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ATHLÉTISME

PHOTO : AGENCE SAM / MARC BEAUDENON

COURSE DE VITESSE

ACQUERIRETSTABILISER
T a b l e a u 1. Comprendre l'évolution que vit actuelle-
ment l'athlétisme scolaire n'a de sens que si
l'on se réfère aux nouvelles orientations
que connaît l'EPS (1). Les conséquences di-
dactiques sont importantes mais nécessi-
tent une analyse critique à propos de leurs
mises en œuvre.

Quelles transformations fondamentales y trou-


vons-nous ? L'athlétisme qui s'est défini j u s q u ' à
présent par une recherche et une évaluation qua-
si exclusive de la performance doit aujourd'hui
intégrer la prise en compte des savoirs acquis uti-
lisés lors de la réalisation.

L'ATHLÉTISME ET LE DOMAINE 1
Le milieu stable qui caractérise le domaine 1
dont fait partie l'athlétisme vise à développer
chez l'élève la capacité à produire et reproduire
une efficience dans une zone de réalisation la
plus élevée possible. Si nous appuyons notre ré-
flexion sur les courses (configuration espace-
temps que représente une distance à parcourir
dans un temps minimum), l'élève devra ap-
prendre à vaincre l'inertie en mobilisant ses res-
sources, pour atteindre un niveau de performan-
ce, avec un rendement optimal. Mais cette
volonté éducative n'est-elle pas contrariée par
des dominantes conceptuelles ? Le dépassement
de soi. la performance, le record, l'exploit qui
sont dans la logique de l'activité compétitive de
haut niveau, sont autant de représentations que
l'élève a et que nous devrons modifier.

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Tableau 2 - Acquisitions attendues par niveau de classe, activité support : la vitesse.

Tableau 3 - Principes opérationnels évalués en vitesse sur 3 x 60 m,


l'évaluation sera réalisée sur un test ponctuel.
PHOTO : AUTEUR

Réagir vite

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Accélérer rapidement
présentant 8 0 % de celle n o r m a l e m e n t c o u r u e
(80 m pour un 100 m ) ,
e
- une 2 évaluation en fin d e cycle portant sur
un départ en starting-block sur u n e distance de
30 m.

QUELLES MODALITÉS D'ÉVALUATION


RETENIR ?

Les contraintes auxquelles les enseignants sont


confrontés (beaucoup d'élèves par classe, sé-
quences horaires souvent réduites, évaluation
PHOTO : AUTEUR

dans un m ê m e acte de l'efficience et des savoirs


stabilisés) nécessitent la mise en œuvre de condi-
tions d'évaluation mais aussi d'outils qui soient
facilement gérables et efficaces.
Il s'agit de vérifier et d e certifier le niveau d ' a c -
quisition des élèves face aux savoirs appris du-
LES OBJECTIFS GÉNÉRAUX Le coefficient permet-il u n e notation aisée ? rant le cycle. 11 devient d o n c indispensable d e
constater leur capacité à reproduire son exécu-
Nous tentons alors de définir les objectifs géné- Nous avons pu constater q u ' a v e c une population
tion.
raux du domaine 1. à partir des trois types de sa- moyenne, répartie sur d e s classes de lycée allant
de la seconde à la terminale, environ 75 % d e c e s Nous proposons un outil (tableau 3) qui a le m é -
voirs à enseigner q u e sont les principes opéra- rite d'être simple d'emploi (2). Néanmoins, l'en-
tionnels, les principes d'action et les principes de élèves accèdent au coefficient 1 ou 0 . 9 5 . Cela
correspond bien au souhait institutionnel de pla- seignant doit s'exercer au cours de séances et/ou
gestion (tableau 1). de situations précédant l'évaluation, car la prise
cer les élèves moyens à ce niveau d e coefficient.
La notation n ' e n est pas pour autant facilitée ! En d'informations nécessite une observation rapide
COEFFICIENT ET PRINCIPES ÉVALUÉS effet, le seul moyen de réguler les notes ne peut des indices corporels recherchés.
être réalisé que par la mise en place de critères de
L'évolution actuelle présente un double enjeu : Exemple :
réussite plus contraignants. Prenons l ' e x e m p l e
- une minimisation de la performance, celle-ci ne
de l'évaluation d ' u n e maîtrise gestuelle des trois nd
Pour une classe d e 2 dont l'épreuve est un 80 m.
disparaît pas mais son importance est diminuée.
principes opérationnels suivants. « réagir vile, départ debout, le test consiste à courir trois 60 m
L'effet pris en c o m p t e est une zone d e perfor-
accélérer rapidement, arriver vite ». établie à avec un temps de récupération entre chaque pas-
m a n c e ( c ' e s t - à - d i r e u n e f o u r c h e t t e d e perfor-
partir d ' u n 60 m. Pour un élève moyen, sérieux et sage de 10 à 15 mn au cours duquel, l'élève re-
mances) que l'élève doit pouvoir reproduire en
assidu, il pourra réaliser ces exigences et obtenir tourne en marchant jusqu'à la ligne d e départ,
permanence. O r . pour cela, il faut maîtriser cer-
c o m m e note pour la maîtrise d e l'exécution d e 16 puis effectue des étirements des chaînes muscu-
tains principes opérationnels et/ou d'action :
à 2 0 . affectée d ' u n coefficient I au p l u s . P a r laires sollicitées et enfin trottine pour entretenir
- une nouvelle mise en œuvre des savoirs que la
conséquent, une excellente note finale. le niveau d'excitabilité n e u r o - m u s c u l a i r e exis-
profession réclame et c h e r c h e à définir depuis
des années. tant. En fonction du meilleur temps réalisé sur un
Quels sont les risques ? 80 m. le temps demandé sur les 6 0 m sera infé-
Nous nous appuyons sur des interventions faites
avec des classes de secondes, premières et termi- • Une simplification des savoirs enseignés et des rieur d e 2 à 2,5 sec. Trois critères peuvent être
nales au cours desquelles quelques questions ont exigences des critères de réussite lors de l'éva- l'objet d e l'évaluation, correspondant aux trois
émerge. luation. La c o n s é q u e n c e directe serait alors principes opérationnels déjà cités.
d ' a v o i r des m o y e n n e s d e classe trop élevées qui • Si « réagir vite à un signal » est réalisé, cela
P o u v o n s - n o u s parler judicieusement d'objec- pourraient discréditer l'activité et l'enseignant sous-entend q u e :
tifs-planchers ? lui-même. - l'attention au signal est importante,
Il semble que cela soit souhaitable pour clarifier • Une complexification excessive des contenus, - la position des j a m b e s est fléchie,
les objectifs initiaux visés par l'enseignant. Tou- a v e c le r i s q u e d e d e v e n i r p e u t - ê t r e très t e c h - - la répartition du poids est bien sur les deux ap-
tefois, la pratique montre q u ' a v e c une m ê m e clas- nique, ce qui reviendrait à une dérive technocen- puis.
se de première, les contenus abordés (tableau 2) trée sur l ' A P S et donc ne plus faire de l ' E P S . • Si « prendre rapidement sa vitesse maximale »
e e
ont été puisés du niveau 6 /5 j u s q u ' a u niveau ter- Sans doute la solution se trouve-t-elle entre les est effectué, cela indique que :
minale. En fait, plus q u ' à des cycles d'enseigne- deux excès qui pourrait se concrétiser lors d ' u n - l'utilisation des bras est bonne,
ment, c e s contenus s'adressent avant tout à d e s cycle de vitesse avec une classe de première par : - la position du corps est alignée,
niveaux de réalisation et par conséquent aident à re
- une 1 évaluation à une période déterminée du - il y a une augmentation fréquence/amplitude.
différencier l'apprentissage fourni aux élèves. cycle portant sur un départ debout, distance re- • Si « terminer vite sa course » est obtenu, cela
signifie que :
- l'élève reste en position de course,
- les genoux sont hauts,
- l'alignement tête-tronc-jambes est maintenu.

LA STABILISATION

A partir de quand et c o m m e n t prendre en c o m p -


te la stabilisation ? (tableau 4 ) . Cette notion n o -
vatrice présente l'intérêt de passer de l'évalua-
tion de la réalisation d ' u n e prestation
événementielle à celle d e la maîtrise gestuelle et
de la performance pouvant être reproduites. Tou-
tefois, si la stabilité d ' u n savoir m o t e u r paraît
PHOTO : MARC BEAUDENON

trouver un certain c o n s e n s u s dans son é v a l u a -


tion, il n ' e n est pas de m ê m e pour ce qui est d e la
zone d e performance.
Pour les A P S athlétiques permettant plusieurs es-
sais (sauts, lancers), il paraît concevable d'envi-
sager une zone de performance bien qu'il faille
s'interroger sur ce qu'elle doit être (la m o y e n n e
des essais, l'écart-type, la vérification d ' u n e per-
Arriver vite

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Tableau 4 - Activité support : les courses. Stabiliser pour reproduire sa performance au niveau le plus haut.

formance annoncée et reproduite, etc.). En ce qui vérifier la connaissance q u ' a l'élève de lui-même J e a n L u c Raguz
concerne les courses de vitesse, la zone de per- d a n s l'activité. U n e échelle de notation tenant Professeur agrégé d ' E P S ,
formance peut être : compte de l'écart entre le temps annoncé et celui Lycée du Canada - Evreux,
- le résultat, au cours de la m ê m e séance, de plu- effectué pourrait être établie. e
Brevet d'Etat 2 degré d'athlétisme,
sieurs sprints sur la distance retenue ; cependant, M e m b r e de la commission académique
c o m p t e tenu du type d'effort ( a n a é r o b i e a l a c - * de Rouen « Programmes et évaluations ».
tique). et des limites bio-énergétiques des élèves, **
cela paraît peu pertinent au-delà de 6 0 m. L ' a n a l y s e présentée est le résultat d ' u n e expé-
- une prise de performance à chaque fin de leçon rience didactique et n ' a pas la prétention d ' a v o i r (1) B.O n° 3 du 20 janvier 1994, pp. 236-248.
et qui servira d'indice ; ce n'est pas toujours pos- répondu à toutes les orientations et possibilités (21 P. Seners : « L'enseignement de l'athlétisme en milieu
sible, et l'évaluation perdrait son caractère certi- scolaire. Didacthlétisme ». Éd. Vigot, 1991.
qui existent. Elle aura néanmoins joué son rôle si
ftcatif ponctuel, elle favorise auprès de chaque lecteur l'ébauche
Bibliographie :
- l'annonce par l'élève de la zone de performan- d ' u n e c r i t i q u e et d o n n e un é c l a i r c i s s e m e n t . Il
ce q u ' i l p e n s e a t t e i n d r e , à p a r t i r d e s p e r f o r - existe désormais une urgence à définir les nou- Amicale des Entraîneurs Français d'Athlétisme « Entraî-
neurs 8 0 » . Éd. FFA. 1981.
m a n c e s r é a l i s é e s au c o u r s d e s s é a n c e s p r é c é - v e a u x a x e s conceptuels d e la d i d a c t i q u e d e
G. Goriot : « Les fondamentaux de l'athlétisme ». Éd. Vi-
dentes. l'athlétisme à l'école, au service d ' u n e éducation got. 1980.
Cette dernière proposition permettrait aussi d e corporelle structuraliste. Cl. Dessons et coll. « Les courses ». Éd. Vigot, 1980.

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