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Conception de commandes robustes

© LAVOISIER, 2002
LAVOISIER
11, rue Lavoisier
75008 Paris
Serveur web : www.hermes-science.com

ISBN 2-7462-0408-8

Catalogage Electre-Bibliographie
Bernussou, Jacques*Oustaloup, Alain (sous la direction de)
Conception de commandes robustes
Paris, Hermès Science Publications, 2002
ISBN 2-7462-0408-8
RAMEAU : commande robuste
DEWEY : 629.5 : Autres branches de l’art de l’ingénieur.
Commande automatique. Robotique

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soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du
Code de la propriété intellectuelle.
Conception
de commandes
robustes

sous la direction de

Jacques Bernussou
Alain Oustaloup
Il a été tiré de cet ouvrage
30 exemplaires hors commerce réservés
aux membres du comité scientifique,
aux auteurs et à l’éditeur
numérotés de 1 à 30
Conception de commandes robustes
sous la direction de Jacques Bernussou et Alain Oustaloup

fait partie de la série SYSTÈMES AUTOMATISÉS dirigée par Claude Foulard

TRAITÉ IC2 I NFORMATION – COMMANDE – COMMUNICATION


sous la direction scientifique de Bernard Dubuisson

Le traité Information, Commande, Communication répond au besoin


de disposer d'un ensemble complet des connaissances et méthodes
nécessaires à la maîtrise des systèmes technologiques.
Conçu volontairement dans un esprit d'échange disciplinaire, le traité IC2
est l'état de l'art dans les domaines suivants retenus par le comité
scientifique :
Réseaux et télécoms
Traitement du signal et de l'image
Informatique et systèmes d'information
Systèmes automatisés
Productique

Chaque ouvrage présente aussi bien les aspects fondamentaux


qu'expérimentaux. Une classification des différents articles contenus
dans chacun, une bibliographie et un index détaillé orientent le lecteur
vers ses points d'intérêt immédiats : celui-ci dispose ainsi d'un guide pour
ses réflexions ou pour ses choix.
Les savoirs, théories et méthodes rassemblés dans chaque ouvrage ont
été choisis pour leur pertinence dans l'avancée des connaissances ou pour
la qualité des résultats obtenus dans le cas d'expérimentations réelles.
Liste des auteurs

Pierre APKARIAN
ONERA-CERT
Toulouse

Denis ARZELIER
LAAS-CNRS
Toulouse

Jacques BERNUSSOU
LAAS-CNRS
Toulouse

Gustavo Henrique DA COSTA OLIVEIRA


LAS-CCET-PUCPR
Curitiba, Brésil

Benoît CLÉMENT
Supélec
Gif-sur-Yvette

Gilles DUC
Supélec
Gif-sur-Yvette

Gérard FAVIER
I3S
Université de Nice Sophia-Antipolis

Per Olof GUTMAN


Faculty of Agricultural Engineering-Technion
Haïfa, Israël

Ioan-Doré LANDAU
LAG
Ecole nationale supérieure d’ingénieurs électriciens de Grenoble

Jochen LANGER
LAG
Ecole nationale supérieure d’ingénieurs électriciens de Grenoble
Patrick LANUSSE
LAP
Université Bordeaux 1

Philippe DE LARMINAT
IRCCyN
Ecole centrale de Nantes

Yann LE GORREC
ONERA-CERT
Toulouse

Raphaël LINKER
Faculty of Agricultural Engineering-Technion
Haïfa, Israël

Jean-François MAGNI
ONERA-CERT
Toulouse

Benoît MATHIEU
LAP
Université Bordeaux 1

Alain OUSTALOUP
LAP
Université Bordeaux 1

Dimitri PEAUCELLE
LAAS-CNRS
Toulouse

Paulo César PELLANDA


ONERA-CERT
Toulouse

Jocelyn SABATIER
LAP
Université Bordeaux 1
Table des matières

Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

Chapitre 1. QFT : une méthode classique pour la synthèse


de commande robuste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
Per Olof GUTMAN et Raphaël LINKER
1.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
1.1.1. Synthèse classique en boucle fermée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
1.1.2. Alternatives à la synthèse en boucle fermée
avec un degré de liberté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
1.1.3. Le problème de commande robuste. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
1.2. Le rôle de la rétroaction en synthèse robuste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
1.2.1. Boucle de rétroaction et incertitude. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
1.2.2. Le coût de rétroaction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
1.3. Incertitude du système. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
1.4. Spécifications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
1.5. Les frontières d’Horowitz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
1.6. Synthèse du compensateur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
1.7. Fermeture de la boucle et synthèse du préfiltre . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
1.8. Simulation de la boucle fermée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
1.9. Quand la synthèse échoue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
1.10. QFT et des problèmes plus complexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
1.11. Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

Chapitre 2. Un tour d’horizon sur la commande CRONE


de procédés scalaires et multivariables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
Alain OUSTALOUP, Benoît MATHIEU, Jocelyn SABATIER, Patrick LANUSSE
2.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
2.2. Les trois générations de commande CRONE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
2.3. Analyse de la relaxation de l’eau sur une digue poreuse . . . . . . . . . . . . 56
10 Conception de commandes robustes

2.4. Processus d’étude et interface eau-digue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57


2.5. Equation différentielle d’ordre non entier comme modèle dynamique
régissant la relaxation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
2.6. Robustesse fractale : demi-droites d’iso-amortissement
et gabarit fréquentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
2.6.1. Demi-droites d’iso-amortissement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
2.6.2. Gabarit fréquentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
2.7. De la robustesse fractale à la commande CRONE
de deuxième génération . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
2.7.1. Domaines d’incertitudes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
2.7.2. Domaines d’incertitudes de la boucle ouverte
ayant conduit au gabarit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
2.7.3. Adéquation du gabarit aux domaines d’incertitudes . . . . . . . . . . . 66
2.8. Généralisation du gabarit à travers la commande CRONE
de troisième génération . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
2.8.1. Premier niveau de généralisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
2.8.2. Deuxième niveau de généralisation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
2.8.3. Transfert en boucle ouverte intégrant le gabarit curviligne . . . . . . 74
2.8.4. Optimisation du comportement en boucle ouverte . . . . . . . . . . . . 75
2.8.5. Synthèse paramétrique du régulateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
2.8.6. Application. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
2.9. Commande CRONE multivariable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
2.9.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
2.9.2. Cas des procédés multivariables stables à minimum de phase . . . . 84
2.9.3. Application. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
2.10. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
2.11. Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95

Chapitre 3. Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR :


une approche robuste par placement de pôles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99
Philippe DE LARMINAT
3.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99
3.2. La restauration de boucle par placement de pôles. . . . . . . . . . . . . . . . . 101
3.2.1. Préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
3.2.2. Les degrés des polynômes en présence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102
3.2.3. Analyse du premier principe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104
3.2.4. Analyse du premier mode de restauration : F → A . . . . . . . . . . . . 105
3.2.5. Analyse du deuxième mode de restauration : C → B . . . . . . . . . . 106
3.2.6. Commentaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106
3.3. Stratégies concrètes de placement de pôles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107
3.3.1. Position du problème. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107
3.3.2. Placement des pôles dominants (détermination de F(s)) . . . . . . . . 108
3.3.3. Placement des pôles accessoires (détermination de C(s)) . . . . . . . 110
3.3.4. Principes de réglage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
Table des matières 11

3.4. Application aux régulateurs PID . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112


3.4.1. Présentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
3.4.2. Application à l’intégrateur retardé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113
3.4.3. Réglage final du régulateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114
3.4.4. Commentaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115
3.5. Le placement des pôles à travers la commande LQG . . . . . . . . . . . . . . 116
3.5.1. Difficultés relatives au placement des pôles auxiliaires. . . . . . . . . 116
3.5.2. Une formulation standard élémentaire
des problèmes de régulation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116
3.5.3. Une reformulation standard pour un régulateur intégral . . . . . . . . 118
3.5.4. Interprétation du LQG/LTR en termes de placement de pôles . . . . 119
3.5.5. Détermination des pondérations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120
3.5.6. Renforcement de la robustesse de la cible . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121
3.5.7. Généralisation multivariable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123
3.6. Exemples d’applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124
3.6.1. Premier exemple : un système flexible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124
3.6.2. Deuxième exemple : régulation multivariable
en centrale thermique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127
3.7. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
3.8. Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130

Chapitre 4. Placement de pôles avec calibrage de fonctions de sensibilité


par optimisation convexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
Jochen LANGER et Ioan-Doré LANDAU
4.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
4.2. Eléments de base du placement de pôles
avec calibrage de fonctions de sensibilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135
4.2.1. Schéma de la boucle fermée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135
4.2.2. Fonctions de sensibilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136
4.2.3. Formulation du problème. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137
4.3. Paramétrisation convexe du contrôleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137
4.3.1. La paramétrisation du contrôleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137
4.3.2. Paramétrisation de α et β . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139
4.3.3. Bornes supérieures sur les fonctions de sensibilité . . . . . . . . . . . . 140
4.3.4. δ-stabilité des pôles auxiliaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
4.4. Synthèse du régulateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
4.4.1. Etapes de conception. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
4.4.2. Spécification des performances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143
4.4.3. Paramètres d’optimisation et optimisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143
4.4.4. Améliorations du résultat initial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145
4.4.5. Optimisations du préfiltre T (poursuite) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145
4.5. Application sur le bras souple 360° . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145
4.5.1. Description du procédé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145
4.5.2. La conception du régulateur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146
12 Conception de commandes robustes

4.6. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152


4.7. Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

Chapitre 5. La commande multimodèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155


Jean-François MAGNI et Yann LE GORREC
5.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
5.2. Notations et rappels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156
5.2.1. Rappel : placement de valeurs/vecteurs propres classique . . . . . . . 158
5.2.2. Extension triviale au calcul de gains dynamiques. . . . . . . . . . . . . 159
5.2.3. Rappel : sensibilité des pôles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
5.3. Contraintes exprimant le placement et le déplacement des pôles . . . . . . 160
5.3.1. Principe du placement de valeurs/vecteurs propres
par un gain dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
5.3.2. Principe du déplacement de pôles avec un gain dynamique. . . . . . 164
5.3.3. Comparaison du placement et du déplacement de pôles . . . . . . . . 165
5.4. Calcul du gain dynamique : placement et déplacement de pôles . . . . . . 167
5.4.1. Calcul du gain dynamique : approche LQP . . . . . . . . . . . . . . . . . 167
5.4.2. Calcul du gain dynamique : approche LMI . . . . . . . . . . . . . . . . . 170
5.5. Extension à la synthèse multimodèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171
5.5.1. Exemple de contraintes multimodèles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172
5.5.2. Construction de l’ensemble des contraintes multimodèles. . . . . . . 173
5.6. Structuration du gain et gabarits fréquentiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 176
5.6.1. Structuration du gain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 176
5.6.2. Gabarits fréquentiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178
5.7. Synthèse directe de gains programmés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179
5.8. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
5.9. Annexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
5.9.1. Démonstration de la proposition 5.1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181
5.9.2. Démonstration de la proposition 5.2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183
5.9.3. Démonstration des propositions 5.3 et 5.4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183
5.9.4. Démonstration de la proposition 5.5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185
5.10. Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 186

Chapitre 6. Fonctions de Lyapunov dépendant des paramètres


pour l’analyse et la synthèse robuste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189
Denis ARZELIER, Jacques BERNUSSOU, Dimitri PEAUCELLE
6.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189
6.2. Les modèles LTI incertains . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190
6.2.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190
6.2.2. Les inclusions différentielles linéaires polytopiques . . . . . . . . . . . 192
6.2.3. Les modèles affines paramétriques réels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193
6.2.4. Illustration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194
6.3. Analyse robuste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 196
6.3.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 196
Table des matières 13

6.3.2. Analyse robuste en stabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 197


6.3.3. Analyse robuste en performance. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203
6.4. Synthèse robuste. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215
6.4.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215
6.4.2. DR-stabilisation robuste par retour d’état. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215
6.4.3. Synthèse en temps discret garanti H2 et H∞ . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
6.4.4. Synthèse nominale multi-objectif en temps discret. . . . . . . . . . . . 219
6.5. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 223
6.6. Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 223

Chapitre 7. Synthèse multicritère par retour de sortie :


utilisation de la paramétrisation de Youla et de l’optimisation LMI . . . . . . 229
Benoît CLÉMENT et Gilles DUC
7.1. Notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 231
7.2. Définitions de quelques critères . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 233
7.2.1. Norme H∞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 233
7.2.2. Norme H2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234
7.2.3. Propriété d’α-stabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 235
7.2.4. Modification par congruence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 236
7.3. Paramétrisation de Youla. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 238
7.3.1. Boucle bien posée et stabilité interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 238
7.3.2. Paramétrisation de Youla. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239
7.3.3. Correcteur de type observateur/retour d’état . . . . . . . . . . . . . . . . 241
7.4. Equivalence d’un correcteur
avec une structure observateur/retour d’état. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 242
7.5. Optimisation du paramètre de Youla. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 245
7.5.1. Propriété de supplémentarité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 246
7.5.2. Linéarisation des inégalités matricielles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 247
7.5.3. Augmentation des degrés de liberté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249
7.6. Algorithme. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
7.7. Application à un bras flexible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
7.7.1. Le système étudié . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
7.7.2. Spécifications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 253
7.7.3. Synthèse multicritère : première approche. . . . . . . . . . . . . . . . . . 254
7.7.4. Résultats de la première approche. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 255
7.7.5. Algorithme de synthèse : deuxième approche . . . . . . . . . . . . . . . 259
7.7.6. Résultats de la deuxième approche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261
7.8. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
7.9. Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
7.10. Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
14 Conception de commandes robustes

Chapitre 8. Une méthode d’interpolation de structures


estimation/commande pour des compensateurs H∞ et µ . . . . . . . . . . . . . . . 269
Paulo César PELLANDA et Pierre APKARIAN
8.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 269
8.2. Structures estimation/commande . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273
8.2.1. Formulation du problème. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273
8.2.2. La structure estimation/commande équivalente . . . . . . . . . . . . . . 277
8.2.3. Sélection des valeurs et restrictions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 279
8.2.4. Algorithme pour le calcul des compensateurs équivalents. . . . . . . 287
8.3. Une méthode d’interpolation continue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 290
8.3.1. Continuation des sous-espaces invariants sélectionnés . . . . . . . . . 291
8.3.2. Interpolation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 296
8.4. Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 297
8.4.1. Un exemple du deuxième ordre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 298
8.4.2. Un exemple de pilotage d’un missile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 302
8.5. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 310
8.6. Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313

Chapitre 9. Commande prédictive robuste


basée sur une modélisation de Laguerre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 317
Gérard FAVIER et Gustavo Henrique DA COSTA OLIVEIRA
9.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 317
9.2. Rappels de résultats fondamentaux sur la stratégie MPC . . . . . . . . . . . 320
9.2.1. Modèle et prédicteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 320
9.2.2. Critère de performance et calcul de la commande . . . . . . . . . . . . 322
9.2.3. Propriétés et extensions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 324
9.3. Modélisation de Laguerre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 331
9.3.1. Modèle de Laguerre sous forme de schéma-bloc . . . . . . . . . . . . . 332
9.3.2. Modèle de Laguerre sous forme d’équations d’état . . . . . . . . . . . 335
9.3.3. Extensions du modèle de Laguerre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 337
9.3.4. Calcul des coefficients de Laguerre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 338
9.3.5. Modèle incertain de Laguerre. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 338
9.3.6. Prédicteur à i pas de sorite d’un modèle de Laguerre . . . . . . . . . . 341
9.4. Algorithmes RMPC utilisant une modélisation de Laguerre . . . . . . . . . 344
9.4.1. Critère quadratique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 345
9.4.2. Critère basé sur la norme infinie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 349
9.4.3. Critère basé sur la norme l1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 352
9.5. Résultats de simulation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 354
9.6. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 357
9.7. Annexe : démonstration du théorème 9.4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 358
9.8. Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 359

Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 365
Avant-propos

Les modèles des procédés étant par nature incertains, la robustesse des méthodes
de synthèse de commande constitue depuis deux décennies un objectif fondamental.
Cette notion de robustesse définit l’insensibilité ou la quasi-insensibilité de la
commande aux variations paramétriques ou aux dynamiques non modélisées du
procédé. Derrière cette définition générale et suite à une volonté de clarification
initialisée au début des années 1990, chacun s’accorde à ne plus uniquement
considérer la robustesse en stabilité de la loi de commande. La robustesse en
performance, qui est beaucoup plus générale, est maintenant au cœur de toutes les
préoccupations.

Comme les deux ouvrages qui ont précédé celui-ci, l’objectif ici est la
présentation aussi exhaustive que possible des méthodes de synthèse proposées par
les différentes écoles de pensée actuelles. Tendant toutes vers des objectifs
semblables, ces méthodes peuvent être considérées comme complémentaires.
Toutefois, la commande robuste étant un sujet extrêmement large et qui reste encore
ouvert, elles sont de nature très variée et utilisent des outils mathématiques assez
différents. En effet, elles consistent en une mise en forme de la réponse fréquentielle
en boucle ouverte pour les approches QFT et CRONE, présentées respectivement
aux chapitres 1 et 2. Elles sont fondées sur le placement des pôles et/ou des vecteurs
propres en boucle fermée pour les chapitres 3, 4 et 5. Au chapitre 6, l’obtention de
performances robustes est subordonnée à l’obtention de fonctions de Lyapunov
dépendant de paramètres, tandis qu’elle découle d’une optimisation multicritère au
chapitre 7 et d’une interpolation entre différents correcteurs au chapitre 8. Au
chapitre 9, cette robustesse résulte à chaque instant et sur un horizon fuyant de la
minimisation entre une trajectoire de référence et la sortie du procédé.

Les méthodes présentées aux chapitres 1, 2 et 3 peuvent être indifféremment


appliquées à des systèmes à temps continu et discret. En revanche, les approches
présentées aux chapitres 5, 7 et 8 sont réservées aux systèmes à temps continu,
16 Conception de commandes robustes

tandis que les approches présentées aux chapitres 4, 6 et 9 sont plus particulièrement
consacrées aux systèmes à temps discret.

Un effort tout particulier a été fourni par les auteurs pour présenter l’application
de leur technique. Les applications correspondantes sont parfois de type
académique, comme aux chapitres 1, 2, 8 et 9 et reposent parfois sur des procédés
réels, comme aux chapitres 3, 4, 7 et 8.

Après la vague H• qui a déferlé sur l’automatique au cours des années 1980, la
lecture des chapitres 5, 6 et 7 permettra de remarquer que c’est maintenant aux
inégalités linéaires matricielles (LMI en anglais) d’être de plus en plus utilisées. Les
outils H∞ n’ont cependant pas disparu, ils ont tout simplement été intégrés et digérés
par la communauté qui les considère maintenant comme classiques.

En ce qui concerne l’organisation de l’ouvrage, la rédaction est ponctuée par


neuf chapitres dont le contenu est décrit ci-après.

Le chapitre 1, rédigé par Per Olof Gutman et Raphaël Linker, présente la


méthode de synthèse robuste QFT (Quantitative Feedback Theory) initialement
développée par le professeur Isaac Horowitz dans les années 1970. Cette approche
fréquentielle permet de prendre en compte l’incertitude portant sur le procédé par
des domaines d’incertitudes fréquentiels nommés « gabarits » et construits pour un
ensemble de fréquences sur le diagramme de Black-Nichols. Cette modélisation
totalement structurée de l’incertitude permet d’obtenir des commandes à la fois
robustes et aussi performantes que possible. Au lieu de résoudre le problème de
synthèse pour l’ensemble des états possibles du procédé, l’approche QFT repose sur
la synthèse du régulateur pour un système nominal choisi arbitrairement, tout en
satisfaisant l’ensemble des spécifications du cahier des charges pour l’ensemble des
procédés. Pour cela, les spécifications temporelles initiales sont tout d’abord
traduites en spécifications fréquentielles. En tenant compte des gabarits
d’incertitudes, ces spécifications sont ensuite traduites en contraintes graphiques.
Tracées sur le diagramme de Black-Nichols, ces contraintes définissent des
frontières délimitant les différentes zones où doit se situer la réponse fréquentielle en
boucle ouverte nominale pour différentes fréquences. Un régulateur est d’abord
utilisé pour modeler le lieu de Black-Nichols en boucle ouverte et respecter ainsi la
partie du cahier des charges relative au rejet des perturbations et à l’incertitude
portant sur le suivi de consigne. Un préfiltre est ensuite synthétisé afin de respecter
la partie du cahier des charges relative à la dynamique en suivi de consigne. Tout au
long de ce chapitre, un exemple simple est traité et permet d’illustrer l’ensemble des
étapes du processus de synthèse.

Le chapitre 2, rédigé par Alain Oustaloup, Benoît Mathieu, Jocelyn Sabatier et


Patrick Lanusse, présente tout d’abord la deuxième génération de la commande
Avant-propos 17

CRONE à partir d’une interprétation du modèle dynamique d’ordre non entier


régissant la relaxation naturelle robuste de l’eau sur une digue poreuse. Dans cette
interprétation, le processus de relaxation est décrit par une équation différentielle
d’ordre non entier, dont la représentation fréquentielle dans le plan de Black conduit
à un gabarit vertical en boucle ouverte. Dans la suite du chapitre, le gabarit vertical
est généralisé. Représenté dans le plan de Black par un segment de droite de position
et de direction quelconques, le gabarit généralisé est décrit par une transmittance
fondée sur l’intégration non entière complexe. Le gabarit généralisé est intégré au
transfert en boucle ouverte, qui permet également de prendre en compte les
spécifications de précision aux basses fréquences et les spécifications de limitation
de la sensibilité de l’entrée aux hautes fréquences. La recherche du gabarit optimal
au sens de la minimisation des variations du degré de stabilité et sous des contraintes
de mise en forme des fonctions de sensibilité nominales et reparamétrées définit le
premier degré de généralisation de la commande. Le deuxième niveau de
généralisation est fondé sur un gabarit curviligne, interprété comme résultant du lieu
asymptotique de Black d’une suite de gabarits généralisés. Dans la dernière partie,
ce chapitre propose une extension de la commande CRONE de troisième génération
aux systèmes multivariables. Cette extension est fondée sur la préparamétrisation
non entière complexe de la matrice de transfert en boucle ouverte nominale. Une
application à un cas d’étude illustre les performances de la commande CRONE
multivariable.

Le chapitre 3, rédigé par Philippe de Larminat, est intitulé Des régulateurs PID à
la commande LQG-LTR. On pourrait penser que tout a été dit sur les PID, le
placement de pôles et le LQG. Ce chapitre n’en contient pas moins des avancées
notables. Tout d’abord, la synthèse des PID par placement de pôles ne relève pas ici
d’un souci d’unification académique, mais permet de se libérer de l’empirisme qui
règne depuis Ziegler et Nichols, et surtout d’obtenir des réglages robustes et adaptés
à une large classe d’applications. Concernant la commande par placement de pôles,
la robustesse résulte d’une formulation simple et originale du principe de la
restauration du transfert de boucle (Loop Transfert Recovery, LTR). Cette
formulation rend la pratique du LTR accessible sitôt acquis des rudiments de
l’automatique, et surtout conduit à des stratégies de placement de pôles efficaces et
rationnelles. La mise en œuvre (plus classique) du LTR par optimisation H2 apparaît
comme un prolongement nécessaire dans le cas des processus plus difficiles à
traiter : multivariables ou affectés de zéros proches de l’axe imaginaire. Un apport
significatif réside dans les modalités de détermination des matrices d’intensité des
bruits et de pondérations, à travers des paramètres de synthèse communs à ceux du
placement de pôles et aptes à gérer les principaux compromis performance
robustesse inhérents à toute boucle de régulation. Deux exemples d’application sont
exposés, que d’autres auraient peut-être traité par des méthodes plus savantes. Ils
montrent que des méthodes basées sur des concepts classiques recèlent des trésors
de robustesse inexplorés.
18 Conception de commandes robustes

Le chapitre 4, rédigé par Jochen Langer et Ioan-Doré Landau, est dédié à la


conception de régulateurs numériques robustes par le placement de pôles avec
calibrage de fonctions de sensibilité. Le problème de définir une région désirée pour
les pôles de la boucle fermée et de respecter simultanément certaines limites sur les
fonctions de sensibilité est formulé et résolu par optimisation convexe. Des pôles
dominants de la boucle fermée peuvent être spécifiés aussi bien qu’un intégrateur ou
d’autres parties fixes du régulateur. La méthode est illustrée par la conception d’un
régulateur pour un bras souple 360°.

Le chapitre 5, rédigé par Jean-François Magni et Yann Le Gorrec, présente une


méthodologie de synthèse prenant en compte un ensemble fini de modèles pour
traiter la commande robuste aux variations paramétriques réelles. La méthode
proposée repose sur l’alternance de l’analyse pire cas et la synthèse multimodèle :
l’analyse pire cas permet de détecter les modèles critiques à prendre en compte lors
de la synthèse multimodèle. Cette dernière est fondée sur le placement de structures
propres. Pour valider cette approche, c’est-à-dire être sûr que le comportement du
système régulé est aussi valable entre les points utilisés pour la synthèse
multimodèle, on utilise une technique de type µ-analyse.

Le chapitre 6, rédigé par Denis Arzelier, Jacques Bernussou et Dimitri Peaucelle,


considère certains problèmes d’analyse et de synthèse des modèles incertains
paramétriques. Il est proposé une nouvelle approche permettant de dépasser le cadre
classique de la stabilisation quadratique qui présente l’inconvénient de l’utilisation
d’une fonction de Lyapunov unique générant ainsi un certain conservatisme.
L’approche présentée dans ce chapitre lève, en grande partie, cet inconvénient par
l’utilisation de fonctions de Lyapunov dépendant des paramètres. Dans le cas de
synthèse multicritère, l’approche se traduit par l’utilisation de matrices
paramétriques de Lyapunov particularisées à chaque critère ou contrainte. Différents
problèmes d’analyse et de synthèse en stabilité et performance, que ce soit le
placement de pôles robustes ou la satisfaction de critères fréquentiels en norme H ∞,
ou norme H2, sont abordés. Il est à noter que les conditions proposées sont
exprimées en termes de résolution d’inégalités matricielles linéaires et présentent
donc une faible complexité numérique.

Le chapitre 7, rédigé par Benoît Clément et Gilles Duc, propose une méthode
originale de synthèse multi-objectifs pour commander un système linéaire par retour
de sortie de correcteurs. On utilise la paramétrisation de Youla pour décrire
l’ensemble des correcteurs stabilisant et l’optimisation convexe sous contraintes
LMI pour aboutir à la solution finale. L’approche proposée permet de prendre en
compte plusieurs critères de synthèse (de type H∞, H2 ou α-stabilité) sans introduire
de couplage artificiel entre les contraintes et en s’affranchissant du conservatisme
induit par les approches déjà existantes ; ceci est possible grâce aux propriétés de la
paramétrisation de Youla (la représentation de la boucle fermée linéaire en le
Avant-propos 19

paramètre de Youla) et l’utilisation de changements de variables numériquement


bien posés. Ces propriétés permettent de considérer les objectifs indépendamment
les uns des autres en utilisant des fonctions de Lyapunov différentes pour chaque
critère. Il est important de noter que la réduction du conservatisme se fait au
détriment de la complexité de calcul en augmentant le nombre de variables
d’optimisation. Afin de montrer l’intérêt de cette méthode, elle est mise en œuvre
sur la commande d’un bras souple choisi comme benchmark par le groupe de
recherche (GR) automatique du CNRS. Pour montrer la flexibilité de la méthode,
deux points de vue différents pour considérer les modes souples sont présentés ; les
résultats obtenus sont très satisfaisants comparativement aux résultats déjà existants.

Le chapitre 8, rédigé par Paulo César Pellanda et Pierre Apkarian, présente une
méthodologie générale pour la commande d’un système sur un grand domaine de
fonctionnement en effectuant l’interpolation de compensateurs dynamiques
prédéterminés. Une difficulté importante de l’interpolation réside dans le fait que le
comportement dynamique des compensateurs interpolés dépend de manière critique
des représentations d’état adoptées pour la famille de correcteurs linéaires conçue
sur un ensemble de points de fonctionnement. La technique que nous proposons
utilise une séquence de transformations d’état linéaires permettant d’aboutir à une
famille cohérente et physiquement motivée de compensateurs équivalents qui se
prêtent à l’interpolation. Après la transformation, ces compensateurs présentent une
structure estimation/commande, facilitant l’interpolation et la mise en œuvre. Cette
méthode est applicable aux compensateurs discrets ou continus, d’ordre augmenté
ou plein et, en particulier, aux correcteurs issus d’une synthèse H∞ ou d’une µ-
synthèse, dont le séquencement est en général délicat. Des exemples numériques
sont présentés pour illustrer les avantages de cette approche.

Le chapitre 9, rédigé par Gérard Favier et Gustavo Enrique da Costa Oliveira, est
consacré à la commande prédictive robuste d’un système linéaire incertain. Le
principe général d’une commande prédictive basée sur un modèle (MPC) et certains
résultats fondamentaux concernant les méthodes MPC sont tout d’abord rappelés.
Ce type de commande fait intervenir deux blocs de calcul : le prédicteur, dont la
structure est déterminée à partir du modèle du système à commander, qui effectue le
calcul de la prédiction de la sortie sur un horizon de prédiction, et l’optimiseur qui
détermine la commande de façon à optimiser un critère de performance tout en
tenant compte de contraintes sur les signaux d’entrée/sortie. Le principe de la
commande prédictive robuste (RMPC) consistant à prendre en compte les
incertitudes de modèle au niveau de la synthèse de la loi de commande, est ensuite
introduit sous la forme d’un problème d’optimisation min-max, visant à minimiser
par rapport à la commande le maximum du critère vis-à-vis de l’ensemble des
modèles compatibles avec les incertitudes paramétriques. Après une brève
description du modèle de Laguerre et du prédicteur associé, plusieurs algorihmes
RMPC basés sur l’utilisation d’un tel modèle, sont développés. Ces algorithmes, qui
20 Conception de commandes robustes

nécessitent de résoudre un problème de programmation linéaire ou quadratique selon


la norme utilisée au niveau du critère de performance, présentent l’avantage d’être
plus simples à mettre en œuvre que ceux basés sur un modèle RIF ou CARIMA.
Cette simplicité résulte d’une part du faible nombre de paramètres qui caractérisent
un modèle de Laguerre, et d’autre part de la structure affine du prédicteur associé à
un tel modèle. Des résultats de simulation, relatifs à la commande d’un réacteur de
polymérisation, permettent d’illustrer les lois de commande prédictive robuste
proposées.

Jacques BERNUSSOU
Alain OUSTALOUP
Chapitre 1

QFT : une méthode classique


pour la synthèse de commande robuste

L’objectif de ce chapitre, moyennant un logiciel adéquat, est de vous permettre de


réaliser les opérations suivantes :
– définir un système incertain stationnaire possédant une entrée et une sortie
(single input single output, SISO) comme un ensemble de fonctions de transfert, et
représenter ce système dans le plan complexe (diagramme de Nyquist) et dans le plan
complexe logarithmique (diagramme de Nichols) ;
– définir des spécifications de conduite et d’atténuation de perturbations dans les
domaines temporel et fréquentiel ;
– utiliser la méthode QFT – Quantitative Feedback Theory – pour synthétiser un
compensateur (linéaire et stationnaire) en boucle fermée, accompagné d’un préfiltre.
La synthèse est réalisée de manière à ce que la boucle fermée satisfasse les spécifi-
cations préalablement définies pour tous les systèmes considérés. Dans certains cas,
la conclusion sera qu’il n’existe vraisemblablement pas de compensateur et préfiltre
linéaires stationnaires qui permettent de satisfaire lesdites spécifications ;
– apprécier l’interaction existant entre le degré d’incertitude du système, la rigueur
des spécifications et le gain de rétroaction nécessaire pour réaliser la synthèse désirée.

Chapitre rédigé par Per Olof G UTMAN et Raphaël L INKER .


22 Conception de commandes robustes

Le présent chapitre est composé de dix sections :

– la première section résume la synthèse classique en boucle fermée pour un sys-


tème sans incertitude et introduit la structure de boucle fermée avec deux degrés de
liberté. Cette section se termine par la définition du problème de commande robuste,
une discussion de l’importance de ce problème et une brève description des principales
étapes de la synthèse QFT. L’idée centrale de QFT est également introduite : au lieu
de résoudre de façon simultanée un problème de synthèse pour tous les systèmes envi-
sagés, un compensateur est synthétisé pour un système nominal arbitraire, de manière
telle que les spécifications préalablement définies soient satisfaites pour tous les sys-
tèmes. Afin d’atteindre cet objectif, la synthèse pour le système nominal doit satisfaire
des contraintes qui dépendent de la fréquence et de la phase, dénommées « frontières
d’Horowitz » (Horowitz bounds) ;

– la deuxième section traite du rôle de la rétroaction dans le cadre de synthèse de


commande robuste. Le compromis qui doit être fait entre le degré d’incertitude, la
rigueur des spécifications et le gain de rétroaction requis est illustré sur un exemple
SISO simple. La notion de « coût de rétroaction » est également introduite ;

– la troisième section traite de la définition de systèmes incertains et du calcul des


ensembles de valeurs associés à ces systèmes ;

– la quatrième section est consacrée à la définition des spécifications, et plus spé-


cialement au passage du domaine temporel au domaine fréquentiel ;

– la cinquième section détaille le calcul des frontières d’Horowitz ;

– la sixième section présente la procédure pour synthétiser le compensateur et


traite du problème de stabilité de la boucle fermée ;

– la synthèse du préfiltre est présentée dans la septième section ;

– la huitième section est consacrée à des simulations de la boucle fermée dans les
domaines temporel et fréquentiel ;

– la neuvième section discute des mesures envisageables dans les cas où la syn-
thèse n’est pas couronnée de succès ;

– la dernière section passe en revue les extensions de QFT pour des problèmes plus
complexes et contient une liste de références permettant d’approfondir les connais-
sances de base acquises par la lecture de ce chapitre.

Un exemple détaillé pour un système SISO de base est intégré dans les sections
1.3 à 1.8. Cet exemple est réalisé à l’aide du logiciel Qsyn – The Toolbox for Robust
Control Systems Design for use with Matlab [GUT 96].
La méthode QFT 23

1.1. Introduction

1.1.1. Synthèse classique en boucle fermée

La synthèse classique dans le domaine fréquentiel (diagrammes de Bode ou de


Nichols) est décrite dans tous les livres de base d’automatique et peut être sommaire-
ment résumée de la façon qui suit.

Un système ayant une entrée et une sortie est défini à l’aide de sa fonction de trans-
fert P (s), qui décrit de façon univoque la relation entre l’entrée et la sortie du système.
Des perturbations peuvent être présentes aussi bien à l’entrée qu’à la sortie du système
(figure 1.1). Afin de ne pas compliquer inutilement les notations, des configurations
plus générales ne sont pas traitées dans le cadre de ce chapitre.

Les spécifications pour la boucle fermée sont exprimées dans le domaine tem-
porel sous forme de réponses désirées pour un signal d’entrée donné r(t), et/ou des
perturbations d1 (t) et d2 (t) données (figure 1.2). A cette fin, on a souvent recours à
des signaux standards, tels qu’un échelon, une rampe ou une sinusoïde. Par exemple,
la spécification de conduite, pour laquelle la sortie du système doit suivre le signal
d’entrée, peut être exprimée par la réponse désirée à un échelon. De la même façon,
l’atténuation de perturbations peut être exprimée par celle d’une pertubation d’entrée
d1 , ayant un profil de rampe. Généralement, les spécifications sont exprimées par un
nombre restreint de paramètres tels que la valeur du dépassement, le temps de montée
tr [s], le temps de convergence ts [s] et, pour les cas où la convergence est imposée,
les coefficients d’erreurs e0 , e1 ... et les coefficients de raideur c0 , c1 ...

Le but de la synthèse est de trouver un compensateur linéaire stationnaire, décrit


par sa fonction de transfert G(s), tel que la réponse de la boucle fermée soit conforme
aux spécifications.

Les spécifications exprimées dans le domaine temporel ne peuvent pas être direc-
tement représentées dans les diagrammes de Bode, de Nyquist ou de Nichols de la
boucle ouverte, L(s) = P (s)G(s). Pour cette raison, les spécifications sont « tra-
duites » dans le domaine fréquentiel en utilisant, par exemple, la bande passante ωb
[rad/s], la fréquence de résonance ωp [rad/s], le pic de résonance Mp [dB], le gain et
la pente asymptotique de L(s) et/ou G(s) en basse fréquence, la sensibilité maximale
Sp , la marge de phase φm [deg] et la marge de gain Am [dB]. La définition de ces
différents paramètres est donnée dans le tableau 1.1.

La synthèse proprement dite consiste à façonner la boucle ouverte désignée par


L(s) = P (s)G(s). P (s) est donné et les polynômes qui forment le numérateur et le
dénominateur de G(s) sont modifiés de manière telle que : 1) la représentation fré-
quentielle L(jω) prenne la forme désirée dans les diagrammes de Bode, Nyquist ou
Nichols et 2) les spécifications dans le domaine fréquentiel soient satisfaites.
24 Conception de commandes robustes

La simulation de la boucle fermée dans le domaine temporel est nécessaire afin de


vérifier que les spécifications temporelles imposées sont effectivement atteintes. Dans
le cas contraire, les spécifications dans le domaine fréquentiel doivent être redéfinies
de manière plus stricte et la synthèse doit être recommencée.

Figure 1.1. Système ayant pour fonction de transfert P (s),


avec un signal de commande u(t), une perturbation d’entrée d1 (t),
une perturbation de sortie d2 (t) et un signal de sortie y(t)

Figure 1.2. Système décrit à la figure 1.1, incorporé dans une structure
en boucle fermée avec un degré de liberté ; r(t) est le signal de référence,
e(t) l’erreur de la boucle et n(t) le bruit de mesure

ωc |L(jωc )| = 1 √
ωb |L(jωb )/(1 + L(jωb ))| = −3 dB = 1/ 2
ωp maxω |L(jω)/(1 + L(jω))| = |L(jωp )/(1 + L(jωp ))|
Sp maxω |1/(1 + L(jω))|
φm φm = (180/π)(π − arg((L(jωc ))))
ω−180 et Am arg(L(jω−180 )) = −π et Am = −20 log10 (|L(jω−180 )|)

Tableau 1.1. Définition de certains paramètres


utiles lors du passage du domaine temporel au domaine fréquentiel

Au cours des années, la synthèse classique s’est révélée très adéquate pour
résoudre des problèmes de commande en boucle fermée, et ceci même pour des sys-
tèmes représentés par des fonctions de transfert incertaines. Dans de tels cas, l’incer-
titude liée à la représentation du système est prise en compte en imposant des marges
de phase et de gain adéquates.
La méthode QFT 25

1.1.2. Alternatives à la synthèse en boucle fermée avec un degré de liberté

Plusieurs alternatives existent à la synthèse en boucle fermée telle que décrite dans
le paragraphe précédent. Une première alternative consiste à effectuer une commande
en boucle ouverte, pour laquelle le signal de commande u(t) est généré sans l’aide de
rétroaction. Plus concrètement, le signal de commande est obtenu en filtrant un signal
de référence, r(t) : U (s) = F (s)R(s). Dans cette expression, U (s) et R(s) sont les
transformations de Laplace de u(t) et r(t), et F (s) est la fonction de transfert du
préfiltre. Une commande en boucle ouverte est possible et dans une certaine mesure
avantageuse, puisqu’elle ne nécessite pas de capteur, dans les cas où le système est
stable et les effets des perturbations et des incertitudes sont négligeables par rapport
aux spécifications imposées.

Une autre possibilité est de synthétiser une boucle de rétroaction avec deux degrés
de liberté (figure 1.3) [HOR 63]. Cette configuration est en fait une boucle ouverte
appliquée non pas au système initial, mais plutôt à une boucle fermée avec un degré
de liberté. La fonction de transfert entre le signal de référence et le signal de sor-
tie, T (s) = Y (s)/R(s) = P (s)G(s)F (s)/(1 + P (s)G(s)), est découplée des fonc-
tions de transfert entre les perturbations et le signal de sortie S(s) = Y (s)/D2 (s) =
1/(1 + P (s)G(s)) et Y (s)/D1 (s) = P (s)/(1 + P (s)G(s)). Ce découplage permet
de synthétiser, dans un premier temps, un compensateur G(s) de façon à satisfaire
les spécifications relatives à l’atténuation des perturbations. Une fois le compensa-
teur G(s) obtenu, le préfiltre est choisi afin de satisfaire les spécifications de réglage
T (s). Au fil de ce chapitre, il apparaîtra rapidement que ce découplement est un élé-
ment crucial de la méthode QFT. La première étape consiste à synthétiser G(s) afin
d’atténuer l’effet des pertubations et de réduire l’incertitude de la boucle fermée à un
niveau acceptable. La seconde étape consiste à choisir F (s) tel que les spécifications
de conduite soient également satisfaites.

Figure 1.3. Structure canonique de boucle fermée


avec deux degrés de liberté pour un système à une entrée et une sortie

A ce stade, il doit être souligné qu’il n’est pas nécessaire d’implémenter le système
de commande sous la forme canonique décrite par les figures 1.1 et 1.2. A l’aide de
26 Conception de commandes robustes

calcul algébrique, il est possible d’obtenir des structures équivalentes contenant, par
exemple, un compensateur dans la boucle de rétroaction.

1.1.3. Le problème de commande robuste

Lorsqu’appliquée à un système incertain représenté non pas par une fonction de


transfert P (s), mais plutôt par une famille de fonctions de transfert {P1 (s), P2 (s),
. . .}, la synthèse classique décrite ci-dessus se heurte à diverses difficultés. Les dia-
grammes de Bode, Nyquist et Nichols deviennent rapidement illisibles lorsque plu-
sieurs boucles ouvertes, chacune correspondant à une fonction de transfert Pi (s), sont
tracées simultanément. Il devient dès lors difficile de synthétiser G(s) de façon à satis-
faire les spécifications pour tous les systèmes considérés. A titre d’exemple, vous êtes
invités à essayer d’utiliser les diagrammes de Bode ou de Nichols afin de résoudre le
problème suivant.

E XERCICE 1.1.– P (s) = ke−τ s /s2 , k ∈ [1, 10], τ ∈ [0, 1]. Trouvez un compensateur
G(s) (figure 1.2) tel que la fréquence de coupure ωc soit supérieure ou égale à 0,07
[rad/s] et le gain de la fonction de sensibilité 1/(1 + P (s)G(s)) soit inférieur ou égal
à 6 dB pour tous les systèmes envisagés.

D ÉFINITION 1.1.– Le problème de commande robuste consiste à synthétiser un com-


pensateur linéaire stationnaire G(s), et si besoin un préfiltre F (s), tels que la boucle
fermée satisfasse toutes les spécifications, et ce pour l’ensemble des systèmes consi-
dérés {Pi (s)} (l’index i est utilisé de manière non rigoureuse et ne signifie pas que
l’ensemble est dénombrable).

Aperçu de la méthode QFT

Il existe un grand nombre de méthodes de synthèse robuste [SAN 98]. Historique-


ment, QFT est une des premières à avoir été développée [HOR 72]. QFT est intime-
ment liée à la procédure classique décrite dans le paragraphe 1.1.1, avec cependant
deux différences importantes :
– le cas général consiste en une structure avec rétroaction et deux degrés de liberté ;
– au lieu de résoudre simultanément le problème de synthèse pour tous les sys-
tèmes, le problème est résolu pour un système nominal (arbitraire), auquel sont asso-
ciées des contraintes qui garantissent que la boucle fermée satisfait les spécifications
pour tous les systèmes envisagés. Ces contraintes, dénomées frontières d’Horowitz
(Horowitz bounds), dépendent de la fréquence et de la phase. Pour cette raison, la syn-
thèse QFT se fait en grande partie dans le diagramme de Nichols et l’originalité de
QFT réside en grande partie dans le calcul des frontières d’Horowitz.
La méthode QFT 27

Un aperçu des six étapes qui consituent une synthèse QFT pour un système SISO
est énuméré ci-dessous, et chaque étape fait ensuite l’objet d’une section :
1) détermination de l’ensemble de fonctions {Pi (s)} pour lesquelles le système de
commande doit être synthétisé. Choix d’une fonction de transfert arbitraire qui définit
le système nominal Pnom (s). Pour une série de fréquences juidicieusement choisies
{ωk } [rad/s], calcul des ensembles de valeurs ;
2) détermination des spécifications dans les domaines temporel et fréquentiel. Ces
spécifications correspondent aux performances requises pour la boucle fermée. A ce
stade, les spécifications exprimées dans le domaine temporel sont transformées en
spécifications dans le domaine fréquentiel ;
3) calcul des frontières d’Horowitz pour {ωk }, basé sur les ensembles de valeurs
et les spécifications dans le domaine fréquentiel ;
4) synthèse d’un compensateur G(jω). Elle consiste à façonner la boucle ouverte
nominale Pnom (jω)G(jω) dans le diagramme de Nichols sur lequel sont indiquées
les frontières d’Horowitz que la boucle ouverte nominale doit satisfaire. Analyse de la
stabilité asymptotique de la boucle fermée, basée sur le théorème de Nyquist ;
5) fermeture de la boucle G(s)P (s)/(1 + G(s)P (s)) et synthèse du préfiltre F (s).
A cette étape, il est fait usage du diagramme de Bode de la boucle fermée et F (s) est
choisi tel que la fonction de transfert entre le signal de référence et celui de sortie
F (s)G(s)P (s)/(1 + F (s)G(s)P (s)) soit conforme aux spécifications ;
6) simulation de la boucle fermée pour un certain nombre de systèmes et vérifica-
tion que les spécifications exprimées dans les domaines fréquentiel et temporel sont
satisfaites.

1.2. Le rôle de la rétroaction en synthèse robuste

1.2.1. Boucle de rétroaction et incertitude

Ainsi que mentionné dans la première section, il est nécessaire de recourir à une
commande en boucle fermée afin de stabiliser un système instable et/ou diminuer l’ef-
fet de perturbations. Dans les cas où le système est incertain, la boucle de rétroaction a
également un second rôle : obtenir une incertitude en boucle fermée inférieure à celle
du système initial. La figure 1.4 présente les relations qui existent entre les différents
éléments impliqués dans une synthèse robuste : si l’incertitude du système augmente,
un gain plus élevé est requis afin de satisfaire les spécifications. Si les spécifications
deviennent plus strictes, un gain plus élevé est également requis. Ceci est illustré ci-
dessous à l’aide d’un exemple.

Suivant la structure définie par la figure 1.2 ou la figure 1.3, la sensibilité complé-
mentaire S̄(s) est définie comme S̄(s) = P (s)G(s)/(1 + P (s)G(s)). Considérons
28 Conception de commandes robustes

Figure 1.4. Relation entre incertitude, spécifications et rétroaction

un système de pur gain P (s) = k ∈ [kmin , kmax ] et un compensateur G(s) = g > 0.


Définissons une spécification ∆ pour l’incertitude de la boucle fermée :

maxk |S̄| kmax 1 + kmin g b


∆= = ≤ [1.1]
mink |S̄| kmin 1 + kmax g a

où b > a sont des constantes données. Un graphe de ∆ en fonction de g est présenté à


la figure 1.5 pour différentes valeurs de kmin et kmax . Si, par exemple, il est requis que
∆ ≤ 3, quand le système a une petite incertitude (kmax /kmin = 2/0,5 = 4), g ≥ 0,4
doit être choisi. Par contre, si l’incertitude est grande (kmax /kmin = 4/0,25 = 16),
g doit être supérieur à 1,625. De même, si la spécification est plus stricte, un gain de
rétroaction plus élevé est nécessaire.

Figure 1.5. Incertitude subsistant en boucle fermée ∆,


en fonction du gain de rétroaction g pour deux valeurs de kmax /kmin
La méthode QFT 29

Dans la méthode QFT, l’interaction entre incertitude et spécifications apparaît à


chaque fréquence de la manière suivante : si l’ensemble de valeurs {Pi (jωk )} couvre
une plus grande surface dans le plan complexe (ce qui signifie que l’incertitude à la
fréquence ωk augmente), la frontière d’Horowitz correspondant à une spécification
donnée devient plus difficile à satisfaire. De la même façon, pour une incertitude don-
née, une spécification plus stricte est reflétée par une frontière d’Horowitz plus difficile
à satisfaire. Cette interaction entre incertitude et spécifications est également discutée
à la section 1.9.

1.2.2. Le coût de rétroaction

Considérons la fonction de transfert entre la perturbation d2 (t) et la sortie y(t)


(figure 1.3). Par définition, cette fonction de transfert est la fonction de sensibilité
S(s) = 1/(1 + P (s)G(s)). Il est évident que plus le gain du compensateur est élevé,
plus les pertubations sont atténuées. Une conclusion similaire a été obtenue dans le
paragraphe précédent : un gain élevé améliore les performances.

Il est dès lors naturel de poser la question suivante : pourquoi ne suffit-il pas
d’augmenter le gain afin de diminuer l’incertitude et/ou de satisfaire des spécifications
plus strictes? La raison est qu’il existe des limitations fondamentales concernant tout
contrôle en boucle fermée [SER 97]. Tout système réel inclut un retard, possède un ou
plusieurs zéros dans le demi-plan complexe droit (Non Minimum Phase system), ou
est grandement incertain aux fréquences élevées. Dans ces conditions, la contrainte
de stabilité, associée aux relations de Bode entre gain et phase [BOD 45, HOR 63],
limite la bande passante et limite donc le gain admissible. De plus, le bruit de mesure
est amplifié à l’entrée du système par la fonction de transfert du « coût de rétroaction »,
−G(s)/(1 + P (s)G(s)) (figure 1.3). Un gain de compensation élevé aux fréquences
associées au bruit de mesure est indésirable. En effet, un tel gain peut entraîner satu-
ration ou usure prématurée de l’élément de commande, ou nécessiter l’utilisation d’un
capteur moins sujet au bruit et donc plus couteux. Pour ces raisons, il est impératif de
résoudre un problème de synthèse robuste en utilisant le minimum de gain nécessaire.

1.3. Incertitude du système

R ÉSUMÉ.– Détermination de l’ensemble de fonctions {Pi (s)} pour lesquelles le sys-


tème de commande doit être synthétisé. Choix d’une fonction de transfert arbitraire
qui définit le système nominal Pnom (s). Pour une série de fréquences judicieusement
choisies {ωk } [rad/s], calcul des ensembles de valeurs.

Une fonction de transfert incertaine est définie comme un ensemble fini ou infini
(dénombrable ou non dénombrable) de fonctions de transfert :

P (s) ∈ {Pi (s)} [1.2]


30 Conception de commandes robustes

A chaque fréquence, l’ensemble des nombres complexes {Pi (jωk )} qui repré-
sentent le système est appelé l’ensemble de valeurs (en anglais, value set ou template)
à la fréquence ωk . Dans certains cas particuliers, il est possible d’obtenir une définition
plus spécifique.

Un système ayant une incertitude paramétrique est défini par :

P (s) ∈ {P (s, q)}, q ∈ Q ⊂ <p [1.3]

où q est le vecteur de paramètres incertains. Une autre forme particulière est


l’incertitude multiplicative non structurée :

P (s) = Pi (s)(1 + M (s)), |M (s)| ≤ m(s) ≤ 1, M (s) ∈ C, m(s) ∈ <


[1.4]

où M (s) est une fonction de transfert stable de façon asymptotique et Pi (s) une fonc-
tion de transfert, ou une des fonctions de transfert incertaines définies par les relations
[1.2] ou [1.3].

Dans QFT, un système nominal est choisi de façon arbitraire, Pnom (s). La figure
1.6 présente le diagramme de Nyquist correspondant au cas d’une incertitude multipli-
cative ([1.4]), avec Pi (s) = Pnom (s). A chaque fréquence ωk , la fonction de transfert
P (jωk ) est entourée par un cercle de rayon m(jωk )|Pnom (jω)|.

Lorsque l’incertitude est définie par un ensemble fini de fonctions de transfert, il


est facile de calculer les ensembles de valeurs. Par contre, le calcul des ensembles
de valeurs pour les cas d’incertitude paramétrique ([1.3]) est en général non solvable
en un temps de calcul polynomial (par rapport au nombre de paramètres). Des algo-
rithmes garantissant le calcul exact (avec une précision donnée) des ensembles de
valeurs en un temps de calcul polynomial n’existent que pour certaines structures d’in-
certitudes paramétriques. Ces problèmes liés au calcul des ensembles de valeurs sont
discutés, par exemple, par [ACK 93] et [GUT 96]. Ces ouvrages incluent divers algo-
rithmes et références.

La méthode la plus simple consiste à quadriller l’ensemble des paramètres Q et


à évaluer P (jω) aux points équidistants ainsi obtenus (Grid method). La méthode de
quadrillage récurrent (Recursive grid method) [COH 95] est nettement plus rapide.
Cependant, le temps requis pour atteindre une précision donnée croît de façon poly-
nomiale seulement dans les cas où il existe une constante de Lipshitz connue pour
P (ωk , q). La méthode de quadrillage des arêtes de Q (Edge grid method) est appli-
cable seulement pour les cas où le théorème de l’arête (Edge theorem) est valable
[ACK 93].
La méthode QFT 31

Figure 1.6. Diagramme de Nyquist pour un système incertain


avec incertitude multiplicative non structurée [1.4] avec Pi (s) = Pnom (s).
Le système nominal P (jω) est indiqué par un trait plein.
L’ensemble de valeurs a un rayon m(ω)|Pnom (jω)|

Un grand nombre de fonctions de transfert peut être mis sous forme de produits de
facteurs réels :
ke−τ s Πl (1 + s/bl ) Πm (1 + s/bm ) Πq (1 + 2ζq s/ωq + s2 /ωq2 )
P (s) =
sn Πu (s + au ) Πv (s + av ) Πw (1 + 2ζw s/ωw + s2 /ωw 2)

Πr (s2 + 2ζr ωr s + ωr2 )


× (1 + M (s)) [1.5]
Πi (s2 + 2ζi ωi s + ωi2 )
où k, τ , bl , bm , ζq , ωq , ζr , ωr , n, au , av , ζw , ωw , ζi et ωi sont des paramètres incertains
et où M (s) représente une incertitude multiplicative non structurée [1.4]. Pour de tels
systèmes, un algorithme qui garantit un temps de calcul polynomial a été développé
par [GUT 94] (Real factored form method).

Toutes les méthodes mentionnées ci-dessus sont implémentées dans le logiciel


Qsyn – The Toolbox for Robust Control Systems Design for use with Matlab [GUT 96].

E XEMPLE 1.1 ( CALCUL DES ENSEMBLES DE VALEURS ).– Considérons le système


incertain (donné sous forme de produit de facteurs réels) :
s+a
P (s) = ke−τ s [1.6]
1 + 2ζs/ωn + s2 /ωn2
avec :
k ∈ [2, 5], a ∈ [1, 3], ζ ∈ [0,3, 0,6], ωn ∈ [4, 8], τ ∈ [0, 0,01] [1.7]
Le système nominal est choisi arbitrairement :
s+3
Pnom (s) = 2 [1.8]
1 + 2 × 0,6 × s/4 + s2 /16
32 Conception de commandes robustes

La figure 1.7 présente le diagramme de Bode pour 45 = 1 024 systèmes diffé-


rents, obtenus en quadrillant l’intervalle de chaque paramètre de façon équidistante.
La figure 1.8 présente le diagramme de Nichols avec le système nominal [1.8] et les
ensembles de valeurs calculés aux fréquences 0,2, 0,5, 1, 2, 5, 10, 20, 50 et 100 [rad/s].
Etant donné la structure du système, ces ensembles de valeurs ont été calculés avec
l’algorithme correspondant. Ces fréquences ont été choisies judicieusement, en tenant
compte notamment du pic de résonance clairement visible à la figure 1.7. Le choix
des fréquences auxquelles les ensembles de valeurs sont calculés n’est pas trivial, et
durant la synthèse du compensateur, il est parfois requis de calculer ces ensembles
de valeurs à des fréquences supplémentaires. Les figures 1.7 et 1.8 sont complémen-
taires, mais puisqu’un ensemble de valeurs est un ensemble dans le plan complexe,
un diagramme de Nichols (ou de Nyquist) est nécessaire afin de voir clairement cet
ensemble de valeurs à une fréquence donnée.

Figure 1.7. Diagramme de Bode pour 1 024 cas


du système défini par [1.6] et [1.7]

1.4. Spécifications

R ÉSUMÉ.– Détermination des spécifications dans les domaines temporel et fréquen-


tiel. Ces spécifications correspondent aux performances requises pour la boucle fer-
mée. A ce stade, les spécifications exprimées dans le domaine temporel sont transfor-
mées en spécifications dans le domaine fréquentiel.
La méthode QFT 33

Figure 1.8. Ensembles de valeurs {Pi (jωk )} du système défini par [1.6]
et [1.7], présentés dans le diagramme de Nichols. Le système nominal
est indiqué par un trait plein et le point « nominal » de chaque ensemble
de valeurs est indiqué par un cercle et la fréquence correspondante

Les spécifications peuvent être exprimées sous différentes formes suivant la nature
du problème considéré. Parfois, une enveloppe de la sortie désirée en réponse à un
signal d’entrée en échelon est spécifiée (figure 1.9). De façon similaire, il est possible
de spécifier une enveloppe pour la réponse à une perturbation d’entrée ou de sortie,
dans le domaine temporel ou fréquentiel.

Notons R(s), E(s), U (s), D1 (s), D2 (s), Y (s) et N (s) les transformations de
Laplace des signaux r(t), e(t), u(t), d1 (t), d2 (t), y(t) et n(t) définis à la figure 1.3.
Il est habituel de définir des spécifications pour la fonction de transfert de l’erreur (ou
la fonction de sensibilité) :

E(s) Y (s) 1
S(s) = = = [1.9]
R(s) D2 (s) 1 + P (s)G(s)

A titre d’exemple, on peut imposer que :

|S(jω)| ≤ X(ω) [1.10]


34 Conception de commandes robustes

Figure 1.9. Spécification pour la réponse à un échelon (graphe supérieur) et son « équivalent »
dans le domaine fréquentiel. Dans le graphe supérieur, les traits fins l(t) et v(t) indiquent les
spécifications inférieure et supérieure. Les traits pleins A(t) et B(t) indiquent l’enveloppe des
réponses des modèles acceptés, c’est-à-dire les modèles du deuxième et troisième ordres dont
les réponses à un échelon sont entre l(t) et v(t). Dans le diagramme de l’amplitude de Bode
(graphe inférieur), a(ω) et b(ω) indiquent les spécifications fréquentielles, qui sont l’enveloppe
des fonctions d’amplitude des modèles acceptés. Pour des fréquences supérieures à la fréquence
de coupure, a(ω) est remplacé par 0 (= −∞ dB), indiquant que la boucle fermée peut avoir une
diminution d’amplitude supérieure à −60 dB par décade, qui est le taux maximal des modèles
testés.

où X(ω) ∈ < peut être constant, en prenant toutefois en compte que X(ω) doit être
supérieur à 1 à certaines fréquences [BOD 45, HOR 63]. Il existe de nombreux types
de spécifications, tels que marges de gain et de phase, marge de retard minimum, coef-
ficients d’erreurs et de raideur, etc. Les spécifications utilisées en QFT sont similaires
à celles utilisées pour la synthèse classique, la seule restriction étant qu’un certain
niveau d’incertitude persiste toujours dans la boucle fermée.

E XEMPLE 1.2 ( SPÉCIFICATIONS DE SENSIBILITÉ ).– Considérons à nouveau le sys-


tème défini par [1.6] et [1.8] en boucle fermée avec deux degrés de liberté (figure 1.3).
La méthode QFT 35

Il est désiré de garantir une marge de stabiblité. A cette fin, il est nécessaire d’inclure
une spécification du type défini par [1.10] :
|S(jω)| ≤ 2 (= 6 dB) [1.11]
De plus, il est aussi requis que le compensateur inclue au moins un intégrateur, et
ce afin d’obtenir une erreur nulle en état stationnaire avec un échelon d’entrée :
G(s) = H(s)/s [1.12]

Dans QFT, toutes les spécifications doivent être finalement exprimées dans le
domaine fréquentiel. Pour cette raison, les spécifications exprimées dans le domaine
temporel doivent être transformées en spécifications fréquentielles avant d’entamer
la synthèse du compensateur. Il n’existe pas de transformation univoque du domaine
temporel au domaine fréquentiel. En général, on suppose que la boucle fermée se com-
porte comme un système du deuxième ou troisième ordre (pôles dominants), et il est
alors possible de passer du domaine temporel au fréquentiel. La procédure est illustrée
ci-dessous par un exemple.

E XEMPLE 1.3 ( SPÉCIFICATIONS DE CONDUITE ).– Pour la boucle fermée avec deux
degrés de liberté décrite à la figure 1.3 et le système défini par [1.6]-[1.8], considé-
rons une spécification de conduite, dans le domaine temporel, en réponse à un échelon
d’entrée (figure 1.9). Notons u(t) et l(t) les limites supérieure et inférieure des spéci-
fications. Trouvez tous les systèmes du troisième ordre C(s), dont les réponses à un
échelon satisfassent v(t) et l(t) :
 
1 + s/a ω02
C(s) = , (a, b, ζ, ω0 ) ∈ Q [1.13]
1 + s/b s2 + 2ζω0 s + ω 2
avec :
    
 −1 1 + s/a ω02 1

Q = (a, b, ζ, ω0 )l(t) ≤ L ≤ u(t)
1 + s/b s2 + 2ζω0 s + ω 2 s
[1.14]
où L−1 est la transformation de Laplace inverse. La spécification équivalente dans le
domaine fréquentiel est de la forme :
F (jω)G(jω)P (jω)
a(ω) ≤ ≤ b(ω) [1.15]
1 + G(jω)P (jω)
avec :
(
minQ |C(jω)|, ω < ωcut-off
a(ω) = [1.16]
0, ω ≥ ωcut-off
b(ω) = max |C(jω)| [1.17]
Q
36 Conception de commandes robustes

La fréquence de coupure ωcut-off [rad/s] est choisie au-delà de la bande passante de


a(ω) (figure 1.9). Les relations [1.15], [1.16] et [1.17] forment les spécifications de
conduite dans le domaine fréquentiel pour Y (s)/R(s).

Il est clair que le passage du domaine temporel au fréquentiel n’est pas univoque,
puisque les normes utilisées dans les deux domaines sont incompatibles. Il n’est
pas garanti qu’une boucle fermée satisfaisant [1.15], [1.16] et [1.17] ait une réponse
incluse dans l’intervalle [v(t), l(t)] et vice versa.

Pour le cas de base SISO, on ne définit généralement des spécifications que pour
l’amplitude de la boucle fermée. Il est cependant possible de définir des spécifications
pour la phase. Il faut alors s’assurer qu’il n’y a pas de contradiction entre les deux
types de spécifications, notamment si le système est à non minimum de phase.

1.5. Les frontières d’Horowitz

R ÉSUMÉ.– Calcul des frontières d’Horowitz pour {ωk }, basé sur les ensembles de
valeurs et les spécifications dans le domaine fréquentiel.

Les frontières d’Horowitz sont des contraintes qui assurent que si la boucle ouverte
Lnom = Pnom (jω)G(jω) satisfait ces frontières à toutes les fréquences, alors la
boucle fermée satisfait les spécifications dans le domaine fréquentiel pour tous les cas
envisagés. Les frontières d’Horowitz reflètent l’interaction qui existe entre le degré
d’incertitude et la rigueur des spécifications (voir paragraphe 1.2.1). Afin de satisfaire
les spécifications de conduite [1.15], il faut également synthétiser un préfiltre F (s).

Puisque F (s) ne contient pas d’incertitude, [1.15] implique que, pour une fré-
quence ω, le nombre complexe G(jω) doit être tel que :
G(jω)Pi (jω) G(jω)Pi (jω)
max / min ≤ b(ω)/a(ω) [1.18]
i 1 + G(jω)Pi (jω) i 1 + G(jω)Pi (jω)
où Pi (jω) appartient à l’ensemble de valeurs de P (s). La relation [1.18] est sou-
vent dénommée spécification de tolérance à ω. Cette tolérance est généralement
exprimée en décibels : 20 log10 (b(ω)/a(ω)) = 20 log10 (b(ω)) − 20 log10 (a(ω)). Il
est clair que si |G(jω)| est suffisamment grand, [1.18] est satisfaite. Par contre, si
G(jω) = −1/Pi (jω) pour i quelconque, alors [1.18] ne peut pas être satisfaite.
Il existe donc une région BT G (ω) du plan complexe telle que G(jω) ∈ BT G (ω)
si et seulement si [1.18] est satisfaite pour tous les membres de {Pi (s)}. Dès lors,
BT L (ω) = BT G (ω)Pnom (jω), où Pnom (jω) est le système nominal, est telle que
Pnom (jω)G(jω) ∈ BT L (ω) si et seulement si [1.18] est satisfaite pour tous les
membres de {Pi (s)}. Les frontières de tolérance d’Horowitz δBT L (ω), définies par
les frontières de la région BT L (ω), sont en général tracées dans le diagramme de
Nichols et le compensateur est ajusté afin que la boucle ouverte satisfasse ces fron-
tières à toutes les fréquences considérées.
La méthode QFT 37

La détermination des frontières d’Horowitz relatives à d’autres types de spécifica-


tions se fait de manière similaire.

Il est important de noter que si :

max |Pi (jω)|/ min |Pi (jω)| ≤ b(ω)/a(ω) ∀ω ∈ Ω [1.19]


i i

la spécification de conduite ne requiert pas de rétroaction dans l’intervalle de fré-


quence ω ∈ Ω. Si Ω = <+ (axe réel positif), alors pour cette spécification, une com-
mande en boucle ouverte est suffisante : il est simplement nécessaire de synthétiser un
préfiltre F (s) tel que :

a(ω) ≤ |F (jω)Pi (jω)| ≤ b(ω) ∀i [1.20]

E XEMPLE 1.4 ( FRONTIÈRES DE TOLÉRANCE ).– Considérons le système défini


par [1.6-1.8] avec la spécification de conduite définie par [1.15] et la figure 1.7.
L’ensemble de valeurs est choisi comme dans l’exemple 1.1. En parcourant le plan
G(jω), on trouve les frontières d’Horowitz indiquées à la figure 1.10. Le « point d’in-
stabilité » −1 (0 dB, −180°) n’appartient pas à BT L (jω) et la boucle ouverte nominale
Lnom (jωk ) doit donc être située au-dessus de la frontière d’Horowitz pour la même
fréquence.

E XEMPLE 1.5 ( FRONTIÈRES DE SENSIBILITÉ ).– Considérons le système défini par


[1.6-1.8] avec la spécification de sensibilité définie par [1.11]. L’ensemble de valeurs
est choisi comme dans l’exemple 1.1. En parcourant le plan G(jω), on trouve les
frontières d’Horowitz indiquées à la figure 1.11. Le « point d’instabilité » −1 (0 dB,
−180°) n’appartient pas à BSL (jω) et la boucle ouverte nominale Lnom (jωk ) doit
donc être située en dehors de la frontière d’Horowitz pour la même fréquence.

E XEMPLE 1.6 ( FRONTIÈRES DOMINANTES ).– En combinant les figures 1.10 et 1.11,
il apparaît clairement que pour ω < ωcut-off , les frontières de tolérance sont plus res-
trictives que les frontières de sensibilité. En effet, si Lnom (jωk ) ∈ BT L (ωk ), alors
Lnom (jωk ) ∈ BSL (ωk ). Pour la synthèse, il est dès lors possible de se préoccuper
uniquement des frontières dominantes (figure 1.12).

1.6. Synthèse du compensateur

R ÉSUMÉ.– Synthèse d’un compensateur G(jω). La synthèse consiste à façonner la


boucle ouverte nominale Pnom (jω)G(jω) dans le diagramme de Nichols sur lequel
sont indiquées les frontières d’Horowitz que la boucle ouverte nominale doit satisfaire.
Analyse de la stabilité asymptotique de la boucle fermée, basée sur le théorème de
Nyquist.
38 Conception de commandes robustes

Figure 1.10. Diagramme de Nichols avec frontières de tolérance


pour l’exemple 1.4. Pour chaque frontière, la fréquence est indiquée en [rad/s].
Pour ω > ωcut-off , BT L (ω) = C et les frontières de tolérance n’existent pas
pour ces fréquences

Les figures 1.10 à 1.12 montrent qu’une frontière d’Horowitz est une courbe dans
le plan complexe dont l’amplitude dépend de la phase. C’est pourquoi il n’est pas
possible de tracer les frontières d’Horowitz dans un diagramme de Bode. Il est donc
nécessaire de faire la synthèse QFT dans le diagramme de Nichols ou de Nyquist, et
non pas dans celui de Bode comme dans le cas classique.

La procédure est la suivante : tracer les frontières d’Horowitz dominantes dans


le diagramme de Nichols. Tracer ensuite la boucle ouverte candidate Lnom (jω) =
Pnom (jω)G(jω) sur ce même diagramme. Le compensateur G(jω) = n(s)/d(s)
doit être strictement causal, de manière à pouvoir être implémenté à l’aide de circuits
électroniques analogiques.

Si Lnom (jω) satisfait les frontières d’Horowitz à toutes les fréquences ωk avec un
gain minimal la synthèse du compensateur est terminée. Si une ou plusieurs frontières
d’Horowitz ne sont pas satisfaites, il est nécessaire de modifier n(s) et/ou d(s) jusqu’à
ce que toutes les frontières le soient.
La méthode QFT 39

Figure 1.11. Frontières de sensibilité pour l’exemple 1.5.


Pour chaque frontière, la fréquence est indiquée en [rad/s]

Il est souvent avantageux pour l’utilisateur de définir G(s) sous forme d’un produit
de facteurs réels. Cette représentation permet d’identifier facilement G(s) comme un
produit de filtres simples tels que PI, PID, filtre passe-haut, filtre passe-bas, etc.

E XEMPLE 1.7 ( FAÇONNAGE DE LA BOUCLE NOMINALE ).– Considérons le système


défini par [1.6-1.8], en boucle fermée avec deux degrés de liberté (figure 1.3), avec
les spécifications définies dans les exemples 1.2 et 1.3 et la figure 1.9 qui a donné les
frontières calculées dans l’exemple 1.6.
Comme première tentative, la boucle est fermée avec G(s) = G1 (s) = 1. Tracez
les frontières d’Horowitz (voir figure 1.12) avec la boucle nominale Lnom (jω) =
Pnom (jω)G1 (jω) = Pnom (jω) (figure 1.13, courbe A). La spécification de tolérance
est clairement violée en basse fréquence.
Comme deuxième tentative, essayons G(s) = G2 (s) avec :

6 1 + 2 × 0,6 × s/4 + s2 /16


G2 (s) = = [1.21]
s(1 + s/500)Pnom(s) s(1 + s/3)(1 + s/500)
40 Conception de commandes robustes

Figure 1.12. Frontières dominantes pour l’exemple 1.6.


Pour chaque frontière, la fréquence est indiquée en [rad/s]

G2 (s) est essentiellement l’inverse du système [1.6], auquel ont été ajoutés un
intégrateur, conformément à la spécification [1.12], et un filtre passe-bas afin d’at-
ténuer l’effet du bruit de mesure. La boucle ouverte Lnom (s) = Pnom (s)G2 (s) =
6/(s(1 + s/500)) est la courbe B de la figure 1.13. Toutes les frontières sont satis-
faites – excepté celles correspondant à 0,2, 0,5 et 1 [rad/s] (Lnom à 100 [rad/s] est
juste à la limite).
Il est tentant d’augmenter le gain de G(s) d’environ 6 dB. Cela entraînerait cepen-
dant la violation de la frontière d’Horowitz à 100 [rad/s], et ce même si le pôle du filtre
passe-bas était déplacé vers des plus hautes fréquences (il est souhaitable de noter
qu’il n’est pas non plus désirable d’atténuer le bruit de mesure seulement au-delà de
la fréquence caractéristique du bruit).
Il est donc nécessaire d’avoir recours à une synthèse plus créative, basée sur les
observations suivantes :
– le gain de Lnom (j100) devrait être inférieur à −26 dB. En effet, dans ces
conditions, la frontière d’Horowitz à cette fréquence ne sera jamais violée, quelle
que soit la phase de Lnom (j100). Il doit être noté que la frontière de sensibilité à
100 [rad/s] résulte du retard e−τ s présent dans le système. Ce retard introduit donc
La méthode QFT 41

Figure 1.13. Boucles ouvertes nominales Pnom (jω) (courbe A)


et Pnom (jω)G2 (s) (courbe B) et frontières d’Horowitz dominantes
dans le diagramme de Nichols

une limite quant à la bande passante de la fonction de transfert complémentaire


S̄(s) = P (s)G(s)/(1 + P (s)G(s)) ;
– la phase de Lnom (jω) devrait être diminuée pour les fréquences inférieures à
2 [rad/s]. Il sera en effet alors plus facile de satisfaire les frontières d’Horowitz à ces
fréquences (le gain présente un minimun aux environs de −100 degrés).
Le problème est résolu en ajoutant un filtre de retard de phase en basse fréquence.
Le compensateur final G3 (s) est défini par :

2,5 (1 + s/1,5) (1 + 2 × 0,6 × s/4 + s2 /16)


G3 (s) = [1.22]
s (1 + s/0,5) (1 + s/3)(1 + s/500)

La boucle ouverte Lnom (s) = Pnom (s)G3 (s) est présentée à la figure 1.14. Toutes
les frontières sont satisfaites.

Même si, comme dans l’exemple 1.7, toutes les frontières d’Horowitz sont
satisfaites, il est possible que les spécifications soient violées à des fréquences pour
lesquelles les ensembles de valeurs, et donc les frontières d’Horowitz, n’ont pas été
42 Conception de commandes robustes

calculés. De telles violations apparaîtront lors des simulations qui constituent l’étape
finale de la synthèse (section 1.9). L’utilisateur a alors les choix suivants :
– négliger ces violations en les considérant insignifiantes ;
– refaire la synthèse en laissant un peu d’espace libre entre la boucle nominale et
les frontières d’Horowitz ;
– recommencer la synthèse en ajoutant les fréquences où les violations appa-
raissent.

Figure 1.14. La boucle ouverte Pnom (jω)G3 (jω)


dans le diagramme de Nichols, avec les frontières d’Horowitz dominantes

Il est possible d’essayer d’améliorer la synthèse dans quatre directions : meilleur


règlage du compensateur existant, meilleure adhérence aux frontières d’Horowitz, par
exemple en utilisant un filtre passe-bas ayant un pôle complexe et un zéro réel (filtre
Slor), synthétiser un compensateur de degré moins élevé, mais satisfaisant toujours les
contraintes, ajouter un filtre d’atténuation du bruit de degré élevé. De cette manière, il
est possible d’apprécier la relation entre la complexité du compensateur et les spécifi-
cations.

E XERCICE 1.2.– Modifiez le compensateur G(s), par exemple en essayant d’obte-


nir un compensateur de degré moins élevé, ou en utilisant un filtre d’atténuation du
La méthode QFT 43

bruit de second ordre. Aide : il est souhaitable de calculer également les frontières
d’Horowitz à 80, 90 et 95 [rad/s].

Stabilité de la boucle fermée

R ÉSUMÉ.– Fermeture de la boucle G(s)P (s)/(1 + G(s)P (s)) et synthèse du préfiltre


F (s). A cette étape, il est fait usage du diagramme de Bode de la boucle fermée, et
F (s) est choisi tel que la fonction de transfert entre le signal de référence et celui de
sortie F (s)G(s)P (s)/(1 + F (s)G(s)P (s)) soit conforme aux spécifications.

L’obtention d’un compensateur tel que la boucle nominale Lnom (jω) satisfasse
les frontières d’Horowitz ne garantit pas la stabilité de la boucle fermée. En principe,
il est nécessaire de vérifier que chaque boucle ouverte Li (s) = Pi (s)G(s) satisfait le
théorème de Nyquist : ∆ arg(1 + Li (s)) = −pi , quand s ∈ γ, une courbe entourant
dans le sens positif tout le demi-plan complexe positif et pi est le nombre de pôles
instables de la boucle ouverte. Cependant, le théorème suivant facilite l’analyse de
stabilité pour une classe importante de systèmes.

T HÉORÈME 1.1.– Stabilité en boucle fermée pour des systèmes ayant des ensembles
de valeurs simplement connectés.

Considérons la classe de systèmes décrits par des fonctions de transfert ration-


nelles, plus éventuellement un élément de retard. Nous supposons que le gain en
haute fréquence a le même signe pour tous les systèmes, sign(lims→∞ Pi (s)) =
sign(lims→∞ Pk (s)) pour tout i et k (un éventuel retard n’affecte pas le signe du
gain). Supposons que tous les ensembles de valeurs {Pi (jω)}, pour tout ω, sont sim-
plement connectés dans le diagramme de Nichols étendu, c’est-à-dire le diagramme
de Nichols qui s’étale sur des surfaces de Riemann multiples. Supposons que le sys-
tème nominal appartient à l’ensemble de valeurs à chaque fréquence Pnom (jω) ∈
{Pi (jω)}. Supposons encore que le compensateur G(s) est tel que la boucle nomi-
nale Lnom (jω) = Pnom (jω)G(jω) satisfasse les frontières d’Horowitz qui émanent
de la spécification qu’aucun point de l’ensemble de valeurs de la boucle compensée
ne soit égal à −1. Chaque boucle ouverte Li (jω) = Pi (jω)G(jω) satisfait le critère
de Nyquist si et seulement si Lnom (jω) satisfait le critère de Nyquist.
Démonstration (résumé). En vue d’assurer la stabilité simultanée de tous les sys-
tèmes, il est nécessaire que le gain en haute fréquence ne change pas. De plus, pour la
classe de systèmes considérée, la stabilité de la boucle fermée implique que le contour
de Nyquist contourne le point −1 par le même côté pour tous les systèmes. Puisque
les frontières d’Horowitz sont calculées telles que Li (jω) 6= −1 pour tout i et ω et que
les ensembles de valeurs sont simplement connectés, le fait que Lnom (jω) satisfasse
la frontière d’Horowitz implique que tous les systèmes contournent le point −1 par le
même côté.
44 Conception de commandes robustes

R EMARQUES.–
1) La spécification de sensibilité [1.11] satisfait les suppositions du théorème.
2) Le théorème reste valable dans les cas où il y a des systèmes avec différents nombres
de pôles instables.

L’implication directe pour l’utilisateur de QFT est qu’il faut être extrêmement pru-
dent lorsque les ensembles de valeurs ne sont pas simplement connectés. Ceci peut être
le cas pour des systèmes avec différents nombres d’intégrateurs [GUT 94], ou lorsque
l’incertitude est définie par un nombre fini de systèmes discrets [NOR 95]. En général,
Pnom (s) est choisi tel que Pnom (s) ∈ {Pi (s)}, comme recommandé à la section 1.3.
Il est cependant possible de choisir Pnom (s) en dehors de l’ensemble de valeurs, mais
la stabilité de la boucle fermée n’est alors pas assurée par le théorème 1.1.

E XEMPLE 1.8 ( STABILITÉ DE LA BOUCLE FERMÉE ).– Considérons la synthèse


finale de l’exemple 1.7. Il est facile de vérifier que Pnom (jω) = Pnom (jω)G3 (jω)
satisfait le critère de stabilité de Nyquist. Puisque toutes les autres suppositions du
théorème 1.1 sont satisfaites (vérifiez !), la boucle fermée est stable pour tous les cas
envisagés.

1.7. Fermeture de la boucle et synthèse du préfiltre

R ÉSUMÉ.– Simulation de la boucle fermée pour un certain nombre de systèmes et


vérification que les spécifications exprimées dans les domaines fréquentiel et temporel
sont satisfaites.

Lorsque le système est incertain, il est clair qu’une boucle fermée obtenue avec
un compensateur linéaire reste incertaine. L’incertitude résiduelle sera cependant plus
petite que l’initiale, du moins dans l’intervalle de fréquence considéré. Le préfiltre est
« certain » et ne modifie donc pas l’incertitude de la boucle.

Dans QFT, le compensateur est synthétisé tel que l’incertitude de la boucle fer-
mée soit inférieure aux spécifications de tolérance, et que la boucle fermée satis-
fasse les spécifications d’atténuation des perturbations et du bruit de mesure. Une fois
G(s) obtenu, les ensembles de valeurs de la sensibilité complémentaire {S̄i (jω)} =
{G(jω)Pi (jω)/(1 + G(jω)Pi (jω))} sont calculés pour ω ∈ {ωk }. Le préfiltre F (s)
est alors synthétisé tel que la fonction de transfert de la boucle fermée Y (s)/R(s)
soit façonnée conformément aux spécifications de conduite [1.15]. Si [1.18] est satis-
faite et la spécification de conduite définie seulement pour le gain de la boucle fermée
(comme cela est le cas avec [1.15]), il est toujours possible de trouver F (s) rationnel et
asymptotiquement stable qui garantit que la boucle fermée satisfasse les spécifications
[HOR 92].
La méthode QFT 45

Pour une spécification de conduite définie par [1.15], la synthèse du préfiltre


se fait comme suit : tracer {|F (jωk )S̄i (jωk )|} = {|F (jωk )G(jωk )Pi (jωk )/(1 +
G(jωk )Pi (jωk ))|} dans un diagramme de Bode (pour l’amplitude) et les spécifica-
tions ([1.15]). Synthétiser F (s) afin de satisfaire les spécifications pour tout ω.

E XEMPLE 1.9 ( SYNTHÈSE DU PRÉFILTRE ).– Considérons le système défini par [1.6-
1.8] en boucle fermée avec deux degrés de liberté (figure 1.3), avec les spécifications
définies dans les exemples 1.2 et 1.3 et la figure 1.9. Considérons également le com-
pensateur défini par [1.22]. Calculez {|F (jω)G(jω)Pi (jω)/(1 + G(jω)Pi (jω))|}
pour tout ω ∈ {ωk }.

Figure 1.15. Spécifications de conduite ([1.15-1.17] et figure 1.9)


(traits pleins), avec la boucle fermée nominale
{|F (jω)G(jω)Pnom (jω)/(1 + G(jω)Pnom (jω))|} (pointillés),
maxi {|F (jωk )G(jωk )Pi (jωk )/(1 + G(jωk )Pi (jωk ))|} (cercles supérieurs)
et mini {|F (jωk )G(jωk )Pi (jωk )/(1 + G(jωk )Pi (jωk ))|} (cercles inférieurs),
avec F (s) = F1 (s) = 1

Choisissons comme préfiltre initial F (s) = F1 (s) = 1. La figure 1.15 montre


{|F (jωk )S̄i (jωk )|} dans le diagramme de Bode, avec les spécifications dans le
domaine fréquentiel. Il est clair que F (s) devrait être un filtre passe-bas, afin de
réduire le gain de la boucle fermée aux hautes fréquences à des valeurs conformes
aux spécifications. Après quelques tentatives, il est possible d’aboutir, par exemple, à
F (s) = F2 (s) = 1/(1 + s/15)2 (figure 1.16).
46 Conception de commandes robustes

Figure 1.16. Spécifications de conduite ([1.15-1.17] et figure 1.9)


(traits pleins), avec la boucle fermée nominale
{|F (jω)G(jω)Pnom (jω)/(1 + G(jω)Pnom (jω))|} (pointillés),
maxi {|F (jωk )G(jωk )Pi (jωk )/(1 + G(jωk )Pi (jωk ))|} (cercles supérieurs)
et mini {|F (jωk )G(jωk )Pi (jωk )/(1 + G(jωk )Pi (jωk ))|} (cercles inférieurs),
avec F (s) = F2 (s) = 1/(1 + s/15)2

1.8. Simulation de la boucle fermée

La boucle fermée est simulée dans le domaine fréquentiel pour un grand nombre
de cas. Les simulations ne sont pas restreintes à ω ∈ {ωk } (les fréquences pour les-
quelles les ensembles de valeurs ont été calculés), et ceci afin de vérifier que les spéci-
fications sont satisfaites à toutes les fréquences. Si une spécification n’est pas satisfaite
à une fréquence qui n’était pas incluse dans {ωk }, il est souhaitable d’inclure cette fré-
quence dans une nouvelle version de {ωk } et de recommencer la synthèse. En dernier
lieu, la boucle fermée est simulée dans le domaine temporel afin de vérifier que les
spécifications dans ce domaine sont également satisfaites.

E XEMPLE 1.10 ( SIMULATIONS ).– Considérons le système défini par [1.6-1.8] en


boucle fermée avec deux degrés de liberté (figure 1.3), avec les spécifications définies
dans les exemples 1.2 et 1.3 et la figure 1.9. Considérons également le compensateur
défini par [1.22] et le préfiltre F2 (s) défini ci-dessus.
La figure 1.17 présente la spécification de sensibilité [1.10] et la fonction de sensi-
bilité S(jω) = 1/(1 + P (jω)G(jω)) pour 144 cas. La spécification est satisfaite pour
tous les cas.
La méthode QFT 47

Figure 1.17. Diagramme de Bode avec simulations de la fonction


de sensibilité S(jω) = 1/(1 + P (jω)G(jω)) pour 144 cas
et spécification de sensibilité [1.10]

La figure 1.18 présente la spécification de conduite [1.15] et l’amplitude de la


fonction de transfert de la boucle fermée {|F (jω)G(jω)Pi (jω)/(1+G(jω)Pi (jω))|}
pour les mêmes 144 cas. La spécification est satisfaite pour tous les cas.
Des simulations dans le domaine temporel ont été réalisées pour 86 des 144 cas
pour lesquels le retard est maximum (τ = 0,01 seconde). Ces cas avec le retard le plus
élevé sont les plus aptes à violer les spécifications puisqu’ils ont la plus petite marge
de phase. La figure 1.19 présente les spécifications de la figure 1.9 avec les résultats
des simulations. Toutes les simulations satisfont les spécifications, même si certaines
le font de façon très serrée. Il doit être noté que puisque le retard ne peut pas être
compensé par une commande linéaire, les spécifications auraient dû être décalées de
0,01 seconde.

1.9. Quand la synthèse échoue

Si toutes les spécifications dans le domaine fréquentiel sont satisfaites, mais cer-
taines dans le domaine temporel ne le sont pas, ceci est une indication que la transfor-
mation des spécifications du domaine temporel au fréquentiel n’était pas correcte. Les
remèdes sont les suivants :
1) vérifier si un préfiltre différent résout le problème ;
48 Conception de commandes robustes

Figure 1.18. Diagramme de Bode avec simulations de la boucle fermée


|F (jω)P (jω)G(jω)/(1 + F (jω)P (jω)G(jω))| pour 144 cas
et spécification de conduite [1.15]

2) essayer de refaire la synthèse avec des contraintes dans le domaine fréquentiel


plus contraignantes, par exemple en réduisant la spécification de conduite [1.15] ou
de sensibilité [1.10]. Le nouveau compensateur aura un gain plus élevé et la fonction
de sensibilité complémentaire {G(s)Pi (s)/(1 + G(s)Pi (s))} aura une bande passante
plus élevée ;
3) transformer les spécifications temporelles en fréquentielles en utilisant une
approximation plus réaliste de la boucle fermée. Par exemple, si la boucle fermée
présente une résonance, inclure celle-ci lors de la transformation.

Par contre, il peut être noté qu’une (petite) violation des frontières d’Horowitz
émanant de spécifications temporelles transformées en fréquentielles n’entraîne géné-
ralement pas de violation des spécifications dans le domaine temporel.

Si après plusieurs tentatives, comprenant entre autres des retransformations des


spécifications comme expliqué ci-dessus, vous n’aboutissez toujours pas à des résul-
tats satisfaisants, la raison est probablement que vous êtes encore peu familier à QFT
(et l’aide d’un collègue plus expérimenté sera utile), ou qu’il n’existe pas de solution
au problème posé.

Malheureusement, et comme cela est le cas avec toutes les méthodes de synthèse
robuste, en dehors de quelques situations triviales, il n’est pas possible de savoir a
La méthode QFT 49

Figure 1.19. Simulations de la boucle fermée


|F (jω)P (jω)G(jω)/(1 + F (jω)P (jω)G(jω))| pour 86 cas
avec un retard maximum (0,01 seconde).
Les spécifications de la figure 1.9 sont également indiquées
(légendes pour v(t), l(t), A(t), B(t) voir figure 1.9)

priori si un problème peut être résolu. Le théorème suivant, pour un cas trivial, est
connu depuis longtemps dans la litérature QFT [GUT 89, HOR 92].

T HÉORÈME 1.2.– Accomplissement de spécifications de tolérance et de sensibilité


arbitrairement petites.

Supposons que la structure du système incertain soit telle que tous les systèmes
ont un gain aux hautes fréquences de même signe et que :

Pi (s) → ki /sdi , ki ∈ [k, k], di ∈ [di , di + 1, . . . , d − 1, d] ∀i [1.23]

N’importe quelle spécification de conduite [1.15] ou de sensibilité [1.10] X(ω) =


1 + ,  > 0 pour ω ≥ ωH , avec ωH arbitraire, peut être obtenue avec un compensa-
teur causal.
Démonstration (résumé). L’idée est de rendre le gain de G(s) suffisamment grand.
Le problème est dès lors d’assurer la stabilité des intégrateurs multiples. Une telle
stabilisation est toujours possible en ajoutant le nombre requis de filtres d’avancement
de phase qui augmente la phase autour de la fréquence de coupure. Un filtre passe-bas
peut être ajouté à haute fréquence afin de rendre le compensateur causal.
50 Conception de commandes robustes

R EMARQUES.–
1) Pour des systèmes réels, ce théorème n’est pas utile puisqu’il suppose la possibilité
d’une bande passante arbitrairement élevée. En réalité, la bande passante est toujours
limitée à cause de problèmes de saturation, parce que tout système réel est à non mini-
mum de phase aux fréquences élevées, parce qu’un retard est présent, ou encore parce
qu’une incertitude très grande existe aux fréquences élevées, introduite par exemple à
l’aide d’une incertitude non structurée [1.4] :

Pi (s) → ki (1+M (s))/sd, ki ∈ [k, k], di ∈ [d, d+1, . . . , d−1, d] ∀i [1.24]

avec 1 + |M (jω)| un nombre positif suffisamment grand (mais < 2) aux hautes fré-
quences. Il est recommandé que l’utilisateur de QFT (ou de toute autre méthode de
synthèse robuste) inclue une bande passante maximale de façon explicite, ou intro-
duise un retard ou une incertitude non structurée en haute fréquence.
2) Bien que le théorème ne soit pas applicable, il peut donner une indication quant à la
bande passante qui serait nécessaire si les suppositions du théorème étaient réalisées.
Il reste alors à vérifier que cette bande passante est inférieure à la limitation.

Si la synthèse de votre collaborateur plus expérimenté n’est pas non plus couron-
née de succès, il est recommandé de prendre au moins une des actions suivantes :
1) relaxer les spécifications aux fréquences pour lesquelles la violation des fron-
tières d’Horowitz ne peut pas être évitée ;
2) améliorer la connaissance du système, ce qui permet de réduire l’incertitude. En
particulier, essayer de réduire les ensembles de valeurs aux fréquences où les frontières
d’Horowitz ne sont pas satisfaites.

Ce dernier point est connecté à la commande adaptative. S’il n’est pas possible
d’obtenir hors ligne suffisamment d’informations pour diminuer la taille de l’ensemble
de valeurs, il peut être possible de combiner des synthèses robuste et adaptative en vue
d’identifier en ligne des ensembles de valeurs pour un compensateur QFT adaptatif
[GUT 88, YAN 90].

1.10. QFT et des problèmes plus complexes

Ce chapitre est consacré exclusivement à l’utilisation de QFT pour des systèmes


continus de base. QFT a cependant été développé pour des problèmes plus complexes,
parmi lesquels :
– les systèmes contrôlés par ordinateur [NOR 95] ;
– les systèmes de commande en cascade, dans lesquels un ou plusieurs signaux
internes du système sont utilisés pour fermer des boucles de rétroactions internes ;
– certaines classes de systèmes non linéaires [HOR 92, OLD 94, YAN 99] ;
La méthode QFT 51

– les systèmes à plusieurs entrées et sorties (Multiple input multiple output,


MIMO).

Les ouvrages d’Horowitz [HOR 92] et de Yaniv [YAN 99] sont recommandés. En
particulier, le premier inclut une liste d’articles relatifs à QFT publiés jusqu’en 1991.

En conclusion, nous voudrions souligner que QFT a été appliqué avec succès à
un grand nombre d’applications, aboutissant souvent à des performances supérieures
à celles obtenues avec d’autres méthodes de commande robuste. La force de QFT
réside principalement dans le fait qu’il s’agit d’une méthode hautement interactive
dans laquelle l’utilisateur perçoit clairement l’interaction existant entre spécifications,
incertitude et gain de rétroaction.

1.11. Bibliographie

[ACK 93] ACKERMANN J., Robust control, Springer-Verlag, 1993.


[BOD 45] B ODE H.W., Network analysis and feedback amplifier design, Van Nostrand, 1945.
[COH 95] C OHEN B., N ORDIN M., G UTMAN P.O., « Recursive grid methods to compute value
sets for transfer functions with parametric uncertainty », dans Proceedings of the American
Control Conference, 1995.
[GUT 88] G UTMAN P.O., L EVIN H., N EUMANN L., S PRECHER T., V ENEZIA E., « Robust and
adaptive control of a beam deflector », IEEE Transactions on Automatic Control, vol. 33,
no 7, p. 610-619, 1988.
[GUT 89] G UTMAN P.O., N EUMANN L., Å STRÖM K.J., « Incorporation of unstructured
uncertainty into the Horowitz robust design method », dans IEEE International Conference
on Control and Applications (ICCON’8), 1989.
[GUT 94] G UTMAN P.O., BARIL C., N EUMANN L., « An algorithm for computing value sets
of uncertain transfer functions in factored real form », IEEE Transactions on Automatic
Control, vol. 39, no 6, p. 1268-1273, 1994.
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[YAN 99] YANIV O., Quantitative feedback design of linear and non-linear control systems,
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Chapitre 2

Un tour d’horizon sur la commande CRONE


de procédés scalaires et multivariables

2.1. Introduction

La robustesse est un notion très large qui traduit toujours la même idée, à savoir
l’insensibilité, ou à défaut la quasi-insensibilité. Aussi, dans un même domaine, il
existe autant de types de robustesses que de grandeurs insensibles et de grandeurs
auxquelles elles sont insensibles. Le domaine de la commande n’y échappe pas.

Dans ce domaine, il est fréquent de considérer la robustesse de la stabilité.


L’objectif est alors le maintien de la stabilité (robustesse en stabilité) ou, au mieux,
la garantie d’une valeur maximale du facteur de résonance en asservissement ou en
régulation [OUS 95].

Dans l’approche non entière qu’utilise la commande CRONE [OUS 91a,


OUS 91b], abréviation de commande robuste d’ordre non entier, la robustesse est de
nature plus sévère puisqu’il s’agit de celle du degré de stabilité, l’objectif étant alors
le maintien de la performance dynamique fréquentielle ou temporelle qui mesure ce
degré (robustesse en performance).

Plus précisément, la robustesse dont il s’agit est celle du degré de stabilité de la


commande vis-à-vis des incertitudes du procédé.

Le degré de stabilité est mesuré par le facteur de résonance en asservissement ou


celui d’amortissement en asservissement et en régulation : le premier est en effet
significatif du premier dépassement réduit de la réponse libre ou indicielle en
asservissement ou en régulation ; le second est significatif de l’amortissement de son

&KDSLWUH UpGLJp SDU $ODLQ 2867$/283 %HQRvW 0$7+,(8 -RFHO\Q 6$%$7,(5 3DWULFN /$1866(
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

mode oscillatoire. Les incertitudes sont prises en compte à travers les véritables
domaines qu’elles définissent (contrairement à l’approche Hf [KWA 93]) et sans
distinction de leur nature, qu’elles soient structurées ou non structurées. A ce propos, il
convient de préciser qu’une restructuration du procédé due à la prise en compte de
dynamiques négligées (ou non modélisées) peut relever de la reparamétrisation d’un
modèle de structure augmentée (en l’occurrence d’ordre plus élevé). Il suffit que
certains paramètres de ce modèle, initialement nuls pour l’état paramétrique nominal,
deviennent différents de zéro lors de la prise en compte des dynamiques négligées. La
reparamétrisation du procédé intègre alors sa restructuration.

L’ordre non entier d’intégration, réel ou complexe selon la génération de la


commande, permet de paramétrer la transmittance en boucle ouverte avec peu de
paramètres et de réduire ainsi l’optimisation à la recherche de leur valeur optimale.
La synthèse du régulateur sous la forme d’une fraction rationnelle est alors effectuée
pour la transmittance optimale en boucle ouverte, évitant ainsi la synthèse itérative
d’un régulateur à de nombreux paramètres (qu’exige notamment l’approche QFT
[HOR 72, HOR 91]).

En ce qui concerne la performance dynamique fréquentielle duale du facteur de


résonance en asservissement, c’est-à-dire le facteur de résonance en régulation,
l’approche non entière ne recherche en aucun cas à assurer sa robustesse, ce facteur
n’étant pas significatif d’une quelconque performance dynamique temporelle.

Quant à la performance dynamique temporelle indissociable du facteur


d’amortissement, à savoir la fréquence propre, l’approche non entière ne recherche
pas non plus à assurer sa robustesse. Le fait de laisser varier librement la fréquence
propre de la commande permet en effet de mieux « respecter » le procédé,
notamment en évitant de forcer son entrée quand sa dynamique devient beaucoup
plus lente que celle imposée à la commande.

2.2. Les trois générations de commande CRONE

Trois stratégies bien distinctes [OUS 94], assurant d’excellentes performances de


robustesse, ont actuellement fait l’objet de développements théoriques et
technologiques importants. Chacune d’elles définit une génération de la commande
CRONE. Fondées sur l’intégration non entière réelle [OUS 95a], les deux premières
stratégies puisent leur idée dans deux interprétations légitimes du modèle
dynamique d’ordre non entier qui régit une relaxation naturelle robuste, en
l’occurrence celle de l’eau sur une digue poreuse ; appelée robustesse fractale en
raison du caractère fractal de la porosité, la robustesse dont il s’agit est celle de
l’amortissement de la relaxation vis-à-vis de la masse d’eau en mouvement, une telle
robustesse étant aussi remarquable que paradoxale dans l’approche entière de la
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

mécanique où toute relaxation présente un amortissement lié à la masse transportée.


Fondée sur l’intégration non entière complexe [OUS 99], la troisième stratégie est
une généralisation de la deuxième à travers la substitution d’un ou de plusieurs
ordres non entiers complexes à l’ordre non entier réel qui caractérise le
comportement en boucle ouverte autour de la fréquence au gain unité Zu.

La première stratégie repose sur une phase constante du régulateur autour de la


fréquence Zu. Sachant que les variations de marge de phase résultent toujours des
variations additives de phase du procédé et du régulateur autour de la fréquence Zu,
dans cette stratégie, le régulateur présente au moins le mérite de ne pas contribuer
aux variations de marge de phase. Celles-ci se réduisent en effet aux variations de
phase du procédé [OUS 91a].

La deuxième stratégie repose sur une phase constante en boucle ouverte autour
de la fréquence Zu (pour l’état paramétrique nominal du procédé). Contrairement à
la première, son objectif est non plus de réduire les variations de marge de phase,
mais de les annuler. Il peut être atteint par la vérification de deux conditions : un
gabarit vertical que forme le lieu de Black en boucle ouverte autour de Zu pour
l’état paramétrique nominal du procédé ; un glissement du gabarit sur lui-même lors
d’une reparamétrisation du procédé (cette condition étant respectée lorsque la
reparamétrisation conduit uniquement à des variations de gain autour de Zu). Le
gabarit ainsi défini est décrit par la transmittance d’un intégrateur non entier réel
dont l’ordre détermine son placement en phase.

Lorsque la seconde condition ne peut être vérifiée, il n’y a aucune raison pour que
le gabarit vertical assure au mieux la robustesse de la commande. Il convient alors de
le généraliser, conformément à deux niveaux de généralisation. Le premier consiste à
considérer un gabarit, toujours défini comme un segment de droite pour l’état
paramétrique nominal du procédé, mais de direction quelconque, appelé gabarit
généralisé. Ainsi défini, il est décrit par une transmittance fondée sur celle d’un
intégrateur non entier complexe, dont l’ordre réel détermine le placement en phase du
gabarit et dont l’ordre imaginaire détermine ensuite son inclinaison par rapport à la
verticale. Dans le cadre de cette généralisation, la recherche d’un gabarit optimal au
sens de la minimisation d’un critère quadratique (sous contraintes) portant sur les
variations du facteur de résonance en asservissement ou du facteur d’amortissement en
asservissement et en régulation, définit la stratégie optimale qu’utilise la version
initiale de la commande CRONE de troisième génération. Le deuxième niveau
consiste à substituer au gabarit généralisé un ensemble de gabarits du même type,
appelé multigabarit. Sa description par un produit de transmittances non entières
complexes bornées en fréquence définit un gabarit curviligne qui étend le gabarit
rectiligne que forme le gabarit vertical ou généralisé. La recherche d’un gabarit
curviligne optimal au sens de la minimisation du critère précédent définit la stratégie
optimale la plus évoluée qu’utilise la commande CRONE de troisième génération.
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

A ce jour, la commande CRONE de troisième génération permet de traiter des


procédés incertains :
– à non-minimum de phase (retards purs et zéros à partie réelle positive, voir
[LAN 94]),
– instables [MAT 97, SAB 93],
– à modes résonants [OUS 95c],
– non linéaires, après obtention d’un ensemble de procédés linéaires tangents
[LINA 95, SAB 95],
– multivariables [MAT 97, SUT 97],
– T-périodiques [SAB 98],

l’extension de la commande CRONE à des procédés multivariables faisant l’objet de


développements dans le présent chapitre.

2.3. Analyse de la relaxation de l’eau sur une digue poreuse

Déjà dans le courant du XVIIe siècle, les constructeurs de digues avaient noté les
propriétés d’amortissement des digues très accidentées, et notamment de celles
formant des poches d’air susceptibles d’être comprimées par l’avancée des eaux.

Il y a en effet fort longtemps que la relaxation de l’eau sur de telles digues fait
l’objet d’analyses expérimentales très poussées, notamment à travers
l’enregistrement de l’évolution du niveau de l’eau sur la paroi des digues. Dans le
cas de digues fluviales ou côtières, très amortissantes (ou absorbantes) de par une
structure volumique poreuse (donc de dimension fractale au sens de Benoît
Mandelbrot [MAN 82]), les résultats de ces analyses révèlent que :
– la fréquence propre de la relaxation est différente selon que la digue est
fluviale ou côtière ;
– le facteur d’amortissement de la relaxation semble indépendant de la digue,
qu’elle soit fluviale ou côtière.

Etant donné que les essais fluviaux ou côtiers se distinguent notamment par la
différence des masses d’eau transportées, les analyses semblent montrer que la
relaxation est caractérisée par une fréquence propre qui dépend de la masse d’eau
en mouvement et par un facteur d’amortissement qui en est indépendant.

Bien que paradoxal dans l’approche entière de la mécanique où toute relaxation


présente un amortissement lié à la masse transportée, ce résultat pour le moins
remarquable révèle l’insensibilité du facteur d’amortissement à un paramètre au
moins, en l’occurrence la masse d’eau en mouvement. Il traduit ainsi la robustesse
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

du degré de stabilité du processus de relaxation (appelée robustesse fractale), un tel


phénomène étant d’ailleurs plus général qu’il n’y paraît puisqu’il se manifeste
également dans le cas de la relaxation de l’air tout aussi bien dans un poumon que
sur le feuillage d’un arbre [GLE 90].

Sachant que la nature est une source inépuisable de solutions, notre intention est
de déterminer l’essence mathématique d’un tel phénomène, notamment en cherchant
à établir la forme de l’équation différentielle qui régit la relaxation. Le but d’une
telle démarche est d’en tirer des idées directrices pour la conception de nouvelles
stratégies de commande robuste des procédés, les stratégies CRONE de première et
deuxième générations pour ne pas les citer.

2.4. Processus d’étude et interface eau-digue

On considère une masse d’eau M, dont le mouvement est consécutif à sa


pénétration dans une digue perméable par porosité (figure 2.1). En désignant par
V(t) sa vitesse, l’application du principe fondamental de la dynamique permet
d’établir l’équation différentielle :

0 G9 W  )W  [2.1]
GW
dans laquelle F(t) est la force de réaction de la digue, c’est-à-dire la résultante des
forces qui sollicitent la masse d’eau M.

Figure 2.1. Processus d’étude

Si S représente la section d’écoulement de l’eau, il est possible d’exprimer la


vitesse V(t) en fonction du débit Q(t), soit :

9W 4 W 6 [2.2]

De plus, la force F(t) peut s’exprimer en fonction de la pression dynamique P(t)


à l’interface eau-digue, soit :

)W 3W6 [2.3]
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

En portant les expressions [2.2] et [2.3] dans la relation [2.1], on obtient une
nouvelle forme de l’équation différentielle [2.1] :

0 G4 W  3W  [2.4]
6 GW

Par ailleurs, en prenant en compte la fractalité de la porosité de la digue et la


récursivité correspondante, nous avons montré que le débit Q(t) de l’eau est
proportionnel à la dérivée non entière de la pression dynamique P(t) à l’interface
eau-digue [OUS 91a], soit :

4W  § G ·Q 3 W 

avec 1<n<2 [2.5]


Q  ¨ ¸
Z  © GW ¹

équation qui représente le modèle dynamique de l’interface eau-digue.

2.5. Equation différentielle d’ordre non entier comme modèle dynamique


régissant la relaxation

Le fait de porter l’expression de Q(t) donnée par [2.5] dans la relation [2.4]
permet d’établir une équation différentielle linéaire d’ordre non entier n compris
entre 1 et 2, soit :

0  § G ·Q 3 W  3 W  [2.6]
¨ ¸
6 Z Q  © GW ¹




ou, sous forme canonique :

Q
W Q §¨ G ·¸ 3 W  3 W  [2.7]
© GW ¹
en posant :

Q
0 

§ ·
W ¨ ¸ [2.8]
¨
© 6 Z Q


 ¸
¹

appelé constante de temps transitionnelle.


&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

2.6. Robustesse fractale : demi-droites d’iso-amortissement et gabarit


fréquentiel

La robustesse fractale exprime la robustesse de l’amortissement dans la nature


qu’assure la fractalité à travers la dérivation non entière. Aussi, l’objet de cette
section est de démontrer la robustesse de l’amortissement de la relaxation, d’une
part par une approche opérationnelle (paragraphe 2.6.1) et, d’autre part, par une
approche fréquentielle (paragraphe 2.6.2).

2.6.1. Demi-droites d’iso-amortissement

L’équation caractéristique de l’équation différentielle [2.6] admet une expression


de la forme :

WS Q   , soit WS Q  HM S  NS
[2.9]

d’où l’on tire :


 N

 M S
S H Q [2.10]
W
Le caractère non entier de n impliquant la multiformité de l’équation [2.9], il
convient de rendre cette équation uniforme. A cet effet, il faut éviter que l’argument
de p décrive un tour complet, ce qui est possible en effectuant une coupure du plan

complexe, notamment suivant pour assurer la propriété hermitienne des racines.

Une telle coupure impose le détermination ]-S,+S[ à l’argument de p, permettant


d’écrire :

 S    N S  S [2.11]
Q
soit :

 
  N   [2.12]
Q
ou encore, sachant que n est positif, ce qui autorise à multiplier cette double
inéquation par n sans changer le sens des inégalités correspondantes :


Q   N  Q  [2.13]
 
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

Le problème se ramène alors à la recherche des valeurs de k qui satisfont à cette


double inégalité, conformément à la condition sur n, à savoir 1 < n < 2.

1<n<2 1<n<2

2<n+1<3 0<n–1<1

 ! 
Q  !   
Q   
   

      

 Q   N  Q 

N  N 

Il existe donc uniquement deux racines correspondant respectivement à k = 0 et


k = – 1, soit :

S S
 M  M
S H Q et S H Q [2.14]

W 
W
Ces racines déterminent le mode oscillatoire de la relaxation. Elles sont
complexes conjuguées et forment un angle au centre 24 avec 4 = S – S/n (voir
figure 2.2).

W dépendant de la masse d’eau en mouvement, les racines ainsi définies se


déplacent avec un angle constant (fixé par l’ordre n) lorsque la masse d’eau varie.
Ce sont donc deux demi-droites formant le même angle 4 par rapport à l’axe des
réels et appelées demi-droites d’iso-amortissement qui illustrent la robustesse dans
le plan p.

La fréquence propre et le facteur d’amortissement du mode oscillatoire se


déduisent directement des racines à travers leur module 1/W et le demi-angle au
centre 4 qu’elles forment :
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

ZS   §
S  S ·¸  § S ·¸ [2.15]
W W Q¹ W
VLQ 4 VLQ ¨ VLQ ¨
© © Q¹
et :

]Q FRV 4
§
FRV¨ S  S ·¸ §
 FRV¨
S ·¸ [2.16]
© Q¹ © Q¹
Ce résultat exprime que le facteur d’amortissement ] est exclusivement lié à
l’ordre n, permettant ainsi d’introduire la notion de mode oscillatoire robuste.

Figure 2.2. Illustration de la robustesse dans le plan p : le déplacement des racines


sur les demi-droites d’iso-amortissement assure la robustesse de l’amortissement

2.6.2. Gabarit fréquentiel

La transformée de Laplace de l’équation différentielle [2.7] admet une


expression de la forme :

WS Q 3 S  3 S  [2.17]

d’où l’on tire :

Q
§  ·
3S ¨ ¸ 3S [2.18]
¨
©WS ¸
¹

Cette équation opérationnelle se traduit par le schéma fonctionnel de la figure 2.3


qui rappelle celui d’une boucle de commande libre (consigne E(p) nulle). En raison
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

d’un retour unitaire, la chaîne d’action détermine une transmittance en boucle


ouverte de la forme :

Q
ES §  ·
¨ ¸
Q §
¨
Z X ·¸ [2.19]
¨
©WS ¸
¹
¨
©
S ¸
¹

qui n’est autre que la transmittance d’un intégrateur non entier de fréquence au gain
unité (ou de transition) Zu = 1/W.

Figure 2.3. Schéma fonctionnel permettant de définir un transfert en boucle ouverte

Sachant que arg E(jZ) = – nS/2 et que 1 < n < 2, le lieu de Black de E(jZ) est une
droite verticale d’abscisse comprise entre – S/2 et – S (voir figure 2.4).

Figure 2.4. Illustration de la robustesse dans le plan de Black :


la forme et le déplacement vertical du lieu de Black en boucle ouverte assurent la robustesse
de l’amortissement par l’invariance de la distance au point critique

Physiquement, une digue ne peut comporter des cavités infiniment grandes et


infiniment petites. Les fréquences transitionnelles qu’elles définissent ne peuvent
alors prendre des valeurs tendant aussi bien vers l’infini que vers zéro. Elles
appartiennent à un intervalle fréquentiel borné qui ne couvre que partiellement
l’espace des fréquences et limite la dérivation non entière d’ordre n à une plage de
fréquences moyennes. Ainsi, la droite verticale d’abscisse – nS/2 se réduit à un
segment de droite vertical s’étendant autour de la fréquence au gain unité Zu (voir
figure 2.5). Ce segment est appelé gabarit fréquentiel en boucle ouverte (ou plus
simplement gabarit).
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

Zu = 1/W dépendant de la masse d’eau en mouvement, le gabarit ainsi défini


glisse sur lui-même lors d’une variation de la masse d’eau. Compte tenu de sa
forme, un tel déplacement vertical du gabarit assure la constance de la marge de
phase )m (voir figure 2.5) et, par conséquent, celle de la « distance au point
critique » (sachant que )m en donne alors une mesure significative), traduisant ainsi
la robustesse de l’amortissement. Il est aisé de concevoir que la robustesse est
d’autant meilleure que la longueur AB du gabarit est importante, le déplacement du
gabarit étant lié à la modification du paramètre M.

Figure 2.5. Un segment de droite vertical définit le gabarit dans le plan de Black

2.7. De la robustesse fractale à la commande CRONE de deuxième génération

Abstraction faite de la commande CRONE de première génération qui repose sur


un régulateur présentant un blocage de phase à un multiple non entier de S/2 autour
de la fréquence Zu, l’idée initiale de la commande CRONE, et notamment de celle
de deuxième génération, résulte de la transposition en automatique de la robustesse
fractale telle que définie à travers le gabarit fréquentiel.

Dans le domaine de la commande, un objectif est en effet d’obtenir un


comportement fréquentiel en boucle ouverte similaire à celui qui assure la
robustesse de l’amortissement de la relaxation de l’eau sur une digue poreuse,
notamment (voir figure 2.5) :
– un lieu de Black en boucle ouverte qui dessine le gabarit vertical pour l’état
paramétrique nominal du procédé ;
– un glissement du gabarit sur lui-même lors d’une reparamétrisation du
procédé (cette condition étant vérifiée lorsque la reparamétrisation conduit
uniquement à des variations de gain autour de Zu).
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

2.7.1. Domaines d’incertitudes

Cas du procédé
Un domaine d’incertitudes du procédé est défini comme le domaine du plan de
Nyquist ou de Black qui regroupe l’ensemble des points images des réponses
fréquentielles du procédé obtenues, à une fréquence donnée, pour ses différents états
paramétriques (voir figure 2.6).

Figure 2.6. Domaine d’incertitudes du procédé :


* MZ désigne la réponse en fréquences du procédé nominal ;
* MZ * Z Z



M  '* M représente la réponse en fréquences du procédé
pour un état paramétrique différent du nominal

Cas de la boucle ouverte


Un domaine d’incertitudes de la boucle ouverte est défini comme le domaine du
plan de Nyquist ou de Black, qui regroupe l’ensemble des points images des
réponses fréquentielles en boucle ouverte obtenues, à une fréquence donnée, pour
les différents états paramétriques du procédé (voir figure 2.7).

Figure 2.7. Domaine d’incertitudes de la boucle ouverte : E MZ & MZ * MZ


 

désigne la réponse en fréquences en boucle ouverte nominale ; E MZ E MZ  'E MZ




avec 'E MZ & MZ '* MZ , représente la réponse en fréquences en boucle ouverte


correspondant à un état paramétrique du procédé différent du nominal
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

Sachant que (voir figure 2.8) :

E MZ & MZ * MZ [2.20]

il est possible d’écrire :

E MZ G%
& MZ G%
 * MZ G%
[2.21]

et :

DUJ E MZ DUJ & MZ  DUJ * MZ [2.22]

De telles relations expriment que le passage d’un point image de G(jZ) à un


point image de E jZ) s’effectue, pour chaque point, par les mêmes opérations de
translation ~C(jZ ~dB et arg C(jZ  le régulateur C(jZ apportant le même gain et la
même phase à une même fréquence Z donnée.

C’est dire que les domaines d’incertitude de la boucle ouverte sont identiques à
ceux du procédé, si ce n’est que leur position est différente. Leur positionnement
relatif est en effet conforme à la relation de correspondance E jZ) = C(jZ * jZ)

Figure 2.8. Boucle de commande élémentaire : e(t) consigne ; p(t) perturbation ; s(t) sortie ;
H(t) signal d’erreur ; u(t) entrée du procédé ; C(p) régulateur ; G(p) procédé

2.7.2. Domaines d’incertitudes de la boucle ouverte ayant conduit au gabarit

Lorsque la masse d’eau en relaxation M change, la fréquence Zu est modifiée


selon le relation :

 Q
ZX  §
¨ Z Q 6
 ·
¸ [2.23]
W ¨
©

0 ¸
¹
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

Si la phase en boucle ouverte reste constante, soit arg E(jZ) = – nS/2, le gain en
boucle ouverte varie conformément aux valeurs extrémales :

ZX Q
E MZ §
¨ PLQ
·
¸ [2.24]
PLQ ¨
© Z ¸
¹

et :

ZX Q
E MZ § ·
PD[
¨ ¸ [2.25]
PD[ ¨
© Z ¸
¹

d’où l’on tire :

Q
E MZ PD[
§
¨
ZX PD[
·
¸ [2.26]
E MZ PLQ
¨
©
ZX PLQ
¸
¹

soit en décibels :

§ ZX ·
E MZ E MZ Q
 ORJ¨
PD[ ¸ [2.27]
ZX

PD[ G% PLQ G% ¨ ¸
© PLQ ¹

Dans le plan de Black, les domaines d’incertitudes sont donc des segments de
droite verticaux de longueur constante, 20 n log (Zumax/Zumin) (voir figure 2.9).

Figure 2.9. Type de domaines d’incertitudes


correspondant à des variations de la masse d’eau

2.7.3. Adéquation du gabarit aux domaines d’incertitudes

La configuration fréquentielle définie par le gabarit vertical et les domaines


d’incertitudes ainsi particularisés, exprime d’elle-même le rôle que joue le gabarit
dans le positionnement des domaines d’incertitudes.
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

La figure 2.10 montre en effet que le gabarit assure un positionnement optimal


des domaines d’incertitudes, notamment en les positionnant de manière qu’ils ne
pénètrent pas les zones de faible degré de stabilité. La zone de faible degré de
stabilité illustrée à titre d’exemple est en l’occurrence celle que délimite un contour
d’amplitude de Black.

Il s’avère que le positionnement optimal des incertitudes assuré par le gabarit


résulte de ce que la direction du gabarit est la même que celle des domaines
d’incertitudes. C’est en fait cette propriété qui est à l’origine de la généralisation du
gabarit qu’exige la considération de domaines d’incertitudes moins particuliers.

Figure 2.10. Le gabarit vertical positionne les domaines d’incertitudes


de manière qu’ils ne pénètrent pas le contour d’amplitude QdB

2.8. Généralisation du gabarit à travers la commande CRONE de troisième


génération

2.8.1. Premier niveau de généralisation

2.8.1.1. Gabarit généralisé


Lorsque les domaines d’incertitudes ne se réduisent pas uniquement à des
segments de droite verticaux, il convient de généraliser le gabarit vertical,
notamment en lui substituant un gabarit :
– toujours défini comme un segment de droite pour l’état paramétrique nominal
du procédé ;
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

– mais qui ne détermine plus forcément un blocage de phase autour de la


fréquence Zu.

Le segment de droite vertical qui définissait jusqu’ici le gabarit dans le plan de


Black est ainsi remplacé par un segment de droite de direction quelconque, appelé
gabarit généralisé (voir figure 2.11).

Figure 2.11. Représentation du gabarit généralisé dans le plan de Black

Afin que le gabarit généralisé assure un positionnement optimal des domaines


d’incertitudes, notamment en les positionnant de manière qu’ils pénètrent le moins
possible les zones de faible degré de stabilité, la direction du gabarit généralisé peut
être donnée par la direction moyenne des axes principaux des domaines
d’incertitudes calculés autour de la fréquence Zu (voir figure 2.12).

Figure 2.12. Le gabarit généralisé positionne les domaines d’incertitudes


de manière qu’ils pénètrent le moins possible le contour d’amplitude QdB :
(a) gabarit généralisé quelconque ; (b) gabarit généralisé optimal
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

Etant donné la continuité de la direction des axes principaux des domaines


d’incertitudes, une bonne approximation consiste à attribuer au gabarit généralisé la
direction de l’axe principal du domaine d’incertitudes calculé à la fréquence Zu (voir
figure 2.13a).

La direction du gabarit généralisé peut aussi s’identifier à celle de l’axe principal


du domaine d’incertitudes calculé à la fréquence de résonance en asservissement Zr,
choix apparaissant quelque peu préférentiel puisque cette fréquence est celle à
laquelle le gabarit généralisé tangente le contour d’amplitude QdB (figure 2.13b)

2.8.1.2. Gabarit généralisé et intégration non entière complexe


Le gabarit vertical est caractérisé par un ordre d’intégration non entier réel n, qui
détermine son placement en phase à – nS/2 (voir figure 2.5). Il est en effet décrit par
la transmittance d’un intégrateur non entier réel, soit :

ES §
¨
Z X ·¸ Q avec n [2.28]
¨
© S ¸
¹

Dans le cadre d’une étude visant à étendre la description du gabarit vertical


[OUS 91a], nous avons montré que le gabarit généralisé est caractérisable par un
ordre d’intégration non entier complexe n, dont la partie réelle détermine son
placement en phase à la fréquence Zu, soit – ƒG(n)S/2, et dont la partie imaginaire
détermine ensuite son inclinaison par rapport à la verticale (voir figure 2.14).

Figure 2.13. Gabarit généralisé optimal dont la direction est donnée par celle de l’axe principal
du domaine d’incertitude correspondant (a) à la fréquence Zu , (b) à la fréquence Zr
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

Figure 2.14. L’ordre réel d’intégration, a = ƒG (n) détermine le placement en phase


à la fréquence Zu du gabarit généralisé, soit – aS/2 ; ensuite, l’ordre imaginaire d’intégration
b= <% (n), détermine son inclinaison par rapport à la verticale

Le gabarit généralisé est en effet décrit par une transmittance fondée sur
l’intégration non entière complexe, soit :

 VLJQ E
VLJQ E D§ LE ·
§ § S ·· § Z X · ¨ ª«§ Z X · º» ¸
E S ¨¨ FK¨ E ¸ ¸¸ ¨¨ ¸¸ ¨ ¨¨ ¸¸ ¸ [2.29]
© ©  ¹¹ © S ¹ ¨¨ «¬© S ¹ »¼ ¸¸
© & M ¹

RX HQFRUH HQ GpYHORSSDQW OH WHUPH UHVWUHLQW DX SODQ RSpUDWLRQQHO M




VLJQ E D§ §  VLJQ E
§ § S ·· § ZX · ¨ FRV¨ E OQ§¨ Z X · ·¸ ·¸
E S ¨¨ FK¨ E ¸ ¸¸ ¨¨ ¸¸ ¸¸ ¸ [2.30]
© ©  ¹¹ © S ¹ ¨ ¨© ¨© S ¹ ¹ ¸¹
©

Le paramètre n (n = a + ib) ne représente (en toute rigueur) l’ordre d’intégration


complexe de la transmittance E(p) (relation [2.29]) que lorsque le paramètre b est
négatif. Néanmoins, afin d’alléger les développements ultérieurs, nous conviendrons
de conserver la dénomination ordre d’intégration lorsque le paramètre b est positif.
Par ailleurs, il convient de préciser que l’imaginaire pur unitaire i qui figure dans
l’ordre d’intégration n = a + ib est indépendant de l’imaginaire pur unitaire j qui
figure dans la variable opérationnelle p = V + jZ.

REMARQUE.– Dans le cas où la transmittance de description du gabarit généralisé


fait l’objet d’une troncature fréquentielle à la fois en basse et en haute fréquence, il
convient de substituer à la relation [2.29] une expression plus générale de la forme :
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

 VLJQ E
D§ LE ·
§ S · ¨ ª«§ S · º» ¸
¨  ¸ ¨ ¨  ¸ ¸
Z ¸ ¨ «¨ & Z ¸ »
E S & VLJQ E ¨¨ & S
K
¸ ¨ «¨  S
K
¸ »
¸
¸  [2.31]
¨  Z ¸ ¨ «¨   Z ¸ » ¸
© E ¹ ¨ «¬© E ¹ »¼ ¸
© & M ¹
dans laquelle :

ª § §Z · § Z · ·º
& FK«E¨¨ DUFWJ ¨¨ X ¸¸  DUFWJ ¨¨ X ¸¸ ¸¸» [2.32]
« ©¬ © ZE ¹ © Z K ¹ ¹» ¼
HW 

§ § Z · ·
¨ ¨ X ¸ ¸
¨ ¨Z ¸ ¸
& ¨ © E¹ ¸ [2.33]
¨ § Z · ¸
¨¨   ¨¨ X ¸¸ ¸¸
© © ZK ¹ ¹
l’expression de C0 se réduisant à :

& Z X [2.34]
ZE

dans le cas particulier où les fréquences transitionnelles basse et haute Zb et Zh, sont
distribuées géométriquement par rapport à Zu, soit (Zb Zh)1/2 = Zu.

2.8.2. Deuxième niveau de généralisation

2.8.2.1. Gabarit curviligne


Un gabarit rectiligne dont la direction s’identifie à celle de l’axe principal du
domaine d’incertitudes calculé à la fréquence Zr n’assure en fait qu’un véritable
positionnement optimal de ce domaine d’incertitudes, les autres domaines pouvant
en effet par trop pénétrer le contour d’amplitude QdB.

Afin d’accorder à chacun des domaines d’incertitudes ce qu’accorde le gabarit


généralisé calculé à la fréquence Zr, notamment en prenant sa direction, il convient de
substituer au gabarit généralisé un gabarit curviligne dont la tangente en chaque point
fréquentiel s’identifie à l’axe principal du domaine d’incertitudes correspondant.
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

En exploitant au mieux la propriété de la robustesse fractale à travers laquelle


« la direction du gabarit est la même que celle des domaines d’incertitudes », la
stratégie qui consiste à mettre en jeu un gabarit curviligne permet en fait d’obtenir,
autour de la fréquence Zu ou Zr, un lieu de Black en boucle ouverte incertain
d’ « épaisseur » la plus faible possible, critère de robustesse par excellence,
l’épaisseur étant en l’occurrence mesurée par l’écart entre les lieux de Black
extrémaux qui enveloppent l’ensemble des domaines d’incertitudes (figure 2.15).

Figure 2.15. La zone délimitée par les lieux de Black extrémaux qui enveloppent les
domaines d’incertitudes positionnés par le gabarit curviligne définit, autour Zu ou Zr, un lieu
de Black incertain dont l’« épaisseur » détermine son incertitude

Figure 2.16. Du gabarit généralisé (a) au multigabarit (b) ; du gabarit rectiligne


(a) au gabarit curviligne (c)
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

2.8.2.2. Description opérationnelle du gabarit curviligne


Dans la recherche d’une description du gabarit curviligne par une transmittance
non entière, il convient d’interpréter le lieu asymptotique du gabarit curviligne
comme un multigabarit définissable par un ensemble de gabarits généralisés (figure
2.16).

L’interprétation telle que définie à travers le multigabarit permet de décrire le


gabarit curviligne par une transmittance résultant du produit des transmittances
bornées en fréquence de la même forme que l’expression [2.31], soit :

1
 S – EN S [2.35]
N 1

avec (pour k z 0) :

 VLJQ EN
§ ·
§

S · DN ¨ ª«§ 
S LE
· N º» ¸
¨  ¸ ¨ ¨  ¸ ¸
VLJQ EN
¨ NZ Z N  ¸ ¨ «¨ N Z Z N ¸ » ¸
EN S &N ¨Z


¸ ¨ «¨ Z


¸ » ¸ [2.36]
S S
¨¨ N   ¸¸ ¨ «¨¨ N   ¸¸ » ¸
© Z N ¹ ¨ «© ZN ¹ »¼ ¸¸
¨¬ &M
© ¹

pour k = 0, Ek(p) est défini par la relation [2.31], dans laquelle Zb et Zh sont en
l’occurrence remplacés par Z0 et Z1.

Zk et Zk+1 désignent les fréquences transitionnelles basse et haute du gabarit


généralisé de rang k. Z’k représente la fréquence par rapport à laquelle est défini ce
gabarit. Plus précisément, elle représente sa fréquence « centrale » lorsque k est
différent de zéro, soit :

ZN Z NZ N  
 
pour k z 0 [2.37]

Le gabarit généralisé de rang 0, dit « médian », est celui défini par rapport à
Z’0 = Zu. Z’0 ne représente pas forcément sa fréquence centrale sachant qu’afin
d’assurer un degré de liberté supplémentaire, Z’0 n’est pas nécessairement égal à
(Z0 Z1) .
1/2

Le gain Ck permet d’assurer un gain unitaire à Ek(p) à la fréquence Zu fixée par


le concepteur.
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

N– désigne le nombre de gabarits généralisés définis par rapport à des fréquences


Z’k inférieures à Zu. N+ désigne le nombre de gabarits généralisés défini par rapport
à des fréquences Z’k supérieures à Zu. Dans le cas particulier où N– = N+ = 0, E(p) se
réduit à la transmittance de description du gabarit généralisé bornée en fréquence
que définit [2.31].

2.8.3. Transfert en boucle ouverte intégrant le gabarit curviligne

L’objectif est de décrire analytiquement le comportement en boucle ouverte


(pour le procédé nominal) qui prenne en compte à la fois :
– les spécifications de précision aux basses fréquences ;
– le gabarit curviligne au voisinage de la fréquence Zu ;
– le comportement du procédé aux hautes fréquences conformément aux
spécifications sur la sensibilité de l’entrée à ces fréquences.

Pour des procédés stables à minimum de phase, il s’avère que le comportement


ainsi défini peut être décrit par une transmittance fondée sur l’intégration non
entière complexe bornée en fréquence [OUS 99], soit :

E S EE S  S E K S [2.38]

La transmittance E(p), fondée sur l’intégration non entière complexe, n’est autre
que la transmittance de description du gabarit curviligne définie par l’ensemble des
relations [2.35] et [2.36]. Ses fréquences transitionnelles extrémales sont Z–N– en
basse fréquence et ZN++1 en haute fréquence.

La transmittance Eb(p) est celle d’un proportionnel-intégrateur d’ordre nb, dont la


fréquence transitionnelle est égale à la fréquence transitionnelle extrémale basse de
E(p), afin que le raccordement de Eb(p) avec E p) ne se traduise pas par
l’introduction de paramètres supplémentaires. Eb(p) est alors défini par :

QE
§ Z 1  ·
EE S &E ¨¨  ¸¸ [2.39]
S


© ¹

si npb représente l’ordre du comportement asymptotique du procédé en basse


fréquence (Z < Z-N-), l’ordre nb est donné par :

QE t  si Q SE  et QE t Q SE si Q SE t  [2.40]

sachant que nb = 1 annule l’erreur de position et que nb = 2 annule l’erreur de


traînage ; enfin, Cb permet d’assurer un gain unitaire à Eb(p) à la fréquence Zu.
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

La transmittance Eh(p) est celle d’un filtre passe-bas d’ordre nh, dont la
fréquence transitionnelle est égale à la fréquence transitionnelle extrémale haute de
E(p), afin que le raccordement de Eh(p) avec E(p) n’introduise pas de paramètres
supplémentaires. Eh(p) est donc défini par :

EK S
&K [2.41]
QK
§ ·
¨  S ¸
¨ Z  ¸


© 1   ¹

si nph désigne l’ordre du comportement asymptotique du procédé en haute fréquence


(Z > ZN++1), l’ordre nh est donné par :

QK t Q SK [2.42]

sachant que, pour Z > ZN++1, nh = nph assure la constance avec la fréquence de la
sensibilité de l’entrée et nh > nph assure sa décroissance avec la fréquence ; enfin, Ch
permet d’assurer un gain unitaire à Eh(p) à la fréquence Zu.

2.8.4. Optimisation du comportement en boucle ouverte

Dans le but de favoriser le caractère didactique de ce paragraphe, le gabarit


curviligne est réduit au gabarit généralisé en particularisant N– et N+ (relation [2.35])
conformément à N– = N+ = 0. E(p) est alors défini par l’expression [2.31], les
fréquences transitionnelles extrémales Z-N- et ZN++1 se réduisant ainsi à Zb et Zh.

2.8.4.1. Gabarit optimal


L’optimisation du gabarit généralisé quant à sa position, sa direction sa
longueur, consiste à déterminer les valeurs optimales des quatre paramètres
suivants, à savoir :
– l’ordre réel d’intégration a, qui détermine la position du gabarit le long de
l’axe 0 dB ;
– l’ordre imaginaire d’intégration b, qui détermine son inclinaison par rapport à
la verticale ;
– les fréquences transitionnelles basse et haute Zb et Zh, qui déterminent sa
longueur.

Ce sont en effet ces paramètres qui « préparamétrisent » la transmittance en


boucle ouverte E(p). Dans le cas particulier où nb = 3 et nh = 4, la figure 2.17 illustre
comment ils agissent pour contribuer à la recherche de la forme optimale de E(p).
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

Figure 2.17. Visualisation de l’effet des paramètres a, b, Z et Z


b h
sur le lieu asymptotique de Black de E(jZ)

En fait, la condition de tangence du lieu de Black de E(p) à un contour


d’isodépassement ou d’iso-amortissement pour une fréquence Zu donnée réduit la
« préparamétrisation » à trois paramètres indépendants.

La « préparamétrisation » de la transmittance en boucle ouverte que permet


l’ordre non entier complexe d’intégration simplifie considérablement la synthèse. La
recherche de la transmittance en boucle ouverte optimale s’effectue en effet non
seulement à partir d’un ensemble de transmittances restreint à celles qui satisfont les
performances nominales, mais également dans un espace paramétrique de
description dont la dimension est réduite, en l’occurrence à trois. C’est dire que
l’introduction d’un autre gabarit généralisé conduit à trois paramètres indépendants
supplémentaires. Le gabarit curviligne ne doit donc résulter que d’un petit nombre
de gabarits rectilignes afin de ne pas perdre l’intérêt que présente l’intégration non
entière en matière de préparamétrisation avec peu de paramètres.

Finalement, étant donné que la structure de la transmittance en boucle ouverte


est connue et sachant que la fréquence Zu est fixée par le concepteur, les quatre
paramètres optimaux, aopt, bopt, Zbopt et Zhopt, déterminent entièrement la forme
optimale de E(p). Celle-ci est en effet obtenue en portant les paramètres optimaux
ainsi définis dans l’expression [2.38], dans laquelle E(p) est donné par [2.35] et
Eb(p) et Eh(p) par [2.39] et [2.41], les paramètres Cb et Ch se déduisant des autres.

2.8.4.2. Critère sous contraintes à minimiser par le gabarit optimal


La recherche du gabarit optimal relève de l’optimisation sous contraintes
[PRE 89, SUB 89]. Le gabarit optimal doit en effet minimiser un critère quadratique
de la forme :
- '  PD[
' G


 '  PLQ
' G


[2.43]
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

que traduit fréquentiellement [OUS 95] :

- 4D
PD[
 4D G 
 4D PLQ  4DG 
[2.44]

tout en respectant l’ensemble des contraintes suivantes pour l’ensemble des


procédés (ou des états paramétriques du procédé). Qad désigne la valeur désirée du
facteur de résonance en asservissement pour l’état paramétrique nominal du
procédé, et Qamax et Qamin caractérisent ses variations extrémales du fait de la
reparamétrisation du procédé.

Dans l’espace des temps, les premières contraintes consistent à forcer les réponses
indicielles en asservissement ou en régulation à évoluer conformément à un calibre
prédéterminé par le concepteur (ce calibrage est illustré en régulation à la figure 2.18).

Les zones hachurées 1 et 2 limitent les effets de traînage des réponses. Dans
l’espace des fréquences, les contraintes temporelles ainsi définies se traduisent par le
calibrage des diagrammes de gain en asservissement nominaux et reparamétrés,
comme illustré par la figure 2.19. Les zones hachurées 1 et 2 de cette figure sont en
correspondance avec celles de la figure 2.18. La zone 3 permet d’atténuer l’effet
d’un bruit de mesure sur la sortie au-delà d’une fréquence donnée. Il est vrai que
[Y(jZ)/Dm(jZ)]e(t)=0;du(t)=0;dy(t)=0 = - T(jZ) (figure 2.21).

Le gain maximal de la fonction sensibilité de l’entrée étant significative du niveau


de sollicitation de l’entrée du procédé, une contrainte consiste à le majorer, soit :

6XS 5 MZ  5PD[ [2.45]


*

avec (voir figure 2.21) :

ª 8 MZ º ª 8 MZ º ª 8 MZ º & MZ
5 MZ « »H W « »H W « ( MZ » G P W
¬« ' \ MZ ¬ 'P MZ  E MZ


¼» G X W ¼ GX W ¬ ¼ GX W
 


 

G\ W G\ W


GP W 
 

[2.46]

Une contrainte supplémentaire consiste à borner fréquentiellement le gain en


régulation, 6 MZ , conformément au calibre qu’illustre la figure 2.20. Les zones
hachurées représentent les zones d’exclusion des diagrammes de gain en régulation :
– la zone 1 permet d’atténuer l’influence sur la sortie y(t) d’une perturbation de
sortie dy(t) en deçà d’une fréquence donnée ;
– la zone 2 permet de prendre en compte une spécification relative à la marge de
module LQI   E MZ .
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

sr(t)

,,,,,,, ,,,,,, ,,,,,,,


, ,
,,,,, , , ,
2

, ,
t
0 D'1

,
1

, ,
Figure 2.18. Calibrage des réponses indicielles en régulation nominales et reparamétrées
,,,,,,, ,,,,,,,
,,,,,,, ,,,,,,,
,,,,,,, ,,,,,,,
,,,,,,, ,,,

Figure 2.19. Calibrage des diagrammes de gain en asservissement nominaux et reparamétrés


,,,,

Figure 2.20. Calibrage des diagrammes de gain en régulation nominaux et reparamétrés


&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

Enfin, notamment dans le cas de modes peu amortis du procédé, une dernière
contrainte consiste à majorer le gain maximum de la fonction de transfert
perturbation de commande-sortie, soit :

6XS *6 MZ  *6 PD[ [2.47]


*

avec (voir figure 2.21) :

ª < MZ º * MZ
*6 MZ « »H W 
¬ 'X MZ  E MZ


¼G\ W  

GP W 
[2.48]

Le schéma de commande est représenté figure 2.21.

Figure 2.21. Schéma de commande

2.8.5. Synthèse paramétrique du régulateur

Le régulateur est défini par une transmittance non entière Cne(p) déduite du
rapport :

E S
&QH S [2.49]
* S
dans lequel E(p) est donné (pour cette génération de la commande) par la relation
[2.38] et où G0(p) désigne la transmittance nominale du procédé.

La synthèse de la transmittance entière d’ordre réduit du régulateur Cen(p),


consiste à réaliser l’identification par modèle rationnel entier de la réponse en
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

fréquences Cne(jZ). La synthèse revient alors à adapter les paramètres d’une


transmittance de structure prédéfinie à la réponse en fréquences Cne(jZ). Le modèle
rationnel entier sur lequel est fondée l’estimation paramétrique est de la forme :

&HQ S 5S [2.50]
6S
où R(p) et S(p) sont des polynômes de degrés n et d spécifiés, soit :

Q
5S ¦ UN S N [2.51]
N 

et :

Q
6S ¦ VN S N [2.52]
N 

L’objectif est d’estimer le vecteur des paramètres v, constitué des coefficients


des polynômes R(p) et S(p), soit :

Y >U  UQ V
  VG @7 [2.53]

qui annule l’écart entre la réponse en fréquences approchée Cen(jZ) et celle en


fréquences à identifier Cne(jZ), soit :

H MZ &HQ MZ  &QH MZ [2.54]

sur m fréquences Zi définies par le concepteur.

La connaissance des transmittances équivalentes à Cne(p) pour p tendant (en


module) vers zéro puis vers l’infini, soit :

D
&QH S | , G  1 D0  5 [2.55]
SG


S o 

et :

&QH S | DGff , Gf  1 Df  5 [2.56]


S of S

&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

permet de réduire le nombre de paramètres du modèle à déterminer. Des relations


[2.55] et [2.56] se déduisent en effet les relations suivantes :

U D  ; VG 
 si G !  , alors V Λ VG 

 [2.57]

et :

G  Q Gf ;
UQ D [2.58]
VG f
La transmittance du modèle utilisant l’ensemble des relations [2.57] et [2.58]
s’exprime alors par :

Q 
D f VG S Q  ¦ UN S N  D 
&HQ S N 
avec G  Q Gf [2.59]
G
¦ VN S N  S G 
N G  

Le vecteur des paramètres à déterminer correspondant se réduit à :

Y >U Λ UQ  VG
  
  Λ
  VG @7 [2.60]

Deux techniques de synthèse sont utilisées. La première est fondée sur les
fonctions symétriques élémentaires des racines de Viète [LAN 94]. La seconde
repose sur la résolution d’un problème de programmation linéaire [MAT 94].

2.8.6. Application

Le procédé d’étude considéré à titre d’exemple est décrit par la fonction de


transfert :

§
¨¨ 
S ·¸
¸
© Z¹


* S * [2.61]
§
¨¨
S ·§
 ¸¸¨  ]
S  S  ·¸
Z ¹¨© Z Q Z Q  ¸¹
  

L’état paramétrique nominal de ce procédé est défini par G0nom = 50, Z’1nom = 0,01,
Z1nom = 0,02, Znnom = 1 et ]nom = 0,8. Par ailleurs, les paramètres G0, Z’1nom, Z1nom, et
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

Znnom sont incertains et peuvent prendre des valeurs quelconques à l’intérieur des
intervalles suivants :

*QRP d * d * Z QRP
d Z  d Z QRP
 QRP   

 

ZQRP Z QQRP
d Z d ZQRP
 HW d ZQ d Z QQRP


 

L’objectif de la loi de commande à synthétiser est d’assurer un facteur de


résonance en asservissement de 2,3 dB et une fréquence au gain unité en boucle
ouverte de 20 rd/s.

Le correcteur répondant à ces objectifs est donné par la relation [2.49] où la


transmittance optimale en boucle ouverte E(p) est caractérisée par la relation [2.38]
avec :
– +
N = N =0, nb = 1, nh = 2,
a = 1,44, b = – 0,209, Z b = 0,12 rd/s et Z h = 955,44 rd/s

Comme l’illustre la figure 2.22, ce comportement optimal en boucle ouverte


positionne les domaines d’incertitude de façon à assurer le robustesse du degré de
stabilité du système en boucle fermée.

Figure 2.22. Lieu de Black du comportement optimal en boucle ouverte


et domaines d’incertitudes associés
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

Figure 2.23. Réponses à une perturbation de sortie du système en boucle fermée pour l’état
paramétrique nominal du procédé et pour deux états paramétriques extrêmes

Dans le domaine temporel, la robustesse du degré de stabilité est illustrée par des
variations limitées, en fonction du temps et de l’état paramétrique du procédé, du
premier dépassement de la réponse à une perturbation de sortie de type échelon (voir
figure 2.23).

2.9. Commande CRONE multivariable

2.9.1. Introduction

La commande CRONE multivariable étend véritablement la stratégie CRONE de


troisième génération aux procédés multivariables carrés. Dans le continuum ainsi
défini, l’approche multivariable est fondée sur la préparamétrisation non entière
complexe de la matrice de transfert en boucle ouverte nominale. Un ensemble de
gabarits curvilignes associé à la boucle ouverte assure le degré de stabilité et le
découplage de la commande. L’optimisation consiste à rechercher l’ensemble de
gabarits curvilignes qui minimise les variations du degré de stabilité sous des
contraintes de calibrage des éléments des fonctions de sensibilité nominales et
reparamétrées.

La préparamétrisation non entière qu’utilise la commande CRONE multivariable


s’inscrit dans le cadre des techniques de découplage par retour de sortie. D’origine
plus récente que les techniques de découplage par retour d’état initialisées par Morgan
en 1964 [MOR 64], les techniques de découplage par retour de sortie trouvent leur
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

origine, en 1975, dans les travaux de Wang et Davison sur la commande découplante
par retour statique de sortie [WAN 75]. En 1981, Desoer et Chen [DES 81] donnent
une paramétrisation simple de l’ensemble des matrices de transfert en asservissement
diagonales stables pour des procédés stables, de laquelle ils déduisent une technique de
commande par placement des pôles et des zéros de la boucle fermée. En 1984, Desoer
[DES 84] étend sa technique [DES 81] aux procédés instables simples (un procédé
instable simple présentant un pôle instable simple ou double). En 1985, Dickman et
Sivan [DIC 85] montrent que, de l’ensemble des matrices de transfert en boucle
fermée nominales de même diagonale, celle entièrement diagonale permet d’atteindre
la plus grande robustesse en stabilité au sens de la norme H•. En 1986, Desoer et
Gündes [DES 86] paramétrisent l’ensemble des matrices de transfert en
asservissement diagonales stables pour des procédés stables ou instables particularisés
par une sortie et deux types d’entrée, en l’occurrence une entrée exogène et le signal
d’erreur. En 1987, Vardulakis [VAR 87] détermine une paramétrisation fondée sur la
théorie des matrices factorisées copremières. En 1991, Lin et Hsieh [LIN 91]
simplifient la paramétrisation de Vardulakis pour des procédés carrés. En 1993 [LIN
93], ils généralisent leurs travaux à des procédés non carrés. Simultanément, dans la
continuité des travaux de Dickman et Sivan [DIC 85], Linnemann et Wang [LINN 93]
s’intéressent à la pertinence du découplage par bloc dans le cadre d’une stratégie de
commande. Ils démontrent l’optimalité d’un régulateur bloc-découplant au sens de
mesures de performance générales incluant les normes H• et H2 pour la commande de
procédés dont les parties instables et à non-minimum de phase ont une structure bloc-
diagonale. Leurs travaux généralisent un résultat établi par Youla en 1976 [YOU 76],
montrant l’H2-optimalité d’une loi de commande découplante pour des procédés
stables à minimum de phase.

2.9.2. Cas des procédés multivariables stables à minimum de phase

Par souci de concision, l’approche CRONE est uniquement étendue dans ce


paragraphe à des procédés stables à minimum de phase. Cependant, la prise en
compte de procédés multivariables instables et/ou à non-minimum de phase ou
présentant des modes peu amortis est également possible [MAT 97].

2.9.2.1. Matrice de transfert en boucle ouverte découplante intégrant un ensemble


de gabarits curvilignes
L’objectif est de décrire analytiquement le comportement matriciel en boucle
ouverte (correspondant au procédé nominal) qui prenne en compte, pour des
procédés multivariables stables à minimum de phase à N entrées et N sorties, à la
fois :
– le découplage nominal ;
– les spécifications de précision aux basses fréquences ;
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

– les spécifications sur le degré de stabilité (comportement autour de la


fréquence Zu) ;
– le comportement du procédé aux hautes fréquences conformément aux
spécifications sur la sensibilité de l’entrée à ces fréquences.

Dans le cadre étudié ici d’un découplage par retour de sortie, la matrice de
transfert en boucle ouverte découplante, c’est-à-dire conduisant à des matrices de
transfert en asservissement et en régulation diagonales, est forcément diagonale.

En la notant :

> E S @ GLDJ > E L S @d L d 1 [2.62]

les matrices de transfert en asservissement et en régulation découplées


correspondantes s’expriment respectivement par :

>7 S @ > E S @ ,  > E S @  GLDJ « E L S


ª º
» GLDJ >7L S @dL d 1 [2.63]
¬ E L S ¼d L d 1

et :

ª º
>6 S @ ,  > E S @  GLDJ « 

» GLDJ > 6L S @d L d 1 [2.64]


¬  E L S ¼d L d 1


Les éléments diagonaux de T(p) et S(p) sont ainsi définis par :

EL S
7L S [2.65]
  EL S

et :

6L S 
[2.66]
  EL S

et vérifient la relation :

7L S  6L S  [2.67]

analogue à celle qui relie les fonctions de transfert en asservissement et en


régulation scalaires. Il est donc possible d’interpréter les transmittances Ti(p) et Si(p)
comme des fonctions de transfert en asservissement et en régulation d’une
commande scalaire de transmittance en boucle ouverte Ei(p).
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

Dès lors, le comportement matriciel recherché peut être décrit analytiquement


par des transmittances Ei(p) du type [2.38], de la même forme que la transmittance
en boucle ouverte de la commande CRONE scalaire de troisième génération
intégrant le gabarit curviligne.

Le degré de stabilité de la commande est alors assuré à travers la tangence des


gabarits associés aux Ei(p) à des contours de performance spécifiés pour des
fréquences Zu données.
i

Les ordres nb des Ei(p) en basse fréquence conditionnent le comportement des


i
transferts entrée-sortie de rang i en régime permanent : nb = 1 annule l’erreur de
i
position et nb = 2 annule celle de traînage.
i

Les ordres nh des Ei(p) en haute fréquence conditionnent le caractère propre de


i
la matrice de transfert du régulateur définie par :

>&QH S @ >* S @> E S @ [2.68]

où [G0(p)] désigne la matrice de transfert nominale du procédé et où [E(p)] est


définie par la relation [2.62]. En écrivant [G0(p)]–1 sous la forme :

ª 1 LM S º
>* S @ « » [2.69]
«¬ 'LM S »¼d L d 1
d M d 1

dans laquelle par hypothèse d’étude les polynômes Dij(p) sont Hurwitz1, la matrice
de transfert du régulateur s’exprime par la relation :

ª 1 LM S º
>&QH S @ « » GLDJ > E L S @d L d 1 [2.70]
«¬ 'LM S »¼d L d 1
d M d 1

qui se réduit à l’expression :

ª 1 LM S º
>&QH S @ « EL S » [2.71]
¬« 'LM S »¼d L d 1
d M d 1

1. Se dit d’un polynôme dont les zéros sont à partie réelle négative.
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

De [2.71] se déduit la relation :

QKL t PD[ GHJ 1 LM S  GHJ 'LM S pour  dLd 1 [2.72]


d M d 1

qui conditionne effectivement le caractère propre du régulateur. Cette relation se


réduit à la relation [2.42] dans le cas scalaire.

2.9.2.2. Optimisation du comportement en boucle ouverte


Pour un état paramétrique quelconque du procédé (différent du nominal), les
matrices de transfert en asservissement et en régulation ne sont plus diagonales.
Elles continuent néanmoins d’être liées par la relation :

>7 S @  >6 S @ , [2.73]

Les éléments diagonaux de [T(p)] et [S(p)], Ti(p) et Si(p), continuent donc de


vérifier la relation [2.67] qui permet de les interpréter comme des fonctions de
transfert en asservissement et en régulation d’une commande scalaire de
transmittance en boucle ouverte Ei(p), dite transmittance en boucle ouverte
équivalente. Ei(p) se déduit des relations [2.65] et [2.66] :

EL S
7L S   6L S
pour dLd 1 [2.74]
 7L S 6L S


Les transmittances en boucle ouverte équivalentes se réduisent, pour l’état


paramétrique nominal, à des transmittances en boucle ouverte de la commande
CRONE de troisième génération.

Il est toujours possible de lier les transmittances en boucle ouverte équivalentes


nominales et quelconques, E0 (p) et Ei(p), par une relation de la forme :
i

EL S EL S 'L S [2.75]

La transmittance 'i(p) représente l’incertitude relative de Ei(p) par rapport à


E0i(p). Malgré l’analogie apparente qui existe entre les cas scalaire et multivariable,
une différence fondamentale les distingue. En effet, contrairement au cas scalaire où
l’incertitude relative de E(p) par rapport à E0(p) s’identifie à celle de G(p) par
rapport à G0(p), il n’en est pas de même pour 'i(p), dont l’expression dépend de
[G(p)] et [G0(p)], mais aussi de [E0(p)]. Les domaines d’incertitudes associés aux
lieux de Black des E0 (p) ne dépendent donc plus seulement du procédé.
i
L’optimisation consiste à rechercher à la fois un positionnement et une forme
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

optimale des domaines d’incertitudes résultant de [E0(p)] et des variations


paramétriques du procédé.

Il existe maintenant un ensemble de nombres indéfinis de gabarits curvilignes


qui peuvent tangenter (voir figure 2.24) :
– le même ensemble de contours d’isodépassement (de graduations '  ,..., ' 1 ),


– le même ensemble de contours d’iso-amortissement (de graduations ]1, ..., ]N).

Figure 2.24. A travers un nombre indéfini de tangences à un même ensemble de contours,


le même degré de stabilité de la commande peut être assuré par un ensemble
de nombres indéfinis de gabarits curvilignes
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

Parmi l’infinité de gabarits curvilignes ainsi définie, il convient de sélectionner


un ensemble de gabarits curvilignes optimal au sens de la minimisation d’un critère
quadratique.

L’ensemble des gabarits curvilignes optimal peut donc être défini comme
l’ensemble des gabarits curvilignes :
– qui tangentent le même ensemble de contours désiré d’isodépassement ( '  ,
..., '  1 ) ou d’iso-amortissement (]1,..., ]N) pour l’état paramétrique nominal du
procédé,
– qui minimisent un critère quadratique exprimé par la somme des variations
extrémales relatives des ' L ou des ]i résultant des différents états paramétriques
i
possibles du procédé.

Le critère quadratique que minimise l’ensemble de gabarits curvilignes optimal


est de la forme :
 
1 § '  ' LG · § ' LPLQ  ' LG ·
- ¦ ¨¨ ¸ ¨ ¸
LPD[
[2.76]
L © ' LG ¸ ¨
¹ ©
' LG ¸
¹
ou :
 
1 §]L ] L · § ] L  ] LG ·
- ¦ ¨¨ PD[ G ¸
 ¨ PLQ
¸ ¨ ]L
¸
¸
[2.77]
L © ] LG ¹ © G ¹

selon que l’on cherche à minimiser les variations des premiers dépassements réduits
ou des facteurs d’amortissement.

La recherche de la synthèse d’un tel ensemble de gabarits curvilignes définit


l’approche optimale de la commande CRONE multivariable.

Le vecteur de paramètres indépendants à optimiser de la commande CRONE


multivariable s’écrit comme la juxtaposition de vecteurs de paramètres indépendants
associés à chacun des gabarits curvilignes, soit v = [v1, ..., vN]T de dimension :

1
 1 ¦ 1 L  1 L   [2.78]
L

Le nombre de paramètres indépendants se réduit à 3N quand tous les gabarits


curvilignes se réduisent au gabarit généralisé (cas où 1 L 1 L ). 
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

La recherche de l’ensemble de gabarits curvilignes optimal relève de


l’optimisation sous contraintes. Le critère à minimiser est défini par [2.76] et [2.77],
alors que les diagrammes de gain des éléments des fonctions de sensibilité sont
contraints à respecter des calibrages imposés par le concepteur. Les éléments
diagonaux des fonctions de sensibilité sont ainsi contraints à satisfaire à des
calibrages du même type que ceux définis dans le cas scalaire (voir paragraphe
2.8.4.2). Les éléments non diagonaux peuvent être majorés en gain afin d’atténuer le
couplage de la commande résultant d’une reparamétrisation du procédé. Une
contrainte prend en compte la possible déstabilisation d’un élément non diagonal
d’une fonction de sensibilité en vérifiant que le théorème de Nyquist multivariable
est validé pour tous les procédés possibles. Pour des procédés stables à inverse
stable, cette contrainte consiste à vérifier que l’image du contour de Nyquist par la
transmittance det(I+[G(p)][C(p)]) n’entoure jamais l’origine.

2.9.3. Application

2.9.3.1. Caractéristiques du procédé d’étude et spécifications de performances


Le procédé d’étude choisi pour illustrer l’approche CRONE multivariable est
décrit par la matrice de transfert suivante, soit :

ª S  º
« Z


. »
« »
« S § S § S
¨¨  ¸¸¨¨ S  ¸¸
· ·§ · »
« Z ¨¨ Z  ¸¸ »
© Z ¹© Z  ¹
  

>* S @ « © 

¹ » [2.79]
« S  »
« . Z

»
« »
«¨§ S ·§ S · S §¨ S  ·¸§¨ S  ·»
« ¨ Z  ¸¸¨¨ Z  ¸¸
 

Z  ¨© Z ¸¹¨© Z 
 ¸¸ »


¬ ©  ¹©  ¹

¹¼

caractérisée par un gain incertain K et des fréquences transitionnelles Z0, Z 0 et Z1 ¶

susceptibles de varier autour des valeurs nominales Knom = 0,05, Z0nom = 10 rd/s,
Z 0nom = 1 rd/s et Z1nom = 5rd/s dans les intervalles :

 d.d    d Z d 

 dZ d  HW  d Z d 

Par ailleurs, la fréquence transitionnelle Z2 a été fixée à 50 rd/s.


&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

D E

Figure 2.25. Lieux de Black en boucle ouverte équivalente


et domaines d’incertitudes associés (a) E1(p) ; (b) E2(p)

Pour l’ensemble des états paramétriques possibles, la commande doit satisfaire


aux spécifications de performances en asservissement suivantes :
– une erreur statique nulle sur les sorties 1et 2 ;
– un temps de réponse à 5 % inférieur à 1 s sur les deux sorties ;
– un premier dépassement réduit inférieur à 25 % sur la sortie asservie.

2.9.3.2. Synthèse du régulateur

La matrice de transfert en boucle ouverte [2.62] est caractérisée par nb1 = 2,


nh1 = 3, N1 = N1 = 0 pour la boucle ouverte équivalente E1(p) et par nb2 = 2, nh2 = 3,
+ -

N2 = N2 = 0 pour la boucle ouverte équivalente E2(p).


+ -

Les fréquences au gain unité en boucle ouverte et les facteurs de résonance en


asservissement sont respectivement fixés à Zu1 = 10 rd/s, Zu2 = 10 rd/s et Qa1 = Qa2 =
2 dB pour l’état paramétrique nominal du procédé, conformément aux spécifications
des performances sur le temps de réponse et le premier dépassement.
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

Les paramètres indépendants caractérisant la matrice de transfert en boucle


ouverte optimale sont donnés par :
D  E  ZE  UGV HW ZK  UGV

en ce qui concerne la boucle ouverte équivalente E1(p) et par :

D  E ±  ZE  UGV HW ZK  UGV

en ce qui concerne la boucle ouverte équivalente E2(p).

La détermination des cette matrice de transfert en boucle ouverte optimale


permet la synthèse de la matrice de transfert du régulateur.

2.9.3.3. Performances de la commande


2.9.3.3.1. Performances fréquentielles
Lors des variations paramétriques du procédé, la figure 2.25 illustre la robustesse
en performance de la commande à travers un positionnement optimal des domaines
d’incertitudes des deux boucles ouvertes équivalentes.

Figure 2.26. Diagrammes de gain de la matrice de transfert en asservissement


&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

La figure 2.26 représente quant à elle les diagrammes de gain de la matrice de


transfert en asservissement. Cette figure met en évidence la quasi-invariance en
fonction de la fréquence du facteur de résonance des termes diagonaux et met
également en évidence le faible module des termes non diagonaux (signe d’un
découplage convenable).

2.9.3.3.2. Performances temporelles


Le système est soumis successivement à un échelon de consigne unitaire sur
l’entrée 1 et sur la 2 du système en boucle fermée. La figure 2.27 représente les sorties
temporelles nominales et reparamétrées du procédé pour un échelon de consigne sur la
première entrée ; la figure 2.28 pour un échelon de consigne sur la seconde.

Figure 2.27. Sorties nominales et reparamétrées en réponse à un échelon de consigne


sur la première entrée (courbes du haut) sortie 1 ; (courbes du bas) sortie 2

Figure 2.28. Sorties nominales et reparamétrées en réponse à un échelon de consigne


sur la seconde entrée (courbes du haut) sortie 1 ; (courbes du bas) sortie 2
 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

Ces réponses temporelles font apparaître un découplage convenable des deux


sorties et un asservissement de ces sorties conforme aux objectifs de robustesse et
aux objectifs fixés au paragraphe 2.9.3.1.

2.10. Conclusion

Ce chapitre constitue un état des lieux assez exhaustif de la commande CRONE


après plus de quinze années d’existence. C’est en effet en 1983 que, suite à une
interprétation d’un phénomène naturel robuste que constitue la relaxation de l’eau sur
une digue poreuse, la commande CRONE de première génération a vu le jour. Cette
commande, basée sur la dérivation non entière réelle, permet de réduire les variations
de marge de phase de la boucle ouverte aux seules variations de la phase du procédé
aux fréquences proches de la fréquence au gain unité. Cette commande est à l’origine
de la commande CRONE de deuxième génération ; elle aussi basée sur la dérivation
non entière réelle, mais permet de garantir la robustesse du degré de stabilité du
système en boucle fermée, malgré des variations paramétriques de gain du procédé.

C’est avec la troisième génération que la commande CRONE a réellement connu


son essor. Cette commande basée sur la dérivation non entière complexe permet la
synthèse de lois de commande optimales, qui minimisent les variations du facteur de
résonance ou de celui d’amortissement en asservissement lors de variations
paramétriques quelconques du procédé, tout en vérifiant un ensemble de contraintes
sur l’ensemble des fonctions de sensibilité de la boucle de commande.

A ce jour, la commande CRONE de troisième génération permet de commander


un vaste panel de procédés scalaires linéaires stationnaires, à savoir :
– des procédés échantillonnés [LAN 94],
– des procédés à non-minimum de phase (retard pur et zéros à partie réelle
positive) [LAN 94],
– des procédés instables [MAT 97, SAB 93],
– des procédés à modes peu amortis [OUS 95c].

Plus récemment, la commande CRONE a été étendue à la commande de


procédés multivariables [MAT 97, SUT 97]. Cette dernière extension fait l’objet de
développements dans ce chapitre.

Concernant les procédés multivariables, l’extension de l’approche CRONE à cette


classe de procédés constitue le prolongement direct de l’approche scalaire. Les
éléments diagonaux de la matrice de transfert en boucle ouverte nominale, en
l’occurrence diagonale, sont en effet décrits par une transmittance en boucle ouverte
de la commande CRONE de troisième génération intégrant un gabarit curviligne.
&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

L’optimisation de l’ensemble de gabarits curvilignes ainsi défini consiste à minimiser


sous contraintes un critère quadratique portant sur les variations relatives des facteurs
de résonance des éléments diagonaux de la matrice de transfert en asservissement.

Compte tenu des résultats plus qu’encourageants déjà obtenus lors de l’application
de la commande CRONE à des procédés réels, il est maintenant envisagé d’étendre
cette commande à celle de procédés non stationnaires et non linéaires.

2.11. Bibliographie

[DES 81] DESOER C.A., CHEN M.J., « Design of multivariable feedback systems with stable
plant », IEEE Trans. on Autom. Control, 29, octobre 1981.
[DES 84] DESOER C.A., GUSTAFSON C.L., « Design of multivariable feedback systems with
simple unstable plant », IEEE Trans. on Autom. Control, 29, octobre 1984.
[DES 86] DESOER C.A., GÜNDES A.N., « Decoupling linear multiinput multioutput plants by
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[DIC 85] DICKMAN A., SIVAN R., « On the robustness of multivariable linear feedback
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[GLE 90] GLENNY R.W., ROBERTSON H.T., Fractal properties of pulmonary blood flow:
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for prescribed time-domain tolerances, International Journal of Control, 16, p. 287-309,
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[HOR 91] HOROWITZ I.M., « Survey of quantitative feedback theory (QFT) », International
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[KWA 93] KWAKERNAAK H., « Robust Control and Hf – Optimization », Automatica, vol. 29,
n° 2, p. 255-273, 1993.
[LAN 94] LANUSSE P., De la commande CRONE de première génération à la commande
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[LIN 91] LIN C.A., HSIEH T.F., « Decoupling controller design for linear multivariable
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[LIN 93] LIN C.A., HSIEH T. F., « Stabilization, parameterization, and decoupling controller
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[LINA 95] LINARES H., SABATIER J., NOUILLANT M., OUSTALOUP A., « Modeling and
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IFAC Workshop on intelligent Components for Autonomous and Semi-Autonomous
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[LINN 93] LINNEMAN A., WANG Q.-G., « Decoupling by precompensation while maitaining
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 &RQFHSWLRQ GH FRPPDQGHV UREXVWHV

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[MAN 82] MANDELBROT B., The fractal Geometry of Nature, Freeman, San Francisco, 1982.
[MAT 94] MATHIEU B., OUSTALOUP A., LEVRON F., Une solution globale à l’identification
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[MAT 97] MATHIEU B., De la commande CRONE scalaire à la commande CRONE
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[MOR 64] MORGAN B. S., « The synthesis of linear multivariable systems by state variable
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[OUS 91a] OUSTALOUP A., La commande CRONE, Hermès, Paris, 1991.
[OUS 91b] OUSTALOUP A., « The CRONE control », ECC’91, Grenoble, 2-5 juillet 1991.
[OUS 94] OUSTALOUP A., « Approche fréquentielle et non entière de la robustesse : la
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[OUS 95a] OUSTALOUP A., La dérivation non entière : théorie, synthèse et applications,
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[OUS 95b] OUSTALOUP A., MATHIEU B., LANUSSE P., « Intégration non entière complexe et
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[OUS 95c] OUSTALOUP A., MATHIEU B., LANUSSE P., « The CRONE control of resonant
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[OUS 99] OUSTALOUP A., LEVRON F., NANOT F., MATHIEU B., « Frequency band complex
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[PRE 89] PRESS W.H. et al., Numerical recipes in Pascal: the art of the computing,
Cambridge University Press, 1989.
[SAB 93] SABATIER J., Extension de la commande CRONE à la commande de procédés
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productique et robotique », ENSERB, 1993.
[SAB 95] SABATIER J., OUSTALOUP A., LANUSSE P., ROBIN G., « Optimal control of a wire-
th
guided robot », 7 International conference on advanced robotics – ICAR’95, Espagne,
20-22 septembre 1995.
[SAB 98] SABATIER J., La dérivation non entière en modélisation des systèmes à paramètres
distribués récursifs et en commande robuste des procédés non stationnaires, Thèse de
doctorat d’Université, Université Bordeaux I, 1998.
[SUB 89] SUBRAHMANYAM M.B., « An extension of the simplex method to constrained
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[SUT 97] SUTTER D., La commande CRONE multiscalaire : application à des systèmes
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&RPPDQGH &521( GH SURFpGpV VFDODLUHV HW PXOWLYDULDEOHV 

[VAR 87] VARDULKIS A.I.G., « Internal stabilization and decoupling in linear multivariable
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[WAN 75] WANG S.H., DAVISON E.J., « Design of decoupled control systems: a frequency
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[YOU 76] YOULA D.C., JABR H.A., BONGIORNO J.J., « Modern Wiener-Hopf design of
optimal controllers (Part II) », IEEE Trans. on Autom. Control, 21, 1976.
Chapitre 3

Des régulateurs PID


à la commande LQG-LTR :
une approche robuste par placement de pôles

3.1. Introduction

Le principe de la commande (monovariable) par placement de pôles est bien


connu : un processus étant modélisé par une transmittance B(s)/A(s), on obtient le
régulateur R(s)/S(s) en imposant que le polynôme caractéristique de la boucle
fermée [A(s)S(s)+B(s)R(s)] soit identique à un polynôme de stabilité spécifié P(s).

Le problème méthodologique correspondant consiste à déterminer P(s) de


manière à concilier performances et robustesse. Pour cela, il ne suffit pas de placer
les pôles en boucle fermée (les racines de P(s)) n’importe où loin à gauche de l’axe
imaginaire. Paradoxalement, les régulateurs ainsi obtenus peuvent engendrer des
boucles très peu robustes [ÅST 98, LAN 94].

Le problème de l’assignation des pôles a évidemment intéressé depuis longtemps


de nombreux chercheurs. La nouveauté que nous apportons ici consiste à proposer
une politique claire et efficace, où la robustesse est obtenue en mettant en action des
mécanismes de restauration de transfert de boucle (loop tranfer recovery LTR). A
l’origine, la théorie du LTR est issue du contexte linéaire quadratique gaussien
(LQG [KAL 64, KWA 72, SAB 93, STE 87]), mais on montre ici que la puissance
du LTR peut être obtenue grâce à de simples manipulations de pôles, sans faire
appel ni à l’approche d’état, ni à la commande LQG : il suffit de connaître les

Chapitre rédigé par Philippe DE LARMINAT.


100 Conception de commandes robustes

rudiments de l’automatique – notion de fonction de transfert, lieux de Nyquist et


marges associées.

La méthodologie que nous allons développer se résume ainsi : le polynôme P(s)


sera factorisé en un facteur dominant F(s) et un facteur auxiliaire C(s). La
robustification par LTR résulte alors de l’application des trois principes suivants :
– déterminer F(s) de sorte que F ( jω ) ≥ A( jω ,
– choisir F(s) proche de A(s),
– choisir C(s) proche de B(s).

La première règle est toujours applicable. Elle définit une sensibilité « cible »
robuste. Les règles 2 et/ou 3 permettent, le cas échéant, d’approcher cette cible (on
dit aussi la restaurer). La règle 2 exige la stabilité en boucle ouverte du modèle (ou
du moins l’absence d’instabilité exponentielle), tandis que la règle 3 demande
l’hypothèse de non-minimum de phase (stabilité inverse).

Ces règles sont simples et claires. Leur justification est immédiate [LAR 99b].
Elle est reprise en section 3.2. Le détail de la mise en œuvre est presque secondaire
et peut donner matière à diverses variations méthodologiques.

A la section 3.3, on propose des stratégies de placement de pôles basées sur une
application directe des règles ci-dessus énoncées, en plaçant des pôles directement
sur les racines de A et B lorsque c’est possible, et à défaut, en leur voisinage, qui est
modulé au moyen de deux paramètres de réglage prévus à cet effet :
– un paramètre To destiné à régler la proximité de F (s ) avec A(s ) . La
robustesse obtenue (principalement en termes de marge de retard) aura pour prix une
perte de performances en régulation ;
– un second paramètre de réglage Tc règle la proximité de C(s) avec B(s), sachant
que les marges de gain et phase obtenues auront pour prix un accroissement de la
sensibilité au bruit. Ce deuxième réglage est accessoire et le « facteur de
restauration » kc = To/Tc pourra se voir attribuer une valeur par défaut.

Au prix d’un investissement théorique étonnamment réduit, la commande


robuste par placement de pôles se révèle alors d’une grande efficacité et d’un large
champ d’application. Fait notable, ce champ recouvre celui des PID en constituant
enfin une méthode de commande rationnelle et surtout plus efficace que les
méthodes plus ou moins empiriques qui foisonnent depuis [ZIE 42]. Cette
application aux PID fait l’objet de la section 3.4.

Le domaine d’application inclut aussi les systèmes d’ordre élevé, intégrateurs


multiples, à modes instables, peu ou pas amortis, à non-minimum de phase… La
principale limitation concerne les systèmes qui présentent des zéros sur (ou très
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 101

proches de) l’axe imaginaire. Les difficultés s’aggravent si des pôles avoisinent ces
zéros : on se trouve alors en présence de problèmes intrinsèquement difficiles à
résoudre. Il importe alors de rester conscient de ce que les limitations de
performance et de robustesse tiennent au processus lui-même et à ses incertitudes
plus qu’à la qualité de la loi de commande. Néanmoins, il peut se révéler utile de
consentir un investissement théorique supplémentaire, surtout si l’on dispose déjà de
quelques acquis en approche d’état et en commande LQG. Dans cet esprit, la section
3.5 s’appuie sur une interprétation de la commande par placement de pôles en
termes d’estimation et retour d’état d’un système étendu. On montre que le LTR
(sous sa forme duale) permet d’interpréter les polynômes F(s) et C(s) comme des
polynômes caractéristiques de commande et de filtrage. Nous introduisons aussi un
deuxième paramètre de réglage accessoire, le « facteur de forme » ko, qui permet de
gérer un compromis entre les marges de gain et phase et les performances en rejet de
perturbation de charge. On montre alors comment déduire de ces trois paramètres To,
kc et ko les matrices de pondération et d’intensité des bruits qui permettent de placer
les pôles à travers la commande LQG.

La section 3.6 illustre l’application de ces principes à partir de deux exemples.


Le premier est un système flexible monovariable, dont la commande par des
techniques issues du cadre H∞ n’est déjà pas une mince affaire, mais que le
placement de pôles résout sans difficultés. Le second concerne une régulation de
pression-puissance en centrale thermique EDF. Il montre que le réglage d’une
régulation multivariable peut se faire plus simplement encore que celui d’un PID,
grâce à la commande robuste par restauration de transfert de boucle.

3.2. La restauration de boucle par placement de pôles

3.2.1. Préliminaires

On considère la boucle classique de contrôle et régulation (figure 3.1), incluant


un régulateur structuré selon la forme dite RST [LAN 93]. Dans ce chapitre, on ne
traite que de régulation, c’est-à-dire que l’on ne se soucie pas du polynôme T(s).

Figure 3.1. Processus et régulateur RST


102 Conception de commandes robustes

Bien souvent, le cahier des charges stipule que le régulateur doit être à action
intégrale. Dans ce cas, deux attitudes équivalentes sont possibles lors de la
conception du régulateur.
– soit augmenter le polynôme A(s) avec la « partie fixe » s du régulateur, puis
effectuer la synthèse du régulateur sans contrainte, et finalement réintégrer la partie
fixe dans le dénominateur S(s) du régulateur ;
– soit imposer au polynôme S(s) la contrainte de se présenter sous la forme
factorisée S(s) = sΣ(s).

Pour la généralité des premiers développements théoriques, nous adoptons dans


cette section 3.2 la première des deux options ci-dessus présentées. Le modèle du
processus incluant les éventuelles parties fixes est noté :
n n −1
B( s ) b0 s b + b1 s b + " + bnb
=
A( s ) s na + a1 s na −1 + " + a na

On aura noté que le polynôme A(s) est normalisé : a0 = 1.

On définit classiquement la fonction de sensibilité :

A( s) S ( s )
y / d = S yd ( s) =
A( s) S ( s) + B( s) R( s )

Le régulateur R/S sera obtenu en spécifiant un polynôme de stabilité arbitraire


P(s) et en résolvant l’identité de Bézout par rapport à R(s) et S(s) :

A( s ) S ( s ) + B ( s ) R( s ) ≡ P( s )

3.2.2. Les degrés des polynômes en présence

Dans l’équation de Bézout ci-dessus, le degré de P(s) a pour expression :

n p = sup[(n a + n s ), (nb + n r )] [3.1]

Par ailleurs, le degré relatif du régulateur d r = n s − n r , sera nécessairement


choisi de manière que le degré de roll-off du transfert de boucle, autrement dit la
différence (n a + n s ) − (nb + n r ) , soit positive. L’égalité [3.1] devient alors :

n p = na + ns [3.2]
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 103

n
L’identité selon les puissances s 0 , s 1 ...s p se traduit par un système de np + 1
équations linéaires. Pour l’unicité de la solution, il convient que le nombre des
coefficients de S et R lui soit égal, soit n p + 1 = (n s + 1) + (n r + 1) . En combinant
avec [3.2], il vient :

nr = na − 1 [3.3]

D’où finalement :

n s = nr + d r [3.4]

et :

n p = 2n a + d r − 1 [3.5]

Par exemple, pour un système d’ordre n, propre, avec contrainte de régulateur


intégral et strictement propre, on aura :

na = n + 1 (après intégration de la partie fixe s dans A),


et :

d r = 0 (qui conduit à un régulateur strictement propre, une fois réintégrée la


partie fixe s dans S).

D’où en appliquant [3.5] :

n p = 2n + 1

On aura donc 2n +1 pôles à placer.

Un nombre de pôles à placer proche de deux fois l’ordre du processus à contrôler


est un résultat très général, commun aux systèmes à temps continu et à ceux à temps
discret. Dans le cas discret, ce résultat est malencontreusement masqué lors de
l’usage de polynômes en z-1, mais un retour aux polynômes en z montre que les pôles
non placés explicitement existent et sont effectivement placés (consciemment ou
non) à l’origine. Ce n’est pas toujours la meilleure place et cette erreur initiale devra
être réparée au prix de complications ultérieures.

Le problème méthodologique consiste donc à déterminer comment placer


d’emblée tous ces pôles en vue de concilier au mieux les exigences de performances
et de robustesse. Rappelons la proposition majeure énoncée dans l’introduction :
104 Conception de commandes robustes

factoriser le polynôme P(s) en F(s)C(s) et appliquer les trois principes :


– imposer que F ( jω ) ≥ A( jω ,
– choisir F(s) proche de A(s),
– choisir C(s) proche de B(s).

3.2.3. Analyse du premier principe

Convenons de normaliser F(s) et A(s) par f 0 = a 0 = 1 . Adoptons nf = na, de sorte


que F puisse tendre vers A.

Définissons le rapport A( s ) / F ( s ) comme une sensibilité « cible » :

A( s )
S yd ( s ) =
F (s)

Il lui correspond un transfert de boucle cible L y (s ) , lié à la sensibilité par la


relation :

1
S yd ( s) =
1 + L y (s)

La règle 1 engendre un transfert de boucle cible robuste, en ce sens que son lieu
de Nyquist est extérieur au « cercle de Kalman » représenté sur la figure 3.2, avec
les marges qui en résultent. On a en effet :

1 F ( jω )
L y ( jω ) − (−1) = L y ( jω ) + 1 = = >1
S yd ( jω ) A( jω )

On va voir que les règles 2 et/ou 3 vont faire tendre S et C vers une même limite
A( s ) S ( s )
(non nulle). Alors, la sensibilité effective S yd ( s ) = tendra vers la cible
F ( s)C ( s )
A( s )
S yd ( s) = .
F (s)
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 105

Figure 3.2. Robustesse du transfert de boucle cible L ( jω )

3.2.4. Analyse du premier mode de restauration : F → A

A la limite, si F → A dans le polynôme P = FC, l’identité de Bézout devient :

AS + BR = AC

et a pour solution triviale :

S = C, R = 0

Si l’on fait systématiquement l’hypothèse que A et B sont premiers entre eux et à


condition que les degrés de S, R et P soient respectés ([3.3], [3.4] et [3.5]), la
solution existe pour tout P. L’identité de Bézout engendre alors une application
continue des coefficients de P sur ceux de S et R.

D’où la restauration de la cible :

AS AC A
lim S yd = lim = = = S yd
F→A F → A FC FC F

La restauration complète n’est possible que pour un polynôme A(s) exempt de


racines à partie réelle strictement positives. Pour les systèmes exponentiellement
stables, elle exprime simplement que la stabilité en boucle ouverte sera « restaurée »
lorsque l’on tend vers un régulateur nul ( R → 0 ). Par contre, lorsque A présente des
racines nulles ou imaginaires pures (dues soit au processus, soit aux parties fixes du
régulateur), il apparaît un compromis incontournable entre performances et robustesse.
Ainsi, si A(s) comporte des racines nulles, sans autres modes imaginaires purs ni à
partie réelle positive, on verra que la robustesse se traduit par des marges de retard
d’autant plus grandes que F(s) sera proche de A(s), mais ceci au prix de modes lents
préjudiciables aux performances. Il importe d’être conscient du caractère
incontournable de ce compromis : il existe, indépendamment de toute méthode de
commande. La théorie peut apporter un moyen de le gérer, mais pas de le contourner.
106 Conception de commandes robustes

3.2.5. Analyse du deuxième mode de restauration : C → B

A la limite, si C → B dans le polynôme P = FC, l’identité de Bézout devient :

AS + BR = FB

et a pour solution triviale :

S = B, R = F − A

où R est bien de degré na –1 [3.3], grâce à la normalisation de F et A. Il en résulte la


restauration de la même cible :

AS AB A
lim S yd = lim = = = S yd
C →B C →B FC FB F

La restauration complète par C → B n’est évidemment possible que pour les


systèmes à minimum de phase.
R F−A
Par ailleurs, considérons le régulateur limite : → . Dans les cas
S B
fréquents où le degré de B est strictement inférieur à celui de F – A, il en résulte une
tendance vers un régulateur impropre. La robustesse obtenue (en termes de marges
de gain et phase) a pour prix la sensibilité de la commande aux bruits. Ici encore, il
s’agit d’un compromis incontournable : il apparaît déjà au niveau des PID, lorsque
l’on cherche à obtenir une avance de phase en renforçant l’action dérivée. Il ne faut
pas espérer qu’une théorie, si élaborée soit-elle, parvienne à contourner ce type
d’antagonisme entre performances et robustesse.

3.2.6. Commentaires

Nous venons d’introduire deux modes de restauration de transfert de boucle. Le


second se rattache directement à la théorie classique du LTR. Il opère en inversant
partiellement le processus dans le régulateur (dont le dénominateur S tend vers B).
Le premier mode est moins classique, bien qu’il s’agisse sans conteste d’une forme
de LTR, et nous le dénommons LTR indirect. Paradoxalement, nous verrons par la
suite que ce LTR indirect joue le rôle majeur dans la gestion des compromis
performances-robustesse1, et c’est pourquoi les racines de F(s) sont dénommées
modes dominants, tandis que celles de C(s) sont qualifiées d’accessoires.

1. Risquons une explication : les automaticiens (surtout hors de France) n’ont généralement
pas encore intégré le concept de marge de retard [BOU 91], qui traduit pourtant une exigence
de robustesse aussi importante que les classiques marges de gain et phase. On se demande
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 107

3.3. Stratégies concrètes de placement de pôles

3.3.1. Position du problème

Pour exposer plus clairement les principes généraux, nous avons considéré dans
la section précédente que A et B incorporaient d’éventuelles « parties fixes » du
régulateur. A partir de maintenant, nous revenons à la notation habituelle où
B( s) b1 s n −1 " + bn
= désigne le modèle du processus proprement dit,
A( s ) s n + a1 s n −1 + " + a n
supposé strictement propre (b0 = 0).

On se limite dès lors au cas précis des régulateurs à action intégrale, sans
incorporer de partie fixe au polynôme A, mais en imposant directement la contrainte
que S(s) soit factorisé en S ( s ) = sΣ( s ) . Le lecteur traitera aisément les problèmes
analogues au coup par coup : exigence de régulateur doublement intégral, facteur
( s 2 + ω 02 ) imposé à S ou R, etc.

La partie fixe s n’étant pas incorporée ici au polynôme A, le LTR indirect


(paragraphe 3.2.4) se traduit maintenant par la proximité de F (s ) avec sA(s ) , ce
qui conduit au degré n + 1 pour F (s ) .

Sous contrainte d’un régulateur juste propre, les degrés sont alors :

deg( F ) = n + 1, deg C = n − 1, deg( P) = 2n


deg(S ) = n, deg(Σ) = n − 1, deg( R) = n

A l’exception des régulateurs PID, que l’on traitera en section 3.4, on préférera
généralement des régulateurs strictement propres (voir section 3.5)2. Les degrés
deviennent :

deg( F ) = n + 1, deg C = n, deg( P ) = 2n + 1


deg(S ) = n + 1, deg(Σ) = n, deg( R ) = n

Dans tous les cas, l’équation de Bézout s’écrit :

[ A( s) s ]Σ( s ) + B( s ) R( s) = F ( s )C ( s )

à résoudre par rapport à Σ et R.

comment tant de théoriciens de la robustesse peuvent traiter, sans savoir l’exprimer, du


compromis majeur entre marge de retard et temps de réponse en régulation.
2. Pour un meilleur roll-off et une moindre sensibilité aux bruits.
108 Conception de commandes robustes

On note en analysant l’équation ci-dessus que la requête d’un régulateur intégral


est incompatible avec un zéro nul du processus : on doit avoir bn ≠ 0 .

Le problème consiste maintenant à exprimer comment régler la proximité de


F (s ) avec sA(s ) , ou de C (s) avec B(s ) et comment le faire à travers des
paramètres de synthèse aptes à gérer les compromis performances-robustesse.

3.3.2. Placement des pôles dominants (détermination de F(s))

On va régler la proximité de F (s ) avec sA(s ) par l’intermédiaire d’un


« horizon dominant » To :
– on définit d’abord le polynôme stable le plus proche de sA(s) comme le
sA( s)
polynôme F * ( s ) qui minimiserait la norme3 − 1 . On obtient F * ( s ) en
*
F ( s) 2
remplaçant les éventuelles racines à parties réelles positives de sA(s ) par leurs
opposées [AND 89] ;
– on veut aussi éviter un amortissement trop lent des modes de F(s), car ils feront
partie des modes de la fonction de sensibilité. Pour cela, on réalise F(s) en projetant
sur la verticale d’abscisse – 1/To les racines de F * ( s) situées à sa droite ;
– on note que le facteur s de sA(s) crée un pôle dominant en – 1/To.

L’ensemble des opérations ci-dessus est illustré sur la figure 3.4.

REMARQUE 3.1.– Le polynôme F(s) est normalisé : f0 = 1.

Cette stratégie conduit aux deux propriétés recherchées. En effet, pour un


système sans instabilité exponentielle, on a F * ( s ) = sA( s ) , et si To → ∞, les pôles
projetés sur la verticale d’abscisse − 1 / To seront infiniment peu déplacés, et donc :

lim F ( s) = sA( s )
TO → ∞

2 ∞ 2 dω ∞
3. F (s) dénote la norme H2 : F ( s ) = ∫0 F ( jω ) = ∫0 f (t ) 2 dt .
2 2 2π
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 109

Figure 3.4. Placement des pôles dominants

Par ailleurs, si l’on note αi les racines de sA(s) et βi celles correspondantes de


F(s), il résulte clairement des opérations de la figure 3.4 que :
jω − α i / jω − β i ≤ 1 , d’où la propriété recherchée de cible robuste :

sA( s)
S y ( jω ) = ≤1
F (s) s = jω

Il apparaît que l’effet LTR indirect permet de régler la marge de retard limite.
Pour un système dont les seules instabilités sont des intégrateurs, on observe en effet
les marges limites suivantes :
– nombre d’intégrations en boucle ouverte : 0, 1 , 2 ;
– marge de retard limite : 1,571 To 0,647 To 0,407 To.

Si, de plus, A(s) présente des paires de racines complexes sur l’axe imaginaire
(± jω n ) , auxquels il correspond des oscillations en boucle ouverte de période
Tn = 2π / ω n , la marge de retard atteint le maximum atteignable, soit le quart de la
plus petite période.

La stratégie proposée ici pour le placement des pôles dominants conduit donc à
des propriétés plus fortes que la simple tendance à sortir du cercle de Kalman. A
l’exception du dernier cas, où la marge de retard est bornée par la nature même d’un
système à amortissement nul en boucle ouverte, on voit que To permet d’accroître
sans limite la marge de retard (au détriment évidemment des performances en
régulation).

On pourrait imaginer bien d’autres moyens de placer les pôles dominants, de


manière à satisfaire à la fois F ( jω ) ≥ A( jω et F(s) proche de A(s). Celle que nous
proposons ici est celle dont la compréhension exige le moins de connaissances
110 Conception de commandes robustes

prérequises. Néanmoins, on ira plus loin au paragraphe 3.5.3, en reprenant un


placement issu de la commande LQG. Enfin, on verra au paragraphe 3.5.5 comment
renforcer la robustesse de la cible F(s)/A(s) en lui imposant non seulement de sortir
du cercle de Kalman, mais aussi de se rapprocher de l’axe imaginaire pur.

3.3.3. Placement des pôles accessoires (détermination de C(s))

On se propose ici de déterminer le polynôme C (dont le degré peut être supérieur


à celui de B) et de régler la proximité de C avec B par l’intermédiaire d’un « horizon
accessoire » Tc.
– on définit d’abord le polynôme stable le plus proche de B (s ) comme le
B( s)
polynôme C * ( s ) qui minimiserait la norme − 1 . On obtient C * ( s) en
C * ( s) 2
remplaçant les racines à parties réelles positives de B(s) par leurs opposées
[AND 89] ;
– on veut limiter la rapidité des modes du régulateur obtenu quand C(s) tend vers
B (s ) . Pour cela, on réalise un polynôme C ** ( s ) en projetant sur la verticale
d’abscisse (− 1 / Tc ) les racines de C * ( s) trouvées à sa gauche ;

– si le degré de C ** ( s) est inférieur au degré requis, on obtient enfin C(s) en


incorporant à C ** ( s) autant de facteurs (1 + sTc ) que nécessaire.

REMARQUE 3.2.– On impose enfin C (0) = B (0) .

Ces trois opérations sont illustrées sur la figure 3.5.

Figure 3.5. Placement des pôles accessoires


Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 111

Pour un système à minimum de phase, cette stratégie conduit à la propriété


recherchée. En effet, on a alors C * ( s) = B(s ) , et si Tc est assez petit,
C ** ( s ) = C * ( s) . Enfin, si Tc → 0, les facteurs (1 + sTc ) tendent vers 1, d’où la
propriété recherchée :

lim C ( s ) = B( s )
Tc →0

Lorsque le polynôme C(s) contient des facteurs (1 + sTc ) , où Tc → 0, le


régulateur tendra à devenir impropre, d’où une forte sensibilité de la commande au
bruit. C’est le prix à payer pour la robustesse engendrée par l’effet LTR.

EXCLUSION.– La stratégie proposée ici exclut les systèmes qui présentent des zéros
sur l’axe imaginaire. Rappelons que le cas de zéros nuls est exclu par hypothèse
dans le contexte de régulateurs à action intégrale. Pour traiter le cas de zéros
imaginaires conjugués, on peut imposer aux pôles accessoires un amortissement
réduit minimal, ce qui introduirait un paramètre de réglage supplémentaire.
Antérieurement, nous avons aussi proposé, lors de l’opération 2, de projeter les
racines de C*(s) sur le cercle de diamètre (– 1/Tc, 0). Section 3.5, nous préférerons
une technique basée sur la commande LQG, et sur le même paramètre de synthèse Tc
que ci-dessus.

3.3.4. Principes de réglage

Sachant que la robustesse résulte soit de Tc → 0 , soit de To → ∞ , on adoptera


évidemment Tc << T0 . Plus précisément, l’expérience montre que l’on peut
recommander : Tc = T0 /kc , où kc est un « facteur de restauration », de l’ordre de 5.

On pourra éventuellement diminuer le facteur de restauration pour limiter la


sensibilité aux bruits, au détriment des marges de gain et phase. Par contre, il est
inutile de l’augmenter exagérément, le gain de robustesse se révélant alors
négligeable.

Si l’on fixe le facteur de restauration, l’horizon dominant To reste le seul


paramètre de réglage.

Pour les systèmes à non-minimum de phase, la présence des zéros à partie réelle
positive introduit une limite incontournable aux performances en régulation
[FRE 85]. L’expérience montre qu’il est inutile de vouloir descendre au-dessous de :
To voisin du retard induit par les non-minima de phase et constantes de temps
mineures du processus.
112 Conception de commandes robustes

Pour les systèmes à minimum de phase, il n’existe pas de limite théorique à la


réduction des temps de réponse. Concrètement, la limite provient alors des
incertitudes et dynamiques négligées dans le modèle du processus, que l’on peut
interpréter comme des non-minima de phase potentiels. Alors, on prendra To voisin
de la marge de retard souhaitée.

En augmentant To, on augmente la marge de retard au détriment des


performances en régulation. Ce réglage du compromis performance-robustesse est à
distinguer de l’ajustement du régulateur au processus, ajustement réalisé par le
simple fait d’effectuer la synthèse à partir du modèle B/A à travers la résolution de
l’équation de Bézout.

3.4. Application aux régulateurs PID

3.4.1. Présentation

Ce paragraphe a un double objet :


– illustrer les principes généraux de la commande robuste par placement de
pôles,
– effectuer cette illustration sur les systèmes modélisables par le second ordre, ce
qui conduit à des régulateurs de la forme PID.

Ce second point apporte une solution au problème capital du réglage rationnel


des PID. La démarche consiste à associer d’une part une identification (ou
approximation) des systèmes qui s’y prêtent par des modèles de second ordre ;
d’autre part à appliquer la présente méthode de synthèse par placement de pôles et
LTR.

La recherche d’un régulateur intégral et strictement propre pour un système du


second ordre (b1 s + b2 ) /( a 0 s 2 + a1 s + a 2 ) conduit en effet aux polynômes ci-
dessous, développés selon leurs degrés respectifs :

S ( s ) = sΣ( s ) = s (σ 0 s + σ 1 )
R ( s ) = r0 s 2 + r1 s + r2
P ( s ) = F ( s )C ( s) = ( f 0 s 3 + f1 s 2 + f 2 s + f 3 )(c 0 s + c1 )
= p 0 s 4 + p1 s 3 + p 2 s 2 + p3 s + p 4
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 113

et l’équation de Bézout se traduit par le système suivant :

a 0  σ 0   p 0 
a a0 b1  σ   p 
 1   1  1
a 2 a1 b2 b1   r0  =  p 2 
     
 a2 b2 b1   r1   p 3 
 b2  r  p 
  2   4

dont la solution peut être identifiée à un PID standard :

r0 s 2 + r1s + r2  1 sTd 
= k p 1 + + 
s(σ 0 + σ 1 )  sT i 1 + sτ 

3.4.2. Application à l’intégrateur retardé

Un exemple type de système contrôlable par un PID est l’intégrateur retardé :

e − sL
G(s) = a
s

où a est le gain en vitesse et L le retard.

Pour effectuer une synthèse de PID par placement de pôles, il faut se donner un
modèle de conception du 2e ordre. Une solution simple consiste à remplacer le retard
1 − sL / 2
par l’approximation classique : e − sL ~ .
1 + sL / 2

Conformément aux principes de réglage énoncés au paragraphe 3.3.4, nous


proposons To = L et Tc = L/5.

Les stratégies des paragraphes 3.3.2 et 3.3.3 s’appliquent simplement et


donnent :

F ( s ) = ( s + 2 / L)( s + 1 / L) 2 , C ( s ) = a ( s + 2 / L)

Après résolution de l’équation de Bézout et identification de R/S à un PID, on


trouve :

0.96
kP = , Ti = 3.3L, Td = 0.30 L, τ = 0.14 L
aL
114 Conception de commandes robustes

Ces valeurs sont du même ordre de grandeur que celles issues de la règle de
1.2
Ziegler et Nichols ( k P = , Ti = 2 L, Td = 0.5 L ). Mais cette règle est réservée
aL
à des systèmes apériodiques, dont la réponse à court terme peut être approximée par
celle de l’intégrateur retardé, tandis que le réglage par placement de pôles robuste
s’adresse à tous les systèmes approximables par des transferts du second ordre, dans
toute leur variété (non amortis, à avance de phase, double intégrateur…). Et surtout,
le réglage par placement de pôles robuste reste ouvert et laisse le concepteur libre de
procéder à un véritable réglage, c’est-à-dire à un arbitrage entre performances et
robustesse.

3.4.3. Réglage final du régulateur

L’existence même de règles telles que celle de Ziegler et Nichols laisse penser
qu’il existerait pour chaque processus un réglage « optimal » qui correspondrait
sensiblement à la minimisation du temps de réponse, sous contrainte d’un facteur de
résonance (ou d’un dépassement) admissible.

Une bonne méthode de commande doit effectivement proposer un tel réglage,


mais doit également laisser le concepteur libre de modifier les compromis
performance-robustesse majeurs, et ceci avec facilité, sans le laisser désarmé soit
devant la manipulation directe des quatre coefficients d’un PID, soit devant un jeu
de « spécifications » plus ou moins abstraites.

Le principe du LTR (indirect) conduit à se donner un (unique) paramètre de


réglage To, qui gère le compromis performances-robustesse. Le tableau 3.1 illustre
l’effet de variations de To sur la fonction de sensibilité effective (celle de
l’intégrateur retardé, bouclé par le régulateur conçu à partir du modèle approximé).

Horizon dominant T0 L 2L 3L

Sup(|Syd (jω)|) 8,82 dB 5,1 dB 3,71 dB

Marge de retard 0,57 L 1,23 L 1,9 L

Pulsation de coupure 0,4/L rd/sec. 0,36/L rd/sec. 0,27/L rd/sec.


à – 3 dB de Sy(jω)

Tableau 3.1. Effet du réglage de To


Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 115

L’effet LTR indirect apparaît clairement lorsque To augmente :


– robustesse par la réduction du facteur de résonance, grâce à la tendance vers
une cible qui satisfait S yd ( jω ) ≤ 1 (voir paragraphe 3.3.2) ;

– robustesse par accroissement de la marge de retard ;


– perte de performances en termes de réduction de la largeur de la bande
d’atténuation de la fonction de sensibilité.

Au vu de ces indicateurs, le concepteur peut exercer un choix, qui consistera


éventuellement à sacrifier les performances au profit de la robustesse en accroissant
le paramètre de synthèse To.

3.4.4. Commentaires

Un préalable à la synthèse des PID par placement de pôles est l’approximation


des processus par des modèles du second ordre. Si le modèle est obtenu par
identification, on le contraindra à être du second degré. Si le processus
préalablement modélisé est d’ordre supérieur, une excellente méthode de
simplification consiste à identifier un second degré à partir de données d’entrée-
sortie simulées. De telles techniques sont incorporées dans le logiciel Easy PID
Tuning, développé par IPSIS [LAR 99a].

Nous ne sommes évidemment pas les premiers à effectuer la synthèse des PID
par un placement de pôles à partir d’un modèle du second ordre. Par contre, nous
nous écartons de la pratique quasi universelle en exigeant trois pôles dominants à
travers le polynôme F(s) pour obtenir le LTR indirect. Nous satisfaisons ainsi à une
exigence qui est pratiquement une condition nécessaire de robustesse. Ceux qui se
contentent de placer simplement deux pôles dominants obtiennent presque
fatalement des régulateurs peu robustes et se voient contraints de procéder à des
corrections ultérieures du transfert de boucle ou de la fonction de sensibilité pour
récupérer quelque robustesse. Ceci est vrai, a fortiori, pour des systèmes d’ordre
supérieur à deux.

Dans tous les cas où l’approximation par un deuxième ordre est pertinente, il
convient de proposer à l’utilisateur le régulateur standard, c’est-à-dire le PID,
sachant qu’il y aura peu à attendre d’un régulateur plus complexe.

Il importe aussi de faire apparaître la synthèse d’un PID comme un cas


particulier d’une méthode plus générale, mais aussi simple à utiliser : le LTR par
placement de pôles, auquel on pourra faire appel lorsque le processus à contrôler
déborde le champ d’application des PID.
116 Conception de commandes robustes

Le comportement décrit par le tableau du tableau 3.1 est très représentatif de


celui qu’exerce le placement de pôles sur une large classe de processus, comme le
montreront aussi les exemples de la section 3.6.

3.5. Le placement des pôles à travers la commande LQG

3.5.1. Difficultés relatives au placement des pôles auxiliaires

Lorsque le processus présente des zéros critiques, proches ou sur l’axe


imaginaire, la recherche d’un compromis performances-robustesse, par quelque
méthode que ce soit, conduira toujours à des pôles de la boucle fermée situés au
voisinage de ces zéros critiques. Le problème consiste à moduler ce voisinage en
fonction des circonstances :
– le degré de petitesse (et le signe) de la partie réelle des zéros concernés,
– la proximité éventuelle de pôles en boucle ouverte,
– les incertitudes affectant les pôles et zéros critiques, ainsi que le degré de
corrélation de ces incertitudes.

Une stratégie directe de placement des pôles auxiliaires, qui voudrait tenir
compte de tous ces facteurs, devient vite inextricable4. Dans ce paragraphe, on
conserve l’horizon Tc comme seul paramètre de réglage auxiliaire, mais avec prise
en compte de la présence des pôles en boucle ouverte dans la synthèse de C(s).

3.5.2. Une formulation standard élémentaire des problèmes de régulation

Un processus (ou système) augmenté inclut le modèle B/A du processus


proprement dit et des ajouts conceptuels (modèles prédicteurs des perturbations,
pénalités matricielles ou fréquentielles), à travers lesquelles on règlera les
compromis entre performances et robustesse.

Un des problèmes standards les plus élémentaires que l’on puisse associer à une
boucle de régulation est représenté sur la figure 3.6. La sortie mesurée y est l’écart
entaché d’un bruit de mesure wy. La perturbation à rejeter wu est disposée en
perturbation de charge additive sur l’entrée. Les entrées de bruits et perturbations
sont regroupées en un vecteur w.

Un signal d’écart augmenté réunit l’écart proprement dit zy et un signal zu


proportionnel à la commande u.

4. Il est d’ailleurs aussi illusoire de prétendre y parvenir à travers des spécifications


artificielles et des méthodes plus ou moins conservatrices (H∞, LMI…).
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 117

Figure 3.6. Un problème standard élémentaire

Des « pondérations » Wo et Wc, disposées judicieusement, permettront de régler


le régulateur à travers le problème standard associé.

La commande dite H2 consiste à minimiser la norme H2 du transfert en boucle


fermée Hzw entre w et z. Il se trouve que sous l’hypothèse où w est un bruit blanc
unité, la variance de z est justement donnée par cette norme H2. On parle alors de
commande LQG. Pour autant, l’optimisation H2 n’implique pas nécessairement un
contexte statistique et ne se confond donc pas avec la commande LQG.

De même, la commande H∞ consiste à minimiser la norme H∞ de Hzw. Mais en


amont du choix de la norme se situe la démarche d’augmentation du processus.
Ainsi, le modèle standard à pondérations statiques de la figure 3.6 ne conduit pas à
un régulateur à action intégrale. Pour obtenir celle-ci, plusieurs solutions se
présentent, par exemple :
– infliger à l’écart zy une « pénalité fréquentielle » 1/s,
– inclure dans z la dérivée du/dt au lieu de u,
– remplacer le modèle A(s) par sA(s) lors de la conception, puis réincorporer 1/s
au régulateur obtenu.

Dans le principe, toutes ces solutions paraissent simples, mais certaines


soulèvent des problèmes plus délicats qu’il n’y paraît (non-stabilisabilité ou non-
commandabilité du système augmenté, par exemple).

Mais surtout, supposons qu’il existe des modes peu commandables, se traduisant
dans B(s)/A(s) par des couples pôles-zéros voisins les uns des autres. La disposition
additive sur u de la perturbation wu revient à adopter, pour la conception,
l’hypothèse favorable selon laquelle les perturbations solliciteraient peu les modes
eux-mêmes peu commandables. Une hypothèse semblable est sous-jacente à tous les
systèmes augmentés où le processus B/A apparaît comme un tout indissocié. Il s’agit
118 Conception de commandes robustes

là d’une erreur de conception quasi universelle (en particulier dans le cadre H∞) et
beaucoup de théories savantes n’existent que pour racheter cette faute originelle.
Une fois reconnue la nécessité d’intervenir dans le processus B/A lors de
l’augmentation du modèle et pas seulement au niveau de ses entrées et sorties, il
convient d’essayer de le faire de la façon la plus simple possible.

3.5.3. Une reformulation standard pour un régulateur intégral

On considère le problème standard représenté sur la figure 3.7. Par rapport à la


figure 3.6, on souligne les différences suivantes :
– le processus B/A est dissocié selon la factorisation observable : B/A =A-1B ;
– le point d’injection de la perturbation notée ξ correspond à une hypothèse de
conception selon laquelle tous les modes du processus sont excités par ξ,
indépendamment des propriétés de commandabilité associées à la transmittance
complète A-1B ;
– la perturbation ξ est modélisée comme un signal à prédiction constante (le
processus de Wiener). Le modèle Wo /s peut aussi être interprété comme une pénalité
fréquentielle affectée à l’entrée wξ ;
– on souligne enfin que les sorties pénalisées z regroupent d’une part l’écart zy, et
d’autre part l’écart entre la commande u et le signal u a = B (0) −1 ξ , écart destiné à
s’annuler asymptotiquement lors du rejet de la perturbation ξ.

Figure 3.7. Un système augmenté pour la synthèse d’un régulateur intégral


Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 119

Le système ainsi constitué est non stabilisable, ce qui le rend insoluble par les
méthodes simplistes qui exigent l’hypothèse de stabilisabilité du système augmenté :
hypothèse non nécessaire puisque l’objectif est de contrôler l’écart z et non l’état
dans son ensemble. La stabilité interne exigible est réduite à celle de l’état du
processus proprement dit. Le problème standard correspondant est ici soluble, grâce
à la définition ad hoc adoptée pour z. On peut effectuer la résolution par approche
d’état, en appliquant le formalisme LQG et la commande avec rejet asymptotique,
telle qu’elle est développée dans les chapitres 16 et 19 de [LAR 95]

Les modes de la boucle fermée sont constitués du polynôme caractéristique du


filtre (de degré n + 1) et du polynôme caractéristique induit par la commande (de
degré n). Rien n’interdit de noter respectivement ces polynômes F(s) et C(s).
Inversement, les polynômes F(s) et C(s) de la synthèse par placement de pôles
peuvent être interprétés comme des polynômes caractéristiques de commande et de
filtrage, dans une possible mise en forme du régulateur en termes d’observateur et
retour d’état. C’est pourquoi F(s) sera maintenant dénommé indifféremment
polynôme dominant ou polynôme de filtrage, et C(s) polynôme accessoire ou de
commande. Ceci même si la conception du régulateur ne fait pas explicitement
référence à l’approche d’état.

3.5.4. Interprétation du LQG/LTR en termes de placement de pôles

Historiquement, le LTR est né dans le contexte de la commande LQG. Compte


tenu des particularités du problème standard adopté, on peut montrer que le LTR
direct (sous forme duale) demande de faire tendre la pondération Wc vers zéro
[LAR 99c].

Un résultat intermédiaire classique [AND 89] permet de mettre en évidence le


lien entre le LQG/LTR standard et le LTR par placement de pôles, et d’étendre ce
lien au LTR indirect.

Les polynômes F(s) et C(s), issus du LQG appliqué au problème standard de la


figure 3.7, vérifient en effet les égalités suivantes, où F(s) et C(s) sont des
factorisations stables des seconds membres des équations ci-dessous :

C ( s )C (− s ) = Wc2 A( s ) A(− s ) + B( s ) B (− s ) [3.6]

F ( s ) F (− s ) = [ sA( s )][− sA(− s )] + Wo2 [3.7]


120 Conception de commandes robustes

Bien que ces équations soient issues de la commande LQG, on peut faire
abstraction de cette origine et constater que les solutions F(s) et C(s) jouissent des
propriétés évidentes suivantes :
– pour un système dont tous les zéros sont à partie réelle négative ou nulle, il est
clair que si Wc → 0, C(s) tend vers B(s), ce qui engendre, selon le paragraphe 3.2.5,
le LTR direct ;
– pour un système dont tous les pôles sont à partie réelle négative ou nulle, si
W0 → 0, alors F(s) tend vers sA(s), ce qui engendre, selon le paragraphe 3.2.4, le
LTR indirect.

Les équations [3.6] et [3.7] définissent donc, en tant que telles, des stratégies de
placement de pôles, auxquelles ont peut faire appel sans faire référence au LQG, en
considérant Wo et Wc comme de simples paramètres de réglage lors de la
détermination de C(s) et F(s) à travers les équations [3.6] et [3.7].

Le placement des pôles auxiliaires (ou de commande) par résolution de


l’équation [3.7] n’est plus seulement basé sur B(s), mais aussi sur A(s). En d’autres
termes, le placement des pôles de commande prend maintenant en compte les
propriétés de commandabilité du système. Le bénéfice se fait aussi sentir lors du
traitement des systèmes critiques qui présentent des zéros proches de l’axe
imaginaire.

3.5.5. Détermination des pondérations

Les horizons To et Tc présentaient l’avantage considérable d’exercer une action


quantitative directe sur le placement des pôles dominants et auxiliaires. A l’état brut,
les pondérations Wo et Wc ont des effets beaucoup moins prévisibles sur les modes de
la boucle fermée, et c’est là une difficulté à laquelle se heurtent depuis les origines
les usagers du LQG. On va déterminer ici Wo et Wc en fonction des deux paramètres
To et Tc, que l’on dénomme maintenant horizons de filtrage et de commande.

Pour cela, on introduit d’abord le concept de gain quadratique sur un horizon T.


Considérons une transmittance G(s), de réponse impulsionnelle g(t). On définit son
gain quadratique comme le rapport du carré d’une amplitude en sortie Y2 sur la
puissance minimale d’entrée u(t), qui permet de l’atteindre en un temps T :

Y2
Gain quadratique sur l'horizon T : Γ(G, T ) =
1 T 2
min
u ( t ) : y (T ) = Y T
∫0 u (t )dt
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 121

La résolution du problème d’optimisation induit donne simplement :

T
Γ(G , T ) = T ∫0
g (t ) 2 dt

Le gain quadratique quantifie la capacité d’action du système G(s) sur l’horizon


T. Il se révèle utile pour mettre à l’échelle des entrées ou des sorties de systèmes,
avant de procéder à des optimisations ou, ce qui revient au même, pour définir des
pondérations.

Dans le cas présent, la figure 3.7 montre que depuis les entrées w jusqu’à y, le
gain Wo se présente en série avec 1/sA(s), et que depuis u jusqu’à z, le gain Wc se
trouve en parallèle avec B(s)/A(s), d’où les propositions cohérentes :

1 B( s )
Wo = Γ −1 / 2 ( , T0 ), Wc = Γ1 / 2 ( , Tc )
sA( s ) A( s )

Lorsque l’on adopte ces expressions de Wo et Wc, on constate que les horizons To
et Tc ont un pouvoir réglant très similaire à celui qui résulte des stratégies directes de
la section 3.3.

3.5.6. Renforcement de la robustesse de la cible

Jusqu’ici, la seule propriété de robustesse attribuée à la cible était la satisfaction


de l’inégalité (voir paragraphe 3.2.3) :

sA( s)
S y ( jω ) = ≤1
F (s) s = jω

Néanmoins, la marge de gain inférieur garantie par cette condition (voir figure 3.2)
est seulement de ½, soit – 3 dB. Lorsque le système n’est pas asymptotiquement stable
(un double intégrateur, par exemple), la marge de gain de la cible pourra effectivement
devenir insuffisante, d’autant plus que la restauration n’est jamais parfaite. Pour se
rendre compte de cette insuffisance, il ne suffit pas de considérer la marge de module,
définie comme l’inverse du maximum de Syd(jω) : elle est moins contraignante et donc
moins représentative de la robustesse que le traditionnel facteur de résonance de la
sensibilité complémentaire Ty(jω) = 1 – Syd(jω).

Renforcer la robustesse de la cible va évidemment demander un effort de


conception supplémentaire et avoir des répercussions sur les performances.
122 Conception de commandes robustes

Dans le contexte du placement direct des pôles, on adjoint à To un « facteur de


forme » ko et on modifie ainsi le placement des pôles dominants :
– le facteur s de sA(s) reste projeté en – 1/To, d’où un premier facteur (s +1/To) ;
– la stratégie du paragraphe 3.3.2 est appliquée à A(s) avec l’horizon ko To. On
note Fo(s) le second facteur de F(s).

s A( s )
La sensibilité cible devient S yd ( s ) = . Pour un système sans
(s + To−1 ) Fo ( s )
instabilité exponentielle, le LTR indirect induit alors les propriétés suivantes
lorsque ko >> 1 :
s
– S yd ( s ) → : à la restauration, les perturbations additives en sortie
( s + To−1 )
sont rejetées selon un mode exponentiel de constante de temps To ;
– le transfert de boucle cible tend donc vers 1/sTo, avec des marges de gain (– ∞,
+ ∞) et de phase (π/2) accrues ;
– la marge de retard cible (πTo/2) est déterminée par To ;
– es perturbations de charge (autres que celles additives sur la sortie), sont
rejetées selon les modes de Fo(s), qui peuvent devenir très lents avec ko si le système
est intégrateur, ou s’il présente des modes lents en boucle ouverte. C’est le prix des
accroissements de robustesse.

Lorsqu’un renforcement s’impose, un facteur ko = 5 est une bonne valeur par


défaut. Mieux encore, lorsque le système B/A est fortement stable en boucle ouverte,
la cible n’a pas besoin d’être renforcée et le facteur de forme ko se révèle justement
sans effet sensible. On peut donc le maintenir systématiquement et cette proposition
permet de conserver l’horizon To comme paramètre de synthèse majeur.

Dans le contexte d’un placement à base de LQG, la transposition directe des


opérations 1 et 2 ci-dessus conduirait à remplacer l’équation [3.7] par :

( )
F ( s ) F ( − s ) = s( − s ) + 1 / T02  ( A( s ) A( − s ) + Γ −1 (
1 
, T0 ) 
 sA( s ) 

Dans la perspective de généralisations multivariables, il conviendrait de résoudre le


problème inverse, c’est-à-dire retrouver quelle classe de modèle standard engendre le
placement ci-dessus des modes de filtrage. Ce problème n’est pas très simple et sa
résolution fera de toutes façons apparaître des bruits de conception supplémentaires.
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 123

Plus radicalement, nous proposons ci-après une généralisation, dans laquelle un


vecteur de bruit complet est affecté aux équations d’état représentatives du
processus augmenté.

3.5.7. Généralisation multivariable

Soit un système à contrôler carré (nu = ny), de matrice de transfert


G ( s ) = C ( sI − A) −1 B , où le triplet (A,B,C) est une réalisation minimale d’état x.
Pour la conception, on augmente le système d’une perturbation de charge ξ, de
modèle à prédiction constante, additive sur la commande.

Les équations du système d’état étendu XT = [xT ξT] et bruité s’écrivent alors :

 = FX + Gu + w , y = HX + x
X [3.8]
X y

où :

 A B B
F =  , G =  0  , H = [C 0] [3.9]
 0 0   

On associe à ces équations un problème LQG en définissant wy comme un bruit


blanc unité, en attribuant à wX une intensité notée Qo et en minimisant le critère :

J = E [X T H T H X + (u − ξ ) T Rc (u − ξ )]

Bien que la paire (F,G) soit non stabilisable, la solution existe (grâce à la
présence de (u–ξ ) dans le critère) et le régulateur est donné par :


Xˆ = FXˆ + Gu + K o ( y − HXˆ )
[3.10]
u = −[K c I ]Xˆ

où Ko est le gain de Kalman associé à la paire (F,H) et aux intensités Qo et Ro = I, et où


T
Kc est le gain de la commande LQ associé à la paire (A,B) et aux poids Qc = C C et Rc.

Pour déterminer les deux matrices Qo et Rc, on va se baser sur les trois
paramètres déjà introduits : l’horizon dominant To, le facteur de restauration kc et le
facteur de forme ko . On définit :

Tc T AT t T
Rc = Tc
0∫B e C Ce At Bdt [3.11]
124 Conception de commandes robustes

où Tc = To/kc. Cette expression généralise la pondération par gain quadratique du


paragraphe 3.5.4.

Dans le même esprit, on a proposé depuis quelques temps [LAR 95] d’attribuer à
wX une matrice d’intensité basée sur le grammien partiel sur l’horizon To, qui confère
à To un excellent pouvoir réglant des modes dominants du filtre :

Q0−1 = To ∫0To e F t H T H e Ft dt
T

On propose ici de modifier cette expression par le facteur de forme ko, selon :

Q0−1 = k 0−1To ∫0koTo e F t H T H e Ft dt


T
[3.12]

A To constant, lorsque ko → ∞, on observe le comportement souhaité : un groupe


de ny modes de filtrage est piloté par To, les autres le sont selon un horizon koTo.

En résumé, le programme de synthèse des régulateurs multivariables tient en


quelques lignes :
– augmentation du modèle [3.9] ;
– calcul des pondérations [3.11] et [3.12], ce qui demande de disposer d’un
module de calcul de grammiens partiels (par exemple [VAN 78]) ;
– calcul des gains Ko et Kc du régulateur [3.10], sur la base des fonctions
classiques de calcul des commandes LQ.

L’expérience montre que les propriétés réglantes énoncées plus haut pour les
paramètres To, kc et ko se retrouvent bien à travers la synthèse LQG. En particulier,
on peut conserver les propositions par défaut : facteur de restauration kc = 5, facteur
de forme ko = 5. A travers le seul paramètre To, le réglage d’un régulateur
multivariable devient même plus facile que celui d’un PID (voir paragraphe 3.6.2).

3.6. Exemples d’applications

3.6.1. Premier exemple : un système flexible

Ce système (un bloc gyromiroir de viseur d’hélicoptère [COV 92]) est difficile à
contrôler. Il est doublement intégrateur en boucle ouverte, comporte six paires de
pôles complexes conjugués très peu amortis, regroupées sur moins de deux octaves.
Ils sont accompagnés de quatre paires de zéros parfois très voisins des pôles et dont
certains sont à non-minimum de phase. Ayant adopté la milliseconde pour unité de
temps, la transmittance s’écrit :
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 125

( s + 0.012 ± 1.3 j )( s + 0.17 ± 2.15 j )


G ( s ) = 0.04 "
s ( s + 0.012 ± 1.31 j )(s + 0.004 ± 1.8 j )( s + 0.016 ± 2.15 j )
2

( s − 0.14 ± 2.15 j )( s − 0.04 ± 3.93 j )


"
( s + 0.01 ± 3.33 j )( s + 2 ± 4.27 j )( s + 0.015 ± 4.65 j )

L’utilisateur s’intéresse ici aux performances en termes de sensibilité de la sortie


y aux perturbations de charge du, additives sur la commande u, et souhaite atteindre
S ydu ≤ −10dB .

La période du mode le plus lent est de 5 ms. On se base sur cette valeur pour
déterminer une gamme de variation de To, par exemple To = {2.5 ms, 5 ms, 10 ms}.
Par ailleurs, on adopte les valeurs déjà proposées par défaut : facteur de restauration
kc = 5, facteur de forme ko = 5. Les résultats obtenus sont résumés sur la figure 3.8,
où la marge de gain généralisée n’est autre que l’inverse du classique facteur de
résonance, exprimé en pourcentage. Quant à l’expression proposée sous le nom de
marge de retard généralisée, elle constitue un minorant de la marge de retard.

Horizon dominant : To 2,5 ms 5 ms 10 ms


(avec kc = 5, ko= 5) (adopté)
−1 50 % 64 % 70 %
Marge de gain généralisée : T y ( s )

−1 0,24 ms 0,26 ms 0,45 ms


Marge de retard généralisée : sT y ( s )

– 28 dB – 20 dB – 11 dB
Sensibilité aux perturbations du : S ydu

Tableau 3.2. Tableau des indicateurs de robustesse et de performance

On constate que quand To croît, les marges de robustesse augmentent, mais que
les performances se dégradent. Il suffira ici d’adopter le régulateur donnant le
maximum de robustesse dans le respect des performances spécifiées (To = 10). Le
lieu de Nyquist correspondant est représenté sur la figure 3.8.

Le régulateur ainsi obtenu conjugue les deux modes de contrôle classiques : la


« commande en gain » et la « commande en phase ».

La commande en phase consiste à faire basculer les boucles engendrées par les
modes peu amortis vers la partie positive du plan complexe, loin du point (– 1). La
marge de phase pourra alors avoisiner 90°, et la marge de retard sera alors de l’ordre
126 Conception de commandes robustes

du quart de la période du mode concerné (et donc parfois très petite). La commande
en phase ne peut donc s’adresser qu’aux modes de plus basse fréquence, que l’on
peut espérer aussi être les mieux modélisés.

Les modes de fréquence élevée doivent être traités par la commande en gain, qui
consiste à atténuer le transfert de boucle dans leur gamme de fréquence, au risque de
dégrader l’amplitude des basses fréquences de L(jω), qui assurent les performances.

Il y a souvent peu de marge de manœuvre entre les deux modes de commande, et


il est déjà remarquable d’avoir obtenu un régulateur acceptable en manipulant le
seul paramètre de synthèse To à travers une technique de synthèse qui, notons-le,
n’est pas spécialement dédiée au contrôle des structures flexibles.

Le concepteur perfectionniste voudra néanmoins profiter des degrés de liberté


offerts par les facteurs kc et ko pour tenter d’améliorer l’arbitrage entre robustesse et
performances. Ainsi, pour privilégier la commande en gain, il réduira le facteur de
restauration kc (par exemple de 5 à 2), ce qui accroît la pondération Rc et sollicite
donc moins la commande. Mais pour compenser la perte de restauration induite en
basse fréquence il devra augmenter parallèlement le facteur de forme ko (par exemple
de 5 à 10). Suite à ces opérations, le réglage de To devra être repris.

Figure 3.8. Le lieu de Nyquist de la boucle fermée

Avec kc = 2 et ko = 10, le tableau des indicateurs devient comme sur le tableau 3.3.

En adoptant la combinaison To = 5, kc = 2 et ko = 10, on parvient donc à


maintenir les performances et la marge de gain en accroissant la marge de retard de
25 %. Mais ce genre de manipulation fait perdre à la méthode sa séduisante
simplicité et il convient de n’y recourir qu’en cas de besoin réel.
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 127

Horizon dominant To : 2,5 ms 5 ms 10 ms


(kc = 2, ko= 10)
−1 63 % 70 % 71 %
Marge de gain généralisée : T ( s ) ∞
−1 0,28 ms 0,56 ms 0,88 ms
Marge de retard généralisée : sT ( s ) ∞
– 21 dB – 12 dB – 1 dB
Sensibilité : S ydu

Tableau 3.3. Nouveau tableau des indicateurs de robustesse et de performance

3.6.2. Deuxième exemple : régulation multivariable en centrale thermique

Il s’agit d’une tranche de 250 MW d’une centrale thermique au charbon. En


premier lieu, un modèle basé sur des équations thermodynamiques macroscopiques
de la chaudière a été développé, puis validé et recalé grâce à des essais sur site, enfin
linéarisé et simplifié. Selon les configurations de commande envisagées (toutes les
grandeurs en régulation, ou certaines en pilotage manuel), on se trouve en présence
de plus d’une dizaine de régulations à concevoir, les unes monovariables, les autres
multivariables. Il n’est pas question de passer un temps considérable au réglage de
chacune d’entre elles, d’où la nécessité d’une procédure simple à mettre en œuvre et
efficace même en multivariable.

On présente ici les résultats concernant la régulation coordonnée pression-


puissance [PUR 99, SAL 98]. Les réponses indicielles du modèle en boucle ouverte
(dimension d’état 6) sont reproduites sur la figure 3.9, où les coordonnées sont
exprimées en unités normalisées.

Les entrées de commande sont :


– U1 : ouverture de la vanne d’admission vapeur à la turbine,
– U2 : débit de charbon d’alimentation aux broyeurs.

Les sorties à contrôler sont :


– Y1 : puissance produite par les turbo-alternateurs,
– Y2 : pression de vapeur à l’admission turbine.

L’examen des réponses en boucle ouverte suggère un horizon dominant de


quelques unités (en temps normalisé). On teste donc la gamme :

To = {3, 4, 5, 6}
128 Conception de commandes robustes

et l’on applique la méthode LQG-LTR avec les paramètres par défaut : facteur de
restauration kc = 5, facteur de forme ko = 5. Le tableau des marges de robustesse est
celui du tableau 3.4. Les réponses indicielles en boucle fermée en réponse à des
perturbations additives sur la commande sont reportées sur la figure 3.10.

Figure 3.9. Réponses indicielles en boucle ouverte

On adopte To = 4, qui assure un rejet suffisamment rapide, en préservant des


marges de gain et de retard compatibles avec les erreurs de modèle et on passe à la
synthèse de la régulation suivante.

Horizon dominant : To 3 4 5 6
(kc = 5, ko= 5)
−1 58 % 71 % 80 % 86 %
Marge de gain généralisée : T ( s ) ∞

−1 0,99 1,65 2,36 3,12


Marge de retard généralisée : sT ( s ) ∞

Tableau 3.4. Tableau des indicateurs de robustesse et de performance

Le réglage est incomparablement plus facile que ne l’aurait été celui de deux
PID, accompagné de tendances croisées. Concrètement, la synthèse a été effectuée
au moyen du logiciel Easy State Control, développé par IPSIS [LAR 96]. Cet outil,
Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 129

destiné à la production de régulateurs numériques à temps discret, prend aussi en


charge la synthèse des feedforwards, en présence de consignes et de perturbations
mesurées. Les régulations, installées sur le système numérique de contrôle
commande infi-90 de Elsag Bailey, sont en fonction sur la centrale du Havre depuis
juin 1998.

Figure 3.10. Réponses en régulation

3.7. Conclusion

La pensée unique prévaut actuellement chez les automaticiens que la synthèse


des lois de commande ne se conçoit pas sans optimisation. Sont apparues depuis
longtemps les optimisations sans contraintes (LQG), et plus récemment sous
contraintes, grâce aux LMI. Cette voie exige toujours plus de prérequis théoriques
chez les utilisateurs et la pénétration industrielle est d’autant plus faible que la
limitation des performances se situe bien plus dans le processus à contrôler lui-
même que dans la conception des régulateurs.

La synthèse par placement de pôles et LTR obéit à une logique différente. Quand
l’optimisation y apparaît, ce n’est qu’à titre d’instrument de calcul, sans prétention
d’optimiser réellement quoi que ce soit de concret. La synthèse repose en effet sur
l’adoption d’un ensemble de paramètres de réglage (To, kc, ko), qui ne prétendent pas
être des spécifications de performance ni de robustesse. Leur petit nombre restreint
la classe des régulateurs potentiels et la sélectivité des effets de ces paramètres rend
cette classe facile à explorer. Par ailleurs, grâce à la théorie d’où elle est issue (le
130 Conception de commandes robustes

LTR), le concepteur a une bonne garantie que la restriction n’a pas exclu les
« bons » régulateurs, c’est-à-dire ceux qui, à un niveau de performances donné,
présentent un haut niveau de robustesse (ou réciproquement). La tâche du
concepteur consiste alors à analyser concrètement les performances et la robustesse
de quelques régulateurs et à sélectionner celui qui lui convient le mieux, sur la base
de ses propres critères (parfois subjectifs ou peu quantifiables), sans être contraint de
les exprimer en termes de spécifications artificielles.

Pour ce qui est des PID, le nombre de leurs coefficients a beau sembler faible
(quatre au maximum), il est déjà trop élevé lorsqu’il s’agit de les manipuler
directement (même à travers une optimisation portant sur des critères concrets [The
Mathworks, 1998]), et c’est pourquoi il existe une telle demande de méthodes de
réglage. Par ailleurs, les utilisateurs ont parfois besoin d’être confortés, ayant quelque
réticence à utiliser un instrument réputé rustique, empirique et de bas de gamme. C’est
pourquoi il importe de souligner encore que, si le champ d’application des PID est
celui des systèmes représentables par des modèles du second ordre, beaucoup de
systèmes d’ordre élevé sont suffisamment bien approximables pour qu’il y ait peu de
gain à attendre de régulateurs plus élaborés. Enfin, leur synthèse par placement de
pôles rationalise le réglage des PID en faisant participer à une méthode générale d’un
plus large champ d’application et à laquelle les utilisateurs pourront se familiariser, à
travers des paramètres et des principes de réglage communs.

3.8. Bibliographie

[AND 89] ANDERSON B.D.O., MOORE J.B., Optimal Control, Linear Quadratic Methods,
Prentice Hall, 1989.
[ÅST 84] ÅSTRÖM K.J., WITTENMARK B., Computer controlled systems, theory and design,
Prentice Hall, 1984.
[ÅST 98] ÅSTRÖM K.J., « A paradox in pole placement design », Perspectives in Control,
theory and Application, Springer, 1998.
[BOU 91] BOURLES H., IRVING E. « La méthode LQG-LTR; une interprétation polynomiale
temps continu-temps discret », RAIRO-APII, vol. 25, p. 545-592, 1991.
[COV 92] COVILLE A.G., Approche de la commande robuste par positivité sans le cadre H∞.
Application à la stabilisation de structures flexibles, Thèse de doctorat, Université Paris
VI, 27 janvier 1992.
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Des régulateurs PID à la commande LQG-LTR 131

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Chapitre 4

Placement de pôles
avec calibrage de fonctions de sensibilité
par optimisation convexe

4.1. Introduction

Le problème de la conception de régulateurs numériques robustes a été abondam-


ment traité dans la littérature. Les différentes méthodes permettent d’obtenir des résul-
tats excellents pour des problèmes de commande très difficiles. Quelques-uns parmi
eux, comme par exemple le quantitative feedback theory (QFT), consistent essentiel-
lement en une synthèse manuelle par un ingénieur expérimenté. D’autres, comme le
H∞ , font appel à des techniques d’optimisation puissantes, mais nécessitent toutefois
un choix judicieux de certains filtres de pondération. A un certain point de la concep-
tion, ces méthodes entrent dans des procédures itératives d’ajustement des paramètres
de synthèse, de sorte que le résultat final dépend énormément de l’expertise et de
l’assiduité de l’utilisateur.

A l’origine, la méthode du placement de pôles avec calibrage de fonctions de sen-


sibilité consiste à placer les pôles dominants de la boucle fermée, à spécifier quelques
parties fixes du régulateur et à rajouter ensuite des pôles auxiliaires et des élements
du régulateur afin de respecter certaines spécifications sur les fonctions de sensibilité
perturbation-entrée et perturbation-sortie. De ce fait, il s’agit naturellement d’une pro-
cédure itérative. Récemment, une approche faisant appel à des techniques d’optimisa-
tion a été présentée, qui revient à définir des fonctions de sensibilité désirées dans une

Chapitre rédigé par Jochen L ANGER et Ioan-Doré L ANDAU.


134 Conception de commandes robustes

première étape et à obtenir ensuite par optimisation H∞ des approximations de ces


fonctions désirées par des fonctions faisables [LAND 98]. Néanmoins, l’optimisation
en deux étapes implique le risque de s’éloigner de la vraie intention de l’optimisation,
le respect des bornes sur les fonctions de sensibilité.

Il a été constaté, dans la deuxième partie des années 1980, que de nombreuses
spécifications de performance de la boucle fermée étaient convexes [BOY 88, SAL 86]
(voir aussi le résumé de [BOY 91]). C’est le cas, par exemple, des normes H∞ sur les
fonctions de sensibilité. Puisque ces fonctions sont affines par rapport au paramètre Q
de la paramétrisation Youla-Kuc̆era, une borne supérieure sur la norme H∞ constitue
également une contrainte convexe sur Q. La convexité des contraintes et objectifs
d’optimisation garantit la convergence vers le minimum global du critère. A la base
de ces propriétés, [BOY 88] ont proposé une méthode de synthèse de régulateurs. Ils
choisissent Q comme une fraction rationnelle avec un dénominateur fixe et optimisent
ainsi un filtre à réponse impulsionnelle finie (FIR). La procédure n’insère pas de pôles
supplémentaires pour la boucle fermée. Des modules très élevés de Q ont un effet
similaire sur les fonctions de sensibilité que de tels pôles, mais évidemment, on ne
dispose d’aucun moyen pour maîtriser leurs fréquences et amortissements. Ces défauts
peuvent être très gênants, avant tout pour des systèmes avec des pôles oscillants au-
delà de la bande passante de la boucle fermée. Par ailleurs, on risque d’avoir besoin
d’un vecteur d’optimisation très grand et d’obtenir un régulateur de complexité élevée.

Une approche de conception de régulateurs en représentation d’états, basée sur


les inégalités matricielles linéaires (LMI), a été présentée. Elle combine une synthèse
H∞ /H2 avec des contraintes sur la région des pôles de la boucle fermée [CHI 96].
Toutefois, afin de préserver la convexité du problème en formulation LMI, une seule
matrice réelle positive (auxiliaire) est à utiliser pour l’ensemble des contraintes, ce qui
introduit du conservatisme supplémentaire. De plus, cette approche ne permet pas de
distinguer entre des pôles dominants et auxiliaires de la boucle fermée afin de définir
le comportement temporel dominant à l’avance.

La méthode de synthèse présentée dans ce chapitre traite des systèmes mono-


entrée et monosortie sous forme de fonction de transfert. Elle est basée sur le place-
ment de pôles avec calibrage de fonctions de sensibilité dont on préserve les propriétés
intéressantes, à savoir les possibilités :
– de prédéfinir la performance temporelle à travers les pôles dominants de la
boucle fermée ;
– d’insérer des éléments fixes dans le régulateur.

La partie relativement pénible de la conception qui consiste à ajuster les pôles


auxiliaires et les parties fixes du régulateur afin de respecter les contraintes fréquen-
tielles est remplacée par une procédure d’optimisation convexe.
Placement de pôles 135

Nous donnons ici quelques caractéristiques de la méthode :


– des pôles auxiliaires peuvent être optimisés et restreints à certaines régions de
stabilité grâce à la relaxation de la contrainte du dénominateur fixe de Q ;
– les bornes supérieures sur les fonctions de sensibilité (pondérations) peuvent être
discontinues. Contrairement à des méthodes standard de type H∞ , elles ne nécessitent
pas d’approximation par des fonctions rationnelles ;
– afin de résoudre le problème par optimisation convexe, les contraintes sur l’em-
placement des pôles de la boucle fermée et sur les maximums des fonctions de sen-
sibilité pondérées peuvent être maintenues convexes. Ceci devient possible grâce à
une paramétrisation adaptée du régulateur en utilisant une condition dérivée de celle
développée pour la stabilité robuste par [RAN 94].

La méthode est basée sur l’hypothèse de la connaissance d’un seul modèle du


procédé. Néanmoins, elle s’applique avec succès aussi à un ensemble fini de modèles,
sachant toutefois que la convexité des contraintes n’est garantie que pour le modèle
nominal.

Le chapitre est organisé comme suit. Dans la section 4.2, nous rappelons quelques
élements de base de la méthode du placement de pôles avec calibrage de fonctions de
sensibilité, comme la structure du modèle du procédé et du régulateur et l’utilisation
de spécifications de robustesse comme bornes sur certaines fonctions de sensibilité.
Nous précisons également le problème traité. La section 4.3 suivante explique la para-
métrisation du régulateur et comment les contraintes sur les fonctions de sensibilité et
la région de pôles desirée sont formulées de façon convexe en termes de paramètres
d’optimisation. La procédure de synthèse est décrite en détail dans la section 4.4.
Nous expliquons également le choix des paramètres par défaut et comment aboutir
à une réduction de la complexité du régulateur. La section 4.5 illustre la procédure
d’optimisation à travers la conception d’un régulateur pour un bras souple 360°. Le
chapitre se termine avec quelques conclusions dans la section 4.6 1.

4.2. Eléments de base du placement de pôles avec calibrage de fonctions de sensi-


bilité
4.2.1. Schéma de la boucle fermée
Nous considérons des modèles linéaires mono-entrée-monosortie dans le cas dis-
cret :
z −d B(z −1 )
G(z −1 ) = [4.1]
A(z −1 )

1. Le travail de J. Langer a été soutenu en partie par des bourses du service allemand des
échanges universitaires (DAAD) et de la commission européeenne (programme TMR).
136 Conception de commandes robustes

où :

z = es Te ,
Te temps d’échantillonnage,
d retard pur,
A = 1 + a1 z −1 + · · · + anA z −nA ,
B = b1 z −1 + · · · + bnB z −nB .

Le système est contrôlé par un régulateur discret avec deux degrés de liberté de
type RST ; un schéma de la boucle fermée est représenté par la figure 4.1.

Figure 4.1. Schéma de la boucle fermée avec modèle de référence

4.2.2. Fonctions de sensibilité

Les fonctions de sensibilité perturbation-sortie, perturbation-entrée et perturba-


tion-bruit de mesure sont d’un côté des indicateurs de la stabilité robuste décrivant la
limite de l’incertitude du procédé tolérable dans une certaine bande de fréquence ; de
l’autre côté, elles permettent de spécifier les performances désirées et les contraintes
de la conception. C’est pour cela qu’elles sont des instruments puissants pour la
conception de régulateurs robustes.

Les fonctions de sensibilité perturbation-sortie et perturbation-entrée apparaissent


comme les indicateurs les plus pratiques pour la spécification à la fois de la robustesse
et des performances.

Les marges de robustesse mesurent de différentes façons la réserve de stabilité du


système de commande par rapport à une variation du transfert de la boucle ouverte.

Les mesures principales utilisées dans le placement de pôles avec calibrage


de fonctions de sensibilité sont la marge de module et celle de retard (voir par
exemple [LAND 93]), qui sont des témoins fiables de l’incertitude réellement tolé-
rée. Elles peuvent s’exprimer comme des bornes fréquentielles de la sensibilité
Placement de pôles 137

perturbation-sortie (impact d’une perturbation p sur la sortie du procédé y, voir figure


4.1). La marge de module correspond à une borne supérieure pour la sensibilité
perturbation-sortie. La marge de retard donne une borne supérieure pour la sensibilité
bruit de mesure-sortie qui peut être convertie en des bornes inférieures et supérieures
sur la sensibilité perturbation-sortie. De même, la bande d’atténuation correspond à
une borne supérieure de la sensibilité perturbation-sortie.

La sensibilité perturbation-entrée n’indique pas seulement l’incertitude additive


du procédé tolérée, mais doit être limitée aussi dans les régions fréquentielles où le
gain du système est très petit. Il s’agit ici d’une contrainte importante en pratique.
Sa violation conduit à une sollicitation importante de l’actionneur et réduit dans ces
bandes de fréquence l’incertitude additive tolérée. En général, le gain du système est
petit, proche de la fréquence de Shannon ; mais dans le cas des systèmes très peu
amortis, ceci se produit aussi dans d’autres bandes de fréquence (qui correspondent
aux zéros complexes du procédé).

4.2.3. Formulation du problème

En conformité avec la méthode du placement de pôles avec calibrage de fonctions


de sensibilité, le problème peut être posé ainsi : étant donné un modèle nominal du
procédé Gnom = z −d Bnom /Anom , il faut choisir les parties fixes du contrôleur (HR
et HS ) (par exemple intégrateur) et le comportement en boucle fermée désiré, c’est-
à-dire les pôles dominants de la boucle fermée (PD ) et la région acceptable des pôles
optimisés (auxiliaires) de la boucle fermée. Il faut choisir également les bornes supé-
rieures (Wx ) des modules des fonctions de sensibilité (pas nécessairement continues
sur toute la bande fréquentielle) et un objectif à minimiser (par exemple une autre
fonction de sensibilité).

En faisant appel à la paramétrisation et à la formulation de contraintes ci-dessous,


un contrôleur avec les propriétés désirées peut être obtenu par optimisation convexe à
l’aide de méthodes standard d’optimisation (ou des méthodes spécialisées comme les
ellipsoïdes).

4.3. Paramétrisation convexe du contrôleur

4.3.1. La paramétrisation du contrôleur

En faisant appel à la paramétrisation Youla-Kuc̆era et introduisant des parties fixes


HR et HS du régulateur, nous posons pour les polynômes R et S du régulateur :

R HR (R0 + Anom HS Q)
=
S HS (S0 − z −d Bnom HR Q)
138 Conception de commandes robustes

où Gnom = z −d Bnom /Anom est le modèle nominal et Q appartient à RH∞ , l’en-


semble des fonctions de transfert rationnelles stables et propres. Quand Anom , Bnom ,
HR et HS sont des polynômes en (z −1 ), alors le contrôleur central est le régulateur
« classique » du placement de pôles avec calibrage de fonctions de sensibilité, et ses
éléments R0 et S0 se calculent par l’équation de Bezout :

PD = Anom HS S0 + z −dBnom HR R0 [4.2]

où PD représente le polynôme des pôles fixes de la boucle fermée. Dans le cas général,
Q peut être une fonction de transfert stable et propre. On pose alors Q = β/α, où α
et β sont des polynômes, nα ≥ nβ et les zéros de α sont stables.

Le régulateur devient :
R HR (R0 α + Anom HS β)
= [4.3]
S HS (S0 α − z −d Bnom HR β)
Pour l’ordre maximal des polynômes R et S du régulateur, on obtient :

nR0 = nA + nHS − 1
nS0 = nB + nHR + d − 1
nR = nHR + nHS + nA + max(nα − 1, nβ ) [4.4]
nS = nHR + nHS + nB + d + max(nα − 1, nβ ) [4.5]

Les pôles de la boucle fermée obtenus sont :

P = Anom S + z −d Bnom R = PD α

On retrouve parmi les pôles de la boucle fermée ceux qui caractérisent le contrô-
leur central et les zéros de α.

La sensibilité perturbation-sortie Syp devient :


Anom S
Syp nom =
Anom S + z −dBnom R
 
Anom HS β
= S0 − z −d Bnom HR [4.6]
PD α
La sensibilité perturbation-entrée Sup et la sensibilité bruit de mesure-sortie Syb
prennent une forme similaire :
 
Anom HR β
Sup nom = − R0 + Anom HS [4.7]
PD α
 
z −dBnom HR β
Syb nom = − R0 + Anom HS [4.8]
PD α
Placement de pôles 139

On constate que les fonctions de sensibilité sont affines en Q = β/α. Si Q est


choisi comme un filtre FIR, alors les fonctions de sensibilité sont affines par rapport
au vecteur de ses coefficients et des bornes sur leurs normes H∞ seront des contraintes
convexes.

L’affinité est cependant perdue si l’on considère α et β séparément. La paramé-


trisation de α et β décide alors si la convexité des spécifications de la boucle fermée
peut se conserver et comment.

4.3.2. Paramétrisation de α et β

L’optimisation de Q = β/α comme une fonction de transfert propre et stable est


a priori un problème d’optimisation de dimension infinie. Afin de pouvoir le résoudre
par approximation, [BOY 91] utilisent la méthode mathématique classique de Ritz
(voir [BOY 91] et ses références). Elle consiste à résoudre le problème pour des sous-
ensembles de plus en plus grands mais de dimension finie. Le polynôme β est choisi
comme un filtre FIR dont on ajuste les coefficients par optimisation. Le polynôme α
est fixé comme un polynôme stable.

L’avantage considérable de cette approche est que toute condition convexe en Q le


sera aussi dans le vecteur de paramètres d’optimisation, c’est-à-dire les coefficients du
filtre FIR. Cependant, les pôles de la boucle fermée seront les zéros spécifiés de PD et
α. Des modules extrêmement élevés de Q = β/α peuvent également approcher des
pôles de la boucle fermée, mais, d’une part on ne dispose d’aucun moyen pour maîtri-
ser directement leurs fréquences et amortissements, et d’autre part, ceci demande un
ordre très grand de Q (qui se reflète dans la complexité du régulateur).

Les pôles auxiliaires de la boucle fermée nécessaires pour atteindre certaines per-
formances sont – surtout dans le cas de spécifications de robustesse sévères – très sou-
vent fortement liés aux pôles du système et influencent de façon significative la perfor-
mance du système de commande. Par exemple, l’application présentée dans la section
4.5 montre que des systèmes avec des pôles très peu amortis (amortissement ζbo ) au-
delà de la bande passante de la boucle fermée exigent des pôles de la boucle fermée
correspondants peu amortis (amortissement environ ζbf ≤ 5 ζbo ). L’emplacement le
plus avantageux de ces pôles est cependant inconnu a priori. Généralement, ils per-
mettent de limiter l’activité du régulateur et de respecter des contraintes typiques de
robustesse dans cette bande de fréquences. Des contraintes spécifiques pour une appli-
cation donnée (par exemple sur les fonctions de sensibilité) peuvent également requé-
rir certains emplacements de pôles auxiliaires. D’autre part, des pôles de fréquence
plus basse ou de faible amortissement ont une influence importante sur la performance
temporelle. C’est pour cela que nous nous intéressons à optimiser une partie des pôles
de la boucle fermée tout en surveillant leur emplacement, c’est-à-dire de paramétriser
α et de contrôler les fréquences et amortissements de ses zéros.
140 Conception de commandes robustes

Dans la paramétrisation du contrôleur, α et β sont considérés comme des poly-


nômes. Pour l’optimisation, il est intéressant de considérer plutôt des fractions ration-
nelles, mais avec un dénominateur commun pour α et β. Au moment de la mise en
œuvre du contrôleur, les dénominateurs s’annulent entre α et β.

Nous suivons la proposition d’utiliser la méthode de Ritz pour la paramétrisation


de α et β et d’approcher la famille de toutes les fonctions stables et propres par une
somme finie de fonctions stables et propres. Nous définissons :

X
N X
N
α(xa ) = 1 + xak αk β(xb ) = xb0 + xbk βk
k=1 k=1

où αk et βk sont des fractions rationnelles stables et N est l’ordre de la paramétrisa-


tion. α et β sont alors affines par rapport aux paramètres d’optimisation xak et xbk .
Pour le cas discret (|z| = 1), les éléments αk et βk sont choisis comme des passe-touts
stables avec un pôle constant réel z0 (|z0 | < 1) et une multiplicité proportionnelle à k :
 k
z0 − z −1
αk = βk = [4.9]
1 − z0 z −1
où z0 est la constante de temps de la paramétrisation. Le dénominateur commun de α
et β est (1 − z0 z −1 )N . α et β sont définis par le vecteur xT = [xa T xb T ] qui est celui
des paramètres à optimiser.

Au moment de la mise en œuvre, les dénominateurs communs de α et β s’annulent.


L’ordre maximal du régulateur dans [4.4] et [4.5] est obtenu en posant nα = nβ = N .

4.3.3. Bornes supérieures sur les fonctions de sensibilité

Imposer une borne supérieure (variable avec la fréquence) sur une fonction de
sensibilité pour des besoins de performance ou de robustesse constitue une contrainte
(comparer [4.6] à [4.8]) de la forme :

β 0 (z −1 )
T1 (z −1 ) + T2 (z −1 ) < |W −1 (z −1 )| ∀|z| = 1 [4.10]
α0 (z −1 )

où T1 , T2 et la borne supérieure W −1 (T1 , T2 et W stables) dépendent de la fonction


de sensibilité en question. α0 et β 0 appartiennent 0 0
pà RH∞ , (β /α ) est stable. |.| repré-
sente le module d’une valeur complexe |z| = <2 {z} + =2 {z}. Par exemple, dans
le cas de la fonction de sensibilité perturbation-sortie Syp , l’équation [4.6] donne :
Anom HS
T1 := S0
PD
Placement de pôles 141

Anom HS −d
T2 := − z Bnom HR
PD
et il reste à spécifier la borne supérieure W −1 := Wr−1 .

Néanmoins, des conditions sur la borne supérieure des fonctions de sensibilité du


type [4.10] sont convexes en Q = β 0 /α0 sans l’être en α0 et β 0 . [RAN 94] montrent
que l’existence de α0 , β 0 ∈ RH∞ qui vérifient pour tout k∆k∞ < 1 la condition de
stabilité :
 
β0
1 + ∆ T̄1 + T̄2 0 6= 0 [4.11]
α

implique aussi l’existence d’une paire α, β ∈ RH∞ telle que :

|T̄1 α + T̄2 β| < <{α} ∀|z| = 1

La condition [4.11] est équivalente à :

β0
T̄1 + T̄2 <1
α0 ∞

Ainsi, l’équation [4.10] implique l’existence de α et β telles que, avec T̄1 = W T1


et T̄2 = W T2 :

|W T1 α + W T2 β| < <{α} ∀|z| = 1 [4.12]

et ceci est évidemment une condition convexe sur α et β.

La condition est évaluée point par point sur une grille de fréquences (par exemple
32 points équidistants entre f = 0 et f = 0,5fe , fe étant la fréquence d’échantillon-
nage). Ceci évite l’approximation du gabarit par une fonction de transfert. La nécessité
d’une telle approximation est un problème classique de la synthèse H∞ , puisqu’avec
l’ordre de ce filtre augmente également la complexité du régulateur.

4.3.4. δ-stabilité des pôles auxiliaires

La stabilité des pôles de la boucle fermée dépend de la stabilité des zéros de


α(z −1 , xa ). Remarquons d’abord que [4.12] garantit la stabilité de α comme α est
forcément strictement positif réel.

Néanmoins, nous souhaitons pouvoir restreindre encore plus la région admissible


pour les pôles auxiliaires, par exemple à une intersection de cercles et demi-plans, afin
d’assurer que les pôles de PD restent dominants. Dans ce cas, on parle généralement
de δ-stabilité.
142 Conception de commandes robustes

Pour garantir la δ-stabilité, nous posons une contrainte de stricte positivité réelle
sur un ᾱ qui correspond à l’α original après une projection de la région δ sur l’en-
semble du disque unitaire. Par exemple, si l’on désire restreindre les pôles de α au
cercle de rayon r autour du centre c, il suffit de vérifier la stricte positivité réelle de :

ᾱ(z̄ −1 ) = α(z −1 )
z=r z̄+c

c’est-à-dire :

<{ᾱ(z̄ −1 )} > 0 ∀|z̄| = 1 [4.13]

Cette condition est une contrainte convexe pour le vecteur xa qui définit les coef-
ficients de α. Dans le cas d’une intersection d’un cercle et d’un demi-plan gauche, il
suffit de poser une deuxième contrainte :

ᾱ2 (z̄2−1 ) = α(z −1 )


z=(g+rm)z̄2 −g

où rm signifie le bord du demi-plan (partie réelle maximale tolérée) et g  1.

Ces conditions de stricte positivité réelle convexes en xa constituent des condi-


tions suffisantes pour que les zéros de α soient δ-stables. Les expériences avec des
procédés très variés ont montré qu’avec la paramétrisation choisie pour α, le conser-
vatisme apporté par la condition suffisante est très faible en pratique.

4.4. Synthèse du régulateur

4.4.1. Etapes de conception

La procédure de synthèse pour le régulateur comprend les étapes suivantes :


– la spécification des performances exigées en termes de contraintes et objectifs de
synthèse. Elle est complétée par une proposition de valeurs par défaut pour les gabarits
sur les fonctions de sensibilité, l’emplacement des pôles et la région désirée pour les
pôles auxiliaires ;
– le choix des paramètres d’optimisation (avec proposition de valeurs par défaut)
et l’optimisation même ;
– si l’optimisation ne donne pas de résultat satisfaisant : la correction des premières
étapes afin de répéter l’optimisation ;
– l’optimisation du préfiltre T .
Placement de pôles 143

4.4.2. Spécification des performances

Bornes supérieures des fonctions de sensibilité


La valeur par défaut pour la borne supérieure de la fonction de sensibilité
perturbation-sortie résulte d’une marge de module de −6 dB et d’une marge de retard
d’une période d’échantillonnage. La fonction de sensibilité perturbation-entrée est
limitée à 15 dB par défaut. Ces valeurs standard assurent souvent une robustesse satis-
faisante. Une définition plus précise demande :
– des connaissances plus amples sur le procédé nominal (par exemple, dans le cas
du bras souple traité plus loin, les zéros profonds de la fonction de transfert cachent
des modes non observables peu amortis) ;
– la connaissance de l’incertitude réelle du procédé.

La fonction de transfert du modèle nominal ne fournit pas ces informations, de


sorte qu’une éventuelle correction des valeurs par défaut doit rester à la charge de
l’utilisateur.

Pôles dominants de la boucle fermée et région désirée pour les pôles auxiliaires
Par défaut, les pôles dominants sont fixés à une paire de pôles complexes d’amor-
tissement ζ = 0,8 et de la fréquence des pôles du système les plus lents (sauf inté-
grateurs). La région désirée pour les pôles supplémentaires (optimisés) est l’intersec-
tion d’un cercle touchant les pôles dominants et le point (−1, j0) avec le demi-plan
à gauche des pôles dominants (voir figure 4.2a). D’autres choix sont possibles, tels
qu’un choix plus restrictif afin d’assurer que les pôles de PD restent dominants (voir
figure 4.2b).

Eléments fixes du régulateur


Par défaut, un intégrateur est inclus si nécessaire pour assurer une erreur statique
nulle, mais d’autres filtres peuvent être introduits, soit :
– pour atténuer des perturbations ayant des caractéristiques spécifiques ;
– pour ouvrir la boucle à certaines fréquences (ne pas atténuer certaines perturba-
tions) ou ne pas solliciter l’actionneur à certaines fréquences.

4.4.3. Paramètres d’optimisation et optimisation

Ordre et constante de temps de la paramétrisation


L’ordre de la paramétrisation N correspond au nombre (maximal) de pôles auxi-
liaires ajoutés durant l’optimisation. Par défaut, N est fixé à 3 pour des systèmes bien
amortis. Des pôles fortement oscillants (par exemple ζ ≤ 0,1) du procédé à des fré-
quences au-delà de la bande passante de la boucle fermée ne sont pas à déplacer trop
144 Conception de commandes robustes

(a) Région par défaut (b) Choix pour pôles auxiliaires plus rapides

Figure 4.2. Région désirée pour les pôles auxiliaires (optimisés)

loin afin d’éviter une forte action du régulateur dans cette région fréquentielle. C’est
pour cela que nous augmentons N par le nombre de pôles de ce type. Il reste à détermi-
ner la constante de temps z0 de la paramétrisation. Lors d’une expérience avec N = 2,
on observe qu’avec des valeurs croissantes de z0 , la région dans laquelle les zéros sont
les plus concentrés se déplace de la partie gauche du disque unitaire vers la droite. Il
semble alors raisonnable de choisir z0 égal à la moyenne des parties réelles de tous les
pôles du système. z0 doit néanmoins rester à l’intérieur de la région de stabilité pour
les pôles auxiliaires afin de permettre la stricte positivité réelle de ᾱ.

Optimisation

Des bornes supérieures sur des fonctions de sensibilité et une région désirée pour
les pôles optimisés de la boucle fermée peuvent se traiter comme un problème de fai-
sabilité. Si ces contraintes ne sont pas trop strictes, un objectif d’optimisation peut
être ajouté, tel que la minimisation de la norme H∞ ou H2 du spectre d’une perturba-
tion importante à supprimer. Une autre possibilité est de restreindre encore la région
désirée pour les pôles auxiliaires afin d’accélérer la réponse temporelle. Ceci apparaît
comme la mesure la plus fiable pour augmenter la vitesse de la réponse temporelle
tout en assurant un amortissement suffisant.

L’optimisation est effectuée par un algorithme ellipsoïde standard.


Placement de pôles 145

4.4.4. Améliorations du résultat initial


Si aucune solution pour le problème n’est obtenue, il faut soit relâcher les
contraintes, soit augmenter l’ordre N de la paramétrisation. Si, au contraire, l’atteinte
de l’objectif s’avère facile, on peut réduire l’ordre de la paramétrisation et par consé-
quent la complexité du régulateur.

Un effet subsidiaire de la procédure d’optimisation est une certaine analyse auto-


matique du procédé et des spécifications de performances : parfois un sous-ensemble
des zéros de α obtenus par optimisation peut se corréler facilement avec des pôles
correspondants du procédé. On peut conclure que de tels pôles de la boucle fermée
sont pratiquement indépendants de la procédure d’optimisation et leur présence est
plus ou moins obligatoire pour que la boucle fermée puisse vérifier les spécifications
données avec le procédé en question. Ces zéros de α peuvent alors s’introduire directe-
ment dans PD . La répétition de l’optimisation permet souvent d’obtenir un régulateur
d’ordre réduit, soit directement par la réduction de l’ordre de paramétrisation N , soit
indirectement par la simplification de pôles et zéros proches du régulateur.

4.4.5. Optimisation du préfiltre T (poursuite)


L’optimisation (quasi) convexe du préfiltre T peut être soumise à des contraintes
sur le temps de montée, celui d’établissement, le dépassement et autres caractéris-
tiques. L’optimisation peut prendre en compte un ensemble fini de modèles. Elle
élargit les possibilités par rapport aux choix habituels d’une dynamique de poursuite
découplée (au prix d’une complexité très élevée) ou identique à celle de régulation
(complexité nulle) : une compensation entière de la dynamique de régulation n’est
souvent pas nécessaire, un T d’ordre réduit suffit afin de compenser seuls les pôles les
plus lents de la boucle fermée et d’obtenir une performance satisfaisante, et ceci pour
tout un ensemble de modèles.

Un modèle de référence peut être ajouté afin d’obtenir des transitoires plus lisses
pour l’entrée et la sortie du procédé.

L’application de la procédure d’optimisation permet en général d’obtenir un com-


portement découplé poursuite-régulation avec un T d’ordre sensiblement plus réduit
que celui fourni par la procédure classique tout en présentant une meilleure robustesse.

4.5. Application sur le bras souple 360°


4.5.1. Description du procédé
Description mécanique
Le bras souple est un procédé mono-entrée-monosortie formé de deux lames d’alu-
minium d’1 m de longueur, de 10 cm de largeur et d’une épaisseur de 0,7 mm. Ces
146 Conception de commandes robustes

lames sont reliées de façon souple par une dizaine de pontons rigides (voir figure 4.3).
L’extrémité fixe est asservie en position angulaire par un moteur à courant continu
(asservissement local). La sortie du procédé est la position angulaire de l’extrémité
libre. Afin de varier le comportement du procédé, il est possible de fixer une charge à
l’extrémité libre du bras. La charge de 240 g utilisée augmente l’inertie de la structure
d’environ 50 %.

Figure 4.3. Le bras souple 360°

Plus de détails sur la structure du bras souple et son système de mesure se trouvent
dans [CYR 93] ou [LAND 96].

Le modèle du procédé
Le modèle du procédé a été obtenu à l’aide d’une séquence binaire pseudo-
aléatoire (SBPA) par identification en temps discret avec une fréquence d’échantillon-
nage de 50 ms. Il s’agit d’un modèle d’ordre 6 identifié sans charge [LAND 96], dont
la réponse fréquentielle est donnée dans la figure 4.4.

4.5.2. La conception du régulateur

La borne supérieure sur la fonction de sensibilité Syp correspond à la valeur par


défaut d’une marge de module de −6 dB et d’une marge de retard d’une période
d’échantillonnage. Par contre, la connaissance du procédé incite à réduire la borne
sur Sup par rapport à la valeur par défaut (15 dB) afin de tenir compte d’un mode non
observable (zéro profond de transmission du procédé).
Placement de pôles 147

Figure 4.4. Réponse fréquentielle du modèle du bras souple

Les pôles dominants de la boucle fermée sont choisis par défaut avec la fréquence
des pôles les plus lents du procédé (f = 0,4166 Hz) et un amortissement de ζ = 0,8.
La région désirée pour les pôles auxiliaires est ajustée en fonction. Tenant compte
des pôles du procédé (tableau 4.1), l’ordre de la paramétrisation devient N = 7 (la
valeur 3 pour des systèmes bien amortis est augmentée de quatre pour les pôles oscil-
lants au-delà de la bande passante) et la constante de temps z0 = 0,3508 (voir les
valeurs par défaut des paramètres d’optimisation ci-dessus). Afin d’assurer que les
pôles choisis restent dominants, nous réduisons alors la région désirée pour les pôles
auxiliaires en déplaçant sa limite droite vers la gauche (voir figure 4.2). Tous ces pôles
peuvent être forcés à une partie réelle plus petite qu’un pôle réel avec une fréquence
de f = 0,47 Hz.

Temps discret Temps continu


ζ f0 [Hz]
0,989 1 ± 0,130 2 i 0,018 3 0,416 6
0,738 5 ± 0,647 6 i 0,024 9 2,292 3
−0,675 1 ± 0,613 3 i 0,038 2 7,658 0

Tableau 4.1. Pôles du procédé avec équivalents en temps continu

Les zéros de α issus de l’optimisation sont donnés dans le tableau 4.2. Après
l’annulation d’un pôle contre un zéro du régulateur (tolérance |zi −pi | ≤ 0,02), l’ordre
des polynômes du contrôleur R et S est de 13. Il se révèle que les dernières deux paires
de zéros (peu amorties) correspondent aux deux paires des pôles du procédé en hautes
fréquences. Ces zéros de α peuvent alors être introduits dans PD . L’optimisation est
148 Conception de commandes robustes

Temps discret Temps continu


ζ f0 [Hz]
0,862 6 1,000 0 0,470 4
0,858 5 ± 0,279 1 i 0,309 6 1,052 1
0,545 1 ± 0,728 0 i 0,101 7 2,969 6
−0,593 0 ± 0,585 3 i 0,077 0 7,543 2

Tableau 4.2. Zéros de α avec équivalents en temps continu

répétée avec les mêmes contraintes. La figure 4.5 montre les fonctions de sensibilité
Syp et Sup avec leurs gabarits. La figure 4.6 montre les pôles de la boucle fermée
avec les limites de la région désirée pour les pôles optimisés avant la simplification du
régulateur. Après six annulations de pôles et zéros, les ordres de R et S sont d’ordre
nR = nS = 8. Le gain du contrôleur est donné dans la figure 4.7. La qualité de la
régulation se manifeste dans le rejet de perturbation en temps réel (voir figure 4.8).

Figure 4.5. Fonctions de sensibilité avec gabarits

R EMARQUE 4.1.– A cause de l’évaluation point par point des contraintes fréquen-
tielles, ces dernières peuvent s’avérer violées quelque part entre deux points de test.
Si le respect parfait des contraintes est nécessaire, il suffit d’ajouter la fréquence cri-
tique à l’ensemble des points de test et de répéter l’optimisation.

Il paraît également intéressant d’étudier l’effet de l’ordre de paramétrisation N .


Avec N plus petit que N = 7, même l’exigence minimale (pas de pôles optimisés plus
Placement de pôles 149

Figure 4.6. Pôles de la boucle fermée choisis (∗) et optimisés (×)

Figure 4.7. Gain du régulateur R/S

lents que les pôles dominants fixés) ne peut pas être respectée. Une augmentation de
N vers N = 8 réduit le temps de rejet de perturbation simulé de 2,61 s à 2,43 s. Forcer
les pôles optimisés vers des fréquences plus élevées permet de le réduire à 2,36 s.
L’ordre de R et S est alors de 11 chacun. Augmenter encore N permet de déplacer les
pôles optimisés sans pour autant réduire le temps de rejet. Puisque le nombre de pôles
près de la fréquence minimale augmente, la constante de temps globale de la boucle
ne diminue plus.
150 Conception de commandes robustes

Figure 4.8. Commande en temps réel : rejet de perturbation

Le préfiltre T est conçu pour la boucle avec nR = nS = 8. La structure fragile


du bras nécessitant une trajectoire très lisse pour un temps de réponse donné, nous
utilisons un modèle de référence d’ordre 4 avec deux filtres de fréquence propre f =
0,6 Hz et d’amortissement ζ = 0,8, correspondant à un temps de montée de 1,26 s
(légèrement plus lent que le temps de montée théorique de 1,14 s du deuxième ordre
dominant de la boucle de régulation). Le meilleur résultat est évidemment obtenu
quand T est de l’ordre nT = 14, ce qui annule la dynamique de régulation entière.
Afin de réduire la complexité du régulateur, il est néanmoins intéressant d’examiner
les résultats possibles avec un filtre d’ordre nT plus petit. La figure 4.9 montre la
réponse indicielle pour nT ∈ {2, 4, 6, 8, 10, 12, 14}. Un résultat proche de l’optimum
peut s’obtenir déjà avec un ordre nT = 6 ; l’augmenter au-delà de 10 est inutile.

L’examen de la figure 4.6 met en évidence qu’il est essentiel de compenser les
cinq pôles les plus lents de la boucle fermée ; au-delà de neuf, on ne gagne plus rien.

Le comportement du régulateur en poursuite en temps réel est montré dans la


figure 4.10. La performance de ce régulateur est comparable à celle d’un régulateur
obtenu par la version itérative du placement de pôles avec calibrage de fonctions de
sensibilité [LAND 96]. Par contre, l’ordre du régulateur calculé ici par optimisation
est d’une complexité réduite d’environ 50 %.

En comparaison à des résultats antérieurs, le nouvel algorithme de calcul fournit


des résultats au moins égaux, sinon meilleurs du point de vue performance et com-
plexité du régulateur.
Placement de pôles 151

Figure 4.9. Réponse indicielle avec préfiltre d’ordre variable nT

Figure 4.10. Poursuite en temps réel

Le bilan peut encore s’améliorer quand on touche aux valeurs par défaut des para-
mètres de synthèse, surtout concernant la complexité du régulateur. Lors d’une varia-
tion, ils montrent des effets cohérents et logiques. Leur manipulation est alors facile
et nécessite très peu d’expérience.

Le principal mérite de l’algorithme de calcul réside cependant dans le gain de


temps pour la synthèse qui est particulièrement important pour des systèmes d’ordre
élevé avec des spécifications sévères comme le bras souple.
152 Conception de commandes robustes

4.6. Conclusion

Nous avons présenté dans ce chapitre une paramétrisation de régulateur basée sur
celle de Youla-Kuc̆era adaptée au placement de pôles avec calibrage de fonctions de
sensibilité. Cette paramétrisation permet de formuler des bornes supérieures (même
discontinues) sur les fonctions de sensiblité nominales et l’emplacement des pôles de
la boucle fermée dans une région désirée du plan complexe comme des contraintes
convexes d’une seule optimisation convexe.

Le préfiltre T peut également s’obtenir par une optimisation convexe qui utilise des
contraintes et objectifs d’optimisation comme le temps de montée, le dépassement et
le temps d’établissement.

La méthode a été conçue dans le souci de réduire autant que possible le besoin
d’intervention par l’utilisateur. Son action se restreint à vérifier le choix des pôles
dominants par rapport à ses propres besoins et à définir la région acceptable pour les
pôles auxiliaires, ce qui ne nécessite que des connaissances de base du placement de
pôles classique. Son intervention reste indispensable au niveau des spécifications de
performance (pour la simple raison que le modèle mathématique linéaire que l’on a pu
obtenir par l’identification ne contient parfois pas toutes les informations nécessaires
pour leur définition). Ceci ne nous paraît pas comme un obstacle majeur, puisque
l’ingénieur est en général beaucoup plus familier avec les saturations, limitations et
fréquences d’oscillation de son procédé qu’avec les procédures de synthèse de régu-
lateurs.

Ici, nous avons illustré la méthode à travers son application à un bras flexible (voir
aussi [LANG 99b]). La méthode a été également appliquée au benchmark de com-
mande robuste d’une transmission flexible [LAND 95], ce qui permet une comparai-
son objective à d’autres méthodes de synthèse. Le régulateur obtenu par la méthode
décrite ici [LANG 99a] satisfait l’ensemble des spécifications de conception et donne
des réponses transitoires légèrement meilleures que le meilleur régulateur (Nordin et
Gutman, 1995) lors de l’étude comparative originale.

Les deux exemples montrent clairement l’intérêt de contrôler la position des pôles
de la boucle fermée et l’importance de minimiser des normes H∞ plutôt par optimi-
sation que par des techniques standard de H∞ .

Des voies d’extension de la méthode présentée s’ouvrent vers l’optimisation


convexe des contraintes et objectifs pour tout un ensemble de procédés et une amé-
lioration de la conversion des contraintes temporelles vers le domaine fréquentiel (par
exemple le rejet de perturbation).
Placement de pôles 153

4.7. Bibliographie

[BOY 88] B OYD S.P., B ALAKRISHNAN V., BARRATT C.H., K RAISHI N.M., L I X., M EYER
D.G., N ORMAN S.A., « A new CAD method and associated architectures for linear control-
lers », IEEE Transactions on Automatic Control, vol. 33, no 3, p. 268-283, 1988.
[BOY 91] B OYD S.P., BARRATT C.H., Linear controller design: Limits of performance, Pren-
tice Hall, Englewood Cliffs, New Jersey, 1991.
[CHI 96] C HILALI M., G AHINET P., « H∞ design with pole placement constraints: An LMI
approach », IEEE Transactions on Automatic Control, vol. 41, no 3, p. 358-367, 1996.
[CYR 93] C YROT C., Conception assistée par ordinateur de systèmes de commande robuste
temps réel – application aux procédés mécaniques flexibles, Thèse de doctorat, Institut
national polytechnique de Grenoble, Grenoble, France, décembre 1993.
[LAND 93] L ANDAU I.D., Identification et commande des systèmes, deuxième édition, Série
Automatique, Hermès, Paris, France, 1993.
[LAND 95] L ANDAU I.D., R EY D., K ARIMI A., VODA A., F RANCO A., « A flexible trans-
mission system as a benchmark for robust digital control », European Journal of Control,
vol. 1, no 2, p. 77-96, 1995.
[LAND 96] L ANDAU I.D., L ANGER J., R EY D., BARNIER J., « Robust control of a 360°
flexible arm using the combined pole placement/sensitivity function shaping method »,
IEEE Transactions on Control Systems Technology, vol. 4, no 4, p. 369-383, 1996.
[LAND 98] L ANDAU I.D., K ARIMI A., « Robust digital control using pole placement with
sensitivity shaping method », International Journal of Robust and Nonlinear Control, vol. 8,
p. 191-210, 1998.
[LANG 99a] L ANGER J., C ONSTANTINESCU A., « Pole placement design using convex opti-
misation criteria for the flexible transmission benchmark », European Journal of Control,
vol. 5, p. 193-207, 1999.
[LANG 99b] L ANGER J., L ANDAU I.D., « Combined pole placement/sensitivity function sha-
ping method using convex optimization criteria », Automatica, vol. 35, p. 1111-1120, 1999.
[RAN 94] R ANTZER A., M EGRETSKI A., « A convex parametrization of robustly stabilizing
controllers », IEEE Transactions on Automatic Control, vol. 39, no 9, p. 1802-1808, 1994.
[SAL 86] S ALCUDEAN S., Algorithms for optimal design of feedback compensators, Thèse de
doctorat, Université de Californie, Berkeley, 1986.
Chapitre 5

La commande multimodèle

5.1. Introduction

Le problème test relatif à la synthèse d’un pilote automatique d’avion gros porteur
proposé dans [MAG 97] (en particulier dans le chapitre 35 [GRU 97]) a donné lieu à
une comparaison de diverses techniques de synthèse robuste. Il ressort de cette compa-
raison fondée sur une analyse µ-réelle que les deux approches de nature multimodèle
sont les plus robustes. Cela est surtout dû au fait que les autres techniques modernes
prennent en compte un continuum de modèles (au lieu d’un ensemble discret comme
en multimodèle) et sont toutes conservatives. Par exemple, les techniques fondées
sur la stabilité quadratique imposent une même fonction de Lyapunov pour tous les
modèles. La µ-synthèse traite quant à elle les paramètres réels du système comme
s’ils étaient complexes. Il existe quelques techniques qui en réduisent le conserva-
tisme, mais dans leur état actuel d’avancement, elles sont confrontées à des problèmes
numériques lors de la résolution, ou à des tailles de correcteurs prohibitives.

Ce chapitre présente une approche a priori moins ambitieuse sur le plan théo-
rique que les techniques fondées sur la prise en compte d’un continuum de modèles.
En effet, la synthèse que nous envisageons ne prend en compte qu’un ensemble fini
de modèles. Cependant, ces derniers sont choisis de manière cohérente (en général
deux ou trois modèles suffisent) et permettent un traitement efficace du continuum.
Enfin, pour valider cette approche sur le continuum, c’est-à-dire être sûr que le com-
portement du système régulé est aussi valable entre les points utilisés pour la synthèse
multimodèle, il faut utiliser une technique de type µ-analyse. Nous verrons qu’elle

Chapitre rédigé par Jean-François M AGNI et Yann L E G ORREC.


156 Conception de commandes robustes

servira aussi à mettre en évidence les quelques « pires cas » à traiter par la synthèse
multimodèle. Ce point sera détaillé dans la section 5.5.

Cette démarche pourrait être appliquée pour toute approche de nature multimo-
dèle. En fait, nous n’en connaissons que deux : l’optimisation non convexe (voir
[JOO 99]) et celle présentée dans ce chapitre. L’optimisation non convexe se confronte
au problème de la convergence vers des minimums locaux, le résultat dépendant de
l’initialisation.

La technique décrite dans ce chapitre présente des avantages et des inconvénients.


Le principal inconvénient est lié à l’expérience (de la méthode et du système à com-
mander) que doit avoir le concepteur. Pour y remédier, nous proposons plusieurs dis-
cussions constituant un ensemble de recommandations qu’il est impératif d’assimiler
avant de tenter la moindre synthèse modale monomodèle ou multimodèle. Les avan-
tages sont les suivants :
– la technique de synthèse ne présente aucun conservatisme ;
– la matrice de transfert du gain peut être structurée. Cela signifie qu’il est pos-
sible d’annuler certains retours, d’imposer des fonctions filtrage à certains coefficients
du gain (par exemple transfert coupe bande ou passe-bande). Il est de plus possible
de maîtriser l’ordre du correcteur. Ce genre de structuration est très important, par
exemple en aéronautique, puisqu’il permet d’attribuer un sens physique à chaque coef-
ficient du gain. Les méthodes numériques sont rapides et fiables ;
– une adaptation des équations du système permet la synthèse directe de gains
autoséquencés (voir [5.42]) ;
– enfin, il est possible de combiner les avantages naturels des techniques modales
et non modales. Rappelons brièvement que les techniques modales de placement
de vecteurs propres permettent naturellement d’atteindre les objectifs de temps de
réponse, d’amortissement, de non-interactivité ou de robustesse aux variations para-
métriques réelles (voir section 5.5). Les techniques fondées sur la minimisation de
critères H∞ ou H2 sont plutôt recommandées pour traiter les overshoots fréquen-
tiels, le découplage de perturbation, la robustesse à des dynamiques négligées, les
marges de gain et de phase. Pour combiner ces deux types d’approche, nous suggé-
rons de refaire une version modale du correcteur non modal en plaçant les mêmes
modes dominants. Ce placement de vecteurs propres est ensuite utilisé pour initialiser
la procédure modale multimodèle décrite section 5.5.

5.2. Notations et rappels

Considérons un système linéaire ayant n états, m entrées, p mesures. On le note :

ẋ = Ax + Bu
[5.1]
y = Cx + Du
La commande multimodèle 157

où x est le vecteur d’état, y le vecteur des mesures et u le vecteur de commande,


A ∈ Rn×n , B ∈ Rn×m , C ∈ Rp×n et D ∈ Rp×m . Rang(B) = m, Rang(C) = p.
La matrice de transfert de ce système est notée :

G(s) = C(sI − A)−1 B + D [5.2]

On considère un feedback dynamique :

ẋc = Ac xc + Bc uc
[5.3]
yc = Cc xc + Dc uc

Ac ∈ Rnc ×nc , Bc ∈ Rnc ×p , Cc ∈ Rm×nc et Dc ∈ Rm×p . Le transfert correspondant


est noté K(s) :

K(s) = Cc (sI − Ac )−1 Bc + Dc [5.4]

La forme d’état ci-dessus sera prise en compte dans la démonstration des proposi-
tions 5.1 et 5.2. Ce transfert sera aussi écrit sous la forme suivante :
 b011 +b111 s+···+bq11 sq b01p +b11p s+···+bq1p sq 
a011 +a111 s+···+aq11 sq ··· ··· a01p +a11p s+···+aq1p sq
 
 ··· ··· ··· ··· 
K(s) =  

 [5.5]
 ··· ··· ··· ··· 
b0m1 +b1m1 s+···+bqm1 sq b0mp +b1mp s+···+bqmp sq
a0m1 +b1m1 s+···+aqm1 sq · · · · · · a0mp +a1mp s+···+aqmp sq

Lorsque l’on considère des contraintes égalités sur le correcteur (placement de


valeurs/vecteurs propres, déplacement exact...), on pourrait laisser libres les dénomi-
nateurs des éléments de K(s) à condition qu’ils soient identiques par ligne ou par
colonne. Les équations ainsi obtenues (voir paragraphe 5.4.1) seraient linéaires 1 en
aijk et bijk . Mais fixer les dénominateurs permet de les choisir tous distincts, de consi-
dérer des inégalités et surtout de pouvoir minimiser des critères quadratiques.

Nous verrons que les techniques proposées offrent suffisamment de degrés de


liberté, voire trop. L’utilisation d’un critère est donc impérative. Les dénominateurs
seront choisis a priori (voir section 5.6 pour un exemple). Cela peut sembler res-
trictif, mais si l’on considère les dénominateurs comme des filtres qui rendent réali-
sables les dérivations de mesures, cette restriction devient plus acceptable. De plus, les

1. Dans ce cas, il faudrait introduire des contraintes inégalités sur les coefficients aijk pour assu-
rer la stabilité des dénominateurs. Pour cela, il est possible de sélectionner les valeurs nominales
des aijk à partir d’un choix de pôles nominaux. Pour calculer les variations maximales des coef-
ficients (autour de leur valeur nominale) qui préservent la stabilité, on pourrait alors utiliser le
théorème de Kharitonov (voir par exemple [DAS 88]) ou une technique de Value Set (voir par
exemple [FER 96]).
158 Conception de commandes robustes

contraintes de roll off imposent plus ou moins un choix a priori des bandes passantes
des gains. Les degrés de liberté utilisés pour la synthèse seront donc les bijk .

Les notations suivantes seront utilisées : Diag{A1 , A2 , . . .} pour la matrice bloc-


diagonale avec A1 , A2 , . . . pour les blocs diagonaux ; <(.) et =(.) pour les parties
réelles et imaginaires, le complexe conjugué est noté avec une barre. Les espaces d’état
des équations [5.1] et [5.3] sont notés respectivement X et Xc et celui correspondant à
la connexion de [5.1] et [5.3] : X ⊕ Xc .

5.2.1. Rappel : placement de valeurs/vecteurs propres classique

Rappelons le résultat fondamental pour le placement de valeurs/vecteurs propres


[MOO 76], aussi démontré dans [CHA 89, LEG 00, LIU 98]. Il s’agit du lemme sui-
vant.

L EMME 5.1.– Un vecteur vi ∈ Cn satisfaisant :


" #
  vi
A − λi I B =0 [5.6]
wi

pour un certain vecteur w ∈ Cm est placé par le gain proportionnel K si et seulement


si :

K (Cvi + Dwi ) = wi [5.7]

Si λi n’est pas un réel, pour que la solution K soit une matrice réelle, on doit
adjoindre à [5.7] une contrainte « conjuguée » :

K (Cv i + Dw i ) = wi [5.8]

Ce résultat permet de calculer un gain proportionnel plaçant un ensemble de va-


leurs/vecteurs propres satisfaisant [5.6]. Par exemple, pour p paires de valeurs/vecteurs
propres placés, on calcule le gain par la formule :

K = [w1 . . . wp ] [Cv1 + Dw1 . . . Cvp + Dwp ]−1 [5.9]

Il est sous-entendu que le choix des vi , wi est tel que la matrice de droite est
inversible (une extension triviale au cas multimodèle sera proposée dans l’équation
[5.37]).

Ce résultat sera adapté au cas d’un gain dynamique dans le paragraphe 5.3.1. Mais
avant d’en venir au cas général, voyons une extension immédiate de [5.9] à la synthèse
de gains dynamiques (éventuellement multimodèle comme dans [5.37]).
La commande multimodèle 159

Recommandation. Dans [5.9], seulement p valeurs/vecteurs propres peuvent être pla-


cés. Il faut en fait placer (ou éventuellement imposer de ne pas déplacer) tous les
modes dominants d’un système. Les modes dominants sont ceux qui ont une bonne
commandabilité sans être trop rapides ni hors de la bande passante du correcteur ;
ils apparaîtront également comme dominants dans la décomposition des équations
[5.11] et [5.12]. Compte tenu de leur bonne commandabilité, agir sur d’autres modes
dominants aura aussi un effet sur ces modes, cet effet doit être maîtrisé. D’autre part,
les modes non dominants doivent être ignorés, car agir sur leur dynamique induirait
des gains élevés très probablement néfastes. L’idéal serait donc d’avoir p pôles domi-
nants, puisqu’avec [5.9], on n’agit que sur p pôles. Dans le cas où le nombre de pôles
dominants excède p, il faut utiliser un gain dynamique, comme on le verra dans la
proposition 5.1 (ou un observateur, voir [MAG 02]).

5.2.2. Extension triviale au calcul de gains dynamiques

Supposons que l’on pseudo-dérive les sorties du système [5.1]. Cela signifie que
l’on dérive les sorties, puis que l’on filtre ces signaux de manière à rendre le disposi-
tif réalisable (la bande passante du filtre est alors fonction du bruit de mesure). Une
mesure yi se transforme alors en deux « mesures », yi et une pseudo-dérivée notée yḃi .
Nous avons donc les mesures suivantes pour i = 1, . . . , p :
" # " #
yi 1
= yi
yḃi Ni (s)/Di (s)

Puisque l’on dispose de 2p mesures, en utilisant [5.9], on va pouvoir placer 2p


paires de valeurs/vecteurs propres (au lieu de p). Soit K̃ le gain ainsi obtenu. On écrit
ce gain colonne par colonne :
 
K̃ = K̃1 K̃10 K̃2 K̃20 . . . K̃p K̃p0

En ramenant ce gain aux sorties du système initial [5.1], on obtient :


h i
K̃10 N1 (s) K̃p Dp (s)+K̃p0 Np (s)
K(s) = K̃1 D1 (s)+
D1 (s) . . . Dp (s)

qui est sous la forme donnée par l’équation [5.5]. On peut bien sûr généraliser cet
exemple à des pseudo-dérivées d’ordre supérieur, mettre des filtres à la fois sur les
entrées et sur les sorties. Cependant, nous n’utiliserons pas cette approche pour les
raisons suivantes :
– il est généralement difficile de gérer tous ces degrés de liberté. Par exemple, le
vecteur des mesures y contient souvent des signaux et leurs dérivées ; on génère de
ce fait des sorties quasi redondantes ; utiliser l’équation [5.9] mène alors à des gains
irréalistes ;
160 Conception de commandes robustes

– cette technique, même modifiée de manière à régler le problème évoqué ci-


dessus, offrirait moins de souplesse pour structurer les gains (voir section 5.6) que
celle que nous allons décrire. De plus, le traitement des divers objectifs (placement,
déplacement de pôles, critères de distance à un gain de référence, gabarits fréquentiels,
structuration du gain) induirait des calculs ayant le même niveau de complexité.

L’adaptation au cas dynamique du résultat du lemme 5.1 sera traitée dans le para-
graphe 5.3.1 et la section 5.4.

5.2.3. Rappel : sensibilité des pôles

Nous allons aussi adapter au cas d’un gain dynamique un résultat relatif à la sen-
sibilité des pôles : il s’agit du lemme suivant, dont on pourra trouver une justification
dans [LEG 00].

L EMME 5.2.– Soit (λi , ui , vi ) un triplet de valeur propre, vecteurs propres à gauche
et à droite de la matrice A. On considère un feedback proportionnel de la forme :
∆K = ρK0
où ρ est petit et K0 une matrice réelle donnée (K0 ∈ Rm×p ). La relation suivante
exprime les variations au premier ordre de chaque valeur propre :
∆λi = ρui BK0 Cvi [5.10]

Ce résultat est le point de départ pour la généralisation de la commande en phase


que nous proposons dans le paragraphe 5.3.2.

5.3. Contraintes exprimant le placement et le déplacement de pôles

Dans cette section, les contraintes que nous exprimons sont relatives à un seul
modèle mais, puisqu’il s’agit de contraintes linéaires sur le gain, leur validité est aussi
assurée dans le cadre multimodèle.

5.3.1. Principe du placement de valeurs/vecteurs propres par un gain dynamique

Nous présentons ici le résultat principal qui généralise celui du lemme 5.1 au cas
des gains dynamiques.

Pour justifier le passage du gain proportionnel au dynamique, nous faisons réfé-


rence au contenu modal d’un signal et au couplage/découplage des modes par rapport
aux sorties. Soit z une sortie régulée, définie par :
z = Ex
La commande multimodèle 161

Le contenu modal de la réponse temporelle z(t) s’écrit sous la forme d’une somme
de n termes (on peut regrouper les termes conjugués, pour les détails voir [CHA 89,
LEG 00]) :
X
i=n X
i=n
x= vi ξi (t) ⇒ z= Evi ξi (t) [5.11]
i=1 i=1

où les vecteurs vi sont les vecteurs propres à droite placés par le gain K et les signaux
scalaires ξi (t) sont les modes. Lorsque l’on utilise un feedback dynamique, les états du
gain dynamique induisent une extension de l’espace d’état. Dans ce cas, les vecteurs
propres en boucle fermée deviennent des paires de vecteurs (vi , vci ), avec vi ∈ X et
vci ∈ Xc , il en est de même pour le vecteur d’état. Les notations habituelles sont :
" # " #
x vi
vecteur d’état : , vecteurs propres à droite :
xc vci

La décomposition modale donnée précédemment devient :


" # i=n+n " #
  x X c  vi Xc
i=n+n
z= E 0 = E 0 ξi (t) = Evi ξi (t)
xc i=1
vci i=1
[5.12]
Les vecteurs vci disparaissent de la formule. On peut donc les ignorer (non seule-
ment on peut les ignorer, mais on doit les ignorer, car ils n’ont pas de sens physique).
Notons que les techniques plus classiques de placement de vecteurs propres par gains
dynamiques ([LIU 98] par exemple) sont fondées sur le choix a priori des vecteurs
vci . Avec de telles approches, on doit appliquer le lemme 5.1 à un système augmenté
et, de ce fait, perdre de nombreux degrés de liberté. Dans notre cas, il faut revoir la
procédure de placement de vecteurs propres. Redéfinissons dans un premier temps le
« placement de vecteurs propres ».

D ÉFINITION 5.1.– On dira que λi (valeur propre) et vi ∈ X (vecteur propre) sont pla-
cés par le gain dynamique K(s) s’il existe un vecteur vci ∈ Xc tel que λi et (vi , vci )
sont respectivement valeur propre et vecteur propre du système correspondant à la
connexion de [5.1] avec [5.3], où u = yc et y = uc .

P ROPOSITION 5.1.– Un vecteur vi ∈ Cn satisfaisant :


" #
  vi
A − λi I B =0 [5.13]
wi

pour un certain vecteur wi ∈ Cm , est placé par le gain dynamique K(s) si et seule-
ment si :
K(λi ) (Cvi + Dwi ) = wi [5.14]
162 Conception de commandes robustes

Si λi n’est pas un réel, pour que la solution K(s) ait tous ses coefficients réels, on
doit adjoindre à [5.14] une contrainte « conjuguée » :
K(λi ) (Cv i + Dw i ) = w i [5.15]
Démonstration. Voir le paragraphe 5.9.1.

C OMMENTAIRE 5.1.– Noter les similarités dans les énoncés du lemme 5.1 et de la
proposition 5.1. En fait, placer vi par un gain dynamique K(s) comme dans la propo-
sition 5.1 revient à placer ce même vecteur par un gain statique K(λi ) comme dans le
lemme 5.1.

Pour conclure ce paragraphe, rappelons les possibilités offertes pour le choix des
vecteurs propres. Les relations [5.6] et [5.13] ne sont pas assez contraignantes pour
définir les vecteurs vi dès que le système considéré a plus d’une entrée. Les degrés de
liberté dans le choix des vi satisfaisant ces relations peuvent être fixés de différentes
manières.

En assurant certains découplages. Il s’agit de la technique la plus classique. On


adjoint aux relations [5.6] et [5.13] des contraintes du type Ei vi + Fi wi = 0, soit à
résoudre :
" #" #
A − λi I B vi
=0 [5.16]
Ei Fi wi
au lieu de [5.6]-[5.13]. Cette façon de choisir les vecteurs propres est rarement appli-
cable. D’ailleurs, les seules applications de la commande par placement de vecteurs
propres sont limitées au domaine de l’aéronautique, domaine dans lequel on donne
facilement un sens physique aux composantes des vecteurs propres. Pour rendre ces
techniques applicables dans un contexte plus vaste, nous proposons d’orienter le choix
comme indiqué ci-dessous.

En choisissant les vecteurs de la boucle fermée comme étant la projection ortho-


gonale de ceux de la boucle ouverte. Ce choix permet :
– de minimiser la commande amenant à un placement de pôles désiré (donc les
effets secondaires, comme la déstabilisation des pôles non traités, sont minimisés) ;
– de procéder par continuité. On pourra, grâce aux projections, déplacer « conti-
nûment » un pôle en projetant le vecteur propre correspondant (cela permet d’analyser
jusqu’où l’on peut espérer pouvoir déplacer un pôle vers la gauche) ;
– de préserver en boucle fermée le comportement modal (voir [5.11]) du système
naturel ;
– d’obtenir une « robustesse naturelle ». La sensibilité des pôles aux petites varia-
tions paramétriques est liée aux vecteurs propres. Conserver au mieux les vecteurs
propres du système en boucle ouverte permettra de ne pas aggraver la dispersion natu-
relle des pôles. D’où une certaine robustesse.
La commande multimodèle 163

Les calculs relatifs aux projections sont explicités dans l’équation [5.17] ci-
dessous.

En initialisant la synthèse multimodèle par une synthèse non modale monomodèle,


par exemple H∞ , H2 , µ-synthèse. Cela consiste à replacer les vecteurs propres (partie
vi ) placés par de tels gains (on peut aussi placer leurs projections, voir [5.17]). Deux
avantages sont à en attendre :
– on pourra combiner les avantages naturels des techniques modales et non
modales (avantages généralement distincts et complémentaires) ;
– on pourra adapter notre algorithme de commande à la réduction de l’ordre d’un
compensateur en le synthétisant à nouveau, mais en ne plaçant alors que la dynamique
dominante.

L’extension dynamique de l’espace d’état rend nécessaire la définition de la pro-


jection orthogonale. Brièvement, comme pour la définition 5.1, il s’agit de la définition
naturelle pour laquelle les composantes dans Xc sont ignorées.

D ÉFINITION 5.2.– Soit V (λ) et W (λ) deux matrices (rang(V (λ)) = m) telles que :
" #
  V (λ)
A − λI B =0
W (λ)

Le vecteur v ∈ X est la projection orthogonale de (v0 , vc0 ) ∈ X ⊕ Xc pour la


valeur propre λ si :
−1
v = V (λ) V (λ)T V (λ) V (λ)T v0 [5.17]

Afin d’utiliser la proposition 5.1 pour placer v dans [5.17], il reste à identifier le
vecteur w correspondant. Or :
" #
  V (λ) −1
A − λI B V (λ)T V (λ) V (λ)T v0 = 0 [5.18]
W (λ)

donc, d’après [5.13], le vecteur w correspondant à v dans [5.17] est :


−1
w = W (λ) V (λ)T V (λ) V (λ)T v0 [5.19]

Recommandation. Lorsqu’il n’y a pas d’objectifs évidents de découplage, le choix


des vecteurs propres par projection de ceux de la boucle ouverte est particulièrement
conseillé.
164 Conception de commandes robustes

5.3.2. Principe du déplacement de pôles avec un gain dynamique

En particulier, pour commander des structures flexibles, on peut se limiter à de


petits déplacements de pôles. Si les déplacements requis sont suffisamment petits pour
que les approximations au premier ordre soient valables, il ne faut pas s’en priver,
puisque l’on transforme un problème de placement fortement non linéaire (voir pro-
position 5.1 sans le choix a priori des vecteurs propres) en un problème linéaire. La
linéarisation des contraintes permet, comme on va le voir, de remplacer les contraintes
égalités par des inégalités. L’intérêt de manipuler des inégalités plutôt que des égalités
sera plus visible lorsque l’on abordera les problèmes multimodèles. En effet, utiliser
des inégalités évite, dans une certaine mesure, de définir des objectifs contradictoires
d’un modèle à l’autre 2.

Le principe de la méthode proposée consiste à généraliser l’idée de la com-


mande en phase. Cette technique revient à modifier la phase à certaines fréquences,
de manière à faire tourner le sens de migration des pôles situés près de l’axe imagi-
naire en boucle ouverte. La migration en question est induite par la variation du gain
scalaire de boucle (ρ dans la figure 5.1).

Figure 5.1. Variation du gain de boucle :


on fait varier ρ de zéro à une valeur positive

Nous allons généraliser cette technique en abandonnant le concept de phase typi-


quement monovariable. Modifier la phase à certaines fréquences est remplacé par la
modification de la sensibilité des pôles en prenant en compte les vecteurs propres (à
droite et à gauche). Cette modification a plusieurs avantages :
– la méthode devient multivariable,
– l’extension multimodèle est immédiate,
– on peut traiter des pôles éloignés de l’axe imaginaire.

On considère un feedback de la forme :

∆K(s) = ρK0 (s)

2. En contrepartie, l’utilisation d’inégalités nous prive de l’approche LMI de la section 5.4 ; il


faudra donc se limiter à utiliser l’approche LQP.
La commande multimodèle 165

où ρ est petit. La relation [5.10] du lemme 5.2 (soit ∆λi = ρui BK0 Cvi ) peut être
généralisée par la proposition 5.2.

P ROPOSITION 5.2.– Considérons le système [5.1] commandé par le feedback dyna-


mique ρK0 (s), où ρ est petit. Les vecteurs propres à gauche et à droite de A corres-
pondant au pôle λi sont notés respectivement ui et vi (ils sont supposés être normali-
sés, soit ui vi = 1) :

∆λi = ρui BK0 (λi )Cvi [5.20]

est l’approximation au premier ordre de la variation de λi induite par la variation


de ρ.

Démonstration. Voir paragraphe 5.9.2.

C OMMENTAIRE 5.2.– Une comparaison des énoncés du lemme 5.2 et de la propo-


sition 5.2, comme déjà signalé dans le commentaire 5.1, montre que la contrainte
relative au gain dynamique K(s) de la proposition 5.2 est identique à celle relative au
gain statique K(λi ) du lemme 5.2.

En écrivant K0 (s) comme K(s) dans [5.5], compte tenu de l’hypothèse selon
laquelle les dénominateurs sont fixés a priori, il est clair que [5.20] est linéaire par rap-
port aux bijk . Nous calculerons explicitement la forme LQP de ce type de contraintes
dans le paragraphe 5.4.1. Remarquons que si l’on désire « pousser » le pôle λi vers la
gauche d’au moins δR pour ρ = 1, cela revient à calculer K0 (s) satisfaisant :

<(ui BK0 (λi )Cvi ) ≤ δR [5.21]

Considérer la partie réelle ne change pas la propriété de linéarité, puisque les


inconnues (bijk ) sont des scalaires réels. On pourra de même contrôler la partie ima-
ginaire avec :

δI1 ≤ =(ui BK0 (λi )Cvi ) ≤ δI2 [5.22]

Pour des migrations dans un secteur :

δI1 <(ui BK0 (λi )Cvi ) ≤ =(ui BK0 (λi )Cvi )


≤ δI2 <(ui BK0 (λi )Cvi ) [5.23]

5.3.3. Comparaison du placement et du déplacement de pôles

Lorsque l’on utilise le placement exact, il n’y a a priori aucun lien entre les pôles
placés et ceux existants avant de fermer la boucle. La remarque ci-dessous met en
166 Conception de commandes robustes

évidence un cas particulier où il existe un lien, et de ce fait justifie la terminologie


« déplacer un pôle » lorsque les trois hypothèses ci-dessous seront satisfaites.

C OMMENTAIRE 5.3 ( ÉQUIVALENCE DU PLACEMENT ET DU DÉPLACEMENT ).–


Lorsque l’on place une paire de valeurs/vecteurs propres qui satisfont les trois condi-
tions suivantes :
– le pôle placé (λ̃i ) est assez proche d’un pôle boucle ouverte (λi ) ;
– le vecteur propre placé est la projection du vecteur propre correspondant en
boucle ouverte ;
– la variation de gain est minimisée.
La contrainte ainsi définie (voir proposition 5.1) relativement au gain K(s) est
presque identique à celle que l’on aurait défini en « déplaçant » le pôle de λi à λ̃i en
utilisant la proposition 5.2.

Justification. Pour simplifier les notations, on suppose que D = 0 (la généralisation


au cas D 6= 0 est possible en notant que le vecteur wi associé à un pôle en boucle
ouverte est nul). D’après les commentaires 5.1 et 5.2, on peut raisonner avec un gain
statique K. Supposons que l’on déplace en λ̃i la valeur propre λi de A en utilisant la
relation [5.20]. Nous définissons donc la contrainte linéaire relative à K suivante :

ui BKCvi = λ̃i − λi [5.24]

où vi et ui sont les vecteurs propres à droite et à gauche de la matrice A.

Considérons maintenant un (dé)placement exact comme on l’obtient en utilisant


la proposition 5.1. Supposons que nous avons déplacé la valeur propre λi en λ̃i ; les
vecteurs propres vi et ui sont aussi modifiés : on les note ṽi et ũi . Nous avons donc :

(A + BKC)ṽi = λ̃i ṽi

En multipliant à gauche par ũi , on obtient (ũi ṽi = 1) :

ũi BKC ṽi = λ̃i − ũi Aṽi [5.25]

Les trois hypothèses nous permettent d’affirmer que les variations de vi et ui


sont petites ; on peut alors les assimiler à des variations du premier ordre, soit
ṽi = vi + ∆vi , ũi = ui + ∆ui . Nous avons donc :

ũi Aṽi = (ui + ∆ui )A(vi + ∆vi ) ≈ ui Avi + ∆ui Avi + ui A∆vi

Utilisant Avi = λi vi , ui A = λi ui , puis la normalisation ui vi = 1, qui a pour


conséquence ∆ui vi + ui ∆vi ≈ 0, on obtient :

ũi Aṽi ≈ λi + λi (∆ui vi + ui ∆vi ) ≈ λi


La commande multimodèle 167

La contrainte relative à K de l’équation [5.25] peut donc s’écrire :

ũi BKC ṽi ≈ λ̃i − λi [5.26]

à comparer à celle de l’équation [5.24].

5.4. Calcul du gain dynamique : placement et déplacement de pôles

Nous allons présenter deux techniques. La première utilise la programmation


linéaire quadratique (linear quadratic programming, LQP), la seconde la résolution
d’équations matricielles linéaires (linear matrix inequalities, LMI). Dans les deux cas,
il faut gérer les degrés de liberté habituellement trop nombreux. Avec l’approche LQP,
on minimise la distance par rapport à un gain de référence. Avec l’approche LMI, on
définit des contraintes de distances par rapport au gain de référence. Notons que l’ap-
proche LMI n’est pas utilisable lorsque l’on doit prendre en compte des contraintes
inégalités (déplacement de pôles, gabarits fréquentiels considérés plus loin).

5.4.1. Calcul du gain dynamique : approche LQP

Nous allons maintenant montrer comment résoudre l’équation [5.14] de la pro-


position 5.1 avec un gain sous la forme donnée par l’équation [5.5]. Les calculs sont
assez techniques, car il faut jongler avec trois indices ; de plus, les degrés des éléments
de K(s) doivent pouvoir être distincts (ils ne sont égaux dans [5.5] que pour simplifier
les notations). La toolbox [MAG 02] effectue ces calculs automatiquement.

Le problème de la proposition 5.1 peut s’écrire en termes de programmation


linéaire quadratique. Rappelons dans un premier temps la forme canonique d’un tel
problème.

Formulation LQP. Soit Ξ le vecteur (ligne) des paramètres à optimiser sous les
contraintes :
– les contraintes sont de la forme ΞA1 = b1 (A1 est une matrice, b1 un vecteur
ligne) ;
– et/ou ΞA2 < b2 (inégalités ligne par ligne, A2 est une matrice, b2 un vecteur
ligne) ;
– le critère est quadratique, c’est-à-dire de la forme (Ξ + c0 )H(ΞT + c0 ), soit
T

en ignorant le terme constant J = ΞHΞT + 2Ξc (H est une matrice définie positive,
c = Hc0 est un vecteur colonne).

Les matrices ou vecteurs A1 , b1 , A2 , b2 , H et c sont réels. L’objet de ce paragraphe


est de mettre en évidence la forme analytique des matrices ou vecteurs A1 , b1 , H et c
168 Conception de commandes robustes

pour un problème correspondant au placement de vecteurs propres de la proposition


5.1. Avant de rentrer dans les détails, il faut définir le critère à considérer.

Expression du critère. Utiliser un feedback dynamique introduit un grand nombre


de degrés de liberté (les bijk de [5.5]). Le nombre de degrés de liberté excède alors
largement celui de contraintes de placement de valeurs/vecteurs propres. Pour gérer
cette redondance, nous proposons ici de considérer un critère (dans le paragraphe
suivant, on remplacera le critère par la prise en compte d’inégalités qui seront résolues
par l’approche LMI). Le critère le plus utile en pratique consiste à calculer le gain
le plus proche possible d’un gain de référence Kref . Par exemple, lorsque l’on veut
assurer un minimum de « continuité » des gains en bougeant les pôles placés, lorsque
l’on resynthétise un correcteur en réduisant son ordre... On pourra aussi prendre la
matrice nulle comme gain de référence.

Avec un gain de référence noté Kref , le critère que nous proposons s’écrit :
X
J= k−Kref (jωi ) + K(jωi )k2F [5.27]
i=1,...,r

où ωi , i = 1, . . . , r est un ensemble des fréquences choisies dans la bande de fré-


quence où les deux gains doivent coïncider au mieux (k · kF désigne la norme de
Frobenius).

Calcul du gain. Pour écrire explicitement les matrices ou vecteurs A1 , b1 (égalités


linéaires [5.14]), H et c (critère quadratique [5.27]), quelques notations sont définies.
Ξk représente les bijk de la k-ième ligne de [5.5], soit :
Ξk = [b0k1 . . . bqk1 . . . . . . b0kp . . . bqkp ]
Le vecteur des inconnues s’écrit donc :
Ξ = [Ξ1 . . . Ξm ] [5.28]
Soit la matrice :
 
1
 λ 
 
 ... 
 .. 
 . 
  
 λq  1
  ak1 (λ)
 ..  
Xk (λ) =   .. 
 .  . 
 
 1  1
  akp (λ)
 
 λ 
 ... 
 .. 
 . 
λq
La commande multimodèle 169

où akj (λ) est le dénominateur de l’élément (k, j) de K(s) évalué en s = λ. Puisque


la k-ième ligne de K(s) s’écrit Ξk Xk (s), on a :

X
m
K(s) = ek Ξk Xk (s) [5.29]
k=1

où ek est le k-ième vecteur de la base canonique de Rm (c’est-à-dire un vecteur


colonne de dimension m ayant tous ses éléments nuls sauf le k-ième égal à l’unité).

P ROPOSITION 5.3.– Le problème du calcul de K(s) satisfaisant l’équation [5.14] et


minimisant le critère [5.27] est un problème de programmation linéaire quadratique
(ΞA1 = b1 , J = ΞHΞT + 2Ξc) tel que :

A1 = Diag{X1 (λi )(Cvi + Dwi ) . . . Xm (λi )(Cvi + Dwi )}


 X X 
H = Diag X1 (jωi )X1 (jωi )∗ . . . Xm (jωi )Xm (jωi )∗
i=1,...,r i=1,...,r
   P ∗ 
eT1 w1 X1 (jωi )Kref (jωi ) e1
i=1,...,r
   
b1 =  , c = −<  
.. ..
 .   . 
P ∗
eTm wm i=1,...,r X m (jω i )K ref (jω i ) e m

Si r > q, la matrice H est définie positive (dimensions : A1 ∈ Rmpq×m , b1 ∈


Rm×1
, H ∈ Rmpq×mpq et c ∈ Rmpq×1 ).
Démonstration. Voir le paragraphe 5.9.3. Pour des valeurs propres complexes, afin de
manipuler des nombres réels, on utilisera Ξ<(A1 ) = <(b1 ) et Ξ=(A1 ) = =(b1 ) au
lieu de ΞA1 = b1 et Ξconj(A1 ) = conj(b1 ) (correspondant à [5.14] et [5.15]).

Le nombre de degrés de liberté est égal à mpq. Chaque placement de valeurs/


vecteurs propres définit m équations linéaires (taille de b1 ). Par rapport au placement
de vecteur propre traditionnel (gain non dynamique), le nombre de contraintes reste
inchangé (égal à m) ; cependant, le nombre de degrés de liberté est multiplié par q.

Après avoir traité la mise en forme pratique des contraintes de placement exact,
opérons de même pour les contraintes de déplacement, soit [5.21]-[5.23].

P ROPOSITION 5.4.– Le problème du calcul de K(s) satisfaisant l’équation :

δRi <(ui BK0 (λi )Cvi ) ≤ δIi =(ui BK0 (λi )Cvi )

ou respectivement :

<(ui BK0 (λi )Cvi ) ≤ δRi


170 Conception de commandes robustes

et minimisant le critère [5.27] est un problème de programmation linéaire quadratique


(ΞA2 ≤ b2 , J = ΞHΞT + 2Ξc) où :
 
δRi <(ui Be1 X1 (λi )Cvi ) − δIi <(ui Be1 X1 (λi )Cvi )
 
A2 = 
..
.
, b2 = 0

δRi <(ui Bem Xm (λi )Cvi ) − δIi <(ui Bem Xm (λi )Cvi )
respectivement :
 
<(ui Be1 X1 (λi )Cvi )
 
A2 = 

..
.
, b2 = δRi

<(ui Bem Xm (λi )Cvi )
H et c étant comme spécifié dans la proposition 5.3.
Démonstration. Voir le paragraphe 5.9.3. Les contraintes dans les autres cas (voir
[5.21]-[5.23], ou bien en considérant des égalités à la place des inégalités) se déduisent
facilement de ces résultats.

5.4.2. Calcul du gain dynamique : approche LMI

Avec l’approche LQP, le critère consistait à minimiser en un nombre fini de fré-


quences la somme des distances entre le gain calculé et celui de référence. Dans cer-
tains cas, il peut y avoir des compensations indésirables des distances d’une fréquence
à l’autre. Pour éviter cela, on peut remplacer le critère par une série de contraintes
inégalités du type :

σ̄(−Kref (jωi ) + K(jωi )) < γi , i = 1, . . . , r [5.30]

Ce genre d’inégalités se traduit assez simplement en termes de LMI.

Avant de définir les LMI à résoudre, on considère un paramétrage de toutes les


solutions du problème de placement de valeurs/vecteurs propres considéré. Nous
venons de voir que ces contraintes s’écrivent sous la forme :

ΞA1 = b1

avec A1 et b1 explicités dans la proposition 5.3. Si Ξ0 est une solution particulière et


M une matrice telle que Ker M = Im A1 , la solution générale s’écrit :

Ξ = Ξ0 + Ξ0 M

que l’on peut partitionner (conformément au partitionnement de l’équation [5.28]) en :

Ξk = Ξ0k + Ξ0 k M [5.31]
La commande multimodèle 171

Avec ces notations, les LMI à résoudre sont définies par la proposition 5.5 suivante.

P ROPOSITION 5.5.– Le problème du calcul de K(s) satisfaisant l’équation [5.14] et


les contraintes suivantes :

σ̄(−Kref (jωi ) + K(jωi )) < γi , i = 1, . . . , r [5.32]

s’écrit sous la forme d’un ensemble de LMI à résoudre en Ξ0 k :


 
γi I <(Γi ) 0 −=(Γi )
 <(Γ )T =(Γi )T 
 i γi I 0 
  > 0, i = 1, . . . , r [5.33]
 0 =(Γi ) γi I <(Γi ) 
−=(Γi )T 0 <(Γi )T γi I

où :
X X
Γi = −Kref (jωi ) + ek Ξ0k Xk (jωi ) + ek Ξ0 k M Xk (jωi )
k=1,...,m k=1,...,m
[5.34]
Démonstration. Voir le paragraphe 5.9.4. Pour une application, voir [LEG 98a].

5.5. Extension à la synthèse multimodèle

Les résultats des sections 5.3 et 5.4 sont valables dans le cas multimodèle. La
spécificité du cas multimodèle vient du fait que l’on ne peut quasi jamais décider a
priori des contraintes à appliquer. En effet, on doit respecter une certaine continuité
entre le comportement des modèles représentant un même système. Cette notion de
« continuité » s’avère extrêmement sévère en pratique.

Recommandation. Nous recommandons d’utiliser des méthodes « progressives », où


la première synthèse est monomodèle ; ensuite, on améliore pas à pas le comportement
des « pires cas » en adjoignant de nouvelles contraintes et en supprimant éventuelle-
ment certaines devenant plus ou moins redondantes. Les nouvelles contraintes seront
si possible de type inégalité (déplacement de pôles) ou obtenues par projection de
vecteurs propres (placement exact).

Pour identifier les « pires cas » et juger de la progressivité de la synthèse, il faut


disposer d’outils d’analyse.

Analyse multimodèle : on dispose d’une famille de modèles couvrant tous les com-
portements possibles à prendre en compte. Les configurations de paramètres à prendre
en compte sont notées ∆i , on dispose alors des modèles {(A∆i , B∆i , C∆i , D∆i ),
172 Conception de commandes robustes

i = 1, . . .}. On pourra analyser les pôles, les réponses temporelles, les réponses fré-
quentielles... pour chacun des modèles de cette famille. Noter que si le nombre de
paramètres est élevé, la taille de la famille à considérer devient rapidement irréaliste
(pour trois points par paramètre et dix paramètres, la famille à considérer présente
310 ≈ 59 000 modèles !). Dans ce cas, il est nécessaire d’utiliser la µ-analyse.

µ-analyse : au lieu de disposer d’une famille finie de modèles, on considère ici


un continuum, les variations paramétriques sont représentées par un feedback artifi-
ciel u∆ = ∆y∆ , ∆ étant une matrice diagonale réelle, voir figure 5.2. Pour chaque
valeur ∆i de ∆, nous disposons d’un modèle (A∆i , B∆i , C∆i , D∆i ) qui s’obtient en
fermant la boucle supérieure de la figure 5.2. L’analyse fondée sur cette représentation
(µ-analyse) permet d’assurer que l’on ne ratera pas un « pire cas » (ce qui n’est pas
assuré avec l’analyse multimodèle).

Figure 5.2. Forme standard pour la µ-analyse

5.5.1. Exemple de contraintes multimodèles

L’algorithme du paragraphe 5.5.2 aura pour objectif de mettre en forme un système


de contraintes du type de celui que nous allons décrire ici. Pour simplifier l’écriture,
on donne un indice de modèle différent pour chaque placement (les indices ne sont
pas ceux utilisés pour l’analyse multimodèle). Supposons que l’on ait r contraintes.
D’après la proposition 5.1, on a à choisir (v1 , w1 , λ1 ) . . . (vr , wr , λr ) satisfaisant :
(A∆1 − λ1 I)v1 + B∆1 w1 = 0
.. [5.35]
.
(A∆r − λr I)vr + B∆r wr = 0
Les contraintes multimodèles sont alors :
K(λ1 )(C∆1 v1 + D∆1 w1 ) = w1
.. [5.36]
.
K(λr )(C∆r vr + D∆r wr ) = wr
La commande multimodèle 173

Un critère d’écart par rapport à un gain de référence étant défini, on résoudra ce


système en considérant soit la proposition 5.3 (approche LQP), soit la proposition 5.5
(approche LMI).

Un problème multimodèle de déplacement de pôles s’écrirait de manière identique


en remplaçant les contraintes de la proposition 5.1 par celles de la proposition 5.2. On
peut mélanger les deux approches, mais dans ce cas, il faut que les contraintes de
placement exact correspondent à des variations de gains suffisamment « petites » pour
être conformes aux approximations au premier ordre du déplacement.

Avant de résoudre le problème par l’approche LQP, on peut adjoindre toutes


contraintes linéaires supplémentaires, par exemple celles que l’on verra section 5.6.
Avant de résoudre le problème par l’approche LMI, on pourra adjoindre d’autres
contraintes linéaires à condition qu’il s’agisse d’égalités.

C OMMENTAIRE 5.4 ( CAS PARTICULIER DE L’ EXISTENCE D ’ UNE SOLUTION AVEC


UN GAIN PROPORTIONNEL ).– Lorsque le nombre de contraintes est égal à celui de
mesures (q = p), un gain proportionnel offre suffisamment de degrés de liberté pour
qu’il y ait une solution triviale à [5.36]. Ce gain est donné par (comparer à [5.9]) :

K = [w1 . . . wp ][C∆1 v1 + D∆1 w1 . . . C∆p vp + D∆p wp ]−1 [5.37]

Un nombre de contraintes limité à p n’est généralement pas suffisant ; il faudra


donc plutôt considérer un gain dynamique et résoudre en utilisant l’une des techniques
de la section 5.4.

Nous allons détailler la construction du système de l’équation [5.36]. On construi-


rait de manière identique un système de contraintes de déplacement ou mixte, c’est-à-
dire « placement/déplacement ».

5.5.2. Construction de l’ensemble des contraintes multimodèles

Le principe de la procédure de construction de l’ensemble des contraintes consiste


à choisir un ensemble initial (monomodèle) et à l’enrichir itérativement en alternant
l’analyse (recherche de pires cas) et la synthèse multimodèle. Pour simplifier la pré-
sentation, les détails relatifs à chaque étape seront donnés après la description géné-
rale.

a) Initialisation :
1) synthèse d’un gain initial relatif au modèle nominal (∆ = 0). Ce gain n’est
pas nécessairement construit par placement de vecteurs propres. On peut par exemple
utiliser la synthèse H∞ (voir [CHI 98]), H2 , la µ-synthèse, etc. ;
174 Conception de commandes robustes

2) traduction modale du gain initial. Si le gain initial est de nature placement de


vecteurs propres, aller à l’étape 1. Sinon, analyser le contenu modal des réponses
temporelles et fréquentielles en boucle fermée. En déduire les modes dominants.
Synthétiser alors par placement de vecteurs propres un gain qui replace ces valeurs et
vecteurs propres dominants (on obtient un système monomodèle semblable à [5.36]).
Résoudre en prenant le gain initial comme gain de référence. On pourra s’inspirer des
modes dominants du correcteur initial pour choisir les dénominateurs dans [5.5]. Ce
nouveau gain dynamique est désormais considéré comme le gain initial.

b) Itérations analyse/synthèse multimodèle :


1) analyse multimodèle ou µ-analyse (ou les deux). Si l’analyse est concluante
pour toutes les valeurs de ∆ : fin de la procédure. Sinon, identifier un ou plusieurs
pires cas et aller à l’étape 2 ;
2) analyse de la compatibilité des contraintes. Le ou les nouveaux pires cas
induisent de nouvelles contraintes. Si l’une des nouvelles contraintes existait déjà rela-
tivement à un modèle moins critique 3, il faut supprimer la contrainte préexistante 4.
Aller à l’étape 3 ;
3) résoudre le problème de nature multimodèle défini (et rendu compatible) à
l’étape 2. Aller à l’étape 1.

Commentaires et précisions
Etape a1)
Puisqu’il est possible d’initialiser la procédure proposée par un gain non modal, on
pourra combiner les avantages des approches modales et non modales. Par exemple,
avec les approches non modales comme la H2 /H∞ -synthèse ou la µ-synthèse, on
traitera facilement les performances fréquentielles, le rejet de perturbation, les marges
de robustesse. Les itérations ultérieures de nature modale permettront d’améliorer ou
de traiter les temps de réponse, les performances temporelles, la robustesse aux varia-
tions paramétriques réelles.

Etape a2)
La traduction d’un feedback en termes de placement de vecteurs propres et sa
synthèse modale sont des techniques efficaces pour la réduction de l’ordre. Pour un
exemple, voir [CHI 98] où le feedback initial d’ordre 18 (correcteur H∞ ) est remplacé

3. Noter que des contraintes de même nature relativement à des modèles « distants » n’induisent
pas de problème.
4. Nous n’avons pas encore d’outils systématiques pour juger de la redondance des contraintes.
Avec un peu de sens physique, on évite assez bien ce genre de problèmes (sinon, « essais et
erreurs » en faisant la boucle « étapes 2-3-1 »). On peut aussi s’aider du conditionnement de la
matrice A1 (voir section 5.4).
La commande multimodèle 175

par un feedback équivalent d’ordre 4. Les modes dominants peuvent être identifiés par
des simulations où les contributions modales (voir [5.11]-[5.12]) sont tracées sépa-
rément. Ignorant alors les parties des vecteurs propres dans l’extension dynamique
(Xc ), on place les modes dominants conformément à la proposition 5.1. Les calculs
sont détaillés dans la section 5.4, le gain de référence (voir [5.27]) sera alors le gain
initial 5.

Etape b1)
La µ-analyse est souvent présentée pour analyser la stabilité. On peut aussi utiliser
cet outil pour analyser certaines performances (voir [DOL 99a, FRI 96]). Dans tous
les cas, il s’agit d’une analyse « pires cas » qui donne à la fois le « pire modèle » et
le « pire pôle », c’est-à-dire celui qui franchit la limite de stabilité ou de performance.
On a donc tous les éléments pour définir la nouvelle contrainte à prendre en compte.
Cette nouvelle contrainte consistera souvent à pousser vers la gauche le « pire pôle »
du « pire modèle » (voir [5.35] et [5.36]). Noter que la µ-analyse consiste à calcu-
ler une borne supérieure et inférieure de µ ; seule la borne inférieure identifie le pire
cas. Les bornes inférieures des toolboxes du commerce sont peu fiables dans le cas de
variations paramétriques réelles ; des outils spécialement développés pour traiter ces
cas sont disponibles dans [FER 99, MAG 99]. L’analyse multimodèle des réponses
temporelles peut permettre de détecter un mauvais découplage ; dans ce cas, la nou-
velle contrainte ne correspondra pas forcément à déplacer un pôle mais à modifier un
vecteur propre.

Etape b2)
Illustrons le problème d’incompatibilité. Avec l’approche monomodèle, il est peu
probable que l’on essaie de placer deux fois le même vecteur propre. Ceci mènerait
à un gain infini en résolvant [5.9]. Dans un contexte multimodèle, ce problème est
plus difficile à prévenir. Lorsque l’on traite un pôle de même nature (par exemple en
aéronautique, le mode de l’oscillation d’incidence ou du roulis hollandais...) pour deux
modèles proches, s’ils sont vraiment proches l’un de l’autre, on retrouve à la limite
le problème de gain infini évoqué dans le cas monomodèle. La difficulté réside dans
l’évaluation de la proximité. Pour éviter ce genre de problème, il faudra s’arranger à
ne traiter des pôles de même nature que pour des modèles à des limites opposées du
domaine de variations paramétriques. Si l’on doit introduire une nouvelle contrainte
déjà active pour un modèle trop proche, retirer la contrainte préexistante. Bien sûr,
cette analyse est très qualitative, mais pour un problème donné, on voit rapidement ce
qu’il faut éviter de demander à la loi de commande.

Etape b3)
D’une étape à l’autre, il est important d’assurer un minimum de « continuité »
de l’ensemble des contraintes. On privilégiera la projection orthogonale de vecteurs

5. On peut aussi structurer le gain par la même occasion, voir section 5.6.
176 Conception de commandes robustes

propres. De plus, considérant le critère d’écart par rapport au gain de référence (gain
de l’étape précédente), on pourra faire migrer continûment les pôles à déplacer et de ce
fait régler des compromis entre la robustesse et l’apparition intempestive de nouveaux
pires cas. En fait, les étapes 1-2-3 de l’algorithme sont intimement liées.

5.6. Structuration du gain et gabarits fréquentiels

Nous avons présenté les problèmes de placement et de déplacement de pôles sous


forme de contraintes linéaires. On ne changera pas la nature LQP ou LMI en rajoutant
des contraintes linéaires supplémentaires, par exemple sur le gain. Noter que pour
l’approche LMI, les contraintes supplémentaires doivent être de type « égalité », alors
qu’elles peuvent être de type « inégalité » dans le cas LQP. Nous allons considérer des
contraintes de structure ; ensuite nous verrons des contraintes relatives à la réponse en
fréquences du gain.

5.6.1. Structuration du gain

Nous préférons traiter un exemple, la généralisation étant triviale. Considérons un


modèle latéral d’avion flexible. Il est nécessaire dans ce cas de structurer le gain de
manière à éviter des couplages entre le pilote automatique et les modes flexibles. Les
mesures considérées sont p (vitesse de R roulis),
R r (vitesse de lacet), φ (angle de roulis),
β (estimée de l’angle de dérapage) et φ, β. L’estimée du dérapage est basée sur une
mesure accélérométrique ; de ce fait, elle est polluée par les états des modes flexibles.
Les signaux de commande sont la rotation des ailerons δa et de la gouverne de direc-
tion δr . Les bandes passantes des dénominateurs sont choisis en prenant en compte
la nature (ailes, fuselage, moteurs) et la fréquence des modes flexibles. En particulier,
un filtre coupe bande est nécessaire entre la vitesse de roulis et l’aileron pour ne pas
retourner la fréquence d’un des modes flexibles et avoir une certaine efficacité au-delà
de cette fréquence. Il faut de plus annuler le gain entre β et δa .

Kβ→δa est le gain entre β et δa ; on note de même les autres gains. Les degrés
de liberté sont notés ξ1 , ξ2 , . . . (on s’affranchit ici de l’hypothèse simplificatrice du
paragraphe 5.4.1, car les degrés des dénominateurs sont distincts) :

Kβ→δa = 0
1 + 0,013s + 0,008 3s2
Kp→δa = ξ1
1 + 0,13s + 0,008 3s2
ξ2 + ξ3 s
Kr→δa =
1 + 0,187 6s + 0,017 6s2
ξ4
Kφ→δa =
1 + 0,1s
La commande multimodèle 177

ξ5
Kβ→δr =
1 + 0,2s
ξ6 + ξ7 s
Kp→δr =
1 + 0,225 2s + 0,025 3s2
ξ8 + ξ9 s
Kr→δr =
1 + 0,225 2s + 0,025 3s2
ξ10
Kφ→δr =
1 + 0,15s
Les quatre gains (KR φ→δa = ξ11 , KR β→δa = ξ12 , KR φ→δr = ξ13 , KR β→δr =
ξ14 ) sont scalaires.

Le gain dynamique K(s) est :


" #
Kβ→δa Kp→δa Kr→δa Kφ→δa KR φ→δa KR β→δa
K(s) =
Kβ→δr Kp→δr Kr→δr Kφ→δr KR φ→δr KR β→δr

[5.38]

et le vecteur des degrés de liberté comme défini dans le paragraphe 5.4.1 est Ξ =
[Ξ1 Ξ2 ], soit :

Ξ1 = [0 ξ1 0,013ξ1 0,008 3ξ1 ξ2 ξ3 0 ξ4 0 ξ11 ξ12 ]


Ξ2 = [ξ5 0 ξ6 ξ7 0 ξ8 ξ9 0 ξ10 0 ξ13 ξ14 ]

Les contraintes de structure ci-dessus s’écrivent sous la forme « ΞA1 = b1 ». Par


exemple, Kβ→δa = 0 correspond à :
 
1
 
 0 
 
 
[Ξ1 Ξ2 ]  0  = 0 [5.39]
 
 0 
 
..
.

La contrainte dans laquelle apparaît ξ1 correspond à deux colonnes :


 
0 0
 −0,013 
 0 
 
 1 −0,008 3 
 
[Ξ1 Ξ2 ]  0,013  = [0 0] [5.40]
 0 
 
 0 0 
 
.. ..
. .
178 Conception de commandes robustes

et ainsi de suite. Dans [LEG 98b], cet ensemble de contraintes linéaires est traité
simultanément avec des contraintes multimodèles de placement de valeurs/vecteurs
propres.

On peut généraliser simplement cet exemple. La prise en considération de


contraintes égalité n’est pas plus compliquée. La boîte à outils [MAG 02] permet de
les définir automatiquement.

5.6.2. Gabarits fréquentiels


Le fait de fixer s dans K(s) permet de définir une autre famille de contraintes
linéaires. On en donnera deux exemples.

E XEMPLE 5.1.– En ω = 0 Rd/s, tous les éléments du gain K(s) sont réels ; on peut
alors considérer des inégalités sur les gains statiques de chaque élément.
Par exemple, il est souvent nécessaire d’avoir des gains élevés aux basses fré-
quences. Considérant le gain de l’équation [5.38], pour avoir le gain statique Kr→δa
plus grand que M , nous avons ξ2 > M qui se met simplement sous la forme requise :
ΞA2 < b2
Au contraire, il est parfois nécessaire d’avoir un gain statique nul, par exemple
pour ne pas trop modifier les propriétés en basses fréquences lors d’une deuxième
couche de commande aux hautes fréquences. On arrive naturellement à des contraintes
égalité similaires.

E XEMPLE 5.2.– Aux fréquences non nulles, les éléments du gain sont des nombres
complexes. On peut placer à zéro ces valeurs pour remplacer un filtre coupe bande
comme évoqué plus haut. On peut aussi considérer des contraintes de norme. Mais
les normes habituelles mènent à des contraintes non linéaires. Il est donc proposé
d’adapter la contrainte naturelle kK(i,j) (jω0 )k < M (K(i,j) (s) est l’élément (i, j) de
K(s)) en considérant plutôt :
−<(K(i,j) (jω0 )) ≤ M
<(K(i,j) (jω0 )) ≤ M
−=(K(i,j) (jω0 )) ≤ M
=(K(i,j) (jω0 )) ≤ M
La forme « ΞA2 < b2 » s’en déduit simplement. Prenant en compte un certain
nombre de fréquences, on en déduit un gabarit fréquentiel. Bien sûr, on peut introduire
un gain de référence dans ces contraintes.
Remarquons que ce genre de gabarits a déjá été évoqué au paragraphe 5.4.2. Les
contraintes étaient alors relatives aux normes de matrices plutôt qu’à celles des élé-
ments, mais les inégalités résultantes étaient alors de nature LMI.
La commande multimodèle 179

5.7. Synthèse directe de gains programmés


Les paramètres considérés dans la matrice ∆ de la section 5.5 sont soit des para-
mètres incertains, soit des paramètres variants mesurables. Les paramètres mesurables
peuvent être utilisés pour modifier la loi de commande, il suffit pour cela que cette
dernière soit une formule d’interpolation. Nous allons traiter ce problème en mon-
trant qu’il se ramène à une synthèse multimodèle classique, identique à celle que nous
avons présentée dans la section 5.5, après avoir adapté le modèle à ce problème.

Signalons deux points :


– un gain programmé assurant la stabilité pour toutes les combinaisons admissibles
des paramètres n’assure pas théoriquement la stabilité globale du système en cas de
variations rapides des paramètres. Pour y remédier, certaines techniques de synthèse
de gains programmés prennent en compte la vitesse de variation des paramètres ; mais
pour cela, un certain conservatisme doit être accepté (voir [BIA 99]). Il est cependant
communément admis que pour des variations lentes, la stabilité point par point suffit ;
nous nous limiterons donc à ce type de stabilité ;
– le modèle étendu que nous allons définir peut être utilisé dans un cadre plus
général que celui de l’algorithme de la section 5.5. En particulier, s’il existait un algo-
rithme performant de synthèse µ-réelle, on pourrait l’appliquer au modèle étendu et
de ce fait faire une synthèse interpolée directe.

Pour illustrer la méthode proposée, on prendra un exemple simple. On doit, dans


un premier temps, choisir la structure d’interpolation ; on prendra par exemple :
K(s, δ) = K0 (s) + δK1 (s) + δ 2 K2 (s) [5.41]
Les degrés de liberté pour la synthèse sont les « bijk » des trois matrices K0 (s),
K1 (s) et K2 (s), chacune étant écrite comme K(s) dans [5.5].

Les contraintes de placement exact de l’équation [5.14] s’écrivent comme dans


[5.36], soit :

K0 (λi ) + δi K1 (λi ) + δi2 K2 (λi ) (C∆1 vi + D∆1 wi ) = wi
que l’on peut aussi écrire :
    
C∆i D∆ i
    
[K0 (λi ) K1 (λi ) K2 (λi )]  δi C∆i  vi +  δi D∆i  wi  = wi
δi2 C∆i δi2 D∆i
Cela signifie que l’on peut appliquer la technique de synthèse robuste de la section
5.5 au système suivant :
    
C∆ D∆
    
A∆ , B∆ ,  δC∆ ,  δD∆  [5.42]
δ 2 C∆ δ 2 D∆
180 Conception de commandes robustes

On calculera alors directement le gain sous la forme :

K(s) = [K0 (s) K1 (s) K2 (s)]

Notons deux adaptations de la synthèse multimodèle au cas des gains program-


més :
– les contraintes de structure définies section 5.6 seront particulièrement utiles
pour ne pas interpoler tous les gains et limiter de ce fait le nombre de degrés de
liberté. Le critère pourra aussi être formulé de manière à minimiser la taille des
matrices K1 (s) et K2 (s) afin de limiter l’effet de l’interpolation. Pour cela, il suffit
de considérer un gain de référence de la forme [K0 (s) 0 0]. Une bonne initialisation
est importante. On pourra pour cela initialiser la procédure par un gain initial lui-
même programmé (par interpolation de gains classique calculés en quelques points).
Un exemple illustratif de cette technique est proposé dans [DOL 99b] ;
– la procédure de la section 5.5 fait appel à la µ-analyse. Il faut donc mettre le sys-
tème [5.42] sous la forme de la figure 5.2. Lorsque l’on dispose de la forme requise
pour le système non augmenté (A∆ , B∆ , C∆ , D∆ ), la modélisation recherchée s’ob-
tient sans difficulté.

5.8. Conclusion

Nous avons exprimé le placement (exact) de valeurs/vecteurs propres et le dépla-


cement de pôles (approximation du premier ordre) en termes de contraintes linéaires
relatives aux coefficients d’un gain dynamique. Deux techniques de calcul d’un gain
satisfaisant ces contraintes ont été détaillées : il s’agit d’une technique fondée sur la
programmation linéaire quadratique et d’une autre fondée sur la résolution d’équa-
tions linéaires matricielles. En considérant un critère et d’autres contraintes linéaires,
on peut alors traiter simultanément :
– le placement de valeurs/vecteurs propres,
– le déplacement de pôles,
– la minimisation de l’écart par rapport à un gain de référence,
– la robustesse paramétrique (multimodèle),
– la structuration du gain,
– le respect de gabarits fréquentiels relatifs au gain,
– le séquencement des gains.

L’initialisation de la procédure de synthèse que nous proposons peut être faite par
un gain calculé par H∞ , H2 , µ-synthèse... Cela permet de tirer profit des avantages
complémentaires des approches modales et non modales. L’initialisation de notre pro-
cédure par de tels gains peut aussi être vue comme une technique de réduction de
l’ordre des correcteurs.
La commande multimodèle 181

Toutefois, pour utiliser la commande modale, un minimum d’expérience est néces-


saire. La synthèse multimodèle requiert une attention particulière. Pour cela, nous
donnons un certain nombre de recommandations. En particulier, nous proposons dans
le cas multimodèle une procédure pour aider à construire un ensemble de contraintes
cohérentes.

Les méthodes de calcul décrites dans ce chapitre sont conceptuellement simples,


mais leur mise en œuvre est assez technique. La boîte à outils [MAG 02] propose une
interface où l’utilisateur spécifie simplement les objectifs : la complexité des calculs
devient alors transparente.

Une approche différente pour résoudre les problèmes considérés est proposée dans
[MAG 98]. Il s’agit d’une technique où le correcteur est recherché sous la forme d’un
observateur. Dans ce cas, l’observateur ne sert pas à observer des variables mais à
introduire des degrés de liberté supplémentaires dont on tire profit pour résoudre des
problèmes multimodèles. L’avantage de l’approche observateur est de placer, au moins
pour le système nominal, les pôles introduits par le gain dynamique (principe de sépa-
ration).

L’applicabilité des techniques présentées est validée dans plusieurs références, par
exemple dans [CHI 98, DOL 99b, LEG 97, LEG 98a, LEG 98b, LEG 98c, MAG 02].

5.9. Annexe

5.9.1. Démonstration de la proposition 5.1

Un feedback dynamique peut être vu comme un feedback proportionnel relatif au


système augmenté (A, B, C, D), dont l’espace d’état est X ⊕ Xc . La connexion des
équations [5.1] et [5.3] revient à commander :
" # " #
A 0 0 B
A= , B=
0 0 Inc 0
[5.43]
" # " #
0 Inc 0 0
C= , D=
C 0 0 D

par :
" #
Ac Bc
K= [5.44]
Cc Dc
182 Conception de commandes robustes

Nous sommes alors dans un cas classique où l’on a un placement de vecteur propre
avec gain non dynamique K. On peut donc utiliser le résultat du lemme 5.1, soit :
 
vi
" #
A − λi I 0 0 B   vci 

 =0 [5.45]
0 −λi I I 0  wci 
wi
et :
" # " #" # " #" #! " #
Ac Bc 0 I vi 0 0 wci wci
+ =
Cc Dc C 0 vci 0 D wi wi
[5.46]
Ces deux équations sont équivalentes aux quatre suivantes :
" #
  vi
A − λi I B =0
wi
λi vci = wci
Dc Cvi + Cc vci + Dc Dwi = wi
Bc Cvi + Ac vci + Bc Dwi = wci = λi vci
que l’on peut écrire vci = (λi I − Ac )−1 Bc (Cvi + Dwi ) ; après substitution de vci , la
troisième équation devient :
Dc (Cvi + Dwi ) + Cc (λi I − Ac )−1 Bc (Cvi + Dwi ) = wi
ou :
(Dc + Cc (λi I − Ac )−1 Bc )(Cvi + Dwi ) = wi
ou :
K(λi )(Cvi + Dwi ) = wi
La démonstration de la réciproque est semblable : on définit les deux vecteurs vci
et wci comme ci-dessus ; d’après la dernière équation et avec [5.13], on retrouve [5.45]
et [5.46].

Il reste à discuter le cas complexe. Si une paire d’équations [5.14] et [5.15] est
considérée, il existe une solution avec des coefficients réels. La condition néces-
saire est immédiate. La condition suffisante est vraie si K(λi )(Cvi + Dwi ) = wi
et K(λi )(Cv i + Dw i ) = w i ont une solution réelle. Utilisant la forme spéciale
de ces équations, donnée dans la proposition 5.3, ces deux équations deviennent
Ξ[<(A1 ) =(A1 )] = [<(b1 ) =(b1 )], où les éléments de Ξ sont les bijk . Il n’y a plus
que des nombres réels – la solution sera donc réelle.
La commande multimodèle 183

5.9.2. Démonstration de la proposition 5.2

La variation du gain considéré dans la proposition 5.2 est illustrée par la figure 5.1,
dans laquelle la représentation d’état de K0 est notée (Ac , Bc , Cc , Dc ). Le système
global est :
" # " #" # " #
ẋ A BCc x BDc
= + uc [5.47]
ẋc 0 Ac xc Bc
" #
  x
y = C DCc + DDc uc [5.48]
xc
y est connecté à uc par le feedback non dynamique ρI. Le résultat de l’équation
[5.10] peut alors être appliqué, mais il faut au préalable calculer les vecteurs propres
à gauche et à droite du système [5.47].

Soit λi une valeur propre de A et vi , ui les vecteurs propres correspondants. On


vérifie aisément que :
" #" # " #
A BCc vi vi
= λi
0 Ac 0 0
et :
" #
  A BCc  
ui −ui BCc (Ac − λi I)−1 = λi ui −ui BCc (Ac − λi I)−1
0 Ac

On peut donc appliquer maintenant le résultat de [5.10] au problème considéré :


" # " #
−1 BDc vi
∆λ = [ui − ui BCc (Ac − λi I) ] ρI[C DCc ]
Bc 0

Donc :
∆λ = ρ ui B(Cc (λi I − Ac )−1 Bc + Dc )Cvi

5.9.3. Démonstration des propositions 5.3 et 5.4

La démonstration de la proposition 5.3 est divisée en deux parties : dans un premier


temps, on transforme [5.14] en une équation de la forme « ΞA1 = b1 » ; ensuite, le
critère de [5.27] est mis sous la forme « J = ΞHΞT − 2cΞ ».

Contrainte linéaire. La contrainte [5.14] relative au gain s’écrit K(λi )(Cvi + Dwi ) =
wi . Considérons cette équation, ou plus généralement l’une des équations de [5.36] :
K(λi )(Cvi + Dwi ) = wi [5.49]
184 Conception de commandes robustes

Utilisant [5.29], la k-ième ligne de [5.49] s’écrit :

X
m
eTk ej Ξj Xj (λi )(Cvi + Dwi ) = eTk wi , k = 1, . . . , m
j=1

Puisque eTk ej = 1 si k = j, ou eTk ej = 0 si k 6= j, [5.49] est équivalent à :

Ξk Xk (λi )(Cvi + Dwi ) = eTk wi , k = 1, . . . , m [5.50]

qui est sous la forme recherchée « ΞA1 = b1 ». Les m lignes de [5.49] mènent au
résultat énoncé dans la proposition.

Le critère quadratique. Ignorant la sommation sur les fréquences ωi , ce critère s’écrit :

J = trace(−Kref (jωi ) + K(jωi ))(−Kref (jωi ) + K(jωi ))∗

ou, après suppression du terme constant trace(Kref (jωi )Kref (jωi )∗ ) :

J = −trace(K(jωi )Kref (jωi )∗ ) − trace(Kref (jωi )K(jωi )∗ )


+ trace(K(jωi )K(jωi )∗ )

J = −2< trace(K(jωi )Kref (jωi ) ) + trace(K(jωi )K(jωi )∗ )

Prenons le second terme : un traitement semblable mais plus simple peut être appli-
qué au premier. Utilisant [5.29] :
X
m X
m 
∗ ∗ T T
trace(K(jωi )K(jωi ) ) = trace ek Ξk Xk (jωi ) Xl (jωi ) Ξl el
k=1 l=1

soit après permutation :


X
trace(K(jωi )K(jωi )∗ ) = trace(Ξk Xk (jωi )Xl (jωi )∗ ΞTl eTl ek )
k=1...m, l=1...m

Considérant le fait que la trace d’un scalaire fois ek eTl est nulle si k 6= l :

X
m
trace(K(jωi )K(jωi )∗ ) = Ξk Xk (jωi )Xk (jωi )∗ ΞTk
k=1

Finalement, le critère s’écrit :

X
m
J= (Ξk Xk (jωi )Xk (jωi )∗ ΞTk − 2< Ξk Xk (jωi )Kref (jωi )∗ ek )
k=1
La commande multimodèle 185

soit avec la sommation sur les fréquences :


X
m  X 
J= Ξk Xk (jωi )Xk (jωi )∗ ΞTk
k=1 i=1,...,r
X
m  X 

− 2< Ξk Xk (jωi )Kref (jωi ) ek [5.51]
k=1 i=1,...,r

qui est sous la forme recherchée « ΞHΞT + 2Ξc ». Ce critère est positif. Il est aussi
défini si, prenant en compte la forme spéciale de Xk (λ) et les propriétés des détermi-
nants de Van der Monde, on a considéré au moins q + 1 fréquences dans la sommation
de [5.27] (→ r > q).

On démontre de la même manière le résultat de la proposition 5.4. On se limite à


traiter l’équation la plus complexe parmi [5.21-5.23]. Ne prenant en compte qu’une
seule inégalité de l’équation [5.23], soit :

δRi <(ui BK0 (λi )Cvi ) ≤ δIi =(ui BK0 (λi )Cvi )

K0 (s) est écrit comme K(s) dans [5.5]-[5.29] :


X
m  X
m 
δRi < ui Bek Ξk Xk (λi )Cvi ≤ δIi = ui Bek Ξk Xk (λi )Cvi
k=1 k=1

comme les ui Bek sont scalaires et les Ξk sont des vecteurs réels :
X
m X
m
Ξk δRi <(ui Bek Xk (λi )Cvi ) ≤ Ξk δIi =(ui Bek Xk (λi )Cvi )
k=1 k=1

qui est équivalent à la contrainte inégalité linéaire :


 
δR1 <(ui Be1 X1 (λi )Cvi ) − δI1 <(ui Be1 X1 (λi )Cvi )
 
[Ξ1 . . . Ξm ] 

..
.
≤0

δRm <(ui Bem Xm (λi )Cvi ) − δIm <(ui Bem Xm (λi )Cvi )
[5.52]

5.9.4. Démonstration de la proposition 5.5

Utilisant le complément de Schur, l’inégalité définie par [5.32] devient :


" #
γi I −Kref (jωi ) + K(jωi )
>0 [5.53]
(−Kref (jωi ) + K(jωi ))∗ γi I
186 Conception de commandes robustes

Notons Γi = −Kref (jωi )+ K(jωi ). Utilisant la forme de K(s) définie par [5.29] :
X X
K(jωi ) = ek Ξ0k Xk (jωi ) + ek Ξ0 k Mk Xk (jωi ) [5.54]
k=1,...,m k=1,...,m

donc Γi est comme défini par l’équation [5.34]. De manière à ne manipuler que des
nombres réels, la LMI initiale de [5.53], notée « LMI > 0 » pour simplifier, doit être
remplacée par une LMI réelle équivalente :
" #
<(LMI) −=(LMI)
>0
=(LMI) <(LMI)

ce qui correspond au résultat annoncé (équation [5.33]).

5.10. Bibliographie

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vol. AC-21, p. 659-692, 1976.
Chapitre 6

Fonctions de Lyapunov
dépendant des paramètres
pour l’analyse et la synthèse robuste

6.1. Introduction

Ce chapitre est principalement dédié à la présentation de résultats récents en ana-


lyse et synthèse robuste des systèmes dynamiques à incertitude paramétrique réelle.
Nous nous sommes volontairement limités à des modèles avec incertitude de type
convexe polytopique et au cas particulier des modèles affines en les paramètres incer-
tains. Les problèmes d’analyse et de synthèse robuste associés à ces modèles sont
réputés difficiles [COX 91] et ont généralement été abordés dans le cadre de l’utili-
sation de la notion de stabilité quadratique [ARZ 93, BER 89, GER 91]. Ce concept
très fructueux a permis de développer de nombreux outils d’analyse et de synthèse
numériquement intéressants de par leur simplicité (conditions impliquant la résolu-
tion d’équations de Riccati ou de LMI). Toutefois, il est apparu que ce concept néces-
sitant l’utilisation d’une fonction de Lyapunov unique pour l’ensemble des incerti-
tudes génère un pessimisme irréductible des conditions proposées. Des travaux préli-
minaires ont permis de montrer que celui-ci pouvait être réduit dans certains cas par
l’introduction de fonctions de Lyapunov dépendant des paramètres incertains et par
l’usage systématique de la S-procédure [FER 96].

Les conditions proposées dans ce chapitre reposent également sur le concept


de fonctions de Lyapunov dépendant des paramètres et prolongent ainsi les travaux

Chapitre rédigé par Denis A RZELIER, Jacques B ERNUSSOU, Dimitri P EAUCELLE .


190 Conception de commandes robustes

récents sur le sujet [FER 96, GAH 96]. Nous nous sommes intéressés à divers pro-
blèmes d’analyse et de synthèse en stabilité et en performance. Pour chacun des pro-
blèmes traités, nous nous sommes attachés à présenter notre nouvelle approche le
plus synthétiquement possible en omettant sciemment les preuves trop techniques
et qui auraient alourdi inutilement ce chapitre. Le lecteur désireux d’aller plus loin
dans la compréhension des mécanismes techniques utilisés peut se reporter aux nom-
breuses références citées dans le texte. Chaque résultat a d’autre part été évalué sur des
exemples académiques en le comparant aux résultats préexistants issus du domaine
quadratique ou autre.

Finalement, l’aspect le plus intéressant de ce travail est peut-être lié au fait qu’il
fait apparaître une généricité des problèmes qui permet leur traitement dans un cadre
unifié et leur extension aisée à d’autres types de modélisations incertaines [PEA 00d].
Il reste d’autre part un certain nombre de problèmes ouverts, particulièrement en syn-
thèse, qui font que ce chapitre ne doit pas apparaître comme un état de l’art d’une
recherche définitive et figée, mais plutôt comme un instantané d’une recherche en
pleine évolution.

Notations
La matrice transposée de A est notée A0 , et A∗ est la matrice complexe conjuguée
transposée. Etant donné des matrices symétriques A et B, > (≥) est la relation d’ordre
partiel telle que A > (≥) B si et seulement si A − B est (semi-) définie positive. 1 est
la matrice identité et 0 la matrice nulle de dimensions appropriées. Sn est l’ensemble
des matrices symétriques de Rn×n et S+ +∗
n (Sn ) le cône des matrices semi-définies
(définies) positives dans Sn . C est l’ensemble des nombres complexes. R+ (R+∗ )
est l’ensemble des réels positifs (strictement). δ est l’opérateur de dérivation pour les
systèmes en temps continu (δ[x(t)] = ẋ(t)) et l’opérateur de retard pour les systèmes
en temps discret (δ[x(t)] = x(t + 1)). ⊗ est le produit de Kronecker des matrices.
Nous rappelons que (A ⊗ B)(C ⊗ D) = (AC) ⊗ (BD). co{A1 , . . . , AN } définit
l’enveloppe convexe des matrices sommets A1 , . . . , AN . Le signe ? indique dans une
matrice un terme symétrique qui se déduit du contexte. Pour une matrice A donnée,
sym(A) = A + A0 . Pour les normes de système, • = 2 ou • = ∞. De plus, σ = s ou
σ = z suivant que l’on considère des modèles en temps continu ou discret.

6.2. Les modèles LTI incertains

6.2.1. Introduction

Les modèles linéaires temps-invariant (LTI) sont très largement utilisés en analyse
et synthèse robuste du fait de leur simplicité et du fait qu’il existe de nombreux outils
performants associés. Cette simplicité du modèle LTI n’est toutefois pas sans consé-
quence sur la précision relative de sa représentativité du système physique réel. Il est
Fonctions de Lyapunov 191

donc nécessaire, dans la plupart des cas, d’adjoindre au modèle LTI un modèle mathé-
matique de l’incertitude représentant l’écart entre la réalité physique et le modèle
mathématique simplifié.

L’incertitude affectant un modèle de comportement peut trouver son origine dans


les erreurs et approximations inhérentes au processus de modélisation, résultant d’une
linéarisation ou d’une réduction de modèle, dans la prise en compte de la variation
des paramètres du modèle pour des systèmes variant dans le temps ou dans la prise
en compte d’approximations numériques sur la valeur des paramètres du fait des pro-
blèmes de précision finie. Il est donc indispensable de définir des classes de modèles
d’incertitude suivant l’origine de celle-ci, permettant l’élaboration de modèles incer-
tains adéquats. Le modèle d’incertitude peut ainsi être caractérisé par différents fac-
teurs tels que ceux définissant la nature de l’incertitude considérée.

La nature mathématique peut être réelle ou complexe suivant que l’on considère
des variations sur un certain nombre de paramètres physiques du système ou que
l’on essaie d’évaluer l’influence d’une perturbation modélisée de manière LTI sur une
plage de fréquences prédéfinie.

Cette nature mathématique est donc directement induite par sa nature physique,
qui peut être paramétrique ou non. Les incertitudes non paramétriques complexes per-
mettent essentiellement de modéliser des dynamiques négligées, alors que les incerti-
tudes non paramétriques réelles sont plus utilisées afin de représenter les effets d’une
linéarisation ou de la variation temporelle du système. Le modèle non paramétrique est
utilisé afin de caractériser une classe de modèles incertains ne pouvant être paramétrée
à l’aide d’un nombre fini de paramètres.

Dans le cadre des modèles paramétriques réels, la nature géométrique de l’en-


semble d’appartenance peut également être définie. Cet ensemble est généralement
polytopique (paramètres appartenant à des intervalles) ou ellipsoïdal (paramètres H-
dissipatifs).

L’information relative à la complexité plus ou moins grande de la structure du


modèle de l’incertitude définit concrètement l’interconnection entre le modèle nomi-
nal LTI et le modèle d’incertitude. L’incertitude non structurée diffère de la structurée
par le fait que les éléments incertains du modèle sont implicitement supposés indé-
pendants. La nature du « bouclage » du modèle d’incertitude sur le modèle LTI peut
être considérée également comme caractérisant la complexité du modèle incertain
complet. Les paradigmes les plus usuels vont des modèles incertains linéaires frac-
tionnaires (LFT) aux inclusions différentielles, en passant par les modèles incertains
affines, sous-classe des premiers pour laquelle le bouclage est strictement propre.

L’obtention d’un modèle incertain résulte donc d’un travail complexe qui condi-
tionne en majeure partie le choix de la méthode de résolution et son efficacité. Dans
192 Conception de commandes robustes

ce chapitre, afin de simplifier et de clarifier l’exposé des méthodes présentées, nous


ne considérerons que des modèles affines d’incertitude et les inclusions différentielles
linéaires. Des conditions analogues peuvent être également développées dans le cadre
plus général des incertitudes à structure LFT [PEA 00b, PEA 00c].

6.2.2. Les inclusions différentielles linéaires polytopiques

Une approche très générale de la théorie des inclusions différentielles est donnée
dans la référence [AUB 84]. Dans notre cas, nous nous intéressons plus particulière-
ment à l’interprétation de ces modèles en tant que systèmes linéaires incertains possi-
blement variant dans le temps [BOY 94]. Un système dynamique incertain, décrit par
une inclusion différentielle linéaire polytopique, a la forme [KAM 87] :

δ[x(t)] ∈ f (x), f (x) = {y : y = M x, M ∈ M} [6.1]

où M est un polytope de matrices réelles inclus dans Rn×n et défini par ses N matrices
sommets M [i] :
 X
N X
N 
[1] [N ] [i]
M = co{M ,...,M }= M= ξi M : ξi ≥ 0, ξi = 1 [6.2]
i=1 i=1

Ce type de modèle incertain est apparu dans de nombreux travaux récents en ana-
lyse et synthèse robuste [BAR 86, BAR 93, BER 89, GER 98, KAM 87, KOK 90,
MOL 89, OLI 99a, OLI 99b, PEA 00a]. La référence [BOY 94] offre une vision syn-
thétique relativement complète des principaux résultats liés à ce type de modélisation,
même s’il y manque les résultats les plus récents utilisant des fonctions de Lyapunov
dépendant des paramètres.

Dans le cas le plus général considéré dans ce chapitre, nous définissons l’inclusion
différentielle linéaire polytopique de manière étendue par :
    
δ[x(t)] A B1 B2 x(t)
    
 z(t)  =  C1 D11 D12   w(t) 
y(t) C2 D21 0 u(t)
[6.3]
   
δ[x(t)] x(t)
   
 z(t)  = M  w(t)  M ∈M
y(t) u(t)

où x ∈ Rn est le vecteur d’état, u ∈ Rm le vecteur de commande, y ∈ Rr le vecteur


des sorties mesurées, w ∈ Rl le vecteur des perturbations exogènes et z ∈ Rq le
vecteur des sorties contrôlées.
Fonctions de Lyapunov 193

Ce modèle a particulièrement été considéré dans la littérature du fait de sa sim-


plicité, mais également du fait qu’il recouvre une classe de modèles fréquemment
rencontrée en pratique : les matrices intervalles [BAR 93, BAR 94, BHA 95, BIA 83,
XIN 87]. Une matrice intervalle est définie comme une matrice réelle dont les élé-
ments sont connus comme appartenant à des intervalles :

M = [mij ] mij ≤ mij ≤ mij [6.4]

Il est alors possible de réécrire cette matrice intervalle afin de faire apparaître un
vecteur de paramètres incertains :

2
X
n
2
M (δ) = δi M [i] δ ∈ Rn
i=1 [6.5]

∀i rang(M [i] ) = 1 δ i ≤ δi ≤ δ i

Cette structure a été très étudiée par l’approche algébrique. En effet, ce type de
modèle possède la propriété remarquable d’avoir un polynôme caractéristique dont les
coefficients sont des fonctions multilinéaires de δ. Il est alors possible d’appliquer de
nombreux résultats issus de l’approche algébrique et notamment le mapping theorem
[BHA 95]. Il va sans dire que l’hypothèse additionnelle sur le rang des matrices M [i]
est très restrictive. Ce modèle a toutefois l’avantage d’être plus structuré et de faire
apparaître explicitement un vecteur de paramètres incertains. Dans ce cadre, une classe
de modèles paramétriques réels peut être explicitement définie et utilisée en tant que
telle.

6.2.3. Les modèles affines paramétriques réels

Le modèle LTI incertain considéré dans cette classe se définit comme suit :
    
δ[x(t)] A(∆) B1 (∆) B2 (∆) x(t)
    
 z(t)  =  C1 (∆) D11 (∆) D12 (∆)   w(t) 
y(t) C2 (∆) D21 (∆) 0 u(t)
[6.6]

x(t)
 
= M (∆)  w(t) 
u(t)
194 Conception de commandes robustes

La matrice système incertaine est caractérisée par :

X
p
M (∆) = M0 + δi M [i] |δi | ≤ 1 ∀i = 1, . . . , p
i=1 [6.7]

= M0 + M1 ∆M2 ∆∈∆

où :
   
 δ1 1 0 ... 0 

 


 .. .. ..   


 0 .  
 . . 
∆= ∆=  |δi | ≤ 1 ∀i = 1, . . . , p [6.8]

  .. .. ..  


  . . . 0  


 

0 ... 0 δp 1

et :
 
M1 = 1 ... ... 1 [6.9a]
 [1]

M
 
M2 = 

..
.

 [6.9b]
M [p]

Les écritures scalaires ou matricielles de l’équation [6.7] sont parfaitement équiva-


lentes. Ce modèle fait clairement apparaître un vecteur de paramètres incertains pos-
sédant ou non une signification physique. Ce type de modélisation a été plus particu-
lièrement utilisé dans les références [ARZ 00, FER 96, GAH 96, LEA 90, PEA 00b].

Il est à noter que ce type de modèle peut toujours être réécrit comme une inclusion
différentielle linéaire polytopique [6.2], mais l’écriture [6.6] peut être préférable du
fait de sa structure plus détaillée.

6.2.4. Illustration

On considère à titre d’illustration le modèle en temps continu d’un système méca-


nique de la figure 6.1 fréquemment utilisé dans la littérature et présenté particulière-
ment dans [IWA 96]. Les paramètres incertains sont les raideurs des deux ressorts et le
coefficient de frottement k1 = k10 + δk1 , avec |δk1 | ≤ 0,4 et k10 = 1, k2 = k20 + δk2 ,
avec |δk2 | ≤ 0,4 et k20 = 1, c = c0 + δc , avec c0 = 1 et |δc | ≤ 0,4, soit une variation
de 40 % sur les paramètres non connus précisément.
Fonctions de Lyapunov 195

Les équations du modèle sont les suivantes :


  1 

 0 0 0

 
m1


  0 0 0 1


 ẋ(t) =  m2
 x(t)

  −(k − c


 10 + k 20 ) k 20
0
0


m1

 k20 −k20 0 − m2
c 0







      

 0 0 0 0 0 0 0

  0


  0 0 0  
 0 0 
 

 0 


 +   w (t) +   w(t) +   u(t)

  −1 1 − m1 1
0 
u
 1 0   0 



0 −1 0 − m12 0 1 1



  

 1 0 0 0



  −1 1 0 0 

  

 z (t) =   x(t) wu (t) = ∆zu (t)


u
 0 0 1 0 





 0 0 0 1





  

 z(t) = 0 1 0 0 x(t)







  
y(t) = 1 0 0 0
[6.10]
où l’incertitude ∆ ∈ ∆ est définie par :
   


δk1 0 0 0 


  0 δ  

 k2 0 0 
∆= ∆=  : δki ≤ 0,4, δc ≤ 0,4 [6.11]

  0 0 δ 0  



c


0 0 0 δc

Il est à noter que seule la matrice dynamique du modèle est affectée par l’incer-
titude paramétrique. Ce modèle incertain peut être de manière équivalente considéré
comme une inclusion différentielle linéaire polytopique à huit sommets ou comme un
modèle affine paramétrique réel. Dans le premier cas :
 X8 X8 
[i]
A∈A= A∈R n×n
:A= ξi A : ξi ≥ 0, ξi = 1 [6.12]
i=1 i=1
[i]
où les matrices sommets A sont les images par A des sommets du polytope des
paramètres. Dans le second cas :
A = A0 + δk1 A1 + δk2 A2 + δc A3 [6.13]
196 Conception de commandes robustes

x1 = y
1111111111111111111111111111111111111111
0000000000000000000000000000000000000000
x2 = z
0000000000000000000000000000000000000000
1111111111111111111111111111111111111111
w1
0000000000000000000000000000000000000000
1111111111111111111111111111111111111111
w2
0000000000000000000000000000000000000000
1111111111111111111111111111111111111111
k1 m
0000000000000000000000000000000000000000
1111111111111111111111111111111111111111
1 k2 u
0000000000000000000000000000000000000000
1111111111111111111111111111111111111111
m2
0000000000000000000000000000000000000000
1111111111111111111111111111111111111111
0000000000000000000000000000000000000000
1111111111111111111111111111111111111111
0000000000000000000000000000000000000000
1111111111111111111111111111111111111111
0000000000000000000000000000000000000000
1111111111111111111111111111111111111111
c c
Figure 6.1. Système mécanique

où :
   
0 0 0 0 0 0 0 0
 0 0 0   0 0 0 
 0   0 
A1 =   A2 =  
 −1 0 0 0   0 1 0 0 
0 0 0 0 0 −1 0 0
[6.14]
 
0 0 0 0
 0 0 
 0 0 
A3 =  
 0 0 −1/m1 0 
0 0 0 −1/m2
La matrice A3 n’étant pas de rang 1, cet exemple ne peut être considéré comme
faisant partie de la classe des matrices intervalles. Cet exemple sera utilisé tout au long
de ce chapitre afin d’illustrer les différents résultats présentés.

6.3. Analyse robuste

6.3.1. Introduction

Le choix d’un modèle incertain étant effectué, il est nécessaire d’effectuer une
étape d’analyse des propriétés en stabilité et performance robuste du modèle proposé
afin d’élaborer en suivant une stratégie de correction adéquate résultant en la synthèse
d’un compensateur. Celui-ci obtenu, une nouvelle étape d’analyse du système bouclé
intervient afin d’attester des propriétés réelles du système corrigé. L’étape d’analyse
est donc doublement importante dans le processus de synthèse, puisqu’elle va condi-
tionner en partie les choix effectués pour la synthèse, mais également sanctionner les
résultats de cette étape.

Cette étape d’analyse est usuellement séparée en deux problèmes présentant des
degrés de difficulté différents : l’analyse de stabilité robuste et celle de performance
Fonctions de Lyapunov 197

robuste. Si la notion de valeur singulière structurée [PAC 93] a permis de donner


un cadre général d’étude permettant de ramener l’analyse de performance robuste à
celui d’analyse de stabilité robuste vis-à-vis d’incertitudes structurées, il n’en reste
pas moins que les deux problèmes sont relativement différents. Autant la définition du
premier est univoque et sans ambiguïté, autant la notion même de performance robuste
recouvre des acceptions fort diverses. Quoi qu’il en soit, aussi bien le problème d’ana-
lyse de stabilité robuste que celui d’analyse de performance robuste seront abordés
dans le cadre de la théorie de Lyapunov, dont on peut dire qu’elle fournit les outils et
les concepts les plus simples (fonctions de Lyapunov quadratiques, grammiens d’ob-
servabilité et de commandabilité, lemme borné réel, équation de Lyapunov...) pour
l’étude de ces problèmes.

6.3.2. Analyse robuste en stabilité

Etant donné un modèle LTI et la représentation de l’incertitude associée, il s’agit


de tester la stabilité au sens de Lyapunov du système pour l’ensemble des incertitudes
admissibles. Devant la variété des modélisations, il n’est pas étonnant de retrouver
une grande variété d’approches possibles de ce problème. Même si une typologie
exacte et exhaustive est toujours délicate, il est toutefois possible de dégager trois
grandes approches : algébrique fondée sur l’utilisation du polynôme caractéristique
[BAR 94, BHA 95] ; fréquentielle [PAC 93] ; l’approche fondée sur l’utilisation des
fonctions de Lyapunov [BAR 94, BER 89, GER 91]. De nombreux travaux ont vu le
jour suivant les différentes approches et cette problématique a atteint un état de matu-
rité important qui implique que les problématiques actuelles soient en général d’une
grande complexité. Ainsi, le problème de l’analyse robuste en stabilité vis-à-vis d’in-
certitudes structurées n’est-il pas complètement résolu et l’on doit faire face à un com-
promis inévitable entre la complexité de la méthode et le degré de pessimisme qu’elle
implique. Nous proposons donc dans la suite de ce chapitre des solutions de faible
complexité améliorant les résultats existants pour des problèmes réputés difficiles.

6.3.2.1. Les modèles linéaires polytopiques


Dans cette partie, nous nous intéressons à la stabilité de l’inclusion différentielle :

δ[x(t)] = A(K)x(t) A(K) ∈ A = co{A[1] (K), . . . , A[N ] (K)} [6.15]

Afin d’utiliser une terminologie plus concise largement en usage, nous parlerons
de stabilité robuste du polytope de matrices A. Dans certains cas, la caractéristique
discrète ou continue sera explicitement détaillée par les indices « d » ou « c » quand
cela sera nécessaire.

Le problème d’analyse de la stabilité robuste d’un polytope de matrices a été très


largement évoqué dans la littérature et de nombreuses tentatives ont été faites afin
198 Conception de commandes robustes

d’obtenir des conditions sur les points extrêmes du polytope. Il n’existe pas toute-
fois de résultats définitifs sur le sujet, excepté pour les matrices de dimension 2 et 3
[BAR 93]. Il a en effet été démontré que ce problème est NP-complet [COX 91].
La plupart des conditions proposées sont suffisantes, faisant intervenir des restric-
tions importantes sur les matrices du polytope (matrices symétriques...), ou utilisant
une approche restrictive telle que la stabilité quadratique [HOR 76]. Dans le cadre
de la théorie de Lyapunov, quelques travaux ont proposé d’utiliser des fonctions de
Lyapunov dépendant des paramètres afin de rendre les résultats de stabilité quadra-
tique moins pessimistes [BAR 86, LEA 90]. Nous reprenons ici cette idée et mon-
trons qu’une condition suffisante de stabilité robuste d’un polytope de matrices peut
être donnée en termes de l’existence de solutions à des contraintes LMI ne faisant
intervenir que les matrices sommets du polytope.

Dans la suite, pour plus de concision, nous utiliserons la notation suivante :


" #
−P 0
temps discret : P(P ) =
0 P
[6.16]
" #
0 P
temps continu : P(P ) =
P 0

D ÉFINITION 6.1.– A est robustement stable si et seulement si, pour chaque A(K) ∈
A, il existe une matrice P ∈ S+∗
n telle que :
" #
  1
1 A(K) P(P ) <0 [6.17]
A0 (K)

A est quadratiquement stable si et seulement s’il existe une unique matrice P ∈ S+∗
n
telle que, pour tout A(K) ∈ A :
" #
  1
1 A(K) P(P ) <0 [6.18]
A0 (K)

R EMARQUE 6.1.– La différence majeure entre les deux définitions réside dans l’uni-
cité de la matrice de Lyapunov attestant de la stabilité sur l’ensemble du domaine
dans le cas de la stabilité robuste quand pour établir celle-ci, il est suffisant de dispo-
ser d’une matrice de Lyapunov pour chaque réalisation de la matrice A(K) dans le
polytope de matrices A.

Il est bien connu depuis les travaux de [PAC 90, ROT 93] que ces deux notions
de stabilité ne sont équivalentes que sous des hypothèses très restrictives sur la nature
de l’incertitude. Dans le cas des incertitudes linéaires polytopiques, une interprétation
Fonctions de Lyapunov 199

par la théorie des jeux de ces deux définitions a été proposée dans [CHE 99]. Une
borne supérieure de la distance entre stabilités robuste et quadratique peut ainsi être
définie. Nous rappelons tout d’abord une condition nécessaire et suffisante de stabilité
quadratique.

T HÉORÈME 6.1 ([GER 91, HOR 76]).– A est stable quadratiquement si et seule-
ment s’il existe P ∈ S+∗ n telle que :
" #
 [i]
 1
∀i = 1, . . . , N 1 A (K) P(P ) 0 <0 [6.19]
A[i] (K)

Cette condition est intéressante puisqu’elle permet de tester la stabilité robuste du


modèle incertain à partir d’un nombre fini de contraintes LMI écrites aux sommets
du polytope. Elle ne constitue toutefois qu’une condition suffisante de stabilité robuste
qui peut s’avérer parfois très pessimiste (voir exemples dans [CHE 99]).

La remarque 6.1 permet d’envisager de réduire le pessimisme de la stabilité qua-


dratique et de se rapprocher de la stabilité robuste en considérant non plus une fonction
de Lyapunov unique, mais des fonctions de Lyapunov dépendant des paramètres.

T HÉORÈME 6.2 ([GER 98, PEA 00 A ]).– S’il existe N matrices P [i] ∈ S+∗
n et une
matrice H ∈ Rn×2n telles que :
" #
[i] A[i] (K)  0 
∀i = 1, . . . , N P(P ) + H + H 0 A[i] (K) −1 < 0
−1
[6.20]
alors A est stable
P de manière robuste. Une fonction de Lyapunov dépendant
PN des para-
[i] [i]
mètres P = N ξ
i=1 i P est associée à chaque élément A(K) = ξ
i=1 i A (K) du
polytope A.

Ce résultat permet essentiellement de faire apparaître des variables de relaxation


additionnelles à travers la matrice H et permet également l’utilisation de fonctions
de Lyapunov dont la paramétrisation est polytopique. La condition suffisante propo-
sée est écrite à partir d’un nombre fini de contraintes LMI définies aux sommets du
polytope comme dans le cas quadratique. Sa complexité numérique est toutefois plus
importante, puisque le nombre de variables est cette fois égal à n(n+1)
2 N + 2n2 pour
n(n+1)
2 dans le cas de la condition [6.19]. Comme nous le verrons sur les tests numé-
riques statistiques, le gain obtenu en termes de réduction du pessimisme est toutefois
très important.

Un cas particulièrement remarquable est celui des modèles incertains en temps


discret pour lesquels une condition suffisante de stabilité robuste plus simple peut être
proposée.
200 Conception de commandes robustes

T HÉORÈME 6.3 ([OLI 99 A , OLI 99 B ]).– S’il existe N matrices P [i] ∈ S+∗
n et une
matrice G ∈ Rn×n telles que :

∀i = 1, . . . , N
" # " #
[i]    [i]0 
A (K) 0
P(P [i] ) + 0 G + 0 A (K) −1 < 0 [6.21]
−1 G

alors le polytope Ad est stable de manière robuste.

Cette condition n’a pas d’intérêt majeur pour l’analyse de stabilité robuste, puis-
qu’elle est clairement plus restrictive que la condition [6.20] sans pour autant réduire
fortement sa complexité. Il est pourtant intéressant de constater que la même opération
n’est pas possible dans le cas des modèles incertains en temps continu. On verra par
la suite que cette caractéristique a des répercussions importantes pour les méthodes de
synthèse robuste à base de FLDP.

Le résultat essentiel concernant ces résultats d’analyse robuste en stabilité réside


dans la hiérarchie qui peut en être déduite.

T HÉORÈME 6.4 ([GER 98]).– Si A est stable quadratiquement, alors il existe N


matrices P [i] ∈ S+∗
n et une matrice H ∈ R
n×2n
vérifiant la condition [6.20].
Si Ad est stable quadratiquement, alors il existe N matrices P [i] ∈ S+∗
n et une
matrice G ∈ Rn×n vérifiant la condition [6.21].

R EMARQUE 6.2.– Cela n’est pas précisé dans le théorème 6.4, mais il est clair que la
condition du théorème 6.3 implique la condition du théorème 6.2.

Afin d’illustrer ces résultats, 5 000 polytopes de matrices de dimension 4, 5 ont


été générés aléatoirement pour un nombre de sommets N = 3, 4, 5 dans le cas des
modèles incertains en temps discret. Les matrices sommets sont construites stables
(|λ| < 1), ce qui ne garantit pas pour autant la stabilité robuste du polytope. Les
pourcentages de réussite présentés dans le tableau 6.1 n’ont qu’une valeur relative.
Les résultats de ce tableau nous éclairent en plusieurs points.

Les deux conditions utilisant les fonctions de Lyapunov dépendant des paramètres
sont très nettement moins pessimistes que la condition fondée sur la stabilité quadra-
tique.

La contrainte imposée sur la matrice H = [0 G] dans la condition du théorème 6.3


apparaît relativement restrictive.

Les écarts constatés entre les différentes méthodes tendent à s’accroître avec la
difficulté du problème (taille du système, nombre de sommets du polytope).
Fonctions de Lyapunov 201

n N Théorème 6.1 Théorème 6.2 Théorème 6.3


3 8,8 % 68,6 % 91,0 %
4 4 1,0 % 44,0 % 75,4 %
5 0,2 % 27,4 % 63,0 %
3 7,6 % 68,6 % 91,4 %
5 4 0,8 % 46,4 % 82,8 %
5 0,2 % 28,2 % 71,2 %

Tableau 6.1. Résultats statistiques pour 5 000 polytopes discrets

6.3.2.2. Les modèles affines paramétriques


Les modèles incertains pour l’analyse robuste sont définis par :
 Xp 
δ[x(t)] = A0 (K) + δi A[i] x(t)
i=1
= (A0 (K) + B∆C)x(t) ∀i = 1, . . . , p |δi | < 1 [6.22]
où ∆ ∈ ∆ est défini en [6.8] et :
 
A[1]
   . 
B= 1 ... 1 C =
 .. 
 [6.23]
A[p]
Ce modèle est un cas particulier du modèle linéaire polytopique précédent et il est
donc possible de lui appliquer directement les résultats des théorèmes 6.1, 6.2 et 6.3
en utilisant un polytope de matrices ∆ ayant N = 2p matrices sommets ∆i .

T HÉORÈME 6.5.– On a les résultats suivants :


1) [6.22] est stable quadratiquement si et seulement s’il existe P ∈ S+∗
n telle que :

∀i = 1, . . . , N
" #
  1
1 A0 (K) + B∆i C P(P ) <0 [6.24]
(A0 (K) + B∆i C)0

2) s’il existe N matrices P [i] ∈ S+∗


n et une matrice H ∈ R
n×2n
telles que :
∀i = 1, . . . , N
" #
A0 (K) + B∆i C  
P(Pi ) + H + H 0 (A0 (K) + B∆i C)0 −1 <0
−1
[6.25]
alors [6.22] est stable de manière robuste ;
202 Conception de commandes robustes

3) s’il existe N matrices P [i] ∈ S+∗


n et une matrice G ∈ R
n×n
telles que :

∀i = 1, . . . , N
" # !
[i] A0 (K) + B∆i C  
P(P ) + sym 0 G <0 [6.26]
−1

alors [6.22], dans le cas discret, est stable de manière robuste.

Les fonctions de Lyapunov utilisées en 2) et 3) du théorème 6.5 sont polytopiques


en l’incertitude. L’information concernant la dépendance affine de la matrice dyna-
mique incertaine en fonction de l’incertitude n’est pas utilisée ici. Dans [FER 96] et
[GAH 96], il est proposé de rechercher une fonction de Lyapunov dépendant des para-
mètres de manière affine. Deux conditions suffisantes de stabilité robuste exprimées
en termes de solution à des contraintes LMI sont ainsi proposées. Dans [FER 96],
l’utilisation de la S-procédure permet d’obtenir une condition suffisante interprétable
comme un critère de Popov généralisé. Utilisant un argument de multiconvexité,
[GAH 96] propose un test LMI de stabilité robuste qui peut également prendre en
compte une borne sur la vitesse de variation des paramètres. La recherche de fonctions
de Lyapunov dépendant des paramètres de manière affine peut être relaxée également
par l’introduction de variables additionnelles.

T HÉORÈME 6.6.– S’il existe L + 1 matrices P [i] ∈ S+∗


n , i = 0, . . . , L et une matrice
H ∈ Rn×2n telles que :

∀i = 1, . . . , N
" #
A0 (K) + B∆i C  
P(P0 + ∆i P ) + H + H0 (A0 (K) + B∆i C)0 −1 <0
−1
[6.27]

où P = diag(P [i] ), i = 1, . . . , L, alors [6.22] est stable de manière robuste.

Cette condition suffisante est surtout intéressante de par le fait que le nombre de
variables impliquées est linéaire en le nombre de paramètres incertains (p+1) (n+1)n
2 +
2n2 pour un nombre de variables exponentiel en le nombre de paramètres incertains,
2p (n+1)n
2 + 2n2 , pour la condition 2) du théorème 6.5.

Ces différents résultats sont maintenant évalués et comparés à ceux proposés dans
la littérature. 5 000 polytopes de matrices dynamiques continues contenant L = 2
paramètres incertains sont générés aléatoirement. Les résultats sont présentés dans le
tableau 6.2.

Il apparaît très clairement que la paramétrisation simplifiée de la fonction de


Lyapunov n’a que peu de répercussions sur les résultats obtenus avec les variables
Fonctions de Lyapunov 203

n Théorème 6.5-1 [FER 96] [GAH 96] Théorème 6.6 Théorème 6.5-2
2 52,2 % 60,3 % 69,8 % 71,1 % 71,3 %
3 51,7 % 59,5 % 65,4 % 70,4 % 70,4 %
4 36,4 % 47 % 50,9 % 57,1 % 57,4 %
5 34,2 % 50,6 % 51 % 58,6 % 59,3 %

Tableau 6.2. Résultats statistiques pour 5 000 matrices incertaines continus

de relaxation tout en accélérant la procédure de résolution. Sur des problèmes relati-


vement simples (L = 2), les nouvelles méthodes proposées font clairement apparaître
un gain substantiel par rapport aux méthodes existantes.

6.3.3. Analyse robuste en performance

6.3.3.1. DR -stabilité robuste


Dans ce qui suit, le problème d’analyse de stabilité robuste des modèles [6.15]
et [6.22] est généralisé à celui de l’analyse robuste de la localisation des pôles du
modèle dynamique incertain dans une sous-région DR du plan complexe. Différentes
caractérisations mathématiques d’une région DR ⊂ C ont été données dans la littéra-
ture [CHI 96, GUT 81, PEA 00a]. Seules les régions LMI définies comme dans cette
dernière référence seront considérées dans ce chapitre.

D ÉFINITION 6.2.– Soit R ∈ S2d une matrice partitionnée comme :


" #
0
R11 R12 R11 = R11 ∈ Rd×d
R= 0
: 0
[6.28]
R12 R22 R22 = R22 ∈ Rd×d

Nous définissons la région du plan complexe DR :


0
DR = {z ∈ C : R11 + R12 z + R12 z ∗ + R22 zz ∗ < 0} [6.29]

Sans autres hypothèses sur la sous-matrice R22 , les régions ainsi définies ne sont
pas nécessairement convexes. Si R22 ∈ S+ d , alors la définition précédente est une
reformulation simplificatrice de la définition des régions LMI donnée dans [CHI 96].
Une caractérisation de la DR -stabilité de type Lyapunov peut être facilement extrapo-
lée des résultats de [CHI 96].

T HÉORÈME 6.7.– A(K) ∈ Rn×n est DR -stable si et seulement s’il existe une matrice
P ∈ S+∗
n telle que :

R11 ⊗ P + R12 ⊗ (P A0 (K)) + R12


0
⊗ (A(K)P ) + R22 ⊗ (A(K)P A0 (K)) < 0 [6.30]
204 Conception de commandes robustes

En utilisant la forme linéaire de la condition [6.30], les résultats de stabilité robuste


en continu et discret peuvent être étendus au problème d’analyse de DR -stabilité aussi
bien pour les modèles incertains du type polytopique que pour ceux du type affine.

T HÉORÈME 6.8.– On a les résultats suivants :


1) l’équation [6.15] est DR -stable quadratiquement si et seulement s’il existe
P ∈ S+∗
n telle que :

∀i = 1, . . . , N
 0 
R11 ⊗ P + sym(R12 ⊗ (P A[i] (K))) (1d ⊗ A[i] (K))(L ⊗ P )
 
 <0 [6.31]
0 [i]0
(L ⊗ P )(1d ⊗ A (K)) −1d ⊗ P

où R22 = LL0 ;
2) s’il existe N matrices P [i] ∈ S+∗
n et une matrice H ∈ R
dn×2dn
telles que :
∀i = 1, . . . , N
" #
[i] 1d ⊗ A[i] (K)  0 
R⊗P + H + H0 1d ⊗ A[i] (K) −1dn <0
−1dn
[6.32]
alors [6.15] est DR -stable de manière robuste.

Dans le cas des modèles affines du type [6.22], la recherche de fonctions de


Lyapunov peut être restreinte à la classe des fonctions dépendant des paramètres de
manière affine.

T HÉORÈME 6.9.– S’il existe L + 1 matrices P [i] ∈ S+∗


n , i = 0, 1, . . . , L et une
matrice H ∈ Rdn×2dn telles que :
∀i = 1, . . . , N
" # !
1d ⊗ (A0 (K) + B∆i C)
R ⊗ (P0 + ∆i P ) + sym H <0 [6.33]
−1dn

où P = diag(P [i] ), i = 1, . . . , L, alors [6.22] est DR -stable de manière robuste.

Les conditions de DR -stabilité robuste fondées sur l’utilisation de fonctions de


Lyapunov dépendant des paramètres ne sont intéressantes que dans la mesure où elles
améliorent les résultats bien connus issus du cadre de la stabilité quadratique. Le résul-
tat d’analyse robuste de stabilité dans le disque unité [6.21] du théorème 6.3 peut ainsi
être étendu à l’étude de la DR -stabilité dans les régions LMI bornées du plan com-
plexe. De telles régions vérifient l’hypothèse supplémentaire R22 > 0.
Fonctions de Lyapunov 205

T HÉORÈME 6.10.– S’il existe N matrices P [i] ∈ S+∗


n et une matrice G ∈ R
dn×dn

telles que :

∀i = 1, . . . , N
" # !
1d ⊗ A[i] (K)  
R ⊗ P [i] + sym G −1
(R22 R12 ) ⊗ 1n 1dn <0
−1dn
[6.34]

alors A est robustement DR -stable. De plus, cette condition est nécessairement rem-
plie si A est quadratiquement DR -stable.

Ce résultat se déduit en factorisant la matrice H dans la condition [6.32] du théo-


rème 6.8 comme :
 −1

H = G R12 R22 ⊗ 1n 1dn [6.35]

et en posant :
 
H= R12 ⊗ P R22 ⊗ P
[6.36]
[i]
∀i = 1, · · · , N P =P

ce qui permet de retrouver la condition de DR -stabilité quadratique [6.31]. Ce résultat


fait très clairement apparaître la différence entre le cas continu, pour lequel R22 = 0,
et le cas discret pour lequel R12 = 0, R22 = 1, ce qui permet le choix d’une matrice
H factorisée sous la forme H = [0 G].

L’intérêt de l’utilisation des conditions à base de fonctions de Lyapunov dépendant


des paramètres est maintenant illustré sur un exemple académique de faible dimension.
Soit le polytope de matrices A défini par ses deux matrices sommets :
" # " #
−1 1 −2 0
A1 = A2 = [6.37]
−1 −1 −1 −1,2

Différentes régions du plan complexe sont définies :


" #
1,8 1
1) Re(z) < −0,9 : R1 = ;
1 0
 
1,8 0 1 0
 0 −4,41 0 0 
 
2) Re(z) < −0,9 et kzk < 2,1 : R2 =  ;
 1 0 0 0 
0 0 0 1
206 Conception de commandes robustes

 
1,8 0 1 0
 0 −0,21 0 1 
 
3) Re(z) < −0,9 et kz + 1k < 1,1 : R3 =  ;
 1 0 0 0 
0 1 0 1
 
1,8 0 1 0
 0 0 1 
 0,19 
4) Re(z) < −0,9 et kz + 1k < 0,9 : R4 =  .
 1 0 0 0 
0 1 0 1

La figure 6.2 montre la répartition des valeurs propres des matrices du polytope
A quand le paramètre incertain varie de 0 à 1. Il est remarquable de constater que
l’analyse menée à l’aide de la DR -stabilité quadratique donne une réponse positive
uniquement dans le cas de la région définie en 1) alors que la condition [6.32] du
théorème 6.8 donne une réponse positive dans les trois premiers cas et échoue natu-
rellement dans le cas de la région définie en 4).

Figure 6.2. D R régions et localisations des pôles

6.3.3.2. Critères de performance H2 et H∞


On considère, dans ce paragraphe, le paradigme utilisé usuellement en analyse
robuste de performance, où w ∈ Rl , z ∈ Rq , y ∈ Rr , u ∈ Rm . Le modèle LTI
incertain est défini par sa représentation d’état [6.3] ou [6.6]. Pour un contrôleur K(σ)
donné et pour une classe de vecteurs de perturbations w(t), étudier la taille du vecteur
des sorties contrôlées z(t) revient à évaluer le degré de performance de la boucle
fermée de la figure 6.3 à partir d’un critère de performance défini comme une norme
sur le transfert Tzw (σ, K). Pour ce faire, il est nécessaire de définir une norme sur
le vecteur des perturbations exogènes et une autre sur le vecteur des sorties. Cela
Fonctions de Lyapunov 207

permet en retour de définir la norme-système associée (induite ou non). Différentes


normes, H2 [ELG 00], H∞ [ZHO 98], L1 [DAH 95], permettant de définir différents
types de critères de performance, ont été largement étudiées dans la littérature. Dans
ce chapitre, nous nous intéressons plus particulièrement aux critères de performance
déduits des normes H2 et H∞ . D’autre part, du fait que les modèles incertains affines
sont inclus dans les modèles polytopiques, ces derniers sont principalement utilisés
pour la présentation générale des résultats. Les cas permettant la prise en compte de
la structure affine seront explicitement mentionnés.

Figure 6.3. Problème standard

On suppose que le contrôleur K(σ) est donné et que l’on désire analyser le degré
de performance robuste H2 ou H∞ du modèle incertain en boucle fermée. Le modèle
du système n’étant pas parfaitement connu, une façon raisonnable d’envisager le pro-
blème de performance robuste est de considérer le calcul de la norme H2 ou H∞
dans le pire des cas. Cela consiste à déterminer l’élément maximal de l’ensemble des
normes H2 ou H∞ sur l’ensemble des modèles possibles. Nous présentons en détail
en premier lieu le problème d’analyse H2 qui servira de référence pour la présentation
du cas H∞ .

P ROBLÈME 6.1 ( ANALYSE H2 DANS LE PIRE DES CAS ).– Le modèle polytopique
en boucle fermée étant caractérisé par la fonction de transfert en boucle fermée :

Tzw (σ, K) = C1 (K)(σ1 − A(K))−1 B1 (K) [6.38]

dont le modèle d’état associé est donné par :


" # " #" #
δ[x(t)] A(K) B1 (K) x(t)
=
z(t) C1 (K) 0 w(t)
[6.39]
" # " #
δ[x(t)] x(t)
= M (K) M (K) ∈ M
z(t) w(t)

le problème consiste à calculer Γ2 = maxM(K)∈M ||Tzw (σ, K)||2 .

Ce problème est en général très difficile et l’approche classique consiste à dériver


des bornes supérieures γ2 que l’on appelle coûts garantis H2 . De nombreuses réfé-
rences et une présentation détaillée et des comparaisons entre différentes méthodes
208 Conception de commandes robustes

LMI sont proposées dans les chapitres 7 et 8 de la référence [ELG 00]. Le calcul des
bornes supérieures fait le plus souvent appel à la formulation LMI et nous rappelons
tout d’abord la caractérisation LMI de la norme H2 .

L EMME 6.1 ( NORME H2 ).– Etant donné un modèle d’état certain strictement propre
de fonction de transfert :
Tzw (σ, K) = C1 (K)(σ1 − A(K))−1 B1 (K) [6.40]
l’inégalité ||Tzw (σ, K)||22 < γ2 est vérifiée si et seulement s’il existe X ∈ S+∗
n et
T ∈ S+∗
q telles que l’ensemble LMI défini par :

trace(T ) < γ2
 
" # 1 0
1 0 0  
R2 (X, B1 )  0 1 <0 [6.41]
0 1 A(K) 0
| {z } 0 A (K)
h i
1 N2 (A)
 
" # 1 0
0
1 0 C1 (K)  
T2 (X, T )  0 1 <0
0 1 0
| {z } C1 (K) 0
h i
1 N2 (C1 )

admet une solution. Les notations utilisées correspondent aux définitions suivantes :
  0  
−1 B1 (K) 0
 " # 
R2 (X, B1 ) =  B1 (K)  [6.42]
P(X)
0
 
−T 0 0
 
T2 (X, T ) =  0 −X 0  [6.43]
0 0 0

R EMARQUE 6.3.– Une caractérisation duale de la norme H2 est toujours possible. Il


suffit de choisir :
   
−1 C1 (K) 0
 " 0 # 
R2 (X, C1 ) =  C1 (K)  [6.44]
P(X)
0
" #
0
N2 (A) = [6.45]
A0 (K)
 
N2 (C1 ) = N2 (B1 ) = B1 (K) 0 [6.46]
Fonctions de Lyapunov 209

Dans le cas certain, ces deux formulations sont strictement identiques. Il n’en est
rien dans le cas incertain.

Le théorème suivant permet d’obtenir différentes méthodes LMI fournissant dif-


férents coûts garantis H2 .

T HÉORÈME 6.11 ( COÛTS GARANTIS H2 ).– Etant donné le polytope de matrices


défini en [6.39], avec N sommets, M = {M [1] (K), . . . , M [N ] (K)} :
1) s’il existe une matrice X ∈ S+∗ +∗
n et une matrice T ∈ Sq solutions optimales du
problème de programmation semi-définie positive [6.47] d’argument optimal γ2quad :

min γ2
Trace(T ) < γ2
" #
  [i] 1
1 N2 (A[i] ) R2 (X, B1 ) <0 ∀i = 1, . . . , N [6.47]
N20 (A[i] )
" #
h i 1
[i]
1 N2 (C1 ) T2 (X, T ) [i] < 0 ∀i = 1, . . . , N
N20 (C1 )
q
alors le polytope de matrices M est stable quadratiquement et γ2quad est un coût
garanti H2 ;
2) s’il existe N matrices X [i] ∈ S+∗ n , une matrice T ∈ Sq
+∗
et deux matrices
(H1 , H2 ) ∈ R n×2n
×R n×(q+n)
solutions optimales du problème de programmation
semi-définie positive [6.48] d’argument optimal γ2f ldp1 :

min γ2
Trace(T ) < γ2
" # !
[i] N2 (A[i] )  
R2 (X [i] , B1 ) + sym 0 H1 < 0 ∀i = 1, . . . , N
−1
[6.48]
" # !
[i]
N2 (C1 )  
T2 (X [i] , T ) + sym 0 H2 <0 ∀i = 1, . . . , N
−1
q
alors le polytope de matrices M est stable robustement et γ2f ldp1 est un coût
garanti H2 ;
210 Conception de commandes robustes

3) s’il existe N matrices X [i] ∈ S+∗ +∗


n , une matrice T ∈ Sq et une matrice G ∈
Rn×n
solutions optimales du problème de programmation semi-définie positive [6.49]
d’argument optimal γ2f ldp2 :

min γ2
Trace(T ) < γ2
" # !
[i] [i] N2 (A[i] )  
R2 (X , B1 )
+ sym 0 0 G < 0 ∀i = 1, . . . , N [6.49]
−1
" # !
[i]
[i] N2 (C1 )  
T2 (X , T ) + sym 0 0 G < 0 ∀i = 1, . . . , N
−1
q
alors le polytope discret de matrices M est stable robustement et γ2f ldp2 est un coût
garanti H2 .

R EMARQUE 6.4.– La différence entre la condition 2) et la condition 3) réside dans la


structuration des matrices H1 et H2 en une matrice [0 0 G] qui n’est possible que
dans le cas de modèles incertains en temps discret.

R EMARQUE 6.5.– Pour les conditions 1) à 3), une formulation duale existe qui
conduit à des coûts garantis différents de ceux fournis par la méthode primale sans
que l’on puisse montrer qu’une formulation ait un avantage sur l’autre. La formula-
tion proposée a l’avantage de pouvoir être directement utilisée pour les problèmes de
synthèse par retour d’état. Les différentes formulations seront toutefois testées sur un
exemple numérique.

Nous abordons maintenant le problème d’analyse robuste en norme H∞ .

P ROBLÈME 6.2 ( ANALYSE H∞ DANS LE PIRE DES CAS ).– Le modèle polytopique
en boucle fermée étant caractérisé par la fonction de transfert en boucle fermée :

Tzw (σ, K) = C1 (K)(σ1 − A(K))−1 B1 (K) + D11 (K) [6.50]

dont le modèle d’état associé est donné par :


" # " #" #
δ[x(t)] A(K) B1 (K) x(t)
= [6.51a]
z(t) C1 (K) D11 (K) w(t)
" # " #
δ[x(t)] x(t)
= M (K) M (K) ∈ M [6.51b]
z(t) w(t)

Le problème consiste à calculer Γ∞ = maxM(K)∈M ||Tzw (σ, K)||∞ .


Fonctions de Lyapunov 211

De même que dans le cas de l’analyse du pire des cas H2 , des bornes supérieures
γ∞ sont calculées à l’aide d’une formulation de type LMI.

L EMME 6.2 ( NORME H∞ ).– Etant donné un modèle d’état certain de fonction de
transfert :

Tzw (σ, K) = D11 (K) + C1 (K)(σ1 − A(K))−1 B1 (K) [6.52]

l’inégalité ||Tzw (σ, K)||2∞ < γ∞ est vérifiée si et seulement s’il existe X ∈ S+∗
n telle
que l’ensemble LMI défini par :
– pour les modèles en temps continu :
" # " #
A(K) 1
1 Rc∞ (X) <0 [6.53]
C1 (K) A0 (K) C10 (K)
| {z }
h i
1 N∞ (A, C1 )

où :
 
B1 (K)B10 (K) B1 (K)D110
(K) X
 0 
Rc∞ (X, B1 , D11 ) =  ? −γ∞ 1 + D11 (K)D11 (K) 0 
? ? 0
[6.54]

– pour les modèles en temps discret :


" # " #
A(K) 1
1 Rd∞ (X, B1 , D11 ) <0 [6.55]
C1 (K) A0 (K) C10 (K)

où :
 
B1 (K)B10 (K) − X B1 (K)D110
(K) 0
 0 
Rd∞ (X) =  ? −γ∞ 1 + D11 (K)D11 (K) 0 
? ? X
[6.56]

admet une solution.


212 Conception de commandes robustes

Différents calculs des coûts garantis H∞ peuvent être proposés.

T HÉORÈME 6.12 ( COÛTS GARANTIS H∞ ).– Etant donné le polytope de matrices


défini en [6.39], avec N sommets, M = {M [1] (K), . . . , M [N ] (K)} :
1) s’il existe une matrice X ∈ S+∗
n solution optimale du problème de programma-
quad
tion semi-définie positive [6.57] d’argument optimal γ∞ :

min γ∞
" #
h i 1
[i] [i] [i]
1 N∞ (A[i] , C1 ) R∞ (X, B1 , D11 ) [i] <0 [6.57]
N∞ (A[i] , C1 )

∀i = 1, . . . , N
q
quad
alors le polytope de matrices M est stable quadratiquement et γ∞ est un coût
garanti H∞ ;

2) s’il existe N matrices X [i] ∈ S+∗


n et une matrice H ∈ R
n×(2n+q)
solutions opti-
males du problème de programmation semi-définie positive [6.58] d’argument optimal
f ldp1
γ∞ :

min γ∞
" # !
[i]
[i] [i] N∞ (A[i] , C1 )
Rc∞ (X [i] , B1 , D11 ) + sym H <0 [6.58]
−1

∀i = 1, . . . , N
q
f ldp1
alors le polytope de matrices M est stable robustement et γ∞ est un coût garanti
H∞ ;

3) s’il existe N matrices X [i] ∈ S+∗


n et une matrice H ∈ R
n×(3n+q)
solutions
optimales du problème de programmation semi-définie positive [6.59] d’argument
f ldp1
optimal γ∞ :

min γ∞
" # !
[i]
[i] [i] N∞ (A[i] , C1 )
Rd∞ (X [i] , B1 , D11 ) + sym H <0 [6.59]
−1

∀i = 1, . . . , N
Fonctions de Lyapunov 213

4) s’il existe N matrices X [i] ∈ S+∗


n et une matrice G ∈ R
n×n
solutions opti-
males du problème de programmation semi-définie positive [6.60] d’argument optimal
f ldp2
γ∞ :

min γ∞
" # !
[i]
[i] [i] N∞ (A[i] , C1 )  
Rd∞ (X [i] , B1 , D11 ) + sym 0 G <0 [6.60]
−1

∀i = 1, . . . , N
q
f ldp2
alors le polytope discret de matrices M est stable robustement et γ∞ est un coût
garanti H∞ .

R EMARQUE 6.6.– La remarque concernant les caractérisations duales de la norme


H2 ne peut être extrapolée au cas de la norme H∞ . En effet, écrire la condition duale
dans le cas certain ou sur la condition de stabilité quadratique revient à écrire une
condition strictement équivalente. Pour les conditions utilisant les FLDP, cela n’est
pas le cas et il peut être intéressant de distinguer la formulation duale et primale en
considérant les changements suivants :
 
C10 (K)C1 (K) C10 (K)D11 (K) X
 0 
Rc∞ (X, C1 , D11 ) =  ? −γ∞ 1 + D11 (K)D11 (K) 0  [6.61]
? ? 0
 0 0

C1 (K)C1 (K) − X C1 (K)D11 (K) 0
 0 
Rd∞ (X, C1 , D11 ) =  ? −γ∞ 1 + D11 (K)D11 (K) 0 
? ? X
[6.62]
" #
0
A (K)
N∞ (A, C1 ) = N∞ (A, B1 ) = [6.63]
B10 (K)

C OROLLAIRE 6.1.– Les coûts garantis définis aux théorèmes 6.11 et 6.12 vérifient :

γ•f ldp1 ≤ γ•f ldp2 ≤ γ•quad [6.64]

Afin d’illustrer les résultats précédents d’analyse robuste en performance, deux


exemples numériques, respectivement en temps continu et discret, ont été choisis et les
coûts garantis H2 et H∞ sont calculés dans les deux cas. Le premier exemple en temps
continu consiste en l’illustration du système masse-ressort présenté paragraphe 6.2.4.
214 Conception de commandes robustes

Le tableau 6.3 montre très clairement la réduction du pessimisme entre la borne


γ•quad et la borne γ•f ldp ainsi que les différences entre la formulation duale et la pri-
male.

Coût garanti H2 H∞
q
γ•quad 2,288 6 7,112 4
q
γ•quad dual 2,836 9 7,112 4
q
γ•f ldp 1,374 8 3,730 8
q
γ•f ldp dual 1,472 8 3,726 8

Tableau 6.3. Bornes de coût garanti : exemple en temps continu

L’exemple en temps discret est l’exemple 2 repris de [GER 93]. Pour celui-ci,
un gain stabilisant et le coût garanti H2 ont été recalculés en utilisant la condition
proposée dans [GER 93]. Le système bouclé par ce gain est ensuite analysé en termes
de norme H2 et H∞ par les différentes méthodes du théorème 6.12 et les formulations
duales associées. Les résultats sont donnés dans le tableau 6.4.

Coût garanti H2 H∞
q
γ•quad 37,839 6 215,91
q
γ•quad dual 58,986 5 –
q
γ•f ldp1 20,604 3 102,656 6
q
γ•f ldp1 dual 29,005 2 –
q
γ•f ldp2 21,730 6 102,656 6
q
γ•f ldp2 dual 36,074 1 102,656 6

Tableau 6.4. Bornes de coût garanti : exemple en temps discret

Si la réduction du pessimisme est très importante en ce qui concerne le passage


des conditions quadratiques aux conditions avec fonctions de Lyapunov dépendant des
paramètres, cette réduction est moins sensible entre les bornes γ•f ldp1 et γ•f ldp2 , voire
inexistante pour la norme H∞ . Il ne faut toutefois pas en déduire nécessairement que
cela est toujours le cas.
Fonctions de Lyapunov 215

6.4. Synthèse robuste

6.4.1. Introduction

Au centre des préoccupations de l’automatique moderne, le problème de la syn-


thèse de compensateurs robustes vis-à-vis d’incertitudes structurées a suscité un inté-
rêt considérable durant ces dernières années. Cette problématique est toujours large-
ment ouverte puisqu’il n’existe pas actuellement d’approche permettant de l’aborder
dans toute sa généralité tout en garantissant une complexité faible des calculs et des
performances garanties. Ainsi, le cadre de travail de la valeur singulière structurée,
si fécond en analyse, a permis de développer la µ-synthèse fondée sur la méthode
itérative des « D − K »-itérations [ZHO 98]. Il s’agit principalement d’alterner les
étapes d’analyse (recherche de multiplieurs, séparateurs quadratiques ou autres sca-
lings) avec les étapes de synthèse d’un compensateur. Si l’on peut montrer que chaque
étape individuelle peut être ramenée à un problème d’optimisation convexe, la pro-
cédure globale ne possède pas la propriété de convexité. De fait, les méthodes de
synthèse fondées sur l’utilisation de multiplieurs [SAF 93], de séparateurs quadra-
tiques [ELG 00] ou de scalings [ZHO 98], conduisent à des conditions bilinéaires en
les variables recherchées. Dans la majorité des cas, la prise en compte de l’incerti-
tude implique nécessairement une complexité importante. Il existe toutefois un cer-
tain nombre de cas qui permettent de conserver aux problèmes de synthèse robuste
le caractère LMI des conditions proposées. Nous présentons dans ce paragraphe
quelques aspects du problème de synthèse pour lesquels l’emploi de fonctions de
Lyapunov dépendant des paramètres et des nouvelles conditions proposées permet
une avancée significative tout en garantissant une amélioration certaine des résultats
antérieurs.

Il est ainsi toujours possible, dans le cas du retour d’état [BER 89] et dans le
cas du retour de sortie d’ordre plein nominal [SCH 97a], d’utiliser un changement de
variables sur les paramètres du compensateur linéarisant afin de traduire une spécifica-
tion d’analyse en boucle fermée en une spécification correspondante de synthèse, tout
en conservant le caractère LMI des conditions. Les problèmes de DR -stabilisation
robuste par retour d’état, de synthèse de retour d’état à coût garanti H2 et H∞ sont
ainsi abordés dans ce cadre en considérant que le modèle incertain est du type polyto-
pique. Finalement, le problème de synthèse multi-objectif H2 /H∞ dans le cas nomi-
nal est également abordé.

6.4.2. DR -stabilisation robuste par retour d’état

Le problème particulier que nous allons étudier dans ce paragraphe est celui de
la DR -stabilisation d’un polytope de matrices par retour d’état. Nous nous sommes
limités au problème du retour d’état du fait que celui plus général du retour de sor-
tie dynamique d’ordre plein est extrêmement délicat à aborder pour une description
216 Conception de commandes robustes

polytopique de l’incertitude. A notre connaissance, seule l’approche par décomposi-


tion croisée proposée dans [GER 99], qui fournit une solution itérative, permet d’abor-
der ce problème. Le modèle d’état considéré est le suivant :
" # " #" #
δ[x(t)] A B x(t)
= [6.65a]
y(t) C D u(t)
" # " #
δ[x(t)] x(t)
=M M ∈M [6.65b]
y(t) u(t)
On suppose de plus que le vecteur d’état complet est accessible : C = 1 et D = 0.
Ce problème de DR -stabilisation robuste par retour d’état a une solution LMI pour
toutes les régions DR dans le cadre de la stabilité quadratique. Pour réduire le pessi-
misme inhérent à cette solution, nous proposons ici une méthode LMI utilisant des
fonctions de Lyapunov dépendant des paramètres qui s’applique uniquement dans le
cas où la région de placement considérée est telle que R22 > 0. Cette restriction exclut
les régions non bornées telles que le demi-plan ou le secteur et les régions produits de
l’intersection de régions comprenant au moins une région telle que R22 est singulière,
mais elle comprend les régions bornées telles que le disque ou l’ellipse. Sous cette
hypothèse, une condition suffisante de DR -stabilisation robuste peut être définie en
termes d’existence de solutions d’inégalités linéaires matricielles.

T HÉORÈME 6.13.– S’il existe des matrices H ∈ Rn×n , S ∈ Rm×n et N matrices


Xi ∈ S+∗
n telles que ∀i ∈ {i, . . . , N } :
" #
0
sym[R12 ⊗ (Ai H + Bi S)] −R12 ⊗ H 0 + R22 ⊗ (Ai H + Bi S)
R ⊗ Xi + <0
? −R22 ⊗ (H + H 0 )
[6.66]
alors [6.65] est robustement DR -stabilisable par un gain de retour d’état donné par :
K = SH −1 [6.67]

Cette condition est fondée sur l’utilisation de fonctions de Lyapunov dépendant


des paramètres du type polytopique et généralise la condition proposée dans [OLI 99a]
pour les systèmes en temps discret.

Afin d’illustrer ces résultats, nous définissons un polytope de matrices en temps


continu pour lequel nous souhaitons synthétiser un retour d’état robuste plaçant les
pôles dans un disque du demi-plan gauche. Afin de comparer la condition propo-
sée avec celle issue du cadre quadratique, nous choisissons de minimiser le rayon du
disque tangent à la droite verticale définissant un degré donné de stabilité absolue.
Le tracé des pôles en boucle fermée pour une discrétisation du paramètre incertain
et les deux disques associés à la méthode quadratique et à la méthode proposée sont
représentés à la figure 6.4.
Fonctions de Lyapunov 217

Figure 6.4. Placement des pôles dans un disque

6.4.3. Synthèse en temps discret à coût garanti H2 et H∞

L’étape naturelle après celle d’analyse robuste en performance présentée au para-


graphe 6.3.2 est celle de la synthèse de compensateurs optimisant le degré de perfor-
mance suivant un critère choisi. Le cas de la stabilisation dans une région prédéfinie
du plan complexe ayant été abordé dans le paragraphe précédent, il s’agit mainte-
nant de proposer des méthodes de synthèse de compensateurs garantissant une borne
sur les normes H2 ou H∞ du transfert entre les perturbations exogènes et les sor-
ties contrôlées. L’objectif est alors évidemment de choisir le compensateur garantis-
sant une borne minimale définissant ainsi une loi de commande à coût garanti H2
ou H∞ . Comme nous l’avons déjà indiqué dans le paragraphe précédent, pour les
modèles incertains polytopiques, nous nous limitons volontairement au cas de la syn-
thèse par retour d’état. Le modèle incertain est donc caractérisé par la représentation
d’état [6.68] :
    
x(t + 1) A B1 B2 x(t)
    
 z(t)  =  C1 D11 D12   w(t)  [6.68a]
y(t) C2 D21 0 u(t)
   
x(t + 1) x(t)
   
 z(t)  = M  w(t)  M ∈M [6.68b]
y(t) u(t)
On suppose de plus que le vecteur d’état complet est accessible : C2 = 1 et
D21 = 0. Les matrices système en boucle fermée sont alors :
Acl = A + B2 K B1cl = B1
[6.69]
C1cl = C1 + D12 K Dcl = D11
218 Conception de commandes robustes

Nous distinguerons le cas de la commande à coût garanti H2 pour lequel D11 = 0


de celui de la commande à coût garanti H∞ pour lequel D11 peut être non nulle.

T HÉORÈME 6.14 ( SYNTHÈSE À COÛT GARANTI H2 ).– La solution du problème de


minimisation convexe [6.70] défini par :

min γ2
trace(T ) < γ2
" #
[i] [i]
−T C1 H + D12 S
<0 ∀i = 1, . . . , N [6.70]
? Xi − H − H 0
 [i] [i]

−Xi A[i] H + B2 S B1
 
 ? Xi − H − H 0 0  < 0 ∀i = 1, . . . , N
? ? −1

fournit une commande à coût garanti H2 par retour d’état de gain :

K2 = SH −1 [6.71]

Un coût garanti H2 du système en boucle fermée est donné par γ2 .

T HÉORÈME 6.15 ( SYNTHÈSE À COÛT GARANTI H∞ ).– La solution du problème de


minimisation convexe [6.72] défini par :

min γ2
 [i] [i] 
−Xi A[i] H + B2 S B1 0
 [i]0 [i]0 
 ? Xi − H − H 0 0 H 0 C1 + S 0 D12 
 <0 ∀i = 1, . . . , N
 [i]0 
 ? ? −1 D11 
? ? ? −γ∞ 1
[6.72]

fournit une commande à coût garanti H∞ par retour d’état de gain :

K∞ = SH −1 [6.73]

Un coût garanti H∞ du système en boucle fermée est donné par γ∞ .

Nous reprenons l’exemple en temps discret du paragraphe 6.3.2 issu de [GER 93].
Nous avons donc calculé un gain de retour d’état à coût garanti H2 et un autre à
coût garanti H∞ et les coûts garantis H2 et H∞ respectivement associés obtenus par
la résolution des problèmes d’optimisation convexe des théorèmes 6.14 et 6.15. Le
système bouclé par ces deux gains robustes est ensuite analysé à l’aide de méthodes
utilisant les fonctions de Lyapunov dépendant des paramètres. Nous n’avons conservé
Fonctions de Lyapunov 219

que le meilleur des résultats d’analyse dans tous les cas. Les résultats obtenus sont
comparés à ceux obtenus dans [GER 93], fondés sur le calcul d’un gain quadratique-
ment stabilisant.

Coût garanti H 2 synthèse analyse


q
γ2quad 37,839 6 20,604 3
q
γ2f ldp 19,237 4 18,272 3

Tableau 6.5. Bornes de coût garanti : exemple en temps discret

L’amélioration des performances est donc sensible pour la norme H2 et celle H∞ ,


même si cet exemple précis est particulièrement spectaculaire pour cette dernière.

Coût garanti H ∞ synthèse analyse


q
quad
γ∞ 215,91 102,656 6
q
f ldp
γ∞ 69,081 8 67,987 6

Tableau 6.6. Bornes de coût garanti : exemple en temps discret

6.4.4. Synthèse nominale multi-objectif en temps discret

La reformulation des problèmes de stabilité et de performance robuste telle qu’elle


a été présentée jusqu’ici fait apparaître, en analyse et en synthèse, un découplage entre
les matrices système et celles définissant la fonction de Lyapunov dépendant des para-
mètres. Cette caractéristique des conditions proposées permet également d’aborder
le problème de la synthèse nominale multi-objectif et de généraliser le Lyapunov sha-
ping paradigm qui semblait indépassable depuis [SCH 97a]. Considérant un problème
de synthèse multi-objectif décrit par différentes spécifications formulées en termes de
LMI, le Lyapunov shaping paradigm consiste à imposer une fonction de Lyapunov
en boucle fermée unique pour l’ensemble des spécifications. Du fait de l’introduction
des variables additionnelles et du découplage qui s’ensuit, cela n’est plus nécessaire.
Le compensateur unique que l’on souhaite calculer s’exprime directement en fonction
des nouvelles variables qui doivent donc être communes pour toutes les spécifications,
ce qui résulte en un nouveau shaping paradigm [OLI 99c]. Afin de ne pas alourdir ce
chapitre, nous présentons cette technique pour les spécifications H2 et H∞ , étant bien
220 Conception de commandes robustes

entendu que la prise en compte de contraintes de performances additionnelles est pos-


sible si une formulation associée LMI existe. Nous définissons le modèle du système
comme suit :
    
x(t + 1) A B1 B x(t)
    
 z(t)  =  C1 D11 D   w(t)  [6.74]
y(t) C D21 0 u(t)

avec :
" # " #
z∞ w∞
z= w= [6.75]
z2 w2

où w2 ∈ Rm2 et z2 ∈ Rr2 , alors que w∞ ∈ Rm∞ et z∞ ∈ Rr∞ , et conséquemment :


" #
  D∞ D∞2
B1 = B∞ B2 D11 =
D2∞ D2

" #
  C∞
D21 = Dy∞ Dy2 C1 = [6.76]
C2

" #
D∞u
D=
D2u

Nous définissons un compensateur dynamique d’ordre plein défini par sa repré-


sentation d’état :

xK (t + 1) = AK xK (t) + BK y(t)
[6.77]
u(t) = CK xK (t) + DK y(t)

où xK ∈ Rn . Le système en boucle fermée est donc caractérisé par les matrices


suivantes :
" # " #
A + BDK C BCK B1 + BDK D21
Acl = Bcl =
BK C AK BK D21
[6.78]
 
Ccl = C1 + DDK C DCK Dcl = [D11 + DDK D21 ]
Fonctions de Lyapunov 221

On définit les transferts en boucle fermée Tz∞ w∞ (z, K) et Tz2 w2 (z, K). Le pro-
blème de synthèse multi-objectif consiste à déterminer un compensateur dynamique
[6.77] tel que :

min αγ2 + βγ∞

sous

||Tz∞ w∞ ||2∞ < γ∞ [6.79]

||Tz2 w2 ||22 < γ2

Il est à noter que les paramètres α et β sont des paramètres de synthèse permettant
de définir précisément le problème que l’on souhaite traiter : minimisation H2 sous
contrainte H∞ (α = 1, β = 0), minimisation H∞ sous contrainte H2 (α = 0, β = 1)
ou une version mixte de ces problèmes.

Afin de résoudre ce type de problèmes, on applique les résultats d’analyse nomi-


nale fournis dans les théorèmes 6.11-3 et 6.12-4 tout en mettant en œuvre une généra-
lisation du changement de variables linéarisant de [SCH 97a].

Pour cela, on note :


" # " #
X U2 −1 Y V2
G= G = [6.80]
U1 • V1 •

De même, chaque fonction de Lyapunov en boucle fermée associée à chaque spé-


cification est définie par :
" # " # " #
1 0 1 Y P2 J2
P2cl = [6.81a]
Y0 V10 0 V1 J20 H2

" # " # " #


1 0 1 Y P∞ J∞
P∞ = [6.81b]
Y0 V10 cl
0 V1 0
J∞ H∞

Le résultat principal est alors le suivant.

T HÉORÈME 6.16 ([OLI 99 C ]).– S’il existe des matrices T ∈ S+∗ m2 , X ∈ R


n×n
,
Y ∈R n×n
, Â ∈ R n×n
, B̂ ∈ R n×r
, Ĉ ∈ R m×n
, D̂ ∈ R m×r
, P2 ∈ Sn , H2 ∈ S+∗
+∗
n ,
222 Conception de commandes robustes

P∞ ∈ S+∗ +∗
n , H∞ ∈ Sn , J2 ∈ R
n×n
, J∞ ∈ Rn×n , S ∈ Rn×n et deux scalaires
+∗ +∗
γ2 ∈ R et γ∞ ∈ R solutions du problème d’optimisation convexe :

min αγ2 + βγ∞


sous
Trace(T ) < γ2
 
−T C2 X + D2u Ĉ C2 + D2u D̂C
 
 ? P2 − X − X 0 1 + S 0 − J2  < 0
? ? H2 − Y − Y 0
 
−P2 J2 AX + B Ĉ A + B D̂C B2 + B D̂Dy2
 
 ? −H2 Â Y A + B̂C Y B2 + B̂Dy2 
 
 ? P2 − X − X 0 0
1 + S − J2 0  <0
 ? 
 
 ? ? ? H2 − Y − Y 0 0 
? ? ? ? −1
 
−P∞ J∞ AX + B Ĉ A + B D̂C B∞ + B D̂Dy∞ 0
 
 ? −H∞ Â Y A + B̂C Y B∞ + B̂Dy∞ 0 
 
 

 ? ? P∞ − X − X 0 1 + S 0 − J∞ 0 X 0 C∞
0
+ Ĉ 0 D∞u
0 
 <0
 
 ? ? ? H∞ − Y − Y 0 0 0 0 0 0
C∞ + C D̂ D∞u 
 
 0 0 0 0 
 ? ? ? ? −1 D∞ + Dy∞ D̂ D∞u 
? ? ? ? ? −γ∞ 1

[6.82]

alors le compensateur dynamique dont la représentation d’état est définie par les
matrices :
 
AK = V1−T Â − Y (A + B D̂C)X − V10 BK CX − Y BCK U1 U1−1 [6.83a]
BK = V1−T (B̂ − Y B D̂) [6.83b]
CK = (Ĉ − D̂CX)U1−1 [6.83c]
DK = D̂ [6.83d]

résoud le problème de synthèse multi-objectif [6.79].

R EMARQUE 6.7.– Etant donné une solution du problème d’optimisation LMI [6.82],
la reconstruction du compensateur s’effectue en choisissant V1 et U1 matrices non
singulières telles que :

V10 U1 = S − Y X [6.84]

et en remontant par DK les formules [6.83].

Différentes illustrations numériques de cette approche peuvent être retrouvées


dans [OLI 99c].
Fonctions de Lyapunov 223

6.5. Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons montré que l’utilisation d’une nouvelle formulation
des conditions de stabilité et de performance robuste a permis l’élaboration d’un cadre
de travail très intéressant fondé sur les fonctions de Lyapunov dépendant des para-
mètres. La paramétrisation des fonctions de Lyapunov peut être directement reliée
à la modélisation incertaine retenue. Nous n’avons présenté que le cas des modèles
incertains polytopiques convexes et affines, mais tous les résultats présents dans ce
chapitre peuvent être étendus aux modèles incertains de type LFT [PEA 00c]. Il est
nécessaire de faire appel à des arguments de séparation quadratique afin de retrou-
ver des conditions numériquement solvables [IWA 98]. Dans la plupart des cas, les
résultats obtenus avec ces nouvelles conditions sont meilleurs que ceux fournis par
la stabilité quadratique. Les problèmes d’analyse et de synthèse robuste apparaissent
toutefois de complexité différente dans ce cadre de travail. Autant les résultats d’ana-
lyse robuste en stabilité et en performance se sont avérés intéressants, autant on peut
être relativement déçus par les avancées réalisées en synthèse robuste. Il est d’ailleurs
tout à fait remarquable de constater la différence entre modèles en temps discret et
modèles en temps continu. Les résultats obtenus en premier n’ont jusqu’à présent pas
pu être totalement étendus aux modèles en temps continu en ce qui concerne les pro-
blèmes de synthèse. La compréhension des mécanismes exacts de ces différences ou
la levée de celles-ci constitue un champ d’investigations futures d’importance.

6.6. Bibliographie

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Fonctions de Lyapunov 227

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Chapitre 7

Synthèse multicritère par retour de sortie :


utilisation de la paramétrisation de Youla
et de l’optimisation LMI

En 1991, Boyd et Barrat [BOY 91] ont montré l’intérêt des méthodes
multicritères : elles permettent de traiter des problèmes à objectifs contradictoires
particulièrement intéressants car pouvant refléter les compromis propres à la mise en
œuvre d’une loi de commande. Cette vision nécessite une approche de l’optimalité
définie par Pareto il y a plus d’un siècle [PAR 96] et qui se traduit intuitivement par
la figure 7.1 dans le cas de deux objectifs. Toute amélioration de l’un des objectifs
se fait au détriment de l’autre et la solution optimale est un compromis entre les
deux. Pour plus de détails, on se reportera à [BOY 91] dans laquelle ce formalisme
est longuement étudié.

Figure 7.1. Illustration de l’optimalité au sens de Pareto

Les principes fondamentaux exposés dans [BOY 91, DOR 91] conduisent à la
résolution de problèmes d’optimisation de dimension infinie que l’on ne sait pas
aujourd’hui résoudre numériquement. Cependant, des solutions approchées ont été

Chapitre rédigé par Benoît CLÉMENT et Gilles DUC.


230 Conception de commandes robustes

proposées ; on peut les classer selon trois grands axes. Le premier consiste à utiliser
des heuristiques afin de résoudre les problèmes d’optimisation ou bien à considérer
des cas particuliers comme la commande LQG [BER 89, KHA 91a], le placement
de pôles [CHI 96], le retour d’état [BAM 93, BOY 94, FOL 94], ou l’application à
des systèmes à structures particulières (par exemple monovariable) [KHA 91b,
KAM 93, SZN 94, ROT 98]. Le second axe regroupe quant à lui des approches plus
générales (qui utilisent notamment une correction par retour de sorties) ; cependant,
elles introduisent un grand conservatisme1 lié en particulier à l’utilisation d’une
fonction de Lyapunov commune à tous les problèmes [ELG 96a, ELG 96b, FOL 97,
MAS 98, SCH 95, SCH 97]. Enfin, d’autres approches, les plus récentes, constituent
une troisième voie visant à réduire le conservatisme tout en restant exploitables
numériquement [HIN 98, CLE 99, CLE 00, SCH 99]. On notera également que le
problème mixte H2/H∞ tient une place particulièrement importante dans les cas
étudiés. C’est dans la dernière voie que s’inscrit la méthode de synthèse présentée
ici, méthode reposant sur la paramétrisation de Youla [KUC 74, YOU 76]. En effet,
les propriétés fondamentales de cette paramétrisation permettent de transformer le
problème initial en un problème d’optimisation convexe sous contraintes LMI
(inégalités matricielles affines). Ce formalisme est particulièrement adapté à la
synthèse multicritère, car il permet de juxtaposer les critères sans perdre la
convexité ; de surcroît, il existe de nombreuses formulations de critères de synthèse
en termes d’inégalités matricielles [FOL 97, GER 91, SCH 97].

Cependant, une limite importante est inhérente à ce formalisme : la calculabilité


est limitée par l’augmentation de la complexité due à la réduction du conservatisme.
Notons que ce dilemme complexité/calculabilité est récurrent dans la résolution des
problèmes d’optimisation sous contraintes. En effet, lorsque les contraintes sont très
pointues, elle savent parfaitement traduire le cahier des charges d’un ingénieur mais
le temps de calcul risque de ne plus être admissible. Et à l’inverse, une solution
facilement calculable met en jeu des exigences physiques élémentaires ou des
hypothèses trop fortes (conservatives), et ces conditions n’intéresseront pas
l’ingénieur automaticien. Il est donc primordial de toujours garder en tête que tout
problème sera résolu en établissant un compromis entre ces deux notions.

Il est tout de même fondamental de noter que si les méthodes actuelles induisent
un fort degré de conservatisme, ce n’est pas seulement à cause des problèmes de
complexité, mais surtout à cause de points théoriques. En effet, lorsque l’on cherche
à satisfaire simultanément plusieurs critères, les manipulations matricielles que l’on
utilise en fonction de chaque critère sont indépendantes les unes des autres ; ainsi,
l’utilisation de lemmes techniques comme celui d’élimination [BOY 94] ou de
changements de variables [SCH 97] peut conduire à un découplage des contraintes

1. Une propriété est dite conservative si elle est valable de façon exacte sur un ensemble
contenant strictement l’ensemble étudié.
Synthèse multicritère par retour de sortie 231

tel que l’on trouve ensuite une solution pour chaque contrainte prise séparément,
mais que l’on soit incapable d’en obtenir une les satisfaisant toutes. Il est donc
fondamental de conserver le couplage entre les critères. C’est ce point qui a motivé
l’utilisation d’une fonction de Lyapunov unique et donc induit du conservatisme par
le passé ; mais c’est aussi ce point que la paramétrisation de Youla permet de
satisfaire en évitant l’augmentation du conservatisme.

Afin de développer ces différents concepts, ce chapitre se décompose selon trois


grands axes. On commencera par définir l’ensemble des notations et des objectifs qui
seront utilisés tant au niveau des systèmes que des critères. Dans un second temps,
nous nous attacherons au développement d’un certain nombre d’outils théoriques qui
s’inscrivent dans l’élaboration d’un algorithme de synthèse robuste multicritère. Pour
terminer, une application complète sur un benchmark déjà longuement étudié dans la
littérature [LAN 93, LAN 96] sera traitée de deux manières différentes, afin de mettre
en évidence les possibilités de l’approche proposée.

7.1. Notations

Dans ce chapitre, chaque système dynamique est linéaire invariant (LTI) à temps
discret. Considérons un système à commander décrit par les équations d’état
suivantes :

 x[k + 1] = A x[k ] + B1w1 [k ] + B2 w2 [k ] + Bu u[k ]



 z1 [k ] = C1 x[k ] + D11w1 [k ] + D12 w2 [k ] + D1u u[k ]
P
 z 2 [k ] = C 2 x[k ] + D21w1 [k ] + D22 w2 [k ] + D2u u[k ]
[7.1]

 y[k ] = C y x[k ] + D y1w1 [k ] + D y 2 w2 [k ] + D yu u[k ]



p j ×n p j × ni
avec A ∈ R n× n , Bi ∈ R n× ni , C j ∈ R , D ji ∈ R .

Par souci de simplification, on notera ce système de manière matricielle et on


confondra le système et sa représentation d’état [7.2] ainsi que ses fonctions de
transfert en z [7.3] :

 A B1 B2 Bu 
 
 C1 D11 D12 D1u 
P=
D2u 
[7.2]
C D21 D22
 2 
Cy D y1 Dy2 D yu 

Pi → j (z ) = C j (zI − A)−1 B j + D ji [7.3]


232 Conception de commandes robustes

Le problème de synthèse d’une loi commande stabilisante par retour de sortie


dynamique K sur le couple entrée-sortie (u, y) est illustré par la figure 7.2.

Le correcteur K est noté de la même manière que le système P :

A BK 
K =  K  [7.4]
 CK DK 

Figure 7.2. Boucle de correction

On définit d’autre part les transferts en boucle fermée entre l’entrée wi et la


sortie zi , notés Ti , par la relation d’interconnexion :

 A Bi Bu  
   Acl Bi , cl 
Ti (z ) = LFT   C i Dii Diu , K  =   [7.5]
    C i , cl Di , cl 
 Cy D yi D yu   
 

où le sigle LFT signifie transformée fractionnaire linéaire.

La synthèse d’un correcteur a pour but de stabiliser le système P et de lui


conférer certaines performances. La notion de stabilité utilisée ici est celle au sens
de Lyapunov.

DÉFINITION 7.1 (FONCTION DE LYAPUNOV).– On appelle fonction de Lyapunov


toute fonction :

V (x, k ) : R n × N → R + [7.6]

telle que V (0, k ) = 0 et pour laquelle il existe une fonction α : R + → R +


strictement croissante et un scalaire positif d tels que :

∀k > 0 et ∀x / x < d , V (x, k ) ≥ α ( x ) [7.7]

Bien souvent, on choisit une fonction de Lyapunov quadratique :


Synthèse multicritère par retour de sortie 233

V (x, k ) = x[k ]T X x[k ] [7.8]

où X ∈ R n× n est symétrique et définie positive. Dans la suite du chapitre, on


confondra la fonction de Lyapunov V et la matrice X qui lui est associée.

7.2. Définitions de quelques critères

Dans une démarche de synthèse de correcteur, on cherche à obtenir sur chaque


transfert Ti de la boucle fermée une propriété qui se traduira par une contrainte sous
forme d’inégalité matricielle. On formule ainsi le cahier des charges de la synthèse
sous forme d’un problème d’optimisation sous contraintes d’inégalités matricielles.
Nous allons donc nous attacher à établir des liens entre un cahier des charges et des
notions de type H∞, H2 ou α-stabilité, que l’on sait exprimer sous forme matricielle.
Dans le cas général, la formulation à laquelle on aboutit ne correspond pas à un
problème convexe. En effet, les inégalités obtenues ne sont pas linéaires en les
paramètres inconnus, il ne s’agit donc pas de LMI. Les paragraphes suivants
s’attacheront à rendre linéaires ces inégalités. Notons que si nous nous limitons aux
trois critères cités ci-dessus, d’autres peuvent être considérés [FOL 97, SCH 97].

7.2.1. Norme H∞

La norme H∞ des systèmes a été au centre de nombreuses études au cours des


années 1990 [ZHO 96 et références incluses] ; elle a en effet permis de donner un
formalisme unifié pour l’analyse et la synthèse fréquentielle [DUC 99]. Elle permet de
prendre en compte des objectifs de suivi de référence, de stabilité, de « roll-off », de
marges de stabilité et de modelage des différents transferts. Il s’agit d’une norme
induite par la norme euclidienne des signaux, comme le montre la définition suivante.

DÉFINITION 7.2 (NORME H∞).– On appelle norme H∞ du transfert T1 entre w1 et z1


le réel positif défini par :

 z1 
T1 = sup  2  [7.9]

w1 ∈ L 2

w1 ≠ 0 w1

2 

Il existe une caractérisation par inégalité matricielle de la borne supérieure de


cette norme, comme le montre le théorème suivant.
234 Conception de commandes robustes

THÉORÈME 7.1. ([BOY 94]).– Caractérisation matricielle de la norme H∞.


Un système (A, B, C, D) est stable et admet une norme H∞ inférieure à un niveau
γ si et seulement si :

 − X 1 −1 A B 0 

 AT − X1 0 CT 
∃X 1 = X 1T >0/  <0 [7.10]
 B
T
0 −γ I DT 
 0 − γ I 
 C D

7.2.2. Norme H2

La norme H2 d’un système est définie à partir d’une caractérisation entrée/sortie


pour les signaux aléatoires. Elle permet d’intégrer un critère énergétique sur
l’ensemble de la bande de fréquence. La norme H2 est par exemple un bon outil
pour évaluer l’aptitude du système à filtrer les bruits engendrés par les capteurs,
générés par les actionneurs ou bien encore issus de perturbations extérieures.

DÉFINITION 7.3 (NORME H2).– On appelle norme H2 du transfert T2 entre w2 et


z 2 le réel positif défini par :

T2 2


(
= ∫ 0 trace T2 e 2πjν
1
) T (e π ν )  dν

2
2 j
[7.11]

Le calcul algébrique de la norme H2 utilise les grammiens d’observabilité et de


commandabilité du système [MAC 89]. On montre que pour un système (A, B, C, D) :

D + C (zI − A)−1 B
2
= (
trace D T D + B T Lo B = ) (
trace DD T + CLc C T ) [7.12]

où Lc et Lo sont respectivement les grammiens de commandabilité et


d’observabilité, solutions des équations de Lyapunov suivantes :

 ALc AT − Lc + BB T = 0
 T [7.13]
 A Lo A − Lo + C T C = 0

De plus, il existe une caractérisation par inégalités matricielles de la borne


supérieure de cette norme, comme le montre le théorème suivant.
Synthèse multicritère par retour de sortie 235

THÉORÈME 7.2 (CARACTÉRISATION MATRICIELLE DE LA NORME H2).– Un système (A,


B, C, D) est stable et admet une norme H2 inférieure à un niveau γ si et seulement
si :

 AT X 2 A − X 2 + C T C < 0
∃X 2 = X 2 T > 0 / 
( )
[7.14]
trace D T D + B T X 2 B < γ 2

L’utilisation du lemme de Schur et de manipulations matricielles conduit à une


caractérisation sous forme d’inégalités matricielles :

 − X −1 A 0 
 2
 AT − X2 CT  < 0 [7.15]
 
 0 C −I
 

 − X −1 B 0 
 2
 BT −Y DT  < 0 [7.16]
 
 0 D −I
 
trace(Y ) < γ 2 [7.17]

7.2.3. Propriété d’α-stabilité

L’α-stabilité est une propriété des systèmes qui permet de garantir la rapidité de
convergence vers un point d’équilibre. Ce critère peut aussi être vu comme une
contrainte de placement de pôles dans un disque de rayon α .

DÉFINITION 7.4 (α-STABILITÉ).– L’état x d’un système est dit α-stable ( α ∈] 0 ; 1[ )


si et seulement si pour une entrée nulle et pour toute condition initiale x[0] , la
relation suivante est vérifiée :

(
lim α − k x[k ]
k →∞
)= 0 [7.18]

De manière équivalente, on peut dire que le module des valeurs propres de la


matrice d’évolution est inférieur à α .

Il existe une caractérisation matricielle de cette propriété.


236 Conception de commandes robustes

THÉORÈME 7.3 (CARACTÉRISATION MATRICIELLE DE L’α-STABILITÉ).– Un système


( A, B, C , D) est α-stable si et seulement si :

α 2 X 3 AT 
∃X 3 = X 3T > 0 /  >0 [7.19]
 A X 3 −1 

Il est important de noter qu’il s’agit d’une notion très contraignante. En effet, il
n’est pas possible de l’imposer sur un sous-ensemble des valeurs propres du
système.

7.2.4. Modification par congruence

Nous venons de présenter les caractérisations classiques des normes H2 et H∞ en


temps discret. Cependant, on remarque que cette représentation est non linéaire en
paramètres. Dans le cas de l’analyse, une application du lemme de Schur suffit à
lever les non-linéarités. Lors de la synthèse, cette méthode conduit à des termes
d’ordre 2, qu’il est plus facile par la suite d’éliminer que des termes d’ordre 3 ou
des inverses.

Ainsi, nous allons adopter un formalisme différent, qui peut sembler moins
élégant au sens de la minimalité en symbole mais ne faisant intervenir que des
termes bilinéaires que l’on s’attachera ensuite à faire disparaître pour mener à bien
la synthèse d’une loi de commande.

Le lemme suivant rappelle une propriété des matrices définies positives.

LEMME 7.1 (POSITIVITÉ ET CONGRUENCE).– Soient deux matrices A ∈ C n× n et


C ∈ C n× m , si A > 0 , alors C A C ≥ 0 .

De plus, C ∗ A C > 0 si et seulement si rang (C ) = m (C est de rang plein).

Utilisons ce résultat avec les matrices Π1 , Π 2 et Π 3 suivantes pour les


caractérisations respectives des normes H2, H∞ et de l’α-stabilité :

 X1 0 0 0 
   X2 0 0
 0 I 0 0   I 0 
Π1 =  ; Π2 =  0 I 0  ; Π 3 =   [7.20]
0 0 I 0  0 0 X 3 

 0 0 0 I
  0 I 
 
Synthèse multicritère par retour de sortie 237

REMARQUE 7.1.– Les matrices Π1 , Π 2 et Π 3 sont de rang plein car définies


positives.

La modification par congruence en multipliant à gauche et à droite les inégalités


matricielles [7.10] par Π1 et Π1T , [7.15], [7.16] par Π 2 et Π 2T , et [7.19] par Π 3
et Π 3T se traduit immédiatement par le théorème suivant.

THÉORÈME 7.4 (PROBLÈME MULTICRITÈRE).– En utilisant les notations précédentes,


le système LFT (P , K ) de la figure 7.2 vérifie les trois propriétés suivantes :

T1 ∞
< γ 1 , T2 2
< γ 2 et LFT (P , K ) α-stable [7.21]

si et seulement s’il existe quatre matrices symétriques définies positives X 1 , X 2 ,


X 3 et Y telles que les inégalités suivantes soient vérifiées :

 − X1 X 1 Acl X 1 B1, cl 0 
 
 Acl T X 1 − X1 0 T
C1, cl 
 <0 [7.22]
T
 B1, cl X 1 0 − γ 1I D1, cl T 
 0 C1, cl D1, cl − γ 1 I 

 − X2 X 2 Acl 0 
 T 
 Acl X 2 − X 2, cl T
C 2, cl  < 0 [7.23]
 
 0 C 2, cl −I 

 − X2 X 2 B2, cl 0 
 
 B2, cl T X 2 −Y T
D2, cl  < 0 [7.24]
 
 0 D2, cl −I 

trace(Y ) < γ 2 2 [7.25]

α 2 X Acl T X 3 
 3 >0 [7.26]
X A X 3 
 3 cl
238 Conception de commandes robustes

7.3. Paramétrisation de Youla

Après avoir rappelé brièvement les notions de boucle bien posée et de stabilité
interne, cette section présente la paramétrisation de Youla. Il s’agit de paramétrer de
manière complète la famille des correcteurs stabilisant pour un système donné. Nous
présenterons dans un premier temps les concepts en utilisant le formalisme des
fonctions de transfert (pour son aspect historique et sa facilité de présentation), puis
nous verrons l’intérêt de la formulation dans l’espace d’état dans certains cas
particuliers. On fera l’hypothèse que P est stabilisable par u et détectable par y.

7.3.1. Boucle bien posée et stabilité interne

La stabilité entrée-sortie utilisée avec le formalisme des fonctions de transfert


n’est pas équivalente à la stabilité au sens de Lyapunov de part les possibles
compensations entre pôles et zéros. On peut néanmoins relier la stabilité de la
représentation d’état et celle par matrice de transfert en considérant une matrice de
transfert augmentée. Cette analyse a été formalisée par Desoer et Chan dans
[DES 75] puis largement utilisée dans la littérature.

On introduit deux entrées fictives v1 et v2 comme l’indique la figure 7.3, que


l’on peut interpréter comme des bruits d’actionneurs et de capteurs.

Figure 7.3. Stabilité interne

On peut alors définir les notions de boucle fermée bien posée et de stabilité
interne en partitionnant la matrice de transfert de P sous la forme suivante :

P P12 
P =  11  [7.27]
 P21 P22 

La matrice de transfert augmentée de la boucle fermée formée par


interconnexion de P et K est :
Synthèse multicritère par retour de sortie 239

 z   P11 + P12 K (I − P22 K ) P21 P12 (I − KP22 )−1 P12 (I − KP22 )−1 K  w 
−1
   
u  =  K (I − P22 K )−1 P21 (I − KP22 )−1 (I − P22 K )−1 K  v1  [7.28]
 y   (I − P22 K )−1 P21 (I − P22 K )−1 P22

(I − P22 K )−1 P22 K  v2 
  

On lit directement que cette matrice existe si et seulement si (I − P22 K ) et


(I − KP22 ) sont inversibles. En remarquant que :

(I − P22 K )−1 = I + P22 (I − KP22 )−1 K [7.29]

il suffit qu’un seul des transferts soit inversible. Cette condition traduit la notion
d’interconnexion bien posée. On peut alors définir la stabilité du système.

DÉFINITION 7.5 (STABILITÉ INTERNE).– Un correcteur K stabilise le système P si


l’interconnexion est bien posée et si les neuf termes de la matrice de transfert [7.28]
sont stables.

En tenant compte des propriétés de détectabilité et de stabilisabilité, on montre


[DES 75] que l’on peut réduire le transfert précédent à :

 u   (I − KP22 )−1 (I − KP22 )−1 K  v1 


  = [7.30]
 y   (I − P22 K ) P22
−1
(I − P22 K )−1 P22 K  v2 
Le correcteur K stabilise le système P si et seulement si les quatre termes de
cette matrice de transfert sont définis et stables.

7.3.2. Paramétrisation de Youla

Avant de définir avec précision la paramétrisation de l’ensemble des correcteurs


garantissant la stabilité interne de l’interconnexion de P et K , nous allons insister
sur l’évolution des idées.

L’idée générale de paramétrisation de l’ensemble des correcteurs stabilisant un


système linéaire est née de la constatation suivante : pour un système P stable,
l’interconnexion de la figure 7.4 reste stable pour tout système Q stable.

Cette paramétrisation, déjà connue dans les années 1950 en commande optimale
[RAG 58], a été reprise dans les années 1970 par Kucera [KUC 74] et Youla
[YOU 76] : c’est le nom de ce dernier que l’histoire a retenu.
240 Conception de commandes robustes

Figure 7.4. Principe de la paramétrisation de Youla

La forme générale de la paramétrisation a été finalement énoncée par Desoer et


al. [DES 80], en utilisant les représentations fractionnaires copremières [VID 85].
Des interprétations avec une représentation d’état ont été mises en place en 1984 par
Doyle [DOY 84].

La définition de la paramétrisation de Youla correspond au théorème suivant


dont on trouve une démonstration dans [MAC 89].

THÉORÈME 7.5 (FAMILLE DES CORRECTEURS STABILISANTS).– Soit


−1 ~ −1 ~
P = NM = M N des factorisations premières à gauche et à droite de P , où
~ ~
M, N, M et N sont des matrices de transfert stables. Soit de même
~ ~
K 0 = U 0V0 −1 = V0 −1U 0 les factorisations premières d’un correcteur stabilisant P
qui de plus vérifient :

 V~0 ~
− U 0  M U0   I 0
 ~ ~  =  [7.31]
− N
 M  N V0   0 I 

Pour tout système stable Q de dimensions adéquates, on définit :

U = U 0 + MQ [7.32]

V = V0 + NQ [7.33]

~ ~ ~
U = U 0 + QM [7.34]

~ ~ ~
V = V0 + QN [7.35]

~ ~
Sous ces hypothèses, on vérifie l’égalité UV −1 = V −1U et le correcteur
~ ~
K = UV −1 = V −1U est stabilisant pour P.
Synthèse multicritère par retour de sortie 241

De plus pour tout correcteur stabilisant il existe des factorisations premières du


type [7.31] à [7.35].

Ce théorème nous donne le résultat fondamental : une fois connu un correcteur


stabilisant quelconque, on est capable de générer la famille de tous les correcteurs.
De plus, celle-ci peut être représentée par la LFT de la figure 7.5, dans laquelle
l’expression générale du système J est la suivante :

 K ~
V0 −1 
J =  −01 [7.36]
V − V0 −1 N 
 0

Figure 7.5. Forme générale de la paramétrisation de Youla

7.3.3. Correcteur de type observateur/retour d’état

La figure 7.5 définit la famille des correcteurs stabilisant comme


l’interconnexion d’un système J et d’un système stable Q. Doyle [DOY 84] est le
premier à avoir montré que cette famille pouvait être obtenue à partir d’un
correcteur du type observateur/retour d’état.

Dans le cas général, le système J est d’ordre n + n0 , en notant n l’ordre du


système P et n0 celui du correcteur stabilisant initial. Dans le cas particulier où
K 0 est sous la forme observateur/retour d’état, il est possible de réduire l’ordre de
J à n. En effet, on montre par le calcul que J admet dans ce cas comme
représentation d’état :

 A − Bu K c − K f C y Kf Bu 
 
J = − Kc 0 I nu  [7.37]
 
 − Cy I ny 0 
 

où K c et K f sont respectivement les gains du retour d’état et de l’observateur


(figure 7.6).
242 Conception de commandes robustes

Figure 7.6. Paramétrisation de Youla d’un correcteur par retour d’état estimé

Nous avons donc une démarche constructive de mise sous forme de Youla d’un
correcteur de type observateur/retour d’état. Il est alors légitime de se poser la
question de savoir si n’importe quel correcteur admet une représentation sous la
forme observateur/retour d’état. Une réponse positive permettrait de limiter l’ordre
du système d’interconnexion J. La section suivante est dédiée à l’étude de cette
question.

7.4. Equivalence d’un correcteur avec une structure observateur/retour d’état

Les correcteurs de type observateur/retour d’état ont l’avantage de pouvoir être


implantés de manière simple dans un contexte industriel avec des contraintes
d’embarquabilité. De plus, de tels correcteurs ont des interprétations modales simples.
Ce sont ces raisons qui ont motivé les travaux qui visent à trouver une structure
équivalente observateur/retour d’état pour un correcteur quelconque. Les travaux de
Schumacher [SCH 80] montrent qu’en général, tout correcteur peut être mis sous la
forme retour d’état estimé ; Bender et Fowell [BEN 85, FOW 85] ont formulé une
méthode simple de transformation pour un correcteur d’ordre égal à celui du système
de synthèse ; les derniers travaux sur le sujet sont ceux d’Alazard et Apkarian
[ALA 99].

Dans notre cas, l’équivalence entre les structures est motivée par la réduction de
l’ordre du système d’interconnexion J et l’extraction naturelle d’un paramètre de
Youla, point-clé de notre méthode.

Soit un correcteur K d’ordre k stabilisant le système P d’ordre n et défini par


les équations d’état suivantes :
Synthèse multicritère par retour de sortie 243

A BK 
K =  K  [7.38]
 CK DK 

On cherche à mettre le correcteur K sous la forme Kˆ = LFT ( J , Q ) (figure 7.7),


qui est équivalente à la structure de la figure 7.6 lorsque J est décrit par [7.37].

Dans le cas général d’un paramètre de Youla dynamique, la représentation d’état


correspondant à la structure de la figure 7.6 s’écrit :

 A − Bu K c − K f C y − Bu DQ Bu CQ K f + Bu DQ 
 
K̂ =  − BQ C y AQ BQ  [7.39]
 
 − K c − DQ C y CQ DQ 

où ( AQ , BQ , CQ , DQ ) constitue une représentation d’état de Q .

La question est donc de trouver les matrices de gain K c , K f et une


représentation d’état de Q telles que les représentations d’état de K et K̂ soient
équivalentes. Cherchons pour cela un changement de base T tel que :

 xˆ 
xK = T   [7.40]
 xQ 

Figure 7.7. Equivalence avec un correcteur de type observateur/retour d’état


utilisant la paramétrisation de Youla

L’équivalence est obtenue quand les égalités matricielles suivantes sont


vérifiées :
244 Conception de commandes robustes

 −1  A − B u K c − K f C y − Bu D Q Bu C Q 
T AK T =  
  − BQ C y AQ 
  K f + B u DQ 
−1
 T BK =  

[7.41]
  BQ 


CK T (
= − K c − DQ C y CQ )
 DK = DQ

Nous nous limiterons au cas où le correcteur initial est d’ordre égal à celui de P.
Alors, le système Q se réduit à la matrice de gain statique Q = DQ. Les égalités
précédentes deviennent :

T −1 AK T = A − Bu K c − K f C y − Bu QC y

T −1 B K = K f + Bu Q
 [7.42]
C K T = − K c − QC y

 D K = Q

La détermination de Q est immédiate et celle de la paire ( K c , K f ) est


subordonnée à T. Les substitutions de Q, K c et K f dans la première équation
conduisent à une équation de Riccati généralisée d’inconnue T :

AK T − T (A + BDK C ) − TBC K T + BK C = 0 [7.43]

On remarquera que malgré les substitutions, on garde un raisonnement par


équivalence : à partir de T et Q, on est capable de reconstruire la paire ( K c , K f ).

Pour la résolution de cette équation de Riccati généralisée, on utilise les


méthodes classiques des espaces invariants [BIT 91]. On définit l’hamiltonien H
de l’équation [7.43] :

 A + Bu D K C y Bu C K 
H =  
 [7.44]
 BK C y AK 

L’équation [7.43] s’écrit alors sous la forme suivante :

I 
(− T I n ) H  n  = 0 [7.45]
T 
Synthèse multicritère par retour de sortie 245

Soient Λ = diag (λ1 " λn ) une matrice formée à partir de n valeurs propres de
H et U = (u1 " u n ) la matrice des vecteurs propres associés :

HU = UΛ [7.46]

En partitionnant U de la manière suivante :

U 
U =  1  [7.47]
U 2 

On peut vérifier que T = U 2U1−1 est solution du problème et que les n valeurs
propres affectées à la matrice A − Bu K c (qui correspondent à la dynamique de
retour d’état) sont les valeurs propres retenues dans Λ (par voie de conséquence,
les n valeurs propres non retenues dans Λ sont celles de la matrice A − K f C y qui
correspond à la dynamique de reconstruction).

Cette méthode de résolution des équations de Riccati impose de choisir une


partition des valeurs propres pour les espaces invariants (l’un lié à l’estimation,
l’autre à la commande). Afin de réduire ce choix, on peut tenir compte de ces
quelques remarques d’ordre général [ALA 99] :
– les espaces invariants seront choisis autoconjugués afin d’obtenir des matrices
de gain réelles, c’est-à-dire que l’on ne doit pas séparer les paires de pôles
complexes conjugués ;
– les valeurs propres non commandables de ( A, Bu ) doivent être choisies pour
éviter que U1 soit singulière ;
– les valeurs propres non observables de ( A, C y ) doivent être écartées pour
éviter que U 2 soit singulière ;
– les n valeurs propres retenues sont en général les plus proches de celles du
système en boucle ouverte pour que les dynamiques du retour d’état soient
dominantes.

7.5. Optimisation du paramètre de Youla

Cette section est consacrée à l’exploitation des propriétés de la paramétrisation


de Youla. En effet, celle-ci permet d’exprimer un problème de synthèse multicritère
par retour statique de sortie sous forme de problème d’optimisation convexe.
246 Conception de commandes robustes

7.5.1. Propriété de supplémentarité

La propriété fondamentale de la paramétrisation de Youla exprime que le


système G formé par l’interconnexion de P et J (figure 7.5) a un transfert
rigoureusement nul « vu » du couple entrées/sorties (uˆ , yˆ ) :

PROPRIÉTÉ 7.1.– Soit une représentation d’état du système G défini sur la figure 7.5 :

 AG BG Buˆ 
 
G =  CG DG DGu  [7.48]
 
 C yˆ D yˆG D yˆuˆ 

alors la propriété suivante est vérifiée :

C ˆ (zI − A )−1 B ˆ = 0


y G u
 [7.49]
 yˆuˆ
D = 0

Cette propriété exprime le fait que les sous-espaces non commandables et non
observables de G sont supplémentaires dans l’espace d’état. Ainsi, elle permet
d’obtenir une représentation d’état qui soit simultanément sous forme commandable
et observable. Le changement de base correspondant permet d’obtenir le
partitionnement suivant avec une matrice d’état sous forme triangulaire :

 A1 A3 B1,1 B2,1 Buˆ 


 
 0 A2 B1,2 B 2, 2 0 

G =  1,1
C C D11 D12 D1uˆ  [7.50]
1, 2 
 C 2,1 C 2,2 D21 D22 D2uˆ 
 0 C yˆ D yˆ1 D yˆ 2 0 

REMARQUE 7.2.– Les matrices Dij de G sont les mêmes que celles du système à
régler P pour deux raisons :
– la structure particulière du transfert direct de J ne génère aucune transmission
directe de w vers z ;
– le changement de base trigonalisant n’affecte pas non plus ces transmissions
directes.
Synthèse multicritère par retour de sortie 247

7.5.2. Linéarisation des inégalités matricielles

Soit G le système [7.50], asymptotiquement stable, et Q un retour statique de


sortie. Nous allons montrer qu’il existe une formulation LMI au problème de
commande H2/H∞. Ce résultat est obtenu par changement de variables et
manipulations matricielles.

Considérons les caractérisations matricielles des normes H2 et H∞ du système


bouclé :

A Bcl 
Gcl = LFT(G, Q ) =  cl  [7.51]
 Ccl Dcl 

où Q est un retour statique de sortie ; la représentation d’état du système bouclé a la


forme suivante :

 A1 A3 + Buˆ QC yˆ B1,1 + Buˆ QD yˆ1 B2,1 + Buˆ QD yˆ 2 


 
 0 A2 B1,2 B 2, 2 
=
D12 + D1uˆ QD yˆ 2 
Gcl [7.52]
C1,1 C1,2 + D1uˆ QC yˆ D11 + D1uˆ QD yˆ1
 
 C 2,1 C 2,2 + D2uˆ QC yˆ D21 + D2uˆ QD yˆ1 D22 + D2uˆ QD yˆ 2 

Les caractérisations par inégalités matricielles des normes H∞ et H2 exposées au


paragraphe 7.2.4 et appliquées à Gcl ne sont pas linéaires en les paramètres (les
fonctions de Lyapunov et le gain Q ). Par exemple, le terme X 1 AGcl fait intervenir
un terme où intervient dans le même produit X 1 et Q. Il est donc nécessaire de
modifier le problème pour le transformer en un problème d’optimisation convexe.

Soit X i la fonction de Lyapunov associée au critère i (H∞ ou H2). On la


partitionne dans les mêmes proportions que la matrice d’état de G :

W Zi  A A3 
X i =  Ti  selon AG =  1  [7.53]
 Zi Yi  0 A2 

et on définit le changement de variable bijectif suivant :

 R n× n → R n× n

L  Wi Z i  R Si   Wi −1 − Wi −1Z i  [7.54]
 T  6  Ti  = 
 Z i Yi   Si Ti   − Z i T Wi −1 Yi − Z iT Wi −1Z i 
248 Conception de commandes robustes

ainsi que la matrice :

R 0
M i =  Ti  [7.55]
 Si I 

En appliquant au système bouclé G cl les caractérisations matricielles des


critères décrites au paragraphe 7.2.4 et en utilisant les propriétés de congruence, on
obtient des formulations LMI.

Problème H∞
En utilisant la congruence par la matrice Π1 = diag (M1 M1 I I ) , on
obtient à partir de [7.22] :

 − R1 0 A1R1 A1S1 − S1 A2 + A3 + Buˆ QC yˆ B1,1 + Buˆ QD yˆ1 − S1B1,2 0 


 
 0 − T1 0 T1 A2 T1B1, 2 0 
 
 * * − R1 0 0 R1T C1,1T 
 * T<0
* 0 − T1 0 C1,2 + C yˆ Q D1uˆ + S1 C1,1
T T T T T
 
 * * * * − ã 1I D11T + D yˆ1T QT D1uˆ T 
 
 * * * * * − ã 1I 
[7.56]

Problème H2
En utilisant la congruence par les matrices Π 21 = diag (M 2 M 2 I ) et
Π 22 = diag (M 2 I I ) , on obtient à partir de [7.23], [7.24] et [7.25] :

 − R2 0 A1 R 2 A1 S 2 − S 2 A2 + A3 + Buˆ QC yˆ 0 
 
 0 − T2 0 T2 A2 0 
 * * − R2 0 R 2 T C 2,1T <0
 
 * * 0 − T2 T T T T T
C 2,2 + C yˆ Q D 2uˆ + S 2 C 2,1T 
 
 * * * * −I 
[7.57]

 − R2 0 B2,1 + Buˆ QD yˆ 2 − S 2 B2,2 0 


 
 0 − T2 T2 B2,2 0 
  < 0 [7.58]
 * * −Y D22 T + D yˆ 2 T Q T D2uˆ T 
 * −I 
 * * 

trace(Y ) < γ 2 2 [7.59]


Synthèse multicritère par retour de sortie 249

Ces différentes inégalités sont effectivement linéaires en les paramètres R1 , S1 ,


T1 , Q et γ 1 pour le problème H∞ et R 2 , S 2 , T2 , Y , Q et γ 2 2 pour le problème
H2. Les deux problèmes sont couplés par le retour statique de sortie Q et utilisent
des fonctions de Lyapunov indépendantes. Nous avons ainsi montré l’existence
d’une formulation LMI au problème de commande H2 / H∞ et explicité les LMI
correspondantes.

REMARQUE 7.3.– Il est important de noter que si l’on souhaite intégrer une
contrainte d’α-stabilité, il est nécessaire de l’introduire dans la synthèse du
correcteur initial. En effet, de par la propriété fondamentale de la paramétrisation de
Youla, les pôles de G ne sont pas modifiés par l’interconnexion de Q.

7.5.3. Augmentation des degrés de liberté

Si l’on souhaite introduire un retour dynamique de sortie pour augmenter le


nombre de degrés de liberté pour l’optimisation et donc réduire le conservatisme de
la méthode, on choisit comme paramètre de Youla un système dynamique de
représentation d’état :

 AQ BQ 
Q =   [7.60]
 CQ DQ 

Dans ce cas, on se ramènera au cas précédent d’un retour statique de sortie en


fixant la paire ( AQ BQ ) − ou la paire ( AQ C Q ) . Ce choix se justifie en
remarquant que les dynamiques de Q apparaissent directement dans celle de la
boucle fermée. Par ailleurs, la représentation d’état de la boucle fermée en incluant
les dynamiques de Q répond bien à la structure nécessaire à la méthode exposée.
On a en effet :

 A1 A3 0r×q B1,1 B2,1 Buˆ 


 
 0 (n − r )× r A2 0 B1,2 B 2, 2 0 (n − r )× nu 
 0 BQ C yˆ AQ BQ D yˆ1 BQ D yˆ 2 0 q × nu 
 q× r 
Gaug =  C1,1 C1,2 0 D11 D12 D1uˆ  [7.61]
 
 C 2,1 C 2, 2 0 D21 D22 D2uˆ 
 0q× r 0 q × (n − r ) Iq 0 0 0 
 
 0n ×r C yˆ 0 ny × q D yˆ1 D yˆ 2 0 
 y 
250 Conception de commandes robustes

et le paramètre Q de la figure 7.5 est formellement remplacé par la matrice


(CQ DQ ) .

Du point de vue pratique, il est nécessaire de fixer la paire ( AQ BQ ) ;


autrement dit, il faut que l’information contenue dans (CQ DQ ) soit suffisante
pour caractériser le système Q tout entier. Une formulation qui répond bien à cette
demande est de considérer Q comme un filtre à réponse impulsionnelle finie (filtre
FIR). La représentation d’état de Q est alors la suivante :

 0 I (r −1)× n y 0 
 
Q= 0 0 I ny  [7.62]
Q Qr −1 " Q1 Q0 
 r

ce qui correspond à introduire r retards sur chaque sortie (figure 7.8).

La sortie ŷ[k ] est remplacée par ~


y [k ], avec :

 yˆ [k ] 
 
y [k ] =  # 
~ [7.63]
 yˆ [k − r ]
 

Figure 7.8. Système augmenté par une batterie de retards

Cette méthode a l’avantage d’être très simple à implémenter. On pourra


s’interroger dans d’autres travaux sur l’importance du choix de la dynamique de Q .
Synthèse multicritère par retour de sortie 251

7.6. Algorithme
L’utilisation des concepts développés dans les paragraphes précédents aboutit à
une méthode concrète de synthèse de loi de commande satisfaisant simultanément
un ensemble de critères.

La méthode se décompose en quatre étapes :


– synthèse initiale : synthétiser un correcteur initial en utilisant les algorithmes
classiques tels que les méthodes LQG, optimisation H2 ou H∞ ou bien encore
d’autres algorithmes de synthèse multicritère malgré le conservatisme induit ;
– paramétrisation observateur/retour d’état : résoudre l’équation de Riccati
[7.43] pour construire le système d’interconnexion J ;
– optimisation convexe : choisir l’ordre du paramètre de Youla Q et résoudre le
problème d’optimisation sous contraintes LMI décrit en 7.5.2 ;
– reconstruction du correcteur : le correcteur final est obtenu par interconnexion
des systèmes J et Q.

REMARQUE 7.4.– D’un point de vue pratique, on peut supposer que la qualité des
résultats dépend du correcteur initial. La première étape de la synthèse peut donc faire
appel à une synthèse conservative utilisant une fonction de Lyapunov unique
[SCH 97], ou une synthèse monocritère garantissant déjà un des objectifs de synthèse
[CLE 99].

7.7. Application à un bras flexible

Dans cette section, nous proposons une évaluation de cet algorithme en


considérant un benchmark choisi dans les années 1990 par le groupe de recherche
Automatique du CNRS [LAN 96]. Le problème est traité par deux approches
différentes, qui mettent en évidence les diverses possibilités de la méthode.

7.7.1. Le système étudié

Le système est un bras flexible, d’un mètre de longueur, constitué de deux lames
d’aluminium reliées entre elles par dix pontons régulièrement espacés. Ce bras est fixé
par une de ses extrémités à un axe vertical. L’axe peut être mis en rotation par un
moteur à courant continu, qui fait décrire au bras un mouvement circulaire dans le plan
horizontal (figure 7.9). L’extrémité libre du bras peut recevoir une charge dont la
masse varie de 0 g à 75 g et la position de cette extrémité est mesurée par un capteur à
infrarouge. Ce système a donc pour entrée la commande u de l’asservissement
analogique de la position du moteur, et pour sortie y la position de l’extrémité libre
du bras, mesurée par le capteur.
252 Conception de commandes robustes

Figure 7.9. Bras flexible

La modélisation tient compte des trois premiers modes de résonance qui sont très
peu amortis. La fréquence de Shannon a donc été choisie entre le 3e et le 4e mode.
La période d’échantillonnage est Te = 70 ms. Les modèles identifiés sont d’ordre 6
[LAN 96] et correspondent à la fonction de transfert :

( )
H z −1 =
b2 z −2 + b3 z −3 + b4 z −4 + b5 z −5 + b6 z −6
1 + a1 z −1 + a2 z − 2 + a3 z − 3 + a4 z − 4 + a5 z − 5 + a6 z − 6
[7.64]

Les coefficients et les réponses fréquentielles des trois modèles sont donnés dans
le tableau 7.1 et la figure 7.10 respectivement.

Coefficients Charge 0 g Charge 25 g Charge 75 g


a1 – 1,95254 – 2,12025 – 2,30990
a2 1,38492 1,50938 1,73794
a3 – 0,57667 – 0,41965 – 0,46104
a4 0,81758 0,67078 – 0,72261
a5 – 1,33320 – 1,28873 – 1,33301
a6 0,76063 0,71391 0,68082
b2 0,04235 0,03682 0,03531
b3 – 0,04359 0,00961 – 0,01520
b4 – 0,16986 – 0,10102 – 0,12648
b5 0,42575 0,28427 0,27310
b6 – 0,19068 – 0,12933 – 0,13373

Tableau 7.1. Paramètres des trois modèles


Synthèse multicritère par retour de sortie 253

7.7.2. Spécifications

Les études faites au laboratoire d’automatique de Grenoble ont montré qu’il était
nécessaire de calibrer la fonction de sensibilité perturbation-sortie [7.65]
essentiellement pour des raisons de robustesse par rapport aux variations des
paramètres :

S = (I − KH )−1 [7.65]

De même, la fonction de sensibilité perturbation-commande [7.66] doit être


calibrée pour des raisons de sollicitation de l’actionneur et de robustesse vis-à-vis
des dynamiques hautes fréquences :

K S = K (I − KH )−1 [7.66]

Figure 7.10. Représentation de Bode des trois modèles de bras souple

Le régulateur doit être calculé de façon à tenir les spécifications suivantes pour
les trois charges :
1) maximum de la fonction de sensibilité perturbation-sortie :
- S ≤ 6 dB (soit une marge de module supérieure à 0,5) ;
2) maximum de la fonction de sensibilité perturbation-commande :
254 Conception de commandes robustes

- KS ≤ 15 dB pour les fréquences comprises entre 0 et 0,4 fs (où f s est la


fréquence de Shannon),
- K S ≤ 10 dB pour les fréquences comprises entre 0,4 fs et 0,5 fs ;
3) marge de retard ∆τ ≥ Te = 70 ms ;
4) erreur statique nulle ;
5) face à un échelon de consigne :
- temps de montée à 90 % de la valeur finale inférieur à 1,8 s,
- temps d’établissement à 2 % inférieur à 4,8 s ;
6) face à un échelon de perturbation appliqué en sortie :
- temps de rejet de la perturbation inférieur à 2,8 s,
- intégrale du module de l’écart à la consigne normalisé avec l’amplitude de
la perturbation inférieure à 1,5 s.

7.7.3. Synthèse multicritère : première approche

La robustesse vis-à-vis de la charge est recherchée en imposant une contrainte


d’α-stabilité : outre qu’elle permet d’assurer une certaine rapidité à la boucle
fermée, elle évite surtout les compensations pôle-zéro entre le correcteur et le
modèle de synthèse, dont on sait qu’elles posent des problèmes de robustesse sur les
structures flexibles. Le correcteur est calculé en utilisant le modèle à vide. Les
résultats obtenus sur les trois modèles sont donnés dans le paragraphe suivant.

La figure 7.11 donne le schéma de synthèse qui a été choisi : le suivi de


consigne est assuré par l’ajout explicite d’un intégrateur dans la boucle. Le
correcteur, qui a trois entrées, réalise donc une correction à deux degrés de liberté
avec action intégrale. Des pondérations constantes W1 = 0,5 et W2 = 0,2 sont
utilisées pour traduire les spécifications sur S et K S en objectifs H∞.

Figure 7.11. Schéma de synthèse (première approche)


Synthèse multicritère par retour de sortie 255

Comme indiqué dans l’algorithme de la section 7.6, la synthèse consiste en deux


étapes successives basées sur l’optimisation LMI :
– la synthèse initiale est faite à partir d’une méthode multicritère n’utilisant
qu’une seule fonction de Lyapunov. Les critères sont l’α-stabilité (avec α = 0,875 )
et la performance H∞ sur K S :

(
min γ / Tw1 → z 2

< γ et α − stabilité ) [7.67]

L’algorithme utilisé est déduit de [SGC97] avec quelques manipulations


matricielles pour obtenir une formulation en temps discret. Il fournit un correcteur
initial d’ordre 7 ;
– la seconde étape (passage à une forme observateur/retour d’état) est réalisée en
affectant à la dynamique de commande les valeurs propres les plus lentes ;
– la troisième étape (optimisation du paramètre de Youla) est une synthèse
multicritère où les objectifs sur S , K S et le suivi de référence sont introduits sous
la forme de deux contraintes H∞ :

  Tw → z  
 W1S  
min  γ 1 + γ 2 /   =  1 1  < γ 1 et Tr →ε < γ 2  [7.68]
  2 ∞
W KS  T  ∞

  w1 → z 2  ∞ 

L’avantage de cette formulation (par rapport à une synthèse H∞ traditionnelle)


est de supprimer toute contrainte artificielle sur les transferts croisés de r vers z1 et
z 2 , et de w1 vers ε .

Afin d’obtenir des résultats probants, un paramètre de Youla sous forme de filtre
FIR d’ordre 4 a été utilisé.

7.7.4. Résultats de la première approche

Les résultats obtenus sont résumés dans le tableau 7.2. Ils sont très satisfaisant si
l’on se réfère aux objectifs et aux résultats obtenus par d’autres méthodes [LAN 96].
L’indice de performance défini dans [LAN 96] est de 97 %.

Le diagramme de Bode du correcteur (figure 7.12) et celui de Black-Nichols de


la boucle ouverte (figure 7.13) montrent qu’il n’y a pas eu de compensation pole-
zéro. La figure 7.14 montre que les spécifications sur les fonctions de sensibilité S
et K S sont globalement respectées pour les trois modèles. Enfin, les réponses à des
échelons de consigne et de perturbation (figures 7.15 et 7.16) remplissent les
objectifs de manière satisfaisante.
256 Conception de commandes robustes

Echelon de consigne Perturbation

t10%(s) t 2% (s) Dépassement (%) t10% (s) ∫ ε dt (s)

Objectifs 1,8 4,8 10 2,8 1,5

0g 1,68 2,54 0 2,21 1,03

25 g 1,47 3,26 0 2,29 1,08

75 g 1,28 4,80 11 2,44 1,08

Tableau 7.2a. Résultats temporels de la première synthèse

Domaine fréquentiel

S KS ∆τ (ms)
Objectifs 2 6/3 70

0g 2,1 4,32 / 3,8 56,0

25 g 1,8 5,25 / 3,13 74,5

75 g 2,3 6,29 / 3,00 293

Tableau 7.2b. Résultats fréquentiels de la première synthèse

Figure 7.12. Diagramme de Bode du correcteur


Synthèse multicritère par retour de sortie 257

Figure 7.13. Diagramme de Black-Nichols de la boucle ouverte corrigée


par les trois modèles (contours à 1 dB,3 dB et 6 dB)

Figure 7.14. Fonctions de sensibilité S et KS


258 Conception de commandes robustes

Figure 7.15. Réponses à un échelon de consigne

Figure 7.16. Réponses à un échelon de perturbation


Synthèse multicritère par retour de sortie 259

7.7.5. Algorithme de synthèse : deuxième approche

Dans ce paragraphe, la robustesse est recherchée en introduisant des incertitudes


sur chacun des modes. Le suivi de consigne est assuré de façon classique en
synthèse H∞ par une pondération sur l’erreur d’asservissement. Le correcteur est
calculé en utilisant le modèle à vide. Les résultats obtenus sur les trois modèles sont
donnés dans le paragraphe suivant.

Les incertitudes sont modélisées en utilisant la décomposition en éléments


simples de la fonction de transfert [7.64] :
3 z + ai
H ( z) = ∑ Ki [7.69]
i =1 z + αi z + βi
2

Chaque élément simple, qui correspond à un mode, est noté M i . On modélise


alors les incertitudes sur chaque mode par un scalaire complexe δ i (figure 7.17) qui
traduit simultanément des incertitudes sur le gain, la pulsation propre et
l’amortissement du mode.

Figure 7.17. Incertitude sur le mode M i

Le système global est la somme des trois modes souples ; la matrice


d’incertitude résultante s’écrit donc ∆ = diag (δ 1 , δ 2 , δ 3 ) .

La figure 7.18 donne le schéma de synthèse avec un correcteur à deux degrés de


liberté qui a été choisi : elle contient les mêmes pondérations constantes W1 = 0,5 et
W2 = 0,2 pour les objectifs H∞ sur S et K S et une pondération W1 bis du premier
ordre pour assurer le suivi de consigne :

0.535 z − 0.465
W1 bis ( z ) = [7.70]
z −1

Les signaux z 4 et w2 correspondent aux entrées et sorties de la matrice


d’incertitude ∆ .
260 Conception de commandes robustes

Figure 7.18. Schéma de synthèse (deuxième approche)

Les trois étapes de la synthèse s’effectuent successivement comme suit :


– la synthèse initiale est faite à partir d’une méthode multicritère n’utilisant
qu’une seule fonction de Lyapunov. Les critères sont la performance H ∞ sur S et
K S et la robustesse de la stabilité par rapport aux variations de modèles :

  Tw → z  
 W1 S  
min  γ 1 /   =  1 1  < γ et T
w2 → z4 ∞ < γ 2 [7.71]
 W2 KS  ∞  Tw → z  1

  1 2 ∞ 

l’algorithme fournit un correcteur initial d’ordre 7 ;


– la seconde étape est réalisée là aussi en affectant à la dynamique de commande
les valeurs propres les plus lentes ;
– la troisième étape est une synthèse multicritère où les objectifs sur S, KS et le
suivi de référence (transfert entre r et ε , noté Sbis ) sont introduits sous la forme
de deux contraintes H∞ :

   W1S   Tw1 → z1  
    =   < γ1 
min  γ 1 + γ 2 /   W2 KS  ∞  Tw1 → z2  ∞  [7.72]
  
  W1bis Sbis ∞ = Tr → z3 ∞ < γ 2 
 
Afin d’obtenir des résultats probants, un paramètre de Youla sous forme de filtre
FIR d’ordre 4 a été utilisé.
Synthèse multicritère par retour de sortie 261

7.7.6. Résultats de la deuxième approche

Les résultats obtenus sont résumés dans le tableau 7.3. Ils sont très satisfaisants
si l’on se réfère aux objectifs et aux résultats obtenus par d’autres méthodes.
L’indice de performance est de 98 %.

Le diagramme de Bode du correcteur (figure 7.19) et celui de Black-Nichols de


la boucle ouverte (figure 7.20) montrent qu’il n’y a pas eu de compensation pôle-
zéro. Les figures 7.21 et 7.22 montrent que les spécifications sur les fonctions de
sensibilité S et K S et le gabarit utilisé pour le suivi de trajectoire sont respectés
pour les trois modèles. Enfin, les réponses à des échelons de consigne et de
perturbation (figures 7.23 et 7.24) remplissent les objectifs de manière satisfaisante.

Echelon de consigne Perturbation

t10%(s) t 2% (s) Dépassement (%) t10% (s) ∫ ε dt (s)

Objectifs 1,8 4,8 10 2,8 1,5

0g 2 4,1 5 1,9 1,10

25 g 2,1 4,1 9 2,15 1,11

75 g 2,3 4,8 11 2,42 1,15

Tableau 7.3a. Résultats temporels de la deuxième synthèse

Domaine fréquentiel

S KS ∆τ (ms)
Objectifs 2 6/3 70

0g 2 2,25 / 2,53 458

25 g 1,8 2,25 / 2,39 367

75 g 2,3 2,25 / 2,39 405

Tableau 7.3b. Résultats fréquentiels de la deuxième synthèse


262 Conception de commandes robustes

Figure 7.19. Diagramme de Bode du correcteur

Figure 7.20. Diagramme de Black-Nichols de la boucle ouverte corrigée


pour les trois modèles (contours à 1 dB,3 dB et 6 dB)
Synthèse multicritère par retour de sortie 263

Figure 7.21. Fonctions de sensibilité S et KS

Figure 7.22. Fonction de suivi de trajectoire Sbis


264 Conception de commandes robustes

Figure 7.23. Réponse à un échelon de consigne

Figure 7.24. Réponse à un échelon de perturbation


Synthèse multicritère par retour de sortie 265

7.8. Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons présenté une approche systématique pour résoudre
le problème de synthèse multicritère. Les critères pris en compte sont de type H∞ ,
H2 , ou α-stabilité, mais cette liste ne doit pas être considérée comme exhaustive
[FOL 97, SCH 97]. Nous utilisons la paramétrisation de Youla, qui permet de se
ramener à un problème d’optimisation par retour statique de sortie sous contraintes
LMI, tandis que la formulation d’un correcteur initial sous forme observateur/retour
d’état permet de limiter l’ordre du correcteur final.

Afin de tester les performances de l’algorithme de synthèse proposé, celui-ci a


été appliqué à un « benchmark » de la littérature et s’avère aboutir à des résultats
concluant en comparaison de ceux publiés dans [LAN 96]. Pour montrer le caractère
modulable de la méthode, deux approches ont été utilisées pour prendre en compte
les objectifs de robustesse : d’une part une contrainte de type α-stabilité et d’autre
part l’utilisation d’incertitudes paramétriques. Notons que nous n’avons pas cherché
à minimiser l’ordre du correcteur, ce point ne faisant pas partie du cahier des
charges. Il est probable, d’après sa réponse fréquentielle, que l’on pourrait le réduire
sans dégradation notable des résultats.

Différents points pourraient faire l’objet d’investigations supplémentaires à la


suite de ces résultats. On peut notamment s’interroger sur le choix de la dynamique
de Q (nous nous sommes limités à des filtres FIR, mais on pourrait par exemple
décomposer Q sur une base de fractions rationnelles). Une autre question serait
d’étendre les résultats au cas où le correcteur initial est d’ordre inférieur à celui du
système à commander.

7.9. Remerciements

Ce travail est effectué dans le cadre d’une collaboration entre le CNES, EADS-
Launch Vehicles et Supélec.

7.10. Bibliographie

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268 Conception de commandes robustes

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[ZHO 96] ZHOU K., DOYLE J.C., GLOVER K., Robust and Optimal Control, Prentice Hall, 1996.
Chapitre 8

Une méthode d’interpolation de structures


estimation/commande
pour des compensateurs H∞ et µ

8.1. Introduction

Les méthodes d’interpolation constituent une façon très efficace de commander les
systèmes dont la dynamique change avec les conditions de fonctionnement. Depuis la
publication des premiers articles sur ce sujet, il y a presque trente ans, cette approche
a été utilisée avec succès dans de nombreuses applications. En dépit de son succès au
niveau applicatif, l’intérêt théorique pour l’interpolation de compensateurs pour les
systèmes linéaires à paramètres variables (LPV) et pour les systèmes non linéaires n’a
augmenté considérablement que récemment [RUG 91, SHAH 92, SHAM 90].

La plupart des méthodes d’interpolation récentes ont été développées sur la base
d’un ensemble de conditions d’équilibre du système et d’un ensemble de compen-
sateurs linéaires correspondants [KAM 95, LAW 95, RUG 91, SHAM 90]. Dans ce
contexte, les conditions d’équilibre peuvent être paramétrisées par des variables d’in-
terpolation. En supposant que ces variables sont mesurées en temps réel, le compen-
sateur interpolé est un système non linéaire et/ou non stationnaire obtenu par interpo-
lation simple ou par des réalisations non linéaires plus sophistiquées.

Lorsque les modèles nominaux sont linéaires à temps invariant (LTI), les concep-
teurs disposent de techniques linéaires modernes de commande optimale et robuste.

Chapitre rédigé par Paulo César P ELLANDA et Pierre A PKARIAN.


270 Conception de commandes robustes

Elles permettent de concevoir des correcteurs linéaires qui fournissent un compromis


raisonnable entre performance et robustesse autour des conditions de fonctionnement
données. En comparaison, les techniques disponibles pour les interpoler ne sont pas
encore suffisamment matures. Parmi les stratégies les plus utilisées dans l’approche
d’interpolation classique, certaines techniques utilisent une interpolation linéaire de la
structure pôle-zéro-gain de fonctions de transfert [NIC 93] ou de matrices de représen-
tation d’état ou encore des gains d’observateur et de retour d’état [HYD 93, KEL 91].
Cependant, des difficultés théoriques, notamment concernant la complexité, et des
questions délicates à propos de la stabilité dans la zone de transition ont été un obs-
tacle majeur pour le développement de méthodes d’interpolation plus puissantes.

Malgré ces difficultés, quelques résultats théoriques dans le domaine de l’interpo-


lation conventionnelle ont été publiés. Un algorithme pour interpoler linéairement les
gains de retour d’état est proposé dans [SHAH 92], dans un contexte de placement
de pôles. Dans [STI 00], les auteurs présentent deux méthodes pour l’interpolation de
compensateurs : la première utilise des facteurs « coprimes » de fonctions de transfert
et la seconde est basée sur les descriptions en espace d’état. Dans [STI 99], les gains de
retour et d’observation d’état sont interpolés. Ces approches assurent, avec un certain
conservatisme et sous la condition de variations lentes des variables d’interpolation,
la stabilité exponentielle locale du système correspondant en boucle fermée.

Les techniques d’interpolation velocity-based et LPV fournissent d’autres voies de


recherche. Des méthodes potentielles dans ce domaine ont aussi été explorées, incluant
respectivement [LEI 98b, LEI 98c] et [APK 95, APK 98, PAC 94]. Ces techniques
permettent un traitement systématique et intégré du problème d’interpolation par
lequel les questions de stabilité/performance à temps variant sont analysées judicieu-
sement. Cependant, ces techniques sont potentiellement très conservatives puisque des
trajectoires irréalistes sont prises en considération et cela constitue certainement une
faiblesse importante de cette théorie.

Dans les méthodes d’interpolation classiques, si les compensateurs linéaires


changent considérablement d’un point de fonctionnement à l’autre, on introduit artifi-
ciellement une variation rapide de la dynamique en boucle fermée et cela peut induire
un effet déstabilisant ou une perte de performance. Les compensateurs linéaires à inter-
poler devraient donc avoir des structures compatibles pour obtenir un comportement
d’interpolation lisse. Puisque les comportements dynamiques des correcteurs interpo-
lés peuvent être fortement dépendants des réalisations adoptées, ces problèmes struc-
turels deviennent particulièrement critiques lorsque des données d’espace d’état sont
utilisées pour l’interpolation. Des démonstrations claires de ce fait sont fournies dans
[LEI 98a, STI 99, STI 00]. Dans [STI 99, STI 00], Stilwell et Rugh fournissent des
conditions suffisantes et théoriquement justifiées sur le « placement » de compensa-
teurs LTI telles qu’un compensateur interpolé qui préserve la stabilité existe toujours
(voir aussi [STI 97a, STI 97b] et les exemples numériques inclus). Une limite supé-
rieure du taux de variation du paramètre variable est aussi détérminée pour établir
Une méthode d’interpolation de structures 271

la stabilité du système non stationnaire. Leurs résultats montrent clairement que des
transitions satisfaisantes dépendent non seulement de la « distance » entre points de
fonctionnement, mais aussi de la « proximité » entre les coefficients des compensa-
teurs LTI à interpoler. Leurs méthodes sont, malheureusement, restreintes aux com-
pensateurs d’ordre plein dans le contexte de l’interpolation en espace d’état. De plus,
lorsque l’ensemble de points de fonctionnement est choisi convenablement, le pro-
blème de produire l’ensemble de réalisations d’état correspondant qui soit bien adapté
à l’interpolation constitue un défi et reste ouvert dans le domaine de l’interpolation
classique. D’autre part, les gains ne sont pas les seules variables à interpoler dans le
cas particulier de la structure estimation/commande. L’ensemble des coefficients du
compensateur dépend aussi du modèle en espace d’état du système. Alors, ces coeffi-
cients doivent évoluer conformément à la dynamique du système, c’est-à-dire que les
variations ou non-linéarités significatives du système doivent être compensées conve-
nablement par des ajustements adéquats dans le compensateur.

Dans cette étude, nous proposons une méthode pour dériver un ensemble de trans-
formations linéaires d’espace d’état applicable à la famille originale de correcteurs
linéaires dans le but de minimiser les différences de dynamiques entre des compen-
sateurs de la famille transformée et de respecter la dynamique physique du système.
Par conséquent, le compensateur non linéaire interpolé a une dynamique similaire à
celle de la famille linéaire, ce qui conduit à des restrictions plus faibles sur la limite
supérieure du taux de variation du paramètre qui garantit la stabilité. Dans [LEI 98a],
différentes classes de réalisations satisfaisant la condition de l’équivalence linéaire
locale étendue sont examinées et un support analytique pour un choix approprié de
réalisations du correcteur non linéaire est fourni. Notre méthode est différente de cette
approche dans le sens où les compensateurs équivalents ne sont calculés que pour
l’ensemble de correcteurs linéaires. Des structures estimation/commande sont obte-
nues et il n’y a pas de restrictions sur la stratégie pour les interpoler (sous la condition
que les coefficients du compensateur soient choisis comme fonctions continues de la
variable d’interpolation). En outre, notre méthodologie produit un ensemble de para-
mètres de Youla stables ayant une structure particulière qui tolère une simple inter-
polation linéaire. Les méthodes d’interpolation proposées dans [STI 99] et [STI 00]
qui préservent la stabilité sont donc généralisées pour des compensateurs d’ordre aug-
menté.

Les structures estimation/commande présentent des caractéristiques importantes


qui deviennent particulièrement intéressantes dans le problème d’interpolation pour
des applications réalistes. Des techniques modernes de conception, comme la synthèse
H∞ et la µ-synthèse et leurs variantes, produisent des correcteurs d’ordre élevé dont
la dynamique reste obscure au concepteur et peut changer considérablement avec les
conditions de fonctionnement. L’interpolation de représentations d’état générales de
ces correcteurs est discutable d’un point de vue de la mise en œuvre et, dans un grand
nombre de cas, peut conduire à un effort calculatoire insurmontable, en particulier
272 Conception de commandes robustes

pour les problèmes qui nécessitent un ajustement rapide des données du compensateur
en temps réel. Au contraire, pour les structures estimation/commande, en supposant
que le modèle linéaire soit disponible en temps réel, il n’est requis que le stockage
de deux gains statiques et d’un paramètre de Youla pour mettre à jour la dynamique
du correcteur à chaque instant de l’échantillonnage. De plus, dans la pratique, le para-
mètre d’interpolation est généralement choisi comme une fonction des mesures et/ou
des états du système physique. Il est donc intéressant d’estimer efficacement les états
pour tout le domaine de variation du paramètre. Des techniques pratiques pour calcu-
ler les formes estimation/commande pour des compensateurs arbitraires ont été pro-
posées, notamment dans [ALA 99, BEN 85] et références incluses. Néanmoins, ces
méthodes traitent les compensateurs LTI d’une façon séparée et déconnectée qui mène
à un ensemble de transformations d’état qui ne sont pas toujours adaptées au contexte
de l’interpolation.

Ce chapitre est organisé comme suit : dans la section 8.2, nous présentons un algo-
rithme fondé sur les techniques proposées dans [ALA 99] pour le calcul de compen-
sateurs, équivalents du point de vue entrée-sortie, plus adaptés aux techniques d’inter-
polation. La décomposition de Schur de la matrice dynamique en boucle fermée est
essentiellement distincte de celle utilisée dans [ALA 99], ce qui conduit à des trans-
formations d’état bien adaptées à notre contexte. Les difficultés numériques inhérentes
à ce calcul sont aussi discutées et des solutions proposées. Dans la section 8.3, nous
proposons une méthode pour construire des compensateurs adjacents ayant la même
structure d’observateur et conservant un comportement dynamique continu pour cha-
cun de leurs éléments, indépendamment de la stratégie d’interpolation adoptée. Un
ensemble de transformations d’espace d’état des compensateurs est obtenu par conti-
nuation d’une partition choisie des pôles de la boucle fermée. Dans la section 8.4,
enfin, les techniques présentées sont illustrées par des exemples numériques emprun-
tés à la littérature.

Les notations utilisées dans ce chapitre sont standards. La notation R est utilisée
pour l’ensemble des nombres réels et l’indice supérieur T pour la transposition de
matrices. Le spectre d’une matrice M est noté spec(M ). La norme 2 euclidienne pour
les vecteurs et la norme 2 induite (norme spectrale) pour les matrices sont dénotées
||.||. Pour les ensembles, S désigne le complément de S et {φ} l’ensemble vide ou
nul. Pour les variables complexes, λ désigne le conjugué de λ. La notation RH∞
dénote l’ensemble des fonctions de transfert rationnelles réelles qui sont analytiques
en Re(s) > 0, c’est-à-dire l’ensemble des fonctions de transfert propres rationnelles
et asymptotiquement stables avec des coefficients réels. La réalisation d’état d’une
fonction de transfert G(s) = C(sI − A)−1 B + D est dénotée :
" #
A B
C D
Une méthode d’interpolation de structures 273

8.2. Structures estimation/commande

Dans cette section, nous rappelons les techniques proposées dans [ALA 99] (para-
graphes 8.2.1 et 8.2.2) permettant de calculer des représentations équivalentes de type
estimation/commande d’un compensateur stabilisant arbitraire associé à un système
donné. Nous proposons aussi un algorithme (une variante d’une méthode présentée
dans [ALA 99]) permettant le calcul de compensateurs équivalents du point de vue
entrée-sortie bien adaptés aux techniques d’interpolation (paragraphes 8.2.3 et 8.2.4).
Les techniques dans [ALA 99] sont générales et prennent en compte des compen-
sateurs à temps discret ou continu et d’ordre réduit, plein ou augmenté. Elles sont
aussi applicables à des systèmes et des correcteurs propres ou non strictement propres.
Cependant, nous sommes intéressés surtout par des compensateurs dont les ordres sont
égaux ou plus grands que l’ordre du système, en particulier les correcteurs de type
H∞ et µ. Les compensateurs d’ordre réduit, les systèmes non strictement propres et
les cas à temps discret sont omis pour simplifier la présentation, mais sont également
traitables par notre technique.

On peut trouver dans la littérature de la commande plusieurs expressions souvent


utilisées comme termes équivalents pour « compensateur de structure estimation/com-
mande » : observer-based structure, observer state (feedback) controller, LQG (form)
controller, estimator/controller structure (or form), observer/controller structure, state
estimator-state feedback structure, entre autres.

D ÉFINITION 8.1 ([ZHO 96]).– Etant donné un système générique (A, B, C) avec
(A, B) stabilisable et (C, A) détectable, alors il existe des matrices réelles Kc et Kf
telles que les valeurs propres de A − BKc et A − Kf C sont stables. Le compensateur
noté u = K̄(s)y et :
" #
A − BKc − Kf C Kf
K̄(s) = [8.1]
−Kc 0

est appelé « compensateur de structure estimation/commande ».

8.2.1. Formulation du problème

Considérons les systèmes en boucle fermée représentés dans la figure 8.1, où :


" #
G11 (s) G12 (s)
G(s) = [8.2]
G21 (s) G22 (s)

et :
" #
P11 (s) P12 (s)
P (s) = [8.3]
P21 (s) P22 (s)
274 Conception de commandes robustes

sont respectivement les modèles du système nominal et du système augmenté. Les


signaux w, e, z et y sont respectivement l’entrée exogène, la commande, la sortie
commandée et la mesure de P (s).

Figure 8.1. Systèmes en boucle fermée

Le système nominal G22 (s), supposé strictement propre sans perte de généralité,
est défini par la représentation d’état stabilisable et détectable suivante :
" #
A B
G22 (s) = [8.4]
C 0

avec A ∈ Rn×n , B ∈ Rn×m et C ∈ Rp×n .

Nous supposons aussi que le système augmenté :


" #
Ap Bp
P22 (s) = [8.5]
Cp 0

où spec(Ap ) ⊇ spec(A), contient des dynamiques fictives supplémentaires (pondéra-


tions fréquentielles et/ou multiplicateurs dynamiques stables Wi (s) et Wo (s)). G22 (s)
correspond à la dynamique physique (éventuellement incluant des actionneurs et des
détecteurs) dont les trajectoires de l’état doivent être stabilisées et estimées par un
compensateur de structure estimation/commande.

Le problème peut être énoncé comme suit : étant donné les systèmes G22 (s) et
P22 (s) et un compensateur stabilisant initial (figure 8.1a) :
" #
Ak Bk
K(s) = [8.6]
Ck Dk
Une méthode d’interpolation de structures 275

où Ak ∈ Rnk ×nk , nk ≥ n, Dk ∈ Rm×p et Bk , Ck sont des matrices réelles de


dimensions compatibles, calculer un compensateur qui présente une structure esti-
mation/commande séparée de manière explicite (figure 8.1b) et que J11 (s) ait une
structure estimation/commande par rapport au système physique G22 (s) (figure 8.2) :
" #
T −1 Ak T T −1 Bk
Ke (s) = [8.7]
Ck T Dk

où T est une transformation linéaire inversible, tel que [8.7] soit équivalent à [8.6] du
point de vue entrée-sortie.

L’ensemble de tous les compensateurs stabilisants est représenté par le schéma


fonctionnel de la figure 8.2. Ke (s) est une transformation fractionnaire linéaire (TFL)
inférieure en ce qui concerne le paramètre de Youla Q(s) ∈ RH∞ et Kc , Kf sont
choisis tels que A − BKc et A − Kf C soient stables. Il est intéressant de remarquer
que ces contraintes de stabilité sont satisfaites si l’équivalence entre [8.6] et [8.7] est
valable.

Figure 8.2. Paramétrisation de Youla sur la structure estimation/commande

La fonction de transfert entre [y; y1 ] et [u; u1 ] est la matrice de coefficients :


 
A − BKc − Kf C Kf B
 
J(s) =  −Kc 0 Im×m  [8.8]
−C Ip×p 0

de la TFL Ke (s), c’est-à-dire Ke (s) = J11 + J12 Q(I + J22 Q)−1 J21 . De plus,
J(s) peut être défini comme un compensateur de structure estimation/commande pour
276 Conception de commandes robustes

G22 (s) ayant x̂ pour état, où x̂ est un estimé asymptotique de l’état réel x de G22 (s).
En d’autres termes, x − x̂ tend vers 0 lorsque t tend vers l’infini, pour des entrées
exogènes nulles w = 0.

Si nous notons :
" #
Aq Bq
Q(s) = [8.9]
Cq Dq

une réalisation minimale de Q, où dim(Aq ) = nq = nk − n et Bq , Cq , Dq ont des


dimensions compatibles, il vient :
 
A − BKc − Kf C − BDq C BCq Kf + BDq
 
Ke (s) =  −Bq C Aq Bq  [8.10]
−(Kc + Dq C) Cq Dq

et la fonction de transfert en boucle fermée entre r et y devient :

Tyr (s) = (I − G22 Ke )−1 G22


 
A + BDq C −B(Kc + Dq C) BCq B
 (K + BD )C A − BK − K C − BD C 
 f q c f q BCq 0 
= 
 Bq C −Bq C Aq 0 
C 0 0 0
[8.11]

Le vecteur d’état de [8.11] contient les états du système (ou états physiques), ceux
de l’observateur et ceux du paramètre de Youla : [x; x̂; xq ].

Pour faciliter l’interprétation de la dynamique en boucle fermée, nous appliquons


à [8.11] la transformation d’état suivante :
    
x I 0 0 x
    
 xq  =  0 0 I   x̂  [8.12]
x̂ − x −I I 0 xq

La nouvelle forme de l’espace d’état en boucle fermée [8.13] fait donc intervenir
l’erreur d’estimation x̂ − x :
 
A − BKc BCq −B(Kc + Dq C) B
 −Bq C 0 
 0 Aq 
Tyr (s) =   [8.13]
 0 0 A − Kf C −B 
C 0 0 0
Une méthode d’interpolation de structures 277

A partir de cette représentation, le principe de séparation apparaît clairement. Les


valeurs propres de la boucle fermée peuvent donc être séparées selon les n valeurs
propres du retour d’état, les n valeurs propres du filtre d’estimation et les nq valeurs
propres du paramètre de Youla : spec(A − BKc ), spec(A − Kf C) et spec(Aq ), res-
pectivement.

La fonction de transfert en boucle fermée peut aussi être représentée à partir du


compensateur initial [8.6] :

Tyr (s) = (I − G22 K)−1 G22


 
A + BDk C BCk B " #
  Acl Bcl
= Bk C Ak 0 = [8.14]
Ccl 0
C 0 0

dont le vecteur d’état est [x; T1 x̂; T2 xq ], avec :


 
T1 T2 = T [8.15]

A l’aide de ces définitions et notations, nous allons pouvoir écrire des conditions
qui assurent l’équivalence entrée-sortie des représentations [8.6] et [8.7].

8.2.2. La structure estimation/commande équivalente

A partir de [8.7] et [8.10], on peut déduire :


" # " #
A + BDk C 0 BCk  
Ak T − T −T T + Bk C 0 = 0 [8.16]
0 Aq 0
" #
−1 Kf + BDq
T Bk = [8.17]
Bq
 
Ck T = −(Kc + Dq C) Cq [8.18]
et :

Dk = Dq [8.19]

Le problème se réduit donc à résoudre en T ∈ Rnk ×nk l’équation [8.16] et ensuite


à calculer Kc , Kf , Bq , Cq et Dq en utilisant les relations [8.17], [8.18] et [8.19].
Remarquons que Aq est inconnue en [8.16] et correspond donc à une variable sup-
plémentaire. Il convient aussi de remarquer que la solution théorique de [8.16] est
simplifiée si nous la partageons en deux problèmes dissociés.
278 Conception de commandes robustes

En adoptant une partition appropriée de T en [8.15], on obtient donc :

T1 (A + BDk C) − Ak T1 + T1 BCk T1 − Bk C = 0 [8.20]

et :

(Ak − T1 BCk )T2 = T2 Aq [8.21]

L’équation de Riccati généralisée, non symétrique et rectangulaire [8.20] peut être


encore reformulée :
H
z
" }| #{ " #
  A + BDk C BCk I
−T1 I =0 [8.22]
Bk C Ak T1

Par conséquent, la matrice hamiltonienne H associée à l’équation de Riccati [8.20]


n’est autre que la matrice dynamique du système en boucle fermée Acl , exprimée en
[8.14]. L’équation de Riccati [8.20] peut donc être résolue en T1 ∈ Rnk ×n par des
techniques classiques de calcul d’espaces invariants qui consistent à :
– trouver un sous-espace invariant associé à un ensemble de n valeurs propres
spec(Λn ), choisies parmi 2n + nq valeurs propres en spec(Acl ), c’est-à-dire :
" #" # " #
A + BDk C BCk U1 U1
= Λn [8.23]
Bk C Ak U2 U2

où U1 ∈ Rn×n et U2 ∈ Rnk ×n . De tels sous-espaces peuvent être aisément calculés


par une décomposition de Schur de la matrice Acl ;
– calculer la solution :

T1 = U2 U1−1 [8.24]

dont l’existence est garantie lorsque les valeurs propres de la boucle fermée sont dis-
tinctes.

En utilisant ce dernier résultat et de façon similaire, l’équation de Sylvester


en T2 ∈ Rnk ×nq [8.21] se réduit à calculer un sous-espace invariant associé à un
ensemble de nq valeurs propres spec(Aq ), choisies parmi n + nq valeurs propres
de spec(Ak − T1 BCk ).

En plus, à partir de [8.7], [8.10] et [8.18], on peut vérifier aussi que :


" #
A − Kf C 0
Ak − T1 BCk = T T −1 [8.25]
−Bq C Aq
Une méthode d’interpolation de structures 279

Nous pouvons donc établir la proposition suivante.

P ROPOSITION 8.1.– Les n valeurs propres choisies pour le calcul de la solution T1


de l’équation [8.20], en utilisant l’approche hamiltonienne, sont les n valeurs propres
du retour d’état associé à la structure estimation/commande équivalente, c’est-à-dire
spec(A − BKc ). De plus, la dynamique en boucle fermée restante (qui n’est pas choi-
sie pour la solution de [8.20], c’est-à-dire la dynamique de Ak − T1 BCk ) contient la
dynamique d’estimation (A − Kf C) augmentée de celle du paramètre de Youla (Aq ).

Cette proposition est une conséquence directe de [8.13] et [8.25] et constitue le


cœur de notre technique. A partir de ce résultat, nous établirons, dans le paragraphe
8.2.4, un algorithme pour la sélection des valeurs propres.

Il existe une combinatoire de solutions selon le choix de la partition des valeurs


propres en boucle fermée : premièrement pour le calcul de T1 et deuxièmement pour
le calcul de T2 . Dans le paragraphe 8.2.3, quelques considérations supplémentaires à
propos des solutions possibles de [8.20] et de [8.21] sont présentées et discutées.

Ainsi, étant donné un système d’ordre n et un correcteur d’ordre nk , on peut cal-


culer une transformation linéaire T −1 xk des états du compensateur qui les sépare en
deux parties : l’estimation des états physiques et les états du paramètre de Youla.

8.2.3. Sélection des valeurs propres et restrictions

8.2.3.1. Gouvernabilité et observabilité

Il existe plusieurs solutions admissibles pour [8.20] et [8.21]. Chacune correspond,


respectivement, à un choix particulier de n et nq valeurs propres parmi l’ensemble de
valeurs propres de la boucle fermée. Cependant, certaines sélections de modes ne sont
pas admissibles, selon les propositions suivantes.

P ROPOSITION 8.2.– Considérons l’équation [8.23]. Les propriétés duales suivantes


sont valables :
1) si ∃λ 6∈ spec(Λn ) telle que λ est ingouvernable par (A, B), alors U1 est singu-
lière ;
2) si ∃λ ∈ spec(Λn ) telle que λ est inobservable par (A, C), alors U2 présente
une déficience de rang de colonne.

P ROPOSITION 8.3.– Considérons les équations [8.20] et [8.21]. Si ∃λ ∈ spec(Aq )


telle que λ est inobservable par (A, C) ou ingouvernable par (A, B), alors [T1 T2 ]
est singulière.
280 Conception de commandes robustes

Les preuves de ces propositions sont directes en utilisant les relations précédentes
et les propriétés de gouvernabilité ou d’observabilité.

8.2.3.2. Pôles autoconjugués

Une autre restriction qui peut réduire le nombre de choix admissibles concerne la
non-séparation des paires de pôles autoconjugués, c’est-à-dire que ces paires doivent
rester dans la même partition de l’ensemble des valeurs propres de la boucle fermée,
si nous cherchons des compensateurs équivalents n’ayant que des coefficients réels.
Notons qu’un tel choix n’est pas toujours possible. Par exemple, si l’on considère les
cas où les pôles de la boucle fermée sont tous complexes et n est impair, alors les
gains auront des coefficients complexes. Pour résoudre ce problème, il est impératif
d’augmenter la dynamique du modèle du système avec quelques modes réels (stables)
ingouvernables ou inobservables ou de changer judicieusement son ordre avant de
concevoir le correcteur. On peut montrer qu’une condition nécessaire pour l’existence
d’une paramétrisation réelle est : le nombre de valeurs propres de la boucle fermée
doit être plus grand ou égal à 2(parité(n)) + parité(nk − n).

8.2.3.3. Modes doubles

Un problème difficile apparaît lorsque le spectre de la boucle fermée contient


quelques modes doubles ou « presque » doubles. Une matrice presque non diago-
nalisable peut avoir une matrice de vecteurs propres mal conditionnée et sa structure
de bloc de Jordan est numériquement difficile à déterminer. Si Acl est non diagonali-
sable, alors U = [U1 ; U2 ] en [8.23] et/ou T2 en [8.21] peuvent avoir une déficience de
rang de colonne selon la partition de spec(Acl ) choisie.

En échangeant systématiquement les positions des valeurs propres au moyen des


rotations de Givens, nous pouvons déplacer tout sous-ensemble de spec(Acl ) à la
tête de sa matrice de forme de Schur. Alors, nous pouvons exécuter une séquence
de décompositions de Schur, chacune d’elles ayant des valeurs propres ordonnées de
façon appropriée, pour diagonaliser Acl par bloc (pour les détails, voir [GOL 96]) en
utilisant une transformation linéaire bien conditionnée :

Acl Usc = Usc Λcl [8.26]

Λcl = diag(λ1 , . . . , λi , . . . , Λr , . . . , Λc , . . . , λnk +n ) [8.27]

où λi (i = 1, . . . , λnk +n ) sont les valeurs propres distinctes et :


" #
λr r
Λr = [8.28]
0 λ0r
Une méthode d’interpolation de structures 281

et :
 
λc 0 c 0
 
 0 λc 0 c 
Λc = 
 0

 [8.29]
 0 λ0c 0 
0
0 0 0 λc

sont des blocs qui correspondent, respectivement, à des valeurs propres répétées
réelles λr ≈ λ0r , et complexes λc ≈ λ0c .

Les colonnes de Usc en [8.26] qui correspondent aux valeurs propres distinctes
et aux premières valeurs propres répétées λr , λc et λc sont leurs vecteurs propres
associés et forment une base orthonormée pour le sous-espace invariant associé. Les
colonnes qui restent sont appelées vecteurs propres généralisés. Un ensemble de
colonnes qui contiennent un des vecteurs généralisés constitue une base orthonor-
mée pour un sous-espace invariant de Acl à condition que le vecteur propre respec-
tif qui correspond à la première valeur propre répétée soit inclus. C’est-à-dire qu’un
0
ensemble qui contient le vecteur propre généralisé associé à λ0r , λ0c et/ou λc devrait
aussi contenir le vecteur propre associé à λr , λc et/ou λc . Cependant, un meilleur
conditionnement numérique de T est obtenu généralement si nous ne sélectionnons
aucun vecteur propre généralisé pour composer U et si nous ne sélectionnons aucun
mode double pour Aq . Cette analyse peut être généralisée pour des valeurs propres
multiples.

Puisque la plupart des colonnes de Usc sont des vecteurs propres, la forme bloc-
diagonale [8.27] facilite l’analyse de gouvernabilité et d’observabilité modale (para-
graphe 8.2.3.6). Par contre, une telle analyse serait beaucoup plus compliquée, voire
impossible, en utilisant une forme de Schur triangulaire supérieure.

8.2.3.4. Calcul de la forme réelle

Le calcul de sous-espaces invariants exige de manipuler des grandeurs complexes


lorsque les spectres de l’hamiltonienne contiennent des modes complexes. La propa-
gation d’erreurs d’arrondis peut conduire à des matrices de transformation qui ne sont
pas rigoureusement réelles. C’est pour cette raison qu’une forme réelle de [8.26] est
préférable.

Une alternative aux formes de Schur réordonnées réelles est d’appliquer en [8.26]
la transformation suivante :

Acl Usc J = Usc JJ −1 Λcl J [8.30]


282 Conception de commandes robustes

où J est une matrice√bloc-diagonale


√ dont
√ la diagonale
√ comporte un 1 pour un mode
réel et un bloc [ 1/ 2, −j1/ 2; 1/ 2, j1/ 2 ] pour un mode complexe (répété
ou distinct). En supposant que :
   
λ4 0 c4 0
" #
  0  
 λ3 r3  λ4 0 c4  
Λcl = diag λ1 , λ2 , λ2 , ,   , . . . [8.31]
 0 λ3  0 0 λ4 0  
0 0 0 λ4

où les valeurs propres λ1 , λ2 , λ3 et λ4 sont, respectivement, réelle distincte, complexe


distincte, réelle répétée et complexe répétée, on obtient alors :

0 0 0
Wsc = Usc J = [u1 uR I R I R
2 u2 u3 u3 u4 u4 u4 uI4 . . .] [8.32]

où l’exposant R indique la partie réelle et l’exposant I indique la partie imaginaire,


et :

Λ̃cl = J −1 Λcl J
   
λR
4 λI4 cR
4 cI4
" # " #
 λR λI2  −λI λR −cI4 cR  
 2 λ3 r3  4 4 4  
= diag λ1 , , ,  , . . .
 −λI2 λR
2 0 λ3  0 0 λR
4 λI4  
0 0 −λI4 λR
4
[8.33]

Les matrices transformées ne font donc intervenir que des grandeurs réelles.

8.2.3.5. Un problème d’identification de mode

Pour résoudre [8.16], il est nécessaire de partitionner spec(Acl ) en trois sous-


ensembles, à savoir l’ensemble des modes de retour d’état, celui des modes du para-
mètre de Youla et celui des modes d’estimation, conformément aux contraintes pré-
sentées dans les paragraphes précédents. Le deuxième pas est le calcul de deux sous-
espaces invariants : un premier de dimension n de la matrice Acl et un autre de dimen-
sion nq de la matrice Ak − T1 BCk . Ces sous-espaces sont associés, respectivement,
à l’ensemble des n pôles de retour d’état en [8.23] et à l’ensemble des nq pôles du
paramètre de Youla en [8.21].

Si, d’une part cette approche facilite la compréhension conceptuelle du problème,


d’autre part une difficulté numérique peut se produire à cause de la différence entre
les dimensions de Acl et Ak , notamment lors de l’identification de certains pôles
presque doubles dans spec(Ak − T1 BCk ) parmi ceux dans spec(Acl ) pour désigner
Aq en [8.21].
Une méthode d’interpolation de structures 283

Si l’on réécrit [8.16] comme suit, on trouve une façon similaire de le partager en
deux problèmes dissociés tout en maintenant le même ordre des matrices :
 
A + BDk C 0 BCk " #
   I
−T I  0 Aq 0  =0 [8.34]
T
Bk C 0 Ak

Notons qu’un sous-espace invariant de dimension nk est caractérisé par :


    
A + BDk C 0 BCk V11 V11
    
 0 Aq 0   V12  =  V12  Λk [8.35]
Bk C 0 Ak V2 V2

où Λk est une sous-matrice de Λcl en [8.31] ou de Λ̃cl en [8.33]. Λk est associée


à un ensemble de n + nq pôles choisis parmi ceux de la matrice hamiltonienne qui
correspondent à l’ensemble des pôles de retour d’état et du paramètre de Youla. Donc,
ce problème est équivalent à :
" #" # " #
A + BDk C BCk V11 V11
= Λk [8.36]
Bk C Ak V2 V2

qui est similaire à [8.23], et :

Aq V12 = V12 Λk [8.37]

qui constitue un problème supplémentaire qui consiste à trouver un espace invariant


de Aq de dimension nk . L’espace invariant de dimension maximale de Aq est naturel-
lement l’espace tout entier qui est de dimension nq < nk . En respectant la partition
choisie des spectres de l’hamiltonienne, on fera donc le choix d’une base de dimen-
sion nq pour former un tel espace que l’on complétera par des vecteurs nuls afin de
satisfaire la contrainte de dimension imposée par Λk , c’est-à-dire :

V12 = [0 . . . 0 e1 0 . . . 0 e2 0 . . . 0 enq 0 . . . 0] [8.38]

où la sous-matrice [e1 , . . . , enq ] peut être choisie comme la base canonique de Rnq
de façon à réduire le nombre de coefficients de Q(s) à interpoler. Cet arrangement
revient à séparer nq pôles du paramètre de Youla parmi les nk pôles choisis en [8.36].
Puisque les positions des valeurs propres sont complètement définies par Λk en [8.36]
et [8.37], il devient facile de les identifier.

Finalement, le changement de base T sera obtenu par :


" #−1
V11
T = V2 [8.39]
V12
284 Conception de commandes robustes

Etant donné la nouvelle formulation [8.36] à [8.39], les conditions établies dans
les propositions 8.2 et 8.3 deviennent comme suit.

P ROPOSITION 8.4.– On a les propriétés suivantes :


1) si ∃λ 6∈ spec(Λk ) telle que λ est ingouvernable par (A, B), alors [ V11 ; V12 ]
est singulière ;
2) si ∃λ ∈ spec(Λk ) telle que λ est inobservable par (A, C), alors V2 est singu-
lière ;
3) si ∃λ ∈ spec(Aq ) telle que λ est inobservable par (A, C) ou ingouvernable par
(A, B), alors [ V11 ; V12 ] est singulière.

Les propriétés énoncées dans cette proposition fournissent des contraintes qui
doivent être satisfaites pour la construction d’une solution inversible T .

8.2.3.6. Des règles supplémentaires de sélection

Des expériences calculatoires ont indiqué que de meilleurs résultats dans la procé-
dure d’interpolation et d’estimation physique sont obtenus si l’on respecte les règles
supplémentaires suivantes pour sélectionner la partition de valeurs propres de la
boucle fermée :
– affecter à spec(A−BKc ) les pôles qui sont le moins gouvernable afin de réduire
les gains de retour d’état. De petits gains assurent une certaine « proximité » des pôles
de la boucle ouverte, respectant la dynamique naturelle du système physique ;
– affecter à spec(A− Kf C) les pôles les plus rapides et les moins observables afin
d’avoir une estimation d’état efficace et réduire les gains de l’observateur ;
– affecter à spec(Aq ) des pôles rapides de telle façon que le paramètre de Youla
se comporte comme une transmission directe dans le compensateur.

La manière de classer les modes d’après leur gouvernabilité et leur observabilité


est le premier point que nous allons examiner. Une méthode utile pour mesurer la
gouvernabilité d’un mode λi à partir d’une entrée j d’un système (Ã, B̃, C̃) consiste à
|v T b |
calculer cij = ||vi ||i ||bj j || , où vi est le vecteur propre à gauche associé à λi , bj la j-ième
colonne de B̃ et viT bj est appelé le facteur de gouvernabilité de λi . Cette méthode a été
utilisée dans des applications pratiques, dans de petits et grands systèmes [HAM 89,
||v T B̃||
MAR 90]. La gouvernabilité globale peut être mesurée par ci = ||vi i || .

Si à n’a que des valeurs propres distinctes et si l’on suppose que Acl = à en
−T
[8.26], alors chaque colonne ui de Usc et chaque colonne vi de Usc sont, respective-
ment, un vecteur propre normalisé à droite et à gauche associé à la valeur propre λi .
Une méthode d’interpolation de structures 285

Donc, ci peut être réécrit comme :

ci = ||B(i, :)|| [8.40]


−1
où B = Usc B̃.

Nous avons aussi des coefficients pour mesurer l’observabilité modale :

oi = ||C(:, i)|| [8.41]

où C = C̃Usc .

La matrice B (C) est appelée matrice de gouvernabilité (observabilité) de mode.


Si la i-ième ligne (colonne) de B (C) est nulle, alors λi est ingouvernable (inobser-
vable). En examinant ces matrices, on peut donc classer les modes en gouvernables
et observables, en gouvernables et inobservables, en ingouvernables et observables et
en ingouvernables et inobservables. Ainsi, la gouvernabilité et l’observabilité abso-
lues des modes sont complètement définies par B et C. En plus, ces matrices sont
aussi utiles pour classer les modes selon leur gouvernabilité (observabilité) relative
puisque : moins gouvernable (observable) est λi , plus petit est le coefficient ci (oi ).

En supposant que à a un mode double réel (ou complexe) λi = λ0i comme en


[8.28] (ou [8.29]), on peut dire que :
– c0i (o0i ) « grand » ⇐⇒ λi et λ0i sont gouvernables (observables) ;
– c0i (o0i ) « petit » ⇐⇒ λ0i est ingouvernable (inobservable) ;
– c0i (o0i ) « petit » et ci (oi ) « grand » =⇒ λi est gouvernable (observable) ;
– c0i (o0i ) « petit » et ci (oi ) « petit » ⇐⇒ λi est ingouvernable (inobservable).

Une analyse similaire pour des pôles multiples serait une tâche plus difficile, mais
des extensions sont possibles.

Le deuxième point consiste à faire une analyse de gouvernabilité et d’observabilité


modale des pôles de la boucle fermée pour respecter les contraintes posées par le sys-
tème en boucle ouverte, c’est-à-dire comment définir B̃ et C̃ pour calculer ci e oi . En
effet, d’après la proposition 8.4, aucune restriction à propos de la gouvernabilité et de
l’observabilité en boucle fermée n’est imposée. De plus, un problème numérique peut
se produire pour identifier quelle valeur propre en boucle fermée correspond exacte-
ment à un certain pôle ingouvernable ou inobservable en boucle ouverte, notamment
lorsque les spectres en boucle fermée contiennent des modes (presque) doubles.

En considérant les réalisations d’état de la boucle ouverte et fermée [8.4] et [8.14],


nous pouvons établir la proposition suivante dont la preuve est triviale.
286 Conception de commandes robustes

P ROPOSITION 8.5.– Supposons que Ck et Bk soient de rang plein et considérons que


à = Acl , B̃ = [ B0 Ink0×nk ] et C̃ = [ C0 Ink0×nk ], alors les proprietés duales suivantes
sont valables :
1) λi est ingouvernable par (A, B) ⇐⇒ λi est ingouvernable par (Ã, B̃) ;
2) λi est inobservable par (A, C) ⇐⇒ λi est inobservable par (Ã, C̃).

Le triplet (Ã, B̃, C̃) peut donc être utilisé pour analyser l’observabilité et la gou-
vernabilité des modes de la boucle fermée.

Nous pouvons aussi utiliser une mesure de la contribution de chaque mode en


boucle fermée aux états du système bouclé pour choisir ceux qui sont les plus « affec-
tés » par les modes du système physique. Le i-ième élément du vecteur propre à gauche
vj mesure l’impact du mode λj dans la i-ième variable d’état, et le j-ième élément du
vecteur propre à droite ui quantifie la contribution de cette activité. Le produit de
ces deux éléments est adimensionnel, c’est-à-dire indépendant du choix d’unités, et
mesure la participation nette. Ainsi, la matrice [8.42], appelée matrice de participation
[KUN 94], combine les vecteurs propres normalisés à droite et à gauche et fournit
une façon efficace et pratique de mesurer l’association entre les modes et les variables
d’état de la boucle fermée :

−T
P = Usc · ∗Usc = [pij ] [8.42]

où ·∗ dénote la multiplication élément par élément et pij est une mesure de la par-
ticipation relative du j-ième mode dans la i-ième variable d’état. Ce coefficient est
appelé facteur de participation. La somme des facteurs de participation
P associés à
une variable d’état ou à un mode quelconque est égale à 1 : n+n k
p ij = 1, ∀i et
Pn+nk j=1

i=1 pij = 1, ∀j. Il est facile de montrer que pij est égal à la sensibilité de la
valeur propre λj à l’élément aii de la diagonale de la matrice d’état en boucle fer-
∂λ
mée, ∂aiij .

Si les états de la boucle fermée sont ordonnés comme en [8.14], la somme des
amplitudes des n premiers éléments de la j-ième colonne de P donne la participation
totale de λj dans les n états de G(s).

Ainsi, les coefficients :

X
n
pj = |pij |, j = 1, . . . , n + nk [8.43]
i=1

peuvent nous aider à choisir une partition des valeurs propres en boucle fermée qui
respecte le comportement dynamique du système physique.
Une méthode d’interpolation de structures 287

8.2.4. Algorithme pour le calcul des compensateurs équivalents

Dans ce paragraphe, nous résumons les points présentés et discutés dans les para-
graphes précédents et nous décrivons les étapes principales du calcul d’un compensa-
teur équivalent.
E TAPE 1.– Calculer la matrice hamiltonienne Acl d’après [8.14] et la diagonaliser par
bloc selon [8.26].
E TAPE 2.– Classer les modes de la boucle fermée d’après leur gouvernabilité et leur
observabilité en utilisant [8.40] et [8.41] sur le triplet (Ã, B̃, C̃) défini dans la propo-
sition 8.5.
E TAPE 3.– Classer les modes de la boucle fermée d’après leurs atténuations (partie
réelle).
E TAPE 4.– En se basant sur les résultats des étapes 2 et 3, définir les ensembles de
valeurs propres en boucle fermée suivants :
– Uc = {valeurs propres ingouvernables + faiblement gouvernables} ;
– Uo = {valeurs propres inobservables + faiblement observables} ;
– Sc = {Nc valeurs propres moins gouvernables − Uc }, où le nombre entier Nc
est initialisé tel que Nc + length(Uc ) ≈ n et les paires autoconjuguées ne soient pas
séparées ;
– So = {No valeurs propres les plus observables}, où le nombre entier No est
initialisé tel que No + length(Uo ) ≈ n et les paires autoconjuguées ne soient pas
séparées ;
– Sr = {Nr valeurs propres les plus lents}, où le nombre entier Nr est initialisé
tel que Nr ≈ n et les paires autoconjuguées ne soient pas séparées.

E TAPE 5.– Choisir Pc = {(Sc − So − Uo ) ∩ (Sr )} ∪ {Uc } l’ensemble des n pôles de


retour d’état :
– attribuer les nombres entiers 1 ou 2 à kc , ko et kr tels que les paires autoconju-
guées ne soient pas séparées dans les opérations suivantes ;
– si length(Pc ) < n, alors : faire alternativement Nc ← (Nc + kc ), No ←
(No +ko ) et Nr ← (Nr +kr ), et aller à l’étape 4, c’est-à-dire commencer en changeant
seulement Nc et aller à l’étape 4, après seulement No et aller à l’étape 4, et après seule-
ment Nr et aller à l’étape 4, et répéter ce procédé jusqu’à obtenir length(Pc ) = n ;
– si length(Pc ) > n, alors : faire alternativement (comme au-dessus) Nc ← (Nc −
kc ), No ← (No − ko ) et Nr ← (Nr − kr ) ; aller à l’étape 4 ;

E TAPE 6.– En utilisant seulement les nk valeurs propres restantes {Pc }, redéfinir :
– So = {No valeurs propres les moins observables − Uo }, où le nombre entier No
est initialisé tel que No + length(Uo ) ≈ n et les paires autoconjuguées ne soient pas
séparées ;
288 Conception de commandes robustes

– Sr = {Nr valeurs propres les plus rapides}, où le nombre entier Nr est initialisé
tel que Nr ≈ n et les paires autoconjuguées ne soient pas séparées.
E TAPE 7.– Choisir Po = {So ∩Sr }∪{Uo } l’ensemble des n pôles d’estimation d’état :
– attribuer les nombres entiers 1 ou 2 à ko et kr tels que les paires autoconjuguées
ne soient pas séparées dans les opérations suivantes ;
– si length(Po ) < n, alors : faire alternativement (de façon similaire à l’étape 5)
No ← (No + ko ) et Nr ← (Nr + kr ) ; aller à l’étape 6 ;
– si length(Po ) > n, alors : faire alternativement (comme au-dessus) No ← (No −
ko ) et Nr ← (Nr − kr ) ; aller à l’étape 6.
E TAPE 8.– Choisir les valeurs propres restantes Py = {Pc ∪ Po } comme les pôles du
paramètre de Youla.
E TAPE 9.– Calculer la forme réelle [8.30] et séparer le sous-espace invariant de dimen-
sion nk [8.36] associé aux nk valeurs propres {Py ∪ Pc }.
E TAPE 10.– D’après les positions de {Py } en Λk , calculer un espace invariant de
dimension nk de Aq [8.38] et calculer Aq en utilisant :
−1
Aq = V12 Λk V12 [8.44]
E TAPE 11.– Calculer T [8.39] et ensuite calculer Kc , Kf , Bq , Cq et Dq en utilisant
[8.17], [8.18] et [8.19].

Notons que le choix de la partition des valeurs propres est essentiellement


fondé sur leur gouvernabilité et leur observabilité – absolues et relatives – et sur
leurs atténuations. Cependant, si l’on classe les valeurs propres de l’hamiltonienne
selon leurs facteurs de participation [8.43] dans l’étape 2 et si l’on définit Sc =
{Nc valeurs propres les plus affectées − Uc }, dans les étapes 4 et 6, cet algorithme
sera capable de sélectionner les valeurs propres en n’utilisant que leurs gouvernabilité
et observabilité absolues, leurs facteurs de participation et leurs atténuations.

Une mise en œuvre de cet algorithme devrait aussi considérer le fait que certaines
règles peuvent être conflictuelles et ne sont pas obligatoires, alors que d’autres sont
indispensables. Par exemple, on peut jouer sur les relations établies pour le choix de
Pc et Po , dans les étapes 5 et 7, de façon à obtenir length(Pc ) = length(Po ) = n.
En revanche, les conditions autour de modes doubles et de pôles autoconjugués (para-
graphes 8.2.3.2 et 8.2.3.3) doivent être respectées strictement.

Observons que lorsque nk est strictement plus grande que n, le compensateur


équivalent comprend un paramètre de Youla dynamique et un estimateur physique.
Mais, lorsque nk = n, Aq et T2 sont vides en [8.21] et le problème se réduit à résoudre
[8.20] en T1 = T et ensuite à calculer Kf , Kc et Dq en utilisant les relations [8.17]-
[8.19], c’est-à-dire :
Kf = T −1 Bk − BDk [8.45]
Une méthode d’interpolation de structures 289

Kc = −Ck T − Dk C [8.46]
et :

Q(s) = Dq = Dk [8.47]

Nous avons donc un paramètre de Youla statique et une structure estimation/com-


mande qui peut être interprétée de deux façons différentes :
– estimation augmentée : le système augmenté P22 remplace le système nominal
G22 ; la dynamique du système physique est incluse dans P22 et l’état de G22 sera
estimé si le sens physique est conservé dans l’état augmenté ;
– estimation physique : P22 remplace G22 avec Wi (s) et Wo (s) statiques (ou
nulles) et dim(Ap ) = n (ou P22 = G22 ).

Enfin, il est également intéressant de remarquer que le paramètre de Youla dyna-


mique peut être envisagé comme un paramètre de Youla statique avec une estimation
augmentée. En effet, si nous calculons un compensateur équivalent comprenant un
Q-paramètre dynamique, (Aq , Bq , Cq , Dq ) et une structure estimation/commande
J(s) = f (A, B, C, Kc , Kf ), nous pouvons l’interpréter comme un compensateur
ayant un Q-paramètre statique Dq et une structure estimation augmentée [ZHO 96] :
˜ = f (Ã, B̃, C̃, K̃c , K˜f )
J(s) [8.48]
0 Kf
0 Aq ], B̃ = [ 0 ], C̃ = [C 0], K̃c = [Kc − Cq ] et Kf = [ Bq ]. Ici, J(s) est
où Ã = [ A B ˜ ˜
un compensateur équivalent avec une structure estimation/commande pour le système
fictif augmenté :
 
A 0 B
 
P̃ (s) =  0 Aq 0  [8.49]
C 0 0

Si l’on considère qu’un compensateur équivalent pour P22 (s) est aussi un com-
pensateur équivalent pour P̃ (s), que les deux systèmes incluent des dynamiques fic-
tives (Wi (s) et Wo (s) dans le premier et Aq dans le deuxième) et que généralement
dim(Ap ) = nk (surtout dans les synthèses H∞ et µ), cela suggère de remplacer
G22 (s) par P22 (s) dans cet algorithme. Certainement, quelques inconvénients, comme
le calcul de Aq , Bq et Cq , sont évités en utilisant P22 (s). De plus, le calcul d’un
compensateur équivalent pour P̃ (s) serait impossible en utilisant l’approche hamilto-
nienne (voir les propositions 8.2, 8.3 et 8.4). Cependant, les compensateurs équivalents
ayant Q(s) dynamique présentent aussi quelques avantages qui justifient l’utilisation
de l’approche plus générale adoptée :
– alors que Aq est construit d’après quelques exigences d’estimation, ce qui rend
une estimation physique efficace, Wi (s) et Wo (s) sont déterminés indépendamment
de ces considérations. En d’autres termes, un compensateur équivalent pour P22 (s)
290 Conception de commandes robustes

considérerait l’identification de la dynamique fictive aussi importante que celle de la


dynamique physique ;
– alors que G22 (s) est, en général, complètement gouvernable et observable,
P22 (s) a nk − n pôles inobservables ou ingouvernables, ce qui restreint les possi-
bilités de choix de modes ;
– puisque le modèle du système est utilisé pour construire le compensateur équi-
valent, nous avons aussi besoin d’interpoler la dynamique fictive. Comme nous le
montrerons dans la prochaine section, la matrice Aq , calculée pour cette approche, a
des propriétés qui assurent sa stabilité sur les intervalles d’interpolation linéaire. De
plus, les dynamiques fictives des compensateurs adjacents peuvent être déterminées
en utilisant une continuation analytique de Aq .

Nous avons introduit un algorithme pour calculer un compensateur ayant une


structure estimation/commande équivalent à un compensateur stabilisant associé à un
système donné, où l’ordre du correcteur est égal ou supérieur à l’ordre du système
(nk ≥ n). Le compensateur résultant fournit une estimation physique efficace. Une
autre propriété qui le rend bien adapté à l’interpolation est son nombre réduit de coef-
ficients.

8.3. Une méthode d’interpolation continue

Les méthodes classiques d’interpolation sont basées sur une philosophie de


conception du type « diviser pour régner », par laquelle la conception d’un compen-
sateur non linéaire est décomposée en plusieurs synthèses de compensateurs linéaires
[LEI 98a, LEI 98b]. De plus, ces approches fournissent des structures de conception
ouvertes dans le sens où il n’y a aucune restriction inhérente à une méthodologie par-
ticulière de synthèse des compensateurs linéaires et, généralement, le concepteur est
libre d’employer les méthodes d’analyse de stabilité et de performance qui sont les
plus convenables à une application particulière.

Bien que la variable d’interpolation soit une fonction du temps dans la mise en
œuvre des compensateurs interpolés, elle est considérée comme un paramètre dans
l’étape de synthèse. Considérons que l’ensemble de points de fonctionnement peut être
paramétrisé par une variable d’interpolation θ ∈ R, laquelle évolue dans un ensemble
compact Θ ⊂ R. Supposons que A(θ), B(θ) et C(θ) en [8.4] et Ap (θ), Bp (θ) et Cp (θ)
en [8.5] sont des fonctions continues sur Θ. Supposons aussi que K(s, θi ) en [8.6]
sont des compensateurs stabilisants conçus sur θ = θi , i = 1, 2, . . . , r. Le principal
objectif d’une procédure d’interpolation est de fournir une loi de transition continue
entre des points de fonctionnement, θi et θi+1 , ∀i = 1, . . . , r − 1, de façon à préserver
la performance obtenue par les compensateurs LTI dans leur voisinage.
Une méthode d’interpolation de structures 291

Les lois de transition introduisent toujours des distorsions quant à la dégradation


de la stabilité/performance dans les zones intermédiaires. Toutefois, lorsque les coeffi-
cients du compensateur évoluent de façon continue et leurs gammes de variation sont
aussi petites que possible, les distorsions sont gardées dans des limites acceptables.
Le prochain paragraphe discute une méthode efficace, basée sur des représentations
estimation/commande pour faire face à ce problème. Plus précisément, le problème
étudié dans cette section est : étant donné les systèmes G22 (s, θ) [8.4] et P22 (s, θ)
[8.5], maintenant considérés dépendants du paramètre, et un ensemble de compensa-
teurs stabilisants K(s, θi ) [8.6], calculer un ensemble de compensateurs de structures
estimation/commande équivalents Ke (s, θi ) [8.7], tel que la structure propre impli-
cite du compensateur interpolé (voir paragraphes 8.2.4 et 8.3.1) soit connectée de
façon continue entre points de fonctionnement. Cela est réalisé par une technique de
continuation du type Euler-Newton. Cette procédure permet de calculer un ensemble
de compensateurs LTI équivalents, compatibles dynamiquement et assure qu’il existe
une trajectoire continue qui connecte leurs réalisations du type estimation/commande.

8.3.1. Continuation des sous-espaces invariants sélectionnés

Considérons θ̃ le paramètre normalisé θ̃ := (θ − θi )/kθi+1 − θi k. Alors, pour


θ ∈ [θi , θi+1 ], nous avons θ̃ ∈ [0, 1]. Dans [LUI 97], les auteurs présentent une
méthode intéressante pour calculer les valeurs propres d’une matrice H(θ̃ = 1) =
H(1) donnée et les vecteurs propres associés. A partir des valeurs et vecteurs propres
d’une matrice H(0) réelle, les valeurs et vecteurs propres de la matrice paramétrée :
H(θ̃) := (1 − θ̃)H(0) + θ̃H(1) [8.50]
sont suivis séparément à intervalles successifs de θ̃ = 0 à θ̃ = 1 en utilisant des
techniques de continuation. En θ̃ = 1, on obtient donc les données pour H(1).

Les valeurs propres de H(θ̃) sont des fonctions analytiques de θ̃, sauf pour un
nombre fini de points où quelques valeurs propres peuvent avoir une singularité algé-
brique. Loin de ces singularités, les vecteurs propres peuvent être choisis comme fonc-
tions analytiques de θ̃. Ces singularités se produisent lorsque des valeurs propres se
croisent ou subissent des bifurcations sur le chemin θ̃ ∈ [0, 1]. Des bifurcations sont
rencontrées typiquement lorsqu’un mode fait une transition entre réel et complexe
ou devient double et peuvent causer des difficultés calculatoires si elles ne sont pas
manipulées convenablement. Quelques techniques pour traiter ces problèmes sans dif-
ficultés numériques, selon la nature de la singularité, sont présentées dans [LUI 97].
Cependant, puisque les valeurs et vecteurs propres sont calculés et suivis indépen-
damment, le mauvais conditionnement dû à des vecteurs propres presque colinéaires
constitue un inconvénient de la méthode de continuation dans [LUI 97].

Nous proposons l’utilisation d’une méthode similaire pour obtenir les ensembles
correspondants des valeurs propres de matrices hamiltoniennes adjacentes. Au lieu de
292 Conception de commandes robustes

suivre chaque mode indépendamment, l’idée est de suivre séparément chaque sous-
espace invariant sélectionné correspondant à chaque partition choisie du spectre de
l’hamiltonienne. C’est une façon indirecte de suivre un ensemble de modes simulta-
nément. Dans le contexte applicatif de commande de cette étude, cette approche est
plus fiable d’un point de vue calculatoire puisque certains problèmes de bifurcation
et de mauvais conditionnement dus à des vecteurs propres presque colinéaires sont
évités.

Considérons la matrice hamiltonienne :


" #
F R
H := [8.51]
S M

où F ∈ Rn×n , M ∈ Rnk ×nk et R, S sont réelles de dimensions compatibles.


Considérons aussi les ensembles d’équations suivants :
" #" # " #
F R U1 U1
= Λn [8.52]
S M U2 U2

et :
" #" # " #
F R V1 V1
= Λk [8.53]
S M V2 V2

où Λn ∈ Rn×n et Λk ∈ Rnk ×nk sont réelles et bloc-diagonales comme en [8.33],


U1 ∈ Rn×n et V2 ∈ Rnk ×nk sont inversibles, U2 ∈ Rnk ×n et V1 ∈ Rn×nk .
Supposons que les colonnes de [ U1 ; U2 ] et de [ V1 ; V2 ] forment une base pour
un sous-espace de H, respectivement, de dimension n et nk . Alors, T1 = U2 U1−1
(∈ Rnk ×n ) et T3 = V1 V2−1 (∈ Rn×nk ) sont respectivement les solutions des équa-
tions de Riccati généralisées, non symétriques et rectangulaires :

T1 F − M T1 + T1 RT1 − S = 0 [8.54]

et :

T3 M − F T3 + T3 ST3 − R = 0 [8.55]

Il faut remarquer que les colonnes de [ I; T1 ] et de [ T3 ; I ] engendrent aussi


un sous-espace invariant de H de dimension n et de dimension nk , respectivement.

Si nous avons H(θi ) = Acl (θi ), spec(Λn (θi )) = spec(A(θi ) − B(θi )Kc (θi )) et
spec(Λk (θi )) = spec(A(θi ) − B(θi )Kc (θi )) ∪ spec(Aq (θi )) en un point de fonction-
nement θi , alors la continuation de T1 (θi ) et T3 (θi ) est suffisante pour déterminer la
dynamique correspondante au point de fonctionnement adjacent θi+1 .
Une méthode d’interpolation de structures 293

Admettons que [8.50] soit la matrice paramétrée associée à deux points de fonc-
tionnement adjacents, H(θ̃ = 0) = H(0) et H(θ̃ = 1) = H(1). L’équation de
Riccati :

F(T̃ , θ̃) = T̃ (θ̃)F̃ (θ̃) − M̃ (θ̃)T̃ (θ̃) + T̃ (θ̃)R̃(θ̃)T̃ (θ̃) − S̃(θ̃) = 0 [8.56]

où θ̃ ∈ [0, 1], correspond à [8.54] si :




 T̃ (θ̃) := T1 (θ̃)





F̃ (θ̃) := (1 − θ̃)F̃ (0) + θ̃F̃ (1) = F (θ̃) := A(θ̃) + B(θ̃)Dk (θ̃)C(θ̃)

M̃ (θ̃) := (1 − θ̃)M̃ (0) + θ̃M̃ (1) = M (θ̃) := Ak (θ̃)





R̃(θ̃) := (1 − θ̃)R̃(0) + θ̃ R̃(1) = R(θ̃) := B(θ̃)Ck (θ̃)


S̃(θ̃) := (1 − θ̃)S̃(0) + θ̃ S̃(1) = S(θ̃) := B (θ̃)C(θ̃)
k
[8.57]

et à [8.55] si :


T̃ (θ̃) := T3 (θ̃)



F̃ (θ̃) := (1 − θ̃)F̃ (0) + θ̃F̃ (1) = M (θ̃) := Ak (θ̃)



M̃ (θ̃) := (1 − θ̃)M̃ (0) + θ̃M̃ (1) = F (θ̃) := A(θ̃) + B(θ̃)Dk (θ̃)C(θ̃)





 R̃(θ̃) := (1 − θ̃)R̃(0) + θ̃ R̃(1) = S(θ̃) := Bk (θ̃)C(θ̃)


 S̃(θ̃) := (1 − θ̃)S̃(0) + θ̃ S̃(1) = R(θ̃) := B(θ̃)Ck (θ̃)
[8.58]

Pour effectuer la continuation de T̃ sur l’intervalle [θi , θi+1 ], il est nécessaire


d’abord de le subdiviser en sous-intervalles sous la forme 0 = θ̃0 ≤ θ̃1 ≤ θ̃2 ≤
· · · ≤ θ̃L = 1. On utilise ensuite une méthode de continuation d’Euler-Newton pour
calculer la solution T̃ (θ̃l+1 ), (l = 0, . . . , L − 1), de F(T̃ , θ̃l+1 ) = 0, en considérant
que T̃ (θ̃l ) est une solution connue de F(T̃ , θ̃l ) = 0 dans [8.56].

8.3.1.1. Approximation d’Euler


Pour obtenir la solution de Riccati en θ̃l+1 , nous appliquons la méthode de Newton
à l’équation F(T̃ , θ̃l+1 ) = 0 avec l’approximation initiale T̃ (θ̃l+1 )(0) = T̃ (θ̃l ) +
(θ̃
l+1 − θ̃ )T̃˙ (θ̃ ), où le point dénote la dérivée par rapport au paramètre. Ainsi, en
l l
différenciant [8.56] en θ̃ = θ̃l , nous obtenons l’équation de Sylvester suivante :
   
T̃ (θ̃l )R̃(θ̃l ) − M̃ (θ̃l ) T̃˙ (θ̃l ) + T̃˙ (θ̃l ) F̃ (θ̃l ) + R̃(θ̃l )T̃ (θ̃l )
  [8.59]
+ T̃ (θ̃ )F̃˙ − M̃˙ T̃ (θ̃ ) + T̃ (θ̃ )R̃˙ T̃ (θ̃ ) − S̃˙ = 0
l l l l
294 Conception de commandes robustes

où :

 ˙
F̃ = F̃ (1) − F̃ (0)




M̃˙ = M̃ (1) − M̃ (0)
[8.60]

 R̃˙ = R̃(1) − R̃(0)



˙

S̃ = S̃(1) − S̃(0)

La première itération de Newton T̃ (θ̃l+1 )(0) est donc obtenue en résolvant


en T̃˙ (θ̃l ) l’équation de Sylvester [8.59] et ensuite en calculant l’échelon d’Euler
(θ̃
l+1 − θ̃ )T̃˙ (θ̃ ).
l l

8.3.1.2. Algorithme de Newton


L’objectif ici est de résoudre itérativement l’équation algébrique :

F(T̃ , θ̃l+1 ) = T̃ F̃ (θ̃l+1 ) − M̃ (θ̃l+1 )T̃ + T̃ R̃(θ̃l+1 )T̃ − S̃(θ̃l+1 ) = 0 [8.61]

à partir d’une condition initiale T̃ = T̃ (θ̃l+1 )(0) . L’équation [8.61] peut être dévelop-
pée en utilisant le théorème de Taylor. En négligeant les termes d’ordre plus élevé,
la forme étendue de [8.61] à la k-ième itération devient l’approximation au premier
ordre suivante :
 
F T̃ (θ̃l+1 )(k) + ∆T̃ , θ̃l+1
h i
≈ T̃ (θ̃l+1 )(k) R̃(θ̃l+1 ) − M̃ (θ̃l+1 ) ∆T̃
h i
+ ∆T̃ F̃ (θ̃l+1 ) + R̃(θ̃l+1 )T̃ (θ̃l+1 )(k) + F(T̃ (θ̃l+1 )(k) , θ̃l+1 )
=0
[8.62]

Si T̃ (θ̃l+1 )(k) était exacte, alors F et ∆T̃ seraient nulles. Néanmoins, comme
T̃ (θ̃l+1 )(k) n’est qu’une approximation de T̃ (θ̃l+1 ), l’erreur F est finie. Les valeurs de
la mise à jour sont donc calculées par T̃ (θ̃l+1 )(k+1) = T̃ (θ̃l+1 )(k) + ∆T̃ , où ∆T̃ est
la solution de l’équation de Sylvester [8.62]. Le processus est répété jusqu’au moment
où l’erreur ||F|| est inférieure à une tolérance spécifiée par l’utilisateur. A condition
que θ̃l+1 − θ̃l soit suffisamment petit, l’itération de Newton convergera quadratique-
ment à T̃ (θ̃l+1 ). En outre, lorsque l’échantillonnage est trop ambitieux ou le système
linéaire impliqué dans la solution de l’itération de Newton [8.62] est mal conditionné
(quelques modes correspondant à des partitions différentes sont insuffisamment sépa-
rés en un point donné de la trajectoire de continuation), l’algorithme de Newton peut
ne pas converger ou converger vers une autre solution. Ceci caractérise un saut de
chemin. La probabilité qu’une telle situation se produise dans la pratique est faible.
Une méthode d’interpolation de structures 295

Néanmoins, si elle se produit, elle est transparente pour notre méthode de continua-
tion parce que la trajectoire correcte peut être récupérée facilement en calculant Λn
(ou Λk ) et son complément au cours d’une continuation et en utilisant la propriété que
la somme des valeurs propres d’une matrice est égale à sa trace. Tous les sauts de tra-
jectoire peuvent être détectés et identifiés en comparant la somme des valeurs propres
calculées et la trace de Λn (ou Λk ) en deux intervalles successifs d’échantillonnage.

8.3.1.3. Algorithme global


Une procédure globale pour le calcul d’un correcteur ayant une structure esti-
mation/commande au point de fonctionnement θi+1 , à partir d’un point voisin θi , se
traduit comme suit.
E TAPE 1.– Choisir une partition de spec(H(θi )), (Λn (θi ), Aq (θi ) et Λk (θi )), et cal-
culer un compensateur équivalent de structure estimation/commande (algorithme du
paragraphe 8.2.4) au point de fonctionnement θi .
E TAPE 2.– Calculer les solutions T1 (θi ) et T3 (θi ) pour les équations de Riccati [8.54]
et [8.55], d’après la partition choisie de spec(H(θi )).
E TAPE 3.– Exécuter une continuation d’Euler-Newton de T1 (θi ) et T3 (θi ) (para-
graphes 8.3.1.1 et 8.3.1.2) pour obtenir T1 (θi+1 ) et T3 (θi+1 ) qui leur correspondent.
E TAPE 4.– Calculer :
" # " #−1
I I
Λn (θi+1 ) = H(θi+1 ) [8.63]
T1 (θi+1 ) T1 (θi+1 )

et :
" # " #−1
T3 (θi+1 ) T3 (θi+1 )
Λk (θi+1 ) = H(θi+1 ) [8.64]
I I

et ensuite les diagonaliser par bloc comme Λ̃cl en [8.33].


E TAPE 5.– Séparer Aq (θi+1 ) de Λk (θi+1 ) en comparant les vecteurs propres up et
vj associés à Λn (θi+1 ) et Λk (θi+1 ), respectivement, c’est-à-dire calculer cos(θpj ) =
|uTp vj |
pour tout p, j (p = 1, 2, . . . , n et j = 1, 2, . . . , nk ) pour séparer les vj qui
||up || ||vj ||
n’ont pas un up parallèle correspondant.
E TAPE 6.– En utilisant Aq (θi+1 ) et Λk (θi+1 ), calculer le correcteur équivalent au
point de fonctionnement θi+1 (exécuter seulement l’étape 11 de l’algorithme du para-
graphe 8.2.4).

Notons qu’ici T1 (θi+1 ) correspond exactement à la première partition de T (θi+1 )


en [8.15], tandis que la deuxième partition T2 (θi+1 ) est déterminée par Aq (θi+1 ).
D’autre part, comme la solution d’une équation de Riccati est indépendante de l’ordre
296 Conception de commandes robustes

des vecteurs et valeurs propres, les gains Kc (θi+1 ) et Kf (θi+1 ) sont indépendants de
l’arrangement de Λn (θi+1 ) et Λk (θi+1 ). Un possible changement d’ordre des valeurs
propres dans la procédure de diagonalisation (étape 4) affecterait juste les positions
des colonnes de T2 (θi+1 ). Pourtant, l’ordre correct peut être facilement retrouvé en
analysant la proximité entre les valeurs propres de Aq (θi ) et de Aq (θi+1 ).

Il vaut la peine de noter aussi que si nk = n, alors T3 (θ) = T1 (θ)−1 , et il est donc
suffisant d’exécuter un prolongement continu de T1 (θ). En outre, quand il s’agit d’un
ensemble de compensateurs LTI, une fois que l’étape 1 est exécutée au début du pro-
cessus (par exemple, i = 1), seules les étapes 2 et 3 sont nécessaires pour déterminer
la famille entière de transformations linéaires d’état (i = 2, . . . , r). Cette procédure
permet de calculer tout l’ensemble de compensateurs équivalents à partir d’un choix
unique de la partition de valeurs propres en boucle fermée et assure qu’il existe une tra-
jectoire continue qui connecte leurs réalisations d’état du type estimation/commande.

8.3.2. Interpolation

Le sujet principal de cette étude est l’interpolation de correcteurs H∞ et µ. Notre


approche permet toutefois de considérer une classe large d’autres compensateurs.
Comme nous l’avons mentionné plus haut, elle est applicable à condition que les com-
pensateurs soient d’ordre plein ou augmenté.

La méthode proposée produit un ensemble de réalisations d’état adéquat pour l’in-


terpolation de compensateurs. Lorsque l’ensemble de points de fonctionnement est
convenablement choisi, une bonne proximité entre les coefficients correspondants des
correcteurs est, en général, obtenue comparativement aux réalisations génériques. Ceci
assure pendant la transition un comportement régulier des gains d’estimation et de
commande ainsi que du paramètre de Youla. Donc, on peut espérer qu’une interpo-
lation linéaire soit suffisante pour assurer la stabilité locale en boucle fermée pour
chaque valeur intermédiaire du paramètre d’interpolation. Cependant, il n’y a aucune
restriction à l’utilisation d’une autre stratégie d’interpolation.

Comme les variables d’interporlation comportent généralement les sorties et/ou


les états du système, un autre intérêt pratique de cette approche est l’effective estima-
tion de l’état sur tout le domaine de transition. En outre, en supposant que le modèle
linéaire est disponible en temps réel, il n’est requis que le stockage de deux gains sta-
tiques et d’un nombre réduit de coefficients du paramètre de Youla pour mettre à jour
la dynamique du correcteur à chaque instant de l’échantillonnage.

Par rapport aux paramètres de Youla, cette méthodologie produit des matrices
dynamiques Aq bloc-diagonales et stables à chaque point de fonctionnement. Il est
facile de montrer que, dans notre contexte, l’interpolation linéaire de Q(s) est stable.
Supposons que Akq (θi ) et Akq (θi+1 ) soient les k-ièmes blocs composant la diagonale
Une méthode d’interpolation de structures 297

de Aq (θ) en deux points de fonctionnement consécutifs. Considérons le cas général


où :
" #
a b
Akq (θ̃ = 0) = , a < 0, a0 < 0 [8.65]
−b a0

et :
" #
c d
Akq (θ̃ = 1) = , c < 0, c0 < 0 [8.66]
−d c0

L’équation caractéristique de la matrice bloc-diagonale linéairement interpolée :

Akq (θ̃) = (1 − θ̃)Akq (0) + θ̃Akq (1), θ̃ ∈ [0, 1] [8.67]

est :
nh i h io
λ2 + λ (θ̃ − 1)a − θ̃c + (θ̃ − 1)a0 − θ̃c0
h ih i h i2 
+ (θ̃ − 1)a − θ̃c (θ̃ − 1)a0 − θ̃c0 + (θ̃ − 1)b − θ̃d =0 [8.68]

Puisque (θ̃ − 1)x − θ̃y > 0, ∀x, y < 0 et ∀θ̃ ∈ [0, 1], alors tous les coefficients de
[8.68] sont positifs et ses racines sont toujours stables. Cependant, seules trois situa-
tions particulières distinctes pour [8.65] et [8.66] sont possibles : les deux matrices
Akq (0) et Akq (1) n’ont que des valeurs propres réelles (b = 0 et d = 0) ; les deux
Akq (0) et Akq (1) n’ont que des valeurs propres complexes (a = a0 et c = c0 ) ; et Akq (0)
n’a que des valeurs propres réelles et Akq (1) n’a que des valeurs propres complexes
ou vice versa (b = 0 et c = c0 ou d = 0 et a = a0 ). Alors, il est suffisant de mettre
en œuvre une interpolation linéaire des réalisations des Q-paramètres produits par les
méthodes décrites dans les sections précédentes pour assurer que Q(s) ∈ RH∞ sur
un intervalle de transition tout entier.

Enfin, la structure estimation/commande J11 (s) en [8.8] peut être aussi considérée
comme un correcteur stabilisant d’ordre plein pour un système générique (A, B, C).
Ainsi, ce dernier résultat généralise, pour les compensateurs d’ordre augmenté, les
méthodes d’interpolation proposées dans [STI 99] et [STI 00], où respectivement, les
réalisations d’état et les gains de commande et estimation de compensateurs d’ordre
plein sont interpolés de façon à préserver la stabilité du système bouclé.

8.4. Applications

Dans cette section, nous illustrons les algorithmes présentés dans les paragraphes
8.2.4 et 8.3.1.3 par un système simple de deuxième ordre. Un problème plus réaliste
de pilotage automatique d’un missile est ensuite considéré.
298 Conception de commandes robustes

8.4.1. Un exemple du deuxième ordre

Considérons le système de deuxième ordre présenté dans [STI 97b]. Le système


LPV est défini :
 
2 −θ 1
 
P (s, θ) = G(s, θ) =  1 0 0  [8.69]
1 −2 0

où la variable d’interpolation θ ∈ [5/6, 7/6]. Supposons que la dépendance de θ par


rapport au temps est exprimée par :

θ(t) = (1 − t)7/6 + t5/6, t ∈ [0, 1] [8.70]

Les correcteurs stabilisants conçus en t = 0 et t = 1 et connectés au système selon


la figure 8.1a sont, respectivement :
   
−80 −90 900 1 −4,2 −1 478 1
   
K0 (s) =  1 0 0  , K1 (s) =  1 0 0  [8.71]
89 100 −18 711 0 1 355 −460,7 0

Avec ces correcteurs, quand le temps va de 0 à 1, le système bouclé évolue d’une


condition de fonctionnement très stable à l’autre dans la marge de la stabilité.

Le tableau 8.1 montre les données en t = 0 considérées pour le choix de la parti-


tion des pôles en boucle fermée, où ci , oi , pi et σi sont, respectivement, les facteurs de
gouvernabilité, d’observabilité et de participation et l’atténuation de λi (valeur abso-
lue de la partie réelle).

i λi ci oi pi σi
1, 2 −6,16 ± j7,41 1,04 e+7 1,39 139,0 6,16
3 −51,26 5,40 e+6 1,04 61,86 51,3
4 −14,42 2,58 e+7 1,14 324,2 14,4

Tableau 8.1. Données en boucle fermée en t = 0

En utilisant l’algorithme décrit dans le paragraphe 8.2.4, on obtient la transforma-


tion d’état suivante :
" #
−1,583 8 e−4 −1,033 4 e−3
T (0) = [8.72]
+1,113 0 e−5 −2,125 4 e−5
Une méthode d’interpolation de structures 299

En appliquant cette transformation linéaire à la réalisation originale K0 , en [8.71],


on obtient :
 
1 417,2 −2 951,9 −1 429,5
 
Ke0 (s) =  749,59 −1 497,2 −748,59  [8.73]
−14,32 −91,68 0
avec :

Kc (0) = [14,32 91,68] , Kf (0) = [−1 429,5; −748,59] [8.74]

λ1,2 ∈ spec(A − BKc (0)) et λ3,4 ∈ spec(A − Kf (0)C).

La transformation linéaire d’état en t = 1, obtenue par continuation, est :


" #
−2,675 1 e−3 −1,886 5 e−3
T (1) = [8.75]
+6,819 6 e−4 −1,352 8 e−3

laquelle, appliquée à la réalisation originale K1 , produit :


 
273,84 −554,32 −275,78
 
Ke1 (s) =  140,02 −278,04 −139,02  [8.76]
−3,94 −1,93 0
avec :

Kc (1) = [3,939 1,933] et Kf (1) = [−275,78; −139,02] [8.77]

Comme dans [STI 97b], nous allons aussi considérer les réalisations balancées des
compensateurs :
 
−9,7 e−6 301,5 0,104
 
Kb0 (s) =  −301,5 −80,0 298,5  [8.78a]
−0,104 298,5 0

 
−8,2 e−5 38,4 0,163
 
Kb1 (s) =  −38,4 −4,2 36,8  [8.78b]
−0,163 36,8 0

La figure 8.3 montre la localisation des pôles en boucle fermée sur l’intervalle de
transition pour l’interpolation linéaire de Kc et Kf (ou pour les réalisations de Ke0
et Ke1 ) et des réalisations balancées (Kb0 et Kb1 ). Elle illustre le fait que le com-
portement dynamique, sur les points intermédiaires, du système stationnaire bouclé
peut être très dépendant de la réalisation d’état adoptée pour les correcteurs aux points
300 Conception de commandes robustes

Figure 8.3. Localisation des pôles en boucle fermée sur l’intervalle de transition

extrêmes. Remarquons que les trajectoires des pôles sont complètement distinctes, à
l’exception des points terminaux. Ce phénomène affecte aussi le système non station-
naire en boucle fermée qui peut avoir une performance et une stabilité à temps variant
très distinctes.

Les figures 8.4, 8.5 et 8.6 montrent les réponses temporelles du système non sta-
tionnaire bouclé à une perturbation r(t) qui comprend des pulsations rectangulaires de
magnitude unitaire et de durée 0,1 s appliquées en t = 0 et t = 0,4. Les performances
entrée-sortie sont assez semblables pour les deux interpolations, mais le compensateur
formé par l’interpolation de structures estimation/commande a un taux de convergence
d’estimation plus rapide.

Il est facile de montrer que les stratégies qui considèrent l’interpolation linéaire des
pôles, zéros et gains ou des réalisations canoniques originales [8.71] ne garantissent
pas la stabilité. Autrement dit, en utilisant ces approches, le système linéaire bouclé
n’est pas stable pour quelques valeurs « gelées » de θ ∈ [5/6, 7/6] et le système non
stationnaire est instable.
Une méthode d’interpolation de structures 301

Figure 8.4. Réponse des systèmes non stationnaires

Figure 8.5. Etats des systèmes non stationnaires


302 Conception de commandes robustes

Figure 8.6. L’erreur d’estimation d’état |x − x̂|

8.4.2. Un exemple de pilotage d’un missile

Dans ce paragraphe, nous considérons le problème d’interpolation pour le pilotage


en incidence d’un modèle de missile. Le problème consiste à commander un missile
pour suivre l’accélération verticale (normalisée) commandée ηc (t) en produisant une
déviation de l’empennage δc (t). Le modèle non linéaire du missile, la dynamique
de l’actionneur et les spécifications pour la conception de correcteurs LTI sont les
mêmes que ceux considérés dans [NIC 93] et utilisés dans [STI 97a, STI 99]. Les
données numériques sont disponibles dans [NIC 93]. Quelques difficultés majeures
de conception d’un compensateur pour cette application sont mises en évidence dans
[SIG 00] et [SIR 00].

La structure de commande en boucle fermée est représentée dans la figure 8.7.


L’état du missile comprend l’angle d’incidence α(t), la vitesse de tangage q(t) et
l’angle de l’empennage δ(t) et sa dérivée δ̇(t). L’accélération normalisée η(t) et la
vitesse de tangage sont les mesures. Les conditions d’équilibre du système peuvent
être paramétrisées par l’angle d’incidence, car nous supposons la vitesse du missile
constante à Mach 3. Etant donné que le modèle du missile est symétrique par rapport
à α = 0, les compensateurs linéaires C(s) sont conçus pour α ≥ 0 et interpolés
sur |α|.

Dans [STI 97a, STI 99], Stilwell et Rugh ont considéré l’approche de modelage
de valeurs singulières H∞ (H∞ loop shaping), introduite dans [MAC 90], qui incor-
pore des compromis performance/stabilité robuste pour concevoir des compensateurs
Une méthode d’interpolation de structures 303

Figure 8.7. Exemple du missile

LTI ayant une structure estimation/commande. Les gains augmentés de retour et d’es-
timation d’état produits par cette méthode sont déjà appropriés pour l’interpolation
(voir [HYD 93]). Alors, nous les comparerons avec les gains obtenus en appliquant
notre approche sur des réalisations d’état génériques des compensateurs originaux.
Cet exemple permet aussi d’illustrer un autre aspect de notre méthode, car la struc-
ture du pilote automatique n’est pas montrée explicitement dans le diagramme de la
figure 8.1a.

Le compensateur final K(s) := C(s)W (s) (figure 8.7) a l’ordre nk = 8 et est


construit en combinant la fonction de pondération W (s) et le correcteur H∞ original :
" #
Aw + Bw Kc + Kf Cw −Kf
C(s) = [8.79]
Kc 0

où (Aw , Bw , Cw ) sont les matrices d’espace d’état du système pondéré (shaped plant)
Gw (s) = W (s)G(s). Nous considérons des compensateurs LTI pour α = 0, α = 15
et α = 30, et :
" #
g1 s−z
s
1
0
W (s) = s−z2 [8.80]
0 g2 s−p 2

dont les paramètres sont listés dans le tableau 8.2.

α (degrés) g1 z1 g2 z2 p2
0 0,163 8 −169,483 8 0,162 3 −7,625 5 −0,634 7
15 0,171 9 −150,532 7 0,271 6 −3,017 5 −1,043 8
30 0,327 6 −105,446 6 0,429 8 −4,004 1 −0,889 8

Tableau 8.2. Paramètres pour W (s)


304 Conception de commandes robustes

Le filtre W (s) est connecté en cascade avec le système et le correcteur et com-


pose la fonction de transfert de transmission directe. Donc, il convient de conserver sa
structure dans la stratégie d’interpolation pour obtenir une performance satisfaisante
en boucle fermée. Dans cet exemple, un correcteur interpolé basé sur un ensemble de
compensateurs LTI avec un paramètre de Youla dynamique n’est pas approprié pour
être inséré dans la boucle, car la structure du filtre est perdue dans la procédure d’in-
terpolation de Kc , Kf et Aq . Cependant, comme nous allons le montrer plus bas, une
telle structure peut être exploitée d’une manière indirecte pour améliorer l’estimation
physique.

Pour l’application de notre méthode, nous considérons d’abord le système pon-


déré Gw (s, α) et calculons des transformations d’état linéaires T1 (α) (α = 0, 15, 30).
Nous obtenons alors des compensateurs augmentés C1e (s) étant équivalents aux com-
pensateurs H∞ originaux C o (s) (n = nk = 6 et Q(s) = 0). Les correcteurs globaux
sont K o (s) = C o (s)W (s) et K1e (s) = C1e (s)W (s). La structure de commande non
stationnaire est obtenue par interpolation linéaire des gains de retour d’état et d’esti-
mation de C1e (s), tandis qu’une interpolation linéaire de pôles, zéros et gains de W (s)
a été employée pour conserver les propriétés du modelage des valeurs singulières.
Des propriétés d’estimation plus faibles sont donc généralement obtenues. Pourtant,
les spécifications de performance sont encore satisfaites. Les gains des compensateurs
originaux (Kco et Kfo ) et équivalents (Kc1
e
et Kfe1 ) pour ce cas sont présentés dans le
tableau 8.3. D’une part, les gains originaux ont été conçus à chaque point de fonc-
tionnement en utilisant la méthode de synthèse et, d’autre part, l’ensemble de gains
équivalents a été obtenu en choisissant une partition des modes en boucle fermée en
α = 0 (algorithme du paragraphe 8.2.4) et en exécutant une procédure de continua-
tion (algorithme du paragraphe 8.3.1.3) pour les points restants. Plusieurs réalisations
d’état ont été considérées pour le calcul des gains équivalents : les originales [8.79] et
d’autres qui ont été obtenues par des transformations linéaires aléatoires. Dans tous
les cas, les mêmes ensembles de gains équivalents ont été obtenus. On peut remarquer
que, avec quelques exceptions pour les gains d’estimation, les coefficients sont assez
proches.

Nous avons aussi calculé des correcteurs K2e (s) = C2e (s)W (s) équivalents aux
originaux augmentés K o (s) = C o (s)W (s) et aux équivalents augmentés K1e (s) =
C1e (s)W (s). Ce calcul considère le système non pondéré P (s, α) = G(s, α) (nk = 8,
n = 4 et nq = 4) et, selon le paragraphe 8.2.4, fournit des améliorations quant à la
précision des estimations physiques. Donc, nous avons à notre disposition une famille
de transformations T2 (α) qui convertit C1e (s) en C2e (s). Ces derniers correcteurs ne
sont pas explicitement utilisés dans la boucle, mais leurs transformations associées
T2 (α) sont utilisées pour rehausser les estimations des états du système. Les gains
e
du compensateur équivalent, Kc2 et Kfe2 , et les réalisations d’état des paramètres de
e
Youla pour C2 (s) sont présentés dans les tableaux 8.4 et 8.5.
Une méthode d’interpolation de structures 305

α o ]T
[Kc Ko e ]T
[−Kc1 −K e
f f1
       
−27,76 −0,936 0,952 −27,84 −0,919 0,907
       
 0,029 2   11,07 −23,91   0,029 3   11,04 −23,81 
       
       
 5,187   11,16 −24,26   5,194   11,14 −24,19 
0        
       
 0,407   103,14 −398,90   0,407   113,78 −426,63 
       
       
 −0,420   −5,21 34,57   −0,415   5,229 7,144 
−0,001 8 −200,45 −1 125,0 −0,001 6 −501,98 −312,61
 −25,87   −1,540 0,694   −25,91   −1,516 0,655 
       
 0,010 7   9,744 −10,12   0,010 7   9,727 −10,10 
       
       
 4,014   9,785 −10,31   4,035   9,782 −10,31 
15        
       
 0,456   56,8 −221,15   0,455   72,09 −246,69 
       
       
 −0,485   −11,17 39,43   −0,472   5,032 12,64 
−0,002 1 119,76 −1 816,9 −0,001 8 −568,8 −704,1
 −34,55   −1,01 0,559   −37,74   −0,974 0,461 
       
 0,028 9   5,401 −7,900   0,031 6   5,211 −7,393 
       
       
 5,812   5,425 −8,086   6,490   5,240 −7,594 
30        
       
 0,650   35,02 −238,85   0,702   40,93 −257,68 
       
       
 −0,689   −10,31 64,68   −0,760   7,614 14,95 
−0,002 8 121,62 −2 367,2 −0,002 5 −863,95 127,36

Tableau 8.3. Gains de commande et d’estimation augmentés

α [Kc2
e T
] Kfe2
   
−7,05 e−3 0,024 2 1,091
 −1,78 e−3   27,73 99,26 
   
0    
 −9,70 e−1   0,293 −0,952 
−7,44 e−3 −127,97 15,43
   
4,90 e−2 0,021 4 1,075
 1,97 e−3   23,81 84,92 
   
15    
 −9,72 e−1   0,525 −2,967 
−7,08 e−3 −187,59 110,00
   
1,03 e−1 −0,006 95 1,102
 4,81 e−3   −8,30 128,08 
   
30    
 −9,58 e−1   −0,975 −5,449 
−6,17 e−3 −33,80 −197,01

Tableau 8.4. Gains de commande et d’estimation physique

Les valeurs des pôles en boucle fermée et leur distribution pour tous les com-
pensateurs et tous les points de fonctionnement sont présentées dans les tableaux
o
8.6 et 8.7, où Ctr = Aw + Bw Kco , Obs o
= Aw + Kfo Cw , Ctr1 e
= Aw − Bw Kc1 e
,
Obs1 = Aw − Kf 1 Cw , Ctr2 = A − BKc2 et Obs2 = A − Kf 2 Cw , avec (A, B, C) les
e e e e e e
306 Conception de commandes robustes

α Q(s)
 
−102,36 110,08 0 0 6 451,5 −16 470,0
 −110,08 −102,36 0 0 −3 872,1 8 821,4 
 
 
0  0 0 −12,64 9,051 5 273,9 271,91 
 
 
 0 0 −9,051 −12,64 −427,97 1 431,1 
−3,694 e−3 −7,994 e−4 5,294 e−5 1,803 e−5 0 0
 
−100,16 112,06 0 0 5 967,9 −15 983,0
 −112,06 −100,16 0 0 −3 330,6 8 349,0 
 
 
15  0 0 −15,98 11,71 5 700,5 −262,66 
 
 
 0 0 −11,71 −15,98 1 809,3 889,86 
−3,524 e−3 −7,599 e−4 5,878 e−5 4,526 e−5 0 0
 
−98,24 123,43 0 0 155,84 −4 322,6
 −123,43 −98,24 0 0 9 918,8 −39 712,0 
 
 
30  0 0 −16,06 11,26 4 872,3 83,31 
 
 
 0 0 −11,26 −16,06 −2 035,4 1 150,8 
1,730 e−3 −3,179 e−3 1,555 e−4 −6,156 e−5 0 0

Tableau 8.5. Coefficients du paramètre de Youla

matrices d’espace d’état de G(s). Quelques modes doubles ou « presque » doubles ont
interféré sur le choix de la partition initiale des pôles. Pourtant, il y a une distribution
cohérente pour tous les points de fonctionnement.

Pôles α=0 α = 15 α = 30
1 −0,634 7 −1,043 8 −0,889 75
2 −0,634 7 −1,043 8 −0,889 75
3, 4 −10,534 ± j8,287 9 −12,397 ± j9,712 4 −11,404 ± j8,554 8
5, 6 −12,636 ± j9,050 9 −15,984 ± j11,708 −16,063 ± j11,259
7 −21,547 −26,064 −48,670
8 −100,17 −87,787 −134,86
9, 10 −102,36 ± j110,08 −100,16 ± j112,06 −98,243 ± j123,43
11, 12 −104,49 ± j107,75 −103,60 ± j108,76 −101,86 ± j111,39

Tableau 8.6. Pôles en boucle fermée

Les réponses fréquentielles en boucle ouverte et les temporelles à l’échelon uni-


taire en boucle fermée pour les compensateurs originaux et équivalents sont montrées
par les figures 8.8 et 8.9 à 8.12, respectivement. On observe le même comportement
consigne-sortie pour tous les correcteurs et une amélioration considérable de l’estima-
tion d’état pour K2e (s).
Une méthode d’interpolation de structures 307

Figure 8.8. Réponse fréquentielle en boucle ouverte (KG(s))

Figure 8.9. Réponse à l’échelon du système en boucle fermée


linéarisé en t = 0 – accélération
308 Conception de commandes robustes

Figure 8.10. Réponse à l’échelon du système en boucle fermée


linéarisé en t = 0 – angle d’incidence

Figure 8.11. Réponse à l’échelon du système en boucle fermée


linéarisé en t = 0 – vitesse de tangage
Une méthode d’interpolation de structures 309

Pôles o )
spec(Ctr o )
spec(Obs e )
spec(Ctr1 e )
spec(Obs1 e )
spec(Ctr2 e )
spec(Obs2 spec(Aq )

1 * * *

2 * * *

3, 4 * * *

5, 6 * * *

7 * * *

8 * * *

9, 10 * * *

11, 12 * * *

Tableau 8.7. Distribution des pôles en boucle fermée

Figure 8.12. Réponse à l’échelon du système en boucle fermée


linéarisé en t = 0 – angle d’empennage

Les figures 8.13 et 8.14 montrent les réponses en boucle fermée du modèle non
linéaire à une séquence d’entrées en échelon, en considérant l’interpolation linéaire
des gains de retour d’état et d’estimation de K1e (s) et des matrices d’espace d’état
de K o (s). L’amplitude des excitations a été choisie telle que α couvre la plupart du
domaine d’interpolation et que les conditions en régime permanent soient différentes
d’un point de conception. Dans ce cas, les réponses temporelles du pilote automa-
tique qui utilise l’interpolation des matrices présentent un plus grand dépassement et
310 Conception de commandes robustes

un plus petit facteur d’amortissement. L’estimation 2 dans la figure 8.14 a été obte-
nue en appliquant sur les états du correcteur C1e (s, α) une transformation linéaire qui
consiste en une interpolation linéaire de T2 (α). Ce résultat montre que l’estimation de
α peut être améliorée lorsque cette variable n’est pas mesurée. Les figures 8.15 et 8.16
montrent la migration des pôles dominants en boucle fermée (3 et 5 ou 4 et 6) d’un
point de fonctionnement à l’autre, d’après les trajectoires de α dans la figure 8.14.
e
Pour l’interpolation des gains Kc1 et Kfe1 , ce lieu des racines est moins dispersé et
présente de plus petites variations sur la fréquence naturelle non amortie (ωn ) et sur le
facteur d’amortissement (ζ).

Figure 8.13. Réponse du système non linéaire en boucle fermée


à une séquence d’entrées en échelon – accélération

8.5. Conclusion

Cette étude a considéré le calcul d’un ensemble de transformations linéaires d’es-


pace d’état pour une famille de correcteurs LTI à interpoler. L’ensemble des compen-
sateurs transformés assure un comportement régulier du correcteur interpolé, car ils
présentent une structure estimation/commande où les différences de dynamiques sont
minimisées. Cela permet une interpolation continue entre points de fonctionnement et
conduit à des restrictions plus faibles sur la limite supérieure du taux de variation du
paramètre qui garantit la stabilité. Cette approche a un intérêt physique et est exécu-
tée en deux étapes : premièrement, des sous-espaces invariants associés aux valeurs
propres de la boucle fermée sont sélectionnés de façon que l’état du compensateur,
Une méthode d’interpolation de structures 311

Figure 8.14. Réponse du système non linéaire en boucle fermée


à une séquence d’entrées en échelon – angle d’incidence

Figure 8.15. Localisation des pôles dominants en boucle fermée


sur la trajectoire de α(t) – interpolation de matrices d’espace d’état
312 Conception de commandes robustes

Figure 8.16. Localisation des pôles dominants en boucle fermée


sur la trajectoire de α(t) – interpolation de gains

conçu sur un point de fonctionnement donné, soit séparé en deux parties : une esti-
mation de l’état du système et l’état du paramètre de Youla. Un algorithme simple et
stable numériquement est introduit dans ce but. Deuxièmement, une continuation ana-
lytique des sous-espaces invariants sélectionnés est exécutée pour obtenir une famille
homogène de transformations d’état. Un algorithme fondé sur une technique de conti-
nuation d’Euler-Newton de deux équations de Riccati généralisées, non symétriques
et rectangulaires a été construit. Des problèmes numériques sont aussi discutés et des
solutions sont proposées pour une mise en œuvre systématique de l’algorithme global.

Un exemple simple et un problème plus réaliste de pilotage d’un missile ont été
présentés pour démontrer les avantages de la méthode : en utilisant une stratégie d’in-
terpolation linéaire simple, nous avons obtenu des transitions régulières entre correc-
teurs et une bonne estimation physique. Puisque le « placement » des compensateurs
LTI et la stratégie d’interpolation ont été déterminés, ces avantages sont généralement
indépendants des représentations d’état du compensateur original, mais peuvent être
très dépendants d’autres propriétés du correcteur. Par exemple, un grand nombre de
modes doubles en boucle fermée, résultant de correcteurs peu appropriés, peuvent
défavoriser la performance de l’approche.

Lorsque des compensateurs H∞ d’ordre augmenté sont synthétisés, cette approche


fournit une façon de construire des réalisations d’état où une interpolation linéaire
des paramètres de Youla est stable. Par conséquent, les méthodes d’interpolation de
Une méthode d’interpolation de structures 313

compensateur d’ordre plein qui assurent la stabilité peuvent être appliquées dans ce
contexte sans perte de leurs propriétés. Cependant, les schémas de commande où les
fonctions de pondération sont dans la boucle posent quelques limitations pour l’utili-
sation de l’approche du paramètre de Youla dynamique. Dans ce cas, la fonction de
pondération devient implicite dans les réalisations des compensateurs transformés et
sa structure est perdue dans la procédure d’interpolation. Donc, la méthode proposée
doit être utilisée avec précaution dans cette situation particulière.

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gain scheduling », IEEE Transactions on Automatic Control, vol. 44, n° 6, p. 1225-1229,
1999.
Une méthode d’interpolation de structures 315

[STI 00] S TILWELL D.J., RUGH W., « Stability preserving interpolation methods for the syn-
thesis of gain scheduled controllers », Automatica, vol. 36, n° 5, p. 665-671, 2000.
[ZHO 96] Z HOU K., D OYLE J.C., G LOVER K., Robust and optimal control, p. 321-322, Pren-
tice Hall, New Jersey, 1996.
Chapitre 9

Commande prédictive robuste


basée sur une modélisation de Laguerre

9.1. Introduction

La commande prédictive à base de modèle (Model Based Predictive Control,


noté MBPC ou MPC), appelée aussi commande à horizon glissant (Moving Horizon
Control) ou commande à horizon fuyant (Receding Horizon Control), a connu un
très grand essor, tant sur le plan de la recherche fondamentale qu’au niveau des
applications, au cours des vingt dernières années. Le principe général de ce type de
commande, illustré à l’aide des figures 9.1 et 9.2, repose sur les calculs suivants,
effectués à chaque instant d’échantillonnage kT :
– prédiction y(k + i/k), i ∈ [1, Np], de la sortie du processus à commander, sur
l’horizon de prédiction [k+1, k+Np], à partir des entrées appliquées au processus
jusqu’à l’instant (k – 1)T et des sorties mesurées jusqu’à l’instant kT ;
– simulation, sur ce même horizon de prédiction, de la sortie désirée r(k) obtenue
comme la sortie d’un modèle de référence excité par la consigne à suivre, d’où le nom
de trajectoire de référence correspondant au comportement désiré en boucle fermée ;
– optimisation, vis-à-vis d’une séquence de commandes futures u(k + i), i ∈
[0, Nu –1], d’une fonction de coût exprimée en termes d’écarts entre les sorties
prédites et celles désirées, sur l’horizon de prédiction [k + N1, k + Np].

Nu (≤ Np) est appelé horizon de commande, les commandes postérieures à l’instant


(k + Nu – 1)T étant supposées constantes, c’est-à-dire u(k + i) = u(k + Nu – 1) pour
i ≥ Nu.

Chapitre rédigé par Gérard FAVIER, Gustavo Henrique DA COSTA OLIVEIRA.


318 Conception de commandes robustes

N1 (≥ 1) dépend à la fois du retard du processus et de la durée du transitoire


relatif à l’inversion du sens de variation de la consigne, dans le cas d’un processus à
déphasage non minimal.

Seul le premier signal de commande u(k) de la séquence optimisée est appliqué


au processus ; l’horizon de prédiction est ensuite décalé d’un pas vers l’avant et
tous les calculs sont répétés à l’instant d’échantillonnage suivant, ce qui explique la
dénomination de commande à horizon glissant.

Figure 9.1. Schéma-bloc d’une commande MPC

Figure 9.2. Signaux d’entrée/sortie pour une commande MPC


Modélisation de Laguerre 319

De nombreuses variantes de méthodes MPC ont été proposées dans la littérature.


Elles se différencient principalement par : le type de modèle utilisé pour représenter
le processus et prédire sa sortie ; la fonction de coût à minimiser.

Ainsi, la méthode MPHC (Model Predictive Heuristic Control), appelée aussi


MAC (Model Algorithmic Control), utilise un modèle de type réponse
impulsionnelle [BRU 84, MAR 83, RIC 78, ROU 82], tandis que la méthode DMC
(Dynamic Matrix Control) utilise un modèle de type réponse indicielle [CUT 80,
CUT 82, MOR 85]. Les méthodes EHAC [YDS 84], MUSMAR [GRE 84], EPSAC
[DEK 85a] et GPC [CLA 85, CLA 86, CLA 87, FAV 87], utilisent quant à elles un
modèle entrée-sortie de type CAR, CARMA, ou CARIMA (Controlled Auto-
Regressive Integrated Moving-Average). Un modèle d’état peut aussi être utilisé
[LEE 94, ORD 93, REI 86].

Compte tenu de la grande diversité des méthodes MPC, plusieurs études


comparatives ont été réalisées [DEK 85b, FAV 88, GAR 89, KRA 91], et divers
ouvrages de synthèse ont été publiés [BIT 90, BOU 96, CAM 95, RIC 93a,
SOE 92].

Les avantages d’une commande MPC résident dans :


– son applicabilité à diverses classes de processus (linéaires/non linéaires,
mono/multivariables, stables/instables, à déphasage minimal/non minimal, avec/sans
retard pur) ;
– sa capacité à prendre en compte : des contraintes sur les signaux d’entrée/sortie,
des perturbations mesurables, des perturbations stochastiques et des incertitudes sur
les paramètres du modèle ;
– sa facilité de réglage, les paramètres à ajuster ayant un sens physique et donc
leurs variations un effet prévisible.

Ce chapitre est organisé comme suit. Dans la section 9.2, nous rappelons un
certain nombre de résultats fondamentaux concernant les méthodes MPC. Nous
présentons tout d’abord le modèle de type réponse impulsionnelle finie (RIF) et
montrons comment la prédiction y(k + i/k) à i pas de la sortie peut être décomposée
en deux parties :

y(k + i/k) = y1(k + i/k) + yf(k + i/k) [9.1]

Le premier terme correspondant à la réponse libre du système, c’est-à-dire la


valeur de la sortie à l’instant (k + i) prédite à l’aide des sorties mesurées jusqu’à
l’instant kT et des commandes appliquées au processus jusqu’à l’instant (k – 1)T,
tandis que le deuxième terme correspond à la réponse forcée, c’est-à-dire la
composante de la prédiction résultant de l’action des commandes futures qui sont à
320 Conception de commandes robustes

optimiser. Cette décomposition du prédicteur est à la base de toutes les méthodes


MPC. Nous présentons ensuite une loi de commande MPC résultant de la
minimisation d’un critère quadratique, sans contraintes. Puis certaines propriétés et
extensions sont discutées, en particulier au niveau de la prise en compte de
contraintes sur les signaux d’entrée/sortie et d’incertitudes paramétriques. Cette
dernière considération nous permet d’introduire la notion de commande prédictive
robuste (RMPC).

La section 9.3 est consacrée à une présentation du modèle de Laguerre. Ce


modèle est introduit sous forme de schéma-bloc, puis de représentation d’état. Les
problèmes de l’estimation des paramètres et de la caractérisation des incertitudes
paramétriques de ce type de modèle sont ensuite brièvement traités. Le calcul du
prédicteur à i pas de la sortie d’un tel modèle est également détaillé.

Dans la section 9.4, nous envisageons la commande prédictive robuste (RMPC)


basée sur une modélisation de Laguerre. Différents algorithmes RMPC prenant en
compte les incertitudes paramétriques du modèle au niveau de l’optimisation de la
fonction de coût sont présentés. Ces algorithmes nécessitent la résolution d’un
problème d’optimisation min-max, avec des critères de performance qui font
intervenir trois normes différentes. Nous montrons les avantages liés à l’utilisation
d’une modélisation de Laguerre tant en termes de complexité de calcul que de
propriétés de stabilité du système en boucle fermée.

Dans la section 9.5, nous fournissons quelques résultats de simulation relatifs à


la commande d’un réacteur de polymérisation pour illustrer les lois de commande
prédictive robuste proposées. Enfin, dans la section 9.6, nous concluons ce chapitre
en indiquant quelques perspectives de recherche.

9.2. Rappels de résultats fondamentaux sur la stratégie MPC

9.2.1. Modèle et prédicteur

Comme il est bien connu, la sortie y(k) d’un système linéaire causal peut
s’exprimer comme la convolution de sa réponse impulsionnelle avec l’entrée u(k) :

y(k) = Σ hj u(k-j) [9.2]
j=1

Les coefficients hj sont appelés paramètres de Markov, ou coefficients de la


réponse impulsionnelle du fait qu’ils représentent les valeurs de la sortie lorsque le
système est excité par une impulsion unité. L’équation [9.2] sous-entend que le
système admet un retard unité (h0 = 0). Un retard d quelconque peut être pris en
Modélisation de Laguerre 321

compte en annulant les coefficients hj pour j = 0, ..., d – 1. Dans le cas d’un système
stable, la somme intervenant dans [9.2] peut être tronquée à l’ordre n :

n
y ( k ) = ∑ h j u ( k − j) + e ( k ) = H ( q ) u ( k ) + e ( k ) [9.3]
j=1

où e(k) désigne l’erreur de modélisation due à la troncature et peut inclure


également un terme de perturbation ; H(q) est un polynôme de degré n, défini
comme :
-1 -2 -n
H(q) = h1 q + h2 q + ... + hn q [9.4]
-1 -1
q représentant l’opérateur de décalage arrière unité (q u(k) = u(k – 1)).

A partir de l’équation [9.3], il est facile de déduire la prédiction à i pas de la


sortie (1 ≤ i ≤ Np) :
n
y(k+i/k) = Σ hj u(k+i-j) + e(k+i/k) [9.5]
j=1

où e(k + i/k) représente la prédiction de l’erreur de modélisation. En l’absence


d’une quelconque information sur cette erreur, sa valeur prédite peut être choisie
constante sur l’horizon de prédiction et égale à e(k) :
n
e(k+i/k) = e(k) = y(k) - Σ hj u(k-j) [9.6]
j=1

c’est-à-dire l’écart, à l’instant kT, entre la sortie du processus et la sortie du modèle


à réponse impulsionnelle finie (RIF).

Dans la méthode PFC (Predictive Functional Control) [RIC 87], cette erreur est
prédite en utilisant un modèle polynomial :
M
Σ
m
e(k+i/k) = e(k) + α m(k) i [9.7]
m=1

Les coefficients αm(k), m = 1, ..., M sont déterminés en résolvant un système de


Na (≥ M) équations algébriques à l’aide de la méthode des moindres carrés. Ces
équations sont obtenues en considérant les écarts passés e(j), j = k – N a + 1, ..., k,
préalablement filtrés à l’aide d’un filtre passe-bas de degré M pour atténuer l’effet
des perturbations de haute fréquence sur les mesures. Cette procédure
d’autocompensation de l’erreur fait donc intervenir trois paramètres de réglage
322 Conception de commandes robustes

(degré M ; horizon Na ; pôle z0 du filtre, d’ordre de multiplicité M) dont le choix a


une répercussion tant sur la précision du prédicteur que sur la stabilité et la
robustesse du système en boucle fermée.

A partir de l’équation [9.5], la prédiction de la sortie peut être décomposée sous


la forme [9.1], avec :
i n
yf(k+i/k) = Σ hj u(k+i-j) y1 (k+i/k) = Σ hj u(k+i-j) + e(k+i/k) [9.8]
j=1 j=i+1

Considérant les valeurs prédites de la sortie sur l’horizon de prédiction [k + 1,


k + Np], nous définissons les vecteurs suivants :
y(k + 1/k) yf(k + 1/k) y1 (k + 1/k)
y(k + 2/k) yf(k + 2/k) y1 (k + 2/k)
Y(k) = , Yf(k) = , Y1 (k) = [9.9]
y(k + Np/k) yf(k + Np/k) y1 (k + Np/k)

et réécrivons l’équation [9.1] du prédicteur sous forme matricielle :

Y(k) = Yf(k) + Y1(k) = H U(k) + Y1(k) [9.10]

où U(k) représente le vecteur des commandes futures à optimiser :

u(k)
u(k + 1)
U(k) = [9.11]
u(k+Np-1)

Le vecteur Yl(k) est calculé à l’aide des équations [9.8] et [9.6] ou [9.7], et la
matrice H, de dimensions (Np, Np) se déduit facilement de l’expression [9.8] de
yf(k + i/k) :

h1 0 0
h2 h1 0
H= [9.12]
hNp hNp-1 h1

9.2.2. Critère de performance et calcul de la commande

Nous considérons ci-après le critère de performance le plus couramment utilisé


dans les algorithmes MPC, à savoir le critère quadratique suivant :
Modélisation de Laguerre 323

Np Np-1

Σ Σ
2 2
J2 (U(k)) = y(k+i/k)-r(k+i) + λ(i) u (k+i) [9.13]
i=N1 i=0

λ(i) > 0 est une pondération, considérée en général constante et égale à λ, qui
permet de réaliser un compromis entre la qualité de la poursuite de la consigne et le
coût énergétique, mesurés respectivement à l’aide de la première et de la deuxième
sommes du critère. L’horizon de prédiction [k + N1, k + Np] représente l’intervalle
de temps sur lequel on minimise les écarts quadratiques entre la sortie prédite et
celle désirée ; dans la suite, nous supposerons que N1 = 1.
T
Définissant le vecteur de la trajectoire de référence R(k) = [r(k + 1) ...r(k + N p]
sur l’horizon de prédiction, le critère J2(U(k)) peut être réécrit sous la forme
matricielle suivante :

J2 (U(k)) = ||Y(k) – R(k)|| + ||Λ


2 1/2 2
U(k)|| [9.14]

où Λ est une matrice de pondération diagonale, définie positive, dont les éléments
diagonaux sont les coefficients λ(i) et où || · || représente la norme euclidienne.
Omettant l’indice temporel pour simplifier l’écriture et utilisant la décomposition
[9.10] du prédicteur, J2(U) s’écrit aussi :

J2(U) = [HU + Y1 - R] [HU + Y1 – R] + U ΛU = U AU + 2b U + c


T T T T
[9.15]

où A est une matrice définie positive de dimensions (Np, Np), b un vecteur de


dimension Np et c un scalaire, définis comme :

A = H H + Λ,
T T T
b = H [Y1 - R] , c = [Y1 - R] [Y1 - R] [9.16]

Nous allons tout d’abord envisager le cas sans contraintes. La minimisation du


critère [9.15] est alors obtenue en annulant le gradient de J2(U) par rapport à U :

∂J2 (U) = 2 AU + b = 0
∇J2 (U) = [9.17]
∂U

La matrice A étant définie positive, ceci conduit à la solution analytique suivante :

U = – A b = [H H + Λ] H (R – Y1)
-1 T -1 T
[9.18]

Seule la première commande optimisée u(k) étant appliquée au processus, il suffit


de calculer la première ligne de la matrice [H H + Λ] de dimensions (Np, Np). Dans le
T -1

cas des algorithmes DMC et GPC, qui s’expriment en fonction des incréments de
commande δu(k + i) définis comme :
324 Conception de commandes robustes

δu(k + i) = u(k + i) – u(k + i – 1) [9.19]

il est possible de diminuer le volume de calcul en introduisant un horizon de


commande Nu < Np, comme cela a été illustré sur la figure 9.2. Les commandes étant
supposées constantes sur l’horizon [k + Nu – 1, k + Np – 1], i.e. δu(k + i) = 0 pour i ∈
[Nu, Np – 1], l’optimisation est effectuée par rapport au vecteur δU suivant, de
dimension Nu :
T
δU(k) = [δu(k) δu(k + 1) ... δu(k + Nu – 1)] [9.20]
La matrice à inverser est alors de dimensions réduites (Nu, Nu).

9.2.3. Propriétés et extensions

La loi de commande [9.18] est facile à mettre en œuvre sur le plan numérique.
Toutefois, cette mise en œuvre doit être précédée d’une phase de réglage des
paramètres de synthèse du correcteur, qui caractérisent le prédicteur de l’erreur de
modélisation, le modèle de référence (en général choisi comme un modèle du
premier ordre) et le critère de performance (horizons de prédiction N p et de
commande Nu et pondération λ).

Même si, depuis deux décades, les méthodes MPC ont largement fait la preuve
de leur grande efficacité à travers de nombreuses applications industrielles
[BEC 99, RIC 93b, SAN 99], plusieurs questions fondamentales continuent de
faire l’objet de nombreux travaux de recherche :
– choix des paramètres de synthèse et influence de ces paramètres sur les
performances et la stabilité du système en boucle fermée (BF) ;
– prise en compte explicite de contraintes sur les signaux d’entrée/sortie, au
niveau de l’optimisation du critère de performance ;
– influence des incertitudes du modèle du processus sur les performances en BF,
et prise en compte de ces incertitudes au niveau de la synthèse du correcteur.

Quelques solutions apportées à ces problèmes sont brièvement revues ci-après.

9.2.3.1. Stabilité en BF
Dans [ROG 88] et [GOR 87], une analyse de la stabilité du système en BF est
effectuée pour les algorithmes GPC [CLA 87] et GPC/MRM [IRV 86]
respectivement, mettant en évidence la relation complexe qui lie les pôles du système
en BF aux paramètres de réglage du correcteur. Les propriétés stabilisantes de la
commande GPC sont étudiées dans [BIT 89], via une interprétation en tant que
problème de commande optimale LQ (linéaire quadratique). Toutefois, cette approche
Modélisation de Laguerre 325

basée sur le formalisme LQ ne permet pas de prendre en compte des contraintes sur
les signaux d’entrée/sortie. Deux solutions ont été proposées pour assurer la stabilité
en BF avec une commande GPC : la première consiste à prendre en compte des
contraintes terminales sur la sortie [CLA 91, MOS 92, SCO 94]. La deuxième, appelée
Stable Generalized Predictive Control (SGPC) [KOU 92], consiste à déterminer tout
d’abord un correcteur stabilisant le système de façon interne, puis à optimiser le critère
J2(U), non pas vis-à-vis d’une séquence de commandes futures, mais par rapport aux
valeurs futures de la trajectoire de référence. Cette idée de séparer le problème de
stabilisation de celui de l’optimisation du signal de consigne a également été utilisée
dans le cas avec contraintes [BEM 94]. Cette stratégie a pour effet de lisser la
trajectoire de référence et d’éviter ainsi des violations de contraintes pouvant résulter
de changements brusques de consigne.

Nous détaillons ci-après la première stratégie conduisant aux algorithmes CRHPC


(Constrained Receding Horizon Predictive Control) et SIORHC (stabilizing I/O
RHC), qui sont obtenus en prenant en compte les contraintes terminales suivantes :

y(k + Np + i) = r(k + Np ), i = 1, ..., Nc [9.21]

ce qui signifie que la séquence de commandes futures est maintenant optimisée de


façon à minimiser le critère J2(U) tout en contraignant les sorties prédites à
coïncider avec la trajectoire de référence, supposée constante, sur l’horizon de
coïncidence [k + Np + 1, k + Np + Nc]. Définissant les vecteurs Yc(k), Ylc(k) et Rc(k),
de dimension Nc :
T
Yc(k) = [y(k + Np + 1/k) ... y(k + Np + Nc/k)]
T
Y1c(k) = [y1(k + Np + 1/k) ... y1(k + Np + Nc/k)] [9.22]
T
Rc(k) = [r(k + Np ) ... r(k + Np )]

les contraintes terminales peuvent être réécrites sous la forme matricielle suivante :

Yc(k) = Hc U(k) + Y1c(k) = Rc(k) [9.23]

où la matrice Hc, de dimensions (Nc, Np), est définie comme :

hNp+1 hNp h2
hNp+2 hNp+1 h3
Hc = [9.24]

hNp+Nc hNp+Nc-1 hNc+1


326 Conception de commandes robustes

La minimisation du critère quadratique [9.15] sous la contrainte linéaire de type


égalité [9.23] est effectuée en construisant le lagrangien :
T
L(U, µ) = J2(U) – 2µ [Hc U + Y1c – Rc] [9.25]

où µ est le vecteur des multiplicateurs de Lagrange, et en écrivant les conditions


d’optimalité de Kuhn et Tucker :
T
∇UL(U, µ) = 2(A U + b – Hc µ) = 0 [9.26]

∇µL(U, µ) = – 2(Hc U + Y1c – Rc) = 0 [9.27]

De la première condition, on tire :


-1 T
U = A (Hc µ – b) [9.28]

En reportant cette expression de U dans la deuxième condition, on déduit la


valeur suivante de µ :
-1 T -1 -1
µ = [Hc A Hc ] [Hc A b + Rc – Y1c] [9.29]

En remplaçant µ par [9.29] dans [9.28] et compte tenu de la définition [9.16] de


b, on obtient la solution analytique suivante :
-1 T -1 T -1 -1 T
U = A [I – Hc [Hc A Hc ] Hc A ] H [R – Y1] +
-1 T -1 T -1
A Hc [Hc A Hc ] [Rc – Y1c] [9.30]
-1 T
où A est défini en [9.16]. Pour que la matrice [Hc A Hc ], de dimensions (Nc, Nc),
soit inversible, il faut que Hc soit le rang plein et que Nc ≤ Np.

9.2.3.2. Prise en compte de contraintes sur les signaux d’entrée/sortie


En pratique, les processus à commander sont généralement soumis à des
contraintes liées à la technologie des actionneurs, à la sécurité du système à
commander, ou encore à la qualité désirée pour le produit issu du processus
commandé. Les points de fonctionnement étant souvent déterminés de façon à
satisfaire des objectifs économiques, le système de commande maintient le
processus proche de ses limites, ce qui peut entraîner assez fréquemment des
violations de contraintes. Les méthodes MPC permettent de prendre en compte
explicitement certaines de ces contraintes, au niveau de la minimisation du critère
de performance J2(U), afin d’éviter leur violation. Ces contraintes, de type inégalité,
portent en général sur l’amplitude des signaux d’entrée/sortie et la variation du
signal de commande, sur l’horizon d’optimisation :
Modélisation de Laguerre 327

um ≤ u(k + i) ≤ uM ∀i ∈ [0, Np – 1]
δum ≤ δu(k + i) ≤ δuM ∀i ∈ [0, Np – 1] [9.31]
ym ≤ y(k + i) ≤ yM ∀i ∈ [1, Np]

où δu(k + i) représente la variation de la commande, appelée aussi incrément de


commande, à l’instant (k + i)T, définie en [9.19].

Cet ensemble de contraintes peut être écrit sous forme matricielle en fonction du
vecteur U des commandes futures. Définissant les vecteurs de dimension Np :

T T
UM = [uM, ... , uM] , Um = [um, ... , um] ,
δUM = [δuM, ... , δuM] , δUm = [δum, ... , δum]
T T
[9.32]

et remplaçant les sorties y(k + i) par leurs valeurs prédites y(k + i/k) mises sous la
forme décomposée [9.10], les inégalités [9.31] s’écrivent sous la forme matricielle
suivante :
ΓU≤V [9.33]
avec :

INp UM
-INp u(k-1) 1 0 0
-Um
0 -1 1 0
Γ= D , V= δUM+V0
, V0 = , D= 0
-D -δUm-V0
0
H YM-Y1
0 0 0 -1 1
-Ym+Y1
-H
[9.34]
où INp est la matrice identité d’ordre Np.

Il est possible de prendre également en compte des contraintes liées au


comportement désiré en boucle fermée. Ainsi, comme c’est le cas pour la
commande de bras manipulateurs, si l’on veut éviter des dépassements lors d’un
changement en échelon de la consigne w(k), à l’instant kT, on considérera les
contraintes suivantes sur la sortie :

y(k + i) ≤ w(k) pour i = 1, ... , Nd [9.35]

où Nd représente l’horizon sur lequel peut se produire le dépassement.

Dans le cas des algorithmes DMC et GPC, la prédiction de la sortie est obtenue
en utilisant respectivement un modèle de type réponse indicielle et un modèle
328 Conception de commandes robustes

CARIMA. Ces derniers sont incrémentaux vis-à-vis de la commande, c’est-à-dire


qu’ils s’expriment en fonction des incréments de commande δu(k) définis en [9.19].

Remarquant que :
i
u(k+i) = Σ δu(k+i-j) + u(k-1) = 1 ... 1 0 ... 0
T
δU + u(k-1) [9.36]
j=0 i+1 Np-i-1
on a :
U = D1 δU + V1 [9.37]

avec :
u(k-1)
δu(k) 1 0 0
u(k-1)
δU = δu(k+1) , D1 = 1 1 , V1 = [9.38]
0
δu(k+Np-1) 1 1 1
u(k-1)

Les contraintes [9.31] peuvent ainsi être écrites en fonction du vecteur δU des
incréments de commande futurs :
Γ δU ≤ V [9.39]

avec :
INp δUM
-INp -δUm
D1 UM-V1
Γ= , V= , H1 = H D1 [9.40]
-D1 -Um+V1
H1 YM-Y1 -HV1
-H1 -Ym+Y1 +HV1

La prise en compte des contraintes [9.33] de type inégalité, sur les signaux
d’entrée/sortie, conduit à la résolution du problème d’optimisation sous contraintes
suivant :
T T
Min J2 (U) = U AU + 2b U + c [9.41]
U ∈Ψ

où Ψ représente l’ensemble admissible des commandes futures, défini par :

Ψ = {U / Γ U ≤ V} [9.42]

Sa matrice hessienne ∇ J2(U) = 2A étant définie positive, la fonction objectif J2(U)


2

est strictement convexe. D’autre part, les contraintes [9.42] étant linéaires, elles
Modélisation de Laguerre 329

définissent un ensemble admissible Ψ qui est lui-même convexe. Le problème


d’optimisation [9.41]-[9.42] est donc un problème de programmation quadratique
(PQ) convexe, pour lequel la solution globale est unique [FLE 81]. Une méthode de
résolution consiste à transformer le problème d’optimisation quadratique en un
problème de complémentarité linéaire [CAM 93]. Des adaptations de certaines
méthodes d’optimisation (points intérieurs ; ensemble actif) peuvent également être
utilisées [WRI 96].

9.2.3.3. Prise en compte des incertitudes de modèle


En pratique, le modèle du système à commander est caractérisé par un vecteur

θ ∈ ℜ de paramètres incertains, constants ou variants dans le temps. Deux types
de modélisation peuvent être envisagés pour les incertitudes paramétriques : une
modélisation stochastique à l’aide de variables aléatoires et une modélisation sous
forme d’ensembles d’appartenance. Dans ce dernier cas, les paramètres étant
supposés bornés, le vecteur θ appartient à un ensemble compact Θ, définissant une
famille de modèles F. Le domaine d’appartenance Θ, appelé aussi domaine
d’incertitude paramétrique, est le plus souvent considéré sous une forme
géométrique simple : ellipsoïde ou orthotope.
Cas ellipsoïdal :

Θ = {θ ∈ ℜ θ : (θ - θ ) Σ (θ - θ ) ≤ 1}
n T -1
[9.43]

où le centre de l’ellipsoïde θ représente le vecteur des paramètres du modèle


nominal et Σ détermine l’orientation et le volume de l’ellipsoïde d’incertitude.
Cas orthotopique :

{
Θ = θ ∈ ℜnθ : θi = θi + ε θ i ∆θi , ε θ i ∈ [−1,1],i = 1,..., nθ } [9.44]

où θi et ∆θi ≥ 0 représentent respectivement la i-ième coordonnée du centre de


l’orthotope et la demi-longueur du côté de l’orthotope, parallèle au i-ième axe de
coordonnée de l’espace des paramètres :

θi = 1 (θmax,i + θmin,i ) , ∆θi = 1 (θmax,i - θmin,i ) [9.45]


2 2

εθi caractérise l’incertitude relative au paramètre θi, tandis que θmin,i et θmax,i
représentent les bornes relatives à ce paramètre :

θmin, i = min θi , θmax, i = max θi [9.46]


θ∈Θ θ∈Θ
330 Conception de commandes robustes

Des formes parallélotopiques ou polytopiques peuvent aussi être utilisées pour le


domaine Θ. De nombreuses méthodes ont été proposées dans la littérature pour
identifier de tels domaines d’incertitude paramétrique. Voir par exemple [FAV 96]
pour une revue des principaux algorithmes d’identification de domaines ellipsoïdaux,
et [MES 94] pour la détermination récursive d’un domaine orthotopique.

Le système à commander étant supposé décrit de façon exacte par l’un des
modèles de la famille F, une stratégie MPC robuste (RMPC) consiste à prendre en
compte les incertitudes paramétriques au niveau de la synthèse de la loi de
commande, de telle façon que les performances désirées soient satisfaites quel que
soit le modèle de la famille F. Ceci conduit à une stratégie du pire cas, basée sur la
minimisation d’un critère de la forme :

Min Max J(U,θ) [9.47]


U∈Ψ θ∈Θ

où le critère de performance J(U,θ) est maintenant une fonction du vecteur θ des


paramètres du modèle. Il en résulte un problème d’optimisation min-max, le vecteur
U de commandes futures étant déterminé de façon à minimiser le maximum du
critère J(U,θ) vis-à-vis du vecteur θ ∈ Θ, tout en satisfaisant les contraintes sur les
signaux d’entrée/sortie qui définissent l’ensemble admissible Ψ.

Ce type d’algorithme RMPC a été proposé pour la première fois par [CAM 87],
en utilisant une famille F de modèles définie à partir d’une combinaison linéaire
d’un nombre fini de réponses impulsionnelles connues, avec des pondérations
inconnues mais bornées et un critère du type norme ∞ :

J ( U, θ ) = Y ( k ) − R ( k ) ∞ = Max y (k + i k ) − r (k + i )
[9.48]
i = 1, ..., N p

Le problème d’optimisation min-max consiste alors à minimiser par rapport à U


l’erreur de poursuite du pire cas, i.e. celle qui a la plus grande valeur absolue vis-à-
vis de l’ensemble des pas de prédiction i = 1, ..., Np, et de l’ensemble des modèles
de la famille F caractérisés par θ ∈ Θ. Ce problème min-max peut être résolu à
l’aide d’une méthode de programmation linéaire, avec un nombre fini de
contraintes. Toutefois, la solution ainsi obtenue ne garantit pas la stabilité du
système en BF [ZHE 93]. La raison en est que, comme pour les méthodes
classiques MPC, ce type d’approche conduit à une commande en boucle ouverte au
niveau de l’optimisation, en ce sens que cette dernière ne tient pas compte du fait
que seule la première commande de la séquence optimisée est réellement appliquée,
les autres commandes futures étant déterminées à partir d’optimisations effectuées à
des instants d’échantillonnage successifs et après application de différents retours
de sortie. Ceci peut avoir pour conséquence une variation du vecteur de paramètres
Modélisation de Laguerre 331

θ associé au pire cas, sur l’horizon de prédiction. Cette remarque est prise en
compte par [LEE 97] qui proposent de minimiser le critère suivant :

Min Max J(U,θ) [9.49]


U∈Ψ θ (k),..., θ (k+Np-1) ∈Θx...x Θ

où J(U,θ) est un critère quadratique de la forme [9.13]. Cette formulation, qui


nécessite de faire appel à la programmation dynamique, fournit en général une
commande plus robuste que celle résultant de la minimisation du critère [9.47].
Dans le cas d’un horizon de prédiction infini, cette solution garantit la stabilité
robuste du système. Cependant, elle présente deux inconvénients : d’une part, le
volume de calcul nécessité est très important et d’autre part, le problème
d’optimisation à résoudre à chaque étape de la programmation dynamique est non
convexe, ce qui la rend difficilement exploitable en pratique.

Dans [KOT 96], le problème d’optimisation min-max [9.47] est envisagé avec un
modèle d’état incertain et un critère quadratique. Au lieu d’optimiser une séquence de
commandes futures, la solution proposée consiste à déterminer, à chaque instant
d’échantillonnage, une matrice constante de gain de retour d’état qui minimise une
borne supérieure du critère. Pour une description tout à fait générale des incertitudes
paramétriques, la loi de commande résultante se ramène à la résolution d’un problème
d’optimisation LMI, c’est-à-dire faisant intervenir des inégalités matricielles linéaires,
problème pour lequel des solutions numériquement efficaces existent.

Dans le cas d’une modélisation d’état stochastique avec des incertitudes


paramétriques stochastiques, [LEE 98] proposent une loi de commande prédictive
basée sur la minimisation de l’espérance conditionnelle d’une fonction de coût
quadratique sur un horizon de prédiction fini. Il en résulte un problème de
commande optimale stochastique, qui peut être résolu analytiquement en utilisant la
programmation dynamique. Cependant, cette loi de commande qui nécessite la
résolution d’une équation de Riccati ne peut prendre en compte des contraintes.

Dans la section 9.4, nous décrivons plusieurs algorithmes RMPC basés sur
l’utilisation d’une modélisation de Laguerre et de trois normes différentes au niveau
du critère de performance.

9.3. Modélisation de Laguerre

La plupart des méthodes RMPC développées à ce jour sont basées sur l’utilisation
d’un modèle incertain du type RIF. Ce type de modèle présente l’inconvénient de
nécessiter, en général, un nombre élevé de coefficients, ce qui a pour effet de rendre
complexe l’identification du domaine d’incertitude paramétrique d’une part, et le
calcul de la loi de commande RMPC d’autre part. Pour cette raison, [GUT 95] ont
332 Conception de commandes robustes

proposé un algorithme RMPC basé sur une modélisation CARMA, dont le nombre de
paramètres est généralement beaucoup plus petit que celui d’un modèle RIF, et la
minimisation d’un critère quadratique. Cependant, le critère à minimiser n’étant pas
convexe vis-à-vis des coefficients de la partie AR du modèle, le problème
d’optimisation ne peut être simplifié en se limitant à la recherche de la solution en l’un
des sommets de l’orthotope qui caractérise le domaine d’incertitude. La solution
adoptée par [GUT 95] consiste alors en une discrétisation de l’espace paramétrique
relativement aux paramètres AR, de façon à assurer la finitude des calculs, mais ceci
ne permet pas de garantir l’optimalité du signal de commande par rapport au problème
min-max original. Ces remarques nous ont conduits à développer des algorithmes
RMPC utilisant une modélisation de Laguerre [OLI 96]. Ce type de modèle obtenu à
partir du développement de la réponse impulsionnelle sur une base de fonctions
orthonormales présente plusieurs avantages : il est insensible au choix de la période
d’échantillonnage ; il ne nécessite pas une connaissance a priori du retard du système ;
il fait intervenir en général un nombre peu élevé de paramètres ; lors d’une
augmentation de l’ordre du modèle, les premiers coefficients du développement
restent quasiment inchangés ; d’autre part, comme nous allons le voir, la convexité du
critère J(U,θ) vis-à-vis des paramètres incertains de Laguerre est assurée, ce qui
permet de simplifier l’optimisation min-max.

Dans la suite de cette section, nous introduisons le modèle de Laguerre en en


donnant une description sous forme de schéma-bloc puis de représentation d’état.
Quelques méthodes permettant de déterminer les paramètres caractéristiques de ce
modèle et les incertitudes paramétriques associées sont brièvement décrites. Enfin,
nous présentons le prédicteur à i pas de la sortie de ce modèle.

9.3.1. Modèle de Laguerre sous forme de schéma-bloc

Dans ce qui suit, nous considérons la classe des systèmes linéaires à temps
discret, causaux, stables et invariants dans le temps. La réponse impulsionnelle de
ce type de système peut être développée en série sur une base de fonctions
orthonormales {φi(j)}, comme :

h(j) = Σ ci φ i(j) [9.50]
i=1

où les coefficients ci du développement sont donnés par :



ci = Σ h(j) φ i(j) [9.51]
j=0
Modélisation de Laguerre 333

En écrivant que la sortie du système est égale à la convolution de l’entrée avec


la réponse impulsionnelle, nous avons :

y(k) = Σ h(j) u(k-j) [9.52]
j=0
ou encore, en substituant [9.50] dans [9.52] et en inversant l’ordre des sommations :

y(k) = Σ ci si(k) [9.53]
i=1
où :

si(k) = Σ φ i(j) u(k-j) [9.54]
j=0

En utilisant l’écriture opératorielle, on a :

s i(k) = Φ i(q) u(k) [9.55]

et par suite, la sortie du système peut s’écrire sous la forme opératorielle suivante :

y(k) =  Σ ciΦ i(q) u(k)
 i=1 
[9.56]

mettant en évidence le développement en série de la fonction de transfert


opératorielle du système :

H(q) = Σ c i Φ i (q) [9.57]
i=1

développement qui peut être déduit directement de celui de la réponse


impulsionnelle [9.50].

En supposant que le système à commander soit amorti, avec une dynamique


dominante du premier ordre, il est possible de choisir comme base de
développement φi(j) la base des fonctions de Laguerre discrètes li(j) dont la
transformée en z est donnée par :

 ( 1-p 2 ) z -1   z -1 - p  i-1
Li(z) =   , p <1 [9.58]
 1 - pz -1   1 - pz -1 

Cette transformée définit la fonction de transfert du filtre de Laguerre discret


d’ordre i, constitué d’un filtre passe-bas du premier ordre en série avec un filtre passe-
334 Conception de commandes robustes

tout d’ordre (i – 1). Elle dépend du paramètre p, appelé pôle de Laguerre. A partir de
la formule de définition [9.58], il est facile de déduire la relation de récurrence
suivante, liant les filtres de Laguerre d’ordres i et i – 1, mis sous forme opératorielle :
 -1 
Li(q) =  q - p-1  Li-1(q) , i ≥2 [9.59]
 1 - pq 
avec, pour i = 1 :

L (q ) =
( 1− p )q 2 −1

[9.60]
1 − pq −1
1

En pratique, le développement en série [9.50], réalisé sur la base des fonctions


de Laguerre, est tronqué à l’ordre n, donnant ainsi une valeur approchée h(j) de la
réponse impulsionnelle exacte h(j) :
n
h(j) = Σ ci li(j) [9.61]
i=1
avec :

ci = Σ h(j) li(j), i = 1, ... , n [9.62]
j=0

La sortie du modèle de Laguerre de réponse impulsionnelle h(j) s’écrit alors :


n
y(k) = Σ ci si(k) [9.63]
i=1
avec :

si(k) = Σ li(j) u(k-j) [9.64]
j=0

Définissant les vecteurs de dimension n :

T T
C = [c1 ... cn ] , X(k) = [s1(k) ... sn(k)] [9.65]

la sortie du modèle de Laguerre peut être réécrite comme :

y(k) = CT X(k) [9.66]

En remplaçant Φ i ( q ) par Li(q) dans [9.55] et en utilisant la relation de


récurrence [9.59]-[9.60], on a :
Modélisation de Laguerre 335

s1(k) = L1(q) u(k) [9.67]


et :
 -1 
si(k) = Li(q) u(k) =  q - p  si-1(k) , i = 2, ... , n [9.68]
-1
 1 - pq 
d’où l’on déduit le schéma-bloc de la figure 9.3.

Figure 9.3. Modèle de Laguerre sous forme de schéma-bloc

9.3.2. Modèle de Laguerre sous forme d’équations d’état

A partir des relations [9.67] et [9.68], on déduit les équations récurrentes


suivantes :
– pour i = 1 :
s1 ( k ) = p s1 ( k − 1) + 1 − p 2 u ( k − 1) [9.69]

– pour i = 2 :
s2 (k) = p s2 (k-1) + s1 (k-1) - p s1 (k) ; [9.70]
ou encore, en substituant [9.69] dans [9.70] :
s 2 ( k ) = p s 2 ( k − 1) + (1 − p 2 ) s1 ( k − 1) − p 1 − p 2 u ( k − 1) [9.71]

– pour i = 3, on a :

s3 ( k ) = p s3 ( k − 1) + (1 − p 2 ) s 2 ( k − 1) − p (1 − p2 ) s1 ( k − 1) + p 2 1 − p 2 u ( k − 1) [9.72]

– et, pour i = n ≥ 2, par substitution successive, on obtient :


n −1 j−1

s n ( k ) = p s n ( k − 1) + ∑ ( −p ) (1 − p ) s (k − 1) + (−p )
2
n− j
n −1
1 − p 2 u ( k − 1) [9.73]
j=1
336 Conception de commandes robustes

Par suite, en utilisant le vecteur d’état défini en [9.65], on obtient la


représentation d’état suivante :
X(k) = A X(k-1) + b u(k-1) [9.74]
avec :
p 0 0 0
2
1-p p 0 0
-p ( 1-p )
2 2
1- p p 0 0
A=

0
(-p) (1-p )
n-2 2 2
1- p p

1
-p
p2
b = 1-p 2 [9.75]

n-1
(-p)

Le choix du pôle p conditionne le nombre de coefficients ci ayant une valeur


significative dans le développement en série [9.50]. Afin de réduire la complexité
(i.e. l’ordre n) du modèle, ce paramètre doit être choisi proche du pôle associé à la
constante de temps dominante du système. Il peut aussi être déterminé à partir de la
minimisation d’un critère J(p). Ainsi, [MAS 91, OLI 95] considèrent comme critère
J(p) l’erreur quadratique entre la réponse impulsionnelle mesurée du système à
modéliser et celle associée au modèle de Laguerre :

∞ n 2

J(p) = Σ h(j) - Σ ci(p) li(j,p) [9.76]


j=0 i=1

où la dépendance des coefficients ci et des fonctions de Laguerre li(j) vis-à-vis du


pôle p est explicitée. Un autre critère pondérant chaque coefficient de Laguerre
proportionnellement à son numéro est considéré par [FU 93] :

J(p) = Σ i ci(p)
2
[9.77]
i=1

Le pôle optimal au sens de ce critère est donné par une expression analytique
simple.
Modélisation de Laguerre 337

9.3.3. Extensions du modèle de Laguerre

Nous devons tout d’abord noter que pour le choix p = 0, on obtient :

-i
Li (q) = q [9.78]

La fonction de Laguerre correspondante est la fonction de Dirac retardée de i


périodes d’échantillonnage, i.e. li(j) = d(j – i), et les équations [9.63]-[9.64] sont
alors équivalentes au modèle RIF :
n
y(k) = Σ ci u(k-i) [9.79]
i=1

Le modèle de Laguerre peut ainsi être considéré comme une extension du


modèle RIF.

Dans le cas d’un système possédant un retard pur important, pouvant varier
entre d1T et d2T, [FIN 93] suggèrent d’utiliser un modèle dit de Markov-Laguerre,
du fait qu’il combine les fonctions de base de Laguerre [9.58] et celles de la base
polynomiale [9.78]. La fonction de transfert opératorielle du système est alors
développée sous la forme suivante :
d2 ∞
H(q) = Σ cj q + Σ
-j -d 2
cd +j
2
Lj(q) q [9.80]
j=d 1 j=1

La première somme (partie Markov) modélise le retard, tandis que la deuxième


(partie Laguerre) modélise la dynamique du système.

Dans le cas d’un système résonant, avec une dynamique dominante du second
ordre, il est possible d’utiliser comme base de développement φi(j) la base des
fonctions de Kautz discrètes, caractérisées par une paire de pôles complexes
conjugués. Récemment, de nouvelles bases orthonormales dites généralisées ont été
introduites de façon à permettre la prise en compte a priori d’un nombre
quelconque de dynamiques du système à modéliser [HEU 95, NIN 97]. Dans cette
dernière référence, les fonctions de base sont définies par :

Φ i (q ) = 

(
 1 − pi
2
)
 i −1  q −1 − p m 
q  ∏ 
−1
−1 
−1  [9.81]
 1 − pi q  m =1  1 − p m q 
 

où pm représente le nombre complexe conjugué de pm.


338 Conception de commandes robustes

Les modèles RIF, de Laguerre et de Kautz, peuvent être obtenus comme des cas
particuliers de cette base orthonormale généralisée.

9.3.4. Calcul des coefficients de Laguerre

Une fois l’ordre n et le pôle p du modèle de Laguerre fixés, il reste à déterminer


les coefficients ci. Ils peuvent être obtenus par simple simulation. Ainsi, en
supposant connue la réponse impulsionnelle du système, une méthode de calcul
direct consiste à appliquer l’équation [9.62] en prenant pour li(j) le j-ième point de
la réponse impulsionnelle du filtre Li(q), ou l’expression analytique de l’original de
la transformée en z définie en [9.58] [FU 93] :

 i −1 
li ( j) = 1 − p 2  ∑ ( −p ) Cim−1Cij−+1m −1p j−i + mυ ( j − i + m )
m
[9.82]
 m=0 
où υ(j) est la fonction échelon unité et Cij le coefficient binomial égal à i! pour
j! (i-j)!
0 ≤ j ≤ i, et à 0 sinon.

Ils peuvent aussi être déterminés à travers une étape d’estimation paramétrique.
Les équations d’état [9.74] sont alors simulées avec une séquence d’entrée {u(k)}
quelconque, puis le vecteur C des coefficients de Laguerre est estimé en appliquant
la méthode des moindres carrés à l’équation de mesure déduite de [9.66] :

y(k) = X (k) C + ξ(k)


T
[9.83]

où y(k) et ξ(k) représentent respectivement la mesure de la sortie du système, obtenue


pour la séquence d’entrée {u(k)} et l’erreur de modélisation. Cette méthode a été
utilisée par [ZER 88], dans le cadre d’une commande prédictive adaptative. Les
propriétés statistiques asymptotiques de cet estimateur sont étudiées dans [WAH 91].

9.3.5. Modèle incertain de Laguerre

Comme nous l’avons vu précédemment, les paramètres caractéristiques du


modèle de Laguerre sont les coefficients ci (i = 1, ..., n). Dans ce qui suit, nous
considérons des incertitudes paramétriques structurées, définies à l’aide
d’intervalles d’appartenance :
cmin,i ≤ ci ≤ cmax,i [9.84]
correspondant à un domaine d’incertitude paramétrique de forme orthotopique,
comme défini en [9.44] :
Modélisation de Laguerre 339

{
C = c ∈ ℜn : ci = ci + εci ∆ci , εci ∈ [−1, 1],i = 1,..., n } [9.85]

où ci, ∆ci ≥ 0 et ε ci représentent respectivement la valeur nominale, l’écart absolu


maximum par rapport à cette valeur nominale et l’incertitude du coefficient ci :

ci = 1 (cmax,i + cmin,i ) , ∆ci = 1 (cmax,i - cmin,i ) [9.86]


2 2

où cmin,i et cmax,i représentent les bornes relatives au paramètre ci.

Désignant par ε = [εc1 ... εcn] le vecteur des incertitudes paramétriques du


T

modèle de Laguerre et compte tenu que εci ∈ [– 1, 1], nous avons ε ∈ Ω, où Ω


représente l’orthotope centré en l’origine et dont la demi-longueur de chaque côté
est égale à 1. Par suite, le modèle incertain de Laguerre, paramétré par le vecteur ε
des incertitudes, s’écrit sous la forme suivante :

X(k) = A X(k-1) + b u(k – 1) [9.87]

y(k) = C (ε) X(k)


T
[9.88]

la matrice A et le vecteur b, définis en [9.75], étant indépendants de ε, et avec :

C (ε ) = C + δC (ε ) [9.89]
où :
C = c1 ... c n  , δC (ε ) = ε c1 ∆c1 ,..., ε cn ∆c n 
T T
[9.90]

Les paramètres ci et ∆ci (i = 1, ... , n) qui caractérisent le domaine d’incertitude


paramétrique C peuvent être déterminés soit par application d’une méthode
d’identification basée sur l’approche à erreur bornée, soit par exploitation directe
d’un ensemble de M réponses impulsionnelles mesurées [OLI 98].

Dans le premier cas, l’erreur de modélisation, i.e. l’écart ξ(k) entre la sortie
mesurée du système à identifier et celle du modèle de Laguerre :

ξ(k) = y(k) - y(k) [9.91]

est supposée inconnue mais bornée et de borne emax(k) ≥ 0 connue :

ξ(k) ≤ emax(k) [9.92]


340 Conception de commandes robustes

L’ensemble S des vecteurs de paramètres C compatible avec la structure du


modèle [9.87]-[9.88], les bornes de l’erreur de modélisation [9.92] et un ensemble
de K mesures entrée/sortie {u(k), y(k)}, est défini par :
T
S = {C / y(k) – emax(k) ≤ X (k) C ≤ y(k) + emax(k) ; k = 1, ... , K} [9.93]

L’ensemble S peut être vu comme une partie de l’espace paramétrique délimitée


par K paires d’hyperplans parallèles H1(k) et H2(k) définis par :

T
H1(k) = {C / X (k) C = y(k) – emax(k)} [9.94]

T
H2(k) = {C / X (k) C = y(k) + emax(k)} [9.95]

L’ensemble S est alors donné par :


K

S = ∩ (H 1 (k) ∩ H 2 (k))
+ +
[9.96]
k=1
où :
+
H 1 (k) = {C / X (k) C ≥ y(k) - e
T
max(k) } [9.97]

+
H 2 (k) = {C / X (k) C ≤ y(k) + e
T
}
max(k) [9.98]

L’ensemble S est un polytope dont la détermination peut devenir très complexe


lorsque le nombre K de mesures augmente. En pratique, on approche le polytope
par un ensemble de forme géométrique plus simple, comme par exemple un
ellipsoïde ou un orthotope. Dans [MES 94], un algorithme récursif permettant de
déterminer une approximation de S sous forme orthotopique est proposé. Cet
algorithme délivre directement des bornes cmin, i et cmax, i pour chaque paramètre ci.

Une deuxième approche consiste à exploiter un ensemble de M réponses


m
impulsionnelles mesurées {h (k), m = 1, ..., M}. A partir de la relation [9.62], nous
pouvons déterminer un jeu de coefficients {c i } pour chaque réponse
m

m
impulsionnelle {h (k)} :

c i = Σ h (j) l i(j)
m m
[9.99]
j=0

li(j) étant soit obtenu à partir de la simulation de la réponse impulsionnelle du filtre


Li(q), soit pris égal à l’expression analytique [9.82]. Du jeu de coefficients {c i },
m

nous déduisons les bornes suivantes :


Modélisation de Laguerre 341

m m
cmin, i = min c i , cmax, i = max c i ; i = 1, ... , n [9.100]
m m

9.3.6. Prédicteur à i pas de la sortie d’un modèle de Laguerre

Comme nous l’avons vu dans les sections 9.1 et 9.2, les méthodes de commande
MPC utilisent les prédictions y(k + i/k) de la sortie du système sur l’horizon de
prédiction [k + 1, k + Np]. Dans ce qui suit, nous déterminons le prédicteur à i pas
de la sortie, construit sur un modèle de Laguerre mis sous forme incrémentale. En
supposant l’erreur de modélisation ξ(k) négligeable et après multiplication par le
polynôme ∆(q) = 1 – q , les équations [9.74] et [9.83] s’écrivent sous la forme
-1

incrémentale suivante :

δX(k) = A δX(k – 1) + b δu(k – 1) [9.101]

y(k) = y(k – 1) + C δX(k)


T
[9.102]

où les incréments du signal de commande et du vecteur d’état sont définis par :

δu(k) = u(k) – u(k-1), δX(k) = X(k) – X(k – 1) [9.103]

La prédiction à i pas de la sortie se déduit de l’équation de mesure [9.102] :

y(k + i/k) = y(k + i – 1/k) + C δX(k + i) , i ≥ 1


T
[9.104]

où y(k + i/k) signifie que la prédiction à l’instant (k + i)T est calculée à partir des
mesures de la sortie effectuées jusqu’à l’instant kT.

D’après l’équation [9.101], on a :


i
δX(k+i) = A δX(k) + Σ A b δu(k+j-1)
i i-j
[9.105]
j=1

La substitution de [9.105] dans [9.104] donne :


i
Σ
T i T i-j
y(k+i/k) = y(k+i-1/k) + C A δX(k) + C A b δu(k+j-1) [9.106]
j=1

ou encore :
342 Conception de commandes robustes

y(k+i/k) = y(k+i-2/k) + C T Ai + Ai-1 δX(k) +


i i-1
Σ Σ
T i-j i-1-j
C A + A b δu(k+j-1)
j=1 j=1 [9.107]

Par substitution successive et en tenant compte du fait que y(k/k) = y(k), on


obtient :
T i i-1
y(k+i/k) = y(k) + C A + A + ... + A δX(k) +
i i-1 1
Σ Σ Σ
T i-j i-1-j 1-j
C A + A + ... + A b δu(k+j-1) [9.108]
j=1 j=1 j=1

ou encore, après une réorganisation des sommes :

i
 i− j 
y ( k + i k ) = y ( k ) + CT ∑ A jδX ( k ) + CT ∑  ∑ Am  b δu ( k + j − 1)
L

[9.109]
j=1 j=1  m = 0 

Définissant :
i
Ki = Σ A pour i ≥ 0
j
et Ki = 0 pour i < 0 [9.110]
j=0

nous obtenons :
i
Σ
T T
y(k+i/k) = y(k) + C Ki - In δX(k) + C Ki-j b δu(k+j-1) [9.111]
j=1

Par suite, la prédiction à i pas de la sortie se décompose sous la forme [9.1]


avec :
y1(k + i/k) = y(k) + C [Ki – In] δX(k)
T
[9.112]

i
Σ
T
yf (k+i/k) = C Ki-j b δu(k+j-1) [9.113]
j=1

Le vecteur Y(k) des prédictions, sur l’horizon de prédiction [k + 1, k + Np], se


décompose alors en :
Y(k) = Yf(k) + Y1(k) = G δU(k) + Y1(k) [9.114]

où le vecteur Yl(k) peut être calculé en utilisant [9.112] pour i = 1, ..., N p, δU(k) est
le vecteur des incréments de commande, de dimension Np :
Modélisation de Laguerre 343

δU(k) = [δu(k) δu(k + 1) ... δu(k + Np – 1)]


T
[9.115]

et la matrice G, de dimensions (Np, Np), est donnée par :

g1 0 0
g2 g1 0
G= [9.116]

gNp gNp -1 g1

où :
T
gi = C Ki-1 b [9.117]
T j-1
En utilisant la définition [9.110] de Ki et en notant que hj = C A b, on a :
i-1 i
gi = Σ C A b = Σ hj
T j
[9.118]
j=0 j=1

Les éléments gi représentent donc les coefficients de la réponse indicielle du


modèle de Laguerre.

Dans le cas d’un modèle incertain de Laguerre, décrit par les équations [9.87]-
[9.88], nous avons vu que les incertitudes paramétriques désignées par ε sont
localisées uniquement au niveau du vecteur C. Le prédicteur à i pas de la sortie se
décompose alors en :

y(k + i/k, ε) = y1(k + i/k, ε) + yf(k + i/k, ε) [9.119]

avec, d’après [9.112] et [9.113] :

y1(k + i/k, ε) = y(k) + C (ε) [Ki – In] δX(k)


T
[9.120]

i
yf ( k + i k, ε ) = CT (ε ) ∑ K i − j b δu ( k + j − 1) [9.121]
j=1

En considérant le vecteur des prédictions sur l’horizon [k + 1, k + N p], la


décomposition [9.114] devient :

Y(k, ε) = Yf(k, ε) + Y1(k, ε) = G(ε) δU(k) + Y1(k, ε) [9.122]


344 Conception de commandes robustes

où le vecteur Y1(k, ε) est calculé en utilisant l’expression [9.120] pour i = 1, ..., N p,


et la matrice G(ε), de dimensions (Np, Np), est donnée par :

g1 (ε) 0 0

g2 (ε) g1 (ε) 0
G(ε) =
[9.123]

gN (ε) gN -1(ε) g1 (ε)


p p

où :
gi(ε) = C (ε) Ki-1 b
T
[9.124]

A partir des formules [9.120] et [9.121], nous pouvons conclure que les
composantes y1(k + i/k, ε) et yf(k + i/k, ε) sont des fonctions affines du vecteur ε des
incertitudes paramétriques. Par suite, le prédicteur à i pas est lui-même une fonction
affine de ε, propriété fondamentale qui sera exploitée dans la section suivante.

9.4. Algorithmes RMPC utilisant une modélisation de Laguerre

Dans cette section, nous allons présenter des algorithmes de commande


prédictive robuste (RMPC) basés sur une stratégie du pire cas, consistant à
minimiser un critère de la forme [9.47], et une modélisation incertaine de Laguerre
déduite de la forme incrémentale [9.101]-[9.102] :

δX(k) = A δX(k-1) + b δu(k – 1) [9.125]

y(k) = y(k – 1) + C (ε) δX(k)


T
[9.126]

L’ordre n et le pôle p du modèle de Laguerre, ainsi que le domaine d’incertitude


paramétrique de forme orthotopique défini en [9.85], sont supposés avoir été
préalablement identifiés. Le modèle incertain de Laguerre est paramétré par le
vecteur ε (∈ Ω) des incertitudes paramétriques et l’ensemble des modèles du
système à commander est donc décrit par l’orthotope Ω. Dans ce qui suit, nous
considérons que les commandes et les incréments de commande futurs doivent
satisfaire les contraintes suivantes sur l’horizon de commande Nu ≤ Np :

um ≤ u(k + i) ≤ uM ∀i ∈ [0, Nu – 1] [9.127]

δum ≤ δu(k + i) ≤ δuM ∀i ∈ [0, Nu – 1] [9.128]

avec, par définition de l’horizon de commande :


Modélisation de Laguerre 345

δu(k + i) = 0 pour i ≥ Nu [9.129]

Définissant les vecteurs δU et V, de dimensions respectives Nu et 4Nu, et la


matrice Γ de dimensions (4Nu, Nu) :

δu(k) INu δUM


δU = δu(k+1) , -I
Γ = Nu , V= -δUm [9.130]
D1 UM-V1
δu(k+Nu-1) -D1 -Um+V1
les contraintes [9.127]-[9.128] peuvent être réécrites sous forme matricielle, en
fonction du vecteur δU des incréments de commande futurs :

Γ δU ≤ V [9.131]

les vecteurs UM, Um, δUM et δUm, de dimension Nu étant définis comme en [9.32],
tandis que la matrice D1 et le vecteur V1, de dimensions respectives (Nu, Nu) et Nu,
sont définis comme en [9.38]. Ces contraintes de type inégalité définissent
l’ensemble admissible δΨ des incréments de commande futurs :

δΨ = {δU / Γ δU ≤ V} [9.132]

Par suite, la stratégie du pire cas va consister à résoudre le problème


d’optimisation min-max suivant :

Min Max J( δU,ε) [9.133]


δU∈δΨ ε ∈Ω

c’est-à-dire minimiser par rapport au vecteur δU appartenant à l’ensemble


admissible δΨ le maximum du critère J(δU, ε) vis-à-vis du vecteur ε ∈ Ω. Comme
pour toutes les méthodes de commande prédictive, une stratégie à horizon glissant
est appliquée, à savoir qu’à l’instant kT, seule la première commande optimisée
u(k) est appliquée au système, avec :
u(k) = u(k – 1) + δu(k) [9.134]

Trois critères J(δU, ε) sont envisagés ci-après : ils utilisent respectivement la


norme euclidienne, la norme infinie et la norme l1.

9.4.1. Critère quadratique

Nous considérons ici le problème d’optimisation min-max basé sur l’utilisation


du critère quadratique [9.13] exprimé en fonction des incréments de commande
futurs et du vecteur d’incertitude ε intervenant au niveau du prédicteur :
346 Conception de commandes robustes

Min Max J (δU,ε )


δU∈δΨ ε ∈Ω 2 [9.135]
avec :
Np 2 N u −1
J 2 (δU, ε ) = ∑  y ( k + i k, ε ) − r ( k + i ) + ∑ λ (i ) δu ( k + i )
2 [9.136]
i =1 i 0

En utilisant la décomposition [9.122] du vecteur des prédictions et les


développements du paragraphe 9.2.2, ce critère peut être réécrit sous la forme
matricielle suivante :
Τ Τ
J2(δU, ε) = δU Μ(ε) δU + 2 β (ε) δU + γ(ε) [9.137]

où M(ε) est une matrice définie positive de dimensions (Nu, Nu), β(ε) un vecteur de
dimension Nu et γ(ε) un scalaire, définis comme :

M(ε) = G (ε) G(ε) + Λ , β(ε) = G (ε) [Y1(ε) – R]


T T

Τ
γ(ε) = [Y1(ε) – R] [Y1(ε) – R] [9.138]

A noter que, compte tenu de l’introduction de l’horizon de commande Nu, la


formule [9.121] devient :
Min(i,Nu )
yf(k+i/k, ε) = CT(ε) Σ Ki-j b δu(k+j-1) [9.139]
j=1

Définissant la matrice Ψi de dimensions (n, Nu) :

Ψi = [Ki-1 b ... Ki-Nu b] [9.140]

la composante yf(k + i/k,ε) du prédicteur peut être réécrite en fonction du vecteur


δU des incréments de commande à optimiser :
y f ( k + i k, ε ) = CT (ε ) Ψ i δU [9.141]

D’autre part, d’après [9.139], on déduit que l’introduction d’un horizon de


commande Nu induit une dimension réduite (Np, Nu) pour la matrice G(ε) qui devient :

g1 (ε) 0 0
g2 (ε) g1 (ε)
G(ε) = 0
[9.142]
gNu (ε) g1 (ε)

gNp (ε) gNp-Nu+1 (ε)


Modélisation de Laguerre 347

Comme nous l’avons signalé à la section précédente, la matrice G(ε) et le


vecteur Y1(ε) sont des fonctions affines du vecteur d’incertitude ε. Le critère
J2(δU, ε) est donc quadratique à la fois vis-à-vis du vecteur δU et du vecteur ε.
Définissant la quantité scalaire µ*(δU) solution du problème :

µ * (δU ) = Max J 2 ( δU, ε )


[9.143]
ε ∈Ω
tout scalaire µ > 0 qui satisfait la contrainte :

µ ≥ J2 (δU,ε) , ∀ε ∈Ω [9.144]

est une borne supérieure de µ*(δU). Par suite, le problème d’optimisation min-max
peut être reformulé de façon à chercher la plus petite borne supérieure µ et un
vecteur δU satisfaisant les contraintes [9.131] et [9.144], ce qui revient à résoudre le
problème d’optimisation suivant :

Min µ [9.145]
µ, δU
avec :
µ ≥ J2(δU, ε) , ∀ε ∈ Ω [9.146]

Γ δU ≤ V [9.147]

Le problème d’optimisation s’exprime maintenant en termes d’une fonction


objectif, linéaire en les variables de décision δU et µ, d’un ensemble fini [9.147] de
contraintes linéaires en δU, et d’un ensemble infini [9.146] de contraintes linéaires
en µ et quadratiques en δU. Nous montrons ci-après qu’il est possible de se ramener
à un nombre fini de contraintes.

Mis sous la forme matricielle [9.14], le critère [9.136] peut être réécrit comme :

J2(δU,ε) = ||Y(k,ε) – R(k)|| + ||Λ δU(k)||


2 1/2 2
[9.148]

Notant que J2 est une fonction strictement convexe de Y(k,ε) et ayant montré au
paragraphe 9.3.6 que Y(k,ε) est une fonction affine de ε, l’application du théorème
suivant (voir la démonstration en annexe) nous permet de conclure que le critère J 2
est une fonction strictement convexe de ε.

THÉORÈME 9.1.– Si la fonction scalaire J(Y), à valeurs réelles, est strictement


convexe vis-à-vis de Y ∈ ℜ et si la fonction Y(ε) est affine vis-à-vis de ε ∈ ℜ ,
Np n

alors la fonction composée F(ε) = J [Y(ε)] est strictement convexe vis-à-vis de ε.


348 Conception de commandes robustes

THÉORÈME 9.2.– Etant donnée une fonction convexe J définie sur un ensemble Ω
convexe fermé, si J admet un maximum dans Ω, alors ce maximum est atteint en un
point extrême de Ω.

D’après le théorème 9.2 [LUE 84] on peut simplifier le problème d’optimisation


n
[9.145]-[9.147]. En effet, le domaine d’incertitude paramétrique Ω (⊂ ℜ ) étant un
orthotope, il s’agit d’un ensemble convexe fermé dont les points extrêmes sont ses
n
2 sommets. Par application du théorème 2, il est donc suffisant de considérer le
n
sous-ensemble fini constitué des 2 contraintes [9.146] associées à l’ensemble S(Ω)
des sommets de l’orthotope Ω. Le problème d’optimisation se simplifie alors en :
Min µ [9.149]
µ, δU
avec :
µ ≥ J2(δU,ε), ∀ε ∈ S(Ω) [9.150]

Γ δU ≤ V [9.151]

Le nombre de contraintes de type inégalité à prendre en considération est donc


n
égal à (2 + 4Nu), où n est l’ordre du modèle de Laguerre.

Les avantages d’une modélisation incertaine de Laguerre sont :


– d’une part de nécessiter un nombre (n) de paramètres nettement inférieur à
celui d’un modèle de type réponse impulsionnelle ;
– d’autre part de garantir la convexité du critère vis-à-vis du vecteur d’incertitude
ε et donc de permettre une simplification du problème d’optimisation, comme nous
venons de le voir. Ceci n’est pas le cas avec un modèle CARIMA [GUT 95].

En remarquant que :

Np 2 Np 2

Max ∑  y ( k + i k, ε ) − r ( k + i ) ≤ ∑ Max  y ( k + i k, ε ) − r ( k + i )


i 1 i =1
[9.152]
ε ∈Ω ε ∈Ω

et en appliquant le même raisonnement que précédemment, une solution sous-


optimale du problème d’optimisation [9.149]-[9.151] peut être obtenue en résolvant
le problème de programmation quadratique (PQ) suivant :

T T
Min µ µ + δU Λ δU [9.153]
µ, δU
Modélisation de Laguerre 349

avec :
– µ ≤ G(ε) δU + Y1(ε) − R ≤ µ, ∀ε ∈ S(Ω) [9.154]

Γ δU ≤ V [9.155]

où µ = [µ1 ... µNp] est un vecteur de dimension Np. La fonction objectif est
T

quadratique en les variables de décision δU et µ, tandis que les contraintes, au


n+1
nombre de (2 Np + 4Nu), sont linéaires en ces mêmes variables.

9.4.2. Critère basé sur la norme infinie

Nous considérons ci-après un critère faisant appel à la norme infinie :

Min Max J ∞ (δU, ε )


[9.156]
δU ∈ δΨ ε ∈ Ω
avec :
J ∞ (δU, ε ) = Max y ( k + i k, ε ) − r ( k + i )
[9.157]
i = 1, ..., N p

En utilisant le même raisonnement que précédemment, le problème d’optimisation


min-max [9.156] peut être réécrit comme :

Min µ [9.158]
µ, δU
avec :
– 1µ ≤ G(ε)δU + Y1(ε) – R ≤ 1µ ∀ε ∈ S(Ω) [9.159]

Γ δU ≤ V [9.160]

où 1 est un vecteur de dimension Np, composé de 1. La fonction objectif et les


contraintes étant linéaires en les variables de décision δU et µ, il s’agit ici d’un
problème de programmation linéaire (PL), avec (Nu + 1) variables de décision et
n+1
(2 Np + 4Nu) contraintes. Ce problème peut être formulé dans la forme standard :

Min
x
cT x avec Ax ≥ b, x ≥0 [9.161]

Définissant le vecteur x, de dimension (Nu + 1), comme :

δU - δUm
x= [9.162]
µ
350 Conception de commandes robustes

on a :

T T T T T T T T T
c = 0 ... 0 1 , A = A1 ... A2 n AδU , b = b1 ... b2 n bδU [9.163]
Nu

avec, d’après [9.159] :

-G(εj) 1 -R+Y1 (εj)+G(εj)δUm n


Aj = , bj = , j = 1, ..., 2
G(εj) 1 R-Y1 (εj)-G(εj)δUm [9.164]

et, à partir de [9.130]-[9.131], on déduit :

-INu 0 δUm - δUM


AδU = -D1 0 , bδU = -UM+V1 + D1 δUm [9.165]
D1 0 Um-V1 - D1 δUm
où εj (j = 1, ..., 2 ) représente le vecteur des incertitudes associé au j-ième sommet
n

de l’orthotope Ω.

Le nombre de contraintes étant beaucoup plus élevé que celui de variables de


décision, il est numériquement moins coûteux de résoudre le problème dual
correspondant [FLE 81] :
T
Min - b λ avec A λ ≤ c , λ≥0
T
[9.166]
λ

n+1
qui fait intervenir (2 Np + 3Nu) variables et (Nu+1) contraintes.

Une autre solution moins coûteuse en temps de calcul, que nous présentons ci-
après, consiste à réduire le nombre de contraintes en simplifiant le calcul du
maximum du critère J∞(δU, ε) vis-à-vis du vecteur d’incertitude ε. Cette
simplification a été proposée par [ALL 92] dans le cas d’un modèle incertain de
type réponse impulsionnelle.

Définissant le vecteur vi(k), de dimension n :


vi(k) = [Ki – In] δX(k) [9.167]

et compte tenu de la décomposition [9.89] du vecteur C(ε), le prédicteur à i pas


défini à l’aide des formules [9.119], [9.120] et [9.141] peut être réécrit comme :

y ( k + i k, ε ) = y ( k ) + C T vi ( k ) + C T Ψ i δU + δCT (ε )  vi ( k ) + Ψ i δU  [9.168]
Modélisation de Laguerre 351

où la matrice Ψi est définie en [9.140]. Par suite, en utilisant la définition [9.90] de


δC(ε), on a :

y(k+i/k, ε) - r(k+i) =
T T n
y(k) + C vi(k) + C Ψ iδU - r(k+i) + Σ
j=1
ε c ∆cj
j
vij(k) + Ψ i:jδU [9.169]

où vij(k) et Ψi:j représentent respectivement le j-ième élément du vecteur vi(k) et la


j-ième ligne de la matrice Ψi. En inversant l’ordre du calcul des maxima et en tenant
compte du fait que |εcj| ≤ 1 et ∆cj ≥ 0, on en déduit que :

Max J∞(δU, ε) = Max Max y(k+i/k, ε) - r(k+i) = [9.170]


ε ∈Ω ε ∈Ω i=1, ..., Np

 n

Max  y ( k ) + C vi ( k ) + C Ψ i δU − r ( k + i ) + ∑  vij ( k ) + Ψ i:j δU  ∆c j 
T T

 j=1 
i = 1, ...N p

[9.171]

Cette dernière expression fournit le maximum de J∞(δU, ε) vis-à-vis de ε ∈ Ω,


sans avoir à considérer les 2 sommets de Ω, ce qui conduit à une réduction très
n

importante du volume de calcul. La minimisation par rapport au vecteur δU de ce


maximum est ensuite effectuée en résolvant un problème PL. En utilisant le même
raisonnement qu’au paragraphe 9.4.1, le problème d’optimisation min-max [9.156]-
[9.157] peut être réécrit dans la forme équivalente suivante :

Min µ [9.172]
µ, α, B, δU
avec :
T T
-α i ≤ y(k) + C vi(k) + C Ψ iδU - r(k+i) ≤ α i i = 1, ..., Np [9.173]

-βij ≤ vij(k) + Ψ i:jδU ≤ βij i = 1, ..., Np et j = 1, ..., n [9.174]


n
αi + Σ βij∆cj ≤ µ i = 1, ..., Np [9.175]
j=1

Γ δU ≤ V [9.176]
352 Conception de commandes robustes

où α et B sont respectivement un vecteur de dimension Np et une matrice de


dimensions (Np, n), contenant les éléments αi et βij.

Le problème d’optimisation décrit à l’aide de la fonction objectif [9.172] et des


contraintes [9.173]-[9.176] est un problème PL, comportant ((2n + 3)Np + 4Nu)
contraintes. Nous avons donc réduit de façon très sensible le nombre de contraintes
par rapport au problème d’optimisation initial [9.158]-[9.160]. Ainsi, pour
(Np, Nu, n) = (10, 1, 8), le nombre de contraintes passe de 5 124 à 194, ce qui
entraîne bien entendu une réduction importante du temps de calcul au niveau de la
résolution du problème d’optimisation.

Dans [OLI 97, OLI 00], une condition suffisante pour la stabilité du système en
boucle fermée, commandé à l’aide de la loi de commande basée sur le critère
[9.156], dans le cas sans contraintes, est démontrée. Ce résultat fait l’objet du
théorème suivant.

THÉORÈME 9.3.– Etant donné un système décrit à l’aide du modèle incertain de


Laguerre [9.125]-[9.126] et commandé à l’aide de la loi de commande résultant de
l’optimisation min-max sans contraintes suivante :

Min Max Max y(k+i/k, ε ) - r(k+i) [9.177]


δU ε∈ Ω i=1, ..., Np

une condition suffisante pour la stabilité du système en boucle fermée est :

Np ≥ n m + Nu - 1
où nm représente l’ordre maximum des modèles RIF permettant de décrire toutes les
réponses impulsionnelles associées au modèle de Laguerre, caractérisé par le
vecteur d’incertitude ε ∈ Ω.

9.4.3. Critère basé sur la norme l1

Comme nous venons de le voir dans le paragraphe précédent, un critère basé sur
la norme infinie présente l’avantage de permettre une transformation du problème
d’optimisation min-max en un problème PL. Toutefois, un tel critère ne prend
explicitement en compte qu’un point de l’horizon de prédiction, à savoir celui qui
correspond à l’écart maximum entre la sortie prédite et celle désirée. Dans certaines
situations, il est souhaitable que le critère de performance prenne en considération
tous les points de l’horizon de prédiction, comme c’est le cas avec le critère
quadratique étudié au paragraphe 9.4.1.
Modélisation de Laguerre 353

Une autre possibilité consiste à utiliser le critère suivant, basé sur la norme l1 :

Np N u −1
J1 ( δU, ε ) = ∑ y ( k + i k, ε ) − r ( k + i ) + λ ∑ δU ( k + i ) [9.178]
i =1 i=0

Le problème d’optimisation min-max :

Min Max J1 (δU,ε ) [9.179]


δU∈δΨ ε ∈Ω

se ramène alors au problème PL suivant :


Min µ
µ, α, β, δU [9.180]
avec :
– α ≤ G(ε)δU + Y1(ε) – R ≤ α ∀ε ∈ S(Ω) [9.181]
– β ≤ δU ≤ β [9.182]
T T
1Np α+ λ1Nu β≤ µ [9.183]

Γ δU ≤ V [9.184]

où 1Np et 1Nu sont des vecteurs composés de 1, de dimensions Np et Nu respectivement.

En définissant le vecteur x de dimension (Np + 2Nu + 1) comme :

δU - δUm
x= α [9.185]
β
µ

le problème PL [9.180]-[9.184] peut être réécrit dans la forme standard [9.161],


avec :

T T T T T T T T T
c = 0...0 0...0 0...0 1 , A = A1 ... A2 n AδU , b = b1 ... b2 n bδU
Nu Np Nu
[9.186]
avec, d’après [9.181] :

-G(εj) INp 0 0 -R + Y1 (εj) + G(εj)δUm


Aj = , bj = j = 1, ..., 2n
G(εj) INp 0 0 R - Y1 (εj) - G(εj)δUm
[9.187]
354 Conception de commandes robustes

et, à partir de [9.182]-[9.184], on déduit :

INu 0 INu 0 - δUm


-INu 0 INu 0 δUm
T T
0 - 1Np - 1Nu 1 0
AδU = , bδU = [9.188]
-INu 0 0 0 δUm - δUM
-D1 0 0 0 -UM + V1 + D1 δUm
D1 0 0 0 Um - V1 - D1 δUm

n+1
Ce problème PL comporte (Np + 2Nu + 1) variables de décision et (2 Np + 5Nu
+ 1) contraintes. Par suite, le nombre de contraintes étant beaucoup plus élevé que
celui de variables de décision, il sera numériquement plus efficace de résoudre le
problème dual correspondant. Cette dernière solution fournit certainement le
meilleur compromis en termes de précision d’asservissement et de complexité de
calcul. En effet, comme la solution sous-optimale [9.153]-[9.155] basée sur un
critère quadratique, elle permet de prendre en compte l’ensemble des points de
l’horizon de prédiction, faisant appel toutefois non pas à la résolution d’un
problème PQ, mais PL, comme la solution [9.172]-[9.176].

9.5. Résultats de simulation

Nous présentons ci-après quelques résultats de simulation obtenus en appliquant


la méthode de commande prédictive robuste basée sur une modélisation de
Laguerre et la minimisation d’un critère quadratique. Le système simulé correspond
à un réacteur de polymérisation, dont une représentation d’état non linéaire est
décrite à l’aide des équations suivantes :
dx1 (t) = 10 (6-x (t)) - 2,4568 x (t) x (t)
1 1 2
dt

dx2 (t) = 80 u(t) - 10,1022 x (t)


2
dt

dx3 (t) = 0,0024121 x (t) x (t) + 0,1121191 x (t) - 10 x (t)


1 2 2 3
dt

dx4 (t) = 245,978 x (t) x (t)- 10 x (t)


1 2 4
dt

y(t) = x4 (t)
x3 (t)
Modélisation de Laguerre 355

où les signaux d’entrée u(t) et de sortie y(t) représentent respectivement le débit


volumétrique d’entrée et le poids moléculaire moyen du produit polymérisé (méthyle
méthacrylate). Le problème de commande consiste à régler le débit d’entrée de
manière à maintenir le poids moléculaire moyen à des valeurs de consigne fixées a
priori [DOY 95, MAN 96]. Les conditions de fonctionnement nominal du processus
sont telles que : x1(0) = 5,50677, x2(0) = 0,132906, x3(0) = 0,0019752,
x4(0) = 49,3818, u(0) = 0,016783 et y(0) = 25000,5. Les signaux d’entrée/sortie sont
normalisés comme suit :

un (t) = u(t) - u(0) , yn (t) = y(t) - y(0)


u(0) y(0)

En fixant la période d’échantillonnage égale à 0,03 heure, un modèle de


Laguerre discret, incertain, a été identifié à partir d’un ensemble de dix réponses
impulsionnelles obtenues pour des entrées en impulsion d’amplitudes différentes.
Cet ensemble de réponses simulées est tracé sur la figure 9.4. La méthode de
[FU 93] fournit comme pôle de Laguerre p = 0,6704, valeur utilisée pour
déterminer la matrice A et le vecteur b du modèle de Laguerre, définis en [9.75].
L’ordre n du modèle de Laguerre étant fixé égal à 6, la méthode d’identification
basée sur la relation [9.99] donne le vecteur de paramètres incertains suivant :

0,334 ± ε 1 0,104
0,186 ± ε 2 0,112
-0,178 ± ε 3 0,185
C(ε) =
0,154 ± ε 4 0,181
-0,161 ± ε 5 0,120
0,048 ± ε 6 0,220

Les figures 9.5 et 9.6 montrent les signaux d’entrée/sortie obtenus en appliquant
la méthode RMPC basée sur la minimisation du critère quadratique [9.135], avec
comme paramètres de réglage Nu = 1, λ(0) = 0, et deux valeurs différentes (5 et 10)
pour Np. A partir de ces figures, nous pouvons conclure que la prise en compte des
incertitudes paramétriques du modèle de Laguerre, au niveau de la synthèse de la
loi de commande, permet de « robustifier » la linéarisation du processus et en
conséquence les performances du système en boucle fermée.
356 Conception de commandes robustes

-0,005

-0,01

-0,015

-0,02

-0,025

-0,03

-0,035

-0,04

-0,045

-0,05
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 1,4 1,6 1,8 2
Temps (heures)

Figure 9.4. Ensemble de réponses impulsionnelles simulées

Figure 9.5. Signaux d’entrée/sortie pour Np = 5


Modélisation de Laguerre 357

Figure 9.6. Signaux d’entrée/sortie pour Np = 10

9.6. Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons présenté plusieurs algorithmes de commande


prédictive robuste, permettant de prendre en compte des contraintes de saturation du
signal d’entrée et de ses incréments. Ces algorithmes qui utilisent un modèle de
Laguerre présentent l’avantage d’être plus simples à mettre en œuvre que ceux basés
sur un modèle RIF ou CARIMA. Cette simplicité résulte d’une part du faible nombre
de paramètres qui caractérisent un modèle de Laguerre, et d’autre part de la structure
affine du prédicteur associé à un tel modèle. Suivant la norme utilisée au niveau du
critère de performance, l’application d’une stratégie min-max nécessite de résoudre un
problème de programmation linéaire ou quadratique. Des extensions directes de ces
travaux peuvent être envisagées, dans le cas des systèmes linéaires, en considérant une
modélisation basée sur l’utilisation de bases orthonormales généralisées.

D’une manière générale, outre l’aspect modélisation qui constitue l’un des
points-clés de l’approche commande prédictive, la mise en œuvre d’un algorithme
MPC nécessite de réaliser les étapes suivantes :
– identification d’un modèle ou, dans le cas d’une commande robuste, d’un
domaine d’incertitude paramétrique associé à ce modèle, ce qui nécessite de
résoudre différents problèmes : choix du signal test ; estimation des paramètres de
structure et des coefficients du modèle ou des paramètres caractéristiques du
domaine d’incertitude ; validation du modèle ;
358 Conception de commandes robustes

– optimisation du critère de performance qui, dans le cas d’une commande


robuste, revient à résoudre un problème min-max avec la prise en compte de
contraintes sur les signaux d’entrée-sortie. Il est important de noter que
l’introduction de contraintes peut rendre insoluble le problème d’optimisation. Les
contraintes relatives à la commande étant incontournables du fait qu’elles sont
imposées par des limitations physiques des actionneurs, une solution consiste alors
à assouplir les contraintes relatives à la sortie du processus, de telle sorte qu’elles
puissent être violées. Un terme additionnel peut être introduit dans la fonction
objectif de façon à pénaliser ces violations de contraintes [ZAF 93, ZHE 95] ;
– diagnostic de défauts au niveau du système commandé et supervision du
système de commande, de façon à rendre le système plus sûr et la commande plus
efficace. Ce niveau de supervision doit effectuer l’analyse de la stabilité et des
performances du système en boucle fermée, avec à la clé la possibilité de modifier
les paramètres de réglage du système de commande.

De nombreuses méthodes étant disponibles dans la littérature pour réaliser


chacune de ces étapes, une des principales difficultés à laquelle est confronté un
utilisateur réside dans le choix des méthodes les mieux appropriées pour une
application donnée et le réglage des paramètres caractéristiques de ces méthodes.
Ceci explique l’apparition sur le marché de plusieurs logiciels commercialisés au
cours de la dernière décennie [QIN 96].

En conclusion, on peut dire qu’aujourd’hui, la commande prédictive est


certainement l’approche la plus prometteuse pour les applications industrielles,
comme en témoigne son très grand succès dans les raffineries de pétrole, les
industries chimiques, pétrochimiques, métallurgiques ou encore alimentaires.
D’autre part, elle constitue un domaine de recherche ouvert, avec comme objectifs
d’améliorer les méthodes proposées tant pour les systèmes linéaires que non
linéaires. Voir [BEQ 91, MOR 99, RAW 94] pour une revue des principales
méthodes MPC non linéaires.

9.7. Annexe : démonstration du théorème 9.4

THÉORÈME 9.4.– Si la fonction scalaire J(Y), à valeurs réelles, est strictement


convexe vis-à-vis de Y ∈ ℜ et si la fonction Y(ε) est affine vis-à-vis de ε ∈ ℜ ,
Np n

alors la fonction composée F(ε) = J[Y(ε)] est strictement convexe vis-à-vis de ε.

En effet, le gradient de la fonction F(ε) est donné par :

∇ε F(ε) = ∇F(ε) = ∇Y J [Y(ε)] ∇ε Y(ε) [9.189]


Modélisation de Laguerre 359

d’où l’on déduit l’expression suivante de la matrice hessienne de la fonction F( ε) :

∇ εε F(ε) = ∇ F(ε ) = {∇ε Y(ε)} ∇ YY J [Y(ε)] {∇ε Y(ε)} +


2 2 T 2

Np
Σ ∇y i J Y(ε) ∇εε yi(ε)
2
[9.190]
i=1

La fonction Y(ε) étant supposée affine vis-à-vis de ε, nous avons :

∇ εε yi(ε) = 0
2
i = 1, ..., Np [9.191]

D’autre part, la fonction J(Y) étant supposée strictement convexe vis-à-vis de Y,


sa matrice hessienne est définie positive. Par suite, nous déduisons que :

∇ εε F(ε) = ∇ F(ε ) = {∇ε Y(ε)} ∇ YY J [Y(ε)] {∇ε Y(ε)} > 0


2 2 T 2
[9.192]

ce qui implique la stricte convexité de la fonction F(ε) vis-à-vis de ε.

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Index

A linéaire 23, 26, 28, 37


QFT adaptatif 50
α-stabilité 233, 255
continuation des sous-espaces invariants
analyse robuste
291
en performance 189, 196,
contour
203, 213, 223
en stabilité 190, 192, 197, d’isodépassement 76, 88
223 d’iso-amortissement 76, 88
contraintes sur les signaux d’entrée/sortie
B 330, 358
contrôle numérique 137, 143
bande passante 23, 29, 36, 41, 48, 50
convexité 134
base de fonctions orthonormales 332 coût de rétroaction 29
Bézout 102 coût garanti 207-212, 214, 216-219
boucle de rétroaction 27 critère
bras H ∞ 206, 207, 210-215, 217-219
flexible 251
H2 206-210, 214, 215, 217-219
souple 360° 145-151
bruit de mesure 29, 40, 44 quadratique 167, 168

C D
calibrage 77, 78, 83, 90 δ-stabilité 141
cercle de Kalman 104 degré de stabilité 53, 57, 67, 68, 82, 83,
cible 104, 106 85, 86, 88, 94
coefficient d’erreur et de raideur 23, 34 demi-droite d’iso-amortissement 59, 60
comande déplacement de pôles 164
en cascade 50 dérivation
en phase 164 non entière 59, 62
H∞ 247 non entière complexe 94
H2 247 non entière réelle 94
prédictive robuste 320, 344 deux degrés de liberté 25, 45
robuste 26 diagramme
compensateur de Bode 26, 27, 28, 45
équivalent 272-275, 287 de Nichols 26
366 Conception de commandes robustes

domaine gain
d’incertitude paramétrique 329 dynamique 157
fréquentiel 23, 27, 35-37, 47,48 séquencé 179, 180
temporel 23, 27, 35-37, 47, 48 grammien 124
DR-stabilité 203-205, 215, 216
H
DR-stabilité quadratique 205, 206
horizon
E de commande 317, 324
de prédiction 317, 331, 341
ellipsoïde d’incertitude 329
ensemble de valeurs (value set, template) I
30, 32
incertitude 27, 29, 30
équation de Riccati généralisée 278
extension dynamique 161 du modèle 324
polytopique 191-194, 197, 198,
F 203, 204, 215, 216, 223
interpolation de compensateurs 269, 290,
façonnage de la boucle nominale 39 296
facteur
d’amortissement 54-56, 60 L
d’observabilité 284
de gouvernabilité 284 LFT 172
de résonance en asservissement 53- LMI 170, 186, 197-199, 202, 207-209,
55, 82, 91 211, 215, 216, 219, 220, 247, 255
de résonance en régulation 54 LQG 101, 129
LQP 167
de restauration 111, 123
filtre 157, 159, 176, 178 LTR 101, 114, 119
fonction
M
de Lyapunov dépendant des
paramètres 189, 192, 197-199, 202, µ-analyse 172
204, 205, 213, 214, 216, 219, 223 µ-synthèse 163, 271, 273
de sensibilité 25-27, 29, 33, 37, 46, marge
136 de gain 24, 34, 121
forme standard 172 de module 121
fréquence de phase 24, 34, 125
de coupure 26, 36 de retard 34, 125
de résonance 23 méthode du placement de pôles avec
frontière calibrage de fonctions de sensibilité
d’Horowitz 26, 29, 36, 37, 50 135
de sensibilité 37 méthodologie 100
de tolérance 37, 45
mode oscillatoire robuste 61
dominante 37
modèle
G incertain de Laguerre 343, 344
LTI 190-193, 197
gabarit modélisation de Laguerre 320, 331, 344
curviligne, 55, 71-76, 86
fréquentiel 176, 178 O
généralisé 55, 67-71 optimisation convexe 133, 142, 230, 251
vertical 55, 63, 66, 67
Index 367

optimisation min-max 330, 345, 349 robustesse 103, 105, 110, 121, 125
ordre de la paramétrisation N 140, 143, RST 101
145
S
P
sensibilité
paramètre de Youla 275, 282, 296 complémentaire 25, 27, 40, 41, 44,
paramétrisation 48
convexe du contrôleur 137-142 des pôles 160
de Youla 230, 238, 265 sous-espace invariant 281-283, 291
pente et gain asymptotiques 23 spécification 23, 27, 32, 34-36, 45, 50
perturbation 23 des performances 143
pic de résonance 23, 32 stabilité
PID 106, 114, 115 de la boucle fermée 43
pilotage de missile 302 quadratique 189, 197-200
pire des cas 207, 210-213 robuste 189, 198-200
placement structuration 176-178
de pôle 101, 158, 159, 165 structure estimation/commande 269, 271,
de pôle robuste 114 273-275, 277
de pôle avec calibrage de fonctions structure flexible 145
de sensibilité 135-137 synthèse
pôle H ∞ 271, 273
accessoire 110 multi-objectif 215, 219-222
auxiliaire 116, 120, 144 robuste 189, 190, 192, 215, 218,
dominant 108, 109, 115, 143-144, 219
147 système
polytope de matrices 191, 192, 195, 199- à plusieurs entrées et sorties
201, 203, 204, 206, 209-213 (MIMO) 51
prédicteur 322, 332, 345 contrôlé par ordinateur 50
préfiltre 25, 27, 36, 37, 43, 44 incertain SISO 21, 36
problème standard 117, 119 linéaire à paramètres variables 270
procédé multivariable 56, 83, 84, 94 nominal 26, 29, 30
programmation non linéaire 50
linéaire 330, 349
T
quadratique 329, 348
pseudo-dérivée 159 théorème de Nyquist 43
transfert de boucle 102, 106
Q transformation fractionnaire linéaire 275
QFT (méthode) 21, 26
Qsyn (logiciel) 22, 31 V
valeur propre 158
R variable d’interpolation 269, 290
région LMI 203, 204, 205 vecteur propre 158
régulateur numérique robuste 133, 135,
136 Z
relation de Bode 29 zéro du demi-plan droit 29
restauration 101, 121, 126
retard 29, 40, 50
retour d’état 215-219

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