce conflit, Staline respecte
sa parole et ne soutient pas l'EAM, au contraire des Etats-Unis qui interviennent pour endiguer le
communisme grec. Cette guerre civile fera 210k morts, dont 150k civils.
- Guerre civile en Chine ( jusqu’en 1950) :
Conflit entre les communistes de Mao Zedong et les nationalistes de Tchang Kai Tchek
(Guomindang) soutenus par les occidentaux.
- Émeutes et tensions en Palestine :
L'Irgoun (organisation de terroristes juifs sionistes) attaque les britanniques qui veulent juguler
l'émigration juive, et les arabes palestiniens s’opposant à la présence juive.
- Soulèvements dans les colonies des empires européens :
Le 8 mai 1945, plusieurs émeutes ont lieu dans la région du constantinois algérien, notamment à
Sétif, Guelma et Kherrata. Répression sanglante du GPRF (gouvernement provisoire pour la
république française) du général De Gaulle.
- Les persécutions contre les juifs en Europe :
La fin de la 2GM n’empêche pas les violences contre les juifs de continuer, notamment en Europe
de l’Est avec pour exemple le pogrom de Kielce en 1946 (Pologne).

II- LA FABRIQUE DE LA GUERRE FROIDE (1945-1948)

A- La Guerre Froide n’arrive pas du jour au lendemain

Il n’y a pas de date officielle d’entrée dans la Guerre Froide. Il faut replacer cette période dans son
contexte. En 1945, le monde doit se reconstruire :
- La fin de la guerre ne met pas fin aux pénuries : en France, le rationnement dure jusqu'en 1949.
- Les usines sont à l'arrêt, ces années de guerre totale ont brisé le tissu économique des pays : 50%
du potentiel industriel de l'Europe est anéanti.
- Il faut trouver une alternative au modèle libéral qui n'a pas su empêcher la guerre, mais y a
contribué. En Angleterre, les travaillistes de Attlee prennent le pouvoir contre Churchill. En France,
le programme du CNR (conseil national de la résistance) est partiellement appliqué.

Dans ce contexte, deux puissances prennent de l’importance et vont progressivement


déterminer les relations entre les acteurs géopolitiques mondiaux.

Tout d’abord, les Etats-Unis deviennent la principale puissance mondiale sur les plans militaires,
économiques et géopolitiques :
- La plupart des pays européens sont endettés outre-Atlantique (3,5Md pour le Royaume-Uni).
- Les Etats-Unis détiennent les 2/3 des stocks d'or mondiaux.
- La production agricole a augmenté de 25% pour faire face aux pénuries mondiales.
- Le monde est placé sous la dépendance étasunienne, notamment avec le Plan Marshall.

Un autre acteur sort grandi du conflit : l'URSS, grand vainqueur en Europe. Les partis
communistes européens, pro-soviétiques, sont très soutenus par les opinions publiques, et disposent de
la légitimité de leur participation à la résistance. Pour les contemporains européens, contrairement à la
perception actuelle historiquement construite, c’est bien l’URSS qui a sauvé l’Europe des nazis. Cette
position offre aux soviétiques une légitimité forte et fait de l’URSS un contre-pouvoir important.

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Dans ce contexte, la Guerre Froide met du temps à se mettre en place. Les Etats-Unis et l’URSS
mettent du temps à se considérer comme des ennemis, et à réorganiser leurs stratégies politiques et
économiques uniquement au prisme de cette rivalité. La Guerre Froide est le fruit d’un processus de
fabrication, certes rapide, mais progressif. Ni les Etats-Unis, ni l’URSS ne considèrent dans un premier
temps qu’un affrontement est nécessaire.

De fait, si l’URSS a une forte légitimité internationale au sortir de la 2GM, elle est ruinée et a perdu
10% de sa population en 6 ans. Elle n’est pas en capacité d’imposer une logique de bloc aux Etats-Unis.
La volonté première de Staline est d’obtenir des « gages de sécurité » :
- Demander la restitution des territoires perdus depuis la 1GM.
- Encourager les partis communistes en Europe de l’Est : Roumanie et Pologne avec une union des
gauches pro-soviétique au pouvoir, Tchécoslovaquie et Hongrie avec des pouvoirs amis, en
Bulgarie par l’intermédiaire de purges.
- Et au Moyen-Orient : Iran via le parti Tudeh et les partis séparatistes kurdes et azéris.

Au départ, les Etats-Unis acceptent de faire des concessions, et reconnaissent les gouvernements
communistes en Europe de l’Est, pourtant non démocratiquement élus.
Les premières prises de position contre l’URSS arrivent seulement en 1946, mais ces dernières
restent minoritaires et surtout ne sont pas bellicistes mais encouragent plutôt le dialogue :
- 1946, Long Télégramme de Kennan :
Kennan (ambassadeur des Etats-Unis à Moscou) informe le gouvernement de Truman que les
soviétiques n’auraient pas l’intention de collaborer avec le bloc capitaliste.
- 1946, Discours de Fulton par Churchill :
Churchill est l’ancien premier ministre britannique, dans l’opposition à l’époque. En 1946, alors
invité pour une conférence aux Etats-Unis, il théorise l’idée d’un rideau de fer qui se dresse en
Europe entre l’Ouest capitaliste et l’Est communiste.

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B- 1947, la rupture

Des enjeux géopolitiques majeurs vont pousser Truman (président des Etats-Unis) à prendre la
décision de s’opposer à l’influence communiste pour sauvegarder l’hégémonie étasunienne et de
remplacer ses conseillers politiques et s'entourer de hauts dignitaires hostiles à l’URSS :
- Mars 1946 : un réseau d’espionnage soviétique est révélé à Ottawa, au Canada.
- Mars 1946 : les soviétiques prennent plus de temps que prévu pour évacuer l’Iran.
- 1947 : la Pologne, alliée historique des occidentaux pendant les guerres mondiales, devient
communiste à la suite d’élections truquées par Moscou.
- 1946/47 : l’URSS refuse la politique économique des occidentaux pour l’Allemagne, notamment
l’entrée dans une économie de marché capitaliste et le nouveau Deutsche Mark.

Mais surtout, deux enjeux géopolitiques majeurs vont pousser Truman à prendre définitivement la
décision de s’opposer à l’URSS :
- La Turquie :
L'URSS veut la rétrocession de territoires à l’Est
de l’Anatolie (Kars, Ardahan) et un partage du
contrôle des détroits (Bosphore, Dardanelles).
Il s’agit en effet d’un enjeu diplomatique majeur
car les détroits (ci-dessous) sont sur la route
commerciale entre Europe et Asie, et
notamment pour le pétrole. Pour les Etats-Unis,
il est hors de question que l’URSS obtienne
l’hégémonie sur l’acheminement du pétrole en
Europe, alors que les soviétiques sont déjà en
avance sur le charbon.

- La Grèce :
L’EAM communiste (anciens résistants grecs pendant l’occupation nazie) mène la guérilla depuis le
Nord du pays constitué en république (Konitza) et les bases arrières en Yougoslavie. L’EAM
s’oppose aux royalistes et monarchistes qui veulent le retour du roi des grecs au pouvoir, soutenu
depuis 1946 par les britanniques qui refusent la possibilité d’un pouvoir communiste en Grèce. Or,
les britanniques n’ont plus les moyens de mener la guerre et agitent la menace d’une intervention
de l’URSS pour appeler les Etats-Unis au secours.
On sait aujourd’hui que l’URSS n’avait aucune intention d’intervenir en Grèce : Staline s’y refusait
au nom d’une politique pragmatique qui cherche à étendre son influence dans son entourage
proche pour ériger une zone tampon.

Les différends en Turquie et en Grèce sont les principales causes de l’entrée des Etats-Unis
dans une logique de bloc contre les soviétiques. La Guerre Froide est donc avant tout un conflit
économique et énergétique. La dimension idéologique de la lutte est secondaire au sortir de la 2GM.

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En résumé, ce qu’il faut retenir :

⇒ Mettre fin à la 2GM :


- 8 mai 1945, fin des combats de la 2GM en Europe.
- 2 septembre 1945, capitulation du Japon et fin officielle de la 2GM.
- 60M de morts, dont 55% de civils.
- 90M de personnes déplacées, dont 40M en Europe.

⇒ Sanctionner les vaincus :


- Novembre 1943, conférence de Téhéran entre Staline, Roosevelt et Churchill. Une stratégie de
partage de l’Allemagne est adoptée. Un débarquement en Normandie est prévu. La disparition de
l’Allemagne (Plan Morgenthau) est abandonnée.
- Juillet 1945, conférence de Potsdam entre Staline, Truman et Churchill (puis Attlee). Les décisions
de Téhéran sont confirmées. La stratégie des 4D est décidée. L’Allemagne perd la souveraineté en
étant divisée en 4 zones d’occupation, perd des territoires à l’Est qui deviennent polonais, ne peut
plus constituer d’armée et voit son économie plafonnée. Le 3ême Reich disparaît.
Le Japon peut conserver son système impérial mais doit rétrocéder ses colonies et conquêtes. Il
est mis sous la tutelle des Etats-Unis (Général MacArthur).
- Novembre 1945 - Octobre 1946, procès de Nuremberg contre 23 hauts dignitaires nazis suivant 3
catégories juridiques : crime de guerre, crime contre l’humanité, crime contre la paix,
- Mai 1946 - Novembre 1948, procès de Tokyo, 250 hauts dignitaires japonais jugés. Fiasco.

⇒ Construire la paix :
- 1941, Charte des Nations Unies entre les pays de la Grande Alliance.
- 1943, création de l’UNRRA pour les réfugiés et déplacés de la 2GM.
- 1944, accords de Bretton Woods pour une coopération économique.
- 1945, conférence de San Francisco permettant la création de l’ONU par 50 Etats signataires.

⇒ La prise de conscience des deux destins irréconciliables :


- 1946, long télégramme de Kennan (ambassadeur des Etats-Unis en URSS).
- 1946, discours de Fulton par Churchill qui théorise l’idée d’un rideau de fer en Europe.
- 1946, un réseau d’espionnage soviétique est démantelé au Canada, allié des Etats-Unis.
- 1946/47, les pays d’Europe de l’Est entrent dans le giron communiste, parfois démocratiquement,
ou bien à la suite d’élections truquées (Pologne).

⇒ 1947, l’année de la rupture :


- 1946/1947, l’URSS réaffirme ses revendications en Turquie (annexion de l’Est de l’Anatolie,
obtention de droits sur les détroits des Dardanelles et du Bosphore). Les Etats-Unis veulent
intervenir pour ne pas perdre leur hégémonie sur le pétrole.
- 1947, les Etats-Unis répondent à l’appel des britanniques qui ont envahi la Grèce pour repousser
les communistes (EAM) et imposer une restauration monarchique nationaliste, dans le contexte de
la guerre civile grecque (1946-1949).

⇒ La Guerre Froide n’est pas la continuité logique de la 2GM, c’est un processus long de fabrication :
personne ne pouvait anticiper ce conflit en 1945, l’issue de la guerre fait naître un espoir de paix inédit.
⇒ La Guerre Froide est avant tout un conflit économique et énergétique dans les années qui suivent la fin
de la 2GM. Il structurera les relations internationales et les idéologies pendant plus de 40 ans.

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CHAPITRE 2 - LA BIPOLARISATION DE LA GUERRE FROIDE (1948-1970)

INTRODUCTION

Les tensions héritées des impensés de la construction de la paix au sortir de la 2GM vont
précipiter le monde dans une logique d’affrontement entre deux paradigmes.
Les oppositions d’ordre économique et énergétique se muent en affrontements idéologiques qui
vont structurer les relations internationales et les politiques des Etats pendant plus de 40 ans.

Paradigme : conception théorique dominante à une époque, répondant à des principes et des normes.

I- LA BIPOLARISATION ET L'AVÈNEMENT DE LA LOGIQUE DE BLOC (1948-1953)

A- La montée des tensions entre les deux Grands

Le président Truman se trouve dans une situation inconfortable en 1947. Il souhaite s’opposer aux
velléités soviétiques en Europe et au Moyen-Orient, mais il fait face à une opinion publique étasunienne et
une majorité parlementaire républicaine isolationnistes (contre la rivalité avec l’URSS). Pour légitimer sa
stratégie, il a besoin d’un discours fort et rassembleur.
C’est le but de son fameux discours (1947) où il théorise la doctrine de l’endiguement contre le
communisme et l’expansionnisme sovétique. Il s’agit d’un discours de propagande : Truman s’emporte
en parlant de « terrorisme communiste ».
Endiguement (ou containment en anglais) : politique des Etats-Unis vis-à-vis de l’URSS visant à stopper
l’avancée de la zone d’influence soviétique et de l’idéologie communiste dans le monde entier sans
toutefois entrer dans un affrontement militaire direct.

A l’occasion de ce discours, il
mentionne la création d’une aide économique
pour financer la Grèce et la Turquie. Ce projet
est confié au secrétaire d’Etat des Etats-Unis
George Marshall. Juin 1947, le plan Marshall
voit le jour. Il va bien plus loin que l’idée de
base de Truman puisque l’aide est adressée à
tous les Etats qui la demandent, y compris les
pays communistes. La condition est d’accepter
la politique d’ingérence des Etats-Unis dans la
gestion de l’aide. Il ne s’agit donc pas d’une
aide bilatérale et désintéressée.
- L’URSS refuse face aux conditions et
pousse les Etats d’Europe de l’Est à
faire de même.
- 16 pays reçoivent l’aide, en particulier
en Europe, pour environ $ 13,5Mds.
- Les plus gros bénéficiaires sont la
France et le Royaume-Uni.

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L’URSS, initialement intéressée, convoque les partis communistes européens pour convenir de la
stratégie à adopter. La réunion a lieu à Szklarska Poreba en Pologne en septembre 1947.
A cette occasion, le ministre et représentant de la délégation soviétique Andreï Jdanov propose
un discours qui devient la doctrine Jdanov, en réponse à la position de Truman.
- Jdanov compare les Etats-Unis à l’Allemagne des années 30 en dénonçant l'impérialisme
étasunien. Il propose de s’unir contre cette hégémonie par la création du Kominform, une
organisation de coopération entre les partis communistes d’Europe, dominés par l’URSS.
- Il demande aux autres partis de refuser l’offre du Plan Marshall.

B- L’année 1948, un catalyseur pour la fabrique de la Guerre Froide

Pour la première fois, la collaboration entre les Etats-Unis et l’URSS n’est plus envisagée comme
une possibilité. La Guerre Froide est déclarée et va structurer les relations internationales.
Deux événements géopolitiques majeurs au cours de l’année 1948 vont consommer les divisions
entre les deux blocs.
- Coup de Prague (1948) :
La Tchécoslovaquie occupe une position particulière en 1948. En effet, le gouvernement est élu
démocratiquement, et se dégage une majorité communiste. Pourtant, le pays est considéré
comme un pont entre Est et Ouest, entre communisme et capitalisme. En février 1948, 12 ministres
non-communistes décident de démissionner pour protester contre le refus du Plan Marshall. Leur
objectif est de pousser le chef du gouvernement à proposer de nouvelles élections. Or, le chef du
gouvernement Klement Gottwald réussit à obtenir le soutien de l’opinion publique et à faire
pression sur le président pour qu’un gouvernement quasi-exclusivement communiste soit nommé.
Ce n’est donc pas un coup d’Etat, mais un changement de gouvernement. Le coup de Prague a eu
un impact fort pour son importance symbolique : la Tchécoslovaquie est une démocratie
historiquement alliée de l’Ouest. Les Etats-Unis vont dénoncer une prise de pouvoir autoritaire.

- Le blocus de Berlin (1948) :


Truman ne fait plus confiance à l’URSS et décide sans
l’accord des soviétiques de regrouper les trois zones
d’occupation française, britannique et étasunienne en
un seul Etat libéral. L’annonce de la création de cette
tri-zone et d’élections pour un Etat fédéral avec une
monnaie unique irrite le pouvoir soviétique. Staline
veut contre-attaquer et choisit le point vulnérable de
la stratégie des Etats-Unis : Berlin. Il décide en juin
1948 de mettre la ville sous blocus. Truman trouve la
parade et organise un pont aérien via l’aéroport de
Tempelhof dans la zone étasunienne. Pendant 1 an, la
population de Berlin-Ouest dépend exclusivement de
ce moyen d’approvisionnement.
Staline finit par capituler en mai 1949 devant
l’inefficacité du blocus. Les Etats-Unis parviennent à
imposer une loi fondamentale (constitution) en
Allemagne de l’Ouest : la RFA (république fédérale
allemande) est créée. Quelques mois plus tard, la RDA
(république démocratique allemande) est intronisée
en Allemagne de l’Est, sous domination soviétique.

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C- La militarisation de la Guerre Froide

La militarisation en Asie :
Ces tensions en Europe au cours de l’année 1948 permettent de comprendre l’avènement de la
logique de bloc comme le résultat de variables sociales et économiques. Pourtant, le virage militaire que
prend cet affrontement est le résultat d’un concours de circonstances en Asie.

Le cas central est celui de la Corée. Depuis la conférence de Yalta, le pays devait être séparé en
deux zones d’occupation administrées par les Etats-Unis et l’URSS, et placées sous la tutelle de l’ONU. Or,
face aux oppositions des partis politiques coréens et à l’impossibilité de trouver un accord entre les deux
Grands, la situation devient intenable et aucun traité n’est signé.
Finalement, en 1948, les nationalistes anti-communistes
prennent le pouvoir dans la partie Sud contrôlée par les
Etats-Unis et mettent en place une dictature autour du dirigeant
Syngman Rhee. Le pouvoir des Etats-Unis reconnaît et soutient ce
nouveau gouvernement. En réponse aux Etats-Unis et à la
dictature en Corée du Sud, Staline impose Kim Il-Sung à la tête
de la Corée du Nord.
En effet, les Etats-Unis ont peur d’une vague communiste en Asie :
les communistes chinois autour de Mao Zedong tiennent la
majeure partie du pays depuis 1947. En 1949, la Chine devient
communiste avec la victoire définitive de Mao Zedong contre
les nationalistes de Tchang Kai Tchek (Guomindang). A partir de
ce jour, les relations entre Staline et Mao s’intensifient, et la
nouvelle république populaire de Chine (communiste) entretient
des liens étroits avec les partis communistes en Asie. Le cas de la
Corée voisine est donc tout sauf anecdotique.
En 1950, l’offensive est lancée par la Corée du Nord pour réunifier le pays. Staline pense que les
Etats-Unis n’interviendront pas, c’est une erreur. Ces derniers profitent du boycott du Conseil de Sécurité
par l’URSS (en protestation de la non-reconnaissance de la République populaire de Chine) pour obtenir
le droit de constituer une force militaire et d’intervenir directement en Corée. C’est le début de la Guerre
de Corée, elle dure de 1950 à 1953 et fait entre 2 et 3 millions de morts.

La militarisation en Europe :
En Europe, la militarisation du conflit se met également en place. Les Etats-Unis prennent la
décision de sortir définitivement de leur isolationnisme : 1948, le Sénat signe la résolution Vandenberg
qui prévoit que les Etats-Unis peuvent signer des traités d’alliance en temps de paix.
Quelques mois plus tard, en avril 1949, l’ Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) est
créée entre les Etats-Unis et 5 pays d’Europe occidentale, dont la France et le Royaume-Uni. En cas
d’agression d’un Etat membre, les autres Etats doivent intervenir : c’est donc une alliance militaire. Cette
alliance est rapidement étendue à la Turquie et à la Grèce, pays toujours considérés comme menacés.

Les Etats-Unis multiplient les traités d’alliance militaire avec les autres régions du monde dans le
but de mettre en place leur politique d’endiguement. Quelques exemples de cette « pactomanie » :
- Pacte de Rio (1947) : traité militaire avec plusieurs pays d’Amérique du Sud.
- ANZUS (1951) : traité militaire avec les Philippines, l’Australie et la Nouvelle-Zélande.
- Pacte de Bagdad (1955) : traité militaire avec plusieurs pays du Moyen-Orient.

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De leur côté, les soviétiques
déclenchent également leur militarisation.
Pour commencer, une nouvelle marque le
tournant militariste de la Guerre Froide :
août 1949, l’URSS détient la bombe
atomique. C’est la stupeur à l’Ouest, les
services secrets étasuniens ne l'avaient
pas vu venir.
Dans un second temps, l’URSS
emboîte le pas des Etats-Unis et concluent
avec leurs alliés européens une alliance
militaire : c’est la création en 1955 du
Pacte de Varsovie en Pologne.
Cette alliance a notamment un
intérêt non-négligeable pour les
soviétiques : s’assurer de la stabilité des
partis communistes dans les démocraties
populaires. En effet, le pacte de Varsovie
est mobilisé au cours de chaque épisode
insurrectionnel ou contestataire dans les
pays d’Europe de l’Est :
- Soulèvement à Budapest en 1956.
- Soulèvement à Prague en 1968.

Démocratie populaire : nom donné aux régimes communistes d’Europe de l’Est pendant la Guerre Froide,
par opposition aux régimes occidentaux qualifiés de démocraties bourgeoises.

D- Les tensions se cristallisent autour d’un affrontement idéologique

Pour résumer, 1947 était une année de prise de conscience de deux destins irréconciliables ; 1948
était l’année de matérialisation de l’opposition sur les terrains mondiaux ; 1949 était l’année de l’entrée
dans la course aux armements et dans une logique de blocs militarisés.

Mais une variable centrale et profonde germe dans les esprits des deux Grands. En effet,
Etats-Unis et URSS prennent conscience que deux modèles de sociétés s’opposent : la Guerre Froide
devient un affrontement idéologique.

Etats-Unis URSS
Modèle politique Démocratie représentative Marxisme-léninisme, parti unique
Modèle économique Économie de marché capitaliste, Collectivisation, nationalisation,
libre concurrence planification
Modèle de société Libertés individuelles et collectives, Egalité sociale et raciale, abolition
consumérisme des classes sociales
Critique par l’autre Impérialisme, ségrégation raciale, Terreur des goulags, absence de
capitalisme créateur d’inégalités liberté de la presse

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Ces affrontements idéologiques vont être l’objet d’Intenses campagnes de propagande d’Etat, afin
de marquer les esprits et de convaincre la population de la légitimité des modèles. Plusieurs exemples :

- Le MacCarthysme ou la « chasse aux sorcières » aux Etats-Unis :


Il s’agit du pendant le plus connu des politiques de censure et de propagande pendant la Guerre
Froide. Le FBI est chargé de l’espionnage intérieur et traque les sympathisants communistes au
sein de l’administration étasunienne. Mais le monde de la culture est également visé, et plusieurs
enquêtes visent les influences de personnes travaillant à Hollywood. Par exemple, Charlie Chaplin
est accusé de subversion idéologique et part s’installer en Europe.
Ces affaires ouvrent la voie à la période la plus violente de la répression aux Etats-Unis. Cette
politique est menée par le sénateur MacCarthy. Plusieurs millions de personnes sont surveillées et
des milliers vont perdre leur emploi. Plusieurs procès ont lieu contre des personnes accusées,
parfois sans preuve, de proximité avec les idées communistes, voire d’espionnage. Par exemple,
les époux Rosenberg sont exécutés en 1953 sur la chaise électrique pour espionnage.

- Les nouvelles purges staliniennes en URSS :


Staline organise une forte répression entre 1950 et 1953 dans l’administration soviétique mais
aussi dans le monde de la culture. L’objectif est de supprimer tous les commentaires bienveillants
destinés à la culture occidentale (cinéma, littérature, philosophie). Ce système de censure voit son
âge d’or avec l’apogée du système concentrationnaire soviétique (goulags).

- Campagnes d’organisations privées soutenues par la CIA en Europe :


Le Mouvement de la Paix est un mouvement de masse progressiste créé en France et qui se
mondialise entre la fin des années 40 et le début des années 50. De nombreux intellectuels
européens rejoignent l’initiative comme Joliot-Curie ou Picasso, et demandent l’interdiction de
l’usage de la bombe atomique lors de l’appel de Stockholm en 1950. Cet appel recueille plusieurs
millions de signatures partout en Europe, dont 10 millions en France.
Face à cette initiative clairement orientée contre l'impérialisme des Etats-Unis, le pouvoir
étasunien et ses alliés européens cherchent à créer une organisation de propagande contre les
idées progressistes du Mouvement de la Paix. Avec le soutien de la CIA, le Mouvement Paix et
Liberté est créé en 1950, notamment en France. La propagande s’établit en Europe, notamment
par le biais de Radio Free Europe qui diffuse les appels contre le communisme.

II- FAIRE LA GUERRE FROIDE (1953-années 70)

A- La mort de Staline et la « coexistence pacifique »

Au début des années 50, un conflit protéiforme (qui prend plusieurs formes) s’est installé : en effet
la Guerre Froide est un affrontement économique, culturel, idéologique, militaire et énergétique. Ce conflit
structure les politiques intérieures et extérieures de la totalité des puissances mondiales.
En mars 1953, Staline meurt. Il s’agit d’un électrochoc géopolitique majeur pour deux raisons
principales. Premièrement, ce dernier n’a pas préparé sa succession. Aucun héritier légitime n’est prévu.
Deuxièmement, Staline emporte avec lui sa stratégie de purge et d’affrontement tous azimuts.

Cet épisode coïncide avec la fin des combats en Corée, par épuisement. Après une offensive
éclair des troupes étasuniennes soutenues par l’ONU en 1950, l’intervention chinoise auprès de la Corée
du Nord repousse MacArthur (général étasunien) sous le 38ème parallèle. En 1953, la guerre s’éternise et
les positions sont globalement les mêmes qu’au début de la guerre.
La guerre de Corée a le mérite de nous informer sur le degré d’implication des deux Grands dans
le conflit. Les Etats-Unis sont prêts à intervenir mais ne font plus usage de l’arme atomique. L'URSS, de
son côté, préfère rester en léger retrait pour sauvegarder la survie de son bloc.

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Dès 1951, l’URSS propose la paix et l’ambassadeur de l’URSS à l’ONU déclare que les deux
systèmes (capitalisme et communisme) peuvent coexister pacifiquement. La mort de Staline accélère le
processus en 1953. La fin de la guerre de Corée additionnée à la mort du dirigeant soviétique fait entrer la
Guerre Froide dans une nouvelle ère : la « coexistence pacifique » entre les deux systèmes (1953-1962).

Le nouvel homme fort de l’URSS est Nikita Khrouchtchev à partir de 1955. Sa ligne modérée
face aux Etats-Unis est préférée à celle de Molotov, partisan d’une simple pause dans les affrontements.
Khrouchtchev lance la « déstalinisation » et met fin à plusieurs dossiers sensibles pour calmer le jeu :
- 1953, renoncement aux revendications territoriales en Turquie.
- 1955, fin de l’occupation de l’Autriche en contrepartie de sa neutralité dans la Guerre Froide.
- 1955, reconnaissance de la RFA (république fédérale allemande, Allemagne de l’Ouest).
- 1955, conférence des Quatre (France, Royaume-Uni, Etats-Unis et URSS) à Genève pour discuter
du désarmement nucléaire et du cas de l’Allemagne. Les avancées concrètes sont très limitées,
mais cette réunion permet de faire renaître l’espoir en un apaisement des tensions. En effet, pour
la première fois depuis 1945, les deux Grands acceptent le dialogue.
- 1956, au cours du 20ème Congrès du Parti Communiste, Khrouchtchev stipule que la logique
de bloc n’est pas la finalité de la politique soviétique. Cet épisode marque l’apogée de la
politique de « déstalinisation » en URSS : les dirigeants partisans d’une ligne dure sont écartés.
- 1956, l’action conjointe des Etats-Unis et de l’URSS met fin à la crise de Suez entre l’Egypte d’une
part et la France, le Royaume-Uni et Israël d’autre part.

Des échanges bilatéraux reprennent entre les deux Grands, par l’intermédiaire de plusieurs visites
diplomatiques. En 1959, le Vice-Président des Etats-Unis Nixon se rend à Moscou pour une exposition,
suivi quelques semaines plus tard par la visite officielle de Khrouchtchev aux Etats-Unis. A cette
occasion, le chef du parti communiste soviétique déclare : « Vive l’amitié américano-soviétique ! ».

Il ne faut pas idéaliser cette période. Ces discours de façade permettent certes un espoir mondial
dans un apaisement des tensions, mais les deux Grands restent pragmatiques : les années 50 marquent
l’apogée des pactes de coopération militaire aux Etats-Unis (notamment au Moyen-Orient), la mainmise de
l’URSS sur les démocraties populaires (le pacte de Varsovie de 1955 est utilisé dès 1956 en Hongrie pour
l’insurrection de Budapest), le développement de la bombe H dans les deux camps.
De fait, la déstalinisation a créé un sentiment de rupture dans le bloc de l’Est. A ce titre, la Chine
de Mao Zedong sort de son alliance avec l’URSS, accusée de « révisionnisme ». Certains pays tentent
d’en profiter, mais Khrouchtchev reste ferme : la coexistence pacifique ne met pas fin à la logique de bloc.

B- Berlin et Cuba relancent la Guerre Froide

La coexistence pacifique est rattrapée par les tensions géopolitiques majeures qui animent les
principaux territoires stratégiques des années 50 et 60 : Berlin, l’Asie du Sud-Est et l’Amérique Latine.

- La deuxième crise de Berlin (1958-1961) :


La ville de Berlin est un véritable laboratoire pour la Guerre Froide. En 1958, le secrétaire du parti
communiste de RDA, Walter Ulbricht, demande à Khrouchtchev de prendre des mesures à propos
de Berlin-Ouest : depuis 1948, 2,5M de personnes sont passées à l’Ouest et ont quitté la RDA.
Khrouchtchev accepte et lance un ultimatum aux Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni. La
réunion entre les 4 puissances est prévue en mai 1960 à Paris pour statuer sur Berlin, mais un
événement majeur va mettre ces discussions en péril.

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En effet, quelques jours avant la conférence de Paris, un
avion-espion U2 des Etats-Unis est repéré puis abattu par les
soviétiques au-dessus du territoire de l’URSS (ci-contre). Parti
du Pakistan, allié des Etats-Unis, son objectif est d’espionner
les bases militaires soviétiques. Il s’agit d’un manquement
majeur aux engagements des deux Grands et une violation
du droit international. A la conférence, Khrouchtchev
demande des excuses mais le président Eisenhower refuse.
La crise est à son apogée.
Quelques mois plus tard, face aux refus de collaborer du
nouveau président Kennedy, Khrouchtchev et Ulbricht
décident la construction du Mur de Berlin, en août 1961.

A gauche, la Mur de Berlin dans les années 60.


A droite, le trajet du U2 étasunien en URSS.

La construction de ce mur dans la capitale devient


un électrochoc mondial. Berlin est analysé comme
l’épicentre de l’affrontement. Ainsi, Berlin-Ouest est
une priorité diplomatique absolue pour les Etats-Unis
qui accentuent la dramaturgie autour de ce sujet.

- La crise de Cuba (1959-1962) :


En 1959, Fidel Castro renverse le régime
pro-occidental du dictateur Batista. Sa première
intention n’est pas de rompre totalement avec les
Etats-Unis, mais il fait appel à l’URSS pour être
soutenu car les Etats-Unis s’opposent à ses
réformes sociales et agraires socialistes.
En 1961, la CIA organise un débarquement de 1500
exilés cubains entraînés aux Etats-Unis dans la
baie des Cochons à Cuba. C’est un échec total.
Finalement, en 1962, Khrouchtchev accepte et
envoie des missiles nucléaires à Cuba. Des avions
espions U2 repèrent les installations. En réaction,
Kennedy envoie la marine (US Navy) et organise un
blocus. La tension est à son comble mais la 3GM
que tout le monde redoute n’aura pas lieu.
Khrouchtchev retire les installations en échange du démantèlement des fusées étasuniennes en
Turquie et d’une garantie concernant le régime castriste à Cuba. Cet épisode met un coup au
prestige soviétique. Les deux Grands mettent en place une ligne de communication directe pour
éviter les futures crises : le « téléphone rouge ».

Face aux événements de Cuba (1962) et la peur mondiale d’un conflit nucléaire, les deux blocs
mettent un coup d’arrêt à l’escalade des tensions.

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C- La Détente (1962-1979) : quel constat ?

La période qui débute alors est appelée « Détente » et plusieurs éléments dans les années 60 et
70 semblent bien signaler une nouvelle ère de coopération. Au-delà du « téléphone rouge » hautement
symbolique, plusieurs questionnements sont à l'œuvre. Pour autant, il faut nuancer ce propos et avoir un
regard critique sur cette périodisation artificielle. Si l’on analyse 17 années de « Détente », le changement
dans les relations entre les deux Grands reste marginal. La Guerre Froide n’est pas finie.

1- Un apaisement des relations entre les blocs

Éviter la prolifération nucléaire, rééquilibrer les arsenaux militaires, apaiser les tensions :
- 1963, traité de Moscou interdisant les essais nucléaires (100 Etats signataires).
- 1968, traité de non-prolifération nucléaire (TNP) interdisant aux pays qui ont la technologie de la
partager et aux autres de la développer. Une quarantaine d’Etats signe, pas la France, ni la Chine.
- 1972, accords SALT-I permettant de geler le nombre de missiles intercontinentaux pour 5 ans
entre les deux Grands. C’est l’apogée de la « Détente », une vraie avancée.
- 1975, conférence d’Helsinki (CSCE, conférence sur la sécurité et la coopération en Europe)
réunissant tous les pays d’Europe (Est et Ouest) avec l’URSS et les Etats-Unis et assurant la
reconnaissance et l'inviolabilité des frontières en Europe. Cet épisode marque l’entrée dans un
monde multipolaire et un réel espoir dans l’apaisement des tensions. Si le texte est peu
contraignant, il introduit un nouveau paradigme dans les relations internationales.

Une « Détente » économique et commerciale :


Les échanges entre Ouest et Est étaient interdits. A partir de 1972, 23 accords sont signés pour
relâcher la pression. De 1971 à 1976, le commerce entre URSS et Etats-Unis est multiplié par 8, et l’URSS
exporte 20% de sa production à l’Ouest (Japon, RFA, Etats-Unis, France, Italie).

Des concessions accordées à l’Est :


L’URSS a perdu le soutien de la Chine avec la déstalinisation, et plusieurs Etats communistes se
déclarent ouvertement proches de Mao, dont l’Albanie. Khrouchtchev ne peut pas se permettre de perdre
le soutien des démocraties populaires et accepte plusieurs concessions :
- En Roumanie (Ceausescu) qui obtient une autonomie de politique extérieure, reconnaît la RFA, et
invite Nixon à Bucarest en 1969.
- En Tchécoslovaquie, une libéralisation politique et économique est concédée au gouvernement
dès 1963 mais surtout à partir de l’arrivée au pouvoir de Dubcek en 1968 (ouverture aux
informations occidentales, recul de la censure, autonomie plus forte des entreprises, etc.).

2- Une continuité de l’affrontement entre les blocs

Le cas tchécoslovaque nous permet de comprendre que la logique de bloc est maintenue en dépit
de la « Détente ». En 1968, le printemps de Prague ouvre une période de libération de la parole et de
contestation de la mainmise soviétique sur le pays. Les autres démocraties populaires qui redoutent
une contagion poussent Leonid Brejnev (secrétaire du parti en URSS, successeur de Khrouchtchev).
Les troupes du Pacte de Varsovie entrent à Prague du 20 au 21 août 1968. Le président Dubcek
qui n’a rien fait pour empêcher les manifestations est arrêté. C’est une victoire militaire pour l’URSS, mais
un fiasco diplomatique et médiatique majeur. Cette répression des événements accentue l’essor des
idées libérales dans le bloc de l’Est (Roumanie, Yougoslavie, Albanie qui condamnent l’intervention).

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Les Etats-Unis ne sont pas épargnés par les dissensions au sein du bloc occidental. Les trois
principales épines dans le pied du projet étasunien sont :
- La France à partir du retour de De Gaulle en 1958 qui mène une politique de rapprochement
avec l’Est et refuse le virage atlantiste et fédéraliste que prend la construction européenne.
En 1966, la France qui le commandement intégré de l’OTAN.
- La RFA qui souhaite s’émanciper de la tutelle des Etats-Unis et mener une politique extérieure
souveraine à partir des années 60, en collaboration avec la France. A partir de 1969, le nouveau
chancelier Willy Brandt mène une politique d’ouverture à l’Est : c’est l’Ostpolitik. Plusieurs traités
sont signés avec l’URSS et la RDA, permettant de faire descendre les tensions. Cette politique est
très mal perçue aux Etats-Unis, car elle montre une fracture dans le camp occidental.
- L’Amérique latine où les guérillas anti-étasuniennes se développent alors que les Etats-Unis
soutiennent des coups d’Etat et des dictatures pour endiguer les idées socialistes.

Les deux Grands à la conquête des pays décolonisés :


La Guerre Froide s’étend à de nouveaux territoires jusqu’ici épargnés, notamment au fur et à
mesure des processus de décolonisations dans les empires européens dans les années 50, 60 et 70.
L’Afrique est un cas emblématique : les pays africains nouvellement indépendants se servent des deux
Grands pour s’affirmer comme Etats indépendants.
- A partir de 1957, les Etats-Unis se dote d’une véritable politique africaine avec le vice-Président
Nixon qui crée un Bureau pour l’Afrique au Département d’Etat.
- 1960, la CIA intervient en République démocratique du Congo (RDC, ancien Congo belge) pour
repousser le premier ministre Lumumba qui va à l’encontre des intentions belges et étasuniennes.
Le président pro-occidental Mobutu organise un coup d’Etat soutenu par les Etats-Unis. Lumumba
est torturé puis exécuté. L’URSS dénonce ces pratiques néocoloniales à l’ONU.
- En réponse, l’URSS resserre ses liens avec de nombreux Etats africains (Ghana, Ouganda, etc.).
- En 1975, une guerre civile en Angola devient un enjeu de Guerre Froide lorsque les Etats-Unis
(avec la France, l’Afrique du Sud et la Belgique) interviennent contre le MPLA socialiste soutenu
par Cuba et l’URSS. La guerre se termine par la victoire du MPLA en 1990, après 1M de victimes.

La Guerre du Vietnam, ou déconstruire le mythe de la « Détente » :


En 1954, la France perd la guerre d’Indochine et concède l’indépendance au Laos,
Cambodge et Vietnam. Le Vietnam est divisé en 2 : le Nord-Vietnam contrôlé par Ho Chi
Minh, héros de l’indépendance et communiste, et le Sud-Vietnam pro-occidental où les
Etats-Unis imposent un dictateur impopulaire.
Ho Chi Minh mène une politique habile en soutenant la résistance intérieure
communiste au Sud, menée par le Viêt-Cong. En 1964, la CIA organise une fausse
attaque contre des destroyers étasuniens pour créer de toute pièce un casus belli.
Les Etats-Unis adoptent la résolution du Tonkin et envahissent le Nord-Vietnam en 1964. En
1968, 536 000 soldats de la US Army sont présents sur le territoire vietnamien. La guerre est un fiasco
pour les Etats-Unis qui sont incapables de faire face à la résistance populaire du Viêt-Cong, très populaire.
De plus, des fortes oppositions mondiales émergent contre l’impérialisme étasunien. En 1967, un sondage
permet de constater que la majorité des citoyens aux Etats-Unis sont contre cette intervention.
La guerre du Vietnam dure jusqu’en 1973. Le résultat est glaçant : des millions
de morts, et de multiples traumatismes notamment après les bombardements au
napalm des troupes étasuniennes (1972). Pourtant, cette guerre est une défaite
totale pour les Etats-Unis : toute l’Asie du Sud-Est est communiste (Laos,
Cambodge, Vietnam) et le monde entier a été témoin de l’horreur de la guerre.

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III- ETUDES DE CAS

A- La conquête spatiale

La conquête de l'espace est un domaine où l'URSS se démarque clairement. Le 4 octobre 1957,


l'URSS envoie dans l'espace le premier satellite, Spoutnik 1, démontrant son avance sur les autres pays.
Un mois plus tard, Spoutnik 2 est envoyé, avec un passager à bord : Laïka, un chien.
Les Etats-Unis répondent en 1958 et envoient leur premier satellite dans l'espace, puis un satellite
météo, puis un satellite de surveillance, et en 1963, un satellite géostationnaire. La NASA est créée pour
refaire le retard accumulé par les Etats-Unis dans le secteur spatial.
Mais entretemps, en 1961, les soviétiques ont à nouveau emporté un succès symbolique. En effet,
ils ont envoyé le premier homme dans l'espace, Youri Gagarine. On est en pleine crise de Berlin : l'URSS
veut apparaître en position de force. Khrouchtchev jubile, les Etats-Unis sont humiliés. Eisenhower affirme
alors qu'avant la fin de la décennie, les Etats-Unis iront sur la Lune.
C’est chose faite, après de multiples essais ratés, le 20 juillet 1969. Neil Armstrong et Buzz Aldrin
deviennent les 2 premiers hommes à marcher sur la Lune. Cet événement a peu d’intérêt scientifique
mais il marque l’histoire de la conquête spatiale pour ses retombées médiatiques.
L’URSS parvient plusieurs fois à mener des missions d’intérêt technologique et scientifique majeur
notamment avec la première station spatiale habitée en 1971 (ancêtre de l’actuelle ISS) ou encore la
première satellisation d’une sonde autour d’une planète, technique toujours utilisée aujourd’hui.
En 1975, marquant l’apogée de la « Détente », une mission commune entre les deux Grands est
mise en place : la mission Apollo-Soyouz. Il s’agit de la première mission conjointe URSS/Etats-Unis.

B- Les Etats-Unis et la CIA en Amérique latine

Pour mener à bien leur politique d’endiguement anti-communiste, les Etats-Unis vont se doter d’un
arsenal d’institutions de renseignement : la CIA en 1947 (National Security Act), la NSA en 1952.
La CIA dispose de statuts d’exception lui assurant une autonomie importante. Ses actions sont
confidentielles, et ne peuvent être soumises au jugement des sénateurs du Congrès des Etats-Unis
notamment. Elle est placée sous la seule responsabilité du Président.

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Son budget est exempté des limitations habituelles en matière de renseignement : la CIA a le
pouvoir d’utiliser le budget fédéral avec une relative liberté, ce qui va lui permettre de développer des
nouvelles technologies de renseignement qui vont révolutionner l’espionnage pendant la Guerre Froide.
Cette autonomie va permettre à la CIA de devenir un acteur central dans la politique étrangère
des Etats-Unis, bien au-delà du mandat initial d’endiguement de la menace soviétique en tant que telle.
Les actions les plus connues de la CIA pendant la Guerre Froide résident notamment dans le
soutien financier ou militaire à plusieurs coups d'État et groupes armés, en particulier en Amérique Latine.
La présence étasunienne en Amérique latine est historique : les Etats-Unis ont toujours considéré ce
continent comme un espace sous influence qui relevait de la « chasse gardée » étasunienne. Déjà
Theodore Roosevelt (à ne pas confondre avec Franklin Roosevelt vu un peu plus haut) avait théorisé la
stratégie du Big Stick, censée affirmer le devoir de protéger les intérêts des Etats-Unis dans la région. La
CIA une fois créée en 1947 reprend ce flambeau et y perpétue la domination et l’influence de l’Oncle Sam.

- Guatemala 1954 :
Suite à l’élection du président Arbenz, dont le programme prévoit l’expropriation des terres non
exploitées par les grands propriétaires et la nationalisation de l’entreprise bananière gérée par les
Etats-Unis, un coup d’Etat éclate. Ce coup d’Etat est organisé par la CIA et est connu sous le nom de code
d’opération PBSUCCESS. Des paramilitaires insurgés entraînés et armés par la CIA à partir du Honduras
renversent le président et une junte militaire dirigée par le colonel Carlos Castillo Armas remplace l’ancien
gouvernement. S’ensuit pour le pays une longue période de violence et d’instabilité.

- Cuba 1961 :
Voyant que Fidel Castro mène à Cuba une politique économique défavorable aux intérêts des
Etats-Unis et que le dirigeant cubain se rapproche de l’URSS, la CIA décide d’intervenir. Les services
secrets organisent en 1961 un débarquement dans la Baie des Cochons. Ce débarquement est opéré par
1400 exilés cubains recrutés et entraînés par la CIA. Cette opération est un échec total pour Washington.

- Chili 1970 :
En 1970, le gouvernement d’Unité Populaire de Salvador Allende est au pouvoir. Le pays est
rapidement frappé par une crise économique ainsi qu’une agitation politique et sociale avec des
manifestations et grèves financées par la CIA. En 1973 a lieu un coup d’Etat provoquant la mort d’Allende
et son gouvernement est remplacé par une dictature militaire dirigée par le général Pinochet qui est
soutenu par les Etats-Unis, préférant donc une dictature à un gouvernement de gauche.

- Opération Condor (années 70) :


Il s’agit d’une campagne d’assassinats et de lutte anti-guérilla conduite dans les années 1970 par
les services secrets de différentes dictatures d’Amérique latine (Argentine, Chili, Uruguay, Paraguay,
Bolivie, Brésil) avec le soutien de la CIA. Cette alliance de services secrets transnationaux a participé à la
poursuite et aux assassinats des dissidents politiques parfois jusqu’en Europe. De hauts dignitaires des
Etats-Unis sont impliqués, notamment Henry Kissinger (secrétaire d’Etat) et Richard Nixon (Président).

Et bien d’autres exemples encore comme en République Dominicaine en 1965, au Nicaragua à


plusieurs reprises notamment dans la guerre civile entre 1979 et 1989, ou encore avec une implication
dans la mort du Che Guevara. Par ailleurs, la CIA mène ce type d’actions illégales à tous les coins du
globe, comme en Iran en 1953 pour repousser le premier ministre progressiste Mossadegh, et en Europe.

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En résumé, ce qu’il faut retenir :

⇒ La montée des tensions entre les deux Grands :


- Mars 1947, Truman énonce sa doctrine lors d’un discours belliciste : l’endiguement. Il promet une
aide économique à la Turquie et à la Grèce pour contrer le communisme.
- Juin 1947, le Plan Marshall est proposé en application de la doctrine. 16 pays acceptent, mais pas
l’URSS qui refuse l’ingérence des Etats-Unis dans la gestion des fonds. L’aide atteint $13,5Mds.
- Septembre 1947, réponse soviétique avec la doctrine Jdanov à Szklarska Poreba en Pologne lors
d’un discours engagé contre l'impérialisme étasunien et le plan Marshall.
- Février 1948, coup de Prague en Tchécoslovaquie. Un gouvernement communiste est désigné et
le pays bascule dans le giron soviétique.
- Juin 1948, Staline impose un blocus sur Berlin après la décision par les Etats-Unis de regrouper
les 3 zones d’occupation en un Etat libéral. Le blocus dure jusqu’en mai 1959 mais échoue face au
pont aérien des Etats-Unis qui permet de contourner les voies terrestres.

⇒ La militarisation de l’affrontement :
- 1949, l’OTAN (organisation du traité de l’Atlantique-Nord) est créé. Il s’agit d’une alliance militaire.
Les Etats-Unis sortent définitivement de l’isolationnisme.
- 1950, début de la Guerre de Corée. Les Etats-Unis profitent du boycott du Conseil de sécurité de
l’ONU par l’URSS pour créer un coalition intervenant dans le pays.
- 1955, création du Pacte de Varsovie, traité d’assistance militaire entre l’URSS et les démocraties
populaires. L’objectif est de maintenir le bloc face aux ennemis de l’extérieur comme de l’intérieur.

⇒ Un affrontement idéologique par la répression, la censure et la propagande :


- 1950, début de la chasse aux sorcières (maccarthysme) aux Etats-Unis ainsi que des opérations de
propagande de la CIA en Europe (Mouvement Paix et Liberté).
- 1950, purges staliniennes en URSS avec une répression automatique de toute dissidence, dans la
culture et l’administration. C’est l’âge d’or des goulags.
- 1953, les époux Rosenberg sont exécutés pour espionnage lors d’un procès expéditif (Etats-Unis).

⇒ Mort de Staline et « coexistence pacifique » (1953-1962) :


- Mars 1953, Staline meurt sans héritier désigné. Finalement, en 1955, Khrouchtchev partisan d’une
ligne modérée obtient le pouvoir en URSS et impose la « déstalinisation ».
- 1955, Khrouchtchev reconnaît la RFA et met fin à l’occupation de l’Autriche par l’URSS.
- 1956, 20ème Congrès du Parti Communiste, Khrouchtchev stipule que la logique de bloc n’est pas
la finalité de la politique soviétique. C’est l’apogée de la politique de « déstalinisation » en URSS.
- 1956, l’action conjointe des Etats-Unis et de l’URSS met fin à la crise de Suez.
- 1959, Nixon (Vice-Président des Etats-Unis) se rend à Moscou pour une exposition, suivi quelques
semaines plus tard par la visite officielle de Khrouchtchev aux Etats-Unis.

⇒ Retour des conflits et menace d’une 3GM nucléaire :


- 1958, début de la seconde crise de Berlin face aux passages de RDA à l’Ouest par Berlin-Ouest.
Les discussions sont polluées par l’affaire de l’avion-espion (U2) étasunien abattu en URSS (1960).
Les Etats-Unis refusent de s’excuser. En août 1961, le Mur de Berlin est construit.
- 1961, les Etats-Unis opposés à Fidel Castro tentent un débarquement à Cuba. Castro demande
l’aide d’URSS qui livre des missiles nucléaires. En 1962, un avion-espion (U2) étasunien détecte
les missiles : c’est la crise de Cuba. Les Etats-Unis imposent un blocus et l’URSS retire les missiles.

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⇒ La « Détente » (1962-1979), une période d’apaisement… :
- 1963, libéralisation politique et économique en Tchécoslovaquie accordée par l’URSS.
- 1968, traité de non-prolifération nucléaire (TNP) par environ 40 Etats (pas la France, ni la Chine).
- 1972, premier accord commercial entre les Etats-Unis et l’URSS.
- 1972, accords SALT-I permettant le gel du nombre de missiles intercontinentaux pour 5 ans.
- 1975, première collaboration spatiale entre les deux Grands (mission Apollo-Soyouz).
- 1975, conférence d’Helsinki (CSCE, conférence sur la sécurité et la coopération en Europe)
réunissant tous les pays d’Europe (Est et Ouest) avec l’URSS et les Etats-Unis et assurant la
reconnaissance et l'inviolabilité des frontières en Europe.

⇒ … mais aussi de permanence des tensions :


- Années 60, apogée de la contestation contre l’hégémonie des Etats-Unis en Europe autour du
couple franco-allemand Charles de Gaulle (France) - Willy Brandt (RFA) et son Ostpolitik (1969).
- 1964, résolution du Tonkin des Etats-Unis qui interviennent au Vietnam pour contrer Ho Chi Minh
(communiste) et le Viêt-Cong. La guerre est un fiasco total et ternit de façon durable l’image des
Etats-Unis qui ont multiplié les exactions et les crimes de guerre. Elle se termine en 1973 et la
quasi-totalité de l’Asie du Sud-Est devient communiste.
- 1968, début du Printemps de Prague. Face aux contestations, les troupes du Pacte de Varsovie
entrent dans la ville en août 1968. La répression est très violente et discrédite l’URSS.
- 1970, coup d'État au Chili orchestré par les Etats-Unis et la CIA. C’est le début de la dictature très
violente et sanglante du général Pinochet.

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CHAPITRE 3 - UNE NOUVELLE DONNE POLITIQUE : L'ÉMERGENCE DU
TIERS-MONDE (1945-1970)

CHAPITRE 4 - LA FRANCE : NOUVELLE PLACE DANS LE MONDE (1945-1970)

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