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REB 43 1985 France p. 243-251
Elisabeth Malamut, "À propos de Bessai d'Ephèse". — Partant de la "Vie de Lazare le Galèsiôtès", qui mentionne un bien-fonds
dit « Bessai » et donné à Lazare par l'empereur Constantin Monomaque, l'auteur corrige la date habituellement attribuée à la
mort du saint (la date réelle est le 7 novembre 1053) et tente de localiser précisément le lieu-dit. II montre ainsi que l'on ne peut
en aucune manière identifier Bessai d'Ephèse à un autre bien-fonds dit « Bessai », qui était situé près d'Ataia et qui fit l'objet d'un
chrysobulle du même empereur en faveur de la Néa Monè de Chios en mai 1054.
Malamut Elisabeth. À propos de Bessai d'Éphèse. In: Revue des études byzantines, tome 43, 1985. pp. 243-251.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rebyz_0766-5598_1985_num_43_1_2177
A propos de Bessai d'Éphèse
Elisabeth MALAMUT
1. Vie de saint Lazare le Galèsiôtès : AASS, nov., III, p. 508-588 (nous renvoyons
ci-dessous aux paragraphes de cet ouvrage cité désormais Vie de Lazare) ; au sujet des
fondations de Lazare, consulter R. Janin, Les églises et les monastères des grands centres
byzantins,
" Paris 1975, p. 241-250.
2. Vie de Lazare, 79, 246.
3. Ibid., 254.
4. Voir ainsi R. Janin, op. cit., p. 246 n. 6.
5. Cette date du 7 novembre est néanmoins en contradiction avec un autre passage de
la Vie où il est mentionné que Lazare est mort le jour de la saint André ( Vie de Lazare,
170), qui tombe le 30 novembre. Ni en 1053, ni en 1054 le 30 novembre ne tombait le
dimanche, ce qui nous incite à retenir comme plus véridique la date du 7 novembre.
Revue des Études byzantines 43. 1985. p. 243-251.
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de Lazare, rédigée huit jours avant sa mort6, donc le 31 octobre 1053, d'un
chrysobulle impérial daté de 10547. Nous reviendrons sur ce dernier
document, mais il importe de savoir dès lors que la diatypôsis de Lazare est
antérieure au chrysobulle de mai 1054 portant sur une donation de mille
modia de blé à partir du bien-fonds dit Bèssai (Βησσαι) près d'Ataia.
Si nous savons précisément à quelle date a été rédigé le règlement des
diverses fondations de Lazare, l'historique du monastère de Bessai avant
cette date n'apparaît pas clairement dans la Vie de Lazare, qui comporte
pourtant de nombreuses mentions de Bessai8. Il est rappelé que Bessai se
trouvait en dehors du mont Galèsios9. Ce dernier était situé au nord
d'Éphèse, sur la rive droite du Caystros et non loin de la mer. Strabon a
indiqué clairement sa localisation en le plaçant près de l'ancienne Colo
phon10. Cette localisation n'est pas corroborée par la Vie même de Lazare,
qui mentionne des toponymes aujourd'hui disparus et qui n'apparaissent
pas dans d'autres sources byzantines". Néanmoins des sources byzantines
tardives12, qui décrivent les mouvements des armées turque et ottomane
pendant la « guerre civile » en 1402-141313, confirment les données de
Strabon : en 1406 Soliman envahit l'Asie, marche sur Pergame, Smyrne et
Mésaulion situé, est-il précisé, à six heures de marche d'Éphèse. Or il y
avait un pont sur le Caystros entre Mésaulion et Éphèse, qui donnait accès
au mont Galèsios14. Quelques années plus tard l'itinéraire suivi par Ciineyd
corrobore cette localisation, puisque « de Nymphae il (Ciineyd) prend tout
droit, puis laisse la route à droite, traverse un ruisseau et arrive à un village
dit Triakonta. Traversant alors les régions maritimes qui bordent le mont
Galèsios, il arrive à Ipsili »15. Or Ipsili est une place maritime bien connue,
située près de l'antique Lébédos16. Il n'est pas inutile de rappeler toutes ces
où il était resté de 1005 à 1012, que Lazare prit la décision de partir vers
le mont Galèsios, qui se trouvait en face23. Nous savons par ailleurs que
Bessai était un endroit bien moins déshérité que le mont Galèsios et que
l'on pouvait y commercer facilement24 ; or rappelons que le monastère
d'Hagia Marina était situé sur la route25. Enfin doit-on tirer argument du
fait que Bessai soit cité dans un passage où il est mentionné que deux
moines sont partis de Galèsios pour se plaindre à l'évêque de Magnésie (il
s'agit de Magnésie du Méandre). Ils sont revenus sur la montagne. Puis l'un
est retourné à Magnésie, l'autre est allé à Bessai26. Y avait-il un lien entre
Magnésie et Bessai ? Bessai se trouvait-il à la limite des circonscriptions
d'Éphèse et de Magnésie ? En tout cas, il faudrait pouvoir expliquer
pourquoi des moines de Galèsios, qui se trouvait dans le ressort du
métropolite d'Éphèse27, sont allés trouver l'évêque de Magnésie.
La chronologie de la fondation du monastère de Bessai est également
difficile à établir. Nous avons un terminus ante quern, la rédaction de la
diatypôsis, qui est du 31 octobre 1053. Nous savons que la donation de
Bessai a été faite par l'empereur Constantin Monomaque en sa mémoire et
en celle de Maria Sklèraina28. Nous savons également que cette dernière
avait en plus fait don à Lazare de sept cent-vingt nomismata. Il est
vraisemblable que l'ensemble de ces donations ont eu lieu à la même
époque, et donc avant la mort de Maria Sklèraina, survenue vers 104629.
Mais la construction du monastère de la Théotokos à Bessai n'a pas été
immédiate. Lazare, nous le constatons à la lecture de sa Vie, a bien tardé.
Il ne voulait pas aller s'établir lui-même à Bessai malgré les multiples
pressions dont il était l'objet et le harcèlement continu du métropolite
d'Éphèse30. Même une lettre impériale 31 ne le décida pas à construire le
monastère sur-le-champ. Il avait certes le dessein, nous dit son biographe,
de construire l'église de la Théotokos, surtout pour rassurer les moines qui
craignaient d'être chassés du Galèsios à la mort du saint, mais il remettait
la fondation à plus tard32. Néanmoins cette fondation ne dut pas survenir
immédiatement avant sa mort, mais la précéder de plusieurs mois ou même
39. JGR, I, p. 637 : Nicéphore, dans son histoire de la Néa Monè de Chios, note la
confirmation de ce chrysobulle de Constantin Monomaque par un chrysobulle de
Constantin X Doukas daté de mai 1062, dont nous ne possédons aujourd'hui qu'un
fragment (JGR, I, p. 639). Voir G. Phôteinos, Ta Νεαμονήσια, Chios 1865, p. 97-98.
n° 40.
16, W.
p. 75-76.
Seibt, Die Skier oi. Eine prosopographisch-sigillographische Studie, Vienne 1976,
41. Michel Psellos, Chronographie : Ε. Renauld, II, p. 45-46.
À PROPOS DE BESSAI D'ÉPHÈSE 249
42. N. Oikonomidès, art. cit. (n. 29), p. 242 ; sur Bessai, Fauteur suggère que ce bien
du Tropaiophore en mai 1054 fut donné par la suite à Lazare en novembre 1054, au
moins en partie (voir p. 241 n. 24).
43. B. K. Stéphanidès, Οι κώδικες της Άδριανουπόλεως, BZ 14, 1905, p. 593.
44. JGR, I, p. 637 : άπό τοΟ αφορισμένου τφ σεκρέτω τοο Τροπαιοφόρου κτήματος των
Βησσών κατά την "Αταιαν διακειμένου.
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45. Strabon, 13, 1, 51 : Jones, VI, p. 102. Voir à ce sujet L. Robert, Villes d'Asie
Mineure. Études de géographie ancienne1, Paris 1962, p. 171 s.
46. Synecdemos de Hiéroclès : Honigmann, p. 6633.
47. L. Robert, op. cit.
48. Constantin Porphyrogénète, De Administrando lmperio : Moravcsik-Jenkins,
ch. 50i6 ; Skylitzès : J. Thurn, p. 15948.
49. Sur Karatepe dans la région de Smyrne, cf. H. Grégoire, Recueil des Inscriptions
grecques chrétiennes d'Asie Mineure2, Amsterdam 1968, p. 25, n° 87. A ce sujet, voir
Hélène Ahrweiler, L'histoire et la géographie de la région de Smyrne entre les deux
occupations turques (1081-1317) particulièrement au xme siècle, TM 1, 1965, p. 62, 66.
50. Vie de Joannice : AASS, nov., II,, p. 378.
51. L. Robert, op. cit., p. 192.
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Elisabeth Malamut
C.N.R.S. - UA 186